Bulletin historique de Lambersart - septembre 2019

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La première école publique de garçons de Canteleu Le « hameau » de Canteleu, près de la Haute-Deûle et le long de la route d’Armentières, connaît alors un fort essor démographique lié à l’arrivée d’ouvriers et de leur famille, à la suite de l’implantation d’usines sur des prairies libres et de l’agrandissement de Lille décrété en 1858. C’est en 1869 que naît une classe de garçons à l’initiative de Guislain Michel, sacristain de l’église St-Sépulcre de Canteleu, dans sa grande maison de la rue de l’église (disparue, à situer de nos jours place du Nouveau Canteleu). Il reçoit une subvention de six cents francs par an de la part de la municipalité pour l’instruction des enfants indigents, plus une indemnité de deux cents francs pour la classe et le logement. 50 élèves fréquentent la classe. Sa maison est achetée par la commune en 1879, devenant école communale et il est remplacé au poste d’instituteur. Une extension de l’école (classe pour les petits) et un préau sont construits en face en 1880, à l’entrée de la rue du St-Sépulcre, renommée rue de l’abbé Desplanque ensuite (extension disparue car remplacée en 1926 par le dispensaire d’hygiène sociale et bureau de bienfaisance). La convention de 1878 qui met fin à la sécession des trois hameaux de Canteleu à Lambersart, Lille et Lomme, stipule que les enfants “forains” de ces communes devront être accueillis dans l’école de garçons agrandie de Canteleu Lambersart. Le conseil municipal de Lambersart entend les écarter en 1881 mais le préfet rappelle les obligations et le conseil municipal consent à accueillir ces 50 enfants lillois et lommois de Canteleu. L’école primaire est agrandie en 1883 (2e classe), 1890 (3e classe) et 1898 (4e et 5e classes et cour) par l’architecte communal Henri Boudin et prend alors le nom d’école Victor Hugo. En 1923, la vétusté de ces locaux entraîne une obligation de construire de nouveaux bâtiments d’école et la municipalité rachète des terrains de l’ancienne briqueterie Dumoulin et ses jardins ouvriers attenants. Après l’édification du groupe scolaire Victor Hugo (garçons) & Maintenon (filles) en 1927-28, signé de l’architecte communal Jules Lesaffre, l’ancienne école de garçons de la rue de l’Église abrite jusqu’en 1939 des cours techniques prodigués par l’union philanthropique. Elle est rasée vers 1953, remplacée par le parking de la place devant l’église, qui sera à son tour rasée en 1992, sauf le clocher datant de 1900.

Maison d’école, rue abbé Desplanque

Dessin de la façade de l’école primaire, rue de l’Eglise – H. Boudin, 1898

BULLETIN HISTORIQUE DE LAMBERSART N°18 - septembre 2019 La relique de Saint Calixte

Classe de 1905 dans la cour avec le directeur Désiré Ladrière

Bâtiments d’école de part et d’autre de la rue de l’Eglise vue dans les 2 sens (église et usine Nicolle-Verstraete)

Recherches du comité historique (Éric Parize, Gilbert Pattou, Didier Delval, Catherine Meersdam, Soizic Léger, Dominique Pagliaro, Joël Marquizeau, Hervé Lépée, Claude Reynaert). Pour nous contacter : Bulletin-historique@ville-lambersart.fr Mairie de Lambersart 19, avenue Clemenceau 59130 Lambersart www.lambersart.fr/bulletin-historique Parution chaque mois sauf juillet-août. Versions numériques disponibles dans la rubrique « retour sur notre histoire ». Responsable de publication : Claude REYNAERT Secrétaire de publication : Éric PARIZE Impression ville de Lambersart

