santé N°119 / septembre - octobre 2010 / 1€ www.defense.gouv.fr/sante
Actualités du service de santé des armées
Le soutienmédical
desforcesmaritimes Un nouveau bulletin mensuel de solde pour le SSA IBODE en situation opérationnelle
Sommaire Vieduservice nouveau site Internet : www.defense.gouv.fr/sante Robert Picqué : un espace de réflexion éthique
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Un kiné en première ligne
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Le brevet supérieur de médecine aéronautique
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L’amélioration de la qualité du service RH Le transfert des dossiers au BCAPM Un nouveau bulletin mensuel de solde pour le SSA
page 7
pages 8 et 9
P. 4 et 5
IBODE en situation opérationnelle
pages 22 et 23
L’IBODE face au développement durable
pages 24 et 25
Dossier Le soutien médical des forces maritimes
pages 10 à 21
Quoideneuf
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© Photos couverture : ASP A. Ruzza ; Marine nationale
Direction centrale du service de santé des armées Bureau communication et information Fort neuf de Vincennes - Cours des Maréchaux 75614 Paris Cedex 12 - Tél : 01 41 93 27 77 Mél : bcissa@sante.interarmees.defense.gouv.fr www.defense.gouv.fr/sante Directeur de la publication : Médecin général inspecteur Joël Marionnet Rédacteur en chef : Médecin chef des services Anne Robert
P. 20 et 21
Secrétaire de rédaction : Infirmier anesthésiste cadre de santé Alexandre Schauer Maquettiste PAO : Technicien supérieur hospitalier Anne-Cécile Delpeuch Impression : Pôle graphique de Tulle BP 290 - 19007 Tulle Cedex - Tél : 05 55 93 61 00 Edition : DICOD 1, place Joffre - 75007 Paris Abonnements payants : ECPAD 2 à 8 route du Fort - 94205 Ivry-sur-Seine Tél : 01 49 60 52 44 Régie publicitaire : M. Thierry Lepsch (ECPAD) Tél : 01 49 60 58 56 Numéro de commission paritaire : N°0211 B05691 ISSN : 1165-2268 Dépôt légal : Mars 2010 Tirage : 16 000 exemplaires 6 numéros annuels
P. 24 et 25 Service de Santé des Armées
Actu Santé - N°
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Vieduservice
RobertPicqué:
unespacederéflexionéthique Un espace de réflexion éthique a été créé à l’HIA Robert Picqué. Objectif : aider le personnel dans ses pratiques de soin pour faire de l’hôpital un espace plus humain.
L’
Espace de réflexion éthique (ERE) de l’Hôpital d’instruction des armées (HIA) Robert Picqué à Bordeaux a vu le jour il y a deux ans. Il fait suite à la création de celui de l’HIA Legouest à Metz. Des conférences-débats sont proposées deux fois par an au personnel de l’hôpital autour de thèmes touchant nos pratiques. Cette année, l’euthanasie et le refus de soins par le patient ont été abordés. L’espace de réf lexion permet de prendre du recul vis-à-vis du contexte émotionnel dans lequel se déroulent nos actions. La réflexion pluridisciplinaire autour de différents thèmes peut nous aider à repenser le sens et les objectifs d’une démarche de soin. Le but ultime est de faire de l’hôpital un espace d’hospitalité en contribuant à apporter aux pratiques du soin un surcroît d’humanité.
Un travail de soi sur soi L’éthique est souvent comparée à la morale qui est un système de normes (ce qui est autorisé, ce qui ne l’est pas) avec un sentiment d’obligation. Mais la morale n’a pas de but en soi : elle commande là où l’éthique recommande. On pourrait dire que la morale est un moyen tandis que l’éthique est une fin. L’éthique, c’est la recherche de l’authenticité, de la justice, du juste milieu. Pour Aristote, c’est un travail de soi sur soi. Médecin en chef Franck Albisson Coordonateur de l’ERE HIA Robert Picqué - Bordeaux
Le terme « espace » a deux sens. Le premier, physique, désigne un local. En l’occurrence, il s’agit du lieu de la réunion. Le second sens, métaphorique, symbolise la liberté de parole et l’ouverture d’esprit. Évoluer dans un espace éthique, signifie, pour la pensée, pouvoir se déployer en dehors des espaces exigus des institutions politiques, médiatiques, religieuses dans lesquels elle peut être confinée.
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Actu Santé - N°
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Les conférences et les documents relatifs aux thèmes traités sont disponibles sur Intrahiarp et peuvent être consultés dans la rubrique « espace éthique ». http://www.hia-robertpicque.sante.defense.gouv.fr/prod/
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Un kiné en premièreligne
Des traumatismes variés Le rugby étant un sport de contact et d’engagement, on rencontre tous types de traumatisme, de la simple contusion à la fracture. La participation à un tel évènement sportif requiert la connaissance de la traumatologie du sport, qui incite à une vigilance accrue tant lors des entraînements que des matchs. Le kiné doit savoir prendre les mesures adaptées : glace, contention et position raccourcie du muscle lors d’un claquage musculaire par exemple. En aucun cas le kinésithérapeute ne pose de diagnostic médical. Sa pratique s’accompagne d’“arbres décisionnels” face à un traumatisme avant de renvoyer le joueur au jeu. Un lendemain de match, j’ai orienté vers le médecin d’unité, présent pour cette manifestation sportive, deux joueurs pour avis médical et radiologique. En kinésithérapie du sport, il est important de connaître les critères de gravité d’un traumatisme cervical ou d’une entorse. Il faut demander systématiquement un avis médical en cas de doute, ceci pour deux raisons. Chez le sportif, la tolérance à la douleur ainsi que l’hypertrophie Actu Santé - N°
musculaire peuvent fausser l’appréciation. Par ailleurs, les enjeux sont importants pour les joueurs bénéficiant d’un contrat professionnel et de sélections en équipe nationale. Au quotidien, quinze à vingt consultations sont effectuées. Elles représentent dix heures de travail à type de thérapie musculo-squelettique, pose de contentions élastiques, récupération musculaire. En plus des dysfonctions ostéo-articulaires diverses, j’ai pris en charge une entorse de cheville nécessitant des soins quotidiens, des tendinopathies achilléenne et rotulienne.
Un soutien apprécié À l’issue du stage, les joueurs ont rempli un questionnaire. Tous ont souhaité la présence d’un kinésithérapeute lors des compétitions, celle d’un médecin et d’un infirmier étant également considérée comme bénéfique. En outre, une proportion significative de joueurs insiste sur le fait que le kiné qui les suit doit être aussi formé en ostéopathie. Ce stage, dans le cadre d’une mission de soutien des forces, permet de mettre en avant le rôle et l’engagement du kinésithérapeute auprès de sportifs de haut niveau. La connaissance du milieu sportif et des techniques de thérapie manuelle semblent être une condition nécessaire à l’optimisation des soins. Masseur kinésithérapeute de classe normale Nicholas Amour HIA Sainte-Anne - Toulon (1) 1 manager, 3 assesseurs et 1 kiné
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© Photos : MKCN N. Amour
À
la demande du Rugby club de la Marine nationale (RCMN), j’ai intégré durant deux semaines son staff (1) afin de participer au soutien médical de la compétition. L’équipe se compose de vingt-six joueurs évoluant de la fédérale 2 au top 14, avec une moyenne d’âge de vingt-deux ans. Elle a affronté des équipes Terre, Air et Gendarmerie avec un, voire deux, entraînements par jour.
Depuis sept ans, l’équipe de kinésithérapeutes de l’unité de Médecine physique et de réadaptation (MPR) de l’Hôpital d’instruction des armées (HIA) Sainte-Anne participe à l’encadrement des évènements sportifs militaires. À Luxeuil-lesBains, du 31 mai au 4 juin 2010, un masseur kinésithérapeute était présent lors du championnat de France de rugby militaire.
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Lebrevetsupérieur
de médecineaéronautique Seul un médecin des armées détenant le Brevet de médecine aérospatiale (BMA) peut assurer le suivi médical du Personnel navigant (PN) et des contrôleurs aériens. 1560 personnes ont été brevetées depuis 1944. Ce diplôme est aujourd’hui délivré par l’Institut de recherche biomédicale des armées (IRBA).
Trois conditions sont requises pour suivre l’enseignement du BSMA : un exercice professionnel d’au moins deux ans sur une plateforme à vocation aérienne, une motivation affirmée et l’aptitude médicale déterminée (1) par un Centre d’expertise du personnel navigant (CEMPN). Le dossier est transmis au Directeur régional du service de santé des armées (DRSSA) puis à l’Inspecteur du service de santé pour l’armée de l’air (ISSAA) qui propose les désignations à la DCSSA.
