Kinnarps Trend Report 2 - French

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RAPPORT DES TENDANCES MARIER LE CORPS ET L’ESPRIT

COCRÉATION

CONCEVOIR POUR LA DIVERSITÉ

TECHITURE

MICROMULTINATIONALES

CONCEVOIR DES ESPACES DE TRAVAIL ET DE VIE POUR LA DÉCENNIE DE LA DIVERSITÉ


LES TALENTS À L’ŒUVRE DANS CE RAPPORT Trouver les idées les plus fascinantes requiert souvent d’adopter une vision plus globale. Pour élaborer le rapport des tendances Kinnarps 2015, nous avons réuni un groupe de personnes sélectionnées avec soin qui, comme nous, portent un réel intérêt à l’avenir du design. Nous souhaitons ici les remercier pour leurs lumières. MERCI Ingrid Backman, designer & partenaire, White Architects Jörg Bakschas, fondateur & propriétaire, Headroom Consultants Ulf Boman, partenaire & futur stratégiste, Kairos Future Stefan Brodbeck, fondateur, Brodbeck Design Boris Müller, professeur de conception interactive, Fachhochschule Potsdam Sandra Gauer, consultante en gestion du changement & fondatrice, Perspectives GmbH Kursty Groves, auteure & consultante en innovation pour le lieu de travail Susanne Hedin, ergonome, Ergonomhuset Cecilia Hertz, fondatrice & PDG, Umbilical Design Wayne Hemingway, fondateur, HemingwayDesign Jörgen Jedbratt, associé principal & conseiller, Kairos Future Nina Jobs, designer James Lawrence, décorateur d’intérieur, Gensler Louis Lhoest, partenaire, Veldhoen + Company Nicklas Lundblad, directeur des politiques publiques & relations gouvernementales, Google Luca Nichetto, designer, Luca Nichetto Design Studio Tim Oldman, fondateur & PDG, The Leesman Index Petrus Palmér, cofondateur, Form Us With Love Johanna Agerman Ross, fondatrice & rédactrice en chef, Disegno Magazine Philip Ross, PDG, UnGroup – Un Work Ola Rune, architecte & designer, Claesson Koivisto Rune Monika Semkowicz, décoratrice d’intérieur, White Architects Paul Wheeler, responsable de la stratégie relative aux espaces de travail, Hewlett Packard


TABLE DES MATIÈRES

AVANT-PROPOS La diversité, mot-clé de la décennie à venir

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CONCEVOIR POUR LA DIVERSITÉ 7 Renoncer à la conception par défaut 9 La main-d’œuvre 4G 10 Le mouvement pour l’égalité hommes-femmes 11 La cohabitation entre introvertis et extravertis 12 Un design inclusif pour un monde varié 14 MARIER LE CORPS ET L’ESPRIT 16 Le bien-être, nouveau gage de durabilité 19 L’environnement de travail bienveillant 20 Combattre la fatigue technologique 22 L’espace de travail humain 24 TECHITURE 27 La disparition du bureau 29 Réunions sans frontières 32 Un espace de travail toujours plus intelligent 34 COCRÉATION 37 Redéfinir les notions de temps et d’espace 39 Un nouveau dialogue en matière de design 41 Personnaliser ou non ? 42 La culture hacker passe par le design craft punk 44 DES MICROMULTINATIONALES 47 Une vie professionnelle « liquide » 49 Les cafés collaboratifs 50 Un bureau « comme à la maison » 52 L’espace de travail éphémère 54 Une communauté collaborative 57 UN AVENIR PROMETTEUR 58



RAPPORT DES TENDANCES 2015 LA DIVERSITÉ, MOT-CLÉ DE LA DÉCENNIE À VENIR Nous sommes aux prémices d’une évolution historique en matière de design, conduite par la révolution numérique qui impacte profondément nos vies. Cette vaste transformation est déjà une réalité pour celles et ceux qui ont fort judicieusement adopté ces nouvelles technologies – et par extension, ces nouveaux concepts de design – dans leur organisation, leur société, leur association ou leur entreprise individuelle.

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Le monde d’aujourd’hui est varié et complexe, et les frontières et barrières s’estompent peu à peu à tous les niveaux. La géographie n’est plus un critère ; la priorité est désormais de trouver des talents et de les garder, peu importe leur lieu d’origine. Analogique et numérique ne sont plus considérés comme opposés, mais comme étroitement liés. Comprendre comment fonctionnent notre esprit et notre corps est maintenant indispensable pour appréhender et bâtir un environnement professionnel moderne. Cette ouverture et ces interconnexions croissantes nous imposent de concentrer nos efforts de réflexion créative sur un domaine absolument capital : la diversité. À l’avenir, cette force motrice majeure qu’est la diversité se traduira par le développement renforcé d’échanges culturels, une plus grande mixité au travail, une cohabitation sans heurt entre introvertis et extravertis, des coentreprises entre particuliers et sociétés, et la collaboration d’un personnel rassemblant jusqu’à quatre générations. Chez Kinnarps, nous pensons que la compréhension de cette évolution profonde et les actions entreprises en conséquence nous offrent de nombreuses opportunités pour concevoir des espaces de travail et de vie adaptés à cette décennie de la diversité, et ainsi rendre la vie au travail plus agréable. Des opportunités que nous souhaitons partager avec vous puisque le futur est déjà là. À nous de savoir désormais comment les saisir ensemble pour apporter une contribution positive et proactive aux espaces dans lesquels nous passons tant de temps. Per-Arne Andersson PDG de Kinnarps

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CONCEVOIR POUR LA DIVERSITÉ COMMENT LE DESIGN DOIT

RÉPONDRE AUX BESOINS LES PLUS DIVERS


Dans un monde du travail plus divers que jamais, une solution unique ne convient à personne. Alors que les frontières – qu’elles relèvent de l’emplacement géographique, du genre, de l’âge ou de caractéristiques physiques ou psychologiques – s’estompent de plus en plus, il devient plus difficile pour l’environnement de travail d’attirer et de conserver les talents. Cette évolution et ce développement constants imposent de repenser les politiques en place sur le lieu de travail ainsi que l’espace de travail lui-même, de son architecture à son aménagement. Le design peut unir, mais également diviser. Un design inclusif est donc essentiel à l’environnement de travail de demain.

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RENONCER À LA CONCEPTION PAR DÉFAUT Un lieu de travail moderne et adapté à tous

Évolution n° 1 : la main-d’œuvre 4G La main-d’œuvre à quatre générations rassemble des employés jeunes, chevronnés et anciens, travaillant ensemble grâce aux perspectives de carrière plus diverses et à plus long terme qu’offre l’économie numérique. Il est dès lors essentiel de tenir compte des façons de penser et de travailler différentes de ces générations lors de la conception des espaces.

Évolution n° 2 : le mouvement pour l’égalité hommes-femmes Les femmes sont de plus en plus nombreuses dans nos bureaux, une tendance entamée il y a de nombreuses années déjà. Bien que la lutte pour l’égalité des sexes soit un enjeu majeur dans l’espace de travail moderne, il nous faut étudier de façon approfondie les différences structurelles et psychologiques éventuelles entre hommes et femmes afin de connaître leur impact sur la conception des objets et de l’espace. Remettre en question le statu quo actuel en matière de design sous l’angle des différences hommes-femmes permettra de créer un environnement de travail réellement inclusif. Évolution n° 3 : la cohabitation entre introvertis et extravertis Chacun procède différemment face à un problème à résoudre. S’il est deux groupes que tout oppose dans ce domaine, ce sont bien les introvertis et les extravertis. Il est donc judicieux de concevoir nos espaces de travail en fonction de ces deux types de personnalité. Un véritable défi, pour permettre à des esprits des plus divers de travailler ensemble à la poursuite du même objectif.

→ NOUS DEVONS CHOISIR ACTIVEMENT UN NOUVEAU PARAMÈTRE POUR NOS LIEUX DE TRAVAIL. ←

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Concevoir pour la diversité

En informatique, l’expression « par défaut » désigne un paramètre ou une option attribué(e) automatiquement par l’ordinateur en l’absence d’une indication explicite de la part de l’utilisateur. Nos lieux de travail sont traditionnellement conçus par défaut pour un employé standard de sexe masculin, basé localement et âgé entre 25 et 65 ans. Nous devons désormais choisir activement un nouveau paramètre pour nos lieux de travail, produits et concepts afin de moderniser et d’optimiser notre main-d’œuvre et de répondre au mieux à la diversité actuelle. Le monde du travail connaît actuellement trois évolutions principales et toutes requièrent de renoncer à la conception par défaut.


LA MAIN-D’ŒUVRE 4G

Concevoir pour la diversité

Collaborer dans un milieu intergénérationnel Les pyramides des âges des pays occidentaux sont en train de s’inverser. Nous vivons et travaillons plus longtemps et avons moins d’enfants. Jeunes de 24 ans et seniors de 74 ans sont donc amenés à travailler ensemble. Une étude récente de la UK Commission for Employment and Skills (UKCES) indique que les « mains-d’œuvre 4G » rassemblant quatre générations deviennent de plus en plus courantes alors que certains décident de rester actifs jusqu’à l’âge de 70/80 ans. Deux tiers des employeurs du Royaume-Uni ne possèdent toutefois pas de stratégie de ressources humaines pour gérer cette diversité des âges, selon le Chartered Institute of Personnel and Development (CIPD). Dans le même contexte, les Américains ont créé le terme de « Silver Tsunami » pour décrire les conséquences possibles du vieillissement de la population active. La collaboration intergénérationnelle est désormais un passage obligé, mais comment la rendre plus simple ? D’un côté, la génération plus ancienne est surtout habituée à certains prérequis et pratiques par défaut, comme un lieu de travail principalement non numérique et dominé par les hommes. De l’autre, la nouvelle génération et les générations à venir sont pour ainsi dire des enfants du numérique, nés dans un monde caractérisé par l’omniprésence d’Internet et la mixité au travail. Le vieillissement actuel de la population pose également un certain nombre de problèmes, tant physiques que psychologiques. Bien entendu, ces différences créent certaines tensions (des tensions créatives, espérons-le). Le design peut alors être une aide précieuse en permettant une collaboration intergénérationnelle. Il peut tout d’abord aider à combler le

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→ DES EMPLOYÉS D’ÂGES DIFFÉRENTS N’ONT PAS LES MÊMES ATTENTES EN MATIÈRE DE DESIGN. LA DIFFICULTÉ EST DONC DE TROUVER UNE SOLUTION QUI CONVIENNE À TOUS. UN SIÈGE RESTE UN SIÈGE, QU’IL AIT ÉTÉ CONÇU AUJOURD’HUI OU IL Y A 50 ANS. LES PERSPECTIVES EN MATIÈRE DE DESIGN PORTENT DAVANTAGE SUR LE FONCTIONNEMENT GÉNÉRAL DE L’ENVIRONNEMENT DE TRAVAIL. ← OLA RUNE, ARCHITECTE & DESIGNER, CLAESSON KOIVISTO RUNE fossé entre les générations en créant un environnement professionnel adapté à la fois aux nouvelles générations adeptes des technologies numériques et aux employés plus habitués aux outils analogiques, sans qu’une approche n’empiète sur l’autre. Les anciennes générations effectuent traditionnellement une seule tâche à la fois, tandis que les plus jeunes parviennent souvent rapidement à gérer plusieurs tâches en même temps, même si ce « multitasking » est parfois considéré comme une menace pour la productivité et la pleine conscience. L’architecture et l’aménagement concrets de l’environnement de travail présentent également l’avantage de pouvoir être adaptés à tous les âges et aux besoins physiques et psychologiques propres à chaque phase de la vie. Il s’agit alors de répondre aux besoins de chacun, sans favoriser ou reléguer au second plan une catégorie d’âge en particulier.


LE MOUVEMENT POUR L’ÉGALITÉ HOMMES-FEMMES Donner un nouvel élan à notre environnement de travail grâce à la question hommes/femmes En 2009, le Boston Consulting Group mentionnait dans son rapport intitulé « The Female Economy » que les femmes, en tant que segment du marché, contribuaient davantage à l’économie que la Chine et l’Inde réunies. Ce sont également elles, on le sait, qui prennent 80 à 90 % des décisions d’achats des ménages. 2009 fut par ailleurs une année historique pour les États-Unis, qui virent pour la première fois le taux d’activité des femmes atteindre celui des hommes. Trois ans plus tôt, The Economist avait publié des données relatives aux pays dans lesquels les femmes ne travaillaient pas montrant que le PNB y stagnait par rapport aux pays où la main-d’œuvre était plus mixte. Des études indiquent également que les entreprises dirigées par des femmes PDG obtiennent de meilleurs résultats financiers à long terme. Bref, le travail des femmes est une avancée positive pour tous, tant au niveau des entreprises que des pays. Pourtant, les décisions en matière de design, de concepts et de politiques continuent d’être prises par défaut pour des hommes, confrontant les femmes à des problèmes que ne connaissent pas leurs collègues masculins. Dans son livre « En avant toutes », Sheryl Sandberg, directrice de l’exploitation de Facebook, raconte une anecdote datant de l’époque où elle travaillait chez Google. Un jour, alors qu’elle était enceinte, elle n’eut pas d’autre choix que de se garer dans un parking éloigné et de marcher jusqu’à son lieu de réunion, ce qui l’incita à demander à ses supérieurs hiérarchiques de prévoir des places de stationnement réservées aux

employées et visiteuses enceintes. Son souhait fut exaucé peu après. Pourquoi ne pas l’avoir fait plus tôt ? Tout simplement parce qu’aucun des fondateurs n’y avait pensé ! Dans son livre, Sheryl Sandberg se demande combien d’autres femmes ont déjà souffert en silence, sans jamais oser demander de traitement de faveur. D’autres femmes d’affaires racontent des histoires similaires et toutes se rejoignent sur un point : la longue absence des femmes dans le monde du travail a créé un environnement adapté par défaut aux besoins des hommes, et auquel les femmes ressentent le besoin de se conformer. En réalité, c’est l’environnement de travail qui devrait s’adapter. Certains ont choisi d’adopter la démarche inverse et de développer des concepts basés sur les femmes, à l’image de l’expérience réussie et toujours d’actualité de la Volvo YCC (« Your Concept Car »), qui rencontre un grand succès. C’est en 2004 que Volvo a lancé la YCC, une voiture conçue par des femmes, pour des femmes. Aujourd’hui, la marque affirme que certaines caractéristiques propres à la YCC ont été intégrées à ses utilitaires. Sur les quelque 50 nouvelles fonctionnalités dont est dotée la voiture, une vingtaine a été mise en production. Nombre d’entre elles reposent sur une technologie de pointe,

comme la transmission manuelle automatisée, le démarrage/arrêt automatique et le stationnement automatique. La YCC illustre bien le concept de design inclusif, ou lorsqu’adopter une approche innovante et bien pensée permet de répondre aux besoins d’un plus grand nombre de personnes.

