LA PAILLE PORTEUSE EN ARCHITECTURE QUELS ENJEUX ET QUELLES POTENTIALITÉS RÉELLES DE CETTE TECHNIQUE CONSTRUCTIVE?
LAURE GADRET - Janvier 2017 - ENSAP Bordeaux Directeur de Mémoire: JEAN-JACQUES SOULAS
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LA PAILLE PORTEUSE EN ARCHITECTURE QUELS ENJEUX ET QUELLES POTENTIALITÉS RÉELLES DE CETTE TECHNIQUE CONSTRUCTIVE?
MÉMOIRE DE MASTER EN ARCHITECTURE SÉMINAIRE : ARCHITECTURE, INGÉNIERIE, ENVIRONNEMENT ET VILLE DURABLE LAURE GADRET DIRECTEUR DE MÉMOIRE : JEAN-JACQUES SOULAS ÉQUIPE PÉDAGOGIQUE : A.BARLET - C.CALLAIS - S.SCHOONBAERT - C.SÉMIDOR ECOLE NATIONALE SUPÉRIEURE D’ARCHITECTURE ET DE PAYSAGE DE BORDEAUX JANVIER 2017
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SOMMAIRE Introduction........................................................................................................................ p. 5-7
Partie I. Contexte Global de la Paille Porteuse....................................................p. 9-32 1.1.
Qu’est-ce que la paille ?..................................................................................................
11-13
1.2.
La paille en construction, un savoir vernaculaire..........................................................
14-16
1.3.
L’emploi de paille en construction face aux autres besoins..........................................
17-27
1.4.
Etat de l’art en France....................................................................................................
28-30
1.5.
Réglementations sur la construction paille, en France et ailleurs ...............................
31-32
Partie II. Expression Technique de la Paille Porteuse........................................p.33-61 2.1.
Description d’un mur en Paille Porteuse.......................................................................
34-36
2.2.
Notions techniques de base de la Botte de paille..........................................................
37-41
2.3.
La Botte de paille face aux dangers extérieurs..............................................................
42-48
2.4.
La Botte de paille : qualités isolantes et structurelles...................................................
49-52
2.5.
Des techniques de mise en oeuvre variées.....................................................................
53-61
Partie III. Traduction Architecturale d’une Technique Constructive........ p.63-87 3.1.
La forme architecturale par la technique constructive, contraintes et atouts..............
65-69
3.2.
La hauteur en Paille Porteuse limitée par ses capacités structurelles..........................
70-78
3.3.
Les capacités structurelles de la Paille Porteuse au service de l’architecture...............
80-87
Conclusion.............................................................................................................................p.89-93 Bibliographie....................................................................................................................... p.95-100 Annexes................................................................................................................................... p.101-115 Remerciements..................................................................................................................... p. 117
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INTRODUCTION La « Paille Porteuse », dite aussi « Paille Structurelle », « Technique Nebraska » ou encore « Murs Autoportants en paille », est une technique de construction issue de savoirsfaire vernaculaires. Née au Nebraska au XIXème siècle, elle est aujourd’hui réemployée en architecture à travers l’auto-construction mais aussi par des professionnels particulièrement attachés aux valeurs que porte l’écoconstruction et l’utilisation de bio-matériaux.
La pratique de la Paille Porteuse met en jeu des problématiques contemporaines nombreuses et complexes. Rares sont les ouvrages qui lui sont consacrés. De nombreux retours d’expériences existent sur le net, au travers de blogs et d’articles de presse, mais très peu nous rapportent les choix techniques avec précision et objectivité. La technique Nebraska est expliquée dans des livres abordant la construction paille de manière générale. Les multiples facettes de la construction en paille sont alors décrites. Les qualités thermiques sont revendiquées mais les qualités spatiales et structurelles sont souvent passées sous silence. La France vit un véritable boom de la construction en paille. Le RFCP (Réseau Français de la Construction en Paille) estime à 5000 le nombre1 de bâtiments construits à ce jour. Actuellement de plus en plus de grands bâtiments se font en paille : des logements sociaux, des écoles, des amphithéâtres, des bureaux. Le recensement effectué par l’association Empreinte en 2010 n’a obtenu que 691 réponses2. Néanmoins, ce chiffre montre que 691 propriétaires, en France, sont entrés en contact avec l’association pour donner les informations techniques relatives à leur construction. Les ouvrages portant sur la construction paille sont peu nombreux et ceux traitant uniquement de la Paille Porteuse le sont encore moins. Nous les trouvons dans la littérature étrangère,notamment du Royaume-Uni, de Suisse et d’Allemagne. La technique en Europe est redécouverte depuis peu et le matériau paille n’est pas normé. Des règles Pro Paille permettent depuis 2012 d’obtenir une décennale pour de la construction employant la paille en tant qu’isolant et support d’enduit et non comme élément structurel. Ces règles professionnelles n’expliquent pas comment mettre en œuvre la Paille Porteuse. Elles donnent néanmoins de nombreuses informations concernant la sélection des bottes, leur stockage, les techniques de manipulations, leur façonnage avant la mise en œuvre et la gestion de l’humidité. C’est au cours d’une formation pro paille encadrée par le RFCP que je me suis formée à la construction en paille. Lors du printemps de l’écoconstruction en mai 2016 à Rennes, le RFCP fêtait ses 10 années d’existence (auparavant « les compaillons » était le nom du réseau de référence en France). C’est à cette occasion que mes discussions avec les professionnels de la construction en paille m’ont amenée à m’interroger sur la construction en Paille Porteuse. Je découvre depuis quelques années que travailler avec les matériaux est un jeu et que concevoir avec des matériaux imprévus peut démultiplier leurs emplois si on apprend auparavant à les connaître. Un matériau peut avoir plusieurs vie et les déchets peuvent avoir de nombreux intérêts en architecture. Fait-on des matériaux pour l’architecture ou les matériaux font-ils l’architecture ? La question de la disponibilité est aujourd’hui primordiale.
L’emploi de matériaux bio-sourcés est plus que jamais porteur de sens et d’avenir. Les ressources de la planète s’épuisent. La sonnette d’alarme a déjà été mainte fois tirée par les scientifiques. En 2011, à travers son film documentaire, Denis Delestrac met en exergue le manque de conscientisation du monde de la construction face à la disparition du sable et aux déséquilibres majeurs causés à toutes les échelles. Aujourd’hui cette question de l’économie 1 [RFCP_web_Historique] 2 [EMPREINTE_web_Enquête]
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des matériaux touche directement les architectes, concepteurs et constructeurs dans leurs pratiques et dans leurs choix.
