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SALAMA
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50E ANNIVERSAIRE DE L’INDÉPENDANCE
L’Algérie retrouve-t-elle sa mémoire ?
ABDELMALEK SELLAL
L’eau une sécurité nationale
EL GUSTO
Retrouvailles Photos : DR
N° 05 - avril-mai- 2012
magazine
SALAMA magazine
Algérie 200 DA - Maroc 22 DH - Tunisie 3 DTU - Afrique 2600 CFA - Espagne 3,25 € - Belgique 3,50 € - Suisse 5,50 CHF - Allemagne 5,50 € - Canada 4,50 $CN
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Coup de chapeau
À l’affiche
Le café de l’Histoire Barbès Café s’est installé, pour notre plus grand plaisir, au Cabaret sauvage du 1er au 24 février dernier.
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C’
est au Cabaret sauvage que le spectacle musical de Meziane Azaïche a été interprété sur le thème de l’immigration maghrébine en France. Dans les cafés de Barbès se réunissaient les chanteurs pour y clamer leur exil sur un fond de blues. La plupart travaillaient durement le jour et chantaient dans les cafés la nuit venue. En se penchant sur leurs chansons, on entrevoit des pages de l’histoire de l’immigration se tourner. Chaque soir, Lucette, la « roumia » nous a conviés dans son bar intimiste pour recevoir de nombreux invités qui ont chanté le répertoire de cheikh El Hasnaoui, Slimane Azem, Mohamed Mazouni, H’nifa, Aït Farida, Ourida, Bahia Farah, Hocine Slaoui, Dahmane El Harrachi, Akli Yahiaten, Kamel Hamadi, Mohamed Jamoussi, Missoum, Salah Saâdaoui ou Oukil Amar. Dans ce café populaire, on a aperçu Mouloud et ses amis
Les comédiens et musiciens ont assuré une ambiance conviviale et fraternelle.
ouvriers qui s’y retrouvaient pour prendre un verre après le travail. Ils nous ont fait vivre leurs souffrances, leurs joies et leurs déceptions. Les comédiens et les musiciens ont assuré une ambiance conviviale et fraternelle que l’on a ressentie jusqu’au fond de la salle. Le public ne se sera pas fait prier pour danser sur la piste au son des rythmes parfois mélancoliques et souvent enjoués de l’orchestre. À travers les brèves de comptoirs ont été abordées
les difficultés rencontrées lors de la guerre d’Algérie puis celles dues à l’exil, de façon très pédagogique entre supports vidéos et images d’archives, pour mettre en exergue l’importance de la richesse de ce patrimoine musical teinté de nostalgie. Le public aura eu le privilège de vivre ou de revivre ces périodes marquantes de l’histoire de l’immigration maghrébine en musique. n Lynda Bachli
El Gusto, le goût de vivre
Le phénomène El Gusto a enchanté la France par l’intermédiaire de sa musique chaâbi.
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L
e film documentaire El Gusto est déjà sorti en salle, en France. Il retrace l’histoire de la musique chaâbi qui fait partie du patrimoine algérien. Cette musique populaire est née à la Casbah d’Alger, dans les années 1920, grâce au maître El Anka. Une balade à travers le temps et les rues d’Alger nous fait découvrir la constitution de la troupe El Gusto. Une joie de vivre commune ressort des récits de ses artistes. Ils expliquent, d’une voie émue, comment le contexte historique les a séparés, il y a de cela cinquante ans. Ils révèlent aussi le rôle qu’ils ont joué pendant la période de la guerre d’Algérie. Parfois, ils utilisaient leurs chansons ou leurs instruments pour faire passer des messages. Ou ils se réfugiaient dans cette musique pour oublier « la misère, la faim, la soif ». Mais toute cette aventure débute par une rencontre : celle de Safinez Bousbia, la réalisatrice, et d’un miroitier qui lui raconte son histoire de musicien ayant fait ses classes dans les années 1940. Puis, elle ira à la recherche de ses vieux amis pour retrouver les 42 personnes qui constitueront El Gusto. À l’occasion de la sortie du film, les musiciens musulmans et juifs de la bande ont chanté ensemble, les 9 et 10 janvier au Grand Rex. La réalisatrice, autodidacte, nous a confié une astuce de tournage : elle allume la caméra bien en avance de façon que les musiciens oublient son existence. Ce qui permet de faire ressortir à l’écran leur véritable personnalité. n L.B. avril-mai 2012 • numéro 05 • Salama • 9
À l’affiche
Coup de chapeau
Un nouveau musée du monde arabe
M
arie Foissy, conservatrice en chef du patrimoine et chef du projet de refonte du musée, précise : « La transposition en termes muséographiques du nouveau concept s’est fondée sur les hommes et non, comme on le fait classiquement,surlesobjetsdelacollection,orientés vers les arts de l’islam, qui s’étend bien au-delà de cette aire. » Une vision globale mais synthétique du monde arabe est présentée en prenant en compte la diversité de ses cultures et de ses traditions. Une promenade sur quatre niveaux est proposée par le scénographe Roberto Ostinelli qui a confié que son but principal est de susciter l’émerveillement. Il explique que tous les objets sont traités de la même façon, comme doivent l’être les humains, car ils sont tous importants. Les œuvres de la collection sont mises en valeur par un jeu de lumières et de transparence qui s’intègre parfaitement dans l’architecture de Jean Nouvel. Les collections exposées viennent de musées de pays arabes du Moyen-Orient et du Maghreb,
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Le nouveau musée de l’Institut du monde arabe a ouvert ses portes au public. Après trois années de travaux, il renaît avec un espace et un concept totalement repensés.
Le musée. En médaillon : Roberto Ostinelli, scénographe.
de collectionneurs privés, d’institutions religieuses du Liban et de la Syrie ainsi que d’institutions françaises. On peut désormais explorer les cultures du monde arabe à travers un parcours thématique couvrant de grandes périodes historiques incluant le passé préislamique des pays arabes. Le choix du premier thème a été judicieux, puisqu’il s’agit de : « Les Arabies, berceau d’un patrimoine commun ». L’origine de l’arabité ressort des textes et des objets exposés. On traverse la période de « l’Arabie heureuse » pour poursuivre son chemin dans les déserts des nomades. La culture algérienne est notamment représentée par l’exposition du patrimoine touareg et amazigh. Puis, on accède à la deuxième partie intitulée « Sacré
et figure du divin » qui livre les principaux courants spirituels et religieux que connait le monde arabe. La visite se poursuit par un espace nommé « Les villes », que l’on traverse pour arriver à « L’expression de la beauté ». Éric Delpont, directeur des collections, dit à ce propos : « Le merveilleux, depuis l’émerveillement que suscite un objet rare jusqu’à la figuration du fantastique et de l’invraisemblable, est pareillement source de beauté. » On arrive au bout du chemin avec la partie intitulée : « Un temps de vivre ». Ainsi s’achève le magnifique voyage à travers le temps et l’espace du monde arabe. Les héritages diversifiés constituant l’identité arabe resteront gravés dans notre mémoire. n Lynda Bachli
Journée de la femme
Une artiste sort du lot
Dans le cadre de la Journée internationale de la femme, une exposition regroupant des artistes de plusieurs pays a été inaugurée le 8 mars 2012 à Paris, dans les locaux de l’Organisation des Nations unies pour l’éducation, la science et la culture.
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À La Mère, de Lindart.
l’occasion de la Journée internationale de la femme, des femmes artistes ont exposé des photographies, des peintures ou des installations contemporaines. Parmi elles, une artiste calligraphe d’Algérie s’est particulièrement distinguée par sa façon novatrice d’aborder le sujet de la femme. Ses tableaux ont connu beaucoup de succès. Il s’agit de Lindart. À travers ses œuvres, on distingue une représentation de la femme à la fois sensible et poétique. En effet, elle dessine ses caractéristiques et son destin par l’intermédiaire des plantes. La calligraphie se mêle à la nature afin de décrire la vie d’une femme. La jolie plante juvénile devient l’arbre de vie. Jeune, elle incarne la beauté, plus âgée elle évolue vers la sagesse. Lorsqu’on lui demande d’où lui est
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venue son inspiration, elle répond que c’était lors d’une balade en forêt par une belle journée ensoleillée. La femme s’écrivait dans cette nature luxuriante qui l’entourait. Ce fut l’élément déclencheur qui donna naissance à une série de tableaux. Parmi ses magnifiques œuvres, soulignons celle intitulée La Mère. Par son intermédiaire, elle souhaite transmettre un message : le privilège sacré de pouvoir donner la vie constitue une grande force. Par le lien qui les lie à jamais à leurs enfants, les mères détiennent les clés du changement de toute la société humaine ! Chose que les hommes ne pourront jamais accomplir sans le soutien de leur épouse et l’éducation donnée par leur mère. La talentueuse artiste a ainsi superbement interprété la beauté de la femme et son évolution le long de sa vie. n L.B.
Craf : passeports symboliques pour l’union
U
important, pour Farida Verhaeghe-Amiri, de les dissocier, puisqu’elle considère chacun des pays comme appartenant à un ensemble. L’heure est à l’uniformité. Notre seule force c’est l’unité et l’entente, à l’image des autres
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nité. C’est le mot d’ordre du Conseil représentatif des associations et institutions françaises de culture musulmane (Craf). À l’initiative de sa présidente, Farida Verhaeghe-Amiri, des passeports symboliques ont été publiés sur le site www.craf-france.org, pour mettre en exergue cette notion d’unité du Maghreb et des pays arabes. Cette idée est née d’une réelle volonté pour Farida Verhaeghe-Amiri d’engager le pas, le vrai, vers cette union. « Nous sommes tous des Maghrebins, nous sommes tous pareils, nous devons être unis », declare-t-elle. Les révolutions arabes, qui ont débuté au Maghreb, ont été l’élément déclencheur, « Le moment ou jamais », selon la présidente du Craf. Le président algérien, Abdelaziz Bouteflika, et son homologue tunisien, Moncef Marzouki, ont eux aussi appelé à l’unité, une unité « pressante car vital », selon le president algérien. Le Craf a saisi cette occasion pour dire à ces dirigeants d’aller au bout de leurs idées, en créant ces passeports symboliques. Une liste de trois sortes de passeports a été dressée sur le site du Craf : les passeports maghrebins (Union du Maghreb), africains (United States of Africa), et arabes (Arab Union). Un choix
Farida Verhaeghe-Amiri.
puissances. Il ne suffit pas d’en parler, il faut agir. Pour en finir avec les a priori sur l’un et sur l’autre, les faiblesses et les regards envieux sur l’Occident, unissons-nous pour ne former qu’un seul bloc et créer une unité des peuples, et non seulement géographique. n Vanessa Meflah
À l’affiche Timbre
La poste célèbre les 50 ans de l’indépendance de l’Algérie À
l’initiative de Farida VerhaegheAmiri, présidente du Conseil représentatif des associations et institutions françaises de culture musulmane (Craf), le monument aux morts à Alger, en mémoire aux martyrs de la guerre d’indépendance, arrive sur vos enveloppes. Érigé à Alger en 1982 pour le 20e anniversaire de l’indépendance de l’Algérie, c’est aujourd’hui à l’occasion du 50e anniversaire qu’il figure sur un timbre édité par La Poste française. Farida Verhaeghe-Amiri n’a rencontré aucunes difficultés pour faire éditer les 3 plaquettes de 30 timbres chacune, elle compte d’ailleurs en commander d’autres. « Cet acte est très symbolique puisqu’il montre que l’État français accepte de parler de cette histoire qui nous lie, avec sérénité », explique-t-elle. « J’ai créé ce timbre dans un esprit de réconciliation, d’amitié et d’apaisement entre les deux pays », ajoute-t-elle. Farida a tout financé elle-même, c’est un réel désir de rapprochement qui l’a poussée à faire ce timbre hautement symbolique. Ces timbres sont officiels, ils sont valables à l’international et affranchis pour 20 g. En revanche, ils ne sont pas vendus à La Poste, c’est directement à la présidente du Craf qu’il faut s’adresser (via le site : www.craf-france.org). « Je souhaiterais les offrir plutôt que les vendre, dans la mesure du possible, bien sûr », précise-t-elle. Ne serait-il pas merveilleux de voir circuler ces timbres à travers le monde ? De voir l’un des monuments de la guerre d’indépendance de l’Algérie traverser les frontières ? Que le 50e anniversaire de l’indépendance de l’Algérie soit fêté et honoré, qu’il ait un écho ailleurs que dans nos cœurs et nos mémoires… n V.M. avril-mai 2012 • numéro 05 • Salama • 11
À l’affiche
Fadila Sammari, une femme de cœur
Fadila Sammari est de celles qui vont toujours de l’avant. Elle défend avec passion plusieurs actions, notamment le développement des liens entre la France et l’Algérie. Une belle rencontre pour VivreNancy.
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Excelsior un après-midi. Le soleil inonde la brasserie et fait presque oublier les températures glaciales qui règnent au dehors. Fadila Sammari nous reçoit avec son jeune fils, souriante et attentionnée. L’approche du wee-kend la réjouit. « L’occasion de souffler un peu », nous confie-t-elle. Il faut dire que son agenda bien rempli est le reflet de son dynamisme et des multiples activités qu’elle mène de front.
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À cheval sur deux cultures
Je suis une femme de l’image. La communication permet de changer les choses. 12 • Salama • numéro 05 • avril-mai 2012
Née à Belfort de parents algériens émigrés en France, elle adopte à 18 ans la Lorraine et vient faire une maîtrise de lettres modernes à Metz. Ses études confirment son amour de la littérature et de la langue françaises. Ses auteurs préférés ? Gracq, avec notamment Le Rivage des Syrtes et Le Château d’Argol, mais pas seulement. Elle ne peut s’empêcher d’ajouter Montaigne, Montesquieu, ou Zola. « Ce sont des piliers de la littérature française, ils font partie du patrimoine national. Ça, c’est de la véritable “literature” ». Mais cette passion littéraire ne s’arrête pas à la seule culture française. Fadila Sammari est à cheval sur deux cultures : française et algérienne. « J’ai un pied sur chaque continent. » Elle cite alors son admiration pour Camus ou pour d’autres auteurs algériens trop peu connus en France, comme Assia Djebar ou Malika Mokkedem. On ne s’étonnera donc pas que Fadila Sammari soit en train de peaufiner, pour les 50 ans de l’indépendance de l’Algérie, un bel ouvrage consacré à 100 portraits d’Algériens et Algériennes de France (Chronique française, destins algériens, à paraître, 2012). Elle a aussi dans ses cartons un projet de roman, mais… chut ! il est encore trop tôt. Fadila Sammari fait partie de nombreux cercles comme les Entretiens de l’Excellence (dont elle est la marraine 2012) ou le Cercle économique
de Lorraine. Le Cercle des entrepreneurs industriels et algériens de France (Ceinaf) est l’un de ceux qui lui tiennent le plus à cœur. « C’est un cercle dynamique et sympathique qui compte environ 450 adhérents. Notre but est de renforcer les échanges avec l’Algérie, notamment commerciaux, et d’améliorer l’image de la communauté algérienne en France qui souffre encore de trop de préjugés. Bref, on veut resserrer les liens. » Une démarche plus que louable, dans un contexte encore difficile. Le poids de l’histoire, sans doute. Après sa maîtrise de Lettres, Fadila Sammari étudie les sciences du langage et de la communication. C’est une révélation. « Je suis avant tout une femme de l’image. La communication, et le pouvoir qu’elle offre, permet de faire changer les choses. » Après sept ans passés chez Batigère, elle intègre le groupe Veolia dont elle dirige aujourd’hui la communication pour tout le Grand Est.
Combat contre l’illetrisme Ses premières armes chez Veolia, elle les a faites au contact des populations défavorisées. « Le combat, souligne-t-elle, est immense puisqu’il s’agit de l’illettrisme. » Elle monte un projet et offre la possibilité à une centaine de personnes de retrouver le goût de « l’apprenant ». Une réussite qu’elle mène pendant plus d’un an dans le Pays Haut. Ainsi, elle peut imaginer, créer et mettre en œuvre des solutions. Les bases de la communication, en réalité. Comment résumer la riche personnalité de Fadila Sammari ? Une curiosité évidente des autres et de ce qu’elle ne connait pas (c’est une grande voyageuse). Un multiculturalisme aussi, qui lui permet d’avoir un regard toujours plus ouvert. En bref, connaitre et rapprocher les hommes. n Étienne Martin
politique
élections législatives
La voix des Algériens établis à l’étranger Chafia Mentalecheta, candidate tête de liste de l’Union des forces démocrates et sociales (UFDS) pour la France-zone 1, a décidé de se lancer dans la course à la députation. Celle qui travaille dans le social entend maintenant aussi œuvrer pour le peuple algérien. Pour Salama, elle se dévoile afin de mieux se faire connaître par ses électeurs, qui, elle l’espère, seront nombreux à la porter à l’hémicycle Zighoud-Youcef, l’Assemblée populaire nationale.
