La République des Pyrénées - Découverte de deux corps au CHP de Pau (Archives 20 décembre 2004)

Page 1

Grand Pau: les 147 communes solidaires

Le contrat de Pays du Grand Pau a été signé samedi à Serres-Castet. Ce territoire de 147 communes regroupe 223 785 habitants. C’est le deuxième Pays le plus peuplé d’Aquitaine après le Pays Basque. P.8

Lundi 20 décembre 2004

L’Élan rechute au Palais

La Section rate le coche

Les Béarnais ont subi face à Gravelines (78-89) leur troisième défaite à Pau. Ce nouveau revers souligne les limites d’une équipe qui devra cravacher pour participer à la Semaine des As. Cahier VIII et IX

Les Palois ont du retard à l’allumage. Auteurs d’une première mi-temps calamiteuse à Narbonne, ils gâchent une nouvelle occasion de remporter une victoire à leur portée (13-18). Cahier II et III

PYRÉNÉES PRESSE

No 18 278 - 0,80 €

LE DOUBLE MEURTRE AU CENTRE HOSPITALIER SPÉCIALISÉ RESTE INEXPLIQUÉ

DEUX POLICIERS RACONTENT L’HORREUR Les deux policiers qui ont dévouvert les corps

INCOMPRÉHENSION ET ÉMOTION AU CHP La mort atroce de leurs deux collègues a

LE OU LES ASSASSINS COURENT TOUJOURS Alors que les cinq personnes en garde à vue

mutilés de Chantal Klimaszewski, 48 ans, infirmière, et Lucette Gariod, 40 ans, aidesoignante, sont traumatisés. P.2 et 3

profondément choqué tous les personnels du CHP. L’annonce du drame a également provoqué une vive émotion à Pau et en Béarn. P.4 et 5

ont été laissées libres hier, le ministre DousteBlazy a annoncé un moratoire sur la fermeture des lits en psychiatrie. P.2 à 6

Op MM ase N U Cou CM .

L’Étiquette Adhésive colle au marché

Rachetée par Bruno Pouyanne, la fabrique de Jurançon investit pour se développer avec l’étiquette-livret et sa sœur l’étiquette-dépliant. P.32

Nicolas SABATHIER

PAU SOUS LE CHOC


FAITS DU JOUR EN RÉGION

Solidaires dans la douleur, plus de 150 membres du personnel se sont recueillis devant le pavillon où s’est déroulé le drame. (Photo : Nicolas Sabathier)

PAU • L’infirmière et l’aide-soignante assassinées étaient appréciées et reconnues

Le personnel sous le choc La mort atroce de leurs deux collègues a plongé tous les personnels du centre hospitalier spécialisé dans un profond traumatisme.

S

pontanément, sans qu’aucun mot d’ordre n’ait circulé, ils sont arrivés, seuls ou par petits groupes, se soutenant mutuellement. Certains avaient le visage baigné de larmes, mais tous sont restés très dignes. Tous ceux qui travaillaient samedi dans les différents services du CHP, mais aussi ceux et celles qui étaient en repos se sont retrouvés face au pavillon des Montbrétias. Dans un silence de plomb, ils se sont recueillis devant ce bâtiment plat, écrasé sous les arbres centenaires. Insensibles au crachin, les infirmiers, aides-soignants, psychologues et assistants sociaux ont attendu la sortie des corps de Chantal Klimaszewski et Lucette

Gariod. Recroquevillés par le choc, solidaires dans l’émotion, ils étaient encore là lorsque leur ministre de tutelle, Philippe DousteBlazy, est arrivé samedi en début d’après-midi. Une fermeture partielle Loin des caméras de télévision et des micros, ils échangent quelques mots, quelques étreintes de réconfort. « On a besoin de faire corps, d’être ensemble et de se recueillir », murmure Florence, une infirmière. Brigitte, une collègue, pense aux enfants, au fils de Lucette Gariod et à la fille et au fils de Chantal Klimaszewski. « C’est Noël dans huit jours, et ils n’ont plus de maman. On se dit que ça

aurait pu être nous. » C’était jour de fête samedi : les enfants du personnel devaient accueillir le Père Noël et ouvrir leurs cadeaux. Les réjouissances ont été annulées. Dans la soirée, le directeur a réuni l’ensemble du personnel pour exposer les mesures de surveillance prises pour les prochains jours. Les employés du CHP lui ont demandé de fermer provisoirement les « Montbrétias », qui accueille 22 personnes âgées. « On nous demande de nettoyer le sang et de continuer à fonctionner alors qu’on veut que le pavillon soit fermé symboliquement. On ne peut pas continuer comme si de rien n’était. »