De 1820 à 1920, le ciment moderne à prise rapide connaît ses plus belles années. En 1929, l’ingénieur français Eugène Freyssinet invente le béton précontraint3. En 1933, Disney réalise son court-métrage « Les Trois Petits Cochons ». Près d’un siècle plus tard, cette histoire reste l’unique référence connue pour le public néophyte en matière de construction paille, valorisant les produits industrialisés et ridiculisant des matériaux peu transformés comme le bois et la paille. Avant cela, la maison Feuillette, construite en 1920 à Montargis et toujours habitée, ne sera présentée dans un numéro de « La Science et la Vie » qu’en mai 19214. L’ingénieur Émile Feuillette a révolutionné le monde de la construction en mêlant structure bois et isolation en paille. Dans l’imaginaire collectif, le béton reste pourtant le seul garant de la solidité d’un édifice. Force est de constater que le travail de publicité des industriels de la construction a fonctionné.
De nos jours une évolution des pensées permet aux écomatériaux de revenir sur le devant de la scène. Parmi ces écomatériaux, issus de matières recyclables ou issus de la biomasse végétale ou animale, le bois est l’un des plus sollicités, c’est un matériau biosourcé. Construire sa maison a toujours été mu par le besoin de protection. Aujourd’hui, le bâtiment construit n’est pas seulement pour nous protéger de la pluie, du vent, des intrusions, il doit désormais inclure notre devoir de protection de notre environnement. De nouvelles pistes sont explorées, des pistes oubliées, effacées par le temps. La construction en Paille Porteuse est l’une d’entre elles.
Tous ces constats nous amène à se questionner sur le rôle de cette technique constructive et sur sa légitimité dans le monde du bâtiment. Quels sont les enjeux et les potentialités de la Paille Porteuse aujourd’hui ? Afin de répondre à cette interrogation, je développe dans ce mémoire trois grandes thématiques.
Dans la première partie, j’ analyse la Paille Porteuse ainsi que le matériau qui lui est lié directement, dans son contexte global. Ce contexte aborde les notions historiques, techniques mais aussi sociales, écologiques, économiques et législatives. Le matériau botte de paille sera défini et ses différentes mises en œuvre décrites. Je rendrai compte de l’emploi de la paille en France et les ressources disponibles pour la construction. Afin de mieux comprendre les enjeux écologique et économique que porte ce matériau, la botte de paille sera comparée aux isolants conventionnels mais aussi à d’autres matériaux biosourcés au regard de critères économiques, techniques (capacité d’isolation thermique), écologiques mais aussi en fonction des ressources disponibles. Pour bien comprendre les freins possibles au développement de la Paille Porteuse, j’aborderai l’aspect financier et le cadre législatif qu’offrent certains pays comme les Etats-Unis ou la Grande-Bretagne et les mettrai en parallèle avec le système français actuel. Dans la seconde partie, je m’intéresse à l’expression technique de la Paille Porteuse. J’explique dans un premier temps les notions techniques de base de la Paille Porteuse et sa mise en œuvre la plus courante afin de saisir l’importance des connaissances techniques décrites par la suite. Afin de répondre aux grands mythes populaires, je décris les tests au feu effectués ainsi que les classements obtenus. Sur un autre point technique, j’explique pourquoi la paille n’est 3 [WIKIPEDIA_web_Béton] 4 [LAMACHE1921]
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pas plus exposée à l’installation de rongeurs ou d’autres animaux qu’un autre matériau isolant. Les facteurs d’altération potentiels seront abordés,. L’eau est le plus grand ennemi du monde de la construction. La mise en œuvre de cet agromatériau dépend énormément des conditions de stockage. Des techniques existent pour stocker et vérifier la qualité des bottes. La botte de paille a des qualités isolantes qui varient en fonction de plusieurs paramètres. Des études ont été menées et nous donnent les clés de compréhension de ce matériau. Après avoir étudié les qualités isolantes et acoustiques des murs en paille, j’aborderai les qualités structurelles de la Paille Porteuse. Un bâtiment supporte de nombreuses charges liées à son poids propre, aux charges climatiques et aux charges d’emploi. Son comportement structurel doit être bien maîtrisé. Je montrerai dans cette partie quelles sont les réactions d’un mur autoportant en bottes de paille face aux différents types de charges. Enfin, nous verrons que plusieurs types de mise en œuvre existent et évoluent perpétuellement.
En dernière partie, je m’attache à la traduction architecturale de ce mode constructif ancien et à la fois résolument contemporain. L’analyse de mises en œuvre différentes conduira à mettre en garde , les autoconstructeurs face à des formes trop complexes. Je montrerai comment la spatialité peut être travaillée avec des murs parfois imposants malgré des enveloppes aux géométries simples. Fait-on des matériaux pour l’architecture ou les matériaux font-ils l’architecture ? La réponse sera donnée par le biais de la hauteur en architecture. Nous verrons que la Paille Porteuse peut être mise en œuvre sur deux niveaux. Un exemple d’architecture en R+2 mêlant la technique de la Paille Porteuse à d’autres matériaux porteurs nous permettra de nous poser la question de la vocation de la Paille Porteuse à atteindre trois niveaux ou plus. Enfin, à travers deux projets je montrerai en quoi la technique de la Paille Porteuse peut être synonyme de solution d’avenir. Je décrirai les grandes lignes du projet PAKSBAB (Pakistan Straw Bale Apropriate Suilding) mené par Darcey Donovan et son équipe en zone à forte sismicité au Pakistan. J’aborderai comment les connaissances techniques de Gernot Minke l’ont amené à aller plus loin dans l’innovation en Paille Porteuse et à mettre en œuvre les premières voûtes autoportantes en bottes de paille.
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PARTIE I
CONTEXTE GLOBAL DE LA PAILLE PORTEUSE
© http://www.daybreakdogs.co.uk/
PARTIE I 1.1. QU’EST-CE QUE LA PAILLE ?
inspirent actuellement designers et architectes qui imaginent des structures reprenant ces principes structuraux.