Une formation en trois phases Elle s’échelonne sur neuf semaines. Elle comprend un stage de médecine aéronautique au pôle formation de l’IRBA. Puis, le stage clinique portant sur la médecine d’expertise en
aéronautique s’effectue dans le service de médecine aéronautique de l’HIA Percy et au Centre principal d’expertise médicale du personnel navigant (CPEMPN) à Clamart. Enfin, le stage aéronautique au sein du centre de formation des instructeurs pilotes sur la base aérienne 709 de Cognac permet d’améliorer la perception du milieu aérien : ce sont dix heures de vol en double commande, en place avant. Ensuite, la formation continue comprend plusieurs périodes. Trois jours par an au CEMPN de rattachement permettent de créer les synergies entre experts et médecins du PN. Cinq jours tous les trois ans se déroulent à l’IRBA ou dans le service de médecine aéronautique de l’HIA Percy. Elle est complétée par la participation à des réunions internationales de médecine aéronautique. Le contrôle réglementaire de cette formation est triennal.
Médecin PN qualifié Ce brevet est une qualification indispensable pour accéder au brevet européen de médecine aéronautique. Le BSMA constitue un atout pour suivre un parcours professionnel valorisé de praticien confirmé. À ce jour, trentedeux médecins PN sont déjà certifiés. Ouvert à toute la communauté médicale aéronautique, trois praticiens de l’Aviation légère de l’armée de terre (ALAT) ont pu être ainsi brevetés ; le premier en 2008 et deux en 2010. Au sein des centres médicaux des armées, les médecins titulaires du BSMA pourront être désignés comme des référents bien rompus aux questions de l’aéronautique opérationnelle et seront des conseillers avisés dans le domaine de la sécurité aérienne. Médecin en chef Hélène Lantres Centre médical de la Cité de l’Air - BA 117
© Photos : MC H. Lantres
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n 2005, un plan d’action a été établi entre l’Etat-major de l’armée de l’air (EMAA) et la Direction centrale du service de santé des armées (DCSSA) pour la création du Brevet supérieur de médecine aéronautique (BSMA). Il est inscrit au tableau des formations de l’École du Val-de-Grâce.
Le Brevet supérieur de médecine aéronautique est le fruit d’une réflexion visant à améliorer les compétences du médecin chargé du personnel navigant. Étude du vol en place avant
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(1) Critère siège éjectable
Actu Santé - N°
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Dossier
Le soutienmédical
desforcesmaritimes Mission duale, l’expression est classique pour traduire l’engagement du Service de santé des armées (SSA) dans le soutien des forces d’une part, dans des actions de santé publique d’autre part. Elle s’applique également parfaitement aux activités de nos forces navales lorsqu’elles mettent en œuvre des unités de combat dans des actions strictement opérationnelles et lorsqu’elles contribuent à l’action de l’État en mer.
« Le lien ? C’est le soutien de l’homme. » Cette diversité marque également, bien sûr, le soutien médical de ces forces. Ce numéro d’Actu santé peut donc apparaître, à première vue, comme une mosaïque multicolore et extrêmement contrastée d’activités professionnelles assez disparates... de l’art abstrait en quelque sorte. Il peut en effet sembler difficile d’identifier un fil conducteur, un sens ou un lien, entre les témoignages qui sont ici rassemblés. Du soutien de la France à Haïti en pleine détresse à l’immense solitude et au poids de l’enjeu reposant sur les équipes médicales de sousmarin en patrouille opérationnelle via le soutien médical des activités de déminage dans le merveilleux lagon néo-calédonien, où est le lien? C’est le soutien de l’homme.
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ALFAN
Le MCS de Carbonnières
Interarmisation : un exemple atypique Celui-ci nous rassemble effectivement comme il rassemble dans une mission commune l’ensemble du Service. Cette diversité est en réalité une véritable richesse et non un handicap. Cette mosaïque s’anime lorsqu’on l’inscrit dans le temps. Ces images, d’apparence figée, reflètent en réalité des parcours professionnels qui sont loin d’être aussi cloisonnés, aussi étanches les uns visà-vis des autres, que ce que l’on imagine habituellement. Un infirmier ayant commencé son parcours dans le soutien de l’armée de l’air vient de rentrer, enthousiaste, d’une patrouille opérationnelle de sous-marin. Cet exemple n’est pas un cas isolé, il illustre la réalité de l’interarmisation du Service au-delà de ses établissements.
L’union hôpital-forces Ce numéro met également en valeur à plusieurs reprises la grande complémentarité, et parfois la complicité, qui s’établit entre les centres médicaux des armées et l’Hôpital d’instruction des armées (HIA) de rattachement. L’article du médecin en chef Ould Ahmed est, sur ce point, révélateur. Il Actu Santé - N°
ALFOST
© ALFOST
© P. Clervoy
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our répondre à ces objectifs, les forces maritimes françaises sont organisées autour de deux grands pôles : la Force d’action navale (FAN) qui règne sur tout ce qui se déroule sur la mer, et les Forces sousmarines (FSM) dont le champ d’action est le monde dit du silence. Un point commun entre ces univers pourtant distincts : tous les océans et toutes les mers du globe sont notre domaine d’action. On devine aisément la diversité des exercices professionnels résultant de l’étendue de ces missions.
Le MCS Claudot
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montre à quel degré l’HIA est capable de s’approprier des problématiques liées au caractère opérationnel de nos unités. Là encore, il faut voir la manifestation d’un véritable esprit de corps propre au Service. Le lecteur attentif trouvera au fil des articles qui sont ici proposés quelques reflets de cocotiers sur mer turquoise ou quelques réminiscences des folles aventures du Nautilus. Attention à ne pas se laisser enfermer dans ces images toutes faites. La mer dont nous parlons dans ces pages n’est pas toujours accueillante. Ce sont de vrais bâtiments de combat, avec de véritables équipages composés d’hommes et de femmes, où les personnels du service de santé des armées montrent tout leur professionnalisme. Médecin chef des services Hubert de Carbonnières Chefferie du service de santé des forces sous-marines Médecin chef des services Yves Claudot, Chefferie du service de santé de la force d’action navale
Le soutien médical des forces maritimes
Dossier
Forcessous-marines:bullenoire et étanche ? Servir au sein des Forces sous-marines (FSM) conduit bien sûr à bord des « bateaux noirs », mais également, pour certains d’entre nous vers des horizons insoupçonnés. La formation et l’expérience acquises pour exercer sur un sous-marin peuvent en effet se révéler très utiles dans des environnements extrêmement différents dont voici quelques exemples.
« Moinsd’eausaléeetplusdepoussière » Moins d’eau salée et plus de poussière marquent d’autres souvenirs récents. Ma participation, en tant qu’urgentiste, à la mission Pamir en Afghanistan, ou récemment, le soutien de forces blindées déployées au Liban dans le cadre de l’opération Daman viennent concrétiser cet état de fait. D’autres médecins des FSM ont également participé à l’opération Daman ou encore à l’opération Harpie déployée en Guyane pour lutter contre toutes
les formes de trafic clandestin, notamment l’orpaillage. Très loin de la mer, nos connaissances en radioprotection sont aussi valorisées lors de missions de soutien médical des équipes d’inspection œuvrant dans le cadre du Traité d’interdiction complète des essais (TICE) nucléaires. Ces missions ont ainsi nécessité le déploiement de personnels santé sur les sites de Tchernobyl ou Semipalatinsk. Cette énumération ne vise aucunement à dresser un « tableau de chasse ». Elle montre à quel point, et avec quelle diversité, le caractère ouvert et interarmées du Service se manifeste de façon concrète, et ce, même dans des unités réputées étanches comme celles des forces sous-marines.
Médecin sous-marinier en OPEX
Médecin en chef François Trévidic Base opérationnelle de l’île Longue - Brest
© Photos : ALFOST
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ans un univers encore maritime, le soutien de bâtiments en situation d’isolement total, tel que le patrouilleur austral Albatros dans les mers australes ou le bâtiment d’essais et de mesures Monge lors des campagnes de tir de missiles balistiques, repose souvent sur du personnel médical ayant suivi un cursus de sous-marinier.
Quandtouslesrisquessontlà : excellencede rigueur ! Sauver des vies à bord d’un sous-marin accidenté est un challenge formidable, impressionnant par la complexité des moyens humains et matériels qu’il suppose. Dans ce but, le Service de santé des armées (SSA) a participé à un projet international, avec la GrandeBretagne et la Norvège : le système a été baptisé Nato submarine rescue system (NSRS). Sa mise en œuvre en tout point du globe permet d’évacuer des rescapés jusqu’à 600 mètres de profondeur, 72 heures après une alerte.