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caine algérienne. Avant tout, nous avons sécurisé les compétences, nous avons développé des expertises et nous sommes prêts à les rapatrier en Algérie pour les partager avec nos confrères locaux, affirme-t-elle, tout en rajoutant avec une certaine amertume que, malheureusement, en Algérie, nous avons du mal à identifier des interlocuteurs décisionnaires. Nous les trouvons seulement pour aider notre peuple lors de catastrophes naturelles. Nous voulons passer de l’aide émotionnelle à l’aide opérationnelle. »
Œuvrer pour des services consulaires de proximité La communauté nationale établie en France est également soumise à la problématique du transfert de devises. « Nous en avons assez d’être les vaches à lait de Western Union, s’insurge-t-elle. Pourquoi n’avons-nous pas à notre disposition une véritable banque, comme les Marocains et les Tunisiens ? Nous pourrions ainsi déposer notre épargne dans une banque algérienne, ce qui permettrait à notre pays d’avoir de véritables réserves hors hydrocarbures. » Sur le volet économique, elle va plus loin en préconisant la création d’une agence de développement économique. Jusqu’à présent, la création d’une entreprise en Algérie par un expatrié algérien constitue un « véritable parcours du combattant. Il faut en finir avec cette bureaucratie, cette torturocratie. » Chafia Mentalecheta n’oublie par pour autant les ressortissants qui disposent de biens au pays et qui se trouvent confrontés à l’appareil judiciaire pour retrouver leurs droits. Elle « J’ai l’Algérie dans le sang et rien ni personne ne me fera renier mes idéaux », affirme Chafia Mentalecheta.
préconise la création d’un pôle juridique pour orienter et accompagner les ressortissants dans leurs démarches en Algérie. Elle constate également que rien n’a été fait pour les retraités isolés, qui ont travaillé à la sueur de leur front, et qui vivaient dans des foyers Sonacotra. Comme beaucoup le savent, ces mêmes retraités ne
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ette décision, je l’ai prise sereinement. J’ai beaucoup réfléchi et je me devais de m’engager au service de ma communauté établie dans l’Hexagone. Je suis une femme, je suis algérienne, j’ai l’Algérie dans le sang et rien ni personne ne me fera renier mes idéaux. » Ainsi se présente Chafia Mentalecheta, 53 ans, mère de 3 garçons, qui se veut ainsi non seulement la candidate de toute la communauté algérienne établie dans la zone 1 de la France, mais aussi la députée qui veut donner une tout autre image de l’élu algérien. Son engagement est le fruit de plusieurs années de travail. Cofondatrice de l’Espace franco-algérien, elle s’est donné pour mission « d’organiser la diaspora, de développer les liens entre la France et l’Algérie, le tout dans un esprit de respect et de partage des savoir-faire, des expertises dans tous les secteurs d’activité. » Pour Chafia Mentalecheta, « tout ce qui est du ressort de l’expertise et de la compétence est à mettre au service des Algériens du pays. Je travaille sur l’insertion des jeunes depuis vingt ans. Nous pouvons permettre à l’Algérie d’éviter les erreurs commises en France en matière de politiques publiques dans les domaines tels que l’urbanisme, le chômage des jeunes ou la sécurisation des parcours professionnels. » Elle va plus loin, même, en évoquant le cas des médecins franco-algériens en France, en expliquant que si davantage de moyens leur étaient offerts jamais ils ne partiraient. Les chefs d’entreprise ? « Nous en avons beaucoup qui pourraient exporter leur savoir-faire, malgré le reproche que leur font certains suite à leur départ précipité pour cause de terrorisme. Eux, comme moi, sommes issus de l’école républi-
élections législatives peuvent rester en dehors du territoire français plus de six mois et trois jours. Pour elle, la revalorisation du statut de nos aînés ne peut se faire que par le biais d’une négociation d’État à État. Elle enchaîne sur la problématique du rapatriement des corps : « Il faut renégocier l’assurance avec la SAA et la Macif, car les critères prévus de rapatriement n’ont aucun sens. Nous avons besoin d’un service public de qualité. » Quid de ce service public de qualité ? « Regardons les services consulaires. Il y a, en France, tous les moyens possibles et modernes. Nous devons œuvrer pour des services consulaires de proximité. Il est inadmissible que certains de nos concitoyens soient obligés de faire 400 kilomètres juste pour une pièce d’identité. » Soucieuse de pouvoir parvenir à éviter toutes sortes de désagréments à ses compatriotes, Chafia Mentalecheta pense également au prix du billet d’avion, qui doit être l’objet d’une négociation directe d’État à État sur la taxe des aéroports. Dans le dossier d’Air Algérie, elle met pleinement en exergue la grève qui a secoué la compagnie l’été dernier. « Une grève désastreuse pour notre communauté mais aussi pour l’image de notre compagnie nationale. »
La disposition 49-51 ? Une absurdité Une aberration la fait sursauter, la loi 49-51. « C’est l’exemple même du regard que pose l’Algérie officielle sur nous. Il est inadmissible qu’un Algérien résidant en France ne puisse être patron dans son propre pays d’origine. Nous revendiquons la citoyenneté de droits comme de devoirs. Nous sommes des citoyens électeurs, éligibles, nous sommes prêts à payer nos impôts, s’il le faut. Mais avec cette loi ridicule, nous sommes considérés comme des citoyens de seconde zone, alors que certains de nos compatriotes établis à l’étranger ont fait le courageux choix du service
Politique
Je veux être celle qui aura marqué de sa présence à l’Assemblée populaire nationale la représentation des Algériennes et des Algériens de France. national en Algérie. Si je suis élue, je me battrai pour que cette disposition soit complètement abrogée », lance-t-elle. Pleinement présente au sein de l’Hexagone, elle constate l’absence notoire des députés FLN et RCD sur le terrain lors du dernier mandat. Elle constate que « 400 000 Arméniens sont parvenus à faire voter une loi criminalisant le génocide, mais que les Algériens sont incapables d’influer réellement pour faire voter une loi sur le 17 octobre 1961 ». Pour elle, « 2012 est l’occasion de consolider le devoir de mémoire pour laisser en héritage aux générations futures une vraie relation d’amitié entre les peuples ». Elle se rappelle l’affaire qui a éclaté lors des élections régionales en France concernant l’utilisation du drapeau algérien par le Front national, alors encore dirigé par le père de l’actuelle candidate à l’Élysée de cette formation. Elle revendique être à « l’origine de l’attaque contre Jean-Marie Le Pen, à cause de cette affiche représentant la France drapée dans un drapeau algérien. Il a fallu néanmoins une dizaine de jours pour que l’État algérien réagisse contre cette atteinte à notre emblème national ». Une lenteur à la détente qui pourrait disqualifier l’image de la République algérienne. « Il faut faire comprendre à l’État algérien que nous nous intéressons à l’Algérie et que nous aimons l’Algérie. Il faut arrêter de nous regarder comme si nous étions une verrue, mais comme une composante à part entière de l’Algérie, de la nation algérienne, revendique-t-elle. C’est la raison pour laquelle nous voulons des parlementaires
de terrain, présents et à l’écoute de nos compatriotes établis à l’étranger. Nous ne voulons plus de parlementaires touristes à la manière de Monsieur Tout va bien (le député FLN, ndlr) et de Monsieur Tout va mal (le député RCD, ndlr) qui se sont accordés pour disparaître de la circulation dès leur élection. »
Renforcer les liens entre les jeunes d’Algérie et ceux de France Chafia Mentalecheta estime que des échanges doivent se faire régulièrement entre l’Algérie et la communauté établie à l’étranger. Elle constate que « beaucoup de familles aimeraient envoyer leurs enfants sur le territoire national pour des séjours linguistiques, et ce, afin de pouvoir renforcer leur algérianité. Souvent, quand ils viennent l’été, ils vont dans leurs familles, sans réellement découvrir leur pays d’origine. Ce type de séjour doit être organisé toute l’année, afin de renforcer les liens entre les jeunes d’Algérie et ceux de France ». Chafia Mentalecheta, trop optimiste pour son pays et sa communauté ? « Oui, si je suis élue, je veux agir pour le changement et concrétiser notre volonté de participer activement à la construction d’une Algérie moderne, juste et solidaire. Je veux marquer, par ma présence à l’Assemblée populaire nationale, une réelle représentation des Algériennes et des Algériens de France. » Elle ajoute qu’en revalorisant le citoyen établi de l’autre côté de la Méditerranée c’est toute l’Algérie qui aura à y gagner. n Salah Karki
Fondateurs de l’Espace franco-algérien Alger – juin 2008
Chafia Mentalecheta et Akli Mellouli Cet espace a pour vocation de rassembler la diaspora algérienne établie en France. L’association concernant plus particulièrement les binationaux précise le statut de la double appartenance qui se traduit par un double attachement au pays d’origine et au pays d’accueil. « Nous sommes citoyens français et nous sommes et serons toujours aussi algériens. D’abord, parce que nous restons profondément attachés à nos racines et qu’il n’est pas question pour nous de les renier. Ces racines algériennes nous structurent et il est toujours essentiel de savoir d’où l’on vient pour construire son chemin. Ensuite, parce que le regard que pose sur nous la société française malgré notre citoyenneté et notre réelle insertion sociale et professionnelle nous renvoie en permanence
à notre “extériorité” et à notre “étrangéité”. D’où notre combat à faire accepter la nouvelle société française du XXIe siècle définie par sa multiculturalité et ses diverses appartenances. Enfin, parce que nous voulons prendre notre part dans la construction de l’Algérie du XXIe siècle. Nous voulons définitivement mettre un terme à ce sempiternel statut de migrant. Nous ne voulons plus être vus comme des émigrés en Algérie et des immigrés en France. Pour nous et nos descendants, nous voulons désormais nous reconnaître et être reconnus comme citoyens français en France et citoyens algériens en Algérie. » n S.K.
avril-mai 2012 • numéro 05 • Salama • 21
portrait
Hamid Benamra, guetteur d’images Amoureux du mouvement, du verbe et du geste, il a une passion pour les arts martiaux, la poésie et la danse. Il est le témoin de son histoire, comme il aime à le dire. En filmant les personnalités reconnues, il fait d’eux les témoins de l’engagement d’un cinéaste sincère. Rencontre. Métro de Tokyo.
Salama : Entre le premier film de fiction tourné en Algérie en 1981 Pour une vie meilleure et le dernier documentaire achevé en 2011 Bouts de vies, Bouts de rêves, trente ans se sont passés. Comment se fait-il que tu n’aies pas obtenu la reconnaissance de tes aînés ? Hamid Benamra : Il n’était pas question d’être connu ou reconnu, il était question de faire. Je suis un enfant du cinéma populaire et j’ai fait du cinéma avec des moyens exclusivement personnels, c’est le prix de la liberté. Enfant de la cinémathèque algérienne, nourri par le cinéma russe des années 1920, j’ai compris que le cinéma ne racontait pas une histoire avec des images, mais avec un rapport d’images, et que la façon de filmer était plus importante que le sujet lui-même. Si tu maîtrises la grammaire cinématographique, tu peux tout raconter, mais pas le contraire. Le cinéma a nourri ma sensibilité qui ne pouvait grandir et se développer sans une cuirasse contre l’avidité et le mirage des paillettes. Je suis un enfant de René Vautier et de Djamel Chandarli et témoin de mon histoire.
Hamid Benamra
Salama : Tu as vécu autant de temps en Algérie qu’en France. Que t’ont apporté ces deux cultures ? H.B. :En Algérie, j’ai fait développer mes outils de vie. Issu d’une formation littéraire, le verbe arabe a structuré ma pensée, de la poésie d’avant l’islam, à celle de l’Andalousie, la liberté est omniprésente dans chaque vers. En France, j’ai aiguisé mes outils. J’ai apprivoisé la langue de Molière, j’ai côtoyé des regards et des sensibilités d’horizon divers, j’ai fait le tour du monde en restant à Paris.
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Salama : Tu as porté le kimono à l’âge de 7 ans et tu le portes encore aujourd’hui. Le karaté, est-ce une passion ou une nécessité ?
portrait
Salama : Dans Bouts de vies, Bouts de rêves, tu as filmé des personnalités révolutionnaires qui ont marqué leur histoire et qui ont un lien très fort avec l’Algérie au moment où celle-ci était « la Mecque des révolutionnaires », comme le souligne Mustapha Boutadjine dans le film… H.B. : Ce film est parsemé de visages tous considérés comme emblèmes de révolutions. Filmer Angela Davis en train de recevoir un portrait fait par Mustapha Boutadjine, à base de bouts de magazines, est une façon d’évoquer la lutte des Afro-Américains pour leurs droits civiques. Filmer Abraham Serfaty ou Henri Alleg évoquant leur passé est un soutien à tous les opprimés dans le monde. Poser son objectif sur Mahmoud Darwish ou Adonis, c’est mettre en lumière la puissance de chaque syllabe quand elle sert une cause juste. Saisir le regard pétillant de Miriam Makeba est un écho de toute une Algérie heureuse de son indépendance. Ouvrir le champ de sa caméra aux artistes anonymes de mon quartier natal est un hommage à tous les talents cachés. En filmant des personnalités reconnues je ne cherche pas une caution pour mon travail, mais je fais d’eux les témoins de l’engagement d’un cinéaste sincère. La révolution est certes dans l’air des saisons, mais la seule révolution en laquelle je crois aujourd’hui c’est celle de l’amour.
Se laisser regarder.
Stéphane Benamra
H.B. : C’est devenu un sacerdoce, je suis lié à l’amour du mouvement, à l’énergie du ventre, le hara. Mon père m’y a obligé afin de survivre dans la jungle d’un quartier populaire, la Glacière. Tenir une caméra et ne faire qu’un avec l’objet, être à l’affût de chaque expression, prendre la décision de tel ou tel angle de prise de vue, autant de facultés qui n’exigent pas seulement de la concentration mais surtout une conscience aiguë de chaque instant. Ce que je n’ai pas appris dans une école de cinéma, je l’ai appris sur le tatami. Filmer un peintre comme Mohamed Aksouh qui cherche les nuances de ses pigments exige un respect de son espace. Filmer la danse orientale d’Assia Guemra et de Souraya Baghdadi ou se faufiler dans les coulisses du Moulin-Rouge avec la danseuse Joe Coco nécessitent une attitude saine et une présence quasi transparente afin de capter l’essence du féminin et de l’artiste. Le karaté a cessé d’être une obligation pour devenir le lien entre le corps et l’esprit.
Salama : Dans Mots d’elle, le spectacle inspiré de tes poèmes et monté au Studio Chandon avec Souraya Baghdadi, Hella Vuong et Vi, tu as mis en scène l’ondulation secrète du féminin, c’est la danse orientale ou la danse des mots qui t’inspire ? H.B. : La danse orientale telle qu’elle est pratiquée par Assia Guemra, Souraya Baghdadi et d’autres grandes dames est une école pour les hommes. Les hommes du Sud, en particulier. J’y ai trouvé des femmes qui ne sont pas en rapport de force avec le masculin, des femmes qui ne sont pas en rivalité entre elles, des femmes d’une grande sensualité, mais avec pudeur, toujours. La danse orientale a nourri mon masculin et a rendu fluide mon karaté. Je rêve de danser en publique, mais j’ai un tel respect pour cet art que je n’ose l’approcher que pour le mettre en lumière avec ma caméra, même si mes 8 de la danse orientale sont, je crois, assez justes (rire). Les mots dansent depuis l’enfance dans mon esprit. Les poèmes d’El Moutanabi ou de Mahmoud Derwiche ont accompagné mes pas depuis toujours. Les mots du premier sont fins et ciselés, ceux du second sont des balles qui ricochent sur ma mémoire. « Tout le monde peut porter une arme, tout ceux qui portent des griffes ne sont pas forcement des lions. » El Moutanabi. « La mort comme moi s’amourache brusquement et comme moi elle n’aime pas attendre. » Mahmoud Derwiche.
« Le portrait !/C’est un visage qui porte bien ses traits./C’est le port de tous les départs./ Un trait ondulé autour d’une voix./C’est être en accord avec son âge./L’âge de ses rêves./ Le portrait !/C’est apprivoiser un sourire secret./Être dans un cadre sans contour./Le portrait !/C’est l’identité d’un fantasme./C’est un miroir invisible./Le portrait !/C’est se laisser regarder sans être jugé./Sans être épié./C’est une lumière projetée par le regard de l’autre./Le portrait !/C’est cet autre que j’aimerais être. » (Poème extrait du recueil Mots d’elle de Hamid Benamra, inédit). n Assia Belaje Les extraits des films d’Hamid Benamra sont sur www.nunfilm.com
Salama : Si tu devais réaliser ton autoportrait quel serait-il ? H.B. : Curieusement, quand il s’agit de faire mon cinéma, c’est avec les mots que je le fais. avril-mai 2012 • numéro 05 • Salama • 27
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ÉCONOMIE
La sécurité de l’eau
La mise en œuvre d’un droit à l’eau et à l’assainissement, l’avenir du dessalement de l’eau, la gestion des eaux usées et le développement durable, sans oublier la promotion de la coopération sur les eaux… L’Algérie à lancé de grands chantiers et a démontré qu’elle était capable de régler le problème de l’eau potable. Entretien avec le ministre des Ressources en eau, Abdelmalek Sellal. Salama : Vous avez représenté l’Algérie au 6e Forum mondial de l’eau à Marseille. Quelles sont vos appréciations sur les actions et les engagements de ce forum ? Abdelmalek Sellal : L’Algérie a toujours été un partenaire actif du processus du Forum mondial de l’eau, et ce, depuis son initiation. Nous croyons fermement que l’eau est un défi planétaire et qu’elle constituera l’enjeu géostratégique majeur de ce millénaire. Une prise de conscience à l’échelle mondiale est donc indispensable et urgente. Du premier forum à celui de Marseille, nous constatons une évolution positive des mentalités et un rapprochement sur les questions de fond. Il faut pousser dans cette direction et, surtout, ne jamais se décourager, car il était utopiste de penser que tout serait réglé à Marseille. Le chemin est encore long devant nous.
Le forum de Marseille, à travers sa déclaration ministérielle, a mis l’accent sur l’accès à l’eau et aux services d’assainissement pour le bien de tous, la dimension de l’eau dans les volets énergétique, environnemental et alimentaire, la présence de la notion eau dans les conventions internationales et les politiques de développement urbain et, enfin, la gouvernance et le financement des services de l’eau. La communauté internationale s’intéresse et apprécie la politique hydrique de l’Algérie. Les rendezvous comme le Forum mondial de l’eau constituent des étapes importantes pour échanger avec nos partenaires et continuer à apprendre, car nous estimons qu’il est important d’ancrer le principe que l’accès à l’eau est un droit humain fondamental comme nous aspirons à améliorer l’efficience de nos politiques pour le bien de nos concitoyens.
Salama : Pouvez-vous nous relater les grands projets en cours de réalisation dans le secteur de l’eau, des transferts et du dessalement de l’eau de mer ? Quelles sont également les grandes actions inscrites pour le quinquennat 2010-2014 dans votre programme ? A.S. : En plus de plusieurs barrages en travaux et de la poursuite de la réalisation des stations de dessalement d’eau de mer et d’épuration des eaux usées, les principaux projets actuellement en chantier dans notre secteur sont au nombre de trois : la seconde phase du complexe hydraulique Béni Haroun où il s’agit de la connexion du barrage réservoir d’Oued Athmania avec les retenues d’Ourkiss (w. Oum El Bouaghi) et Koudiat Meddaouar (w. Batna) ; le système des hautes plaines sétifiènnes consistant en l’interconnexion de deux barrages en exploitation (Erraguène et Ighil Emda) avec trois nouveaux
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Barrage de Taksebt (wilaya de Tizi-Ouzou).