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DES EMPLOYÉS DE L’INDUSTRIE DE LA CRÉATION SONT DES HOMMES Qu’il concerne des places de stationnement réservées ou des options de voiture, ce type de design inclusif de l’environnement de travail est de plus en plus courant et permet aux entreprises d’offrir un lieu de travail respectueux de l’égalité hommes-femmes. Dans une industrie de la création composée à 83 % d’hommes, la priorité est désormais d’inviter davantage de femmes autour de la table à dessin, afin de permettre ce design inclusif. Concevoir des bureaux en gardant ces difficultés à l’esprit afin de venir en aide aux femmes et hommes conjuguant vie professionnelle et vie privée sera capital dans tout lieu de travail moderne.


LA COHABITATION ENTRE INTROVERTIS ET EXTRAVERTIS La révolution silencieuse de l’environnement de travail

Concevoir pour la diversité

Sur le plan psychologique, un introverti est essentiellement centré sur son monde intérieur, à l’opposé de l’extraverti, qui est quant à lui principalement tourné sur son environnement social et physique. Ces définitions classiques de l’introverti timide et de l’extraverti très ouvert et sociable sont à l’origine de stéréotypes tenaces sur le lieu de travail. L’introverti est toutefois depuis quelque temps mieux compris et reconnu pour ses qualités. Être extraverti n’est plus considéré comme une nécessité pour être un bon collègue et de plus en plus d’entreprises s’adaptent à cette diversité pour faire en sorte que ces deux types de personnalité se sentent les bienvenus et créer une culture adaptée aux deux manières de penser. Dans son livre « La force des discrets », Susan Cain montre à quel point intravertis et extravertis sont différents. Les introvertis ont besoin de solitude et de tranquillité pour se concentrer sur une tâche, tandis que les extravertis peuvent se concentrer et sont plus efficaces dans des espaces ouverts propices aux bavardages et à l’énergie de groupe. Les environnements actuels favorisent souvent les personnalités confiantes et expressives, mais l’importance croissance des idées et le besoin accru de compétences diverses et variées ont fait prendre conscience aux entreprises de l’importance d’allier ces deux types de personnalité. S’assurer que le design réponde aussi bien aux besoins des introvertis qu’à ceux des extravertis devient donc capital, ce que confirme une enquête Leesman sur une base de données de plus de 70 000 personnes, selon laquelle le travail individuel sur bureau est considéré comme l’activité la plus importante. L’émergence de l’introverti, ou la reconnaissance accrue des personnes ayant besoin de se concentrer sur leur tâche différemment des extravertis, est un élément central pour passer outre la tendance favorisant les bureaux en espace ouvert. Le marché de l’ameublement a répondu à cette nouvelle donne par des produits plus élaborés sur le plan acoustique. Ces solutions temporaires ne sauraient toutefois résoudre les problèmes de diversité aussi efficacement que le design inclusif intelligent.

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→ NOUS EN PARLONS SOUVENT ENTRE NOUS, NOUS SOMMES UNE ENTREPRISE D’INTROVERTIS. NOUS ASSISTONS AUJOURD’HUI AU RETOUR DES INTROVERTIS. SUSAN CAIN INSISTE SUR LE FAIT QUE LES LIEUX DE TRAVAIL MODERNES SONT DEPUIS LONGTEMPS DIRIGÉS PAR LES EXTRAVERTIS. RÉSULTAT ? DES ESPACES OUVERTS DANS LESQUELS LA COLLABORATION DÉBUTE INSTANTANÉMENT, SANS PÉRIODE D’ISOLEMENT. IL EST ÉVIDENT QU’UNE MAJORITÉ DES EMPLOYÉS ASPIRENT À CES MOMENTS DE SOLITUDE. ILS SOUHAITENT POUVOIR ÊTRE SEULS, S’ASSEOIR POUR RÉFLÉCHIR ET LIRE, ET PRENDRE LE TEMPS DE LAISSER LIBRE COURS À LEUR CRÉATIVITÉ AVANT DE PARTAGER LE FRUIT DE LEUR RÉFLEXION, DE COLLABORER ET DE PRENDRE PART À UN PROJET. ← NICKLAS LUNDBLAD, DIRECTEUR DES POLITIQUES PUBLIQUES & RELATIONS GOUVERNEMENTALES, GOOGLE


→ LE DESIGN NE SE RÉSUME PAS À LA CRÉATION DE PRODUITS OU D’OBJETS. C’EST AUSSI UN ÉTAT D’ESPRIT, QUI NOUS AIDE À ORGANISER NOTRE JOURNÉE OU À ALLER D’UN POINT A À UN POINT B. LE DESIGN REPOSE DÉSORMAIS MOINS SUR LA CRÉATION DE NOUVEAUX PRODUITS PHYSIQUES, ET DAVANTAGE SUR L’AMÉLIORATION DES PRODUITS EXISTANTS. ← JOHANNA AGERMAN ROSS, RÉDACTRICE EN CHEF, DISEGNO MAGAZINE

Concevoir pour la diversité

ÊTRE EXTRAVERTI N’EST PLUS CONSIDÉRÉ COMME UNE NÉCESSITÉ POUR ÊTRE UN BON COLLÈGUE.

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UN DESIGN INCLUSIF POUR UN MONDE VARIÉ

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Ces trois évolutions majeures, dans un contexte de mondialisation de la main-d’œuvre, créent un réel melting-pot culturel. Cette diversité génère une nouvelle demande de design adapté à tous les types de différences physiques et renforce la nécessité d’un design inclusif. Le centre de recherche et développement IDRC de l’université de l’EADO définit ainsi le design inclusif : un design tenant compte de toute la diversité humaine en termes de capacité, de langue, de culture, de genre, d’âge et de tout autre type de caractéristique particulière. D’après les données issues du Leesman Index, seuls 54 % des plus de 70 000 sondés estiment que leur lieu de travail est conçu de façon à favoriser leur productivité : la preuve qu’il est plus que temps de concevoir plus intelligemment pour répondre à des besoins divers. Il faut tout d’abord prendre conscience de la nécessité d’un design inclusif, et l’accepter ; vient ensuite la phase de mise en place et avec elle la création d’un environnement de travail plus divers, et donc plus innovant, productif et durable.

PRINCIPE N° 1 Penser le design pour une utilisation simple et intuitive. Créer une expérience agréable pour l’utilisateur, ne nécessitant pas de se reporter constamment au mode d’emploi.

PRINCIPE N° 3 Faire preuve d’empathie. Se mettre à la place des autres. Des personnes différentes auront une expérience différente du produit – essayer de voir les choses de leur point de vue.

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PRINCIPE N° 2 Prendre en compte la population dans son intégralité, pas seulement les personnes se situant dans la moyenne. Inclure le plus large spectre d’âges, de compétences et de genres.

PRINCIPE N° 4 L’ergonomie est à la fois émotionnelle et fonctionnelle. Le ressenti des utilisateurs est aussi important que l’efficacité du produit.


PRINCIPE N° 5 Penser le design pour une utilisation flexible. Tout est connecté. Le design doit donc anticiper cette polyvalence.

PRINCIPE N° 6 Ne jamais négliger la qualité du design, indépendamment des principes précédents. L’esthétique est essentielle pour éviter toute stigmatisation.

CAPELLA : UN SIÈGE INTUITIF

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Un siège n’est jamais juste un simple siège. Et il est possible de s’asseoir de mille et une façons. Les bureaux actuels doivent relever de nombreux défis et un siège de travail doit être à la fois convivial, confortable, robuste et doté de fonctions ergonomiques avancées. Dans ce rapport des tendances, nous évoquons l’importance du design inclusif, qui constitue pour nous une stratégie globale. La conception de notre nouvelle gamme de sièges Capella repose sur un design inclusif afin de répondre aux besoins d’employés de plus en plus divers. Le premier principe de Kinnarps en matière de design inclusif consiste à « penser le design pour une utilisation simple et intuitive » et à « créer une expérience agréable pour l’utilisateur, ne nécessitant pas de se reporter constamment au mode d’emploi ». Le siège Capella a été conçu pour une telle utilisation intuitive. Il est d’ailleurs doté de leviers, placés de façon à permettre une manipulation intuitive et séquentielle. Anna-Lisa Osvalder, experte et professeur à l’École polytechnique Chalmers de Göteborg (Suède), a participé à la conception du siège et au positionnement des leviers. Ce type de conception intuitive améliore la position assise dans son ensemble, et offre également une certaine flexibilité au siège qui s’adapte alors parfaitement aux bureaux basés sur l’activité dans lesquels il est utilisé par plusieurs employés.

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MARIER LE CORPS ET L’ESPRIT

COMMENT NOTRE ENVIRONNEMENT DE TRAVAIL S’ADAPTE À NOS CORPS ET NOS ESPRITS



La santé est notre bien le plus précieux, dit-on. Aujourd’hui, nos processus cognitifs, et la diversité qui les caractérise, sont de plus en plus considérés comme tout aussi importants que nos besoins physiques sur le lieu de travail. Les recherches en psychologie nous incitent à accorder autant d’importance à nos esprits qu’à nos corps lors du processus de conception, ce qui ouvre de nombreuses perspectives pour la création d’un environnement à la fois sain et efficace.

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LE BIEN-ÊTRE, NOUVEAU GAGE DE DURABILITÉ Des environnements professionnels durables sur le plan psychologique pour assurer la pérennité de la société De multiples éléments composent l’espace de travail moderne, qui n’a plus grand-chose à voir avec l’image que l’on se faisait autrefois du bureau idéal. De nos jours, une approche plus flexible, tenant compte davantage des aspects psychologiques et culturels, a un impact positif sur la production, l’innovation et les résultats non seulement des entreprises, mais aussi de la société dans son ensemble.

SANDRA GAUER, CONSULTANTE EN GESTION DU CHANGEMENT & FONDATRICE, PERSPECTIVES GMBH La durabilité a gagné en sens comme composante de la culture d’entreprise et inclut désormais tant la santé physique que la santé mentale des employés, auxquels elle est étroitement liée. Autrement dit, le bien-être constitue un nouveau gage de durabilité, et assurer notre durabilité au travail, et donc également dans nos vies, est un défi stratégique pour tous les employés d’une entreprise, et plus particulièrement encore pour ceux chargés des décisions en matière de design. Mettre l’accent sur le bien-être du personnel peut par exemple se traduire par un investissement dans des bureaux réglables en hauteur ; des études ont en effet montré que changer de position et ne pas rester immobile pendant les heures permettait d’être en meilleure santé. Les aspects psychologiques sont également pris en compte, et certaines zones sont par exemple conçues avec différentes options d’éclairage et de son permettant de modifier l’ambiance. Cette valorisation du bien-être au sein de l’environnement professionnel provient, entre autres, des changements démographiques et des nouveaux besoins et nouvelles

Marier le corps et l’esprit

→ MALGRÉ NOTRE ENVIE RÉELLE DE CRÉER, D’INNOVER ET DE MODIFIER NOTRE FAÇON DE TRAVAILLER, ET DE VIVRE, NOUS DEVONS VEILLER À NE PAS SURESTIMER NOTRE CAPACITÉ À APPLIQUER CES CHANGEMENTS RAPIDEMENT. ←

attentes qui en découlent. Le nouveau visage démographique et certains facteurs tels que les heures travaillées en dehors du bureau, les collaborations mondiales et un travail davantage basé sur des projets sont autant d’obstacles au bien-être des employés, en particulier en ce qui concerne le design. Les décorateurs d’intérieur doivent comprendre les états d’esprit divers de la population à laquelle ils s’adressent afin de créer une variété d’espaces. Prendre conscience que les grands esprits ne se rencontrent pas toujours – et qu’ils travaillent différemment – est essentiel pour concevoir les lieux de travail de demain.

PERSPECTIVES EN MATIÈRE DE DESIGN UN FACTEUR DE MOUVEMENT L’activité physique renforce l’esprit, et l’architecture d’intérieur peut être conçue de façon à encourager les employés à se déplacer d’un endroit à l’autre. Placer des équipements dans des espaces différents permet de créer des lieux de travail incitant les employés à bouger. UNE ATMOSPHÈRE ADAPTÉE À CHAQUE TÂCHE Un environnement professionnel souple offre des espaces variés adaptés aux besoins divers des utilisateurs. Un endroit peut par exemple être calme, avec une lumière d’ambiance tamisée, des couleurs douces et un éclairage individuel, tandis que d’autres peuvent être spacieux et très lumineux, avec des décorations tape-à-l’œil ou de la musique de fond. Les employés choisissent alors l’espace adapté à la tâche à effectuer en fonction d’indicateurs psychologiques issus de l’environnement.