Le culte des reliques fut certainement le fondement de l’implantation du christianisme dans la société antique tardive et celle du haut moyen âge. Il fallait rendre la religion « populaire » et indirectement, fixer durablement des hommes autour d’une chapelle ou église et ainsi coloniser l’espace. L’arrivée à Lambersart, en provenance de l’abbaye de Cysoing, d’une partie des ossements de saint Calixte, ramenée par Evrard de Frioul, gendre puis beau-frère de l’empereur d’Occident et fondateur de cette abbaye au IXe siècle, eut à n’en pas douter cette fonction. Le lieu-dit s’agrandit par défrichement : Lamberti sartum est le sart de Lambert en latin. Une communauté s’y fixa : le lieu de culte est cité dans un texte de 1101, au retour de la 1ère croisade du comte Robert II de Flandre. L’église mère de Lambersart, la seule avant 1870, est dédiée à ce saint qui n’a plus aujourd’hui la notoriété. Calliste 1er, car c’est bien de lui qu’il s’agit, fut pape au début du IIIe siècle. Fils d’un esclave chrétien, esclave lui-même, sarde d’origine, il est affranchi par le pape Zéphyrin lorsque, venu à Rome, il lui fut confié l’administration du premier cimetière chrétien, qui portera son nom. Il fit de ce cimetière le lieu officiel de la communauté chrétienne de Rome où furent ensevelis tous les papes pendant plus d’un siècle. Devenu souverain pontife, il eut à faire face à l’opposition d’un théologien qui contestait la foi en la sainte Trinité et le caractère divin du Christ. Calixte fut massacré en 222, précipité dans un puits, une pierre de meule autour du cou ! Ce qui ne le prédisposait pas vraiment, reconnaissons-le, à une réputation de guérisseur des flux de ventre et de fluxions de poitrines auprès des pèlerins flamands se rendant à l’église de Lambersart au moyen âge. Il est surtout connu comme le saint patron des fossoyeurs et tous métiers liés aux cimetières, fêté le 14 octobre. De là le record de quatre cimetières à Lambersart !? Sa tombe fut retrouvée en 1961 au cimetière de Calepode à Rome mais il ne devait y rester que peu de chose si l’on en croit les tribulations de ses ossements au cours des siècles ! Vers 1600 il faut de nouvelles reliques venues de Cysoing car détruites à Lambersart par les Hurlus protestants ; après la Révolution française, Cysoing et Lambersart se partagent l’os de la mâchoire supérieure (voir photo) venu de la cathédrale de Reims ! Enfin, ne confondons pas Calixte 1er avec le pape Calixte II, descendant lointain de la fille d’Evrard par les comtes de Bourgogne (d’où le blason de Cysoing) et créateur du pèlerinage vers St-Jacques de Compostelle (c’est cependant lui sur le vitrail dans le transept de l’église !) et Calixte III, un Borgia qui a béatifié Jeanne d’Arc. On notera que la relique n’a pas subi le test au carbone 14 pour la dater. Dans le cadre des Journées du Patrimoine, des visites de l’église sont organisées chaque année par Gilbert Pattou du Syndicat d’Initiatives de Lambersart, le dimanche 22 septembre de 15h à 17h.

SOMMAIRE :

p.1 : la mâchoire miraculeuse de Saint Calixte - dossier central : la tentative de sécession de Canteleu - p.4 : la première école publique de garçons de Canteleu


DOSSIER

LA SÉCESSION des hameaux de Canteleu L’opération de dessèchement des marais de la Haute Deûle en 1855 grâce à la rigole dite de la Tortue facilite l’installation de blanchisseries et de teintureries ainsi que d’entreprises textiles. La population ouvrière s’installe dans le secteur près du pont de Canteleu profitant du travail offert, de la proximité de Lille et de nouvelles habitations dans les courées. L’afflux de cette nouvelle population se fait sans l’assentiment des édiles municipaux des bourgs de Lomme et Lambersart. Cette agglomération dite de Canteleu sur trois communes bénéficie toutefois, grâce à l’action et la générosité du filateur de lin lommois Eugène Verstraete (1817-1905) installé depuis 1857 et de l’abbé Desplanque, curé de St-Calixte, d’une grande chapelle en 1866 construite par l’architecte Charles Maillard et baptisée Saint Sépulcre. La précédente chapelle St-Hubert de la maladrerie du 15è siècle est trop petite et vétuste, à l’angle de la rue du Marais. Le conseil municipal de Lambersart s’oppose par 6 voix contre 5 à la création d’une paroisse indépendante donc concurrente du Bourg (idem à Lomme). L’autorité épiscopale se contente donc de nommer le vicaire JB Carlier à Canteleu. Cette question revient à l’ordre du jour le 13 septembre 1869 assortie du même refus du conseil. Ce n’est que contraints et forcés que les édiles lambersartois acceptent la seconde paroisse en 1870, Carlier devenant son 1er curé. Jules Capelle lui succède de 1873 jusqu’à sa mort en 1907.