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économie
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ouvrages à réaliser (Tabellout, Draa Diss et Mahouane), et ce, pour le renforcement de l’AEP dans la région et le développement agricole ; le grand transfert des eaux de la nappe de Chott El Gharbi pour renforcer l’alimentation en eau potable des agglomérations du sud de Tlemcen, du nord de Nâama et du de l’ouest de Sidi Bel Abbès. Le plan quinquennal 2010-2014 réserve au secteur des ressources en eau une enveloppe budgétaire de 870 milliards de dinars. Il prévoit, entre autres, la réalisation de 18 barrages ainsi que la poursuite des programmes de dessalement d’eau de mer, de réutilisation des eaux usées épurées et d’exploitation des aquifères du Sahara septentrional en transférant leurs eaux vers l’extrême sud et les hauts plateaux. Pour améliorer les indicateurs de gestion technique des eaux en milieu urbain. Salama : Récemment, vous avez annoncé que le projet de dépollution et de réaménagement de l’Oued El Harrach sera achevé en 2014, avec la réalisation d’une station d’épuration des eaux industrielles usées. Où en êtes-vous ? A.S. : Oued El Harrach fait l’objet, de la part du secteur des ressources en eau, d’un intérêt particulier. En premier lieu, pour des impératifs de préservation de la ressource hydrique et de l’environnement, mais aussi par ce qu’il constitue, un point nodal du plan de développement et de réaménagement du grand Alger. Si la quasi-totalité des rejets d’eaux usées domestiques le long du tracé de l’oued sont collectés et transférés pour traitement vers la station d’épuration de Baraki, ce sont les rejets industriels, juste à l’amont de l’embouchure de ce cours d’eau, qui sont la principale source de sa pollution. Afin de faire face à cette situation, il a été engagé la réalisation d’un réseau de collecte d’eaux usées industrielles se déversant dans l’Oued El Harrach pour leur refoulement vers trois station d’épuration d’eaux industrielles à réaliser au niveau de la commune d’Oued Smar. Les différents travaux et procédures de passation de marché, au titre de ce grand programme, avancent à des rythmes conformes aux délais fixés. Salama : Vous avez résilié le contrat signé en 2007 avec l’opérateur allemand Gelsenwasser et prolongé celui de l’entreprise française Suez Environnement. Peut-on en connaître les raisons et vos appréciations sur la Marseillaise des eaux et Agbar ? 30 • Salama • numéro 05 • avril-mai 2012
A.S. : La problématique de la gestion de l’eau, potable et usée, se pose en milieu urbain en des termes très différents de ce qu’on l’on retrouve dans les zones rurales ou semi-rurale. Ce phénomène est accentué par le fait que certaines de nos villes, développement socio-économique aidant, tendent à devenir dans un avenir très proche de véritables métropoles. Il est ainsi apparu évident qu’il fallait créer des entités de gestion jouissant d’une large autonomie dont la mission serait de se consacrer exclusivement à la gestion de l’eau et de l’assainissement sur un périmètre donné. Entre 2005 et 2007, quatre sociétés par actions ont vu le jour par un processus de filialisation entre les deux établissements publics : Algérienne des eaux (ADE) et l’Office national de l’assainissement (ONA). La gestion des services publics de l’eau et de l’assainissement leur a été déléguée sur
L’eau constituera l’enjeu géostratégique majeur de ce millénaire. les villes d’Alger, d’Oran, de Constantine et du groupement urbain Annaba/El Tarf. Le management de ces sociétés a été confié à des opérateurs privé sur la base de contrats à objectifs (élever la qualité du service public, la distribution en continu – H24 –, l’amélioration du rendement des réseaux. Il est important de rappeler, à ce titre, que la gestion de l’eau en Algérie demeure un service public. L’État reste propriétaire des réseaux et unique décideur en matière de tarification. Les résultats obtenus sont probants dans certaines villes et plus ardus dans d’autres. À Alger, par exemple, la distribution en continu de l’eau est une réalité dans pressque tous les quartiers de la capitale et le rendement des réseaux s’est également amélioré C’est pour ces raisons que le contrat de management de la Société des eaux et de l’assainissement d’Alger (SEAAL) a été reconduit pour cinq années supplémentaires en y intégrant des responsabilités nouvelles pour le partenaire. Pour les expériences plus récentes, le partenariat à Oran se déroule de manière satisfaisante et, après un démarrage ardu, les choses semblent être reprises en main à Constantine. Quant au groupement urbain Annaba/El Tarf, l’Algérienne des eaux et l’Office national de
l’assainissement ont été contraints de mettre fin à la coopération avec le partenaire étranger pour cause de défaillance de ce dernier. Il est ainsi clair qu’il n’y a pas de règle générale. Quand un contrat de ce type est conclu, nous nous sentons tout autant concernés et responsables de sa réussite que le partenaire étranger. Notre constante en la matière d’améliorer la qualité du service public est que cela soit ressenti par le citoyen-consommateur tout en assurant le transfert de savoir-faire, car la finalité de la démarche est la reprise en main par l’encadrement algérien qualifié et aguerri des entités de gestion que nous avons créées. Salama : Vous avez signé un mémorandum de coopération dans le domaine des ressources en eau à Rabat (Maroc). Peut-on en savoir un peu plus sur cette coopération ? A.S. : Depuis mars 2011, un mémorandum d’entente encadre la coopération dans le domaine des ressources en eau entre le ministère des Ressources en eau en Algérie et le ministère de l’Énergie, des Mines, de l’Eau et de l’Environnement au Maroc. Cette coopération porte sur la proposition de programmes de coopération techniques et scientifiques, la participation aux conférences et séminaires organisés dans les deux pays ainsi que les échanges d’experts, d’expertise et d’information dans le domaine des ressources en eau. Le pilotage de cet accord de coopération a été confié à un comité technique mixte composé de cinq experts de chaque pays. La première réunion de ce comité technique s’est tenue à Alger les 3 et 4 juillet 2011. Salama : Beaucoup de communes en Algérie gèrent très mal l’eau et beaucoup de citoyens paient un prix dérisoire, alors qu’il va encore manquer beaucoup d’eau dans le monde. Quel est votre plan de lutte et vos prévisions ? A.S. : Tous les Algériens ont droit à la même qualité de service des eaux. Parallèlement, il serait injuste que les obligations tarifaires soit différentes d’une partie du territoire national à une autre. L’unicité de gestion est un objectif majeur de l’action de notre département. Le déploiement des entreprises ADE et ONA, en lieu et place des ex-EPDEMIA et des régies communales, est engagé depuis déjà quelques années. Cela a été achevé pour les établissements de wilaya et devrait être terminé pour le reste des communes d’ici à 2014. Il s’agit maintenant et, en seconde phase, de traduire se déploiement par une progression significative du nombre d’abonnés. La systématisation
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Avenir
Le ministre Abdelmalek Sellal entouré du photographe Yann Arthus Bertrand (à sa droite) et de Jean-Louis Chaussade, directeur général de Suez Environnement.
du comptage et l’amélioration du recouvrement constitueront, eux aussi, des priorités et des indicatifs importants pour mesurer l’efficacité de gestion des deux établissements de gestion. Salama : Apparemment la distribution d’eau H24 commence à devenir une réalité dans plusieurs grandes villes du pays. Quel est votre sentiment ? A.S. : Cela peut paraître paradoxal, mais c’est un mélange de fierté quand je vois ce qui a été accompli, et d’humilité en réalisant ce qui reste à accomplir. En l’an 2000, la pénurie d’eau asphyxiait nos grandes villes et agglomérations et on envisageait sérieusement d’importer de l’eau potable. Moins de dix ans après, nous approvisionnons la quasi-totalité des habitants de la capitale, et d’autres grandes agglomérations, en continu. Ils ne sont pas nombreux, en Algérie, à savoir ce que l’atteinte de cet objectif a nécessité comme investissement financier, technique et humain, à réaliser ce que représente vraiment le fait de doubler la capacité nationale de production d’eau potable et de faire progresser le linéaire des réseaux de distribution de plus de 100 % sur la même période. Mais je rends grâce
à Dieu et aux femmes et aux hommes du secteur des ressources en eau pour ces résultats prodigieux, je demeure humble face à la responsabilité qui est la nôtre de garantir la pérennité et le bon fonctionnement de ces infrastructures ainsi que de faire profiter de ce développement dans le service de l’eau tous les Algériens quelle que soit leur condition sociale ou leur lieu d’habitation sur le territoire national. Salama : Le marché des eaux minérales est florissant en Algérie. Y a-t-il vraiment un contrôle de la qualité de cette eau ? A.S. : Les mutations socio-économiques qu’a connues notre pays ces dernières années ont induit des transformations profondes des modes de consommation de nos concitoyens. Ainsi les eaux minérales, qui ont longtemps constitué des achats d’appoint lors de déplacements ou pour accompagner des thérapies médicales, sont devenues aujourd’hui des produits de consommation courante et quasi quotidienne. Cette progression de la demande sur le marché national ainsi que le fort potentiel de croissance de cette activité ont intéressé nombre d’opérateurs économiques qui se sont
positionnés sur ce segment porteur en créant des unités industrielles de production et en établissant des réseaux de distribution sur l’ensemble du territoire national. Dans ce domaine comme dans d’autres, les pouvoirs publics ont placé les critères de qualité et de sécurité alimentaire et sanitaire des citoyens consommateurs comme impératifs non négociables. Cette volonté politique a été traduite dans les dispositions du décret exécutif 01-196 du 15 juillet 2004, relatif à l’exploitation et à la protection des eaux minérales naturelles et des eaux de sources. Les missions d’homologation des eaux minérales, de contrôle de qualité et le suivi de l’exploitation et de la commercialisation sont menées de concert avec d’autres départements tels que le Commerce, la Santé, les collectivités locales et l’Environnement. Il est important aussi de signaler qu’à la faveur d’un amendement introduit sur les dispositions du décret 04-196, en février dernier, des institutions comme l’Institut pasteur et le Centre national de toxicologie ont intégré la composition de la Commission nationale des eaux de source et des eaux minérales. avril-mai 2012 • numéro 05 • Salama • 31
Avenir
Salama : L’Algérie est-elle vraiment menacée par la sécheresse, comme on le laisse entendre. Quel est votre plan de lutte ? A.S. : Le bouleversement climatique et les conséquences de l’action de l’homme sur son environnement font qu’aujourd’hui les cycles de sécheresse, comme d’autres phénomènes tels que les inondations et les ouragans, sont de plus en plus fréquents et dévastateurs. Avec un ratio par habitant de 600 mètres cubes par an, l’Algérie est un pays en stress hydrique, selon les critères de la banque mondiale qui fixe le seuil de rareté à 1 000 m3/habitant. La réponse des pouvoirs publics dans notre pays à la problématique de la rareté de l’eau repose sur quatre axes majeurs ; augmenter et diversifier nos capacités de mobilisation des eaux conventionnelles et non conventionnelles, réhabiliter et développer nos réseaux d’eau potable et usée, assurer une bonne gouvernance du cycle de l’eau en améliorant les indicateurs de gestion et, enfin, promouvoir l’économie de la ressource dans ses usages domestique, agricole et industriel. À ce jour, les différentes réalisations en barrages, grands transferts et installations de dessalement d’eau de mer et d’épuration des eaux usées nous permettent de dire que l’Algérie a gagné la bataille de la disponibilité de la ressource. Par ailleurs, la mise en œuvre de la politique des réserves stratégiques régionales des ressources en eau, fondée sur l’interconnexion des grands barrages du pays et des schémas d’affectation de la ressources affinés et élaborés à l’échelle des bassins hydrographiques, nous permet d’aborder la problématique de la disponibilité de l’eau au-delà de la simple année hydrologique et en
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économie
Abdelmalek Sellal en visite en Corée du Sud sur le chantier d’un barrage.
atténuant le poids de l’aléa climatique dans la balance hydrique nationale. Je tiens enfin à souligner l’importance de l’économie de l’eau dans ce domaine. Tous nos efforts seront vains si tous les Algériens n’adhèrent pas à une politique responsable et solidaire de lutte contre le gaspillage et la pollution. Au prix d’un effort financier et humain très lourd de la communauté nationale. L’accès à l’eau est maintenant une réalité. Il nous faut maintenant mieux la gérer et la préserver. Salama : Quelle est votre contribution pour développer le secteur de l’agriculture ? A.S. : L’avenir de l’Algérie est dans son agriculture. Si nous voulons un développement
SIEE Algérie
Pollutec : 8e Salon international des équipements des technologies et des services de l’eau Du 16 au 19 avril 2012 se tiendra, sur l’esplanade de l’hotel Hilton d’Alger, le 8e Salon international des équipements des technologies et des services de l’eau, événement organisé par Reed Expositions France et Trade 21. Le salon rassemble pendant quatre jours les professionnels de l’eau en Algérie et compte plus de 202 exposants qui représenteront les produits répondant aux besoins du marché algérien, 8 500 visiteurs professionnels issus de l’administration et des collectivités locales, de l’industrie, du bâtiment et du secteur tertiaire. Un contexte économique prometteur et des investissements massifs pour le secteur de l’eau Le thème principal du colloque organisé en marge du salon international de l’eau : Ressources en eau souterraine – volet expertise. Les pays étrangers qui vont participer sont en nombre de 7 (sauf que certains pays peuvent ne pas avoir de stand, mais ils sont représentés par une autre firme qui dispose de l’exclusivité. 32 • Salama • numéro 05 • avril-mai 2012
harmonieux sur l’ensemble du territoire national, la réussite des politiques de développement de l’agriculture et de renouveau rural deviennent des impératifs. La part de l’hydraulique agricole est prépondérante dans le succès de cette entreprise nationale décisive. Notre pays compte aujourd’hui 227 000 hectares en grands périmètres irrigués, 980 000 hectares en petite et moyenne hydraulique ainsi qu’un parc de retenues collinaires composé de 444 unités. En collaboration avec le département de l’Agriculture et du Développement rural, une action globale de développement de l’agriculture irriguée est menée, notamment dans la région des hauts plateaux, en y intégrant les volets des techniques économisatrices d’eau et de la réutilisation des eaux usées épurées. Les objectifs que s’est fixés le secteur en matière d’hydraulique agricole sont d’atteindre les chiffres de 270 000 hectares en grands périmètres, 1,2 millions d’hectares en petite et moyenne hydraulique et 581 retenues collinaires. Le développement du dessalement de l’eau de mer, par les volumes appréciables d’eau qu’il fournira, permettra de sécuriser l’alimentation en eau potable des villes du littoral et de réaffecter la ressource de certains barrages vers les zones déficitaires ainsi qu’à l’irrigation. Le transfert des eaux du Sahara septentrional vers le nord du pays mettra, également, à disposition des quantités additionnelles d’eau à usage agricole et domestique. n Hassina Hadj Sahraoui
6e Forum mondial de l’eau
ÉCONOMIE
L’eau potable est un droit universel
L
a journée ministérielle, lors de laquelle 84 ministres étaient présents, et présidée par Henri de Raincourt, ministre de la Coopération, a aussi – au prix de divers consensus – pris en compte de nouvelles réalités : l’eau n’est plus une problématique séparée, et il a été souligné, par ailleurs, les liens étroits entre la consommation d’eau et la production d’énergie, l’utilisation de l’eau pour l’agriculture et sa fourniture pour les 9 milliards d’habitants de la planète d’ici à 2050. Des voix discordantes pourtant se sont élevées après l’annonce de l’adoption à l’unanimité de cette déclaration, comme celle du ministre de l’Eau de Bolivie ou de son homologue de l’Équateur. Coté Africain, c’est le ministre de Gambie, Bai Maas Taan, qui a souligné qu’il ne peut y avoir de développement sans eau, ajoutant ainsi un nouveau bémol à cette déclaration finale.
Bien qu’une pétition de quelque 103 000 signatures de l’ONG Solidarités internationales ait circulé réclamant la mise en œuvre immédiate de ce droit humain et ait été remise à Henri de Raincourt, il n’en demeure pas moins que l’accès à l’eau potable a été officiellement reconnu à l’issue de ce forum. Loïc Fauchon, président en exercice du 6e Forum mondial de l’eau (FME), a, quant à lui, été au-delà des engagements proposés pour le futur de l’eau, et a formulé un dernier engagement personnel, celui de « constituer dans les mois qui viennent une fondation des écoles pour l’eau ». Et ce, pour permettre, a-t-il precisé, aux collectivités locales et aux États de ne plus construire nulle part des écoles sans eau. Il a exprimé par ailleurs sa satisfaction de constater de grandes avancées politiques du forum qui ont permis d’inscrire l’eau parmi les 9 priorités dans l’agenda des grands rendez-vous internationaux du mois d’avril
prochain en Corée pour le Sommet des chefs d’États sur la sécurité et en juin à Rio+20. Le 7e FME aura lieu en 2015 à Taegu en Corée du Sud. n Jacky Naidja
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Après le succès continu de la plateforme des solutions et la session des engagements pour répondre aux défis de l’eau aujourd’hui, et encore plus demain, les participants ont conclu qu’il était temps d’agir : l’accès à l’eau potable et à l’assainissement a été reconnu comme « un droit universel » par 130 pays qui se sont engagés à la mise en œuvre de ce droit, contrairement à Istanbul qui le conteste.
Le ministre des Ressources en eau Abdelmalek Sellal et le wali d’Oran Mohamed Boudiaf sur le stand de l’Algérie au Forum de l’eau.
Objectifs du millénaire pour le développement : la cible relative à l’eau atteinte Selon le dernier rapport publié par le programme commun Unicef/ OMS et diffusé à l’issue du 6e Forum mondial de l’eau, la communauté internationale a atteint, bien avant l’échéance 2015, la cible des Objectifs du millénaire pour le développement (OMD) qui consistait à réduire le pourcentage de la population n’ayant pas accès à un approvisionnement en eau potable. Entre 1990 et 2010, le nombre de personnes ayant accès à des sources améliorées d’eau potable, par exemple un approvisionnement par canalisation ou des points protégés, a augmenté de plus de 2 milliards. M. Ban Ki-moon, secrétaire général de l’ONU, a fait constater à cet égard, lors de son message d’inauguration du forum, qu’un
grand progrès a été réalisé pour la population mondiale. C’est l’une des premières cibles des OMD à être atteinte. L’action réussie pour généraliser l’accès à l’eau potable donne enfin raison à tous ceux qui considèrent les OMD non comme un rêve mais comme un outil vital visant à améliorer les conditions de vie de plusieurs millions de personnes parmi les plus pauvres. À la fin de l’année 2010, 89 % de la population mondiale, soit près de 4 milliards de personnes, avaient accès à des sources améliorées d’eau potable. D’après ces mêmes estimations du rapport, en 2015 92 % de la population mondiale aura accès à l’eau potable améliorée. n
J.N.
avril-mai 2012 • numéro 05 • Salama • 33
économie
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Rendez-vous économique entre les industriels d’Algérie et de Normandie
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Tayeb Medkour, consul d’Algérie à Pontoise.
ette journée est organisée à l’initiative du consulat d’Algérie à Pontoise, avec le concours de l’Association franco-algérienne des chefs d’entreprise et des industriels (AFACEI) de Pontoise et de Normandie, et avec le soutien de la chambre de commerce et de l’industrie (CCI) de Normandie. Cette manifestation a permis de rassembler industriels, chefs d’entreprises et hommes d’affaires des PME-PMI algériennes et normandes ainsi que les responsables des institutions chargées de l’accompagnement et de la promotion des investissements. Le principal objectif étant de rapprocher les PME-PMI d’Algérie et de Normandie afin de construire des partenariats durables et de dynamiser les échanges. Les discours d’ouverture sont prononcés par Tayeb Medkour, consul d’Algérie à Pontoise, suivi par Christian Hérail, président de la CCI de Rouen, qui ont insisté sur l’importance des échanges entre la Normandie et l’Algérie.
Raisons de ce partenariat Parmi les interventions, celle d’Ameziane Medjkouh, vice-président de la chambre algérienne de commerce et d’industrie (Caci), qui a exposé les avantages offerts par un investissement des 34 • Salama • numéro 05 • avril-mai 2012
PME-PMI sur le marché algérien. Les nombreuses raisons d’un partenariat avec la France sont citées. Il serait préférable, selon lui, à celui imposé par d’autres économies comme celle de la Chine. En effet, cette collaboration sera notamment facilitée par une langue commune parlée dans les deux pays : le français. Ce partenariat est plus durable géopolitiquement qu’un autre. Il appui ses propos par ceux de Jean- Pierre Raffarin qui lors de son passage en Algérie en mai 2011, dans le cadre d’un forum algéro-français de partenariat, s’est montré favorable a un investissement de la France en Algérie. Si la France n’investit pas en Algérie d’autres le feront. Ameziane Medjkouh ajoute : « Nous vous invitons à partager notre croissance économique de 4,5% cette année. »
Contexte très favorable Ensuite, Jean-Marie Pinel, président de la chambre de commerce franco-algérienne en Algérie, témoigne de l’implantation réussie de KPMG en Algérie. Suit Mouloud Hédir, vice-président du forum des chefs d’entreprises d’Algérie, qui conclut sa présentation en notant que « le contexte politique, économique et financier est, à tous égards, exceptionnellement favorable pour l’investissement ». Pour cela, il présente des données globales sur l’économie de l’Algérie exprimées en milliards de dollars US : le PIB à prix courants passe de 160,8 en 2010 à 173 en 2011. Une croissance des exportations et de la balance commerciale est observée. La dette extérieure est en baisse, puisqu’elle est de 4,5 milliards de dollars US en 2011. Puis, Mohand Saïd Naït-Abdelaziz, président de la Confédération nationale du patronat algérien, explique les Tayeb Medkour, consul d’Algérie à Pontoise, accompagné de Valérie Fourneyron, députée et maire de Rouen, et de Véronique Crézé, conseiller en développement international CCI de Normandie.
dispositions juridiques et financières prises en Algérie pour l’amélioration des affaires. Quant aux relations entre la France et l’Algérie, il les compare à celle d’un vieux couple qui ne se sépare jamais, malgré tout.