LA PAILLE, UN MATÉRIAU, PLUSIEURS EMPLOIS La paille est un produit agricole résultant directement de la production céréalière. La paille est très exactement la tige, appelée également chaume, de certaines graminées dont les plus connues sont le blé, l’orge, le seigle, le riz, l’avoine. La paille peut être creuse, plus ou moins creuse, ou pleine, suivant les espèces et variétés.
Se rapprochant de panneaux structuraux, les tatamis japonnais sont par exemple fabriqués à partir de paille de riz depuis le 16 ème siècle.
En agriculture, la paille a de tout temps été utilisée sous de nombreuses formes. En paillage, son emploi reste à contrôler car les effets diffèrent d’une espèce à l’autre. Dégradée dans le sol, la paille apporte de la matière organique et enrichit l’humus. En cas de pénurie de foin, elle peut servir de fourrage aux ruminants. Riche en lignine, la paille peut également être utilisée dans les procédés de fabrication de papier. Dans les usines de pâte à papier moderne, c’est la lignine contenue dans le bois qui sert de combustible. La paille de blé est composée à 16% de cet élément. La valeur calorique élevée de la lignine amène les scientifiques à s’intéresser à la paille en tant qu’agro-combustible et agrocarburant. Certains l’envisagent, associée à d’autres agro-combustibles, pour atteindre 20% d’énergie renouvelable en 2020.
Fabrication de tatamis, années 1900 - © culturejaponaise.info
Le blé fait également partie des plantes employées en phytotechnologie. C’est ce que nous apprend l’ADEME (Agence De l’Environnement et de la Maitrise de l’Energie)5. Le Triticum Sp. est préconisé dans les cas de pollution des sols aux PCB, PCDD et PCDF, tandis que le Triticum Aestivum l’est pour des pollutions aux explosifs (TNT, RDX, etc).
© Stora Enso
La cellulose, composant essentiel de la paille (entre 40% et 48%, suivant les espèces6), lui confère son élasticité et sa structure. Tressée, la paille est employée depuis longtemps en vannerie (chapeaux, paniers, nattes). Les travaux de vannerie 5 [BERT2012] p.64 6 [DEBOUTER2009] p.26
Phytotechnologie au Québec - © L. Henault-Ethier
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Premières maisons en Paille Porteuse au Nebraska aux environs de 1886
Villa de Handsville en Alabama (1938)
Haslow House (1913)
Martin Monhart House (1925)
Haslow house2.jpg
MartinMonhart house.jpg
Église Pilgrim Holiness (1928), Arthur, Etats-Unis
Maison Emile Feuillette (1920) - Actuel siège du RFCP
© NW
© CNCP
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La paille en construction est un savoir vernaculaire. Chaque région du monde a développé des techniques locales, basées sur une démarche empirique. La paille a longtemps servi à couvrir les habitations en milieu rural en France. Le toit de chaume, très répandu jusqu’à la fin du 19ème siècle, intéressait déjà pour son faible coût et ses performances thermiques. Dans les murs, les cloisons ou les sols, la paille est utilisée en torchis, adobe ou bauge. Ces « bétons de terre » connaissent un regain d’intérêt actuellement. La paille sert alors d’armature au mortier de terre.
Toiture en chaume © p9.storage.canalblog.com.jpg
Les premières constructions en bottes de paille ont vu le jour aux Etats-Unis, après l’arrivée des premiers colons dans la région de Sandhills, au Nebraska, à la fin du 19ème. Aux alentours de 1850, ils inventent la première botteleuse tirée par des chevaux. Les colons n’ont que peu de ressources pour construire. Ils ont alors l’idée de mettre en œuvre ces bottes, faites des graminées poussant dans la région, en les mélangeant à de la boue. Entre 1870 et 1880, la presse à botte de paille est diffusée dans toute la région ainsi que le mode de construction qui lui est associé. Aujourd’hui encore, nombre de ces bâtiments sont encore debout.
de 193810. La Martin/Monhart House a été construite en 1925. La Haslow House est de 1913. Ce ne sont que quelques exemples, mais ces bâtiments, comme beaucoup d’autres construits à cette époque sont toujours habités aujourd’hui. En France le plus vieil exemple de construction en bottes de paille est la maison Feuillette, à Montargis. Construite en ossature bois et remplissage paille, elle doit son nom à l’ingénieur qui l’a construite en 1920, Emile Feuillette. Aujourd’hui, elle appartient au RFCP (Réseau Français de la Construction en Paille)11, qui y a installé ses bureaux et qui en fait le Centre National de la Construction en Paille (CNCP)12.
L’une des premières constructions en ballots de paille fut une école. Elle a été construite en 18867 ou 18968 (les sources diffèrent sur la date), le terrain de l’école n’était pas clôturé et la paille apparemment non enduite. En 1902, il a été signalé qu’une partie des murs avait été mangée par une vache.
Depuis les années 1990, la paille porteuse est l’objet d’un regain d’intérêt en Amérique du Nord, mais aussi en Europe, après une pause de plusieurs décennies.
On estime qu’entre 1896 et 1945, 70 bâtiments en paille porteuse auraient été construits dans la région de Sandhills. De nombreux bâtiments de cette époque sont encore utilisés et en bon état9. L’église Pilgrim Holiness construite en 1928 dans le village d’Arthur est actuellement toujours debout et inscrite au Registre National des Lieux Historiques. Villa de Handsville en Alabama, elle n’est pas en paille porteuse mais en ossature de ciment et remplissage paille. Elle date 7 [HENRY_web_2012] 8 [WIKIPEDIA_web_StrawBale] 9 [RFCP2014] p.9
10 [SNEL2004] 11 [RFCP_web_Historique] 12 [RFCP2014] p.9
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PARTIE I
1.2. LA PAILLE EN CONSTRUCTION, UN SAVOIR VERNACULAIRE LA PAILLE COMME ISOLANT
COMPLEXE BOIS
Le remplissage en botte de paille d’un mur en ossature bois est, aujourd’hui, la technique la plus répandue en France (47% en 201613). Dans ce système, la paille est employée en tant qu’isolant et support d’enduit. Le contreventement est le plus souvent assuré par des voiles mais parfois le choix des concepteurs s’oriente vers des écharpes en bois. Lors de la conception, l’ossature doit être pensée selon les dimensions des bottes de paille. L’intérêt principal de cette technique est que le chantier peut-être mis hors d’eau rapidement, puis la paille stockée à l’intérieur du bâtiment ou mise en place directement. La maison Feuillette, à Montargis, est le plus vieil exemple de ce type de structure en France.