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L’ENVIRONNEMENT DE TRAVAIL BIENVEILLANT Penser le design pour une meilleure perception de l’environnement

Marier le corps et l’esprit

Les gouvernements et autorités sanitaires constatent le coût réel pour la collectivité de problèmes de santé tels que l’obésité, le tabagisme et l’alcoolisme, et adoptent donc des lois visant à contrer les conséquences négatives de ces mauvaises habitudes. Les secteurs public et privé font maintenant de même et opèrent des changements positifs pour leurs employés, tant au niveau physiologique que psychologique. Il s’agit désormais d’offrir le plus d’options possibles en matière de design afin d’améliorer la perception de l’environnement. Cette nouvelle perspective pour l’entreprise ne se limite pas à des principes d’ergonomie physique et examine, entre autres, la manière dont le design peut permettre de créer des espaces plus ou moins stressants. Échouer dans ce domaine peut en effet engendrer des symptômes physiques aux conséquences économiques négatives pour tous. Des études menées en Scandinavie ont par exemple démontré l’existence d’un lien entre l’environnement de travail et certains problèmes physiques, sur la base du nombre de jours de congé maladie déclarés par les entreprises et

PERSPECTIVES EN MATIÈRE DE DESIGN UNE QUESTION DE PRÉFÉRENCE Commencez par définir les types d’interaction et leur dynamique. Laissez ensuite les employés choisir leurs interactions et environnements préférés. La difficulté ici est de penser la conception en termes de choix pour l’utilisateur, et pas d’application unique.

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industries de plusieurs secteurs. Les aspects psychologiques de l’aménagement du lieu de travail pourraient bien être plus importants encore que les aspects physiologiques, et ce, à un point que nous étions loin d’imaginer. Mais comment concevoir un environnement de travail du point de vue psychologique ? Sur quoi mettre l’accent en matière d’intimité acoustique et visuelle ? Pour répondre à ces questions, des recherches sont actuellement menées afin de déterminer le niveau maximal de distraction ne nuisant pas à la productivité et l’impact de certains éléments (éclairage, proximité avec les collègues) sur l’efficacité. Elles se penchent notamment sur le domaine de la proxémique, afin de parfaitement comprendre nos actions et réactions face aux objets et personnes qui nous entourent. Depuis la publication de l’article « Effects of the self-schema on perception of space at work » établissant un lien entre design et psychologie au bureau et offrant un modèle théorique reliant perception environnementale, bonheur au travail et conscience de soi, une véritable réflexion sur le design s’est développée visant à créer des lieux de travail plus sains sur le plan psychologique. À l’avenir, le design servira à renforcer l’identité et l’estime de soi et à accroître le sentiment d’appartenance et de groupe au sein des organisations. L’ergonomie psychologique est un aspect relativement nouveau de la conception des lieux de travail, et la reconnaissance et la prise en compte des différentes personnalités cohabitant au sein d’une même entreprise s’avère être une stratégie payante en matière de bien-être.

→ PLUS LE CHOIX EST VASTE ET DE QUALITÉ, PLUS LES EMPLOYÉS SERONT EFFICACES.

UN DESIGN ADAPTÉ AU FONCTIONNEMENT DU CERVEAU

TOUT EST UNE QUESTION D’ÉQUILIBRE.

La conception des lieux de travail de demain devra tenir compte de la recherche contemporaine sur le fonctionnement du cerveau et l’effet qu’a sur lui notre environnement, afin de mieux venir en aide à nos employés.

NOUS SOMMES TOUS UNIQUES PAR NATURE. ←

CHACUN A DES BESOINS DIFFÉRENTS CAR

LOUIS LHOEST, PARTENAIRE, VELDHOEN + COMPANY


UN BUREAU COMME MARQUEUR D’UNE DÉCENNIE ?

1989 marqua non seulement la fin d’une décennie particulièrement mémorable pour ses affaires et ses jeunes cadres dynamiques, mais également le début de la « décennie de l’environnement de travail ». Les élections générales suédoises étaient terminées et des opportunités apparaissaient de faire évoluer le marché de l’emploi. Le moment était donc venu de présenter les résultats du projet de recherche et développement mené par Kinnarps et Fagerhults : le projet Decade.

Marier le corps et l’esprit

L’objectif du projet Decade était de concevoir un meuble permettant de changer d’espace et de position de travail plusieurs fois par jour. Jusqu’alors, les postes de travail étaient tellement compacts que les employés pouvaient ne pas les quitter ou même se lever de la journée. Éviter une position assise prolongée nous apparaît désormais comme l’une des bases de l’ergonomie pour protéger notre santé, mais l’idée était nouvelle à l’époque. L’innovation principale de ce projet consistait donc en un bureau pouvant être réglé en hauteur à la convenance des employés. Douze secondes suffisaient pour lever le bureau à sa hauteur maximale de 117 cm, d’abord à l’aide d’une manivelle manuelle, puis d’un moteur électrique. Et cela était possible avec un poids pouvant atteindre 120 kg, la preuve que nos ordinateurs se sont bien allégés depuis. Il était désormais possible de choisir de s’asseoir ou de rester debout. Un pas de géant dans la création de lieux de travail plus durables sur le plan de la santé. Le projet Decade restera comme un événement majeur de l’histoire de Kinnarps. Il a ouvert la voie aux bureaux réglables en hauteur, améliorant ainsi la santé dans les bureaux du monde entier.

→ AUJOURD’HUI, TOUTE GAMME DE BUREAUX DIGNE DE CE NOM DOIT COMPTER UN MODÈLE RÉGLABLE EN HAUTEUR, MAIS CE N’ÉTAIT PAS LE CAS IL Y A 25 ANS, LORSQUE KINNARPS A INNOVÉ EN LANÇANT SON PREMIER BUREAU RÉGLABLE EN HAUTEUR. UNE VÉRITABLE RÉVOLUTION À L’ÉPOQUE, QUI NE MANQUA PAS DE FAIRE DÉBAT. ← ELISABETH SLUNGE, RESPONSABLE MARQUE/ GAMME/DESIGN, KINNARPS

La gamme Decade fut lancée en 1989. Une véritable révolution à l’époque.

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Marier le corps et l’esprit

COMBATTRE LA FATIGUE TECHNOLOGIQUE

Des cerveaux en permanence sur le qui-vive Apprendre à contrôler la technologie qui nous entoure est essentiel dans un environnement professionnel durable. La façon dont les outils numériques sont entrés dans nos vies n’est pas toujours considérée comme une chose positive. En étant constamment connectés, nous nous exposons à l’effet potentiellement intrusif et néfaste des notifications de nos appareils intelligents sur notre horloge biologique, et plus particulièrement sur nos cycles de sommeil et notre faculté à nous concentrer. La technologie est addictive. Si nous ne la contrôlons pas, nous risquons de souffrir de « fatigue technologique », notre esprit étant constamment sollicité. C’est sans doute cet aspect addictif de la technologie qui pose le plus problème quand il s’agit de trouver un équilibre entre

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→ NOUS DEVONS TROUVER UN MOYEN DE NOUS CONCENTRER SANS AUCUNE DISTRACTION. S’ISOLER DANS UN LOCAL FERMÉ POUR SE CONCENTRER SUR UNE TÂCHE ET EMMENER SON TÉLÉPHONE AVEC SOI N’A AUCUN SENS. IL S’AGIT AVANT TOUT D’UNE QUESTION DE COMPORTEMENTS, ET DONC DE DÉCISIONS PERSONNELLES, MAIS L’ENVIRONNEMENT DE TRAVAIL DEVRAIT DAVANTAGE INCITER À FAIRE LES BONS CHOIX. ← LOUIS LHOEST, PARTENAIRE, VELDHOEN + COMPANY vie professionnelle et vie privée, puisque notre messagerie ne nous quitte jamais via nos smartphones et ordinateurs portables. En Scandinavie, le problème de la fatigue technologique a fait l’objet de solutions diverses. TeliaSonera, le principal opérateur de télécommunications de Suède, a par exemple lancé en 2011 un programme téléchargeable gratuit permettant aux clients de désactiver la connexion Internet pendant une durée donnée. TeliaSonera a également mis en place des zones sans Internet dans plusieurs espaces publics de Suède pendant les vacances. À l’échelle mondiale, une multitude d’applications « bien-être » pour smartphone existent, offrant des fonctions allant de la méditation à la fermeture de toutes les applications afin de favoriser les moments de solitude et de paix auxquels nous aspirons tous.

La fatigue technologique crée des tensions entre vie privée et vie professionnelle, mais ce n’est pas tout : l’omniprésence de la technologie constitue également un problème durant les heures de travail. Les fenêtres contextuelles annonçant la réception d’un nouveau message, les messages instantanés, les applications pour smartphone et les réseaux sociaux sont autant de distractions qui nous empêchent de nous concentrer sur nos tâches professionnelles ou interrompent nos réunions. Étonnamment, ce problème touche aussi bien certains des plus grands experts en informatique que l’utilisateur moyen. Chez Google par exemple, les réunions sont désormais prévues avec ou sans ordinateur portable et la prise de notes manuelle est préférée à l’écriture numérique.


PERSPECTIVES EN MATIÈRE DE DESIGN LE RETOUR DE L’ANALOGIQUE Le design doit considérer le numérique et l’analogique comme égaux, et nécessaires au bon fonctionnement d’un lieu de travail. Les entreprises peuvent par exemple prévoir des espaces sans technologie où leurs employés puissent se réunir ou travailler dans le calme, sans interruption numérique. Ces espaces peuvent alors être conçus de façon à encourager des activités analogiques telles que le dessin, l’écriture manuelle ou la lecture. CRÉER UN SENTIMENT PAR LA VUE ET LE TOUCHER Il peut être intéressant de créer des espaces hétérogènes à l’aide de formes et de matériaux différents pour communiquer soit une fonction analogique, soit une fonction numérique, et ainsi aider nos cerveaux à comprendre cette fonction plus facilement. Vous pouvez par exemple concevoir des objets high-tech qui dégagent une impression de complexité et des objets de base qui respirent le naturel et la simplicité, pour susciter chez l’utilisateur l’intuition adéquate.

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Nous savons maintenant que la fatigue technologique est un véritable problème qu’il est particulièrement difficile de résoudre et dont les conséquences sont réelles. Il n’est donc pas surprenant que certains employeurs aient décidé de concevoir des lieux de travail dans lesquels la technologie est moins visible et la décoration davantage inspirée de nos maisons. Il ne s’agit pas de rejeter le numérique au profit de l’analogique, mais bien de comprendre que le rythme de travail requiert des pratiques et des environnements adaptés à une variation des processus de réflexion. Les concepteurs d’espaces de travail doivent donc veiller à l’équilibre entre les différents produits et environnements afin de permettre une plus grande hétérogénéité moins propice à la fatigue technologique.

→ JE N’EMPORTE PLUS MON ORDINATEUR LORS DE MES RÉUNIONS. JE ME CONTENTE EN GÉNÉRAL DE CARNETS. JE TROUVE QU’ÉCRIRE À LA MAIN SUR DU PAPIER INSPIRE UN STYLE COGNITIF DIFFÉRENT DE L’ÉCRITURE SUR CLAVIER. ET JE PENSE QUE C’EST UN SENTIMENT PARTAGÉ PAR LA PLUPART DE MES COLLÈGUES CHEZ GOOGLE. ← NICKLAS LUNDBLAD, DIRECTEUR DES POLITIQUES PUBLIQUES & RELATIONS GOUVERNEMENTALES, GOOGLE

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L’ESPACE DE TRAVAIL HUMAIN

21% SOLITUDE

des jeunes considèrent la solitude comme l’une de leurs préoccupations majeures

Alors que les entreprises permettent à leurs employés de travailler de façon plus flexible grâce aux outils numériques aux possibilités multiples, il est moins pertinent de concevoir les environnements de travail sur la base de processus de contrôle et de commande. La rationalité de la gestion par le design évolue rapidement et l’une des principales fonctions des locaux d’entreprise est désormais d’offrir un environnement offrant l’aide nécessaire aux employés pour effectuer leurs tâches. Le design doit être davantage axé sur l’humain et permettre à chacun d’opter pour la méthode la plus adaptée à ses objectifs, grâce à des solutions répondant à ses besoins, en particulier sur le plan psychologique. Le bureau est depuis toujours un lieu de rencontre important. S’il est conçu correctement, c’est également un endroit où l’on peut collaborer, faire partie d’une équipe, se sentir comme chez soi et voir du monde.

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NOUS SOMMES DES ÊTRES HUMAINS – ET NOUS AVONS BESOIN DE NOUS RETROUVER Les espaces de bureau, à une époque où nous pouvons travailler partout et n’importe où, sont toujours des pôles pour la culture d’entreprise. Le travail en tant qu’activité sociale devient également important pour préserver la santé et le bonheur du personnel. Cela est particulièrement vrai pour les plus jeunes, puisque 21 % des 18-24 ans considèrent la solitude comme l’une de leurs préoccupations majeures. Se sentir comme chez soi avec des artéfacts propres au groupe est important et favorise l’engagement et la culture d’entreprise. Et c’est la libre circulation des idées qui permet à l’organisation de se développer. Alors que les employés se rendent de façon de plus en plus ponctuelle sur leur lieu de travail et que la frontière entre vie professionnelle et vie privée est de plus en plus floue, il semble inutile, voire peu souhaitable, que les bureaux dégagent une ambiance aseptisée et industrielle. Si nous


pouvons travailler efficacement chez nous, dans des hôtels ou des cafés, il semble logique d’aménager nos bureaux de façon similaire. Il ne s’agit toutefois pas de déplacer le bureau dans les foyers, mais plutôt de faire en sorte que les espaces de travail soient chaleureux et s’inspirent des intérieurs domestiques, avec des touches esthétiques. Les lieux de travail doivent par ailleurs offrir le même confort que la maison. Ils perdent donc progressivement leur côté aseptisé pour prendre davantage en compte le bien-être des employés et favoriser la productivité et la créativité.