Gagnant-gagnant La rencontre s’est poursuivie par une séance-débats animée par Djamel Azzoug, président du bureau de Béjaïa de la Confédération algérienne du patronat (CAP), et par Salim Branki, directeur de l’Agence nationale du développement de l’investissement (Andi). Celui-ci a présenté les avantages économiques et les règles régissant le dispositif d’investissement en Algérie. Et de conclure que le partenariat doit être équilibré : gagnant-gagnant. Parmi les interventions qui se sont succédé, la question des formations aux technologies de fabrication qui sont faites à l’étranger alors qu’il serait souhaitable qu’elles se fassent en Algérie. Puis, celle de la fabrication de pièces de voitures qui sont faites à l’étranger puis vendues en Algérie, alors qu’il serait préférable d’utiliser de la main d’œuvre locale algérienne. En reconnaissance de son engagement auprès de la communauté algérienne installée à Rouen, le consul d’Algérie à Pontoise a remis un diplôme d’honneur à Valérie Fourneyron, députée et maire de Rouen, à la suite de son discours de clôture. n Lynda Bachli
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Une rencontre d’affaires franco-algérienne a eu lieu le 24 février 2012 à Rouen. But principal : rapprocher les PME-PMI d’Algérie et de Normandie afin de construire des partenariats durables et de dynamiser les échanges.
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histoire
Grande figure
Ferhat Mekki Abbas
L’homme aux multiples facettes Rédacteur en chef de l’hebdomadaire L’Entente franco-musulmane, il plaide en faveur d’une « égalité dans le cadre d’une souveraineté française ». Pur produit de l’école de Jules Ferry et de la méritocratie républicaine, il publie le 23 février 1936 : « Si j’avais découvert la ils d’un caïd kabyle, nation algérienne, je serais il naît à Taher en nationaliste, et je n’en rougirais 1899 dans une pas comme d’un crime. Les fratrie de douze hommes morts pour l’idéal enfants. Il entre à l’école patriotique sont journellement primaire de Djidjelli puis honorés et respectés. Ma vie au lycée de Philippeville en ne vaut pas plus que la leur. 1914. Citoyen français, il Et cependant, je ne mourrai est tenu de répondre à la pas pour la patrie algérienne, conscription et effectue son parce que cette patrie n’existe service militaire en 1921. pas. Je ne l’ai pas découverte. À la fin de ses obligations, J’ai interrogé l’histoire, j’ai il est admis à la faculté de interrogé les vivants et les pharmacie d’Alger en 1924. Il morts, j’ai visité les cimetières, en sort en 1927, s’étant signalé personne ne m’en a parlé... On par son talent littéraire sous ne bâtit pas sur du vent. Nous le pseudonyme de Kamel avons écarté, une fois pour Abencérage et par son activé toute, les nuées et les chimères d’élu estudiantin. pour lier définitivement notre Il a lutté contre l’idéologie coloniale et a mené un combat indépendantiste. Un homme de nuances avenir à celui de l’œuvre et de convictions française dans ce pays. » nous. Nous ne pouvons vivre sans elle. Celui À la recherche d’une légitimité de son qui rêve à notre avenir comme à celui des Nouveau tournant identité, il déclare : « Nous sommes chez Peaux-Rouges d’Amérique se trompe. Ce nous. Nous ne pouvons aller ailleurs. C’est sont les Arabo-Berbères qui ont fixé, il y a Il prend un nouveau tournant dans sa cette terre qui a nourri nos ancêtres, c’est quatorze siècles, le destin de l’Algérie. Ce définition du nationalisme hérité de Péguy cette terre qui nourrira nos enfants. Libres destin ne pourra pas demain s’accomplir et de Barrès, lorsqu’il se montre attentif à ou esclaves, elle nous appartient, nous lui sans eux. » Diplômé docteur en pharmacie déclaration de Ben Badis : « L’islam est ma appartenons et elle ne voudra pas nous en 1933, il ouvre une officine à Sétif et se religion, l’arabe est ma langue, l’Algérie est laisser périr. L’Algérie ne peut vivre sans fait élire conseiller général en 1934. ma patrie. » Or, le nationalisme reposant
Pharmacien et lettré, puis homme d’État, son parcours témoigne des soubresauts de l’histoire du XXe siècle.
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sur l’identité linguistique s’inspire de Fichte, auteur du Discours à la nation allemande, prononcé en 1806, par opposition au nationalisme napoléonien supposant un plébiscite de tous les jours. Ce changement philosophique ne se produit chez Abbas que graduellement. De même, défendant l’enracinement d’un peuple sur une terre, ce fin lettré reflète aussi la philosophie allemande du Blut und Boden (le sang et le sol). Quoique dégagé des obligations militaires, il se porte volontaire en 1939. Le 10 avril 1941, partisan de la révolution nationale prônée par le maréchal Pétain, il soumet à celui-ci un rapport : « L’Algérie de demain », formulant des vœux de réformes. Le maréchal accuse bonne réception, manifestant sa sincère affection à l’égard des « poilus » (anciens soldats du front) quelle que soit leur religion ; c’est l’époque à laquelle il autorise le conseil municipal de Beni-Amrane, composé majoritairement d’anciens tirailleurs, à changer le nom du village en Maréchal-Pétain. Après le débarquement allié en Afrique du Nord, Abbas publie, le 10 février 1943 le Manifeste du peuple algérien, mais il se heurte à De Gaulle qui le fait assigner à résidence. Le décret que signe ce dernier le 7 mars 1944 sème le doute et le trouble, parce qu’il dispose de la citoyenneté laïque sans exiger de renonciation au statut coranique, provoquant un mécontentement général. Sept jours plus tard, Abbas se rapproche de l’Association des oulémas et de Messali Hadj. Il est arrêté après les massacres de Sétif du 8 mai 1945. Quand il sort de prison, il fonde l’Union démocratique du manifeste algérien (UDMA) en 1946. En juin, obtenant onze des treize sièges du deuxième collège à la seconde Assemblée constituante, il est élu député de Sétif. Il en démissionne en 1947.
Une subtile alchimie du nationalisme et du socialisme Tout d’abord favorable à l’intégration, Abbas se radicalise graduellement et refuse le destin choisi par Nafissa Sid Cara, le plus jeune ministre de l’histoire de France, ou le bachaga Boualam, vice-président de l’Assemblée nationale. Favorable au FLN dès 1955, il prononce la dissolution de l’UDMA au Caire en 1956. Après le
histoire
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Groupe du GPRA, Gouvernement provisoire, après l’indépendance de l’Algérie.
Celui qui rêve à notre avenir comme à celui des Peaux-Rouges d’Amérique se trompe. Ce sont les Arabo-Berbères qui ont fixé, il y a quatorze sicèles, le destin de l’Algérie. Ce destin ne pourra pas demain s’accomplir sans eux.
congrès de la Soummam, il siège dans la formation politique qui en est issue, puis en 1958 devient le président du Gouvernement provisoire. Cependant, en 1961, il est écarté au profit de Benkhedda. Lors de la crise de l’été 1962, il rallie Ben Bella tout en critiquant le projet de parti unique. Il succède à Farès à la présidence de l’Assemblée nationale et cumule cette fonction législative avec celle de chef de l’État à titre provisoire. Hostile
à la soviétisation prônée par Ben Bella qu’il qualifie d’aventurier gauchiste, il démissionne le 15 septembre 1963. Exclu du FLN, emprisonné au Sahara, il est élargi en 1965, la veille du putsch du 19 juin par Boumédiène. Retiré des querelles politiques, il exprime ses opinions démocratiques et dénonce la corruption, ce qui lui vaut de nouvelles persécutions. Réhabilité en 1984, il s’éteint l’année suivante. n Philippe Lamarque avril-mai 2012 • numéro 05 • Salama • 37
histoire
Algérie
Souvenirs de guerre Ils ne sont ni de 1954 ni de 1962. Pourtant, les récits de la guerre d’Algérie ont bercé l’adolescence de cette jeunesse née pour la plupart en France de parents algériens. Et font désormais partie de son histoire.
L
es commémorations du cinquantenaire de l’indépendance ? Ils s’y intéressent. La guerre d’Algérie ? Ils la connaissent à travers les récits transmis par leurs aïeux. Ils, ce sont ces jeunes, comme Leila, 27 ans, qui raconte son père, décédé aujourd’hui, collecteur de fonds du FLN à Paris pendant la guerre. « Ce qu’il me reste comme souvenir, c’est sa déception après l’indépendance. Le manque de reconnaissance dû aux combattants pour la libération l’a profondément blessé tout comme l’ingratitude des dirigeants arrivés au pouvoir sans aucun mérite. Il rêvait tellement
d’une Algérie meilleure ! Ma mère, qui avait 13 ans à la liberation, a eu la chance d’être scolarisée, même si les professeurs n’hésitaient pas à la renvoyer à son statut d’indigène. »
Un sujet encore très sensible Autre lieu, autre histoire. Celle d’Assia, étudiante parisienne de 28 ans. « La guerre d’Algérie, pour moi, c’est le décès de ma grand-mère, victime d’une frappe d’obus tombée près de sa maison, déclarée zone interdite par l’armée française. Je ne l’ai jamais connue, poursuit-elle, mais cette
Je rageais de voir comment mon professeur avait baclé la leçon sur les événements. Alors que pour nos familles ça a été un tel traumatisme !
moudjahida reste pour moi une icône. Elle montre que les femmes ont joué un grand rôle dans la libération mais qu’elles ont aussi beaucoup souffert. » Khadija a dû « gratter » pour avoir ses réponses. « Auprès de mon grand-père, héros de la libération, car mes parents ne parlaient jamais de la guerre d’Algérie. » Cette trentenaire originaire de Chlef et mère de deux enfants a des tas de souvenirs à partager : sa grand-mère tuée sur dénonciation et dont on a jamais retrouvé le corps, son oncle qui se déguisait en femme pour échapper aux contrôles, ou encore ces femmes qui se tatouaient le visage afin de s’enlaidir au maximum et ainsi échapper aux viols. « J’ai eu beaucoup de mal à avoir mes réponses, continue Assia. Mon père, lui, vivait à Paris. Il se rappelle des contrôles au faciès, de la peur des ratonnades et du couvre-feu imposé aux Algériens. Le 17 octobre 1961, il a été pris dans une rafle alors qu’il rentrait chez lui. Il a passé trois jours enfermé dans un camp à Vincennes. Je vais avoir 30 ans, je l’ai appris après, il y a seulement quelques années », regrette la jeune femme.
Le besoin de connaître leur histoire
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Ce qui revient souvent dans les récits de cette jeunesse, c’est la difficulté des parents à évoquer cette part de leur histoire. Cinquante ans après, les blessures peinent encore à cicatriser. Certains évoquent comme un manque à combler, surtout à l’âge ou les petits-enfants posent à leur tour des questions sur leur identité. Et si la guerre d’Algérie n’avait pas été si vite occultée des programmes scolaires ? « Je rageais de voir comment mon professeur avait bâclé la leçon sur les évènements, explique Kadija. Alors que pour nos familles cela a été un tel traumatisme ! » « Un simple polycopié en classe de 5e », déplore Assia de son côté. Ni revancharde, ni haineuse, cette génération veut seulement connaître le vécu de ses parents pour mieux savoir d’où elle vient. Comme une quête identitaire, beaucoup questionnent, lisent, écoutent tout ce qui se fait autour de cette histoire franco-algérienne. Une quête certes difficile, mais néanmoins nécessaire. n Noria Aït-Kheddache
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Cinquante ans après, les plaies restent ouvertes.
littérature
Découvrir
Fanon l’Algérien Ce livre d’une centaine de pages, dense et précis, présente Frantz Fanon dans un parcours atypique au cours d’une période où la lutte pour l’indépendance de l’Algérie était à l’ordre du jour.
À
travers ce combat, il est devenu un héros, frère des Algériens, ami de l’Algérie combattante, de l’Afrique en marche, de tous les émancipés et des hommes libres de tous les continents. Comment alors ne pas percevoir chez Abdelkader Benarab, l’auteur, ce rappel à la mémoire, à l’histoire et à la maturité de l’esprit de Frantz Fanon, né en Martinique et à peine âgé de 28 ans en ces temps durs des guerres de libération que connaissait l’Afrique et où se jouait son destin. Rien, en effet, ne prédisposait Frantz Fanon à une carrière aussi prestigieuse, souvent complexe et parfois controversée. Abdelkader Benarab a su avec ce livre, et le privilège en référence aux travaux d’Édouard Said et de Homi Bhabha, mettre en lumière Frantz Fanon et lui redonner une nouvelle existence grâce à la fécondité de son langage et surtout aux poids des mots sincères à son endroit,
À l’occasion du cinquantième anniversaire des indépendances, et de la mort de Frantz Fanon, l’universitaire algérien, Abdelkader Benarab, travaillant sur les rapports Nord/Sud et les problèmes d’identité, nous livre un essai sur l’auteur des Damnés de la terre et se demande, enfin, qui mieux que Frantz Fanon a vécu et compris les vicissitudes d’un tiers-monde démembré et lacéré par des siècles de colonialisme ? Arrivé un an avant le déclenchement de l’insurrection algérienne, Fanon, antillais d’origine, a vite compris les maux dont souffrent l’Algérie et, notamment, les malades mentaux dont il avait la charge à l’hôpital de Blida, en tant que psychiatre. La furent ses premiers contacts réels avec ce pays. Doué d’une grande intelligence et d’un fin sens de l’observation, Fanon met le doigt sur « certaines pratiques coloniales génératrices de formes d’aliénation sui generis » (p.19). En un temps rapide, il fonde une tradition sur le plan de la méthode en intégrant la dimension socioculturelle dans le vaste traitement des malades. En remettant en cause le courant psychiatrique à tendance coloniale, l’auteur ajoute que : « L’intérêt anthropologique, associé à l’exercice
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déployés avec aisance et finesse tout au long de son récit. Le livre d’Abdelkader Benarab explique la pensée de Fanon en permanence traversée par le rapport ambigu subalterne/ hégémonique, culture populaire/culture dominante, suprématie culturelle/identité raciale, sans oublier de le distinguer sur les relations aussi ambiguës d’ailleurs avec JeanPaul Sartre à propos de la préface de son livre Les Damnés de la terre. Mais la critique de l’époque, par une lecture biaisée, n’a retenu de l’œuvre de Fanon que la violence. D’ailleurs, il fut moins jugé pour son œuvre que pour l’Antillais qu’il était, au moment même où l’intelligentsia française « a tiré l’écriture de Frantz Fanon vers une violence fantasmée ». En vérité, c’est la révolution algérienne qui était visée à travers lui. À partir de ce travail de recherche laborieux et méticuleux, l’intellectuel Abdelkader Benarab a beaucoup lu et apprécié Frantz Fanon,
du praticien qu’était Fanon, a porté un coup sévère aux modes pratiques d’une prophylaxie mise en œuvre suite à des préjugés de race et de religion. » (p. 21). Mais l’adminstration coloniale ne voyait pas du même œil cette intrusion inopinée et a mis l’auteur des Damnés sous le coup de mesures pénales en commençant par l’expulser d’Algérie, sa terre adoptive. En plus de la remise en cause du fondement même des méthodes thérapeutiques instituées dans le sillage du Dr Porot, il s’emploie à rabattre les ambitions de ce dernier, considéré comme le patriarche de la socialisation forcée des malades, dans une institution assimilable pour le moins à un lieu carcéral. De là, la véritable rupture que nous inspire le titre de l’ouvrage d’Abdelkader Benarab. Là, Fanon développe ses fameuses théories sur la violence et les processus de décolonisation. Les Damnés de la terre est un essai qui a eu un retentissement mondial. Sartre lui fait une préface. Mais, là encore, raconte Abdelkader Benarab, il y a entre les deux hommes un décalage insurmontable qui tient plus de l’ordre formel que du contenu du livre. Sartre s’est couché de tout son long sur l’œuvre de Fanon et l’a étouffée. Fanon
personnage hors du commun sur qui il porte aussi un regard nouveau. Le 6 décembre 1961, à l’âge de 36 ans, Fanon décède des suites d’une leucémie à Washington. Il est d’abord inhumé au cimetière des martyrs à Tunis, puis son corps fut rapatrié de Tunisie en Algérie indépendante qu’il aurait aimé voir en ces jours de gloire et de liberté. Il repose désormais parmi ses frères en terre algérienne avec son dernier vœu accompli. n Wady Hasna Frantz Fanon, l’homme de rupture, Abdelkader Benarab – Paris, éd. Alfabarre, 2010.
cherchait auprès du philosophe existentialiste une diffusion dans les milieux français. Mais, ce dernier, dans un style grandiloquent, « a enrobé (l’œuvre de Fanon) de généralité captieuse, ombrageant du coup sa dynamique interne en la poussant sous les fourches caudines du paternalisme » (p. 54). Dans un chapitre important de L’Homme de rupture, l’auteur démontre que la violence émanant des ouvrages de Frantz Fanon n’est qu’une lecture biaisée qui n’a voulu écumer qu’une violence débordante afin de pénaliser l’audace d’un intellectuel subalterne. S’il en fut pénalisé, c’est pour au moins trois raisons : pour le délit de faciès de cet Antillais de couleur, pour son soutien au combat d’une Algérie hors la loi,et enfin pour son attitude rétive à l’ordre imposé. Mais la postérité a débouté ses détracteurs en inscrivant son œuvre au cœur des nouvelles recherches sur le postcolonial studies où ses écrits servent de postulats de départs à une relecture de l’Histoire entre le Nous et les Autres dans une perspective d’assainisement des rapports et de leur réajustement réciproque. n
W.H.
Le combat
pour la liberté Novembre 1954. Un groupe d’insurgés, en compagnie d’un officier français, mène une lutte acharnée contre l’armée française. Sétif et ses environs, dans les hauts plateaux, en sont le théâtre. Dahmani, héros de La Bataille de Sétif (Éd. L’Haramattan, 2011), d’Abdelkader Benarab, entend harceler l’ennemi, mais la contre-offensive des Français et les caids mercenaires compliquent l’action des révolutionnaires.