Dans la soirée, « une des ailes du bâtiment a été évacuée et le personnel orienté vers d’autres structures », a indiqué hier le directeur Jean-Paul Busch. « L’autre aile, qui est relativement indépendante, continue de fonctionner. » Ceux qui travaillaient samedi soir ont reçu le soutien spontané de leurs collègues qui sont venus leur prêter main forte, pour qu’ils ne passent pas la nuit seuls avec les patients. Après la douleur, la peur La nuit n’a pourtant pas apaisé les esprits. « L’émotion est toujours là. On attend les obsèques pour commencer à faire le deuil. Quand elles seront passées, on

SOUTIEN • Une cellule psychologique mise en place à l’hôpital dès l’annonce du drame

L’incompréhension et l’inquiétude

D

ès 7 heures samedi, peu après la découverte du drame, Thierry Della, psychiatre aux urgences psychiatriques et responsable de la cellule d’urgence médico-psychologique a réuni les membres de la cellule : psychologues, psychiatres, infirmiers… « Notre premier rôle a été d’accueillir les familles des victimes et d’intervenir auprès des premières personnes qui sont venues sur les lieux et de l’équipe qui travaillait avec les collègues », précise Thierry Della. Une permanence a été mise en place pour toute la durée du week-end y compris la nuit. « Il y a un besoin de se regrouper. Beaucoup de personnes sont venues spontanément. Les mots qui reviennent le plus souvent témoignent de l’incompréhension, de la douleur, de la colère », témoigne Thierry Della qui rappelle que la psychiatrie, c’est aussi de la dangerosité. Le psychiatre observe aussi que la peine et l’inquiétude sont les sentiments qui reviennent le plus dans tous les témoignages recueillis « d’autant que l’auteur des faits n’a pas été retrouvé », explique le médecin.

4

Même si des précautions ont été prises avec le renforcement des rondes de police et des veilleurs de nuit, « le fait que quelqu’un qui a commis un tel acte soit en liberté et que l’on ne sache pas ce qu’il recherchait dans cet acte renforce le sentiment d’inquiétude notamment parmi le personnel de nuit », dit-il. « Tout le monde se pose des questions. S’agit-il ou non d’une vengeance ? Le fait de ne pas savoir alimente l’incertitude et la crainte », indique le psychiatre qui souligne que s’ajoute à ce stress le fait que « chacun peut s’identifier aux victimes qui étaient deux mères de famille ». Les personnes qui ont vu la scène du drame ont été « confrontées à de telles images d’horreur qu’elles sont envahies par ces images », ajoute le médecin pour qui « il faut les aider à exprimer leurs sentiments pour les gérer et les évacuer ». Elles ont subi une « effraction psychologique qui est difficile à mettre à distance », selon lui. Et même si le « personnel de cet hôpital peut être confronté à de la violence, il n’est jamais confronté au

Lundi 20 décembre 2004

Des fleurs ont été déposées à l'entrée du bloc de l'hôpital psychiatrique. Des gestes qui témoignent de la vive émotion provoquée par le drame. meurtre. D’autant que les personnes qui travaillaient de ce pavillon de psycho-gériatrie soignaient des personnes âgées et non violentes ». Aujourd’hui lundi et mardi, une autre équipe, dirigée par le doc-

teur Marc Passamar viendra d’Albi assurer le relais et aussi assister l’équipe locale qui, par sa proximité, risque d’être trop directement impliquée affectivement dans le drame.

pourra avancer. On est trop sous le coup de l’émotion », expliquait hier une infirmière. Une autre se souvient de ses deux collègues, « pleines de vie. On ne vient pas travailler pour mourir. » Un nouveau sentiment a aussi émergé. Au-delà de la douleur, c’est maintenant de la peur que chacun là-bas éprouve. « Le personnel a peur pour sa propre sécurité. Ce qui nous est arrivé est totalement exceptionnel » disait hier Serge Foursan, le directeur des soins. L’assassin court toujours. Et la peur de cet inconnu est encore alimentée par de folles rumeurs, démenties les unes après les autres. ISABELLE MAGNAVAL

Une messe pour Chantal et Lucette L’aumônier des hôpitaux de Pau, Jean-Marie Hiquet, a rendu hommage dimanche à la chapelle de l’hôpital psychiatrique de Pau à « Chantal et Lucette, mortes assassinées, sur leur lieu de travail, dans la violence et la folie ». « Nous sommes tous sous le choc d’un événement qui nous dépasse» a dit le religieux « dans un mot d’acceuil ». « J’ai tenu à dire que l’hôpital public est avant tout un lieu d’accueil, d’hospitalité et de soins » et qu’en « quelques heures (il) est devenu le lieu du crime et de l’horreur », a expliqué l’aumônier. Dans l’assistance, des infirmiers en retraite ou des membres du personnel qui n’étaient pas de service avaient pris place aux côtés de patients pour « se retrouver dans la prière », at-il noté. L’aumônier a aussi « prié pour celui ou ceux qui ont commis l’irréparable ».


Turn static files into dynamic content formats.

Create a flipbook
Issuu converts static files into: digital portfolios, online yearbooks, online catalogs, digital photo albums and more. Sign up and create your flipbook.