WAYNE HEMINGWAY, FONDATEUR, HEMINGWAYDESIGN relever ce défi. Ce type d’aménagement intérieur peut par ailleurs renforcer le sentiment d’appartenance à la « communauté », un élément important des valeurs de marque d’une entreprise. Ce sont ces valeurs qui font de nous ce que nous sommes au travail. Nous venons travailler pour faire partie d’une communauté et pas juste pour produire quelque chose ; c’est ce sentiment qui nous motive. Et les gens continuent de travailler dans des bureaux, après tout. Sur les plus de 70 000 sondés lors d’une enquête Leesman, 17 % travaillaient depuis leur domicile. Il n’est donc sans doute pas faux d’affirmer que « la culture mange de la stratégie au

petit-déjeuner ». Le contexte social d’un bureau dépend fortement de son design. Une culture d’entreprise vivante commence donc par des employés enthousiastes et motivés par la décoration de leurs bureaux, qu’il s’agisse de choix collectifs ou individuels La meilleure façon de créer une culture est de concevoir un lieu de travail qui soit bien plus qu’un simple lieu de travail, un lieu pour travailler adapté à la nature humaine. C’est ainsi que nous pouvons favoriser un meilleur équilibre et une réelle séparation entre vie professionnelle et vie privée, tout en assurant un lien flexible et sain entre les deux.

PERSPECTIVES EN MATIÈRE DE DESIGN UNE NOUVELLE DEVISE EN MATIÈRE DE DESIGN Dans un nouvel espace de travail hétérogène, le mobilier peut être conçu de façon à convenir aussi bien au bureau qu’à la maison. La devise de tout créateur de mobilier de bureau devrait être : « voudriez-vous de ce meuble chez vous ? ».

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Marier le corps et l’esprit

Un autre point important lorsque l’on souhaite concevoir un espace de travail plus humain est de s’assurer que le flux de travail est optimisé de façon durable et que les choix en matière de design tiennent compte des sens, à savoir le toucher, la vue, l’ouïe, l’odorat, voire même le goût. L’approche de la conception du lieu de travail basée sur les cinq sens, similaire à celle du marketing sensoriel, devient une partie intégrante des stratégies de planification de l’espace professionnel. Le concept d’environnement de travail basé sur l’activité, consistant à adapter les espaces de travail aux tâches de chacun, se développe et permettra de

→ CONTRAIREMENT À CE QUE BEAUCOUP PENSENT, CERTAINS CONTINUENT DE PENSER QUE TOUT LE MONDE RÊVE DE TRAVAILLER À LA MAISON ET QUE LE BUREAU EST UN CONCEPT DÉPASSÉ. MAIS C’EST BIEN AU BUREAU QUE LES GENS ESTIMENT ÊTRE À LEUR PLACE ET VEULENT TRAVAILLER LE PLUS, MÊME S’ILS NE SOUHAITENT PAS POUR AUTANT Y PASSER CINQ JOURS PAR SEMAINE. IL S’AGIT DE TROUVER L’ÉQUILIBRE ENTRE POUVOIR TRAVAILLER PARTOUT, UN AVANTAGE CERTAIN RENDU POSSIBLE PAR LA TECHNOLOGIE MODERNE, ET POUVOIR S’ASSEOIR À SON BUREAU ET S’AMUSER ET DISCUTER AVEC LES COLLÈGUES, EN PERSONNE. ←



TECHITURE COMMENT ANALOGIQUE ET N U M É R I Q U E FAÇONNENT NOTRE NOUVEL ENVIRONNEMENT DE TRAVAIL


L’interaction entre architecture et technologie constitue un moteur essentiel de la prochaine grande nouvelle tendance en matière de design. Des solutions numériques favorisant un travail plus fluide existent déjà et leurs utilisateurs bénéficieront d’un avantage certain dans la décennie à venir marquée par la diversité. Nous vivons à l’ère de Techiture et l’environnement de travail de demain devra être axé sur l’homme, et non plus sur la machine.

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LA DISPARITION DU BUREAU D’un design du lieu de travail axé sur la technologie à l’utilisation d’une technologie axée sur le design au travail La technologie a autrefois obligé à utiliser et posséder du matériel informatique physique. Elle nous a par ailleurs amenés à repenser notre environnement autour d’elle, modifiant ainsi nos modes de travail et de vie. L’arrivée de la télévision dans nos foyers nous a par exemple obligés à aménager différemment notre intérieur, certains choisissant de la cacher dans des meubles, d’autres de créer des meubles spéciaux – quasiment des autels – pour la mettre en valeur, d’autres encore de la placer discrètement sur un mur.

PAUL WHEELER, RESPONSABLE DE LA STRATÉGIE RELATIVE AUX ESPACES DE TRAVAIL, HEWLETT PACKARD

Les espaces professionnels de demain fonctionneront totalement différemment et n’auront plus rien à voir avec ce qu’ils étaient jusqu’à maintenant. L’esthétique, l’agencement et la décoration classiques des espaces de travail tels que nous les connaissions depuis 50 ans deviennent obsolètes avec l’avènement des nouvelles technologies. Les besoins pour assurer la productivité des employés ont changé,et la conception de ce que nous appelons un bureau doit changer radicalement pour répondre à cette évolution.

LA TECHNOLOGIE EST AUJOURD’HUI VRAIMENT DEVENUE UNE FORCE INVISIBLE

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Techiture

Le matériel informatique s’est toutefois intégré plus harmonieusement dans nos bureaux que dans nos maisons. Citons par exemple les systèmes automatiques à câbles des années 1980 et 1990 ou encore le bureau d’angle adapté à la profondeur des écrans cathodiques. On observe également des points communs entre les infrastructures IT et la façon dont nos bureaux sont agencés, ainsi qu’entre la décoration d’intérieur formelle et la forme des ordinateurs et des circuits qu’ils hébergent, même si ces ressemblances sont moins frappantes.

→ SI VOUS REGARDEZ UN BÂTIMENT GIGANTESQUE COMME LE ONE CANADA SQUARE DE LONDRES, PRÊTEZ UNE ATTENTION PARTICULIÈRE AUX MONTANTS INTERMÉDIAIRES. CE SONT EUX QUI DÉTERMINENT L’ASPECT ESTHÉTIQUE DE CET IMMENSE IMMEUBLE CAR ILS SONT CONÇUS EN FONCTION DE LA TAILLE D’UN POSTE DE TRAVAIL. ET LA TAILLE D’UN POSTE DE TRAVAIL EST À SON TOUR DÉTERMINÉE PAR LA NÉCESSITÉ D’Y PLACER UN ÉCRAN D’ORDINATEUR OU UN ORDINATEUR PORTABLE. JE PENSE QUE NOUS SERONS BEAUCOUP PLUS LIBRES EN MATIÈRE DE DESIGN À L’AVENIR, TANT AU NIVEAU DE L’AMEUBLEMENT QUE DE L’ARCHITECTURE, OU QU’IL S’AGISSE DE RECRÉER ET DE RÉTABLIR DES PROCESSUS DE TRAVAIL OU DES CHAÎNES D’APPROVISIONNEMENT.←


Techiture

Sur le plan individuel, les employés attendront désormais toujours plus de leur lieu de travail en termes d’ambiance et de décoration, mais également de technologie disponible, puisque jamais l’offre en la matière n’a été aussi vaste. Pour répondre à ces exigences croissantes, certaines entreprises ont décidé d’opter pour la tendance AVEC (« apportez votre équipement personnel de communication ») et de permettre à leurs employés d’utiliser les technologies numériques dont ils ont besoin pour travailler, leur allouant même un budget pour acheter leur propre équipement Ceci implique de faire preuve d’ouverture d’esprit en matière d’architecture et de créer des solutions diverses d’aménagement de l’espace

de travail. Les environnements de travail étaient autrefois conçus avant tout de façon à répondre aux exigences de la technologie. Il est aujourd’hui possible d’allier esthétique et outils numériques par le biais de solutions intelligentes et plus élégantes. Le lieu de travail s’inspire désormais également davantage du marché domestique et les entreprises peuvent fixer leurs propres exigences en matière de design plutôt que de devoir aménager leurs bureaux en fonction de la technologie. La technologie imposait en effet autrefois une certaine conception aux lieux de travail, et une version édulcorée s’était installée dans nos foyers. Nous assistons désormais à l’arrivée dans notre espace professionnel des technologies domestiques et

de leur design. Pour faire simple, nous pouvons maintenant baser la décoration d’intérieur sur des critères de design technologique, et non plus sur des exigences imposées par la technologie.

OUVREZ-VOUS À UNE VARIÉTÉ DE SOLUTIONS D’ESPACES DE TRAVAIL

Exigences technologiques et design :

UN EXEMPLE ÉLOQUENT ISSU DU MONDE DOMESTIQUE Pour se projeter dans l’avenir, il faut parfois savoir se plonger dans l’histoire. Lorsque les premières télévisions sont arrivées dans nos foyers dans les années 1950, nous faisions en sorte qu’elles ressemblent à des meubles ordinaires, et les utilisions même aussi parfois comme buffets ou meubles de bar. Nous nous sommes ensuite habitués à la présence de la technologie dans nos foyers, et les produits que nous achetions, ou que nous souhaitions acheter, sont alors devenus des objets de décoration à part entière. Plutôt que d’être dissimulée dans le salon, la télévision est devenue l’élément central du séjour, entourée de trois fauteuils ou canapés. Le salon a changé de rôle et le téléviseur de look avec, dans les années 1970, de nouvelles formes, une couleur noire et une configuration carrée résolument envahissante. Dans les années 1980, la télécommande de la télévision est devenue l’objet du pouvoir à la maison. À l’époque, elle plaisait d’autant plus qu’elle comptait beaucoup de boutons et de fonctions. Les écrans se sont ensuite affinés et ont été intégrés dans nos murs, et nous nous sommes mis à préférer que nos appareils aient le moins de boutons possible. Nos lieux de travail ont également vu leur design évoluer en fonction des matériels informatiques vecteurs de technologie. Nous préférons actuellement les équipements numériques minimalistes, et plus la technologie est avancée, plus son design paraît simple dans nos maisons et lieux de travail.

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PERSPECTIVES EN MATIÈRE DE DESIGN LIBÉREZ L’ESPACE DE TRAVAIL !

→ À L’ÈRE DE LA MONDIALISATION OÙ TOUT EST NUMÉRIQUE, LE LIEU DE TRAVAIL EST L’UN DES ESPACES LES PLUS FASCINANTS SUR LE PLAN ARCHITECTURAL. TRAVAIL ET VIE PRIVÉE S’ENTREMÊLENT PLUS QUE JAMAIS, ET LES GROUPES TRAVAILLANT DANS LES DOMAINES DE L’ARCHITECTURE, DU DESIGN ET DE LA TECHNOLOGIE – LES ENTREPRISES INDIVIDUELLES COMME LES GÉANTS INDUSTRIELS – DOIVENT COLLABORER AFIN DE CONCEVOIR L’ENVIRONNEMENT DE TRAVAIL LE PLUS ADÉQUAT POSSIBLE.←

La conception architecturale de nos espaces de travail sera plus libre et ne dépendra plus de critères rigides comme la surface au sol, les niveaux d’éclairage, la climatisation et le câblage de données. LA PAROLE N’EST PLUS AU MATÉRIEL INFORMATIQUE Le design des espaces professionnels intérieurs peut être abordé différemment, et uniquement basé sur ce que font les employés et la façon dont ils communiquent, et non plus sur les exigences liées au matériel informatique et aux infrastructures. UN RELOOKING TECHNOLOGIQUE POUR VOTRE BUREAU Le « style bureau » classique, largement influencé par la technologie et les structures de gestion, n’a plus lieu d’être. Les produits destinés à l’environnement professionnel n’auront plus à se distinguer sur le plan esthétique de ceux destinés aux hôtels, restaurants, bars ou maisons.

JACOB SAHLQVIST, PRÉSIDENT, SWEDISH ASSOCIATION OF ARCHITECTS

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Illustration : Boris Müller

→ LES ENTREPRISES GAGNENT DE PLUS EN PLUS À EXPLORER LES DONNÉES ET À COMPRENDRE LEURS SCHÉMAS. POUVOIR VISUALISER CES DONNÉES EST ALORS PRIMORDIAL. MAIS QUEL TYPE D’ESPACES DE VISUALISATION CRÉER ? ET COMMENT LES CRÉER POUR QUE TOUS LES PARTICIPANTS PUISSENT DÉBATTRE ET DISCUTER ET NE DOIVENT PAS SE CONTENTER D’ÉCOUTER ? UNE PRÉSENTATION SANS AUCUNE INTERACTIVITÉ À UN SEUL INTERVENANT, LORS DE LAQUELLE L’ASSISTANCE A L’IMPRESSION DE SE FAIRE SERMONNER, N’A AUCUN INTÉRÊT. CE QUI EST INTÉRESSANT, C’EST DE POUVOIR DISCUTER ET MANIER LES INFORMATIONS. CONCEVOIR DES ENVIRONNEMENTS INTERACTIFS OÙ CELA EST POSSIBLE N’EST PAS FACILE. ← NICKLAS LUNDBLAD, DIRECTEUR DES POLITIQUES PUBLIQUES & RELATIONS GOUVERNEMENTALES, GOOGLE

RÉUNIONS SANS FRONTIÈRES

espaces destinés à la visualisation et à la collaboration à l’ère numérique des Big Data.

Concevoir des espaces de visualisation et de collaboration à l’ère des Big Data

Abordons tout d’abord brièvement le concept de Big Data du point de vue des designers. Les Big Data, terme désignant tout ensemble de données devenant tellement volumineux et complexe qu’il en devient difficile à travailler avec des outils classiques, ouvrent un large champ de possibilités pour un designer. Ces données peuvent non seulement servir à concevoir de nouveaux produits, mais le processus d’analyse, de compréhension et de conception peut également changer radicalement si des espaces de travail et outils spéciaux lui sont dédiés.