Ancienne chapelle de la maladrerie

Extrait d’un dictionnaire géographique de 1831

L’accroissement de population, grâce à des rues loties autour de l’église (rues de l’Eglise, Bernard (Bouveur), Béharel (Briand), St-Sépulcre (abbé Desplanque), Blanchisseurs), entraîne une meilleure représentation de Canteleu qui envoya 6 conseillers siéger dès le 1er septembre 1870. La guerre franco-prussienne de 1870-71 nécessite la création d’une garde nationale. Là encore, deux groupes sont constitués : l’un au Bourg sous l’autorité de M. Sdez et l’autre à Canteleu sous celle de M. Testelin. Tout comme il y avait déjà deux comités de secours mutuels,

St-Hubert pour Canteleu et St-Nicolas pour le Bourg. Les escarmouches se poursuivent. Les élus de Canteleu groupés autour d’Emile Béharel (ancien nom de la rue Briand), cultivateur lotisseur, maire adjoint de 1874 à 1878, font une opposition constante au maire de Lambersart Louis Lelong (cultivateur de la ferme des Blancs Gants non loin de là, devenue le restaurant la Cense), en sortant de la salle municipale en pleine séance (la mairie est au Bourg jusque 1894) ou s’abstenant de répondre aux convocations pour que le quorum ne soit pas atteint, tant les intérêts et opinions politiques sont distincts. Le 20 juillet 1874, le préfet saisit le conseil municipal d’une demande d’érection en commune libre des trois hameaux de Canteleu par des républicains progressistes : sur Lille (représentant : le docteur Soins, patron de teinturerie allée du château de Bretagne, connu pour être le mécène du jeune peintre Charles Edmond Delacroix dit Cross), sur Lomme (représentant : Eugène Verstraete, proposé comme futur maire de « Canteleu-lez-Lille ») et Lambersart (représentant : Léon Delobel, brasseur cabaretier,

propriétaire de la mairie que transfère le maire Lelong à son retour en 1874, voir bulletins 6 et 7). Un rapport est rédigé par une commission municipale comprenant messieurs Bailly, Becquart, Bocquet, Philippe et Wambre. Ce rapport du 9 septembre 1875 déclare que l’assemblée comprend « que les habitants groupés autour d’un même clocher aspirent à traiter eux-mêmes leurs affaires, mais que grâce aux sacrifices faits par la commune, le quartier avait son église et ses écoles, qu’il était doté de bonnes voies de communication, que la distance pour se rendre à la mairie ne dépassait pas deux kilomètres et surtout que la division de la commune créerait un déficit dans les recettes de l’une, sans pour cela dégréver les contributions de la nouvelle ». La commune de Lambersart refuse donc en arguant des travaux réalisés en voirie et équipement scolaire. Elle bénéficie du soutien du maire de Lomme, Eugène Becquart, en proie au même conflit (à ne pas confondre avec nos maires Casimir et Alfred Becquart). Le Conseil Général, après saisie de la plainte argumentée et détaillée en retour des séparatistes du 3 juillet 1876, propose finalement en 1878 une solution amiable avec la construction d’un cimetière commun financé par les 3 communes, dessiné en 1882 et réalisé en 1884 à Lambersart comme l’église, agrandie en 1889 et équipé d’un clocher en 1899.