L
a Bataille de Sétif emprunte des épisodes aux événements qui ont marqué l’une des histoires les plus dramatiques du XXe siècle : la guerre d’Algérie. La matière romanesque ne rivalise ici avec le document historique que pour lui dénier l’apanage exclusif du discours historiographique souvent dicté par la nécessité, au service des groupes dominants. Le narrateur prend donc des libertés avec l’Histoire, celle qui relate les événements et explique les faits dans leur ensemble ; celle qui livre les personnages à leur sort collectif et les présente comme une masse abstraite, informe et sans couleur. La narration s’attache plutôt ici à nous les présenter avec leur épaisseur et leur individualité dans leur quotidien, en plein combat pour la liberté, avec leur part de joie et de souffrance. Le rehaut introduit dans la suite narrative donne le juste ton à leurs sensa-
tions exprimées. Car, encore une fois, l’Histoire officielle ne dit pas tout. Par pudeur ou par exigence méthodologique, elle brouille toute subjectivité, ne rapporte que le mouvement global d’un combat ou d’une action. Ce roman, le premier à ma connaissance qui campe Sétif et sa région avec une parfaite connaissance des lieux, comble le vide laissé par une Histoire d’Algérie qui a distribué indûment des titres de gloire à ceux qui ne les ont pas toujours mérités, cependant que les morts pour l’Algérie libre gardent un coefficient certain de respect et de prestige. La Bataille de Sétif est un récit qui ne laisse aucun angle mort où pourraient subsister les doutes sur la barrière de feu, non pas entre Algériens et Français, mais entre les collabos vivants et les militants disparus. n Emir Salim
littérature HK
J’écris donc j’existe
HK
(Kaddour Haddadi) est un fils d’immigrés installés à Roubaix. Compositeur et interprète, il créé avec une bande de copains musiciens d’horizons divers le groupe HK & les Saltimbanks. Leurs mélodies sont un savant mélange de chaabi, reggae, blues, et musique française et leur succès est fulgurant. HK se caractérise comme un nomade, un troubadour, un citoyen du monde revendiquant une identité internationale sans frontières, sans murs et sans barreaux… C’est un artiste contestataire et engagé, militant pour un monde plus égalitaire et plus solidaire. Et ce sont les thèmes récurrents de ce premier roman : J’écris donc j’existe*. Tantôt conte, tantôt récit autobiographique. C’est dans un style simple et poétique que défilent ses rêves, ses peines et ses révoltes. HK a pour passion l’écriture et il croit au pouvoir des mots contre les maux de ce monde… C’est un humaniste qui dénonce l’exclusion, la détresse, l’indifférence qui précipitent l’être dans la marginalité. Écrire, c’est utiliser le pouvoir du verbe, affirme l’auteur. Pour raconter, témoigner, se rebeller, rêver et exister. n Souad Mazur * Éditions Riveneuve – 2012
Minibio Il est né a Roubaix en 1976 et a voyagé dans différents pays pour ses concerts, entre autres à travers l’Algérie où il a rencontré un vif succès ! Il a, lors de son parcours, animé un atelier d’écriture dans la prison de Roubaix, expérience qui semblerait s’être avérée assez douloureuse.
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DROIT
Zoom sur
DR
Les violences à l’égard des femmes en Algérie Maître Nadia Ait-Zai.
L
Après avoir connu un soulèvement populaire le 5 octobre 1988, l’Algérie a opéré un tournant libéral sur le plan politique et économique. La Constitution de 1989 a consacré cette libéralisation en autorisant la création de partis politiques, en favorisant la liberté de la presse et en permettant au mouvement associatif de se développer.
a loi de 1989 conformément à la Constitution a permis à la société civile de s’organiser. Malheureusement, cette ouverture dite « démocratique » a été ralentie par la violence intégriste, ce qui a conduit les pouvoirs publics a instaurer l’état d’urgence. Cette situation d’exception a été levée en 2011, des réformes ont été engagées. Des lois telles que la loi électorale, la loi sur les partis, la loi sur les associations furent modifiées. Une vingtaine de nouveaux partis viennent d’être agréés par le ministère de l’Intérieur donnant un nouvel élan à l’activité politique et associative. La loi organique sur l’élargissement de la représentativité des femmes a été adoptée conformément à l’article 31 bis de la Constitution de 2008. Le système des quotas introduit dans la loi organique va certainement relever le nombre de femmes au Parlement si, bien entendu, les partis vecteurs de la représentativité des femmes en politique jouent le jeu. Il est tout de même important de dire que lors des débats au Parlement sur la loi organique certains députés utilisèrent un langage violent, de rejet et de discrimination à l’égard des femmes algériennes. C’est la violence verbale utilisée dans le discours par les députés qui nous a interpellés et démontré la résistance à l’intégration de la femme en politique. Il a fallu que le ministre de la Justice se déplace par deux fois au Parlement pour calmer les esprits et faire comprendre aux députés que le quota est une mesure
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temporaire permettant d’atteindre l’égalité et de corriger le déséquilibre en nombre de députés homme/femme au Parlement.
Pourcentage La projet de loi prévoyant 30 % de femmes élues a été réduit a une loi prévoyant 20, 30, 40, et 50 % de femmes à introduire dans les listes de candidatures. Le pourcentage proposé a été établi en fonction du nombre d’électeurs par wilaya. Le taux de 50 % concerne la communauté à l’étranger et ceci se passe de commentaires. Il est à remarquer
Recommandations Les pouvoirs publics doivent reconnaître la violence à l’égard des femmes comme un problème de santé publique. Introduire des dispositions dans le code pénal conformément aux conventions internationales incriminant la violence conjugale à l’égard des femmes comme un délit pénal. Élargir les conditions du viol. Dépénaliser l’avortement. Autoriser l’avortement suivant les délais prévus médicalement. Créer plus de centres d’accueil pour les femmes victimes de violence. Revoir les dispositions encore discriminatoires et archaïques du code de la famille. Lever les réserves émises lors de la ratification de la Convention sur l’élimination de toutes les formes de discrimination à l’égard des femmes (Cedaw).
que si les femmes ne sont pas placées en position d’éligibilité, le nombre de femmes peut diminuer par rapport à celui de la législature sortante, 30 femmes députées actuellement. C’est tout de même une forme de violence, qui côtoie les violences physiques (conjugales ou familiales), les violences sexuelles subies par les femmes. Violences souvent tues. Les femmes ont commencé a en parler dès les années 1990 et ce, suite à la violence « intégriste ». La violence « intégriste » a débuté après l’interruption du processus électoral en 1991 et la dissolution du Front islamique du salut. Ce parti dissout est à l’origine de la violence instaurée en Algérie depuis plus de dix ans. Les femmes en furent les premières victimes. Certaines ont été brûlées, d’autres vitriolées. Usant de procédés de plus en plus violents, les terroristes ont commis des viols collectifs, ont enlevé et séquestré des femmes, ont réalisé des mariages forcés de jouissance contraire à la législation nationale et ont menacé de mort les femmes qui ne porteraient pas de hijab, qui enverraient leurs enfant à l’école et qui iraient travailler. (1) Il est évident que si les islamistes ont perdu du terrain dans leur lutte idéologique à vouloir instaurer un État théologique, la violence à l’égard des femmes n’a pas pour autant disparu. Leur influence demeure et s’est étendue à une partie de la jeunesse désœuvrée. Cette dernière considère la femme responsable de tous les maux sociaux de l’Algérie qu’ils soient naturels ou économiques. C’est ainsi que des femmes furent agressées à Hassi Messaoud. Le 13 juillet 2001, suite à l’appel d’un imam, 39 femmes d’un quartier populaire ont été agressées, mutilées, violées. Cette agression a duré toute la nuit sans que les services de sécurité n’interviennent rapidement. Elles furent assistées par des voisins en attendant le lendemain l’arrivée de la force publique. (2) Le mouvement associatif a, depuis ces événements, orienté ses efforts et son
Zoom sur énergie à la dénonciation de la violence sous toutes ses formes perpétrée à l’égard des femmes. Plusieurs études et séminaire furent consacrés à la question. (3) Le cadre juridique prenant en charge ce phénomène existe, mais est insuffisant. Les dispositions du code pénal sont générales. S’agissant de la violence physique utilisée pour condamner les auteurs de violence, il traite des coups et blessures et ne fait aucune distinction entre les auteurs et les victimes de cette agression, il s’adresse indifféremment à l’homme ainsi qu’à la femme. (4) L’Algérie a adhéré à de nombreux pactes et conventions internationaux relatifs notamment à la condition féminine tels que la convention pour la non-discrimination à l’égard des femmes de 1979 et la convention concernant les droits politiques. Notre pays a même souscrit à la déclaration sur la violence. La Constitution algérienne consacre le principe de la hiérarchie des normes et donne ainsi prééminence au traité international sur w Les textes juridiques à l’origine de la violence (code de la famille) Si certains textes juridiques protègent la femme contre certaines formes de violence qu’elle subit, d’autres textes sont à l’origine et sont la conséquence directe des agressions perpétrées contre elle. Le code de la famille de 1984 est le texte le plus violent et à l’origine de la violence à l’égard des femmes. Malgré les récents amendements que ce texte a connus en février 2004, il continue à maintenir la femme sous tutelle matrimoniale diminuant ainsi sa capacité juridique à conclure son contrat de mariage. La polygamie, la répudiation, deux institutions humiliantes sont toujours pratiquées. (1) w Interprétation erronée des dispositions du code de la famille L’application des nouveaux amendements a fait apparaître une mauvaise interprétation de ces textes par les officiers d’état civil. Ces derniers ont détourné l’explication logique de fournir un certificat médical attestant d’une bonne santé des deux conjoints comme un des documents pour la conclusion de mariage en un certificat de virginité exigé pour la femme. w La coutume fait échec à la loi : exhérédation des femmes La coutume s’oppose au droit et aux textes juridiques existants alors qu’un arrêt de la cour suprême en 1968 a rappelé que la coutume ne saurait faire échec à la loi : dans
DROIT
dégagées par ce texte pour la qualification de cette agression sont trop restrictives ; il n’est retenu que le défaut de consentement de la victime et la pénétration comme conditions de preuve d’un viol. Le code pénal sanctionne également l’inceste et le harcèlement sexuel. (5) n
la loi nationale. Cela a même été rappelé par un arrêt du Conseil constitutionnel en 1989. Le code pénal sanctionne et considère le viol comme un crime, mais les conditions certaines régions d’Algérie, des femmes sont exhérédées au nom de la coutume locale et au nom également de certaines institutions du droit musulman prévues dans le code de la famille telles que le habous. Le habous est une institution qui permet à son auteur de geler ses biens au profit des héritiers. Souvent, cet acte est dressé pour protéger les femmes, mais il est devenu un acte utilisé contre les femmes pour les exclure d’une succession. (2) w Insuffisance des textes juridiques Certains textes sont insuffisants pour protéger la femme contre les agressions sexuelles telles que le viol ; bien qu’étant considéré comme un crime par le code pénal, le législateur devrait élargir les conditions requises pour la qualification de cette infraction. La jurisprudence algérienne a été peu productive en règles pouvant protéger les femmes contre de telles violences. Il reste que celles-ci n’ont pas le courage ni la force ni l’aide pour affronter le regard de la société contre les agressions sexuelles qu’elles subissent. Déposer plainte devient le parcours du combattant pour la victime. Ni la famille, ni les institutions n’accompagnent les femmes lors de leurs démarches. La lourdeur de la machine judiciaire est aussi un frein pour certaines victimes. L’exemple de Hassi Messaoud en est un exemple frappant. Le manque de ressources financières constitue aussi un obstacle pour certaines femmes à se lancer dans des poursuites. L’aide judiciaire pourtant prévue répond à une procédure trop
(1) Les Maghrébines entre violences symboliques et violences physiques. Rapport annuel 98-99 Collectif 95 Maghreb Égalité p. 79 « le viol arme de guerre » ; Temps de viol et de terrorisme Rachda ; Femmes contre l’oubli Rachda ; Comment j’ai été violée par un terroriste. Revue de presse document n° 1. (2) Elles se réfugient dans le silence. Revue de presse document n° 2 ; El Haïcha, un éléctrochoc sociologique. Revue de presse document n° 3. (3) Violences à l’encontre des femmes l’enquête nationale. INSP 2005 ; Violations flagrantes des droits à l’égard des femmes au Maghreb. Rapport annuel 96-97 Collectif 95 Maghreb Égalité ; Un premier procès à Lakhdaria. Revue de presse document n° 4 dossier harcèlement sexuel. (4) et (5) Un premier procès à Lakhdaria. Revue de presse document n°4 dossier harcèlement sexuel.
longue et la désignation d’un avocat d’office arrive souvent quand l’affaire est sur le point d’être jugée ou a déjà été jugée. Le code pénal sanctionne l’avortement mais autorise l’avortement thérapeutique. La loi portant sur le code de la santé publique est venue renforcer l’autorisation de la pratique de l’avortement thérapeutique. Mais, dans la pratique, les femmes se voient opposer un refus de certains médecins qui refusent de procéder à cet acte médical car leurs convictions religieuses le leur interdit, et se heurtent également à la lenteur de la commission qui doit autoriser cet acte et qui ne se réunit que tous les trois mois. Beaucoup de femmes sont alors contraintes de se faire avorter clandestinement et dans de mauvaises conditions. Lorsque cet avortement clandestin est connu des autorités, la femme et son médecin encourent des sanctions pénales. Si la femme accepte sa grossesse, elle n’a alors qu’une seule alternative pour ne pas attirer l’opprobre sur elle : abandonner l’enfant. Les violences auxquelles sont confrontées les femmes sont les violences physiques (conjugale et familiale), violences sexuelles (viol et inceste), violences morales, harcèlement sexuel, pratiques discriminatoires, avortement, mauvaise application et mauvaise interprétation de la loi, violence institutionnelle. n (1) L’exigence du certificat de “virginité, une «nouveauté» imposée extra legem. Revue de presse document n° 5 ; L’inégalité “appuyée ” par la loi. Revue de presse document n° 6. (2) Pour la femme kabyle exclue de l’héritage. Revue de presse document n° 7.
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Théâtre
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Corps et âmes
La pièce Corps et Âmes (Les épisodes d’une vie), présentée par la compagnie Chouia Théâtre, s’est jouée du 2 au 10 mars 2012 à Vitry-sur-Seine.
dans la nature qui sera son bol d’oxygène. On découvrira sa personnalité emplie de paradoxes. Son esprit tourmenté ne lui laissant aucun répit. Le spectateur est tenu en haleine et se demande comment tout cela va finir… n Lynda Bachli
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Azzedine Hakka
ette pièce de théâtre dansée a été mise en scène par Azzedine Hakka et chorégraphiée par Dalila Belaza. Théâtre et danse se mêlent pour magnifier la triste histoire d’une femme ayant perdu son âme. Elle se prénomme Anna. Pour ce faire, de sombres tableaux se succèdent sur plusieurs plans. L’espace du fond étant réservé à un écran sur lequel défilent les pensées intérieures de ce personnage. Exerçant le plus vieux métier du monde, elle se considère comme un produit de la société de consommation. C’est en croisant Anna par hasard, dans une rue de Paris, qu’Azzedine Hakka a eu l’idée de réaliser cette pièce. Cette rencontre l’a fait réfléchir. Une série de questions se sont bousculées en lui : « Est-ce que nous existons aujourd’hui autrement qu’à travers nos corps ? Corps utilisés, tantôt comme des produits de consommation, tantôt comme des rouages d’une machine au service de la production ? » Le metteur en scène abordera ses questions d’une façon poétique et philosophique. Anna raconte sa vie parfumée par l’amertume du thé de Chine. Pour échapper à sa misérable existence, elle s’oublie en dansant
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Biographie
Azzedine Hakka est un jeune auteur et metteur en scène de 30 ans. Il commence sa formation en 1997 au conservatoire municipal d’art dramatique d’Oran. Puis, il poursuit ses études théâtrales à Paris, en se spécialisant en art et langage. Entre 2001 et 2005, il décroche le rôle principal dans 3 productions : en 2001, Les Coquelicots ; en 2004, La Récréation des clowns ; et en 2005, Les Sangsues. Ce dernier lui permettra d’obtenir la même année le Prix de la meilleure interprétation masculine au Festival euro-méditerranéen d’Ariana à Tunis. En 2006, il écrit en algérien Les Jeux d’échecs aux Éditions Le Petit Lecteur. Son texte « Sepulcrum » a été sélectionné pour la 2e édition de la Semaine des Arts qui a eu lieu du 26 au 30 mars 2012 à l’université Paris-VIII ainsi que dans des lieux culturels du département de la Seine-Saint-Denis. Après avoir été joué sur les planches en mars 2012, Corps et Âmes sortira en français, en avril 2012, aux Éditions Le Petit Lecteur (Algérie). n L.B.
ART
Culture
Mohamed Lekleti Lauréat du prix du Salon du dessin contemporain « Chic dessin 2011 » à Paris.
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es travaux récents de Mohamed Lekleti interrogent le corps entravé dans sa diversité parcellaire : fusion improbable du masculin et du féminin, association de chevaux cabrés et d’anges déchus, tensions et distorsions de la partie au détriment du tout, rythmique imprévue des points de vue, des raccourcis, des repentirs et du sens enfoui. De la fluidité ponctuelle, rose et bleue du subjectile, émergent la rigueur acérée du trait, la rigidité de structures austères, l’automatisme d’une graphie sensible affirmant clairement la suprématie de la ligne, du dessin sur le pictural, la prédominance du non-fini sur l’achevé, de l’instable sur le définitivement clos. L’espace ramassé de l’œuvre, collage dessiné d’un réel imaginaire, perturbe l’acquis de nos certitudes, l’ancrage ordinaire de nos repères spatio-temporels. La construction du tableau – montage insolite de fragments Le Sommeil du cœur – Technique mixte sur papier 100 x 100. de corps déstabilisés, de femmes culbutées, Sans titre – Technique mixte sur papier 110 x 50. d’anges sur roulettes, de chaises électriques débranchées, d’anatomies incertaines, d’extase et de violence, de chaos et de rigueur, de mouvement et de dédoublement – accentue la fragilité d’espaces ambigus et révèle les anagrammes plastiques : univers onirique décomposé/recomposé.
Lekleti désarticule le monde et le reconstitue en associations nouvelles qui modifient notre perception. Par le dessin et les techniques mixtes, il détourne le procédé de la chronophotographie cher à Étienne-Jules Marey ou Eadweard Muybridge et analyse le mouvement des êtres et des choses. Il privilégie l’instant prégnant pour mieux nous permettre de sonder l’invisible, ce que l’œil ne perçoit pas. Par la succession d’images dessinées et la multiplication des parties d’un réel reconstructible, il instaure 46 • Salama • numéro 05 • avril-mai 2012
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Sonder l’invisible
quelque chose d’indéterminé qui génère une sorte de malaise diffus. Ainsi s’invite un monde imperceptible, inventé, rêvé, qui distille une « inquiétante étrangeté ». n Khalil M’Rabet Université de Provence
ACTUALITÉ Une exposition personnelle d’œuvres récentes à la Galerie Matisse – Casablanca – Maroc du 26 avril au 30 mai.
ART
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Culture
Sans titre – Technique mixte sur papier 150 x 110.