L’activité professionnelle a toujours été basée sur les personnes, sur l’échanges d’idées. Sans réunions, les idées ne quitteraient la plupart du temps jamais l’imaginaire de leur auteur, au lieu de prendre vie, voire de changer le monde. Les écrans sont aujourd’hui peutêtre nos outils les plus précieux pour organiser et faciliter nos réunions, et ils sont également la clé pour créer un flux de travail fluide permettant de trouver la meilleure idée et de la développer. Les salles de réunion traditionnelles laissent progressivement la place aux

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Les Big Data ne sont toutefois pas sans danger. En raison de la quantité

d’informations qu’elles contiennent, les Big Data peuvent semer la confusion, voire permettre la manipulation, conduisant inévitablement à un design inadapté. Il est donc essentiel de disposer d’outils et d’espaces adaptés à cette nouvelle approche du design. Dans cette équation, les écrans offriront non seulement d’abord un environnement de réflexion riche aux concepteurs de lieux de travail, mais leur permettront également ensuite de concevoir pour nous tous de tels espaces propices à la réflexion. Quelles sont donc les conséquences pour les salles de réunion de demain ? La salle de réunion classique est équipée d’un écran de projection d’un côté, de tableaux blancs de l’autre et d’une table au milieu. L’espace de collaboration est alors centré


sur la table, autour de laquelle sont disposées des chaises qui empêchent souvent de circuler librement. Un seul écran principal permet uniquement de concentrer l’attention sur une présentation à la fois, les auditeurs étant souvent assis pour écouter un intervenant unique. Il est également rare que les présentations soient partagées et fassent l’objet de collaborations via des outils numériques. La prochaine génération de salles de réunion ne sera peut être pas centrée sur une table et offrira plus de liberté de mouvement pour se déplacer d’un écran tactile à l’autre et collaborer sur les projets de chacun, partagés dans l’espace de collaboration numérique, depuis cette salle de réunion ou un tout autre endroit. Travailler dans le cloud étant de plus en plus sécurisé et permettant d’accéder à un éventail de données, les écrans constitueront des points d’accès à ces données et le développement de nouvelles méthodes de visualisation et d’interaction avec ces données et ces écrans permettra assurément de créer un espace de travail où les réunions n’auront plus de frontières.

SANS RÉUNIONS, LES IDÉES NE QUITTERAIENT LA PLUPART DU TEMPS JAMAIS L’IMAGINAIRE DE LEUR AUTEUR

PERSPECTIVES EN MATIÈRE DE DESIGN PLACE À L’INTERPRÉTATION Par la quantité de données qu’elles contiennent, les Big Data offrent des perspectives exceptionnelles aux futurs designers chargés de la technologie, de l’architecture et des produits. La marge d’interprétation est immense. CONCEVOIR À PARTIR DES DONNÉES Les Big Data offrent aussi des perspectives en matière de design dans la mesure où les modèles qu’elles révèlent peuvent apporter des enseignements sur les comportements humains non disponibles jusqu’alors. Mieux comprendre, par exemple, la façon dont le mobilier ergonomique est réglé en pratique peut offrir aux fabricants une compréhension capitale de l’efficacité de leurs produits.

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UN ESPACE DE TRAVAIL TOUJOURS PLUS INTELLIGENT Techiture, pour un design optimal

108 MILLIONS

de dispositifs machine-to-machine en 2011

Dans notre monde virtuel, les règles de conception des espaces de travail évoluent et le lieu de travail devient un nouveau type d’écosystème. Les bâtiments numériques et objets inanimés connectés et communiquant entre eux en temps réel font déjà partie de nos quotidiens et leur présence est appelée à se renforcer encore davantage à l’avenir. Le design connaît plusieurs évolutions à la fois – pour un espace de travail encore plus intelligent. L’intégration de la technologie dans des objets pour leur permettre de communiquer via le web – connue sous le nom de « l’Internet des objets » – est utilisée en design depuis quelque temps déjà. Le nombre de dispositifs machine-to-machine (qu’il s’agisse d’ascenseurs, d’imprimantes ou encore de thermomètres de bureau, pour ne citer que quelques exemples) utilisant les réseaux sans fil mondiaux a atteint

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les 108 millions en 2011 et devrait au moins tripler d’ici 2017. C’est dans ce contexte que se développe l’idée d’une séparation de la technologie des objets autres que les surfaces interactives, qui peut être considérée comme une extrapolation de l’Internet des objets. Deux approches se dessinent donc en matière de design, chacune offrant un certain nombre de possibilités. Les deux modes de création de Techiture ont toutefois le même objectif : adopter un style de vie hightech dans un environnement visiblement dominé par les produits de base. Cette Techiture nous offre un espace de travail plus intelligent, principalement en rendant la technologie invisible et en permettant un travail plus flexible grâce à des choses simples comme la réduction du nombre de câbles et de prises ou l’apparition de dispositifs plus sophistiqués tels que des écrans


→ LA TECHNOLOGIE N’A SANS DOUTE PAS FINI DE MODIFIER NOTRE FAÇON DE TRAVAILLER. NOUS SERONS AINSI PROBABLEMENT AMENÉS À L’AVENIR À UTILISER ENCORE DAVANTAGE DE DISPOSITIFS À SYSTÈME DE LOCALISATION ET À OCCUPER DES ESPACES DEVENUS NUMÉRIQUES. CETTE PERSPECTIVE S’INSCRIT DANS LE CADRE DE LA TENDANCE DITE DE « L’INTERNET DES OBJETS », QUI PRÉVOIT QUE DE NOMBREUX OBJETS INANIMÉS VERRONT LEUR ÉTAT ENREGISTRÉ EN TEMPS RÉEL, CRÉANT AINSI UN VÉRITABLE MASHUP DE SERVICES ET D’EXPÉRIENCES AVEC SYSTÈMES DE LOCALISATION, PROPICE À DES COLLABORATIONS ET RENCONTRES EN TOUT GENRE. LES BÂTIMENTS AURONT « CONSCIENCE » DES PERSONNES PRÉSENTES ET DES ÉVÉNEMENTS EN COURS ET DEVIENDRONT DE VÉRITABLES RESSOURCES EN TEMPS RÉEL, ET PLUS UNIQUEMENT DE « SIMPLES MURS ». LES DONNÉES INTELLIGENTES SERONT OMNIPRÉSENTES À L’ÉCHELLE DES VILLES ET DES BÂTIMENTS. ← PHILIP ROSS, PDG, UNGROUP – UN WORK s’utilisant comme des toiles blanches sur le mur, prêts à recevoir vos idées et à les enregistrer dans le cloud.

Techiture

À plus grande échelle, le concept de Techiture consiste à repenser notre façon de travailler d’un point de vue global. Les stratégies employées autrefois pour concevoir nos espaces de travail reposaient en grande partie sur des schémas de travail aujourd’hui de moins en moins pertinents. Les bâtiments numériques sont dès lors un outil intéressant pour découvrir de nouveaux schémas et mieux comprendre comment nous agissons, travaillons et utilisons l’espace. Prenons l’exemple d’un espace de travail conçu au départ pour permettre la

collaboration entre de nombreuses personnes, et au final souvent « hacké » par des employés souhaitant s’isoler et se concentrer. Les informations en temps réel des bâtiments numériques permettent de découvrir cet espace détourné et d’en tirer des enseignements pour l’avenir. Les architectes disposent aujourd’hui d’outils précieux pour redéfinir le rôle d’un espace de travail dans l’environnement construit, surtout si les futures constructions reposent sur une réelle compréhension de la façon dont chacun organise sa vie professionnelle et sa vie privée.

PERSPECTIVES EN MATIÈRE DE DESIGN CE QUE LES BÂTIMENTS NOUS RACONTENT Nos bâtiments sont désormais capables de réagir à la façon dont ils sont occupés et utilisés et les designers peuvent analyser ces données pour mieux identifier les espaces efficaces ou non. Ces informations permettront dès lors d’optimiser constamment les espaces de travail pour s’assurer qu’ils soient adaptés à leur utilisation.

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COCRÉATION COMMENT NOUS COLLABORONS SANS FRONTIÈRES


Une ouverture radicale, une transparence totale et un état d’esprit ouvert préparent la voie pour une création et une collaboration sans frontières, dans lesquelles le design jouera un rôle prépondérant. Collaborer et créer ensemble, et ce, quels que soient le moment et le lieu, au sein de petites entreprises ou de grandes sociétés, devient plus facile. Ces nouvelles possibilités se répercutent d’ailleurs sur la conception au sens large, qu’elle concerne des petits objets, des postes de travail et ou des bâtiments entiers.


REDÉFINIR LES NOTIONS DE TEMPS ET D’ESPACE Un guide pour les futures collaborations sans frontières La virtualisation et la mondialisation ont radicalement modifié les notions de temps et d’espace. Ce nouveau monde est celui de la culture de la cocréation et de la collaboration de masse et il implique de travailler avec des collègues exerçant d’autres métiers, travaillant dans d’autres unités commerciales ou basés dans d’autres régions ou fuseaux horaires. Une dynamique qui ouvre de nouvelles perspectives de travail dans les mondes numériques et aura de nombreuses conséquences sur nos espaces de travail. Les organisations devront s’adapter et concevoir leurs espaces de travail physiques de façon à inclure, par exemple, des espaces polyvalents, des zones réservées aux projets et des technologies de pointe favorisant la productivité. L’accès aisé au matériel numérique depuis n’importe quel endroit constituera alors un atout majeur et favorisera la mobilité tout en permettant de mettre davantage l’accent sur l’échange de connaissances, le partage d’idées et le réseautage. Une évolution ressentie par beaucoup et soutenue par les organisations. Les résultats d’une enquête Leesman indiquent que 79 % des plus de 70 000 personnes interrogées estiment que leur structure soutient l’accès à distance aux dossiers et le réseautage. Plusieurs entreprises proposent aujourd’hui de nouvelles initiatives à grande échelle destinées à favoriser ce type d’accès numérique, à l’image de Google Drive et de la plateforme de

collaboration HP Virtual Room, qui permettent aux membres d’une même équipe d’organiser des réunions ou des formations, ou même d’échanger avec des clients, dans un seul et même emplacement en ligne pratique. Malgré les efforts déployés, la plupart des environnements de travail dépendent toujours de processus de modification par une seule personne et d’accès aux documents sur un seul appareil. Les avantages de la collaboration de masse et de la cocréation ne se feront ressentir que si les comportements et les dispositifs de sécurité s’adaptent à un type de travail plus fluide basé sur la confiance et la communication. Il faut donc par exemple permettre à plusieurs

→ LES ORGANISATIONS DEVRONT S’ADAPTER ET CONCEVOIR LEURS ESPACES DE TRAVAIL PHYSIQUES DE FAÇON À INCLURE, PAR EXEMPLE, DES ESPACES POLYVALENTS, DES ZONES RÉSERVÉES AUX PROJETS ET DES TECHNOLOGIES DE POINTE. ←

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personnes de participer à l’élaboration de la même présentation sur le cloud.

Cocréation

La téléprésence et les murs intelligents feront partie intégrante de ces espaces permettant les collaborations ouvertes en matière de design. Les écrans de formes et tailles diverses joueront un rôle plus important et l’une des priorités sera de pouvoir transporter son travail numérique facilement et partout. L’écran deviendra alors le principal outil et espace d’interaction. Les outils synchrones seront également amenés à se développer plus largement. Les systèmes de visio/audioconférence, de partage de données et de détection de présence en sont quelques exemples. Nos bureaux devront à l’avenir être conçus de façon à favoriser ces espaces de travail virtuels et à ne pas négliger les aspects sociaux de ces réunions virtuelles. Ces espaces professionnels

offriront aux employés davantage de sécurité, et de nouvelles pratiques sociales se développeront pour permettre des moments d’intimité et de solitude. Les employés pourront délaisser leur bureau attitré et avoir accès simultanément à un nombre incalculable d’espaces de travail, au sein des locaux de l’entreprise et en dehors. Autrefois considérées comme confidentielles, les informations relatives par exemple au développement de futurs produits ou à la chaîne d’approvisionnement sont désormais de plus en plus de notoriété publique. Le partage de ces informations et l’opportunité offerte aux clients de faire part de leurs commentaires peuvent jouer un rôle essentiel. La marque de vêtements Patagonia illustre parfaitement cette volonté de révéler les détails de sa stratégie d’approvisionnement et de son processus de conception. Demander

→ LA CONCEPTION DES ESPACES DE TRAVAIL EST SOUVENT CONSIDÉRÉE À TORT COMME UNE SIMPLE QUESTION D’ARCHITECTURE D’INTÉRIEUR. C’EST BIEN PLUS QUE CELA. L’ORGANISATION, LA TECHNOLOGIE ET LA DIRECTION ONT TOUTES UN RÔLE À JOUER DANS CE PROCESSUS ; LA CRÉATION D’UN ESPACE DE TRAVAIL MODERNE REQUIERT EN EFFET LA PARTICIPATION DE TOUS. UNE CULTURE DE LA COLLABORATION EST INDISPENSABLE À LA CONSTRUCTION D’UNE ORGANISATION COLLABORATIVE. IL N’EXISTE PAS DE FORMULE MAGIQUE EN LA MATIÈRE ET LA DIFFICULTÉ EST TOUJOURS DE CRÉER DES ESPACES ADAPTÉS AUX CARACTÉRISTIQUES PARTICULIÈRES DE CHAQUE ENTREPRISE. ← PER-ARNE ANDERSSON, PDG, KINNARPS

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aux clients de participer à la conception des produits, qu’il s’agisse de les laisser choisir la couleur de leurs baskets dans le cadre du projet NikeID ou d’organiser un concours pour choisir la nouvelle saveur des chips Walkers, est désormais bien plus qu’une simple tendance. Il s’agit d’une véritable stratégie commerciale pour les entreprises conscientes du potentiel d’une telle collaboration. En développant ce type de collaboration externe, les entreprises verront leurs espaces, tant virtuels que physiques, devenir de plus en plus perméables, ce qui apportera son lot de difficultés mais également d’opportunités en termes de sécurité et de relations publiques. Le concept de services administratifs est sans doute voué à disparaître puisque les clients se mêleront aux employés, obligeant l’entreprise à donner une image cohérente adaptée à cette diversité.