L’
ensemble, nouvellement admis au service actif, est constitué d’un système de mise à l’eau et de récupération, d’un robot téléopéré d’intervention sous la mer et d’un véhicule de sauvetage (petit sous-marin allant se clamper sur le bateau accidenté). Ce système s’accompagne d’un complexe hyperbare permettant un transfert sous pression depuis le véhicule sous-marin. L’armement en personnel associe les compétences des spécialistes de la plongée à celle des sous-mariniers de Brest et de Toulon afin de prendre en charge des rescapés exposés à une ambiance hyperbare voire une contamination radioactive. Forte de trente personnes, l’équipe française peut assumer le lancement d’une opération de sauvetage. Mais celle-ci, longue par nature, se poursuivra avec
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les militaires britanniques.
nor végiens
et
Aujourd’hui le défi n’est plus technique mais humain : intervenir ensemble dans le respect de nos différences linguistiques, professionnelles, militaires, culturelles mais avec un souci partagé d’efficience maximale. Depuis la tragédie du Koursk, nous savons tous qu’en cas de naufrage sousmarin, le seul ennemi est le temps. Médecin en chef Jean-Laurent Cayla Autorité en domaine particulier/santé/FSM - Brest Médecin en chef Christophe Peny Cellule plongée humaine et intervention sous la mer Commandement de la force d’action navale - Toulon
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Dossier
Le soutien médical des forces maritimes
Infirmeriedesous-marin,
concentrédetechniquemédicale Le service de santé des forces sous-marines assure le soutien médical dans des conditions hors du commun. Il a opté, dès le début, pour une politique audacieuse en termes de formation du personnel et d’équipement biomédical, en adéquation avec la mission.
L’« infirmerie hôpital » du SNLE La formation très polyvalente de l’équipe médicale permet d’exploiter l’« infirmerie hôpital » du SNLE. Modèle d’ergonomie et de fonctionnalité, l’infirmerie intègre un véritable bloc opératoire et dispose d’une capacité d’hospitalisation de deux lits. Les moyens d’imagerie comprennent des appareils de radiologie générale et dentaire, couplés à un développeur numérique, et un échographe portable. Des automates de biologie complètent ces moyens diagnostics : ils permettent de réaliser numération formule sanguine, biochimie, bilan de la coagulation et gaz du sang. Les moyens thérapeutiques disponibles imposent au médecin de bien les connaître : la table chirurgicale se transforme en fauteuil dentaire. La dotation chirurgicale complète permet d’effectuer une laparotomie, une trépanation et la pose d’un fixateur externe. La valise de soins dentaires SATELEC ® , de volume minimal,
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Sur SNA, 2 m² dans une coursive
DC NS
autorise la gestion de la plupart des urgences, la dévitalisation ou l’extraction d’une dent.
©
L
a pratique médicale au profit des 110 hommes d’un Sousmarin nucléaire lanceur d’engins (SNLE) est caractérisée par le contexte d’isolement total durant les 70 jours de patrouille. Le recours à la télémédecine ou à une évacuation médicale, source d’indiscrétion majeure, constituerait une rupture de la dissuasion nucléaire. La dotation médicale allouée assure une autonomie quasi parfaite en matière de diagnostic et de thérapeutique.
Future infirmerie du Barracuda
L’infirmier à bord d’un Sous-marin nucléaire d’attaque (SNA) prend seul en charge la santé des 70 hommes, embarqués pour des missions durant parfois plus de 90 jours, dans des conditions d’isolement opérationnel. Son espace de travail est exigu et confiné : 2 m² dans une coursive. Une table d’examen peu fonctionnelle, des rangements restreints disséminés dans le bord imposent adaptation et organisation. En plus du matériel spécifique au contrôle de l’atmosphère et à la prise en charge de blessés radiocontaminés, les équipements à disposition sont limités (1). Lors d’un déploiement en zone sensible ou sans soutien médical de proximité, un médecin sous-marinier peut se joindre à l’équipage, embarquant un lot médical complémentaire. Le SNA du futur, type Barracuda, aura un espace médical dédié plus important, des capacités de télémédecine et un équipement plus complet. Il représentera un appréciable progrès. Médecin en chef Chris Lafferrerie ESNA - Toulon Infirmier de classe supérieure Yann Chedotal - ESNLE - Brest (1) Un appareil de monitorage, un respirateur, un défibrillateur semi-automatique, deux pousse-seringues monovoie, un aspirateur de mucosités.
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Équipements médicaux a
IADE... del’hôpita
Qu’est ce qui peut bien pousser d’État (IADE) du Service de santé horizon du bloc opératoire pour l Une carrière en blanc, une expér certain pour le bleu marine expliqu
J’
ai passé dix ans dans les Hôpitaux d’instruction des armées (HIA) dont quatre comme IADE au bloc opératoire. Quand l’occasion d’intégrer les forces sous-marines s’est présentée, l’appel du large, la recherche d’autonomie, le goût de l’aventure et des responsabilités ont emporté ma décision.
Prévoir l’imprévisibleà bord J’avais tout à apprendre de la « sous-marinade ». Au départ une sérieuse remise en question doublée d’un investissement intellectuel et humain est nécessaire. À l’arrivée, c’est le sentiment d’appartenance à une communauté à part entière qui est mis en exergue, où l’esprit du sens commun dépasse les individualismes. La mission de l’IADE reste la même, mais l’engagement auprès de l’équipage que l’on sert prend une toute
Le soutien médical des forces maritimes
Dossier
Formationcontinue despersonnelssanté embarquéssur SNLE
ctuellement sur SNLE
alausous-marin
un Infirmier anesthésiste diplômé des armées (SSA) à quitter le clair l’obscurité du monde du silence ? rience afghane en vert et un goût uent ce choix d’évolution. autre dimension quand on vit deux mois ensemble sous plusieurs centaines de mètres d’eau. Les objectifs de l’équipe médicale à bord sont avant tout la préparation et l’anticipation.
© ALFOST
L’IADE du bord doit être capable de faire face à l’imprévu. L’improvisation n’a pas sa place dans un sousmarin. Pour cela, il faut apprendre à développer sa capacité d’adaptation et son bon sens. Je suis pleinement satisfait et fier de mon engagement au sein des forces sous-marines et à aucun moment je ne regrette ce choix de travailler vingt mille lieues sous les mers. Infirmier anesthésiste de classe normale Vincent Garrelon ESNLE - Brest
© Photos : ALFOST
La dissuasion nucléaire impose une discrétion génératrice d’isolement. Ceci est possible grâce à l’autonomie du SNLE et de son équipage dans de nombreux domaines, incluant celui de la santé. L’équipe médicale doit être en mesure de répondre à toutes les sollicitions durant les deux mois de patrouille. La formation continue y trouve aisément sa place. bord d’un Sous-marin nucléaire lanceur d’engins (SNLE), le risque sanitaire est lié à l’individu (1), à la concentration de population avec un risque collectif (2) et à l’environnement industriel des SNLE avec un risque accidentel (3). Une stratégie de prévention et de gestion des risques sanitaires est mise en place dès les premières patrouilles.
À
échanges avec les médecins opérationnels sur SNLE, ils sont centrés sur la pratique. Ainsi, nous nous attachons plus particulièrement à la réalisation de gestes (4) , au diagnostic des principales complications postopératoires (5) et à l’interprétation des examens para cliniques du bord tels qu’analyse biologique, radiographie et échographie de débrouillage.
Son impact sur la fédération d’anesthésie, réanimation et d’urgences (FARU) de l’Hôpital d’instruction des armées (HIA) Clermont-Tonnerre prend des formes variées, essentiellement en amont d’un événement médical. Ceci se traduit souvent par des demandes d’avis ou de conseils à des spécialistes, que ce soit lors d’une allergie au curare suspectée ou chez un patient au critère d’intubation difficile. Mais, notre rôle, partagé avec d’autres acteurs de soins, réside surtout dans la formation continue et d’adaptation à l’emploi des médecins généralistes et Infirmiers anesthésistes diplômés d’État (IADE) embarqués sur SNLE.