STRUCTUREL:
PAILLE
-
Le système du GREB est le plus répandu des systèmes mettant en collaboration paille, structure et enduits. GREB signifie Groupe Écologique de la Baie. C’est, à l’origine, le nom du lieu où a été inventée cette technique, un éco-hameau fondé en 1990, au Québec. La conception est facilitée car il n’y a pas besoin de calepinage précis à réaliser. Une seule section de bois (40x100mm) de classe III est employée dans la construction de l’ossature bois. Les bottes de paille sont glissées entre les montants. L’ossature est extérieure à ce remplissage et celui-ci se fait donc très aisément. L’enduit, le plus souvent constitué de ciment, de chaux, de sable et de sciure, n’est pas appliqué mais coulé au fur et à mesure. Cet ensemble, structure bois, paille, enduit coulé forme un ensemble rigide contreventé. En France, les spécialistes, Baptiste Thévard, Aymeric Prigent et Vincent Brossamin de l’association Approche-Paille, enseignent aux auto-constructeurs cette technique facilement abordable15. Cependant le système GREB n’est valide que pour du R+116
Les bottes de paille peuvent également être placées en force dans des caissons. Cette technique est employée lorsque qu’il y a possibilité de préfabrication en atelier. Suivant les conceptions, les caissons sont enduits ou non, fermés ou non, porteurs ou non-porteurs. Cette technique nécessite plus de manutention et de transport. Les étapes de fabrication et de transport sont souvent réalisées par des entreprises spécialisées. Le choix des caissons permet une préfabrication en milieu abrité en « temps masqué », c’est à dire en même temps que le gros œuvre. Cela peut réduire considérablement la durée du chantier, si la conception est suffisamment réfléchie et détaillée. Le remplissage en paille est, avec cette technique, particulièrement dense : on atteint en moyenne une résistance thermique R = 7m².K/W14
Autre système utilisant les capacités structurelles de la paille, le principe de Cellule Sous Tension (CST) qui est développé par Tom Rijven. La botte, dont la compression est maintenue par les ficelles, est placée de force, à plat, entre 2 montants verticaux dont l’écart est 5 cm inférieur à la longueur de la botte. Une fois les bottes placées sur toute une rangée, des liteaux horizontaux sont fixés aux montants et maintiennent la compression de la botte. Les ficelles des bottes sont ensuite coupées afin de faire interagir directement la botte de paille avec la structure bois. La tension lâchée est directement exercée de manière équivalente sur la totalité de la structure bois et permet le contreventement de la paroi17.
Les deux techniques que nous venons de décrire n’exploitent qu’une partie des capacités des bottes de paille. Elles servent alors uniquement d’isolant et de support d’enduit. Or, la paille a des capacités structurelles intéressantes qu’il faut tenter de valoriser afin de maximiser l’emploi de ce matériau.
15 Aller voir par exemple http://www.approchepaille. fr/ 16 [FLOISSAC2012], p.121-122 17 [RIJVEN2007] p.12
13 [RESEAU_RHONE_ALPES_web] 14 [FLOISSAC2012] p.134-137
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La paille comme isolant
Complexe structurel: paille - bois
Ossature bois porteuse © Empreinte
Système GREB © Wikiwand
Maquette comprenant 3 types d’ossatures (formation pro-paille) © Laure Gadret
Système GREB © Wikiwand
Caissons remplis de paille© Gaujard Technologies
Système CST © El Cojibo Arquitecturas
Isolation d’un mur maçonné en paille© De Pierre et de Bois
Système CST © maison-ecologique.over-blog.com
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LES BÉTONS DE TERRE Le béton de paille, ou « terrepaille » est une variante du torchis et est très adaptable aux structures. C’est la seule technique à passer par la voie humide. Cette technique s’étend à d’autres végétaux (copeaux de bois, de cannes de tournesol, de rafles de maïs, etc.) et à d’autres formes (briques et panneaux préfabriqués). Ce matériau lourd, possède une inertie thermique très intéressante en hiver comme en été, mais est particulièrement intéressant dans les régions chaudes. Luc Floissac décrit dans son ouvrage le béton de lavande18 mélangeant 65% de paille à 20% de pierre ponce, 10% de chaux et 5% de plâtre briqueteur (le liant employé pourrait tout a fait être de la terre). La lavande est riche en silice et contient 2 à 3 % d’huile essentielle (insectifuge).
Tassement manuel d’un béton de terre-paille © aupetitcolibri.free.fr
Durant la mise en œuvre, le béton est coulé en couches de 10cm, tassées au fur et à mesure (par un fouloir par exemple) et maintenu par des banches. Maison en béton de terre-paille© Alain Marcom
LA BOTTE DE PAILLE COMME MATÉRIAU STRUCTUREL Le système Paille Porteuse est connu sous les plusieurs noms: Technique Nebraska, Paille Structurelle, Mur autoportant en paille, ou encore Paille Porteuse. Cette technique constructive exploite à son maximum les capacités porteuses de la botte de paille. Mis à part les lisses de chaînage (basse et haute), il n’y a pas de bois dans les murs. C’est le système paille-enduitlisses qui porte l’édifice et transmet au sol les différents efforts. Une fois la hauteur d’un étage atteinte, le mur est précontraint. Cette technique est tout a fait adaptée aux formes simples, particulièrement en autoconstruction. Mais si la forme de l’édifice tend à se complexifier, il faut penser la conception le plus précisément possible. Cette technique qui semble simple, nécessite de prendre garde à de nombreux points techniques que nous aborderons plus précisement au cours de ce mémoire.