Fleuri et les Charmettes) ainsi que la construction pour ses ouvriers d’une grande cité aux multiples courées face à son usine, entre la nouvelle rue Charles Vaillant (patron d’une tuilerie et adjoint au maire apaisé) et des Martyrs de la Résistance (anciennement rue du briquetier Dumoulin). Le projet concrétisé de l’avenue somptueuse de l’Hippodrome, forgeant l’idée de ville en reliant le Bourg à Canteleu et Lille via un quartier huppé était passé par là en 1890, avec Félix Clouët, Auguste Bonte, Alfred Becquart et Edmond Ory opposés à Richard Bailly… Enfin, Louis Nicolle (1871-1942), petit-fils d’Eugène Verstraete et successeur à la tête de la filature de lin, eut une belle carrière politique : maire de Lomme 1908-1919, député du Nord 1924-1928, de la 1ère circonscription de Lille 1928-1936 (avec Lambersart), ministre en 1936. Il contribua à la construction en 1927 du bureau de bienfaisance et dispensaire d’hygiène sociale à l’angle de la rue de l’abbé Desplanque, et édifia la Linière de Wambrechies en 1922 (même architecte : André Granet). L’usine et le château Nicolle-Verstraete côté Lomme, s’étendant de la rue du Marais à la rue Becker, disparaissent en 1970, peu après l’usine Crépy (1966). Barres et tours d’immeubles les remplacent. Il continue à régner une certaine identité propre à Canteleu, bien que le quartier ait vu sa population évoluer depuis la fin des usines et l’arrivée de la ligne 2 du métro (1989). Une opération de cartographie participative avec les habitants volontaires et des étudiants de Lille 1 est en cours à Lambersart, sur la mémoire et le cadre de vie du quartier…

Le Café du Centre (actuel n°346 av. de Dunkerque) à gauche côté Lambersart (carte 1925)

La sage administration du maire républicain Richard Bailly (1876-1888), ni du Bourg ni de Canteleu mais du Canon d’or (qui émerge comme 3e quartier) contribue à l’apaisement par la réalisation d’une poste près du pont, d’une nouvelle école de garçons (voir article suivant), de l’éclairage des rues au gaz et du pavage, de l’arrivée d’une ligne de tramway avenue de Dunkerque et d’une caserne de sapeurs-pompiers côté trottoir de Lomme, enfin d’une gendarmerie en 1901, ex-place de l’Amiral Courbet (Docteur Martin). Ce quartier se densifie encore par l’installation au nord, au lieu-dit Mont-à-Camp, de l’usine de fil de coton Léon Crépy en 1889 et de son lotissement d’employés (rues Ampère, Lavoisier, Volta, Flament-Reboux du nom de sa belle-famille et l’avenue de Boufflers, menant au lotissement cossu avec les domaines de ses fils, Le Pré La caserne de pompiers

Titre du dossier de 1876 (Verstraete, Delobel et Soins)

E. Verstraete, gd-père de L. Nicolle

Sa tombe (cimetière Canteleu)


DOSSIER

LA SÉCESSION des hameaux de Canteleu L’opération de dessèchement des marais de la Haute Deûle en 1855 grâce à la rigole dite de la Tortue facilite l’installation de blanchisseries et de teintureries ainsi que d’entreprises textiles. La population ouvrière s’installe dans le secteur près du pont de Canteleu profitant du travail offert, de la proximité de Lille et de nouvelles habitations dans les courées. L’afflux de cette nouvelle population se fait sans l’assentiment des édiles municipaux des bourgs de Lomme et Lambersart. Cette agglomération dite de Canteleu sur trois communes bénéficie toutefois, grâce à l’action et la générosité du filateur de lin lommois Eugène Verstraete (1817-1905) installé depuis 1857 et de l’abbé Desplanque, curé de St-Calixte, d’une grande chapelle en 1866 construite par l’architecte Charles Maillard et baptisée Saint Sépulcre. La précédente chapelle St-Hubert de la maladrerie du 15è siècle est trop petite et vétuste, à l’angle de la rue du Marais. Le conseil municipal de Lambersart s’oppose par 6 voix contre 5 à la création d’une paroisse indépendante donc concurrente du Bourg (idem à Lomme). L’autorité épiscopale se contente donc de nommer le vicaire JB Carlier à Canteleu. Cette question revient à l’ordre du jour le 13 septembre 1869 assortie du même refus du conseil. Ce n’est que contraints et forcés que les édiles lambersartois acceptent la seconde paroisse en 1870, Carlier devenant son 1er curé. Jules Capelle lui succède de 1873 jusqu’à sa mort en 1907.