PERSPECTIVES EN MATIÈRE DE DESIGN COMPRENDRE L’ÉVOLUTION DES MODES DE TRAVAIL Le mariage des communications virtuelles et physiques au sein du même espace modifie les critères de conception de la décoration d’intérieur, de l’interaction et des produits. Il s’agit dès lors de comprendre l’évolution des modes de travail et d’offrir des environnements adaptés. UN CLIMAT DE SÉCURITÉ La sécurisation de l’information et de l’espace dans ces entreprises d’un genre nouveau est un réel défi, mais aussi une chance, pour ceux qui déchiffrent le code, d’empêcher les autres de le faire également.


L’union des clients et des entreprises La cocréation revêt plusieurs formes à l’ère de la collaboration de masse. La priorité pour les entreprises est de devenir transparentes, de créer un climat de confiance et d’instaurer un dialogue en matière de design avec leurs employés et collaborateurs du monde entier. Intégrer des groupes d’utilisateurs au processus de conception permet aux entreprises de mieux comprendre les besoins et d’encourager chacun à apporter sa contribution. Ceci vaut non seulement pour les bureaux, mais également pour les entreprises et leurs clients. Bon nombre d’entreprises collaborent par exemple avec leurs fans pour exploiter au mieux le pouvoir de ces clients particulièrement actifs.

Elles sont d’ailleurs de plus en plus nombreuses à créer une nouvelle fonction au sein de leur conseil d’administration et à se doter d’un CCO (Chief Customer Officer, directeur de la relation client), chargé de transmettre et de faire respecter l’opinion des consommateurs. Le CCO peut être amené à agir sur les stratégies de l’entreprise et les relations clients par la mise en place d’interfaces utilisateurs et de centres d’appel ou l’implication de clients dans les processus d’innovation. Certaines entreprises lancent ou rejoignent également des cellules de réflexion collaborative afin de permettre des échanges et d’encourager leurs clients à s’organiser et à apporter leurs idées au processus de création. Les exemples ne manquent pas. Nokia a par exemple créé un logiciel d’impression 3D pour inciter ses utilisateurs à créer leurs propres coques de téléphone. Uber s’est quant à lui associé à différentes entreprises lors de campagnes et Candlewood Suites a lancé l’initiative « Candlewood Suites » permettant à ses clients

d’emprunter des produits du quotidien habituellement absents des chambres d’hôtel. Sans oublier Kickstarter qui donne la possibilité à tout un chacun de présenter une idée et de collecter des fonds pour la développer. Et la liste est encore longue... Alors que la révolution numérique est loin d’être terminée et que le monde se connecte à une vitesse fulgurante, ce changement de modèle entre dans une phase plus avancée. Les concepts de cocréation et de collaboration de masse prennent tout leur sens lorsque entreprises et clients unissent leurs efforts afin de faire entrer le design dans une nouvelle ère.

→ ENTREPRISES ET CLIENTS UNISSENT LEURS EFFORTS AFIN DE FAIRE ENTRER LE DESIGN DANS UNE NOUVELLE ÈRE. ←

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Cocréation

UN NOUVEAU DIALOGUE EN MATIÈRE DE DESIGN


PERSONNALISER OU NON ?

Cocréation

Partager, c’est se soucier des autres, mais n’oubliez pas la touche personnelle. La personnalisation est un élément essentiel de la culture hacker et maker. Dans cette nouvelle ère où les espaces de travail sont temporaires et l’emploi instable, il est particulièrement important de savoir ce que l’on est et à quel groupe on appartient. L’envie de personnaliser l’espace de travail commun aurait pu perdurer s’il était resté des lieux à personnaliser, mais notre époque numérique caractérisée par les nouvelles technologies, la transparence et de nouvelles méthodes d’organisation va quelque peu modifier notre façon de nous définir et de définir notre groupe par rapport à l’ancienne société industrielle. Des études scientifiques indiquent que la personnalisation permettrait aux employés de surmonter leurs problèmes de mémoire et les aiderait à mémoriser plus d’informations et à plus long terme, mais également à mieux résister aux interférences. Les occasions de personnaliser son environnement de travail, et plus particulièrement son bureau, se feront toutefois de plus en plus rares alors que le concept d’environnement de travail basé sur l’activité (ABW, Activity Based Working) se développe un peu partout dans le monde. En réalité, le simple fait de posséder un bureau va à l’encontre d’une stratégie de travail flexible. Mais nombre des bureaux ayant été les premiers à adopter le concept ABW semblent aujourd’hui, plusieurs années après, stériles et dépourvus d’âme. De nombreuses organisations sont confrontées à ce problème, notamment l’agence de communication suédoise The Truth in Gothenburg, qui a décidé de permettre à ses employés créatifs d’exposer leurs œuvres sur les murs, mais également de les vendre. Les employés peuvent ainsi aménager ou décorer les pièces, mais les bureaux, tables et sièges restent propriété commune. L’objectif d’un nombre croissant d’organisations modernes est d’instaurer une culture commune et adaptée à tous sur le lieu de travail.

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PERSPECTIVES EN MATIÈRE DE DESIGN DÉVELOPPER UNE CULTURE GRÂCE À LA PERSONNALISATION À l’image des architectes qui modifient l’utilisation des bâtiments, les designers conçoivent de plus en plus de meubles et de produits à partir de matériaux et d’objets récupérés ou recyclés. Cette approche est d’autant plus pertinente si l’objectif est de rendre notre monde plus durable.


→ INTÉGRER DES GROUPES D’UTILISATEURS AU PROCESSUS DE CONCEPTION PERMET AUX ENTREPRISES DE MIEUX COMPRENDRE LES BESOINS ET D’ENCOURAGER CHACUN À APPORTER SA CONTRIBUTION. ←

L’ESPACE DE TRAVAIL COCRÉÉ À OSLO

Cocréation

Lorsque Kinnarps Norway a décidé de rénover ses nouveaux bureaux d’Eiksmarka (Oslo), l’entreprise a opté pour la version de Kinnarps du concept d’environnement de travail basé sur l’activité, Next Office. Tous les employés ont eu pour tâche d’analyser leurs activités et de déterminer les endroits les plus propices à leur réalisation et le temps qu’elles nécessitaient chaque jour, semaine et mois. Ils ont ainsi pu identifier les différents besoins en termes de configuration et de zones de travail. Choisir un environnement de travail basé sur l’activité n’est pas un simple projet de décoration d’intérieur. C’est un véritable projet de changement à long terme visant à trouver un équilibre entre espace privé et social, réunions et travail individuel, concentration et dialogue. D’où l’importance d’utiliser l’espace de travail de Kinnarps pour étudier des effets du concept, et notamment bien sûr la satisfaction de construire quelque chose ensemble. → NOUS NOUS SOMMES CRÉÉ UN ENVIRONNEMENT DE TRAVAIL BASÉ SUR L’ACTIVITÉ SUR MESURE, ADAPTÉ À LA FOIS AUX INDIVIDUS ET AU GROUPE QUE NOUS SOMMES. L’AMÉNAGEMENT D’INTÉRIEUR DOIT DONC OFFRIR UNE SOLUTION ERGONOMIQUE HOLISTIQUE, DES ESPACES FLEXIBLES ET FONCTIONNELS AINSI QU’UNE DÉCORATION ET DES ASSOCIATIONS DE COULEURS ÉLÉGANTES. CETTE SOLUTION NOUS PERMET DE TRAVAILLER DE FAÇON PLUS STRUCTURÉE, PUISQUE NOUS RÉFLÉCHISSONS DÉSORMAIS DAVANTAGE À L’ENVIRONNEMENT ADAPTÉ À NOTRE TÂCHE. NOS JOURNÉES SONT PLUS VARIÉES ET NOUS DÉVELOPPONS DES QUALITÉS SOCIALES AU GRÉ DES RENCONTRES DANS DIFFÉRENTS TYPES DE SITUATIONS ET D’ESPACES. ← LIV TVETER, DIRECTRICE GÉNÉRALE, KINNARPS NORWAY

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LA CULTURE HACKER PASSE PAR LE DESIGN CRAFT PUNK Le hacking comme booster d’efficacité

Cocréation

Une ouverture absolue est indispensable à une culture hacker et maker de base vivante, où chacun développe des outils et plateformes pour concevoir, refaçonner et revoir ses propres outils et designs et ceux des autres. La culture hacker s’est longtemps cantonnée aux espaces traditionnellement virtuels, mais l’avènement des imprimantes 3D offre désormais aux hackers et makers des outils inédits pour relier les mondes physiques et numériques. Ce type de design craft punk peut potentiellement modifier en profondeur les rapports de force sur les marchés de demain. Au sein de ce mouvement de design, les consommateurs parrainent de nouvelles idées et achètent les produits issus de ce financement participatif ; ils peuvent ainsi prendre part au processus de création, de l’idée à la production, et aider à adapter l’offre à la demande. De nombreuses initiatives de design craft punk ont déjà vu le jour sur des communautés numériques majeures (telles que Threadless et Etsy), mais pour des projets de design mineurs. Threadless est une communauté créative, et une entreprise à forte croissance de plusieurs millions de dollars, qui fabrique, soutient et achète le travail d’artistes. Les utilisateurs votent pour leur T-shirt préféré, le créateur du design le plus populaire reçoit des fonds et un lot de T-shirts est fabriqué et vendu via le site Internet. Le site de vente en ligne Etsy rassemble quant à lui des artistes qui créent et vendent leurs créations personnelles, des bijoux et tricots notamment. Les fournisseurs inscrits sur le site fabriquent leurs produits sur demande et les personnalisent si besoin. Cette plateforme de vente en ligne proposait 5,5 millions de produits en août 2013.

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↘ L’AVANCÉE MAJEURE EN MATIÈRE DE PRODUCTION ET DE DISTRIBUTION MAISON RESTE CEPENDANT L’IMPRIMANTE 3D, QUI PERMET À TOUT UN CHACUN DE CRÉER ET D’IMPRIMER SES PROPRES OBJETS PHYSIQUES.

L’avancée majeure en matière de production et de distribution maison reste cependant l’imprimante 3D, qui permet à tout un chacun de créer et d’imprimer ses propres objets physiques ou de télécharger le design de quelqu’un d’autre pour l’imprimer. L’impression 3D en est encore à ses balbutiements et les entreprises et particuliers continuent d’explorer les possibilités offertes par cette technologie. Détaillants et producteurs découvrent toute l’étendue des possibilités et dangers de cette nouvelle technologie, qui ouvre la voie à une fabrication encore plus sur mesure des produits, avec le risque que des croquis soient piratés et diffusés illégalement au plus grand nombre. La culture hacker a également atteint de nouveaux sommets dans le monde physique et la construction des bâtiments. Les stratégies de performance des nouvelles constructions doivent répondre aux attentes et exigences de demain. Les bâtiments existants peuvent toutefois


PERSPECTIVES EN MATIÈRE DE DESIGN S’INSPIRER DE NOS COMPORTEMENTS Nous devrions concevoir les produits en fonction de nos connaissances du comportement réel du personnel au sein de l’environnement de travail. Les perspectives en matière de design reposent sur une compréhension profonde de la culture du lieu de travail et de la nature des activités. PERMETTRE DES UTILISATIONS VARIÉES Les concepteurs d’intérieurs et de produits devraient s’inspirer de la manière dont chacun peut détourner le design. Produits et espaces peuvent être conçus selon une approche ouverte permettant des utilisations très diverses. Une stratégie à haut risque, certes, mais qui peut s’avérer payante si elle est exécutée correctement. REVALORISATION offrir des pespectives encore plus intéressantes alors que l’évolution démographique, la technologie et le vieillissement des constructions permettent d’améliorer activement les constructions du passé pour les adapter à leur époque. Le bureau de Gensler à Los Angeles a par exemple choisi d’implanter une succursale de banque dans un bâtiment du City National Plaza conçu en 1971 et inoccupé depuis neuf ans. De nombreuses stratégies en matière de design et de durabilité ont permis de faire de cette structure démodée un environnement professionnel dynamique et hautement performant. Gensler a également détourné le J. Edgar Hoover Building DE Washington D.C. et proposé diverses modifications dans l’objectif d’ouvrir l’immeuble au public, notamment l’ajout de nouvelles fenêtres, d’atriums intérieurs, de places publiques et d’entrées. Cette réappropriation de bâtiments par la modification de leur fonction initiale s’opère également à plus petite échelle, surtout lorsque la configuration des lieux incite le personnel à détourner des endroits et objets pour satisfaire ses besoins. Après tout, il n’est pas rare de voir des espaces de travail parfaitement conçus et adaptés pour un certain type d’activité,

À l’image des architectes qui modifient l’utilisation des bâtiments, les designers conçoivent de plus en plus de meubles et de produits à partir de matériaux et d’objets récupérés ou recyclés. Cette approche est d’autant plus pertinente si l’objectif est de rendre notre monde plus durable.

assumer des fonctions totalement différentes. Il arrive par exemple que les espaces de pause restent inutilisés pendant de longues périodes car ils sont jugés trop publics ou parce que s’accorder de tels moments de détente va à l’encontre de la culture de l’entreprise. D’un autre côté, les espaces de collaboration, tels que les capsules installées notamment à Google Zürich, sont davantage utilisés pour s’offrir un moment de solitude que pour organiser les réunions pour lesquelles ils étaient conçus. Le life hacking, qu’il s’agisse de détourner des objets ou des espaces, est une pratique de plus en plus acceptée de nos jours et pourrait permettre d’améliorer la façon dont espaces et produits sont conçus.