Paille Porteuse - Chantier La Chapelle Saint Rémy - Juillet 2016 © Laure Gadret
18 [FLOISSAC2012] p.350
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PARTIE I
1.3. L’EMPLOI EN CONSTRUCTION FACE AUX AUTRES BESOINS
Aujourd’hui, 9 millions d’hectares sont consacrés en France à la production de céréales (blé, maïs, sorgho, avoine, etc...)19. Le secteur du bâtiment n’est pas lié à la ruralité. Or, en 2012, seuls 2% de la population active cultivait ces 9 millions d’hectares. On observe une désagrégation du tissu social de certaines zones rurales. Loin de faire ombrage, le fait d’utiliser la paille en construction revaloriserait cette matière première et les professions et zones de ruralité qui lui sont liées.
consomme 200 tonnes de sable.23 Si tous les habitats construits par an en France étaient en béton armé nous consommerions 100 millions de tonnes de sable chaque année! La paille, au delà de consommer 50 fois moins de tonnes de matériau, emploie une ressource inépuisable et totalement recyclable. Le sable ne se renouvelle pas et la production de béton consomme des quantités astronomiques d’énergies, tout en rejetant énormément de CO2 dans l’atmosphère. La paille au contraire fixe le CO2 et l’enferme dans les murs.
De plus en agroforesterie, la Technique Culturale Simplifié (TCS20) permettrait de réconcilier l’agriculture et la sylviculture. Cette technique fournit du bois d’œuvre en améliorant la fonction première des terres agricoles. Ce système, vérifié sur 20 ans par l’INRA, augmente de 30% la rentabilité céréalière d’une parcelle.21
Employer la paille en construction est possible et largement vérifié à travers le monde. Werner Schmidt, construit essentiellement en bottes de paille et pour lui, le constat est très simple : « la construction en paille moderne signifie combiner tous les aspects différents : la durabilité, l’écologie, l’énergie, la santé, la joie de vivre, l’architecture, la conception, le coût. »24 . Mais qu’en est-il réellement ?
Aujourd’hui, 40% de la paille retourne directement au sol. Il faut avoir à l’esprit qu’avec moins de 10% de la paille de Blé produite en France, tous les logements construits chaque année (un peu moins de 500 000) dans notre pays pourraient être isolés en paille. Cela représente 2 millions de tonnes sur les 20 millions de tonnes de paille de blé produites chaque année en France22. Dans le bassin parisien, la paille est peu valorisée. Cette région n’est pas une région d’élevage et la paille se retrouve souvent enfouie dans le sol afin d’éviter des coûts de transport trop onéreux pour les agriculteurs. Cependant, il faut dans ce cas aider à sa dégradation rapide dans le sol avant les labours, C’est pourquoi elle est parfois simplement brûlée.
Actuellement dans le monde, 2/3 de ce qui est construit l’est en béton armé. Denis Delestrac nous apprend que la construction d’une maison en béton 19 [FLOISSAC2012] p.16 20 [FLOISSAC2012] p.17-19 21 [FLOISSAC2012], p.20. et pour aller plus loin : www.agroforesterie.fr 22 [FLOISSAC2012] p22
23 [DELESTRAC2013] 24 [SNEL2015]
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Disparition du Sable© Arte
Extrait du film «Le Sable, Enquête sur une disparition»© Denis Delestrac
Système TCS © Inra, C. Dupraz
Quantité de la paille en France 3.27 millions d’hectares de céréales à paille 20 millions de tonnes de paille de blé
(sans prendre en comptes les autres céréales (orge, seigle, riz, etc...)
Emploi de la paille en France 11 millions de tonnes de paille employées en élevage et en milieu équestre
3 millions de tonnes de paille seraient disponibles pour le milieu de la construction
Valorisation du fumier par procédés de méthanisation
2 millions de tonnes de paille suffiraient à isoler la totalité du parc immobilier
(litières)
(selon l’AGPB)
(neuf et rénovation, produit chaque année)
18
étude, que des réductions de quantité de paille employée (dans une certaine mesure) ne dégrade pas nécessairement les qualités zootechniques. Les 7,8 millions de porcs que compte la France nécessiteraient près de 4 millions de tonnes de paille par an (5000kg/ porcs/an).
L’EMPLOI MASSIF DE PAILLE PEUTIL AVOIR DES EFFETS NÉGATIFS SUR D’AUTRES SECTEURS? Le programme de recherche Terracrea estime à 50 millions de tonnes de paille de céréales d’hiver disponibles (poids sur matière sèche, calculé sur un ratio grain/ résidus variant selon les récoltes)25. 2/3 de ces résidus sont issus de céréales utilisables en construction (blé, orge, tritical). En soustrayant la paille non récoltable estimée, on obtient 16 à 25 millions de tonnes de paille issues des céréales d’hiver disponibles. Les résidus d’oléagineux, de tournesol, de colza fourniraient pour leur part 5 à 6 millions de tonnes par an26.
En horticulture, la paille est concurrencée par l’écorce de pin ainsi que les films et tissus. De plus, le paillage crée des interactions biochimiques qui sont parfois positives mais parfois négatives. La paille d’Avoine par exemple, empêche la croissance de certains adventices ainsi que celle des tomates et du riz. Elle favorise par contre celle du maïs.
L’emploi des résidus de récoltes de céréales est à priori sans impact sur l’alimentation humaine. Il faut savoir que la paille n’est généralement pas utilisée comme fourrage, sauf en cas de pénurie de foin. Seuls les ruminants sont capables de digérer la cellulose qu’elle contient. De plus sa valeur nutritive est très faible.
En agriculture, il ne faut en rien négliger l’importance du retour au sol de la paille. Un programme de recherche a été lancé à l’initiative des Chambres d’agriculture de Picardie afin de quantifier le taux d’exportation possible de paille. La méthode Cartopaille prend en compte de nombreux critères et obtient des écarts très grands. Parfois aucune exportation n’est possible, parfois l’exportation peut aller jusqu’à 2/3 de la paille. En cas d’apport de compost ou de fumier sur le champ, l’emploi de la paille dans d’autres domaines peut aller jusqu’à la totalité de la matière exploitable.
Actuellement, ce sont les milieux de l’élevage et équestre qui emploient le plus cette ressource afin de pailler le sol des étables et écuries. La paille de chanvre, de meilleure qualité, est néanmoins plus recherchée en milieu équestre de haut niveau.
Selon une estimation de l’AGPB (Association Générale des Producteurs de Blé et autres céréales) qui prend en compte les besoins agronomiques et d’élevage, la disponibilité de paille en France pour la construction atteindrait 3 millions de tonnes par an29.