Les savoir-être relèvent de la gestion de l’équipe constituée du médecin du bord, de l’IADE et de l’infirmier. La dynamique du groupe connaît son acmé lors des échanges avec le “pacha” devant une situation pouvant conduire à l’extraction de la victime. La connaissance des pathologies, leurs pronostics et évolutions, permettent de définir les actions à réaliser à bord en tenant compte des conséquences, risques et bénéfices, pour la victime, l’équipage et la mission. Médecin en chef Medhi Ould Ahmed HIA Clermont-Tonnerre - Brest (1) Pathologie aiguë et parfois chronique, voire symptomatique et méconnue. (2) TIAC, grippe, méningite, etc.
L’isolement humain et matériel, la nature des risques sanitaires sont deux variables majeures prises en compte dans ces formations. Les objectifs du stage sont définis en préambule des périodes hospitalières en anesthésie, en réanimation ou aux urgences des médecins du bord et des infirmiers anesthésistes. Enrichis par des Actu Santé - N°
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(3) Plaie, chute, brûlure, intoxication, etc. (4) Voie veineuse périphérique, voie centrale fémorale, intubation orotrachéale, manœuvre de Sellick, coniotomie, exsufflation, drainage thoracique, bloc fémoral, rachianesthésie. (5) Maladie veineuse thromboembolique, infection du site opératoire, échec de l’analgésie ou insuffisance d’hydratation postopératoire, retard de reprise du transit.
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Dossier
Le soutien médical des forces maritimes
Formépour
Infirmier
sous-marinier c’est...
Vous êtes un homme. Vous êtes IADE ou IDE. Quels que soient votre lieu d’exercice et votre armée, vous pouvez rejoindre les forces sous-marines et saisir ainsi l’opportunité de faire un métier d’exception. Pour plus d’informations : http://www.sante.defense.gouv.fr Infirmier anesthésiste de classe supérieure Sylvain Morvan - ALFOST Brest
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• être volontaire et apte ; • un parcours professionnel lisible à long terme ; • des avantages de solde et d’ancienneté (primes et annuités supplémentaires) ; • un parcours professionnel à fort enrichissement : - possibilité de spécialisation (cursus IDE - IADE) ; - possibilité d’accéder à des postes à hautes responsabilités ; - choix possible de départ vers des postes valorisants (outremer, OPEX…).
Alarme bléssé sur SNA
Àjuste10km,
Formation au centre d'entraînement au sauvetage individuel de l'île Longue
pourtantà1heuredeBrest ! À Brest, chaque jour, 1500 personnes effectuent trente minutes de traversée en bateau pour rejoindre leur lieu de travail. Ce mouvement de marée humaine rythme, matin et soir, l’activité de la base opérationnelle de l’île Longue à l’accès limité.
C
Cette mission est unique mais les activités qui en découlent sont diverses : remise en condition opérationnelle du SNLE dès le retour de patrouille, assemblage et maintenance des missiles stratégiques et armements conventionnels, entretien des chaufferies nucléaires des SNLE, recyclage au sauvetage au
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centre d’entraînement individuel implanté sur la base sous-marine, etc.
Prévenir le danger
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ette importante base navale a pour mission d’entretenir la disponibilité de la dissuasion nucléaire française par la capacité à déployer un ou deux Sous-marins nucléaires lanceur d’engins (SNLE) en patrouille. Pour l’accomplir, l’île Longue, avec ses services de protection, de sécurité et de soutien logistique, doit être en mesure de conduire la maintenance des SNLE et de leur délivrer des missiles stratégiques.
Les structures hospitalières les plus proches de l’île Longue, volontairement isolée, sont à une heure de route. Son service médical doit pouvoir prendre en charge des urgences ou des blessés contaminés. L’ampleur de l’activité industrielle du site impose une médecine de prévention active au profit des personnes. Tous les aspects de la radioprotection sur la base sont importants, qu’il s’agisse de mesures de surveillance anthroporadiamétrique (1) ou de gestion de situation accidentelle.
solides connaissances en médecine de la plongée. Servir à l’infirmerie de l’île Longue peut apparaître tel un challenge en raison des caractères si particuliers de cette base. C’est surtout la possibilité d’élargir, de diversifier son champ d’activités et de compétences. Médecin principal Antoine Delhomme Base opérationnelle de l’île Longue - Brest
L’entraînement au sauvetage à partir d’un sous-marin accidenté réclame, de la part de l’équipe médicale, de
(1) La dosimétrie interne a pour but l’évaluation de la dose efficace engagée de matière radioactive à partir, notamment, de la mesure directe (examen anthroporadiamétrique) ou indirecte (analyse radiotoxicologique) de la contamination interne de l’organisme.
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Le soutien médical des forces maritimes
devenirautonome
Qu’il s’agisse de Sous-marin nucléaire lanceur d’engins (SNLE) ou de Sous-marin nucléaire d’attaque (SNA), c’est l’isolement qui caractérise l’action des équipes médicales embarquées à bord des bateaux noirs. L’autonomie de nos équipes est donc un objectif primordial.
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es formations spécifiques visent à fournir à nos équipes médicales les connaissances et le savoir-faire permettant d’exercer en situation isolée. Elles sont de vingt mois pour un médecin, de trois à six pour l’infirmier en charge de la radioprotection (DOSIPERS) et de cinq semaines supplémentaires pour l’infirmier anesthésiste. Les formations initiales abordent des domaines très variés : techniques médicales et chirurgicales, connaissance des sous-marins, contrôle de la qualité de l’atmosphère, radioprotection ne sont que quelques uns des thèmes abordés. L’entretien de ces compétences fait partie
L’Améthyste scintille souslesoleildjiboutien
À peine les haussières passées, une nouvelle frénésie agite l’équipage : corvées en tous genres, “roulage” vers la seule structure médicale de niveau 3 en Afrique de l’Est, l’hôpital médicochirurgical Bouffard, pour l’équipe médicale du bord, visites protocolaires mais aussi des curieux des Forces françaises à Djibouti (FFDj). Un SNA à Djibouti en escale est un moment rare, même pour la base navale qui organise pourtant 300 escales par an.
intégrante de la mission du sousmarinier. Des stages, programmés et réguliers, sont principalement réalisés au sein des HIA Clermont-Tonnerre et Sainte-Anne. Quelle que soit son armée d’origine, le personnel du Service de santé des armées (SSA) servant dans les forces sousmarines reçoit et entretient une formation de grande qualité, unique et qui a peu d’équivalents par ailleurs. Médecin en chef Xavier Castagnet ESNA - Toulon Infirmier de classe normale Patrice Sembach ESNLE - Brest
À la suite d’une mission opérationnelle dans le golfe arabo-persique, l’Améthyste tente de se défaire de l’ambiance surchauffée des Sous-marins nucléaires d’attaque (SNA). Escale rare et exotique à l’horizon.
« Liberté, liberté chérie... » Le lendemain, une journée en « service du dimanche » permet à une partie de l’équipage de récupérer. Si on en a assez de voir les courses pittoresques de chèvres dans Djibouti, il reste l’évasion avec farniente et snorkeling (1) aux îles Moucha et Mascali, dans la baie de Tadjoura, peuplées de mangroves et de palétuviers qui rendent la plongée sous-marine sur les épaves dans le golfe d’une exceptionnelle beauté. Ceux qui préfèrent les paysages peuvent visiter le lac Assal, les sources d’eau chaude, failles et cratères volcaniques environnants. Le lac Abbé, salé et endoréique au sud-ouest de Djibouti, offre un paysage lunaire avec ses légendaires fumerolles, cheminées de gypse ocre qui s’élèvent à plus de 50 mètres. Les hommes d’équipage moins disponibles, auront préféré s’inscrire Actu Santé - N°
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© MC F. Labarthe
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e trajet reste sous tension car de très nombreux bateaux rendent la navigation délicate. Alors que nous cheminons dans le golfe arabo-persique vers Djibouti, les escortes, maritime et aérienne, sillonnent l’espace. Le port autonome international de Djibouti, à la croisée de nombreuses routes maritimes, est très fréquenté. Mais Djibouti est en outre une plateforme de soutien logistique des unités militaires déployées dans le golfe.
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aux rencontres sportives organisées non loin de là, avec d’autres marines ou le personnel de la base navale. Toutes ces opportunités sont des moments privilégiés pour favoriser des échanges, tisser des liens et se prendre au plaisir de la découverte. (1) Snorkel désigne le tuba. Le snorkeling est l’utilisation du tuba et des palmes pour découvrir les fonds marins.