Cet ouvrage de 72 pages réunit les œuvres de l’artiste Mohamed Lekleti réalisées ces trois dernières années (entre 2009 et 2011). Il présente trois aspects de sa création ; peintures, dessins et œuvres éphémères. Ce livre a été édité avec la complicité et la collaboration de cinq critiques d’art : Khalil M’Rabet, enseignant à l’université d’Aix-en-Provence, Ferdinand Corte, plasticien, Jean-Michel Benech, critique d’art, Jean-François Clément, critique d’art, et Aziz Daki, galeriste et critique d’art, qui apportent un éclairage sur la problématique de l’artiste. Mohamed Lekleti, passionné de dessin et de lecture, axe son travail sur les mythes, toutes civilisations confondues. Ses œuvres, à mi-chemin entre dessin et peinture, puisent leur inspiration dans la richesse de cette dualité. Jouissant d’une reconnaissance et d’un rayonnement important, Mohamed Lekleti multiplie les expositions en France et à l’international (États-Unis, Corée, Allemagne, Espagne, Maroc, Belgique, Suisse…). n
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La religion du trait
Technique mixte sur toile 100 x 100. Papillon de nuit – Technique mixte sur papier 100 x 100.
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K.M.
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Musique
L’amitié en
musique
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Quelques heures avant le concert, le chef d’orchestre natif d’Alger, Amine Kouider, nommé artiste de l’Unesco pour la paix, s’est livré à une interview.
Un concert inaugural de l’orchestre symphonique Algérie-France s’est tenu le 19 mars 2012 à la salle Gaveau.
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n cette année du cinquantenaire de l’indépendance de l’Algérie, ce concert se veut être celui de l’amitié entre l’Algérie et la France. En effet, il est constitué de musiciens professionnels des deux pays sous la direction artistique du chef d’orchestre Amine Kouider. Cette association a été créée à Paris le 4 octobre 2011, afin de réunir des artistes professionnels algériens et français, pour réaliser des concerts et événements culturels en France et en Algérie, notamment durant le cinquantième anniversaire de l’indépendance de l’Algérie. De célèbres morceaux de musique arabo-andalouse ouvrent la manifestation. Le public est absorbé par les airs de « Nouba Zidane » et la voix mélodieuse de Rachid Brahim-Djelloul. Puis, place à l’un des plus connus des opéras : Carmen, de Georges Bizet. Ce sera sous les applaudissements des spectateurs que l’orchestre jouera des musiques du style populaire nommé « Rihla ». On a pu entendre l’une des références de la musique chaâbi composée par Dahmane El Harrachi : « Ya Rayah ». Suivi par le morceau très connu de la musique traditionnelle kabyle : « Echtah a Taous ».
Salama : Racontez-nous la création de l’orchestre symphonique Algérie-France ? Amine Kouider : Cet orchestre symphonique Algérie-France a été crée il y a à peine six mois et il regroupe 50 musiciens : pratiquement moitié algériens moitié français. Ils se connaissent pour la plupart car on a déjà travaillé ensemble pendant une dizaine d’années tantôt en Algérie tantôt en France. C’était très important de fêter le cinquantième anniversaire en ayant une structure qui regroupe cette synergie, et cette amitié. Pour célébrer cet anniversaire, on a créé cet orchestre qui est basé à Paris. Salama : Pouvez-vous nous en dire plus sur ce concert placé sous le signe de l’amitié ? A.K. : C’est le premier concert de l’orchestre symphonique Algérie-France. La date n’a pas été choisie par hasard. C’est le 19 mars que l’application des accords d’Évian a eu lieu, un jour après leur signature. C’est une date très symbolique par rapport à ce qui s’est passé en Algérie. Je pense qu’il faut aller de l’avant sans oublier son passé pour essayer de construire un avenir meilleur pour l’Algérie et faire connaître les deux cultures. En tout cas, entre les musiciens ça se passe merveilleusement bien, avec beaucoup de respect. On attend de voir la réaction du public puisque ça va être la première. C’est la première fois dans l’histoire de l’Algérie et de la France qu’il y a un orchestre de cette dimensions-là, de ce niveau très élevé car tous les musiciens ont été triés sur le volet. Salama : Quel message voulez-vous transmettre à travers votre musique ? A.K. : Ce serait prétentieux de ma part d’être porteur d’un message. Je peux simplement parler de mon ressenti. La musique est un vecteur formidable de rassemblement mais celui-ci ne peut être fait que sous certaines conditions : pour commencer il faut connaître sa propre culture pour connaître la culture des autres. On ne peut pas aimer sans connaître. Donc, il faut d’abord être en paix et en harmonie avec soi-même. Et aussi accepter cette occidentalité qui est en nous et cette orientalité qui est en nous. C’est très important pour moi. n Lynda Bachli
El Gafla a sorti son nouvel album : Salam à toi, le 8 mars 2012.
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arim Chaya est issu des quartiers populaires d’Alger. Il commenc à jouer de la musique sur une guitare qu’il a fabriquée lui-même. Pour ce faire, il a découpé un bidon d’huile auquel a été ajouté un manche à balais. Les cordes de la guitare étaient des fils de pêche. Puis, tel un nomade, il vagabonde (Marseille, puis Rome), et s’installe quelques temps à Paris. À Ménilmontant, il rencontre Manu Chao, dont on retrouvera les influences dans sa musique. En 2002, le groupe El Gafla
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se forme avec Christophe « Eliot » Touzalin à la trompette, Emmanuel Noubomo/Kayou au saxophone, Jean Rollet-Gérard à la basse, Julien Pestre à la guitare, Simon Clavel à la batterie et Thibaut Gueriaux pour les percussions et le chœur. En 2006, le groupe sort son premier album intitulé Paris/Casbah. Ces titres connaissent beaucoup de succès, et l’équipe part jouer en France et à l’étranger. Leur passage en Algérie, en 2009, signe leur consécration. En 2012, le groupe sort son deuxième opus Salam à toi, un mélange de mots français et arabes comme il est courant de le faire dans le langage parlé algérien. D’ailleurs, les textes des chansons
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La caravane nous entraîne
sont franco-arabes et empreints de poésie. Le style musical consiste en l’union du rock et des rythmes méditerranéens. Certains appellent ce mélange un rock oriental. Ce cocktail mélodieux, vivant et énergique nous invite à la danse. n L.B.
Musique
Le malouf, l’ADN
musical du Maghreb Malouf vient du mot arabe maalouf (habitué), qui signifie « habitué à la tradition » ou, plus précisément , « fidèle à la tradition ». Zoom sur deux figures emblèmatiques qui ont su faire rayonner cette musique héritière de la musique arabe : cheikh Raymond et Hadj Mohamed Tahar Fergani.
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Cheikh Raymond Raymond Leyris avait 48 ans lorsqu’il fut assassiné le 22 juin 1961 d’une balle dans la nuque, sur le marché de Constantine. Le musicien était le symbole de cette ville. Elle comptait alors 40 000 Juifs sépharades, près de la moitié de sa population. Symbole du mariage des cultures occidentales et orientales, Raymond Leyris est né d’une Bretonne et d’un Juif sépharade, adopté par une famille juive modeste. C’est de ce rocher et de cette musique que Raymond était emblématique. Et comme le Pont suspendu, symbole de la ville, passerelle entre ses rives aux contours déchiquetés, Raymond était un lien entre les communautés juive et musulmane que l’histoire était en train de séparer. Figure charismatique de la culture traditionnelle constantinoise, il était une notabilité révérée par les deux communautés. Ses concerts hebdomadaires à la radio puis à la télévision locale vidaient les rues de la ville. À l’instar de cheikh Bestandji, son maître, Raymond était un symbole et, à ce titre, il n’était ni juif ni musulman. Il était cheikh Raymond, c’est tout !
Hadj Mohamed Tahar Fergani, le maître absolu De son vrai nom Reganni, fils de cheikh Hamou, célèbre chanteur de hawzi, Hadj Mohamed Tahar Fergani est né le 9 mai 1928 à Constantine. Épaulé par son frère Abdelkrim, il s’initie à la broderie, un métier très prisé dans sa ville natale, puis, à l’âge de 18 ans, il décide de se consacrer entièrement à sa vocation première qui est la musique. Il débute comme joueur de fhel (petite flûte) dans l’orchestre d’Omar Benmalek, avant de se tourner vers le genre charqi (oriental, d’inspiration égyptienne) au sein de l’association
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e malouf est basé sur un système de 24 noubates, qui sont les règles théoriques et inchangées depuis la fin du IXe siècle. Ces noubates se sont maintenues grâce à une tradition orale dans laquelle mélisme et autres ornementations restent difficiles à symboliser par le système de notation emprunté à l’Occident. Cette musique s’est implantée dans la culture de plusieurs grandes villes du Maghreb : Fez, Tlemcen, Alger, Constantine, Tunis, Annaba… Fondée sur des mélodies, elle a subi les influences des régions où elle était perpétuée. Trois grandes écoles se sont distinguées, celle de Tlemcen (qui se revendique de Grenade), celle d’Alger (qui se revendique de Cordoba), et enfin celle de Constantine (qui se revendique de Séville). Le mot Malouf vient du mot arabe maalouf (habitué), qui signifie habitué à la tradition, ou plus précisément : fidèle à la tradition. Et l’un de ces fidèles est cheikh Raymond. Hadj Mohamed Tahar Fergani demeure l’une des références majeures. En médaillon, cheikh Raymond.
Toulou’ El Fadjr (l’aurore). Sa voix chaude et puissante impressionne dans l’interprétation de chansons d’Oum Kalthoum ou de Mohamed Abdel Wahab. Un peu plus tard, après s’être essayé au style hawzi (populaire des faubourgs de Tlemcen), sur les conseils avisés du fameux cheikh Hassouna Amin Khodja, il s’oriente vers le malouf, le genre, d’origine andalouse, le plus enraciné à Constantine, mais également à Annaba, à Tunis et à Tripoli, dont son père lui enseignera les bases essentielles. En 1951, à Annaba, il se fait remarquer à un concours musical, dont il remporte le premier prix, et, dans la foulée, enregistre un premier album qui l’impose, à la fois, comme chanteur populaire et maître du malouf. Au contact des grands maîtres de l’arabo-andalou algérien, tels Dahmane Ben Achour ou Abdelkrim Dali, il perfectionne son art, parvenant à maîtriser le répertoire des trois écoles : l’algéroise et sa sana’a, la tlemcénienne avec son gharnati et, bien sûr, la constantinoise avec son malouf plus vif qu’ailleurs. Primé en plusieurs occasions et honoré tant sur le plan national qu’international, il demeure l’une des références majeures et l’invité incontournable de toutes les manifestations culturelles où la qualité artistique prime sur l’effet de mode. Son sens mélodique aigu, son génie sans pareil dans l’improvisation, la richesse de son style, sa virtuosité dans le maniement du violon, tenu à la verticale, et son audace à dépasser ses limites ont fait école. Et, pour lui, c’est la plus belle des récompenses pour une aussi longue carrière, encore en mouvement. n Abdelouaheb-Boudeffa avril-mai 2012 • numéro 05 • Salama • 49
Constantine autrefois Perchée sur un plateau rocheux cerné de falaises escarpées, la vieille ville occupe un site connu depuis l’Antiquité. Les flots du torrent du Rhumel grondent dans les gorges couvrant les murmures des légendes populaires aux scenarii fantastiques. Par leurs mystères, elles rendent les Constantinois encore plus amoureux de leur ville.
Un paysage magnifique, où l’on voit de loin le monument aux morts.
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e site géologique extraordinaire, plus que l’architecture, retient l’attention du promeneur solitaire qui chercherait en vain les Rêveries de Rousseau. En parcourant les ruelles sinueuses, il y a plus de charme dans la réalité quotidienne que dans un orientalisme convenu, plus d’authenticité dans des façades modestes mais typiques que dans les rares monuments trop remaniés. Le plateau occupe une diagonale de 1 km ; son sommet en plan incliné atteint 580 mètres d’altitude au sud et monte à 790 mètres au nord. Cerné de ravins abrupts dont celui de l’oued Rummel, le plateau n’est rattaché à l’extérieur que par l’isthme du Koudiat-Aty. Au-dessus des murailles se détachent les toitures de maison pittoresque dans les quartiers juifs et ottomans.
Une longue histoire L’antique Cirta fut la capital d’un royaume satellite de Carthage, puis les rois numides Syphax, Massinissa, Micipsa et Adherbal l’embellirent, mais leurs monuments n’ont pas survécu. En 46 av. J.-C., César offrit la ville au mercenaire italiote Sittius qui l’avait aidé à vaincre Juba Ier, allié de Pompée. avril-mai 2012 • numéro 05 • Salama • 51
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Le monument aux morts.
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Le pont d’El Kantara. Il est le lieu des principaux assauts de la ville. En 1792, Salah-bey confie sa restauration à l’architecte Bartolomeo. L’aqueduc romain en siphon qui était inclus au pont est alors remis en état. Cet ouvrage permet d’alimenter les citernes de la ville depuis le Djebel El Ouach.
Vieux (du nom des officiers ayant mené l’assaut de 1837), le promeneur se rapproche du quartier juif, sans oublier la cathédrale, le palais d’HadjAhmed et le musée.
La Victoire de Cirta La grande mosquée, Djamael-Kebir, domine la rue Nationale. Bien que la façade soit moderne et que l’édifice soit de proportions modestes, il reste à l’intérieur quelques fragments antiques de remploi et une inscription de 618 hég. (1221 J.-C.). La mosquée de Sidi-Lakhdar date du XVIIIe siècle. Son minaret octogonal s’inspire lointainement de celui de Tunis. Une galerie comporte quelques sépultures, dont celle de Hassan-bey. La salle à colonnes présente quelques carreaux de faïences italiennes et des lanternes restaurées au début du XXe siècle. Au bout de la rue Combe, place des Galettes, se trouve le centre du quartier juif. Jusqu’au milieu du XXe siècle, quelques vieilles femmes juives avaient encore conservé la tradition de se revêtir le samedi de leurs plus belles
robes et de leurs bijoux ancestraux. Par la place Négrier, des ruelles en escalier débouchent sur la synagogue. À proximité on découvre la mosquée de Salah-bey, Djama-el-Kettani, assez bel exemple d’art ottoman provincial du XVIIIe siècle, orné de colonnes de marbre italien et d’un mihrab de même provenance. Le plafond de bois contraste avec la laideur des faïences. Ce bâtiment fut sauvé de la ruine par une restauration sous Napoléon III. Au nord de la place Négrier, vers le ravin, on peut apercevoir le palais de justice et le lycée. DR
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Intégrée à l’empire, elle connut une période fastueuse. Fronton y naquit puis devint le précepteur de Marc-Aurèle. Détruite au IVe siècle, elle fut relevée de ses ruines par Constantin qui lui donna son nom. Divers potentats musulmans y régnèrent, puis les Ottomans d’Alger y établirent un beylik au XVIe siècle, ne laissant qu’une histoire monotone de révoltes et d’assassinats. Seule émerge la figure de Salah-bey au XVIIIe siècle, qui fonda ou fit restaurer les trois principales mosquées. Le dernier bey, Ahmed, défia les Français qui échouèrent à conquérir la ville en 1836, mais y parvinrent en 1837. Le général Damrémont fut tué la veille de l’assaut. Ses obsèques donnèrent lieu à une commande mécénale du roi Louis-Philippe : le Requiem de Berlioz. L’entrée sud s’ouvre sur la place du duc de Nemours, du nom d’un fils de Louis-Philippe qui accompagnait Damrémont. Elle est bordée des meilleurs hôtels, d’où il faut partir à pied vers la vieille ville. Quatre voies y débouchent : les rues Nationale, Caraman, de France et Damrémont. Le quartier indigène n’obéit à aucun plan d’urbanisme, prenant l’aspect d’un dédale de ruelles étroites où seule la rue Perrégaux offre un point de repère. Rue Abdallahbey et rue des Zouaves, une intense activité commerçante attire les populations de l’arrière-pays. Elles viennent vendre des denrées et acheter des objets utilitaires sans valeur artistique, comme de la maroquinerie fruste ou de rugueux burnous de laine brune. La bijouterie artisanale se limite à quelques objets façonnés dans de l’argent fiduciaire. Au bout de la rue Perrégaux se dresse un édicule typique sur un éperon rocheux : le marabout de Sidi-Rached. Avant la pacification, les juges coraniques y faisaient précipiter les femmes adultères dans le Rhumel. En allant vers les rues Combe et
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Le pont suspendu, ou passerelle de Sidi M’Cid, traverse les gorges à 175 mètres au-dessus du Rhumel. Long de 164 mètres et large de 5,70 mètres, il supporte une charge de 17 tonnes. Conçu par l’ingénieur Ferdinand Arnodin, il a été réalisé par l’entreprise Witte, le 19 avril 1912.
dans la Casbah de Constantine et servit de modèle à l’insigne de la 3e division d’infanterie d’Afrique levée en 1943. Cette grande unité commandée par le général de Monsabert s’illustra en Tunisie, au débarquement en Provence, à la bataille de Belfort et à la conquête du sud de l’Allemagne. Cet insigne comporte à la fois la Victoire de Cirta et les trois croissants bleu-blanc-rouge, exprimant la volonté de ce chef de guerre d’assumer l’héritage spirituel de la 3e légion romaine Augusta. n Philippe Lamarque
Bliographie – Philippe Lamarque • L’Algérie d’antan par les cartes postales, HC éd., 2006 rééd. 2011, 192 p., 600 illustrations et cartes. Ouvrage lauréat du prix du Maréchal Lyautey 2006 décerné par l’Académie des sciences d’outre-mer. • Les Très Riches Heures de l’Algérie, éd. Romain Pages, 2004, 192 p., 180 photos. Ouvrage lauréat du prix Louis-Marin 2005 décerné par l’AEC et lauréat du prix du Cercle algérianiste. http://www. romain-pages.com • Le Débarquement en Provence (narrant l’épopée de la 3e division d’infanterie d’Afrique), Le Cherchemidi, 2011. Ouvrage lauréat du prix de l’Unor.