L’emploi de paille en litière peut être quantifié. En France il a été évalué à 11 millions de t/an. Cela produirait 92 millions de t/an de fumier à revaloriser en procédé de méthanisation (Biomasse Normandie, 2002)27. Ces 11 millions de tonnes de paille, représenterait un cinquième de la production actuelle.
Ainsi, l’utilisation de la paille en construction ne rentre pas en concurrence avec les emplois actuels de cette ressource. La disponibilité de la paille dépendra dans le futur du type d’agriculture mis en place. Mais la production céréalière primordiale, la paille ne devrait pas, à priori, pas manquer dans les siècles, à venir.
Le milieu de l’élevage porcin semble moins confiant dans les ressources en paille que d’autres. Le projet CASDAR28 constate une différence entre fourniture et besoin en paille très contrasté d’une région à l’autre. Cependant, leur volonté actuelle est de modifier leurs techniques afin d’utiliser de façon optimale différents matériaux comme litière. Ils constatent en effet à travers leur 25 [LRA2014] p.33 26 [LRA2014] p.33 27 [LRA2014] p.33 28 [ALLAIN2014]
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quantité d’Énergie Grise nécessaire pour obtenir ces mêmes valeurs.
POURQUOI FAUT-IL VALORISER LA PAILLE PLUTÔT QU’UN AUTRE MATÉRIAU BIOSOURCÉ ?
Aujourd’hui un matériau biosourcé est meilleur pour notre santé et recyclable plus facilement qu’un matériau conventionnel (voire totalement pour ce qui est de la paille). Cependant, d’après ces chiffres, excepté les Bottes de paille, la Laine de mouton et la Ouate de cellulose en vrac qui consomment une quantité d’Energie Grise nécessaire à leur production tout à fait acceptable (entre 5 et 21 kWhEp/ UF), les autres matériaux sont tous très consommateurs d’énergie. Sur 30 produits comparés, 9 sont des matériaux conventionnels. Dans les matériaux conventionnels, seuls le Béton cellulaire et la Laine de roche en rouleau de 30 kg/m3, obtiennent une consommation d’Energie Grise inférieure à 40 kWhEp/UF.
L’emploi de la paille se justifie par bien des points. Son degré de transformation est le plus faible de tous les matériaux biosourcés, son prix extrêmement bas est dû à cette quasi non transformation (la seule étant le façonnement des bottes de paille par la botteleuse). Ce matériau est le seul dont la disponibilité est non limitante, ce qui a été constaté précédemment par calcul et évaluation des ressources. Produit local, non-industriel et nontoxique. La paille et le bois absorbent du CO2 durant leur croissance, puis il est stocké dans les murs. Un mur de brique de chaux/ sable, isolés avec du polystyrène extrudé, envoie dans l’atmosphère 108kg de pollution de CO2 par m² pour un U final de 0,10W/ m²k. Tandis que pour obtenir cette même valeur, un mur en paille avec enduit chaux à l’extérieur et enduit terre à l’intérieur va retirer de l’atmosphère 88kg de CO2 par m². Une maison en paille de 200m² va retirer plus de 17 tonnes de CO2 de l’atmosphère au lieu d’en rejeter 22 tonnes comme le ferait une maison en technique conventionnelle30. Si 1% des logements étaient construits en Paille en France (c’est à dire environ 5.000 logements), on économiserait 100 000 tonnes de CO2 par an.
On remarquera que sur les 19 isolants qui consomment plus de 50 kWhEp/UF pour atteindre la valeur R=5, 12 sont des matériaux bio-sourcés. La France étant un pays agricole, la paille se trouve souvent à proximité et nécessite un minimum de transport. Aujourd’hui, 50% des constructions en paille en France se sont approvisionnées à moins de 10km, et 10% seulement au delà de 50km31. Actuellement, la ouate de cellulose représente 40% des matériaux biosourcés mis en œuvre en France. La laine de bois représente pour sa part 18%. Annuellement, la France produit 30 000 tonnes de ouate de cellulose, nous en consommons 45 000 donc 15 000 tonnes sont importées32.
La résistance thermique (R) indiquée par un fabricant est fiable matériau par matériau. Mais dans le cas d’une paroi complexe, de nombreux facteurs influencent le calcul. Ainsi nous nous intéresserons ici au λ des matériaux seuls et à l’épaisseur nécessaire d’isolant pour obtenir un R=5m².K/W.
On estime qu’en 2050, les besoins maximum en matériaux isolants bio-sourcés seront de l’ordre de 435 000 tonnes par an (dans le scénario BS+++ de Terracrea, supposant 75% des logements isolés en biosourcés) afin d’isoler la plus grande partie du parc immobilier en France (estimé à 600 000 logements dans ce scénario)33.
Le Pic Bleu, encyclopédie interactive et indépendante sur l’habitat durable, compare les prix des matériaux conventionnels et bio-sourcés au m² permettant d’obtenir une résistance thermique R = 5. On observe que la paille est le seul matériau bio-sourcé pouvant faire concurrence aux matériaux conventionnels. La ouate de cellulose en vrac arrive en seconde position.
Si matériaux ouate de à hauteur
Une autre étude comparative issue de cette même source met en exergue la
la répartition actuelle sur les biosourcés restait la même, la cellulose devrait être produite de 200 000 tonnes par an, ce
31 [FLOISSAC2012] p.22 32 [LRA2014] p.41 33 [LRA2014].120
29 [LRA2014], p.37 30 [SNEL2015]
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qui, au regard des filières de production actuelles, semble difficilement atteignable. Si par contre, la paille venait à être utilisée principalement, il faudrait 1 million de tonnes de paille. Ce que la production actuelle peut facilement assumer.
cultivées destinées aux besoins alimentaires. De plus, le peu de transformation que la paille nécessite jusqu’à sa mise en œuvre en fait un matériau prometteur. En outre, sa valorisation en construction ouvrirait de nouvelles possibilités de revenus pour les agriculteurs.
La paille est un co-produit de l’agriculture, sa production ne coûte donc rien et ne fait pas concurrence au surfaces
© Terracrea
© Terracrea
ouate de cellulose © planete-isolation.com
botte de paille © honeybeesuite.com
Tableau comparatif d’isolant suivant 4 critères, pour R=5
Données issues du site pic bleu
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Production des scieries en 2014 (hors bois sous rail et merrains) total: 7.7 Mm3
© Agreste - e-DISAR 2016
Chiffres annuels des forêts de production hors peupleraies en France
© CPF4, e-Douanes 2016
© melyetwinzo.wordpress.com
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POURQUOI CONSTRUIRE PORTEUSE ?
