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à Toulon

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FOCUS

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Exercice national

de sécurité nucléaire à Toulon

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La base navale de Toulon a été le théâtre d’un exercice national de sécurité nucléaire organisé par la Marine nationale, de l’intervention sur site à l’accueil hospitalier au sein d’un hôpital militaire. Le Service de protection radiologique des armées (SPRA) a contribué au scénario, à l’animation, à l’arbitrage ainsi qu’à l’exercice, en déployant ses capacités d’expertise et d’analyse.

Jeudi 17 novembre, 8 heures. Une alarme « blessé » retentit à bord du sous-marin d’attaque « Émeraude ». Lors d’une opération de routine dans le compartiment propulsion, un technicien est gravement blessé à la jambe. Son camarade l’extrait tant bien que mal en dehors de ce local exigu mais au prix d’une fracture de la cheville. Les victimes sont traumatisées par la violence de l’accident, et leur propos sont incohérents. Dans le doute, le plan d’urgence interne est déclenché.

Très vite, sur la base navale, un poste de crise est armé : le PCSN 1 . Au sein de sa cellule « Santé », le médecin, correspondant local du SPRA, doit recueillir en quelques minutes un maximum d’informations sur l’événement, le nombre et la nature des blessés ; durant plusieurs heures, il sera maintes fois sollicité pour orienter ces victimes suspectes de contamination, tout en donnant son avis d’expert en radioprotection. Pour cela, il n’est pas seul. À 900 km de là, à Clamart, la cellule de coordination opérationnelle du SPRA monte en puissance. L’équipe se regroupe autour de moyens de communication dédiés, notamment le portail « MEDUSE » qui restitue en temps réel l’évolution des événements et des actions menées sur le terrain. Médecins et pharmaciens experts en radioprotection joignent leurs compétences autour d’une table pour apprécier la situation et délivrer les conseils sanitaires qui s’imposent, ainsi que les éléments de communication adéquats.

10h00. À bord de l’Émeraude, la situation se dégrade : un incendie se déclare dans le compartiment propulsion. Les pompiers luttent pour extraire de nouvelles victimes dans le vacarme des balises de détection : un événement nucléaire est en train de se produire.

10h30. L’attention des secours se porte sur un blessé, inconscient. Il semble avoir inhalé une grande quantité de fumées et est en arrêt cardiaque. Le médecin initie la réanimation pré-hospitalière malgré le flux important de rayonnements. Avec sang-froid, le médecin sous-marinier urgentiste parvient à mener à bien les actions de ressuscitation de l’avant, tout en rassurant l’ensemble des équipes de secours. En pleine action, l’équipe médicale est sommée d’interrompre la réanimation et d’évacuer loin de cet environnement hostile. Mais l’urgence médicale prime : cette évacuation surviendra sans délai, une fois les gestes vitaux réalisés.

10h45. L’équipe évacue et finit le conditionnement de la victime à l’abri des rayonnements.

Pendant ce temps, l’équipage non nécessaire à la gestion de la crise et la plupart des intervenants sont évacués. Indemnes physiquement, ils sont tous suspects de contamination et sont donc orientés vers les Centres de tri et de décontamination sommaire (CTDS) pour être soumis au processus de décontamination externe : déshabillage, douche…

À l’échelle nationale, sur tout le territoire, les renforts s’organisent : des experts rallient le port de Toulon. Parmi eux, le laboratoire mobile d’anthroporadiométrie du SPRA se met en place à proximité de l’infirmerie de l’ESNA 2 . En soutien de l’installation fixe d’anthroporadiométrie, il assurera le tri des intervenants en confirmant ou infirmant la présence d’une contamination interne individuelle.

11h00. Trois pompiers manquent à l’appel. Ils sont emprisonnés à proximité immédiate du réacteur, derrière un panneau voilé qui refuse de s’ouvrir. Plus d’une dizaine d’intervenants seront nécessaires pour les libérer, tous exposés à de forts débits de doses de rayonnements. Aucun d’entre eux ne présente de symptôme immédiat : c’est certes rassurant, mais l’estimation de la dose n’en sera que plus difficile.

Après une décontamination externe, ils sont adressés au centre médical de l’ESNA. Le SPRA y a dépêché un laboratoire mobile capable d’analyser en urgence les dosimètres passifs que chaque marin porte. Grâce à cet outil unique, en quelques minutes et de façon très précise, le médecin peut bénéficier d’un grand nombre de résultats d’exposition individuelle (plus de 60 par heure). 15h30. Le médecin de l’ESNA est en alerte : l’analyse en urgence du dosimètre d’une des victimes révèle une forte dose, confirmée par le « Dosikit » quelques dizaines de minutes plus tard. Conseillé par la cellule de coordi nation du SPRA, le médecin de l’ESNA décide de transporter en urgence ce blessé vers l’HIA Percy, pour prise en charge d’un syndrome d’irradiation globale aiguë. Les joueurs ont été malmenés et confrontés à des situations inédites, jamais simulées en exercice jusqu’à présent. À chaque difficulté, les réactions ont été excellentes, preuve de la qualité de la préparation de ces équipes médicales de l’avant, hospitalières, ou spécialisées dans le domaine nucléaire. Le SPRA, opérationnel à tous les niveaux de ce grand rendez-vous de la gestion de crise nucléaire a rempli sa mission d’appui technique à l’exploitant Défense.

 MC Fabrice Entine, SPRA 1 - Poste de coordination de la sécurité nucléaire 2- Escadrille des sous-marins nucléaires d’attaque

Les victimes irradiées

À l’inverse des victimes contaminées (externe et interne) qui devront rapidement bénéficier d’un traitement (décontamination, antidotes), la priorité lors de la prise en charge des victimes irradiées doit aller au diagnostic : l’évaluation dosimétrique. En effet les doses en jeu sont potentiellement élevées. Ainsi, même si les effets peuvent parfois apparaître très rapidement, la complexité de la prise en charge médicale des irradiations (qui peuvent être globales et/ou localisées) impose de disposer le plus rapidement possible d’une estimation de la dose déposée, si possible en tenant compte de l’hétérogénéité de cette dose sur l’individu. Le but est de trier les victimes irradiées et de les orienter vers les structures les plus adaptées à leur prise en charge (l’HIA Percy est référent en ce domaine sur le territoire national).

Les blessés radiocontaminés

La prise en charge des blessés radiocontaminés obéit à une règle d’or : l’urgence médicochirurgicale prime sur l’urgence radiologique. À cet égard, le service de santé différencie deux types de structures selon le degré d’urgence des blessures. Les urgences relatives, dont la prise en charge médicale peut être différée de quelques heures, sont orientées vers un poste d’accueil des blessés radio-contaminés, situé au plus près des installations nucléaires de la défense. Parallèlement, les urgences absolues dont le pronostic vital est engagé à court terme, sont rapidement transportées vers le centre de traitement des blessés radio-contaminés ; cette structure, adossée à un hôpital, rassemble les spécialistes nécessaires à la prise en charge de ces patients lourds : urgentistes, réanimateurs, chirurgiens…

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