Ancienne chapelle de la maladrerie

Extrait d’un dictionnaire géographique de 1831

L’accroissement de population, grâce à des rues loties autour de l’église (rues de l’Eglise, Bernard (Bouveur), Béharel (Briand), St-Sépulcre (abbé Desplanque), Blanchisseurs), entraîne une meilleure représentation de Canteleu qui envoya 6 conseillers siéger dès le 1er septembre 1870. La guerre franco-prussienne de 1870-71 nécessite la création d’une garde nationale. Là encore, deux groupes sont constitués : l’un au Bourg sous l’autorité de M. Sdez et l’autre à Canteleu sous celle de M. Testelin. Tout comme il y avait déjà deux comités de secours mutuels,

St-Hubert pour Canteleu et St-Nicolas pour le Bourg. Les escarmouches se poursuivent. Les élus de Canteleu groupés autour d’Emile Béharel (ancien nom de la rue Briand), cultivateur lotisseur, maire adjoint de 1874 à 1878, font une opposition constante au maire de Lambersart Louis Lelong (cultivateur de la ferme des Blancs Gants non loin de là, devenue le restaurant la Cense), en sortant de la salle municipale en pleine séance (la mairie est au Bourg jusque 1894) ou s’abstenant de répondre aux convocations pour que le quorum ne soit pas atteint, tant les intérêts et opinions politiques sont distincts. Le 20 juillet 1874, le préfet saisit le conseil municipal d’une demande d’érection en commune libre des trois hameaux de Canteleu par des républicains progressistes : sur Lille (représentant : le docteur Soins, patron de teinturerie allée du château de Bretagne, connu pour être le mécène du jeune peintre Charles Edmond Delacroix dit Cross), sur Lomme (représentant : Eugène Verstraete, proposé comme futur maire de « Canteleu-lez-Lille ») et Lambersart (représentant : Léon Delobel, brasseur cabaretier,

propriétaire de la mairie que transfère le maire Lelong à son retour en 1874, voir bulletins 6 et 7). Un rapport est rédigé par une commission municipale comprenant messieurs Bailly, Becquart, Bocquet, Philippe et Wambre. Ce rapport du 9 septembre 1875 déclare que l’assemblée comprend « que les habitants groupés autour d’un même clocher aspirent à traiter eux-mêmes leurs affaires, mais que grâce aux sacrifices faits par la commune, le quartier avait son église et ses écoles, qu’il était doté de bonnes voies de communication, que la distance pour se rendre à la mairie ne dépassait pas deux kilomètres et surtout que la division de la commune créerait un déficit dans les recettes de l’une, sans pour cela dégréver les contributions de la nouvelle ». La commune de Lambersart refuse donc en arguant des travaux réalisés en voirie et équipement scolaire. Elle bénéficie du soutien du maire de Lomme, Eugène Becquart, en proie au même conflit (à ne pas confondre avec nos maires Casimir et Alfred Becquart). Le Conseil Général, après saisie de la plainte argumentée et détaillée en retour des séparatistes du 3 juillet 1876, propose finalement en 1878 une solution amiable avec la construction d’un cimetière commun financé par les 3 communes, dessiné en 1882 et réalisé en 1884 à Lambersart comme l’église, agrandie en 1889 et équipé d’un clocher en 1899.

Fleuri et les Charmettes) ainsi que la construction pour ses ouvriers d’une grande cité aux multiples courées face à son usine, entre la nouvelle rue Charles Vaillant (patron d’une tuilerie et adjoint au maire apaisé) et des Martyrs de la Résistance (anciennement rue du briquetier Dumoulin). Le projet concrétisé de l’avenue somptueuse de l’Hippodrome, forgeant l’idée de ville en reliant le Bourg à Canteleu et Lille via un quartier huppé était passé par là en 1890, avec Félix Clouët, Auguste Bonte, Alfred Becquart et Edmond Ory opposés à Richard Bailly… Enfin, Louis Nicolle (1871-1942), petit-fils d’Eugène Verstraete et successeur à la tête de la filature de lin, eut une belle carrière politique : maire de Lomme 1908-1919, député du Nord 1924-1928, de la 1ère circonscription de Lille 1928-1936 (avec Lambersart), ministre en 1936. Il contribua à la construction en 1927 du bureau de bienfaisance et dispensaire d’hygiène sociale à l’angle de la rue de l’abbé Desplanque, et édifia la Linière de Wambrechies en 1922 (même architecte : André Granet). L’usine et le château Nicolle-Verstraete côté Lomme, s’étendant de la rue du Marais à la rue Becker, disparaissent en 1970, peu après l’usine Crépy (1966). Barres et tours d’immeubles les remplacent. Il continue à régner une certaine identité propre à Canteleu, bien que le quartier ait vu sa population évoluer depuis la fin des usines et l’arrivée de la ligne 2 du métro (1989). Une opération de cartographie participative avec les habitants volontaires et des étudiants de Lille 1 est en cours à Lambersart, sur la mémoire et le cadre de vie du quartier…