EN
de paille sont prometteurs et pourraient permettre une économie plus importante si l’on parvenait à minimiser encore la consommation de bois.
PAILLE
D’après le LRA (Laboratoire de Recherche en Architecture de Toulouse) et les différents scenarii proposés dans leur rapport Terracrea, l’emploi du bois en construction constituera dans le futur un point dur, particulièrement dans le cas d’une augmentation très importante de la construction à ossature bois.
Pour le moment, l’économie de bois sur une maison d’une centaine de mètres carrés serait de l’ordre de 1 à 4 m3 de bois. Une maison à ossature bois en consomme entre 3 et 4. L’économie n’est donc pour le moment pas énorme, mais les techniques de construction en paille porteuse tendent à évoluer vers une utilisation toujours plus faible de ce matériau qui risque de se faire rare.
L’emploi de bois d’œuvre est nécessaire et en cohérence avec notre volonté de construire avec des matériaux plus sains pour l’homme et l’environnement. Mais cette ressource, à priori renouvelable, risque de se retrouver dépassée face à la demande croissante. La production actuelle des différentes essences et leur transformation industrielle doivent être pensées avec pertinence pour les années à venir. Actuellement, nos forêt sont constituées à 72% de feuillus et à 28% de résineux34. Or, les proportions de sciages sont complètement inverses à ces chiffres. En effet, les sciages de résineux représentent 82% des sciages totaux effectués par nos scieries, contre 17% de feuillus. Une valorisation plus importante des feuillus en bois d’oeuvre est nécessaire si nous souhaitons suivre l’augmentation de l’emploi de bois en construction. Économiquement, la France est déjà largement importatrice de bois. Le FCBA, en comparant les chiffres de 2014 de la balance du commerce extérieur de bois et produits dérivés, nous permet de prendre conscience des multiples emplois du bois et combien il est important de ne pas tout miser sur ce matériau35. D’autres secteurs font ombrage à l’emploi massif de bois en construction : les usines de fabrication de papier et de carton, le secteur de l’ébénisterie ainsi que celui de l’ameublement. De plus, le bois d’énergie va être dans les années à venir de plus en plus demandeur de matière. L’emploi du bois doit être impérativement planifié sur plusieurs dizaines d’années et la gestion de ses stocks pensée au regard de ces nombreux facteurs.
Les murs autoportants en bottes
34 [FCBA2016] p.9 et p.13 35 [FCBA2016] p.21
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ou du tertiaire répondant aux normes de la RT2012, les prix du conventionnel ou des bâtiments en paille sont globalement compris dans la même fourchette de prix. Cependant, nombre des bâtiments en paille pourrait également répondre aux critères des labels BBC et BEPOS. Un bâtiment en paille peut alors se révéler moins cher qu’un bâtiment conventionnel. Sans faire de généralités car bien des facteurs influencent la construction et donc le prix, une bonne conception en paille peut aboutir à de belles économies, durant le chantier ou à posteriori (amortissement dû à une très faible consommation d’énergie pour le chauffage par exemple).
QUEL EST LE PRIX DE CE TYPE DE CONSTRUCTION? Pour l’agriculteur qui vend ses bottes de paille, la plus-value est de l’ordre de 30% de son chiffre d’affaire (dû à la vente des grains seuls). C’est un revenu supplémentaire nonnégligeable. Mais le constructeur gagne-t-il à construire en bottes de paille ? Au-delà des valeurs écologiques et sociales que porte l’emploi de la botte de paille en construction, le prix intéresse aussi les constructeurs.
Le matériau lui-même, on l’a vu, est le moins cher du marché à résistance thermique égale. Le site du Pic Bleu, nous donne la paroi en paille à 6 euros le m² en moyenne (voir annexe 02). Ce qui ferait 600 euros de paroi en paille pour une maison d’une centaine de m² (nécessitant une centaine de m² de paroi en plein-pied).
Dans la double page suivante nous tentons de rendre compte de la diversité des situations. Le prix au m² d’un bâtiment en Paille Porteuse dépend de beaucoup de choses. En comparant seulement 3 bâtiments employant ce type de structure (voir double page suivante), on voit déjà un écart de plus de 2000 euros au m² de SHON sur le coût global du bâtiment. En observant de plus près on remarque que la structure, la charpente, les parements et l’isolation (paille) influencent de 34 à 41 % le budget total (voir double page suivante). Les autres systèmes constructifs employant la paille obtiennent des pourcentages similaires. Mais encore une fois, les coûts de construction relevés ici ne comprennent pas toujours les mêmes données (VRD incluse ou non, Cuve de récupération d’EP ou non, autoconstruction ou non, etc...).
Il faut ajouter à ce prix celui du bois constituant les lisses, les montants auxquels viennent se fixer les cadres et pré-cadres. En ossature bois, remplissage paille, les lisses seront moins conséquentes mais les montants verticaux bien plus nombreux. En construction conventionnelle, on ajoutera au prix des isolants celui de la maçonnerie.
En s’appuyant sur les données de Batiprix, Luc Floissac obtient des chiffres plus élevés pour une construction en ossature bois remplissage paille que pour les murs conventionnels36. Cependant, il faut noter qu’il compare des parois ayant des résistances thermiques différentes, ce qui fausse les résultats.