Médecin en chef Frédéric Labarthe Infirmier de classe normale Christophe Thomazo ESNA-Toulon
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Le soutien médical des forces maritimes
Soutienmédicalpermanent pouruneforceomniprésente Le soutien médical de la Force d’action navale (FAN) est une affaire d’équipe pour ne pas dire d’équipage : les cent neuf unités navigantes auxquelles s’ajoutent les unités spécialisées d’intervention humaine sous la mer, assurent une présence permanente sur tous les océans. e soutien est relayé vingtquatre heures sur vingt-quatre en mobilisant 50 praticiens et 126 infirmiers d’active, renforcés par une trentaine de réservistes. Il est aussi tributaire des moyens du socle, hôpitaux d’instruction des armées, centres médicaux des armées en métropole et outre-mer sans oublier les unités de distribution des produits de santé. Au cœur de ce dispositif, œuvrent les médecins et les infirmiers embarqués. Ce sont eux qui nous livrent aujourd’hui leur témoignage, les impressions et les enseignements qu’ils tirent des missions auxquelles ils ont participé.
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À travers les récits recueillis pour constituer ce dossier c’est un tour du monde que nous proposons au lecteur depuis le Golfe de Guinée, théâtre des missions Corymbe, nous suivrons les
péripéties de l’assistance médicale en Atlantique pour retrouver le Siroco en Haïti. Dans l’océan Pacifique nous nous immergerons dans le lagon néocalédonien et nous rallierons la Méditerranée pour un aperçu de la participation du Service dans un exercice franco-israélien de coopération navale. Enfin, nous avons souhaité à travers l’espace d’expression offert par ce dossier rendre un hommage à la Jeanne d’Arc, qui se retire du service actif au terme de quarante-six ans de navigation sur toutes les mers. Médecin chef des services Yves Claudot Chef du service de santé de la force d’action navale - Toulon
InterventionmédicaleenAtlantique on d
11 février 2010, le Bâtiment hydrographique (BH) Laplace, en mission sur les côtes d’Afrique occidentale, porte assistance à un homme de 68 ans sur un voilier. La chaîne des secours a impliqué différents acteurs. Flash-back.
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e 7 février, 23h00, le Centre régional opérationnel de surveillance et de sauvetage (CROSS) Antilles Guyane reçoit l’alerte initiale en provenance du voilier : un des équipiers présente une hémorragie digestive abondante. Le Centre de consultation médicale maritime (CCMM) de Toulouse évalue la situation et préconise l’évacuation avec médicalisation de la victime dont le pronostic vital est engagé. Le CROSS fait appel au Centre opérationnel de la marine (COM) Brest pour faire intervenir le vecteur nautique
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le plus proche. Le BH Laplace se déroute pour venir à la rencontre du voilier. L’indication d’une transfusion sanguine posée par le médecin régulateur du CCMM Toulouse mobilise de nouveaux moyens au Sénégal et au Cap-Vert. Sur ordre du Centre de planification et de conduite des opérations (CPCO), un Transall décolle le 9 février à 6h00 de Dakar pour le Cap-vert, avec à son bord un médecin du centre médical interarmées. Alerté la veille au soir à 23h00 pour cette intervention, il s’est rendu à l’hôpital local pour récupérer quatre Actu Santé - N°
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m ur . Fo © MC C
poches de concentrés érythrocytaires avant d’embarquer sur le Laplace. Le 11 février à 17h00, le patient est perfusé à bord du Laplace du fait d’une anémie à 6,5 g/dl. Après deux jours et demi de navigation, il est finalement hospitalisé à Praia, au CapVert. Cette mission illustre les conditions de gestion de l’urgence en pleine mer : une semaine s’est écoulée entre l’alerte et l’hospitalisation du navigateur. Médecin en chef Serge Paez Force d’action navale - Brest Médecin en chef Cyril Fourmond Centre médical interarmées - Dakar
Le soutien médical des forces maritimes
Corymbe101 : l e n n io t a r é p o t n e m ie o l p dé dans le golfe de Guinée
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e détachement du commando Montfort rejoint le Transport de chalands de débarquement (TCD) Foudre avec ses 250 membres d’équipage partis de Toulon début janvier pour un déploiement maritime dans le cadre d’une mission Corymbe (1). Cette présence navale permanente dans le golfe de Guinée participe à la détection et à la prévention du déclenchement d’une crise. Elle est ainsi en mesure d’évacuer des ressortissants français ou étrangers si nécessaire.
VAB sortant du radier
Exercice RESEVAC à Cotonou
Activité du service médical durant cette mission :
1 rapatriement sanitaire effectué, aucun accident grave. Plus de 500 consultations, 300 gestes infirmiers et 42 radiographies à bord.
© Photos : F. Chavet
Une vigilance sans repos Pour le service médical, le bon déroulement de la mission passe par une préparation minutieuse : vaccination de l’équipage contre la grippe A (H1N1), stérilisation des instruments chirurgicaux, préparation des blocs opératoires, rappel sur le fonctionnement des automates de biologie... En mer, les exercices (incendie, voie d’eau, EVASAN) permettent de se préparer à toutes les situations. Le service médical forme les équipes de brancardiers et initie l’équipage au secourisme de combat. Hors exercice, il gère le quotidien : consultations, visites systématiques annuelles et mise à niveau des équipements. Il faut garder en tête que toute activité à la mer est périlleuse, ce qui suppose d’être toujours prêt à faire face à un évènement grave de jour comme de nuit. Le souvenir du crash de l’hélicoptère Cougar au large du Gabon peu après son décollage du TCD est encore très présent.
Quelque part en Atlantique, l’Hercule C130 en provenance de Lorient est en position. L’aérolargage de commandos marine avec récupération en haute mer, encore appelé alerte Tarpon, débute : ouverture des parachutes, hommes et matériels étanches sont récupérés par Zodiac , filant à vive allure, dès qu’ils touchent l’eau. taires ou recherche d’avis spécialisés. À terre, l’entraînement se poursuit lors de notre escale à Cotonou. À la demande de l’ambassade de France, un exercice grandeur nature d’Evacuation de ressortissants (RESEVAC) mobilise tout l’équipage et des expatriés français vivant au Bénin. Cet exercice débute, pour le service médical, par l’arrivée à la coupée d’une blessée à la jambe. Les forces spéciales la prennent en charge à l’ambassade. Puis, conditionnée dans une gouttière Bellisle par l’infirmier des commandos, elle est extraite et immédiatement transportée à l’infirmerie par voie routière. L’équipe médicale débarquée plus tôt sur la plage, où sont regroupés tous les ressortissants, dresse un bilan. Plusieurs blessés et malades sont triés, traités en urgence puis évacués vers le Foudre par un chaland de transport de matériel. L’hôpital de 500 m² est activé : les huit brancards de la salle de triage et de déchoquage sont rapidement occupés par des expatriés blessés. Les deux blocs opératoires, les quatre lits de la salle de surveillance post-interventionnelle et les huit du secteur d’hospitalisation sont prêts et disponibles à accueillir de nouveaux blessés. En fin d’après-midi, l’exercice s’achève : outre les échanges avec les expatriés, les marins ont pu se rendre compte de la difficulté d’accueillir à bord des civils de tous âges. Après plus de trois mois de présence dans cette zone et de multiples exercices, la mission Corymbe 101 s’achève à Dakar.
Escale sans répit
Médecin en chef Frédéric Chavet Médecin major du TCD Foudre
Les escales représentent un moment de repos attendu et sont aussi mises à profit pour résoudre les problèmes médicaux apparus durant la traversée : réalisation de soins dentaires, d’examens complémenActu Santé - N°
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(1) L’opération Corymbe est conduite par la marine nationale depuis 1990. Elle vise à assurer une présence au large des côtes d’Afrique de l’Ouest.
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Le soutien médical des forces maritimes
Le Siroco enHaïti 12 janvier 2010, un séisme de magnitude 7,3 frappe à Portau-Prince et ses environs. Le plus violent sur cette île des Antilles depuis un siècle, il provoque d’énormes dégâts, 270 000 victimes, des blessés par dizaines de milliers et plus d’un million de sinistrés. Le même jour, le TCD Siroco en escale à Dakar, achève la mission Corymbe et s’apprête à passer le relais au Foudre pour rejoindre Toulon. Deux jours plus tard, il reçoit l’ordre de rallier Haïti via Fort-deFrance, pour y apporter aide humanitaire et soutien médical.
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L’escale du bâtiment en Martinique permet de compléter le matériel médical et les stocks de médicaments commandés à l’Unité de distribution des produits de santé (UDPS) de Fortde-France. Des lots pédiatriques médicaux, chirurgicaux et tropicaux sont embarqués avec des centaines de tonnes de fret humanitaire, des moyens d’intervention et de secours. Le 24 janvier, le Siroco mouille devant Port-au-Prince et l’ACA est héliportée à bord. L’hôpital, immédiatement
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Cabur et
Prise en charge péri-opératoire de blessés sur le Siroco.
