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Épernay totalement épargnée par les émeutes
À l'inverse de Reims et de Châlons, la capitale du champagne a vécu des nuits très calmes, la semaine passée. La vie a suivi son cours normalement à Bernon, quartier prioritaire de la ville, pourtant pas épargné par les difficultés sociales.
Un commissariat de quartier pillé et incendié, un supermarché mis à sac, une mairie annexe et un bureau de Poste vandalisés, une rame de tramway brûlée au cocktail Molotov... Reims n'a pas été épargnée par la révolte qui a suivi la mort de Nahel. À Châlons, le quartier Schmit aussi s’est embrasé. Un centre social, des écoles et divers commerces ont subi de lourdes dégradations. Même à Vitry-le-François, quelques incidents ont été recensés dans le quartier Rome SaintCharles. Et à Épernay ?
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Rien de tout cela. Alors que des événements ont été annulés et que les terrasses ont été remballées plus tôt à Reims et à Châlons, le week-end dernier, la vie a suivi son cours normalement dans la capitale du cham - pagne. « Il n’y a eu aucune intervention en lien avec ces faits », nous confirme Sébastien Grangé, le chef de la police municipale d’Épernay. Néanmoins, on apprend, dans « l’Union » du 4 juillet, que six jeunes comparaissaient devant le tribunal correctionnel de Châlons pour avoir participé aux violences urbaines dans la ville-préfecture. Parmi eux, un Sparnacien avait pris le train, tard dans la soirée, pour assister aux émeutes. D’autres ont-ils fait comme lui, épargnant ainsi Épernay ?
À Bernon, identifié comme quartier prioritaire de la politique de la ville, c’est-à-dire qu’il fait l’objet d’une intervention spécifique des pouvoirs publics en raison de la faiblesse du revenu des habitants, rien à signaler ces derniers jours. « Ici, c’est calme », est la phrase qui est revenue le plus souvent dans la bouche des habitants interrogés. « On est ouvert de 8 h à 22 h et on n'a rien changé la semaine dernière, se réjouit le gérant du Colcom Market, la supérette de l’avenue de Middelkerke. J’ai entendu des clients parler des violences, mais ici, c’est tranquille. » Même son de cloche du côté de la pharmacie adjacente.
« On a reçu des messages de l’Ordre national des pharmaciens pour nous mettre en
Dans le quartier de Bernon, le calme règne en ce jour de marché, comme lors des nuits dernières… garde, mais comme c’était très calme, on a fonctionné comme d’habitude. J’étais même de garde », sourit la pharmacienne. Pareil à la boulangerie, idem au bar-tabac La Récréation. Devant celui-ci, trois jeunes fument une cigarette. Et toujours la même rengaine : « Ici, c’est calme, lance un membre du groupe . Il ne se passe jamais rien, peut-être que les gens n’avaient pas envie qu’il se passe quelque chose. » Alors, comment expliquer cette exception sparnacienne ?
En 2010, les projecteurs avaient été braqués sur ce quartier, après l'agression par un groupe de jeunes d'une patrouille de police qui tentait d'interpeller un homme du quartier recherché. Touché à la tête par une pierre, un brigadier-chef de 49 ans avait été
Le ministre de l'Intérieur s'est rendu, lundi matin, au bureau de Poste du quartier Croix-Rouge de Reims, pillé la semaine passée, afin de constater « le rétablissement de l'ordre public » et apporter sa « solidarité ».
Comme environ 300 villes en France, Reims a été le théâtre, la semaine passée, de violentes émeutes en réponse à la mort de Nahel, 17 ans, tué par balle par un policier, lors d’une interpellation en voiture, à Nanterre (Hauts-deSeine). Et comme ailleurs, les quartiers populaires ont été les premiers touchés, déclenchant la colère et l'incompréhension des riverains.
Le ministre de l'Intérieur, Gérald Darmanin, est venu le constater, lundi matin, après deux nuits beaucoup plus calmes. L'occasion de distribuer des satisfecits et lancer quelques messages. « Le moment est venu de constater le rétablissement de l'ordre public », a d’abord lancé le ministre de l’Intérieur, présent dans la cité des sacres pour exprimer sa « solidarité ». Avec le maire Arnaud Robinet et la présidente du Grand Reims Catherine Vautrin, alliés politiques par ailleurs, mais aussi avec les salariés de
La Poste, par exemple, dont trois agences (Orgeval, Wilson et Croix-Rouge) ont été mises à sac ces derniers jours. Devant celle de l'avenue du Général-Bonaparte, le distributeur de billets a été détruit et des colis ont été pillés. « L'urgence était d'apporter une grièvement blessé. Deux ans plus tard, un adolescent de 17 ans avait perdu la vie lors d'une dispute. Depuis, si quelques faits divers émaillent la vie du quartier, rien d’aussi grave n’a été recensé. « Le climat social s’est fortement amélioré depuis quelques années et il n’y a pas plus d’interventions pour des faits de délinquance à Bernon qu’ailleurs dans la ville », affirme le chef de la police municipale.
