LA RESTAURATION DU FOUR A PAIN DE MESNAC PAR LA CLE DE VOUTE
Le four à pain de Mesnac est situé dans le hameau de Pain Perdu, à Vignolles. Il aurait été construit en 1764 et des actes notariés montrent qu’il aurait été reconstruit par un entrepreneur local en 1894. Entre ces deux dates, le four se serait effondré sur la fournée en cours, et le pain aurait été perdu. A compter de cet « évènement », l’appellation Pain Perdu aurait progressivement remplacé l’ancienne appellation du hameau, jusqu’alors La Coudraie. Ce four, par manque d’entretien, se serait de nouveau effondré durant la seconde moitié du XIXème siècle, le rendant inutilisable encore aujourd’hui.
Le four avant restauration
Le four avant restauration
La voûte effondrée La commune de Mesnac a procédé à la restauration de la partie où le pain était préparé (fournil), sans intervenir sur la partie abritant le four. La Communauté de communes a été sollicitée pour procéder à sa restauration complète, dans l’objectif de rendre ce four à nouveau fonctionnel pour que les habitants puissent l’utiliser et y cuire le pain. Il s’agit du premier chantier réalisé par la Clé de Voûte. Nous avons fait le choix d’utiliser, dans la mesure du possible, les matériaux anciens récupérables sur le site, sous les décombres pour les éléments constituant la voûte (ouvrage de maçonnerie cintré qui forme un arc) Les travaux ont débuté le 7 novembre 2011 et se sont achevés en mars 2012. La restauration a duré trois mois et demi, entrecoupée de période de formations des salariés, d’intervention sur des sites extérieurs et de congés. Les travaux ont consisté en un nettoyage préalable du site, des abords, et à l’évacuation de la couverture effondrée, l’extraction des racines insérées dans la maçonnerie, et l’arrachage de grosses souches ayant déstabilisé fortement la partie ouest (partie abritant le four).
Evacuation des racines et nettoyage préalable
L’équipe a ensuite retiré l’épaisse couche de terre argileuse recouvrant la voûte effondrée, qui permettait de conserver la chaleur dans le four en l’isolant de l’extérieur. Une grosse pierre de taille a été retrouvée à l’emplacement de la clé de voûte (élément de maçonnerie situé au milieu d’une voûte et servant à maintenir les autres pierres), son poids a probablement participé à l’effondrement de l’ensemble.
Déblaiement
Dégagement de la voûte effondrée
Dégagement de la voûte effondrée
Dégagement de la voûte effondrée
Dégagement de la voûte effondrée
La voûte effondrée dégagée
Les briques réfractaires (briques résistantes à de hautes températures, plus de 1 000° C) de la sole (surface du four sur laquelle sont placés le bois de chauffe puis la pâte ou aliments à cuire) et de la voûte ont été soigneusement triées pour être réutilisées.
Le tri des briques réfractaires Le diamètre de la sole est d’environ 2.15 mètres, preuve à l’appui (photo de Florine dans la sole) – méthode de mesure non contractuelle.
Le diamètre de la sole
La sole a été déposée, puis reposée sur une chape (couche de mortier à base de ciment ou de chaux appliquée au sol et destinée à aplanir, niveler ou surfacer un support. Cette chape peut rester brute pour recevoir une couche de matériaux, carrelage, dallage en pierre, terre cuite,… ou être travaillée si elle reste apparente) sur hérisson (empierrement calcaire servant de support à une chape de béton) puis rejointoyée (action de remplir à nouveau les joints des pierres des maçonneries). La sole doit être parfaitement plane et sans relief pour permettre de bien enfourner et retirer les pains.
L’ancienne sole après dégagement
L’ancienne sole déposée
Chape sur hĂŠrisson
La repose de la sole
La repose de la sole
Le rejointoiement de la sole
Le rejointoiement de la sole La reconstruction de la voûte s’est faite en trois temps : préparation d’une forme ou moule dans un premier temps, correspondant au volume intérieur fini du four, puis pose des briques réfractaires sur cette forme dans un deuxième temps et enfin retrait, après séchage de la voûte, de cette forme. La forme a été réalisée en cailloutis calcaire, puis recouverte d’une chape maigre (chape peu dosée en liant) ellemême recouverte d’une fine couche de mortier (mélange de liant, chaux ou ciment, de sable et d’eau servant à lier les éléments d’une construction) de chaux faiblement dosée en chaux pour ne pas adhérer aux briques à reposer. La forme est réalisée avec un gabarit (modèle servant à mettre en forme un ouvrage). Elle forme une « coupole » comme l’était la voûte ancienne.
Mise en place du cailloutis calcaire
Pose de la chape maigre
Pose d’une fine couche de mortier de chaux
Les briques de réemploi ont été posées debout, sur leur petit chant, scellées seulement sur leurs grands chants et non sur leurs faces pour éviter de casser les briques lors de la chauffe (dilatation différente de la terre cuite et du mortier réfractaire).
Pose des briques réfractaires La partie sommitale (la clé de voûte) a été réalisée en briques neuves, puisqu’un certain nombre de briques étaient cassées.
Pose de la partie sommitale de la voûte
L’extrados (surface extérieur d’un dôme, d’une voûte) a ensuite été rejointoyé, recouvert pour partie de terre argileuse et, concession faite à l’utilisation de matériaux anciens, par un mortier de chaux et vermiculite (isolant thermique pouvant résister à de hautes températures) plus léger.