© F.
e Transport de chalands de débarquement (TCD) Siroco traverse l’Atlantique à vive allure, 6 000 kilomètres en six jours, pour rejoindre Fort-deFrance. La mission Séisme Haïti 2010 commence. Le TCD dispose de l’effectif prévu pour la mission Cor ymbe : un médecin, deux infirmiers et un infirmier anesthésiste. La traversée est mise à profit pour organiser le soutien médical et préparer la mise à disposition des installations hospitalières, permettant l’accueil de vingt-cinq blessés et malades, au profit de la 9e Antenne chirurgicale aérotransportable (ACA).
opérationnel, accueille les premiers blessés dès le lendemain matin, soit treize jours après le cataclysme. Pour la plupart, des polytraumatisés déjà opérés, compliqués de surinfections et de crush syndromes, qui nécessitent une reprise chirurgicale. Le Comsanté de l’opération, organise leur prise en charge par les équipes médicales. Des norias permettent de transférer quotidiennement les blessés, des postes de secours via l’aéroport, vers d’autres établissements de soins : structures hospitalières civiles fonctionnelles et hôpital de la Sécurité civile. Les vols, assurés par un des Puma gréé en transport sanitaire, s’intensifient et Actu Santé - N°
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l’activité de l’hôpital embarqué croît rapidement. L’ACA trouve à bord des conditions d’intervention et d’hospitalisation confortables et sécurisées, à l’abri des répliques telluriques, nombreuses et menaçantes. Cette activité s’intègre à l’aide internationale : le bâtiment hôpital de l’US Navy d’une capacité de 1 000 lits, ancré à proximité, demandera le concours du Siroco pour l’évacuation de certains patients. Du 25 janvier au 5 février, trente-trois patients sont admis à l’hôpital du bord. Quarante-trois interventions chirurgicales sont réalisées, avec un pic d’activité de sept interventions dans la même journée. La quasi totalité des interventions orthopédiques sont à visée conservatrice et fonctionnelle. Le sourire retrouvé des patients au réveil, soulagés de constater qu’ils n’ont pas été amputés, gratifie les efforts déployés. Au quatrième jour, une
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L’ultimecampagne dela Jeanned’Arc
près les escales de Casablanca et de Dakar, le Groupe école d’application des officiers de marine (GEAOM) a contourné l’Amérique du Sud, en doublant le cap Horn et en empruntant le canal de Panama pour revenir en Europe via les Antilles, New York, Québec et Saint-Pierre et Miquelon. Le service médical du bord assure le soutien santé d’environ 800 personnes. Il comprend deux médecins, un chirurgien, quatre infirmiers, un infirmier anesthésiste, un chirurgiendentiste et un technicien de laboratoire. Sa capacité chirurgicale est celle d’un rôle 2.
© Marine nationale
Le Porte-hélicoptères (PH) Jeanne d’Arc admis au service actif en 1964 vient d’achever sa 45e et dernière campagne. Partie de Brest au début du mois de décembre, la “Jeanne” accompagnée de la Frégate légère furtive (FLF) Courbet a mis le cap au Sud-ouest. Une balade de santé ?
© ICN Paulin © ICN Paulin
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patiente opérée présentant une anémie à moins de 5 g/dl d’hémoglobine bénéficie d’une transfusion grâce au don de deux marins volontaires. Darlène, onze ans sortie des décombres deux semaines après le séisme, est admise à bord dans un état de dénutrition et de déshydratation sévère, compliqué d’une pneumopathie. Toutefois, l’issue sera heureuse grâce aux soins intensifs prodigués à bord. Le 5 février, l’ACA quitte le Siroco qui doit ramener du fret humanitaire de Fort-de-France pour rejoindre l’hôpital de la Sécurité civile. Le 19 février, le bâtiment appareille pour rallier Toulon. L’opération Séisme Haïti 2010 a montré les capacités d’intégration du ser vice médical et de l’hôpital embarqué du TCD dans le dispositif international des secours. Médecin en chef Jean Lyprendi Médecin major du TCD Siroco
Modernité et la fonctionnalité Le service médical se situe sur la partie avant du bâtiment au pont 02 où l’on accède par une large double porte étanche. En entrant, on trouve de part et d’autre de la coursive centrale, le bloc opératoire et la salle de réanimation. Le chirurgien, praticien de réserve qui effectue sa sixième mission à bord, insiste sur la modernité et la fonctionnalité du matériel. Sa dotation est la même que sur les bâtiments de projection et de commandement, plus récents. L’hôpital dispose de douze lits et d’une salle de soins. Ces moyens sont complétés par une salle de radiologie et d’échographie numérisée et un laboratoire d’analyses.
Une activité soutenue Durant les deux premiers mois de mission, 450 consultations médicales, 160 auprès du dentiste ont été effectuées, sans compter les visites Actu Santé - N°
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PH Jeanne d’Arc et FLF Courbet
d’aptitude. L’équipe médicale prend part activement à la vie du bord. Au quotidien, la chaîne santé est déployée lors des exercices de sécurité : évacuation de blessés, récupération d’homme à la mer, crash hélicoptère, treuillage, plongée… Avant chaque arrivée en escale, l’effort est axé sur la prévention. Des conférences santé sont proposées et des cours de secourisme régulièrement dispensés à l’ensemble de l’équipage. Le chirurgien-dentiste affecté à la Chefferie du service de santé de la force d’action navale (CSS/FAN) est mis pour emploi au cabinet dentaire du bord, le temps de la mission. Il traite ainsi l’ensemble des pathologies dentaires survenant chez les marins du PH Jeanne d’Arc et de la FLF Courbet. Malgré les dépistages effectués avant le départ, les consultations sont nombreuses. Tous les soins courants peuvent être effectués à bord, du simple détartrage à l’extraction des dents de sagesse incluses sous anesthésie locorégionale. Chirurgien-dentiste en chef Sébastien Dejean de la Batie Force d’action navale - Toulon
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Exercicenaval
Medic israélienne en action
franco-israélien L’escale de quatre jours de la Frégate anti-aérienne (FAA) Cassard à Haïfa, est mise à profit pour finaliser le scénario de l’exercice Red seagull 09. Il comprend plusieurs phases (1) dont la prise en charge de blessés. Trois instructeurs israéliens présents à bord supervisent cette dernière partie. Ils animent et font évoluer le scénario.
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e 22 novembre 2009, la FAA Cassard reçoit un appel de détresse du chalutier Glory qui vient de heurter violemment un container dérivant. Il s’enfonce rapidement du fait d’une large brèche dans la coque, et le feu s’est déclaré à bord à cause d’un court-circuit électrique. Deux des quatre membres d’équipage ont été blessés au moment du choc. Le Cassard et la corvette israélienne Herev se déroutent rapidement vers le bâtiment en détresse. Arrivés sur zone trente minutes après, les moyens de secours mis en œuvre ne parviennent pas à empêcher le Glory de sombrer. Pendant que les embarcations du Herev récupèrent les naufragés, l’équipe médicale du Cassard se prépare à les accueillir. Une prise en charge médicale conjointe à bord de la frégate
©G . Loa rer
Dossier
française s’impose car le Herev ne dispose pas d’infrastructures médicales. Les blessés sont grimés et tous les gestes d’urgence sont réalisés sur des mannequins d’entraînement.
entraînement à la catégorisation et au triage des blessés dans toutes les configurations possibles.
Organisationàbord
La stratégie de prise en charge des blessés de la marine israélienne, côtière, est celle du scoop and run. Leurs bâtiments se trouvent rarement hors de portée hélicoptère d’un hôpital, d’où l’absence de locaux médicaux à bord. Le medic a deux spécialités complémentaires : celui du Herev est aussi détecteur. L’hygiène navale, l’épidémiologie ou la gestion administrative d’une infirmerie ne constitue pas son quotidien. Sa trousse d’urgence, compacte et légère, se limite au strict minimum. Elle ne comporte qu’un set voie veineuse et intra-osseuse, intubation et drain thoracique, pour lequel il a été formé dix-huit mois, et quelques « drogues ». Leurs fiches médicales de l’avant, faciles d’emploi, sont adaptées tant aux blessés de guerre qu’aux accidentés industriels ou domestiques. Les forces armées israéliennes sont compétentes en matière de triage, dont les modalités leur sont très familières et relèvent d’un automatisme intellectuel. La culture de l’entraînement est prépondérante : ainsi ont été mis en œuvre en mer trois instructeurs, des plastrons et du matériel d’entraînement et de grimage, avec un préavis court. Le débriefing commun de cet exercice montre en outre la pertinence de l’auto critique et la définition des axes d’efforts émis par nos partenaires israéliens.