100 M€ injectés dans le renouvellement urbain
Fernande, qui habite
Bernon depuis près de deux décennies, a constaté un changement radical ces dernières années. « Ça n'a plus rien à voir, assure-t-elle. Avant, il y avait des taudis et on ne se sentait pas trop en sécurité. Aujourd’hui, c'est devenu très calme. »
D’un point de vue esthétique, difficile de contredire Fernande. L'Opération de renouvellement urbain (Oru) menée à partir de 2005 a permis d’injecter 100 M€ dans ce quartier afin de détruire et reconstruire des logements, créer le parc Nelson-Mandela, réhabiliter le centre commercial et installer plusieurs services publics (bureau de Poste, médiathèque, centre social, mairie de quartier, salle polyvalente, conseil de prud’hommes, Club de prévention…). En 2017, un rapport sur la politique de la ville soulignait « les espaces extérieurs sont globalement respectés » par les riverains. « Bernon, c'est une toute petite cité, tout le monde se connaît et se côtoie », fait remarquer une dame sur le marché. » Bien sûr, tout n'est pas rose dans le quartier. Les immeubles ont beau être récents, des dysfonctionnements sont constatés par les habitants des 1 535 logements sociaux, qui représentent plus de 95 % de l’habitat. Comme l’hiver dernier, lorsque près de 200 appartements ont été privés de chauffage pendant une semaine. Sur le marché, mercredi dernier, on déplorait également des petites incivilités du quotidien, tels ces propriétaires de chien inconvenants... Et derrière le vernis de la rénovation urbaine, les inégalités demeurent. Selon les chiffres de l’Agence nationale de la cohésion des territoires établis en 2022, le taux d’emploi des 15-64 ans est de 42 %, contre 61 % pour l’ensemble d’Épernay et le revenu disponible médian des ménages (prestations sociales incluses) est de 1 100 € par mois, soit 520 € de moins que celui de la commune. Quant aux taux de chômage et de pauvreté, ils atteignent respectivement 35 % et 50 % à Bernon. assistance psychologique aux employés, a expliqué au ministre Simon Gamwo Dongho, directeur de secteur à La Banque postale. Pour certains qui travaillent depuis 30 ans dans ce bureau, c’est traumatisant de voir ça. » L’agence est fermée jusqu’à nouvel ordre. À moins de 100 mètres de là, c’est une épicerie qui a été ravagée. « Tout le monde va faire ses courses là-bas, je ne comprends pas... C'est le fait d'enfants mal éduqués, se lamente Violette, une habitante du quartier, touchée par la mise à l'arrêt du tramway suite à l'incendie de deux rames dans la nuit de jeudi à vendredi. J’ai dû marcher depuis l'hôpital alors que je suis souffrante. C'est comme ça que ces gamins nous ont punis. » Peu ou prou, c’est le sentiment général qui domine dans cette avenue passante du quartier. Des mères de famille racontent les nuits difficiles qu’elles ont passées et la colère de voir leur quartier saccagé au petit matin. En réponse, Gérald Darmanin est venu marteler son message : « Il faut écouter les quartiers et être ferme avec les voyous. On doit trouver un bon équilibre, mais ne pas trouver des excuses là où il n'y en a pas. » Le « premier flic de France » a logiquement salué le travail de ses troupes, qui ont réalisé « 3 200 interpellations », et de la justice qui a procédé à des comparutions immédiates. « Ça montre l’ordre républicain et ça contribue à ce retour au calme. » Parmi les personnes arrêtées, la moyenne d’âge est de 17 ans, un tiers est mineur et 60 % n'avait aucun antécédent judiciaire. Le ministre a pointé du doigt « la responsabilité des familles et des parents ».
Alors qu'il s'apprêtait à repartir, Gérald Darmanin a échangé avec quelques riverains. Un homme un peu plus âgé, qui se présente comme « un grand du quartier », l'a interpellé aimablement. « On est tous contre les violences, mais le policier n’aurait pas dû lui mettre une balle dans la tête », a lancé le quadragénaire. « Ce n’était manifestement pas quelque chose de légal, mais il a le droit à la présomption d’innocence et la justice va faire ce qu’il faut faire, a promis le ministre . Mais ça n’a rien à voir avec piller des magasins et mettre le feu dans des écoles. La France, ce n'est pas la loi du Talion. Il y a eu une situation dramatique, mais les gens ne doivent pas se faire justice eux-mêmes. » Après cet échange cordial, changement radical de décor et de public.
« Ces gamins nous ont punis », lance une dame du quartier
Gérald Darmanin s’est rendu sur le parvis de l’hôtel de ville où l'attendaient plusieurs centaines de personnes. Le maire Arnaud Robinet et son conseil municipal ont répondu à l’appel de l’Association des maires de France, qui réclamait « une mobilisation civique des citoyens pour le retour à l’ordre républicain ». Le locataire de la place Beauvau a été accueilli par des applaudissements et à l'issue d'un bref discours d'apaisement du premier édile rémois, La Marseillaise a retenti. Rapidement escorté au commissariat, Gérald Darmanin a déjeuné avec des policiers, des gendarmes et des pompiers, avant de poursuivre sa journée à Saint-Quentin dans l’Aisne et par la même occasion son marathon médiatique. « Les forces de l’ordre ont été très mobilisées », a-t-il répété à Reims. Lui aussi.
Le Grand Est débloque 10 M€
Après les épisodes de dégradations et de pillages, la région Grand Est a annoncé la création d'un fonds d'aide d'urgence de 10 M€. Une moitié doit alimenter la reconstruction des services publics dans les communes touchées et l'autre doit accompagner les TPE et commerçants impactés. Cette mesure exceptionnelle sera soumise au vote du conseil régional ce vendredi 7 juillet, avec l'objectif de débloquer les aides financières dès la semaine prochaine.
Réduite de 10 % l'an passé suite à la relégation de l'équipe masculine en Pro B, la subvention versée par Châlons Agglo au Champagne Basket retrouvera son niveau d'avant-crise, soit 610 500 €, pour la saison 2023-2024. Plusieurs élus s'y opposent.
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F INANCESPUBLIQUES
EN BREF
10 % de notre aide a-t-elle réellement un impact sur leur budget ? Et comment un club pro peut-il arriver à un modèle financé à 50,75 % par des subventions publiques ? »