Le Café du Centre (actuel n°346 av. de Dunkerque) à gauche côté Lambersart (carte 1925)

La sage administration du maire républicain Richard Bailly (1876-1888), ni du Bourg ni de Canteleu mais du Canon d’or (qui émerge comme 3e quartier) contribue à l’apaisement par la réalisation d’une poste près du pont, d’une nouvelle école de garçons (voir article suivant), de l’éclairage des rues au gaz et du pavage, de l’arrivée d’une ligne de tramway avenue de Dunkerque et d’une caserne de sapeurs-pompiers côté trottoir de Lomme, enfin d’une gendarmerie en 1901, ex-place de l’Amiral Courbet (Docteur Martin). Ce quartier se densifie encore par l’installation au nord, au lieu-dit Mont-à-Camp, de l’usine de fil de coton Léon Crépy en 1889 et de son lotissement d’employés (rues Ampère, Lavoisier, Volta, Flament-Reboux du nom de sa belle-famille et l’avenue de Boufflers, menant au lotissement cossu avec les domaines de ses fils, Le Pré La caserne de pompiers

Titre du dossier de 1876 (Verstraete, Delobel et Soins)

E. Verstraete, gd-père de L. Nicolle

Sa tombe (cimetière Canteleu)


La première école publique de garçons de Canteleu Le « hameau » de Canteleu, près de la Haute-Deûle et le long de la route d’Armentières, connaît alors un fort essor démographique lié à l’arrivée d’ouvriers et de leur famille, à la suite de l’implantation d’usines sur des prairies libres et de l’agrandissement de Lille décrété en 1858. C’est en 1869 que naît une classe de garçons à l’initiative de Guislain Michel, sacristain de l’église St-Sépulcre de Canteleu, dans sa grande maison de la rue de l’église (disparue, à situer de nos jours place du Nouveau Canteleu). Il reçoit une subvention de six cents francs par an de la part de la municipalité pour l’instruction des enfants indigents, plus une indemnité de deux cents francs pour la classe et le logement. 50 élèves fréquentent la classe. Sa maison est achetée par la commune en 1879, devenant école communale et il est remplacé au poste d’instituteur. Une extension de l’école (classe pour les petits) et un préau sont construits en face en 1880, à l’entrée de la rue du St-Sépulcre, renommée rue de l’abbé Desplanque ensuite (extension disparue car remplacée en 1926 par le dispensaire d’hygiène sociale et bureau de bienfaisance). La convention de 1878 qui met fin à la sécession des trois hameaux de Canteleu à Lambersart, Lille et Lomme, stipule que les enfants “forains” de ces communes devront être accueillis dans l’école de garçons agrandie de Canteleu Lambersart. Le conseil municipal de Lambersart entend les écarter en 1881 mais le préfet rappelle les obligations et le conseil municipal consent à accueillir ces 50 enfants lillois et lommois de Canteleu. L’école primaire est agrandie en 1883 (2e classe), 1890 (3e classe) et 1898 (4e et 5e classes et cour) par l’architecte communal Henri Boudin et prend alors le nom d’école Victor Hugo. En 1923, la vétusté de ces locaux entraîne une obligation de construire de nouveaux bâtiments d’école et la municipalité rachète des terrains de l’ancienne briqueterie Dumoulin et ses jardins ouvriers attenants. Après l’édification du groupe scolaire Victor Hugo (garçons) & Maintenon (filles) en 1927-28, signé de l’architecte communal Jules Lesaffre, l’ancienne école de garçons de la rue de l’Église abrite jusqu’en 1939 des cours techniques prodigués par l’union philanthropique. Elle est rasée vers 1953, remplacée par le parking de la place devant l’église, qui sera à son tour rasée en 1992, sauf le clocher datant de 1900.