L’équipe médicale (2) du Cassard, renforcée par le medic et les deux paramedics du Herev, s’affaire auprès des naufragés au poste médical avancé dressé dans le hangar, mitoyen de la spacieuse plateforme hélicoptère. Des binômes ou trinômes mixtes francoisraéliens prennent en charge les blessés. Les fiches médicales de l’avant utilisées, de modèle israélien écrites en anglais et en hébreu, décrivent sommairement les tableaux cliniques des quatre naufragés. Cela va du traumatisme thoracique gauche au moment de l’impact avec hémo-pneumothorax suffoquant, à la brûlure étendue du visage avec détresse respiratoire, via le corps étranger de la face latérale du bras droit au moment de l’impact avec plaie et saignement actif ou l’hypothermie majeure à 31°C après 50 minutes sans protection spécifique dans l’eau à 10°C. Aucune lésion ne peut être considérée comme bénigne. Chacune a un potentiel évolutif défavorable utilisé par les instructeurs afin de parfaire notre
Essentieletcompétences
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Médecin principal Gwion Loarer Infirmier de classe normale Régis Le Nair Frégate anti-aérienne Cassard Médecin en chef Christian Perrichot Force d’action navale - Toulon
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(1) Navigation de concert, établissement de communications par différents canaux, assistance à bâtiment en détresse et recherche coordonnée de naufragés. (2) Composée d’un médecin, d’un infirmier et de 8 brancardiers-secouristes.
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Dossier
© R. Pescadere
Déminage dulagonnéo-calédonien a Marine nationale a mené à plusieurs reprises des campagnes de déminage seulement en eaux peu profondes (trente-cinq mètres maximum) à cause de l’absence de caisson et d’équipe médicale. Bien que les mines mouillées en 1942 aient peu de risque de détonner du fait de la corrosion de leur système de mise à feu et de leur « ensouillage » au fond du lagon, leur charge nominale évaluée à 225 kg d’explosif impose de traiter systématiquement ces douze champs de mines historiques. Ils constituent d’excellents terrains d’entraînement pour les équipes de démineurs et une occasion unique de tester leur interopérabilité en multinational.
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Coopération dans le Pacifique sud Du 6 au 20 novembre 2009, s’est déroulé dans le lagon néo-calédonien l’exercice Lagoon minex 2009. Il a réuni près de 250 militaires répartis dans neuf unités différentes dont cinq bâtiments. Outre les moyens apportés par la France, nation hôte, ont participé à cette opération deux chasseurs de mines australiens, un bâtiment de support plongée néo-zélandais, plusieurs équipes de plongeurs
démineurs et une unité américaine de dauphins dressés à la chasse aux mines. 577 mines ont pu être ainsi repérées dont 133 ont été identifiées. L’équipe médicale projetée constituée d’un médecin qualifié et d’un infirmier hyperbariste a été renforcée par celle du Centre médical interarmées (CMIA). Un caisson multiplace léger conteneurisé, acheminé depuis Toulon, a été mis en place sur le Bâtiment de transport léger (BATRAL) Jacques Cartier à Nouméa.
Déminer proprement
1000 mètres de profondeur. Les mines libérées des flotteurs coulent à pic et sont écrasées par la pression des grands fonds : elles ne représentent alors plus aucun danger. Aucun accident de plongée significatif n’est survenu durant cette mission. Les consultations étaient motivées par des brûlures de corail de feu, des piqûres d’oursins et de poissons pierres. Les récifs du lagon néo-calédonien méritent d’être préservés des agressions extérieures. D’autres missions de ce type seront encore nécessaires afin de les débarrasser des 300 tonnes d’explosif qu’ils hébergent encore.
L’encadrement médical a permis de Médecin en chef Christophe Oulie réaliser des chantiers de déminage loin Groupe des plongeurs de Nouméa, par des fonds de démineurs Atlantique 60 mètres. Le maître-mot de la mission est la préservation Un caisson multiplace de l’environnement. Ainsi, léger conteneurisé la méthode classique de « pétardement » des mines a été peu employée. Elle a laissé place à la technique de l’« océanisation », certes, plus longue et fastidieuse. Elle impose de désensabler la mine avant de l’élinguer à un f lotteur et de remorquer l’ensemble en dehors du lagon pour la relarguer à plus de Actu Santé - N°
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© MC C. Oulié
Récupération de mine
Inscrits en 2008 au patrimoine mondial par l’UNESCO, les lagons de Nouvelle-Calédonie abritent des récifs uniques au monde. Pourtant, autour du ruban corallien qui s’étend sur 1 600 kilomètres, quelque 1 900 mines, vestiges de la Seconde Guerre, mondiale menacent ces récifs.
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IBODE ensituation opérationnelle Dans le contexte opérationnel, le rôle de l’Infirmier de bloc opératoire diplômé d’État (IBODE) revêt une importance majeure. Les paramédicaux affectés à la 14e Antenne chirurgicale parachutiste (ACP) exercent à l’HIA Percy de Clamart. Ils rejoignent l’antenne, pour les différents exercices et stages, ou dès qu’elle est sur le point d’être engagée.
L’
IBODE volontaire pour être affecté en Antenne chirurgicale parachutiste (ACP) pour une durée de trois ans doit, au préalable, satisfaire aux tests Troupes aéroportées (TAP). Exercer en tant qu’infirmier au bloc opératoire de l’HIA Percy et être déployé au sein d’une antenne sont deux situations de travail totalement différentes. En opérations, l’IBODE doit faire preuve de réelles capacités d’adaptabilité, voire d’ingéniosité dans son métier d’infirmier, mais également de militaire. Dans le cadre d’une antenne chirurgicale, il est associé à un Infirmier diplômé d’État (IDE). Tout infirmier justifiant d’une solide expérience en bloc opératoire, peut également se trouver projeté sur des théâtres d’opérations.
Souvent placé dans des conditions de travail dégradées, il doit, en équipe, maintenir une qualité de soins optimale. Le soutien médical des forces engagées dans la durée nécessite une adaptation des moyens utilisés. Les conditions d’exercice diffèrent d’une situation à l’autre, allant de la petite structure isolée à une véritable infrastructure hospitalière, l’hôpital médico-chirurgical. Dans ce dernier cas, l’exercice soignant se trouve considérablement facilité. En effet, les salles d’opération sont remarquablement équipées garantissant une prise en charge de haut niveau. De plus, leur travail diffère en fonction des théâtres et nécessite des compétences multidisciplinaires.
• 1 médecin anesthésiste réanimateur • 1 chirurgien orthopédiste • 1 chirurgien viscéral • 2 infirmiers anesthésistes DE • 1 infirmier de bloc opératoire DE • 2 infirmiers DE • 3 aides soignants DE (MDR) • 1 secrétaire administratif du service de santé
Tests TAP
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Stages au 1 Rmed • Stage montage et démontage des tentes UTILIS® constituant les antennes, sa structure propre mais également le déploiement de tout le matériel spécifique avec câblage électrique pour permettre à l’équipe de se familiariser et augmenter la vitesse de mise en œuvre opérationnelle. • Stage d’instruction sur le tir de combat qui s’inscrit dans un concept global combinant des savoir-faire et des savoir-être, visà-vis de son arme, des autres et de soi-même (formation devenue obligatoire pour aptitude OPEX).
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L’antenne chirurgicale
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Compétencesettypesde mission ors d’une mission en Afghanistan, en 2009, les deux infirmiers de bloc exercent au sein du groupement médico-chirugical (GMC) de Warehouse. L’activité opératoire est répartie en quatre salles d’opération modernes. Cette structure est le pôle référent de chirurgie ophtalmologique sur le théâtre d’opération. Elle reçoit, dans le cadre de l’urgence, les traumatismes oculaires de guerre et, de façon programmée, des civils afghans. Dans ce contexte de conflit, l’équipe chirurgicale est amenée à traiter la traumatologie de guerre, viscérale et orthopédique. Dans le cadre de l’OTAN, l’antenne collabore, entre autres, avec les équipes chirurgicales allemande et bulgare. Au GMC, les infirmiers de bloc travaillent selon les trois rôles principaux qui leur sont dévolus : le reconditionnement des boîtes et l’autoclavage, l’entretien du bloc opératoire ainsi que les commandes de pharmacie. L’IBODE et l’IBO de la 14e ACP ont un rôle polyvalent avec une orientation prioritaire de bloc opératoire pour l’IBODE et de façon secondaire pour l’IBO. Ils doivent faire preuve d’une disponibilité importante au profit de l’antenne. Ces circonstances particulières lors d’une mission extérieure, dans un environnement parfois hostile, exigent des soignants une conscience aiguë du service attendu par les militaires. De cet engagement et de cette capacité d’adaptation dépend le succès du soutien des forces.
