ÊTRE GRAPHISTE lorsque tu es une femme
ÊTRE GRAPHISTE lorsque tu es une femme
Les femmes représentent environ 70 à 80% des étudiants en design graphique, seulement 10 à 15% des femmes occupent des postes à responsabilité dans les sociétés. Alors que deviennent ces femmes ? En tant qu’étudiante en communication visuelle et graphique je me demande ce qui m’attend une fois diplomée. Où vais-je aller après mes études, vais-je disparaître à mon tour ? Pour essayer de répondre à ces questions, j’ai demandé à des femmes de mon entourage, de ma région, qui ont étudié et travaillé dans ce secteur, d’énoncer des facteurs qui ont contribué à donner raison à ce pourcentage plus que désolant. Chacune a accepté de répondre dans l’anonymat pour parler de ce qui a pu être un obstacle ou au contraire un tremplin dans leur carrière.
Plus j’ai avancé dans ma carrière, plus je me suis retrouvée à regarder autour de moi et à me demander : attendez une minute … où sont passées toutes les femmes ? Nat Maher
Il faut du temps pour trouver un équilibre, que chacun trouve sa place.
Être graphiste aujourd’hui c’est savoir tout faire,
Ça me rassure de pouvoir toujours apprendre.
Malgré l’envie, je ne me sentais pas vraiment prête à me lancer toute seule, trouver des clients, gérer le côté administratif.
Il y a ce côté de défi qui est parfois stimulant,
mais t’as toujours des doutes vis à vis de toi, tu te sens vulnérable en solo.
Y’a pas les mots pour dire ce que je fais, tellement c’est pas connu. À la fin, je dis que je dessine et c’est plus simple.
Arrivée dans la vie active, la chute a été violente.
J’ai vite compris que les choses qui m’avaient été promises depuis que je suis petite n’arriveraient pas.
Je ne m’étais jamais réellement demandée ce que je voulais vraiment faire de ma vie.
Lors d’une commande, je savais que je me décrédibilisais en ne demandant pas assez d’argent.
Tu mets longtemps à te présenter en tant que graphiste.
En plus si t’ajoutes cette non légitimité d’ être
une femme graphiste.
Mais qui suis-je pour oser faire ça ? Pour dire ça ? Pour avoir ce projet-là ?
Cet imposteur qui me suit comme mon ombre et qui m’engage dans une lutte sans merci contre moi-même.
Imaginez un peu ce que ça peut donner si j’essaie de faire partie de communautés dans la vraie vie…
Bah j’ai du mal.
J’avais peur qu’on ne me prenne pas. On me disait
« Toi tu te respectes même pas ».
Je partais avec un gros sentiment d’illégitimité.
Zéro crédibilité et une grosse peur du ridicule.
Je me suis toujours sentie nulle, peu importe les encouragements de mes proches, ils ont beau me trouver brillante, je me dis qu’ils ne comprennent pas que c’est juste de la chance, que je parais intelligente alors que je suis très moyenne.
Lors d’une grosse réunion, un collaborateur a carrément osé lancer :
« ça sent bien la ch*tte ici ! »
On me disait qu’on avait vu mon profil Tinder et que parfois j’étais connectée.
Il y a toujours un rapport de hiérarchie entre les hommes et les femmes.
Plusieurs fois j’ai été obligée de travailler seule avec un homme et avoir des remarques déplacées.
Ça me met mal à l’aise.
Dans l’organisation des choses, on n’a pas la même manière de s’organiser.
Je pense que les mecs ont plus confiance en eux et hésitent moins à se lancer dans des choses à essayer. Ils cogitent moins sur « comment je vais être reçu, est-ce que ça va marcher » ?
Dans le paysage de l’édition et de l’auto-édition on voit beaucoup de mecs.
En tant que femme, on t’approche d’une façon qui est moins correcte.
On confie plus facilement du budget à un homme plutôt qu’à une femme.