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HOME SWEET HOME


DES MICROMULTI­ NATIONALES COMMENT NOS VIES CONNECTÉES PERMETTENT DAVANTAGE DE RELATIONS INDIVIDUELLES


La population active moderne se caractérise par son absence de frontières ; elle voyage et se déplace constamment et travaille grâce au cloud virtuel, depuis n’importe quel continent ou pays. Le nombre de travailleurs indépendants – freelances, indépendants, consultants, entrepreneurs – augmente et reflète une hausse importante du nombre de start-ups et d’entreprises individuelles. Un nouveau type d’espace de travail voit le jour pour répondre au besoin d’espaces complémentaires aux bureaux à domicile et autres cybercafés, et le design devra lui emboîter le pas.


UNE VIE PROFESSIONNELLE « LIQUIDE » Une main-d’œuvre en flux constant En physique, un état de la matière correspond à un certain degré de cohérence de la matière, qui peut aller de l’état solide à l’état liquide, gazeux ou plasma. Dans notre monde numérique caractérisé par une augmentation de la créativité, notre façon de travailler est passée d’un état solide à un état liquide : les informations coulent telles un flux constant d’idées par les voies numériques.

Ces dix dernières années, bon nombre d’entreprises ont lancé différents modèles de cocréation et d’économie collaborative, et ainsi encouragé cette vie professionnelle à l’état « liquide », pour le meilleur et pour le pire. Les avantages résident clairement dans la flexibilité croissante et la possibilité de disposer d’une large réserve de talents. Côté inconvénients, ce nouveau type de main-d’œuvre flottante est plus imprévisible et se déplace très vite. Malgré ses qualités et ses défauts, la main-d’œuvre « liquide » modifie notre société, et les solutions en matière de design doivent désormais tenir compte des besoins des talents issus des micromultinationales.

HOME SWEET HOME

Même si la main-d’œuvre repose aujourd’hui davantage sur de petites unités, les gens souhaiteront toujours conserver du lien social et le design innovant pourrait alors être la solution

CRÉER DES ESPACES SANS CONTRAINTES DE TEMPS ET DE LIEU EST ESSENTIEL

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Des micromultinationales

Ceci vaut non seulement pour les grandes organisations, dans lesquelles le personnel jouit d’une plus grande liberté de choix de son lieu de travail, mais encore plus pour les petites initiatives et entreprises (des freelances aux entrepreneurs), qui devancent les grandes structures et sont à la tête de ce mouvement des micromultinationales conduisant à la création d’espaces alternatifs et collaboratifs. Conséquence, les bureaux traditionnels perdent en superficie et les cafés et espaces de travail collaboratifs avec Wi-Fi gratuit sont plus populaires que jamais.

adéquate pour tout le monde. Le réseau social Beehive d’IBM permet par exemple aux employés de la marque de renforcer les relations qu’ils entretiennent avec leurs collègues, à la fois professionnellement et personnellement.


Des micromultinationales

LES CAFÉS COLLABORATIFS « Mais où sont partis tous les employés ? », pourrait-on se demander lorsqu’on pénètre dans un bureau moderne. En réalité, ils sont bien là, sans pour autant être présents. Pour plusieurs raisons, la tendance des micromultinationales repose sur la possibilité de passer d’un espace à l’autre et de remettre en question les frontières qui nous retenaient autrefois derrière nos bureaux. Les opportunités de télétravail sont en augmentation constante et cette tendance à la hausse n’est pas près de s’arrêter. En 2013, 3,3 millions de personnes travaillaient à distance aux États-Unis, et ce chiffre ne comprend pas les indépendants et les bénévoles non rémunérés. Des études ont également montré le rôle moteur du télétravail dans la responsabilisation, la motivation et la productivité des employés. L’entreprise Gallup a par ailleurs découvert que les télétravailleurs s’investissaient davantage que la maind’œuvre travaillant sur place. À l’avenir, travailler dans le monde virtuel avec des collègues exerçant d’autres métiers, à d’autres endroits ou dans d’autres unités commerciales, ou issus d’autres cultures sera la norme. Le télétravail offre un environnement plus polyvalent, davantage de contrôle sur l’équilibre vie privée/ vie professionnelle, des horaires plus variés, moins de stress, une meilleure connaissance de la technologie, et permet de d’éviter de perdre du temps dans les transports. Des plateformes et structures permettant et favorisant la cocréation entre ces collègues sans frontières sont toutefois nécessaires.

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→ JE PENSE ET J’ESPÈRE QUE LE BUREAU DE DEMAIN NE SERA PAS UN ENDROIT OÙ L’ON SE SENT ISOLÉ. J’AIME L’IDÉE QU’UN ESPACE DE TRAVAIL SOIT UNE SORTE DE COMMUNAUTÉ. ←

LUCA NICHETTO, DESIGNER, LUCA NICHETTO DESIGN STUDIO


La conception d’espaces de travail a toujours fait partie intégrante de la gestion pour permettre aux employés de travailler dans des conditions optimales quelle que soit la tâche. Mais alors que les espaces de travail deviennent virtuels, de nouveaux défis apparaissent en termes de design. Gérer un employé depuis son domicile ou un cybercafé requiert en effet une approche globale des mondes à la fois analogique et virtuel. L’émergence des micromultinationales et de la main-d’œuvre « liquide » s’accompagne d’une plus grande insécurité de l’emploi et de conditions de travail parfois précaires. Le néologisme « précariat » désigne les actifs connaissant l’insécurité de l’emploi, alternant entre des phases de chômage et d’emploi et souvent liés par des contrats incomplets ou obligés de passer par des intermédiaires comme des agences ou des courtiers. En Grande-Bretagne par exemple, le nombre d’indépendants a augmenté de 10 % entre le début de la crise économique et 2013, tandis que le nombre d’employés baissait de 434 000, selon l’ONS (Office of National Statistics, l’office des statistiques nationales britannique). 42 % des indépendants ne travaillent pas depuis leur domicile. Le précariat ne constitue pas nécessairement une classe ouvrière. Il rassemble des actifs de toutes les couches de la société, et notamment des plus instruites, mais cela ne les empêche pas de se sentir mis à l’écart dans de nombreux domaines. Ceci pourrait d’ailleurs être à l’origine d’un changement majeur, qui verrait ces actifs précaires

PERSPECTIVES EN MATIÈRE DE DESIGN DONNER PLUS DE LIBERTÉ À DAVANTAGE DE FREELANCES Les organisations bien établies ayant recours à de nombreux freelances ont désormais la tâche délicate de concevoir et de gérer leur espace de façon à préserver la culture et la marque de leur entreprise. Les designers ont la possibilité de concevoir des espaces permettant le développement d’une culture « freelance » tout en conservant la culture de marque de l’entreprise accueillant ces indépendants.

Des micromultinationales

Le design peut alors être un outil utile. À San Francisco, le Citizen Space offre par exemple une atmosphère semblable à celle de Google, avec des espaces de travail ouverts et des à-côtés comme une cuisine et un salon, conçue pour accueillir des indépendants, consultants et petites équipes de quatre personnes maximum. On pourrait également citer l’exemple de START à Houston, qui parvient à attirer des actifs issus de différents secteurs en mettant l’accent sur la technologie. START accueille des ateliers et événements professionnels et commerciaux, et met à disposition de ses membres des conseillers issus de l’industrie.

→ LE BUREAU DE DEMAIN NE COMPTERA PLUS NÉCESSAIREMENT D’EMPLOYEUR. ← PETRUS PALMÉR, COFONDATEUR, FORM US WITH LOVE

tourner le dos aux grandes organisations et développer de nouvelles structures potentiellement subversives. Ils constitueraient ainsi ensemble un mouvement multinational à lui tout seul, exigeant une conception qui lui est propre pour fonctionner efficacement au-delà des frontières virtuelles et géographiques.

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29% UN BUREAU « COMME À LA MAISON » La nouvelle façon de travailler « liquide » est caractérisée par la mondialisation, la numérisation et l’externalisation. Travailler dans un monde virtuel avec des collègues exerçant d’autres métiers, à d’autres endroits ou dans d’autres unités commerciales, ou issus d’autres cultures est de plus en plus courant et permet pour faire simple aux employés de « rentrer chez eux ». Parallèlement, bon nombre de lieux de travail s’inspirent des espaces de loisirs et se dotent de salles d’exercice permettant de se détendre ensemble, de cuisines et d’espaces consacrés aux réunions informelles. Au sein du cabinet d’architecture et de design Woods Bagot de Sydney, le bois chaleureux se mêle à la végétation et à l’éclairage ciblé pour créer une atmosphère chaleureuse, tandis que les banquettes de cuisine offrent un

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TRAVAILLENT DEPUIS LEUR DOMICILE AU MOINS UN JOUR PAR SEMAINE.

espace supplémentaire pour le travail collaboratif. Le bureau prend de toute évidence de plus en plus des airs de maison. La question est alors de savoir dans quelle mesure cette nouvelle tendance affecte la façon dont les professionnels travaillant dans ces types d’environnements perçoivent à la fois leur domicile et leur lieu de travail. Il n’est pas saugrenu de penser que ceux qui travaillent depuis leur domicile préféreront une décoration propice au travail, et inversement. Les gouvernements ont toutefois commencé à réguler le travail à domicile, et notamment les horaires et modes de travail autorisés. En Allemagne, le ministère du Travail est intervenu pour réguler les appels en provenance des supérieurs hiérarchiques après certaines heures, afin de protéger le bien-être des employés. En France, une proposition


→ GRÂCE AUX DISTRIBUTEURS, LA PLUPART D’ENTRE NOUS POUVONS DÉCORER NOS MAISONS POUR QU’ELLES SOIENT À LA FOIS CONFORTABLES, AGRÉABLES ET ACCUEILLANTES, ET CE, À UN PRIX ABORDABLE. L’ESPACE DE TRAVAIL DOIT S’Y ADAPTER CAR IL SERAIT REGRETTABLE QUE CERTAINS PRÉFÈRENT TRAVAILLER DEPUIS LEUR DOMICILE JUSTE PARCE QUE LEUR BUREAU N’EST PAS CONFORTABLE. LES GENS SOUHAITENT QUE LEUR LIEU DE TRAVAIL SOIT AUSSI CONFORTABLE QUE LEUR MAISON ET LEUR OFFRE LA POSSIBILITÉ DE RANGER LEURS AFFAIRES ET DE CRÉER UNE COMMUNAUTÉ TOUT EN GARDANT UN ESPACE PERSONNEL. ← WAYNE HEMINGWAY, FONDATEUR, HEMINGWAYDESIGN Trouver le juste équilibre pour concevoir un bureau « comme à la maison » demandera de créer de nouvelles solutions associant design domestique et design professionnel traditionnel à tous les niveaux.

Des micromultinationales

similaire des syndicats suggérait d’interdire les e-mails en dehors des heures de bureau. Proscrire la technologie pendant certaines heures est une tentative symbolique de s’assurer que l’autre partie de l’employé – le citoyen – n’ait pas, à terme, besoin d’aide, ce qui serait préjudiciable pour le système de protection sociale. Autre conséquence du travail à domicile : les espaces qu’il créé. Prenons un exemple. Si les propriétaires de bureaux américains utilisaient 20 % de moins de l’espace qu’ils occupent actuellement d’une valeur totale de 1,25 billion de dollars, la baisse de la demande se chiffrerait à 250 milliards de dollars en raison de l’excédent de bureaux. Une analyse comparative récente montre que pour faire face à cette nouvelle étendue de possibilités, de nombreuses organisations mettent au point des programmes de gestion de l’« espace de travail alternatif » basés sur des configurations, des emplacements et des pratiques non traditionnels. La gestion des sites indique également que 32 % des employés peuvent être considérés comme mobiles car ils passent au maximum 50 % de leur temps au sein de l’espace de travail, et que 29 % des employés travaillent depuis leur domicile au moins un jour par semaine en 2013, contre 17 % trois ans plus tôt.

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CONCEVOIR POUR LA CULTURE D’ENTREPRISE DANS UN ENVIRONNEMENT DE TRAVAIL DÉSTRUCTURÉ

Des micromultinationales

L’ESPACE DE TRAVAIL ÉPHÉMÈRE

69% 54

DES GESTIONNAIRES DE SITE, ARCHITECTES ET DESIGNERS DU MONDE ENTIER ESTIMENT QUE LES EMPLOYEURS DEVRAIENT OFFRIR DAVANTAGE D’OPTIONS À LEURS EMPLOYÉS POUR LE TRAVAIL À DOMICILE.

Nous sommes, ou serons, de plus en plus nombreux à travailler de manière non traditionnelle et dans des endroits peu habituels, notamment depuis notre domicile, d’une façon locale et globale à la fois. À mesure que nous devenons plus mobiles, le besoin d’espaces de travail traditionnels se réduit encore davantage et laisse vacants de nombreux bâtiments. 69 % des gestionnaires de site, architectes et designers du monde entier estiment que les employeurs devraient offrir davantage d’options à leurs employés pour le travail à domicile. C’est dans ce cadre qu’ont vu le jour des dispositions relatives à l’espace de travail alternatif (AWA, Alternative Workplace Arrangement). Les espaces de travail destinés aux employés exerçant à domicile constitueront à la fois un défi et une aubaine. Les employeurs devront peut-être à l’avenir prévoir également des meubles ergonomiques pour les télétravailleurs. Préserver la culture d’entreprise est alors un réel défi. Même si la possibilité de travailler depuis un autre


endroit – la maison, un cybercafé, une bibliothèque – responsabilise de nombreux employés, le possible manque d’interaction régulière peut potentiellement nuire à la culture d’entreprise ou même l’empêcher de se forger. C’est notamment pour cette raison que Marissa Mayer, PDG de Yahoo, décida d’interdire le télétravail en 2013, obligeant tous les employés de Yahoo à travailler au bureau, puisque c’est ensemble que se forme une culture d’entreprise forte et productive. Si le bureau est un endroit où il fait bon passer du temps, les employés choisissent de s’y retrouver plutôt que de travailler à distance.