Rejointoiement de l’extrados
Mise en place de la terre
Après 3 semaines de séchage, le gabarit de la voûte a été démoli, pour laisser apparaitre l’intrados (surface intérieure d’un dôme, d’une voûte) et son appareillage de briques sur chant.
Le retrait de la forme
L’intrados après retrait de la forme
L’intrados a ensuite été rejointoyé : c’est une tâche confiée aux plus petits du chantier. Il faut passer par la trappe d’entrée du four, qui ne mesure que 90 cm de haut, pour intervenir depuis l’intérieur. La trappe d’origine, démontée, est opacifiée (action de rendre opaque, de stopper la rouille) avec un antirouille pouvant résister à de hautes températures, avant d’être scellée lors de la reconstruction.
Rejointoiement de l’intrados de la voûte Les parties de maçonnerie, qui s’étaient affaissées en raison de l’absence de couverture, des infiltrations et de la présence d’arbres et de racines, ont été déposées pour être remontées, rejointoyées L’ensemble de la maçonnerie, qui est restée plusieurs dizaines d’années sans enduit, a perdu une partie du mortier qui en assurait la cohésion. La maçonnerie non reprise (celle du pan sud) sera donc renforcée par l’injection d’un coulis (laitance de mortier de chaux ou de chaux pure) par gravité.
Dépose des maçonneries
DÊpose des maçonneries
Remontage des maçonneries
Remontage des maรงonneries
Remontage des maรงonneries
Remontage des maçonneries
La charpente et la couverture de la partie abritant le four ont également été restaurées. La charpente a été reconstruite d’après les traces de l’originelle.
Pose des chevrons (pièces de bois sur lesquelles sont fixées les lattes d’une toiture).
Pose des voliges (minces planches de bois sur lesquelles sont posées les tuiles d’une toiture) La couverture est composée de tuiles neuves en courants (tuile concave où passe l’eau qui tombe sur le toit), qui ont été précédemment posées par la commune (sauf pour les rives et l’égout ou des tuiles de réemploi ont été utilisées). En revanche, l’intégralité des chapeaux (tuiles convexes couvrant les tuiles de courant) seront d’anciennes tuiles de réemploi pour conserver l’aspect originel du four.
Pose des chapeaux
Pose des chapeaux
Pose des chapeaux
La couverture restaurĂŠe
La couverture restaurĂŠe
Les scellements et mouchettes (scellements de tuiles au bas du toit ou sur les rives) sont réalisés avec un mortier de chaux lourde (mortier réalisé avec de la chaux hydraulique). La souche de cheminée manquait de hauteur en sortie de toiture (norme : 40 cm au-dessus du faitage), pour assurer un tirage suffisant lors des mises en chauffe. Nous avons décidé de la rehausser d’une hauteur de pierre. Après avoir déposé le couronnement (partie terminale, supérieure d’une construction) nous avons dégarnis les joints à base de ciment.
Dépose du couronnement de la souche de cheminée
Dégarnissage des joints
Dégarnissage des joints
Nous avons ensuite taillé des pierres de réemploi et réalisé le nouveau couronnement.
Taille des pierre pour la souche de cheminée
Pose des pierres du couronnement de la cheminĂŠe
Pose des pierres du couronnement de la cheminĂŠe
Le couronnement est ensuite reposé, et afin d’étanchéifier le conduit, des tuiles en épi sont scellées sur celui-ci.
Pose du couronnement de la cheminée La façade ouest de l’entrée du fournil a été enduite à tête de pierre vue ainsi que l’ensemble des murs du fournil et de son annexe.
Pose d’enduit
Pose d’enduit
Pose d’enduit
Les maçonneries ont été rejointoyées à tête de pierre vue, afin de protéger les moellons gélifs. La mode des pierres apparentes à joints creusés est un non- sens technique et architectural sur du bâti traditionnel charentais. Ces enduits sont les enduits charentais traditionnels et ont été mis en œuvre manuellement en deux ou trois couches selon l’état du support. Après avoir arrosé celui-ci, les joints de moellons ont été remplis puis l’enduit a été dressé à la règle, taloché, et fermé à la truelle (lissage). Lorsque cet enduit est suffisamment ferme, trois solutions sont conseillées : le laisser tel quel, le gratter avec le champ de la truelle ou le laver par une projection d’eau réglable (buse de pulvérisateur ou de tuyau d’arrosage) ; les deux dernières ayant pour objectif de le vieillir en imitant l’usure du temps….. Nous avons opté pour la seconde qui nous semblait la plus harmonieuse au regard des bâtiments anciens existants en périphérie du four. Le niveau de la chaussée, bien plus haut que celui de l’intérieur du fournil, provoquait un écoulement d’eau important à l’intérieur du bâtiment, surtout pendant les périodes pluvieuses : un drainage s’est imposé.
Pose du drain
Sa réalisation pourra permettre de collecter les eaux des sols plus hauts aux abords, mais aussi les eaux pluviales du fournil dépourvu de gouttière.
Pose du drain
Pose du drain
Pose du drain
Nous avons aussi créé un emmarchement d’accès au seuil de porte (ce dernier aussi été remplacé).
Emmarchement