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De la vieille forteresse, la kasbah, il reste peu de traces, sauf quelques inscriptions antiques protégées par l’armée française et scellées dans les murs. Les cendres des soldats tués aux sièges de 1836 et 1837 reposent dans un monument funéraire édifié en 1851. Place du Palais, la batterie-fanfare et l’harmonie de la garnison donnèrent des concerts plusieurs fois par semaine pendant toute la période française. La cathédrale de Notre-Dame-desSept-Douleurs présente le meilleur exemple d’architecture ottomane à Constantine. Elle occupe l’ancienne mosquée de Souk-er-Rezel construite au XVIIIe siècle, agrandie et dont l’axe a été interverti. Le mihrab a été conservé, le minbar réutilisé comme chaire à prêcher, les faïences protégées et restaurées. Bien que d’une facture assez grossière, la bâtisse sous coupoles présente un aspect décoratif. Le palais d’Hadj-Ahmed date du dernier dey. Il présente peu d’intérêt, sauf quelques colonnes de marbre italiennes et une statue antique d’une dame romaine du IIe siècle provenant de Djemila. De la place du Palais, la rue Damrémont conduit vers la poste et l’hôtel de ville. L’une des salles sert de musée grâce à la Société archéologique de Constantine et présente des médailles, des lampes à huile, des verres provenant de la nécropole antique découverte sur la butte de KoudiatAty. La tête d’Antonin provient de Tébessa et celle de Claude de Collo ; une statue de Bacchus a été trouvée rue Nationale. La pièce la plus célèbre, une statuette de bronze, représente une Victoire. Elle fut découverte
Le pont de Sidi Rached construit entre 1908 et 1912, par l’ingénieur Aubin Eyraud, avec l’aide de Paul Séjourné qui en a conçu les cintres. Ce viaduc routier traverse les gorges du Rhumel et relie le quartier du Coudiat (centre-ville) à la gare de Constantine. C’est le plus haut pont en maçonnerie du monde. Longueur : 447 mètres, avec 27 arches dont une de 70 mètres, la plus haute culminant à 107 mètres. avril-mai 2012 • numéro 05 • Salama • 53
Patrimoine
Orléansville La Merveille DR
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onnue dès l’empire romain, la ville de Castellum Tingitanum évoque dans son nom les racines de la cité. Castellum signifie qu’il s’agissait d’une place fortifiée avec une garnison dont la mission consistait à garder le limès, c’est-à-dire la frontière. L’adjectif tingitanum désignait le pays, qui ne s’appelait pas l’Algérie, mais la Maurétanie tingitane. Quant à la population, elle était compoPhilippe Lamarque. sée pour partie de Berbères et de colons romains. À cette époque, il n’y avait pas encore d’Arabes et de Juifs. Parmi les Berbères, certains avaient eu accès à la citoyenneté romaine, quant aux colons, tous n’étaient pas citoyens, mais sujets d’empire. Parmi les gens les plus respectés de ces communautés se trouvaient les anciens militaires, qui, une fois leur temps obligatoire accompli dans les légions, recevaient une concession agricole et exerçaient des charges d’édiles. Comme dans toutes les cités romaines, la vie sociale y était active, tournée vers l’exploitation rurale. Ont été découverts de cette époque quelques vestiges archéologiques, par exemple des vases et des citernes, mais il n’en reste plus de trace aujourd’hui. La ville abrite la plus ancienne église d’Afrique, bénie en 426 par saint Réparatus, fondateur du premier diocèse du continent. Il s’agit aux yeux des chrétiens d’un immense privilège, aussi prestigieux que le souvenir du premier Africain converti : Simon de Cyrène, originaire de Cyrénaïque, l’actuelle Libye, qui aida Jésus à porter sa croix.
La fondation d’Orléansville
Une histoire mouvementée, y compris lors des secousses telluriques, rend Orléansville particulièrement attachante. Savourons quelques images d’un passé lointain, grâce à des cartes postales de collection aux douces teintes sépia.
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À l’arrivée des Français, la vallée du Chéliff était presque entièrement inculte et inhabitée. La colonne commandée par le colonel Saint-Arnaud n’y rencontra personne, ce qui lui fit noter dans son rapport qu’il s’agissait d’« un grand désert ». Lorsque les administrateurs observèrent le site, ils remarquèrent que le climat y était rude : un hiver venteux, un été aride et surchauffé à la limite de l’irrespirable, avec un bref printemps tempéré. Pendant cette saison favorable, les tribus semi-nomades remontaient du Sud, parmi lesquels les Arbaa venant de fort loin. De même, les tribus montagnardes descendaient faire paître les troupeaux. Des marchés s’organisaient alors, où se négociaient du sel, des dattes, des moutons. Il y avait aussi divers tissus de laine, de poil de chèvres ou de chameaux : amarra, haïk, tellis ou zorbia. Il s’y échangeait aussi du blé et de l’orge. Profitant des pâturages saisonniers, les nomades faisaient engraisser leurs chameaux puis retournaient vers le sud. Le maréchal Bugeaud, futur duc de l’Isly, ordonna de fonder un poste fortifié le 16 mai 1843 sur le lieu-dit El-Asnam (alias les ruines) de l’antique cité romaine de Castellum Tingitanum. Il fallut trouver un nouveau nom. Or, l’année précédente, était décédé le duc d’Orléans, fils aîné du roi Louis-Philippe Ier. Ce jeune prince, espoir de la couronne française, avait laissé à l’armée d’Afrique et à ses adversaires
Patrimoine un souvenir impérissable par son courage, son humanité, sa magnanimité et son sens diplomatique. Il avait noué des relations cordiales et parfois amicales avec des chefs coutumiers. Tout naturellement, la ville prit le nom d’Orléansville. Dans le même esprit, Philippeville rendait hommage au roi. Tout d’abord, elle eut un statut militaire, puis quelques habitants civils prirent le risque de s’y installer. Orléansville fut érigée en commune de plein exercice par le décret du 31 décembre 1856, sous le règne de Napoléon III. Celui-ci, ami intime d’Abd-elKader, était favorable à la création d’un Empire arabe associé à l’Empire français. Ferdinand Duboc fut élu premier maire de la ville. Celleci connut ensuite le destin des autres centres urbains de l’Algérie française, nécessitant un tracé d’urbanisme, des équipements, une desserte routière, mais la plus grande réalisation fut le chemin de fer.
une vitesse moyenne de 25 km/h). Pour se rendre jusqu’à Orléansville, il fallait compter huit heures de trajet supplémentaires. Pour couvrir les 20 km séparant Orléansville de OuedFodda, il fallait une heure. À l’époque, ces durées étaient regardées comme des performances. N’oublions pas qu’il y avait encore des diligences hippomobiles jusque dans
cupât du confort des voyageurs. La Compagnie P.L.M. (Paris-Lyon-Marseille, concessionnaires des CFA – Chemins de fers algériens) soumit à l’approbation de monsieur le gouverneur général de l’Algérie un projet d’acquisition de dix grandes voitures à voyageurs à couloir et W.C. toilettes dont deux voitures de première classe, trois de deuxième et cinq de troisième classe. Amélio-
Le chemin de fer dessert Orléansville Le décret impérial du 8 avril 1857 disposait dans son article premier « qu’il sera créé en Algérie un réseau de chemins de fer embrassant les trois provinces ». Ce réseau comptait deux grandes lignes : la première parallèle au littoral, reliant Alger et Constantine, traversant les villes d’Aumale (Sour El Ghozlane), Sétif et, à l’Ouest, reliant Alger à Oran, en passant près de Blida, Orléansville, Saint-Denis du Sig. Une seconde desservait à l’Est les principaux ports maritimes : Philippeville (Skikda) à Constantine ; Bougie à Sétif et à l’Ouest Ténès à Orléansville et Arzew à Mostaganem. En 1874, les travaux avaient péniblement avancé à cause des difficultés géographiques et du coût énorme des ouvrages d’art : seules les lignes d’Alger à Oran et de Constantine à Philippeville étaient inaugurées officiellement et ouvertes au trafic ferroviaire. Il ne fallait guère être pressé : le train partant d’Alger à 6 h 00 du matin n’arrivait à destination de Kerguenetah-Oran qu’à 11 h 13 du soir (400 km en dix-sept heures treize ! avec
En 1962, la ville reprend le nom du site de El Asnam qui signifie « ruines ». Et depuis 1981, elle s’appelle Chlef. les années 1930, qui ne furent que lentement supplantées par des autocars. Bien que calculés au plus juste prix, les trajets entre Alger et Oran n’en coûtaient pas moins de 47,15 F en première classe, 35,25 F en deuxième classe et 29,95 F en troisième classe. Sachant la longueur des voyages, l’administration des chemins de fer avait prévu des buffets dans les gares d’Affreville (Khemis-Miliana), Orléansville et Relizane. Enfin des diligences de service desservaient les correspondances entre les gares des chemins de fer et les villes de l’intérieur : El Affroun-Cherchell ; Bou Medefaâ-Hammam Righa ; AffrevilleMiliana et Orléansville-Ténès). Au cours du quatrième quart du XIXe siècle, la ligne dut se contenter de wagons aux banquettes assez sommaires et surtout de wagons de marchandises indispensables aux échanges économiques. Il fallut attendre 1910 pour que l’on se préoc-
rant la sécurité, ces voitures furent dotées du frein continu, de l’intercommunication pneumatique du chauffage à la vapeur et de l’éclairage au gaz avec manchons à incandescence. L’investissement coûta 480 000 francs.
Le destin d’Orléansville au XXe siècle La ville dut déplorer quatre tremblements de terre. Celui de 9 septembre 1954 se solda par 1 500 morts et 5 000 blessés. En 1962, la ville reprit le nom du site de El Asnam. Cependant, le tremblement de terre du 10 octobre 1980 qui détruisit la ville à 80 % incita une partie de la population à conjurer le sort et fit pression sur les pouvoirs publics afin de changer le nom de la ville et d’écarter la malédiction portant sur le nom de « ruines ». Depuis 1981, elle s’appelle Chlef. Espérons qu’elle surmontera les épreuves et restera l’un des lieux prestigieux de la francophonie en Afrique et dans le monde, puisque le célèbre Paul Robert (19101980), avocat, lexicographe et éditeur français y naquit : il est universellement connu comme le rédacteur du Petit Robert. n Philippe Lamarque avril-mai 2012 • numéro 05 • Salama • 55
Mode Haute couture
Aziz Zerari
Gandoura bônoise avec fetla fil d’or.
Le styliste, Aziz Zerari, accompagné d’un mannequin vêtu d’une gandoura en velours, executée à la fetla.
Styliste de haute couture féminine depuis plus de trente ans, Aziz Zerari a su imposer son label à travers sa maîtrise de l’art de la fetla bônoise aussi bien en Algérie qu’à l’étranger.
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ntellectuel par excellence, cet homme au verbe châtié et à l’élégance raffinée a fait de la fetla son cheval de bataille. Il a percé tous les mystères des entrelacs de cette broderie, exécutés au fil d’or, après des années de recherche. Pour ceux qui ne le connaissent pas, Aziz Zerari est né en décembre 1951 à Annaba. Il entame des études de lettres, puis enseigne la langue espagnole à la faculté des lettres de l’université d’Alger. Il décroche un doctorat en littérature hispano-arabe respectivement à l’université de Bruxelles et à l’université autonome de Madrid. Son penchant pour la broderie le pousse à s’inscrire à l’École des arts et des métiers de Bruxelles. Il en ressortira quelques temps plus tard avec un diplôme
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Le maître de la fetla
Robe constantinoise mauve, entièrement travaillée à la fetla.
en stylisme et en haute couture. Poussé par cette passion pour les fils et les tissus, il choisit de faire de la couture son métier de prédilection. Une passion, avoue-t-il, qui l’a habité depuis sa tendre enfance « Tout petit, j’étais fasciné par la fetla quand ma mère m’emmenait avec elle dans les cérémonies familiales. Toutes mes appréciations sur mes cahiers d’école mentionnaient que j’étais un excellent élève, mais rêveur. »
Origine de la fetla Il avoue que, à l’issue d’un séjour de quelques années aux Émirats où il a passé de longs moments assis sur une natte à contempler dans leurs échoppes les brodeurs indiens et pakistanais qui travaillaient au luneville (point réalisé avec un crochet sur métier), il
compris qu’il n’avait qu’une seule raison de vivre. De retour à Annaba, il eut la grande chance de retrouver une grande tante dont la grand-mère était disciple des brodeurs juifs bônois qui excellaient dans la fetla. « Cette dame, dit-il, ne m’a rien montré mais ne m’a rien caché non plus. Cet amour pour la fetla m’a poussé à veiller pour découvrir ses mystères multiples. » D’emblée, Aziz Zerari tient à lever toute équivoque concernant l’origine de la fetla. En effet, il rejette l’hypothèse selon laquelle cette broderie vient de l’Andalousie et de la Turquie. La fetla, explique-t-il, est typiquement algérienne. Elle est originaire plus exactement d’Annaba. Cette broderie
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Gandoura bônoise avec fetla fil d’or.
remonte aux alentours du XVIe siècle. « Je détiens, d’ailleurs, une vieille pièce datant de 1896. Il s’agit d’une gandoura appartenant à l’une de mes ancêtres », argue-t-il. Une pièce que le public algérois a pu découvrir l’année dernière – lors d’une exposition qu’il a organisée au Palais de la culture Moufdi Zakaria – parmi quelque 90 autres pièces récentes et anciennes. Il soutient également que ce sont les familles juives qui détenaient les mystères de cet art. « La véritable fetla a disparu avec le départ massif des juifs d’Algérie en 1956. Ce qui se pratique actuellement se rapproche à peine des techniques originelles de cette broderie, puisque le principe de base des dessins n’est pas respecté. Le principe de base est de trouer le velours une seule fois, de broder l’infini avec un même fil avant de revenir au point de départ. » Sans prétention aucune, Aziz Zerari est convaincu qu’il est le seul et unique à avoir percé les secrets de la fetla originale. Il se dit le « ressusciteur » de cet art millénaire.
Créateur de plus de 1000 motifs de broderie, il entend poursuivre sa quête. Concernant la question épineuse du devenir de la transmission de cette broderie, Aziz Zerari indique qu’un projet d’ouverture d’un centre de formation de fetla sera prochainement à l’honneur, et ce, avec la précieuse collaboration de la wilaya d’El Tarf. Le centre en question accueillera une moyenne de 100 à 200 élèves. Ce maître promet toutefois de dévoiler certains secrets de cet art indémodable. À noter que ce grand monsieur détient un atelier à Annaba et une boutique à Alger. Ayant plus d’une corde à son arc, Aziz Zerari a réussi avec brio à transposer l’art de la fetla du vêtement au tableau. En effet, il a monté l’année dernière une imposante exposition de tableaux où la calligraphie arabe a occupé une place de choix. « J’ai réussi à rehausser l’unicité de cet art en lui donnant une dimension internationale. » Aziz Zerari est un styliste qui a eu l’occasion de dévoiler ses collections au public à travers de somp-
Karakou blanc cassé, serti de pierres swarovski et de perles scintillantes.
tueux défilés de mode. Le dernier remonte à l’année dernière à Alger. Aziz Zerari compte publier prochainement un beau livre sur la fetla bônoise. Un ouvrage qui sanctionnera toutes ses années de recherches. Ce styliste de haute couture, créateur de plus de 1 000 motifs de broderie, entend bien poursuivre sa quête : celle de perpétuer l’art de la broderie bônoise. Rendez-vous étant pris avec cet artiste aux mains d’or en mai prochain à Alger pour une seconde exposition de tableaux, axée sur la broderie. n Elyna Sabrine
Séroual M’Douar vert émeraude, réhaussé d’un djabadouli.
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Caftan long bônois vert bouteille avec une large fente, sertie de pierres et de perles.
Mode
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Haute couture
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Santé Nutrition
Docteur B. Tazeka
L’obésité est si complexe que certains ne savent plus où donner de la tête et se posent la question que faire face à leur obésité. Pour le commun des mortels : c’est un « désagrément », mais pour les scientifiques et les professionnels de la santé c’est une maladie, d’autant plus que l’obésité gagne du terrain sans état d’âme : car gagner des kilos est aisé, mais les perdre n’est pas facile et n’est pas sans risque et danger.
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ais, au fait, qu’est-ce que l’obésité ? Car il faut faire la différence entre le surpoids et l’obésité : une personne « ronde » n’est pas forcément obèse, mais peut le devenir. Avant c’était « le coup d’œil » qui définissait l’obésité (selon le poids et la corpulence), ce qui n’est plus le cas aujourd’hui.
> Définition C’est une accumulation excessive et anormale de graisse corporelle (masse adipeuse) résultant d’un déséquilibre énergétique entre l’apport calorique et les dépenses énergétiques, ce qui signifie que les apports sont plus importants que les sorties ou les entrées sont supérieures aux dépenses. Mais les scientifiques ont ajouté un élément ou outil de définition appelé : • IMC : Indice de masse corporelle (en français) • BMI : Body Mass Index (en anglais). Mais cet IMC (ou BMI) n’est pas si significatif, car il existe un inconvénient : il ne définit pas la répartition des masses graisseuses et ne fait pas la différence entre la masse musculaire, les os et la masse adipeuse (graisse) surtout pour ceux qui ont ajouté le tour de taille comme référence.
> Symptômes de l’obésité ou des obésités • Excès de graisse dans l’abdomen et viscères (grosse bedaine !), on parle d’obésité androïde. 58 • Salama • numéro 05 • avril-mai 2012
Obé
Poids lour
• Excès de graisse aux fesses, cuisses, hanches, on parle d’obésité gynoïde, qui touche surtout les femmes.
> Causes Elles sont multiples : • Alimentation déséquilibrée, anarchique, très riche en gras, sucre et sans légumes. • Stress. • Sédentarisation de plus en plus importante des populations. • « Fainéantise » : certains utilisent leur véhicule pour aller acheter le pain ou le lait chez le commerçant situé à 200 ou 300 m de leur résidence. • Facteur héréditaire, génétique. • Manque de sommeil (ce qui incite au grignotage). • Prise de certains médicaments (antipsychotiques, corticoïdes, etc.). • Alcool (Ah ! le fameux apéritif avant le repas pour « ouvrir l’appétit »). • Maladies et troubles hormonaux (hypothyroïdie, maladie de Cushing, etc.).
> Complications • Métaboliques : - DNID (diabète de type 2). - Dyslipidémie. • Cardiovasculaires : - HTA (hypertension artérielle) - IDM (infarctus du myocarde) - AVC (accident vasculaire cérébral) - Insuffisance cardiaque.
L’autorégime amaigrissant est à proscrire, car ce que l’on perd est rapidement récupéré et entraîne un déséquilibre alimentaire.
sité,
Nutrition
Santé
d à porter
• Hépatobiliaires : - Risque de calculs biliaires. • Articulaires : - Arthrose - Hernie discale. • Psychosociales : Individus renfermés sur eux-mêmes, ne sortant pas, sans loisirs. Exemple : ne vont pas à la plage. • Pulmonaires : - Apnée du sommeil - Syndrome de Pickwick.
> Prévention • Faire son bilan de santé. • Limitation de l’apport énergétique (graisse, sucre, etc.). • Consommer surtout des fruits et légumes. • Activité physique : marche, sport. • Avoir un mode de vie « sain ». • Être « motivé ». • Être « généreux » en distribuant son surplus alimentaire aux plus démunis. • Manger à des heures fixes et ne pas sauter les repas.
> À proscrire • L’autorégime amaigrissant car ce que l’on perd est rapidement récupéré et entraîne un déséquilibre alimentaire pouvant devenir dramatique, dangereux et parfois mortel. • Prise de médicaments amaigrissants surtout chez ceux qui suivent un traitement (HTA, diabète, insuffisance cardiaque, etc.). n
Traitement • Prévention (voir plus haut). • Consulter les professionnels en la matière (médecin, diététicien, psychologue). • Chirurgie chez certains. NB : Cet article ne concerne que l’obésité chez l’adulte bien que certaines études ont montré que 10 % des jeunes sont obèses (certains pays ont interdit l’installation de distributeurs de sucreries, de sodas dans les établissements scolaires pour lutter ou limiter ce phénomène qu’est l’obésité). • Si IMC (poids en kg/taille au carré) compris entre : - 20 et 25 : poids normal. - 25 et 30 : surpoids.
- 30 et 35 : obésité modérée. - > 40 : obésité sévère = danger (maladies, etc.). Tour de taille Idéal Élevé Trop élevé
Homme 80 cm 80 à 88 cm > 88 cm
Femme 95 cm 95 à103 cm > 103 cm
Ainsi vous pourrez calculer votre propre IMC et vous caser dans l’une de ces grilles. Exemple : Taille 1 m 20, poids 50 kg. IMC = 50 kg/1 m 20 x 1 m 20 = 34.