Maison d’école, rue abbé Desplanque

Dessin de la façade de l’école primaire, rue de l’Eglise – H. Boudin, 1898

BULLETIN HISTORIQUE DE LAMBERSART N°18 - septembre 2019 La relique de Saint Calixte

Classe de 1905 dans la cour avec le directeur Désiré Ladrière

Bâtiments d’école de part et d’autre de la rue de l’Eglise vue dans les 2 sens (église et usine Nicolle-Verstraete)

Recherches du comité historique (Éric Parize, Gilbert Pattou, Didier Delval, Catherine Meersdam, Soizic Léger, Dominique Pagliaro, Joël Marquizeau, Hervé Lépée, Claude Reynaert). Pour nous contacter : Bulletin-historique@ville-lambersart.fr Mairie de Lambersart 19, avenue Clemenceau 59130 Lambersart www.lambersart.fr/bulletin-historique Parution chaque mois sauf juillet-août. Versions numériques disponibles dans la rubrique « retour sur notre histoire ». Responsable de publication : Claude REYNAERT Secrétaire de publication : Éric PARIZE Impression ville de Lambersart

Le culte des reliques fut certainement le fondement de l’implantation du christianisme dans la société antique tardive et celle du haut moyen âge. Il fallait rendre la religion « populaire » et indirectement, fixer durablement des hommes autour d’une chapelle ou église et ainsi coloniser l’espace. L’arrivée à Lambersart, en provenance de l’abbaye de Cysoing, d’une partie des ossements de saint Calixte, ramenée par Evrard de Frioul, gendre puis beau-frère de l’empereur d’Occident et fondateur de cette abbaye au IXe siècle, eut à n’en pas douter cette fonction. Le lieu-dit s’agrandit par défrichement : Lamberti sartum est le sart de Lambert en latin. Une communauté s’y fixa : le lieu de culte est cité dans un texte de 1101, au retour de la 1ère croisade du comte Robert II de Flandre. L’église mère de Lambersart, la seule avant 1870, est dédiée à ce saint qui n’a plus aujourd’hui la notoriété. Calliste 1er, car c’est bien de lui qu’il s’agit, fut pape au début du IIIe siècle. Fils d’un esclave chrétien, esclave lui-même, sarde d’origine, il est affranchi par le pape Zéphyrin lorsque, venu à Rome, il lui fut confié l’administration du premier cimetière chrétien, qui portera son nom. Il fit de ce cimetière le lieu officiel de la communauté chrétienne de Rome où furent ensevelis tous les papes pendant plus d’un siècle. Devenu souverain pontife, il eut à faire face à l’opposition d’un théologien qui contestait la foi en la sainte Trinité et le caractère divin du Christ. Calixte fut massacré en 222, précipité dans un puits, une pierre de meule autour du cou ! Ce qui ne le prédisposait pas vraiment, reconnaissons-le, à une réputation de guérisseur des flux de ventre et de fluxions de poitrines auprès des pèlerins flamands se rendant à l’église de Lambersart au moyen âge. Il est surtout connu comme le saint patron des fossoyeurs et tous métiers liés aux cimetières, fêté le 14 octobre. De là le record de quatre cimetières à Lambersart !? Sa tombe fut retrouvée en 1961 au cimetière de Calepode à Rome mais il ne devait y rester que peu de chose si l’on en croit les tribulations de ses ossements au cours des siècles ! Vers 1600 il faut de nouvelles reliques venues de Cysoing car détruites à Lambersart par les Hurlus protestants ; après la Révolution française, Cysoing et Lambersart se partagent l’os de la mâchoire supérieure (voir photo) venu de la cathédrale de Reims ! Enfin, ne confondons pas Calixte 1er avec le pape Calixte II, descendant lointain de la fille d’Evrard par les comtes de Bourgogne (d’où le blason de Cysoing) et créateur du pèlerinage vers St-Jacques de Compostelle (c’est cependant lui sur le vitrail dans le transept de l’église !) et Calixte III, un Borgia qui a béatifié Jeanne d’Arc. On notera que la relique n’a pas subi le test au carbone 14 pour la dater. Dans le cadre des Journées du Patrimoine, des visites de l’église sont organisées chaque année par Gilbert Pattou du Syndicat d’Initiatives de Lambersart, le dimanche 22 septembre de 15h à 17h.

SOMMAIRE :

p.1 : la mâchoire miraculeuse de Saint Calixte - dossier central : la tentative de sécession de Canteleu - p.4 : la première école publique de garçons de Canteleu


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