Il aura une belle carrière, en plus il n’aura pas de souci, lui, c’est un homme.
J’étais une femme et on ne pensait pas forcément à moi tout de suite.
J’ai reçu une
« prime de rattrapage » afin d’égaliser mon salaire annuel sur celui de mes collègues masculins.
Je n’ai pas eu de commentaires directs mais plutôt une attitude différente du client face à moi comparée à un
collègue homme
J’ai vu les visages de clients quand on leur a dit que le directeur de la création était
la jeune de 30 ans en jupe pas le gars aux cheveux gris en costume.
Dans l’éducation genrée,
les hommes ont plus confiance en eux, ils se posent pas la question du prix.
Je me souviens d’être allé à des réunions avec mon directeur créatif masculin et des clients ne reconnaissaient que lui,
c’était comme si j’étais invisible.
Les femmes sont moins susceptibles de créer leurs réseaux ou de prendre la parole sur des plate-formes, nous nous disons
« à quel point nous avons de la chance » et nous nous contentons continuellement de ce qui est proposé plutôt que de négocier
Certains clients peuvent montrer des signes de sexisme, ils paraissent moins coopératifs.
Le mythe du graphisme vu comme un passe-temps.
Tes clients oublient que tu as dû faire des études.
J’ai ressenti le fait qu’être
une toute jeune femme freinait l’employeur alors qu’il prévoyait une formation pour approfondir.
Étant jeune, certains clients ont l’air de douter de mes compétences alors que
je suis qualifiée .
Je m’accrochais parce que je m’estimais chanceuse de vivre de mon art.
A mon retour en entreprise, personne n’a jugé bon de m’informer sur les nouvelles procédures en cours Il m’a donc fallu gérer le retard, les erreurs et les nouveautés...
Nous pourrions travailler dur et atteindre le sommet, mais la nature de dernière minute des demandes de ce secteur et le dévouement requis rendent difficile de combiner un rôle senior et une famille.
Alors Mademoiselle, pourquoi venez-vous me voir aujourd’hui ?
J’espère que vous n’allez pas m’annoncer quelque chose qui ne va pas me plaire...
Travailler pour une entreprise personnelle ou devenir indépendant permet une flexibilité accrue, En ce qui concerne les carrières familiales et de haut vol, j’ai vraiment un immense respect pour les femmes qui réalisent les deux.
Quand tu sors d’une école d’art et que tu sais que personne t’attends,
ben tu allies les forces.
Je suis attachée aux espaces non mixtes car en tant que femme, on prend de l’énergie, de la force et de la confiance en soi.
Dans ces espaces, tu sais que ta parole aura autant de poids que celle de n’importe qui.
Au fil des ans, j’ai observé que c’est dans la nature de la plupart des femmes de partager le succès plutôt que de se battre pour le crédit.
Nous ne faisons pas tellement le truc de la poitrine.
T’es pas obligée de te décrédibiliser toi même, tu peux te valoriser
« Ok je fais ça, parce que je fais ça »
Créons un média où nous ne pouvons pas être interrompues.
Quand tu as la chance de travailler avec des personnes d’autres secteurs que toi, c’est super enrichissant et ça te permet d’aller beaucoup plus loin dans la réflexion.
Bien sûr, le besoin de pousser, de remettre en question et de s’améliorer est vital, mais tout le monde a la responsabilité de créer des lieux de travail.
où ces femmes peuvent s’épanouir.
Pauline
Aurélia Mary Loriane Laura Victoria Marine Sanoula Eléonore
Romane
Marine Emilie Florence
Eva
ÊTRE GRAPHISTE lorsque tu es une femme Laure-Anne Carrera Master 1 Arts² Mons 2021
Les femmes représentent la majorité des étudiants en design graphique, seulement une fois dans le monde du travail ces femmes se font beaucoup plus rares. Alors que deviennent-elles ?