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Saveurs
CUISINE
Fairouz Dernaoui
Tarte aux avocats
Bavarois INGRÉDIENTS
50 cl de lait 125 g de sucre 5 jaunes d’œuf 1/2 gousse de vanille
6 feuilles de gélatine 25 cl de chantilly Parfum
INGRÉDIENTS
Pâte à foncer salée (base 25 g de farine) 400 g de chair de crabe 25 cl de mayonnaise Sauce anglaise (1 cuillère à soupe) Tabasco (1 petite cuillère à café)
4 avocats 1 citron 15 cl de gelée claire 4 tomates 20 g d’œuf de lump noire
PRÉPARATION
1. Préparer la pâte à foncer et laisser reposer 2. Foncer un cercle préalablement ciré 3. Piquer l’intérieur du fond de tarte 4. Mettre dans le fond un papier sulfurisé 5. Mettre à l’intérieur des billes d’étain ou des haricots secs 6. Enfourner 20 minutes environ à 230 °C : cuisson à blanc 7. Préparer la sauce cocktail 8. Mélanger le crabe préalablement pressé 9. Masquer le fond de tarte (cuit à blanc) avec le crabe cocktail 10. Éplucher les avocats. Passer au citron. Couper en 2. Enlever le noyau 11. Émincer les avocats (comme des poires) 12. Disposer les avocats comme les tartes aux pommes 13. Décorer avec rose en tomates et œufs de lump 14. Fixer le décor (gelée froide mais non prise) 15. Couler de la gelée mi-prise sur les avocats 16. Dresser sur plat
1. Faire les pesées 2. Mettre le lait à bouillir avec la vanille 3. Blanchir les jaunes d’œuf avec le sucre 4. Verser le lait en plusieurs fois. Remuer 5. Cuire à la nappe (= crème anglaise) 6. Tremper les feuilles de gélatine dans de l’eau froide 7. Égoutter les feuilles de gélatine et incorporer à la crème anglaise(= crème anglaise collée) 8. Passer au chinois étamine (passoire fine) 9. Monter la chantilly 10. Faire refroidir la crème anglaise collée 11. Incorporer la crème chantilly à l’aide d’une spatule en bois 12. Mouler et réserver au froid 2 à 3 heures 13. Démouler en mettant le moule dans de l’eau chaude 2 à 3 mn et décorer
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PRÉPARATION
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sport
Football
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Le onze de l’indépendance
Ils ont porté haut la main les couleurs nationales à travers le monde pendant la révolution.
En parlant et en se souvenant de la guerre de libération algérienne, plusieurs symboles reviennent à l’esprit, et, parmi eux, cette mythique équipe du Front de libération nationale (FLN). Une équipe qui continue jusqu’à nos jours de faire parler d’elle, tant son rôle fut, alors, primordial.
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n 1958, l’Algérie se trouvait toujours sous le régime colonial français. Pis, elle demeurait le seul pays maghrébin sous ce régime, ce qui avait donné aux Français l’aubaine d’agir selon leurs intérêts afin de promouvoir leur pays, par l’exploitation du potentiel algérien. Tous les domaines ont été
Mohamed Maouche.
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touchés, notamment celui du sport, puisque les instances françaises d’alors voulaient, coûte que coûte, renforcer les rangs de leur sélection nationale de football par les talents algériens, surtout ceux résidant en France. D’autant plus que cela avait coïncidé avec cette période où « les Bleus » se préparaient pour la Coupe du monde organisée cette année-là en Suède. Parmi les éléments visés en priorité : le défenseur de charme de l’AS Monaco et « Monsieur football », Mustapha Zitouni, et l’attaquant « qui avait les yeux derrière la tête », Rachid Mekhloufi, pensionnaire de l’AS Saint-Étienne d’alors. Deux éléments qui ont porté déjà les couleurs de l’équipe nationale française, et contribué grandement à sa qualification pour ladite édition du Mondial. Le Front national de libération (FLN), créé après les décisions du Congrès de la Soummam en 1956, saisit l’occasion de relancer le projet ayant germé en 1957 : créer une équipe de football, dans l’intention de protéger les talents algériens.
Rendre à l’Algérie ses talents Ainsi donc, l’ancien latéral droit des Girondins de Bordeaux, Mohamed Boumezrag El Mokrani, après son retour des Jeux de l’amitié organisés à Moscou, eut la géniale idée de mettre en place une équipe de football, qui serait composée de joueurs algériens évoluant en France, et dont le rôle serait de faire connaître la cause algérienne et le dur combat mené par les moudjahidine. Le natif de Chlef n’informa que ses deux lieutenants, Mokhtar Arribi et Abdelaziz Bentifour, de ce projet de grande envergure. Les trois hommes multiplièrent les réunions clandestines entre décembre 1957 et avril 1958 avant de joindre l’acte à la parole. Comme première étape, prendre attache avec les joueurs algériens évoluant dans le championnat français, en leur demandant de quitter immédiatement leurs clubs et de rejoindre cette nouvelle équipe, à Tunis, lieu de sa création. L’objectif escompté était de montrer au colon français que même les footballeurs étaient impliqués dans la guerre
SPORT
Football
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Le onze de l’indépendance
de liberation, mais, aussi, prouver que l’Algérie peut se développer seule, sans aide extérieure, et ainsi influer positivement sur le moral du peuple algérien. Dès le lendemain de l’appel, pas moins de 10 joueurs quittent la France en catimini, et parmi eux se trouvaient les deux internationaux Zitouni et Mekhloufi.
Effectif Gardiens : Abderrahmane Boubekeur (AS Monaco), Ali Doudou (USM Annaba), Abderrahman Ibrir (O Marseille) Défenseurs : Mustapha Zitouni (AS Monaco), Kaddour Bekhloufi (AS Monaco), Dahmane Defnoun (SCO Angers), Mohamed Soukhane, Chérif Bouchache, Smaïn Ibrir (Le Havre AC ), Abdallah Settati (Girondins de Bordeaux), Khaldi Hammadi (Stade tunisien)
Ils ont porté haut la main les couleurs nationales à travers le monde pendant la révolution.
En parlant et en se rappelant la guerre de libération algérienne, plusieurs symboles reviennent à l’esprit, et, parmi eux, cette mythique équipe du Front de libération nationale (FLN). Une équipe qui continue jusqu’à nos jours de faire parler d’elle, tant son rôle fut, alors, primordial.
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n 1958, l’Algérie se trouvait toujours sous le régime colonial français. Pis, elle demeurait le seul pays maghrébin sous ce régime, ce qui avait donné aux Français l’aubaine d’agir selon leurs intérêts afin de promouvoir leur pays, par l’exploitation du potentiel algérien. Tous les domaines ont été
Mohamed Maouche.
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touchés, notamment celui du sport, puisque les instances françaises d’alors voulaient, coûte que coûte, renforcer les rangs de leur sélection nationale de football par les talents algériens, surtout ceux résidant en France. D’autant plus que cela avait coïncidé avec cette période où « les Bleus » se préparaient pour la Coupe du monde organisée cette année-là en Suède. Parmi les éléments visés en priorité : le défenseur de charme de l’AS Monaco et « Monsieur football », Mustapha Zitouni, et l’attaquant « qui avait les yeux derrière la tête », Rachid Mekhloufi, pensionnaire de l’AS Saint-Étienne d’alors. Deux éléments qui ont porté déjà les couleurs de l’équipe nationale française, et contribué grandement à sa qualification pour ladite édition du Mondial. Le Front national de libération (FLN), créé après les décisions du Congrès de la Soummam en 1956, saisit l’occasion de relancer le projet ayant germé en 1957 : créer une équipe de football, dans l’intention de protéger les talents algériens.
Rendre à l’Algérie ses talents Ainsi donc, l’ancien latéral droit des Girondins de Bordeaux, Mohamed Boumezrag El Mokrani, après son retour des Jeux de l’amitié organisés à Moscou, eut la géniale idée de mettre en place une équipe de football, qui serait composée de joueurs algériens évoluant en France, et dont le rôle serait de faire connaître la cause algérienne et le dur combat mené par les moudjahidine. Le natif de Chlef n’informa que ses deux lieutenants, Mokhtar Arribi et Abdelaziz Bentifour, de ce projet de grande envergure. Les trois hommes multiplièrent les réunions clandestines entre décembre 1957 et avril 1958 avant de joindre l’acte à la parole. Comme première étape, prendre attache avec les joueurs algériens évoluant dans le championnat français, en leur demandant de quitter immédiatement leurs clubs et de rejoindre cette nouvelle équipe, à Tunis, lieu de sa création. L’objectif escompté était de montrer au colon français que même les footballeurs étaient impliqués dans la guerre
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Mohamed Boumezrag.
continuèrent leur chemin de bataille, jusqu’à un certain 15 avril 1958, et l’officialisation de la création de cette équipe d’une nation sans État. Elle servira de porte-voix au gouvernement provisoire algérien en devenant, en outre, un outil de propagande, ayant l’occasion de populariser l’insurrection algérienne partout dans le monde. Les tentatives des Français de la dissuader se sont avérées vaines.
Dès le lendemain de l’appel, 10 joueurs quittent la France en catimini.
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Coup dur avant le Mondial La France est consternée et sa sélection décapitée, à deux mois du Mondial. Des joueurs adulés, mariés pour la plupart à des Françaises et menant la vie insouciante de stars décident, du jour au lendemain, de changer de statut. Ce bouleversement de situation eut un écho médiatique important au niveau mondial. Le célèbre journal spécialisé français, L’Équipe, titrait ce jour-là à sa Une : « Neuf footballeurs algériens portés disparus », alors que France Football aborda le sujet, un peu plus tard, en lui consacrant quatre pages. Et comme il fallut s’y attendre, un débat public sur ce sujet controversé fut lancé, surtout lorsque les clubs français de ces joueurs algériens annoncèrent la rupture des contrats des « fugueurs ». La Fédération française de football (FFF) publia un communiqué dont le passage le plus marquant fut celui-ci : « La foi dans l’avenir du football dans nos chères provinces nord-africaines pénètre leurs dirigeants… Les joueurs indigènes mordent à pleines dents dans le pain du football que nous leur distribuons. » Entretemps, les initiateurs de ce projet
Rachid Mekhloufi.
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Rôle sportif militant La non-reconnaissance de la mythique équipe du FLN au niveau de la toute puissante Fifa, sous pression des Français, ne diminua en rien la volonté des joueurs la composant. Ils disputèrent, au total, 58 matchs, avec un bilan de 44 victoires, 10 nuls et 4 défaites ! Elle se déplaça dans de nombreux pays : Tunis, Pékin, Belgrade, Hanoï, Tripoli, Rabat, Prague, Damas et autres capitales dans lesquelles les Mekhloufi, Amara, Zouba, Boubekeur, et autres Kermali et Maouche, pour ne citer que ceux-là, descendaient en portant le drapeau algérien. Là où ils passaient, ils laissaient leurs empreintes. L’équipe affrontait, la plupart du temps, des clubs, souvent les plus prestigieux, et il lui arrivait parfois de se mesurer à des sélections nationales, comme ce match référence contre la Yougoslavie que les Algériens ont remporté sur le score sans appel de 6 à 1 devant 80 000 spectateurs enthousiastes. Une équipe algérienne qui
Milieux ; Mokhtar Arribi (RC Lens), Saïd Haddad (Toulouse FC), Ali Benfadah (SCO Angers), Rachid Mekhloufi (AS Saint-Étienne), Mohamed Boumezrag (US Mans), Boudjemaa Bourtal (AS Béziers), Amar Rouaï (SCO Angers), Hassen Chabri, Abdelaziz Ben Tifour (AS Monaco) Attaquants : Abdelhamid Kermali (O Lyon), Abdelhamid Bouchouk, Saïd Brahimi (Toulouse FC), Mohamed Maouche (Stade de Reims), Ahmed Oudjani (RC Lens), Amokrane Oualiken, Abdelkader Mazouz, Mohamed Bouricha (Nîmes Olympique), Abderrahmane Soukhane, Hocine Bouchache (Le Havre AC), Abdelkrim Kerroum (AS Troyes), Saïd Amara (AS Béziers), Abdelhamid Zouba (Chamois Niortais). Infirmier : El-Amari Selami continua à jouer son rôle sportif militant jusqu’en 1962, date à laquelle elle constitua le premier noyau de l’équipe nationale algérienne. Mohamed Maouche, l’un des éléments de cette équipe, l’a déclaré un jour, en résumant la situation : « Il y a eu les 22 qui ont été à l’origine du déclenchement de la révolution et il y a eu les 32 footballeurs qui ont sillonné le monde pour porter haut la voix de l’Algérie. » Parmi les éléments de cette glorieuse équipe qui sont encore en vie, la plupart sombrent dans un anonymat des plus regrettables et souffrent de l’ingratitude de ceux qui sont censés reconnaître leurs sacrifices pour avoir porté haut la main les couleurs nationales à travers le monde durant la guerre de révolution. Un geste indigne et une attitude qui doit au plus vite cesser avant qu’il ne soit trop tard. À bon entendeur… ■ A���� B������� avril-mai 2012 • numéro 05 • SALAMA • 63
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HOROSCOPE - JEUX Gémeaux
21 mai -> 21 juin
Amour : Une grande passion en vue. Ne la
gâchez pas par vos préjugés et maladresses. Laissez faire votre chance. Travail : C’est le moment de vous accorder un congé bien mérité et d’oublier vos ennuis professionnels. Santé : Votre angoisse des maladies risque de vous rendre réellement malade. Écoutez de la musique.
Scorpion
24 octobre -> 22 novembre
Amour : C’est le calme plat. Il faut reconnaitre
que vous ne faites rien pour changer les choses. Travail : Ne comptez que sur vous-même pour régler vos problèmes professionnels, vous y arriverez si vous y croyez. Santé : C’est la pleine forme. Essayez de la maintenir en étant toujours positif.
Lion
23 juillet -> 23 août
Amour : Il vous arrive de penser que votre
Taureau
21 avril -> 20 mai
Amour : Une rencontre agréable n’est pas à
exclure ces jours-ci. Sachez vous montrer à la hauteur des espérances de l’autre. Travail : Vous vous imposerez de plus en plus. Gare aux jalousies que vous susciterez autour de vous. Santé : Ne vous exposez pas trop au soleil et ménagez-vous. Buvez beaucoup.
Vierge
24 août -> 23 septembre
Amour : Vos nombreuses concessions
n’ont servi à rien. Il est temps de changer de stratégie. Travail : On tiendra compte de vos idées, mais on fera tout pour vous decourager, du calme et laissez venir. Santé : Quelques allergies dues à la chaleur. Ne vous affolez pas.
Cancer
22 juin -> 22 juillet
Amour : Vous êtes à mi-chemin entre le
amour prêche dans le désert. La réalité est que vous vous y prenez mal. Soyez plus directe et plus sincère. Travail : Votre savoir-faire sera apprécié et vous serez sollicité, sachez négocier vos contrats. Santé : Vous avez un déficit à rattraper en matière de sommeil, organisez votre emploi du temps en conséquence.
bonheur et la déception, vous n’avez qu’un pas à faire pour basculer d’un côté ou de l’autre. Venus veille sur vous, alors osez. Travail : Vous ne devriez pas céder à la hantise des lendemains incertains que vous ne connnaitrez peut-être jamais. Tournez à plein régime. Santé : La moindre douleur vous effraie inutilement. Oubliez vos idées noires et faites un tour dans la nature.
Poisson
Sagittaire
19 février -> 20 mars
Amour : Être romantique, c’est bien, être réaliste c’est encore mieux. Travail : Parlez de vos projets à vos proches ils sauront peut être vous conseiller efficacement. Santé : Si vous ne vous sentez pas bien dans votre peau, n’hésitez pas à consulter un psy, ça vous aidera à mieux vous sentir.
23 novembre -> 21 décembre
Amour : Vous avez un succès fou, ne
pensez-vous pas vous assagir. Travail : Votre désir de toujours faire cavalier seul finira par vous jouer un vilain tour. Santé : L’excès du gras vous fera du mal, essayez de manger léger.
Quiz spécial guerre d’Algérie 1/ Pour la prise d’Alger, les troupes du général de Bourmont ont débarqué le : 30 juin 1830 à Tipaza 5 juillet 1830 à Alger 14 juin 1830, à Sidi Ferruch 2/ L’annonce officielle de la constitution du Gouvernement provisoire de la République algérienne (GPRA) a eu lieu : Au Caire le 19 septembre 1958. À Tunis le 19 septembre 1960 À Rabat le 19 septembre 1961 3/ Le Front de libération nationale (Algérie) est fondé en : Septembre 1953 Octobre 1954 Novembre 1954 4/ La Déclaration du 1er novembre 1954 est émise par radio depuis : Tunis. dans la nuit du 1er novembre 1954 Alger dans la nuit du 30 octobre 1954 Rabat dans la nuit du 2 novembre 1954 5/ La nuit du déclenchement de la révolution algérienne le 1er novembre 1954 est appelée par les historiens la : « Toussaint noire » « Toussaint rouge » « Toussaint grise » 6/ Le congrès de la Soummam, acte fondateur de l’État Algérien moderne et pilier déterminant pour la réussite de la révolution Algérienne, et organisé principalement par Abane Ramdane a eu lieu le : 1er novembre 1958 20 août 1956 19 mars 1958 7/ L’ accord de cessez-le-feu, a été signé le : 18 mars 1962 19 mars 1962 4 juillet 1962 Nom /Prénom : ...................................................... ...........................................
Balance
24 septembre -> 23 octobre
Amour : C’est le temps des grandes
incertitudes. Vous n’êtes plus jeune, pourtant. Demandez conseil avant toutes décisions. Travail : L’augmentation n’est pas pour demain, patience et pensez à ceux qui sont au chômage. Santé : Évitez les sucreries et le gras, et un petit régime ne pourrait que vous faire du bien.
Verseau
21 janvier -> 18 février
Amour : Enfin, le grand amour, mais qui
dépend de ce que vous offrez. Travail : Oubliez-vous de temps en temps pour vous consacrer à ceux qui vous aiment, et ils sont nombreux. Santé : Mangez moins de pâte et de mie de pain. La santé n’a pas de prix.
66 • SALAMA • numéro 05 • avril-mai 2012
Bélier
21 mars -> 20 avril
Amour : Ne brusquez pas votre moitié. Ce
que vous considérez comme du mépris de sa part n’est qu’une simple incompréhension. Une discussion franche s’impose quand même. Travail : Vous ne devriez pas vous tuer à la tâche. Si vous étiez payé en conséquence, cela se comprendrait Santé : Ne vous plaigniez pas trop. Évitez de manger n’importe quoi au printemps, les microbes ne pardonnent pas.
Capricorne
21 décembre -> 20 janvier
Amour : Ne vous laissez pas séduire par
le premier venu. Un peu de sagesse et de pondération ne feront pas de mal. Travail : Ne dévoilez pas tout ce que vous savez. Gardez les meilleures cartes pour vous seul. Santé : Évitez les douches nocturnes, surtout si l’eau est tiède ou froide.
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