Il arrive également que des individus découvrent en premier de nouveaux lieux de solitude, avant que ceux-ci ne soient exploités par le marché. Le besoin d’espaces de travail permet par exemple de contrer la baisse de popularité des bibliothèques publiques. Celles-ci sont maintenant davantage utilisées comme espaces de tranquillité où étudiants et travailleurs mobiles peuvent travailler dans le calme, et moins pour leur fonction première, c’est-à-dire le prêt de livres. La salle de lecture traditionnelle revient à la mode grâce à son Wi-Fi, ses prises de courant et ses machines à café. Notre nouveau bureau à la fois global et local comprend de nombreuses pièces surprenantes pour travailler, mais toutes semblent convenir aux micromultinationales.

FLEXIBILITÉ, DES STRUCTURES OUVERTES ET DES OPTIONS PERMETTANT DE TRAVAILLER OÙ ON LE SOUHAITE, C’EST DE PERDRE LA CULTURE ET L’IDENTITÉ DE L’ORGANISATION OU DU LIEU DE TRAVAIL. ← INGRID BACKMAN, DESIGNER & PARTENAIRE, WHITE ARCHITECTS

PERSPECTIVES EN MATIÈRE DE DESIGN

Des micromultinationales

L’espace de travail éphémère ne semble toutefois pas près de disparaître. Les cafés deviennent des espaces professionnels totalement équipés où l’on ne risque plus d’être mis dehors une fois son café terminé. Certains endroits offrent même la possibilité de réserver un local pour travailler, créant la confusion entre les fonctions de café et d’espace de travail collaboratif.

→ LE DANGER LORSQUE L’ON RECHERCHE PLUS DE

L’EFFET MACROÉCONOMIQUE DES MICROMULTINATIONALES La croissance d’une approche micromultinationale à l’égard du travail et ses répercussions sur l’espace de travail, le domicile et partout ailleurs, offrent de nouvelles perspectives en matière de design qui doivent mettre l’accent sur la création de plateformes communes via des solutions numériques, des aménagements de bureau, de nouveaux styles de direction et l’incorporation du design.

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lorem ipsum


UNE COMMUNAUTÉ COLLABORATIVE Encourager les micromultinationales par des pôles de créativité Concevoir efficacement un nouvel espace de travail exige de repenser notre manière de vivre et de travailler à une échelle beaucoup plus globale puisque cette ère de la collaboration en micromultinationales transforme les fondements de notre société. La société repose à son tour sur la communauté, et la conception d’un espace de travail collaboratif doit donc se baser sur la communauté pour attirer la diversité nécessaire à la collaboration interdisciplinaire.

les systèmes de paiement en ligne pour se connecter. Ils obtiennent dans tous les cas ce dont ils ont besoin grâce aux uns et aux autres, sans passer par des entreprises inefficaces. Cette économie directe entre pairs permet aux particuliers d’agir comme des entreprises, ce qui bouleverse les modèles économiques traditionnels.

Il existe aujourd’hui plus de 500 espaces de travail collaboratif aux États-Unis et environ 1 300 dans le monde. La plupart des gens n’ont pas constamment besoin d’un bureau. Grâce au partage de bureaux et d’équipements, 72 % des espaces de travail collaboratif sont rentables après deux ans. Dans la ville de Grand Rapids, située dans l’État américain du Michigan, quatre grandes entreprises non concurrentes ont développé Grid70, une plateforme de design commune qui offre à chacune un élan créatif. Le réseau Impact Hub regroupe quant à lui des espaces ouverts de travail collaboratif dans plus de 60 villes de par le monde, où des entrepreneurs se rejoignent pour interagir socialement, collaborer et créer ensemble.

→ NOUS VOULONS ÊTRE MODERNES ET

Plusieurs entreprises ont lancé différents programmes de cocréation et d’économie collaborative au cours de la dernière décennie. Il s’agit encore principalement d’initiatives à petite échelle. Les gens emploient des technologies puissantes, notamment les réseaux sociaux, les appareils mobiles et

Des micromultinationales

Le gouvernement investit également dans le travail collaboratif puisque cette pratique semble stimuler la croissance économique. Une toute nouvelle plateforme technologique collaborative à but non lucratif vient d’ouvrir à Chicago. Conçu par Gensler, l’espace « 1871 » est financé en partie par une subvention de 2,3 millions de dollars octroyée par l’État de l’Illinois et accueille les start-ups technologiques actives socialement si caractéristiques de cette ville. Mais ce soutien ne se limite pas aux plateformes de travail collaboratif. De grandes entreprises telles que Proctor & Gamble ou Lego collaborent également avec des travailleurs indépendants dans les domaines de la conceptualisation et du développement de produits.

CRÉATIFS. NOUS AVONS L’HABITUDE DE RELEVER DES DÉFIS POUR TROUVER DE NOUVELLES SOLUTIONS, UNE NÉCESSITÉ ABSOLUE DANS CE MONDE EN ÉVOLUTION CONSTANTE. TANT POUR NOUS QUE POUR NOS CLIENTS, SAVOIR S’ADAPTER À DE NOUVELLES CONDITIONS EST PLUS IMPORTANT QUE JAMAIS. ← PAULINA LUNDSTRÖM, RESPONSABLE MARKETING & COMMUNICATIONS, KINNARPS

PERSPECTIVES EN MATIÈRE DE DESIGN FAVORISER DES ESPACES SINGULIERS La demande croissante d’espaces dédiés au travail collaboratif et la façon dont ceux-ci sont conçus pour des tâches ou industries particulières ouvrent des perspectives en matière de design. Ces espaces ne doivent pas être génériques, et doivent au contraire refléter la marque de l’unité micromultinationale, encourager le réseautage et être adaptés aux tâches à effectuer.

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UN AVENIR PROMETTEUR Au fil de ces pages, nous nous sommes plongés dans les technologies, comportements, structures et données démographiques qui joueront un rôle clé dans cette décennie à venir marquée par la diversité, afin de découvrir les perspectives qu’offre notre nouvel environnement professionnel.

lorem ipsum

Nous avons exploré le concept de Techiture et étudié la façon dont la relation entre technologie et architecture conduit apparemment à la disparition de l’espace de travail tel que nous le connaissons. Nous avons abordé les répercussions de notre monde numérique sur notre façon de collaborer à tous les niveaux. Nous avons considéré toute l’importance du bien-être et l’influence croissante de la psychologie pour concevoir des espaces adaptés à la fois aux introvertis et aux extravertis. Nous vous avons fait part de nos connaissances sur la culture hacker et le design craft punk, et évoqué les conséquences positives et négatives de ces nouvelles tendances. Des espaces mariant le corps à l’esprit aux micromultinationales, et bien plus encore : le futur qui nous attend s’annonce passionnant. Nous vivons à une époque fascinante et le moment semble venu d’observer nos environnements de travail avec un regard nouveau et d’oser les repenser en adoptant un point de vue différent, en prenant la diversité comme point de départ. Travailler ensemble en alliant technologie, architecture, psychologie et physiologie sera essentiel pour concevoir des espaces de travail et de vie modernes, dans une décennie marquée par la diversité et le design inclusif.

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À PROPOS DE KINNARPS Kinnarps est une entreprise suédoise de décoration d’intérieur qui propose des solutions d’ensemble innovantes et inspirées pour les environnements de travail. Nous sommes aujourd’hui un des leaders européens de notre secteur et sommes présents dans plus de 40 pays aux quatre coins du monde. Notre point de départ est le développement durable, le bien-être et la rentabilité pour les personnes qui utilisent les environnements de travail que nous concevons, au sein de différents types d’espaces de travail. Nous contrôlons l’ensemble du processus, du concept à la production, et de la distribution à l’installation sur site. Efficacité et qualité sont ainsi optimisées, et ce, avec un impact environnemental le plus faible possible. Nous sommes particulièrement fiers d’offrir à nos clients une expertise, une expérience et une tradition solides de plus de 70 ans dans ce domaine. Nous travaillons également sans relâche pour analyser les tendances qui auront un impact sur les environnements de travail de demain. Ainsi, vous bénéficiez des meilleurs résultats possibles : un lieu de travail où les employés sont heureux et font prospérer votre entreprise. Pour résumer, nous croyons en l’amélioration des conditions de travail.

RÉFÉRENCES : Livres : Cain, S. (2012). Quiet: The Power of Introverts in a World That Can’t Stop Talking. New York, Crown Publishers. Knight, C. (2013). Mad Women: Herstory of Advertising. Olika Förlag. Plumbe, C et al. (2010) Innovating with People – The Business of Inclusive Design. Norwegian Design Council ; 1ère édition. Sandberg, S. (2013). Lean In: Women, Work, and the Will to Lead. Édition Knopf Doubleday. Standing, G. (2011). The Precariat: The New Dangerous Class. London, Bloomsbury Academic.

Articles : Fischer, Nicolas Gustave et al. (2004). Effect of the Self schema. Journal of Environmental Psychology. Vol 24, numéro 1, p. 131-140. Guidaa, A et al. (2009). The personalisation method applied to a working memory task: Evidence of long-term working memory effects. European Jounal of Environmental Psychology. Vol 21, numéro 6, p. 862-896.

Documents de recherche : Leesman Index, octobre 2014 - 70 306 participants

Liens : www.gov.uk/government/news/four-generation-workplaces-on-the-rise-as-report-revealsthe-future-of-work www.en.wikipedia.org/wiki/Aging_in_the_American_workforce www.cipd.co.uk/pm/peoplemanagement/b/weblog/archive/2014/03/24/prepare-for-4g-agediverse-workforce-now-cipd-urges-employers.aspx www.hbr.org/2009/09/the-female-economy

www.economist.com/node/6800723 www.fortune.com/2014/07/08/women-ceos-fortune-500-1000/ www.youtube.com/watch?v=XX4xFjZPezA www.idrc.ocad.ca/index.php/about-the-idrc/49-resources/online-resources/articles-andpapers/443-whatisinclusivedesign www.pwc.co.uk/en_UK/uk/human-resource-services/issues/the-rising-cost-ofabsence-sickbills-cost-uk-businesses-29bn-a-year.jhtml www.theguardian.com/media/2010/aug/07/social-networking-friends-lonely www.berginsight.com/ReportPDF/ProductSheet/bi-globalm2m4-ps.pdf www.ccocouncil.org/site/defining-the-cco.aspx www.web-strategist.com/blog/2014/04/04/graphic-a-timeline-ofcorporations-in-thecollaborative-economy/ www.watson.ibm.com/cambridge/Projects/project2.shtml www.stjohnstreet.net/why-conventional-offices-are-on-the-way-out-andalternative-workspaces-are-on-the-rise/ www.freshbooks.com/blog/2014/01/30/coworking-space-should-you-run-yourbusiness-fromone/ www.business2community.com/human-resources/14-tools-productive-virtualteam0724033#!F88tu www.costar.com/News/Article/Changing-Office-Trends-Hold-Major-Implications-for-FutureOffice-Demand/146580 www.kingscross.impacthub.net/about-us/

IMAGES : Evert F. Baumgardner – National Archives and Records Administration (p. 30). iStock (p. 13-14, 53), images diverses de Kinnarps. Illustrations : Elin Svensson – NU Agency AB.


Notre objectif est de vous présenter un nouveau regard sur le monde du travail de demain et sur le rôle du design dans cette évolution. Nous espérons que ce rapport vous apportera les connaissances et l’inspiration nécessaires face aux évolutions que connaît actuellement notre vie professionnelle. Nous décrivions dans notre rapport précédent huit évolutions particulièrement importantes à nos yeux. L’une d’entre elles s’intitulait « D’un design visible à un design réfléchi » et suggérait que l’espace de travail de demain serait conçu très différemment d’aujourd’hui et que les entreprises performantes aborderaient les processus de conception de l’espace de travail de façon plus scientifique. Nous avons décidé d’explorer davantage ce domaine dans le cadre de nos recherches pour ce rapport, car nous estimions qu’il revêtait de nombreuses nuances passionnantes qui influenceront sans nul doute notre environnement de travail à l’avenir. La question principale que nous nous sommes posée à nousmêmes ainsi qu’à notre équipe des tendances Kinnarps et à de nombreux experts internationaux était donc la suivante : quelles perspectives cette décennie de la diversité offre-t-elle en matière de conception des espaces de travail ? Nous avons résumé les résultats de nos ateliers de réflexion Kinnarps Future Lab en cinq tendances :

CONCEVOIR POUR LA DIVERSITÉ – Comment le design doit répondre aux besoins les plus divers MARIER LE CORPS ET L’ESPRIT – Comment notre environnement de travail s’adapte à nos corps et nos esprits TECHITURE – Comment analogique et numérique façonnent notre nouvel environnement de travail LA COCRÉATION À L’ÈRE DE LA COLLABORATION DE MASSE – Comment nous collaborons sans frontières MICROMULTINATIONALES – Comment nos vies connectées permettent davantage de relations individuelles Ces cinq tendances vont changer nos vies professionnelles au quotidien, en profondeur et à bien des égards. Le design intelligent sera alors une clé pour concevoir des espaces de travail et de vie adaptés à cette décennie de la diversité. Pour en savoir plus sur l’analyse des tendances Kinnarps, rendez-vous sur : www.kinnarps.com/trend


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