© Photos : ICN S. Sabot
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Antenne à Birao
ors d’une mission avec ouverture de théâtre, l’antenne se déploie seule. Comme l’ensemble du personnel, les infirmiers participent à la mise en place du dispositif : montage des tentes, organisation du bloc opératoire, câblage électrique. En situation sommaire, où le soutien des forces prime, l’IBODE est associé à un IDE. L’IBODE est « l’infirmier circulant » auprès des deux chirurgiens qui travaillent en binôme chirurgien – aide-opératoire. Pour la prise en charge de blessés graves nécessitant un instrumentiste, un infirmier assure cette fonction. L’IBODE est responsable de la stérilisation, effectue les commandes nécessaires et gère la logistique du bloc opératoire. Il doit faire face aux contraintes liées aux moyens de stockage rudimentaires, aux difficultés d’acheminement et aux conditions climatiques particulières. L’IDE participe au triage des blessés lors d’un afflux inopiné et aide l’équipe d’hospitalisation dans la gestion du flux de patients et des soins.
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Bloc du GMC de Warehouse
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ans le cadre de l’opération Epervier, l’ACP participe au soutien des forces françaises présentes au Tchad et à l’aide médico-chirurgicale à la population. Exerçant dans un centre médicochirurgical, l’IBODE et l’IDE contribuent activement à la mise en œuvre des 200 inter ventions chirurgicales sur deux salles, qu’elles soient de chirurgie viscérale, endocrinienne, orthopédique ou traumatologique. Au cours de cette mission, en plus de la garde et de la permanence des soins comme l’ensemble de l’équipe paramédicale, l’IBODE et l’IDE assurent les fonctions d’aide-opératoire, d’instrumentiste et de circulant. Ils encadrent les infirmiers de recrutement local et sont aussi responsables de l’unité de stérilisation, de la commande de pharmacie pour le bloc.
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Infirmier de bloc opératoire de classe normale Frédéric Bache Infirmier de classe normale Sylvère-Étienne Sabot 14e ACP et HIA Percy - Clamart
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Vieduservice
L’IBODE dévelop face au
Le développement durable est un critère de la certification 2010, mais aussi une composante de la loi de juillet 2009 portant sur la réforme de l’hôpital et relative aux patients, à la santé et aux territoires (loi HPST). Face à ce problème de société, chaque individu doit engager sa responsabilité de citoyen et de professionnel. Les Infirmiers de bloc opératoire diplômés d’État (IBODE) de l’HIA Laveran sont au cœur cette dynamique.
Manipulation du diluteur
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n 1987, la commission mondiale sur l’environnement et le développement donne cette définition du développement durable : « la capacité des générations présentes à satisfaire leurs besoins sans empêcher les générations futures de satisfaire leurs propres besoins ». Il concilie trois aspects : économique, écologique, social.
La démarche de l’hôpital Les établissements de soins sont consommateurs d’énergie, utilisateurs de ressources, producteurs de déchets et sources de pollution. Également lieux de rencontres multiculturels et pluri professionnels, ils favorisent la création de groupes de travail et de réf lexion comme en témoigne la création du comité de développement durable en santé. Constitué de professionnels de santé, son ambition est de bâtir une démarche environnementale propre à la communauté hospitalière. La politique de gestion des risques, les directives du plan national santé environnement 2004-2008 témoignent de l’intégration, par les hôpitaux, du développement durable dans leur politique d’établissement.
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Au bloc opératoire L’activité d’un bloc opératoire est fortement génératrice de déchets. Ses acteurs doivent participer à une démarche d’amélioration de la qualité où efficience rime avec respect de l’environnement. Du fait de sa formation et de son diplôme universitaire d’hygiène, l’IBODE est un partenaire privilégié pour promouvoir le développement durable au sein du bloc. À l’Hôpital d’instruction des armées (HIA) Laveran, il est à l’initiative d’actions qui concourent au développement durable : tri sélectif rigoureux des déchets hospitaliers, stratégie de « non gaspillage » des dispositifs médicaux stériles grâce à la réactualisation des protocoles d’intervention. Par ailleurs, une démarche globale de gestion de la qualité de l’eau, pour en réduire la consommation, et un suivi des effluents sont mis en place. À cet effet, des cellules de détection près des auges chirurgicales, des diluteurs (1) pour la pré-désinfection du matériel et un nettoyeur vapeur, pour le bio nettoyage, ont été installés. Dernier Actu Santé - N°
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geste bénéfique, à la fin du programme opératoire et en accord avec l’équipe d’anesthésie, les salles d’intervention sont mises en veille avec déconnexion des fluides médicaux, placement hors tension des appareils électriques et extinction des lumières. Le cursus conduisant à l’obtention du DE d’IBO a évolué entraînant une refonte de la formation. Le référentiel métier intègrera, en 2011, l’acquisition de huit compétences dont le développement durable. Bénéficiant de l’impulsion donnée par notre formation, cette dimension est intégrée aux bonnes pratiques professionnelles. Après l’éco-citoyenneté, développons l’éco-professionnalisme. Infirmier de bloc opératoire de classe supérieure Isabelle Richard Infirmier de bloc opératoire de classe normale Liliane Mahé HIA Laveran - Marseille (1) Automate de dilution d’un concentré de produit dans un volume donné. (2) Instruction ministérielle n°6045/DEF/DCSSA/RH/PF modifiée du 8 avril 2009.
Vieduservice
pementdurable devenir
© Photos : HIA Laveran
IBODE Un infirmier (IDE) qui souhaite devenir IBODE doit remplir les conditions fixées par la réglementation (2), notamment une ancienneté de service de quatre ans, une affectation en hôpital depuis un an et, à compter de 2012, la détention d’un niveau minimum d’anglais : le profil linguistique standardisé 1111. Bionettoyage avec l’appareil vapeur
Ces conditions rentrent dans le cadre de l’internationalisation des théâtres d’opérations et du parcours professionnel des IDE. Elles permettent aux infirmiers des forces de connaître l’hôpital avant d’envisager cette spécialisation. Elles supposent une demande d’affectation en hôpital pour les IDE affectés dans les forces, et/ou une validation du niveau d’anglais via les cellules formation des BLRH ou des DRSSA. Tout infirmier remplissant ces conditions peut déposer un dossier de candidature. Le nombre de postes ouverts étant limité, un concours probatoire permet de sélectionner les candidats qui pourront présenter le concours d’entrée à trois écoles civiles de leur choix. Les infirmiers sélectionnés suivent pendant dix-huit mois la formation au diplôme d’Etat, tout en restant affectés dans leur établissement d’origine. Les jeunes diplômés bénéficient ensuite d’une formation d’adaptation à l’exercice en OPEX de deux semaines, à l’école du Valde-Grâce et au 3e régiment médical de La Valbonne. Capitaine Guillemette Nicolas Bureau politique de formation DCSSA
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Quoideneuf Le SSA récompensé
Cette année, le service de santé des armées, représenté par le directeur central, s’est vu décerner la Victoire de la modernisation de l’État dans la catégorie « Organisation » pour son projet de transformation de sa fonction ressources humaines. Cette récompense constitue une reconnaissance de la pertinence et de la légitimité de l’organisation définie et mise en place.
Le MGA Nédellec reçoit la récompense pour le SSA
© DR
La cérémonie des Victoires de la modernisation de l'État s’est déroulée à l’Assemblée nationale sous la présidence du Secrétaire d’État à la fonction publique, George Tron. Il a récompensé les équipes ayant porté les meilleures initiatives en matière d’amélioration du service public dans quatre grands domaines : « Innovation », « Organisation », « Service » et « Simplification ».
Plus de détails sur le site Internet acteurspublics.com
Troisécoles du SSA surlesChamps-Élysées Pour la première fois, l’École du Val-de-Grâce a participé aux cérémonies du 14 juillet 2010 à Paris. Des internes des hôpitaux des armées, des élèves OCTASSA et des cadres de santé ont défilé aux côtés de leurs camarades des ESSA de Bordeaux et de Lyon. Deux jours auparavant, le directeur central s’était rendu à Satory pour rencontrer les élèves lors des répétitions du défilé.
© ECPAD
Un défilé pluvieux
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