La seconde page d’étude des prix (voir double page suivante) ne permet pas une réelle comparaison, mais nous permet d’avoir un ordre d’idée de la diversité des pratiques avec d’autres typologies structurelles. Les constructions décrites dans l’ouvrage de Luc Floissac ont des écarts de prix parfois bien plus grands que les 3 exemples présentés. Le calcul moyen qu’il fait sur la base du maximum de ses cas d’études nous permet d’avoir une idée de prix d’un mur isolé en paille, avec ses parements extérieurs et intérieurs. Les techniques de caissons, de remplissage d’ossature bois porteuses, d’isolation en paille sur murs, de béton de paille et de paillettes en vrac à sec, donnent un prix médian de 223 euros HT/m². Le prix d’une paroi en Paille
C’est par analyse des bâtiments présentés dans son ouvrage (hors autoconstruction et expérimentations) et comparaison aux données des murs conventionnels que Luc Floissac nous permet de réellement situer la construction paille dans son contexte. Il trouve en effet un prix moyen des bâtiments isolés en paille de 1307 euros HT/m² pour du logement et 1352 euros HT/m² pour du tertiaire (voir figure ci-contre)37. Pour un logement 36 [FLOISSAC2012] p.49 37 [FLOISSAC2012] p.54
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Des bâtiments performants au prix du marché
© Luc Floissac [FLOISSAC2012] p.54
Porteuse varie dans nos exemples de 168 euros/m² de SHON à 899 euros/m² de SHON. Une étude plus poussée des prix pourrait être intéressante, mais nécessite d’avoir beaucoup plus de détails sur chaque construction.
coûts environnementaux ne sont pas pris en compte par la fiscalité et notre modèle économique. Seule une conscientisation globale peut faire comprendre l’importance de l’énergie grise dépensée pour la construction.
L’hétérogénéité des prix dépend de beaucoup de choses et la paille n’est qu’un constituant de la paroi. Même en Paille Porteuse il faut prendre en compte tous les autres matériaux et particulièrement les lisses haute et basse aux dimensions conséquentes. Ensuite, l’économie française et la production en masse des matériaux conventionnels fait baisser leur prix. Les matériaux conventionnels sont plus rapides à mettre en œuvre et ne nécessitent pas d’être réajustés avant d’être placés sur (ou dans) le mur, contrairement à la botte de paille qui est un matériau brut. Enfin, les 25
Comparaison des données économiques de 3 bâiments en Paille Porteuse
© Coralie Garcia
Maison Individuelle Petites Bottes Porteuses 88 m² habitables + 35 m² de garage
soit 123 m²
© archibulleblogspot.fr
© Pierre et Terre
Petit Abri de Jardin Petites Bottes Porteuses
Écocentre Pierre et Terre Grosses Bottes Porteuses
28 m²
345 m²
Budget de construction 59 925€ HT, soit 512 €/m² de SHON
Budget de construction 70 912€ HT, soit 2533 €/m² de SHON
Budget de construction 305 552€ HT, soit 866 €/m² de SHON
Lots en autoconstruction: 18 soit 95% d’autoconstruction
Prix (2012) des murs porteurs en paille, fourni posé: 350 € HT/m² (dont parement ext/int: enduit terre+chaux+treillis à 89€HT/m² et paille porteuse + lisses: 172€/m²)
Compris dans le budget: VRD et aménagements extérieurs
Compris dans le budget: cuve de récupération d’EP de 4000L et panneaux solaires pour Eau Chaude Sanitaire
Budget des constructions dédiée à la charpente, à la structure bois, à la paille et aux parements (enduit ou bardage confondus): 2000€ + 1925€ + 1200€ + 15500€ = 20 625€
5465€ + 19714€ = 25 179€
55473€ + 71234€ = 126 707€
(soit 168 €/m² de SHON)
(soit 899 €/m² de SHON)
(soit 367 €/m² de SHON)
soit 34% du budget total de la construction
soit 36% du budget total de la construction
soit 41% du budget total de la construction
Source des données et des graphiques: [FLOISSAC2012]
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Comparaison des données économiques d’autres typologies structurelles
© Noé Cauderay
© S.Robert
© le pré aux colimassons
Bureaux en Lausanne Système Hybride
Maison Individuelle Ossature Bois porteuse
Ferme Hélicole Caissons bois porteurs
293 m²
130 m²
123 m²
Budget de construction 982 000 FS, soit 4464 FS/ m² (917 296 €, soit 4170 €/m²) Ici: système Hybride avec Paille porteuse et mur en terre pisé porteur.
Budget de construction 43 964€ HT, soit 338 €/m² de SHON
Budget de construction 151 000€ HT, soit 974 €/m² de SHON
100% d’autoconstruction
Prix (2012) des murs en caissons porteurs, fourni posé: 124€ HT/m² (avec bardage mélèze, parepluie, laine de bois, poutre caisson, paille, OSB, lattage, fermacell)
Prix (2011) des murs isolés en paille: 37 € HT/m² (dont parement ext/int: enduit 3 couches: 8€ HT/ m², enduit + liteaux + bardage: 10€/m² et oss. bois + paille: 19€/m²)
Budget des constructions dédiée à la charpente, à la structure bois, à la paille et aux parements (enduit et bardage confondus): 35000FS + 72000FS + 223000FS = 330 000FS (soit 308 319 €) (soit 1052 €/m² de SHON)
610€ + 2885€ + 8400 € = 11 895€
45 811€
(soit 92 €/m² de SHON)
(soit 372 €/m² de SHON)
soit 34% du budget total de la construction
soit 27% du budget total de la construction
soit 30% du budget total de la construction
Source des données et des graphiques: [FLOISSAC2012]
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PARTIE I 1.4. ETAT DE L’ART EN FRANCE
UNE MAJORITÉ DE BÂTIMENTS PAILLE SONT EN OSSATURE BOIS
Systèmes construtifs employés en France (selon les données du Réseau Rhône-Alpes de la Construction paille)
EN
En six ans, le nombre de construction en paille en chantier, en projet ou déjà réalisé à presque doublé. Les chiffres suivant ont été obtenus grâce au travail du réseau de la construction en paille de Rhône-Alpes. Le recensement effectué n’est pas exhaustif et ces données sont certainement destinées à évoluer dans les prochaines années. La Paille Porteuse parmi ces résultats est loin d’être la première sur le podium. Et pourtant, le dynamisme de ses supporters semble la placer comme une solution écologique et économique de premier ordre.
© rhonealpes.constructionpaille.fr Systèmes construtifs employés en France (selon les données du recensement de l’association Empreinte)
Au niveau national aujourd’hui, 47% des constructions sont en remplissage d’ossature bois porteuse38. En effet, de nombreux bâtiments sont en partie autoconstruits. Les néophytes en construction trouvent dans cette technique l’avantage de ne pas à avoir à gérer la partie structurelle de leur bâtiment. Cette étape qui nécessite des connaissances précises est laissée au savoir-faire des charpentiers et concepteurs professionnels. La partie de remplissage en paille peut ensuite être menée en auto-construction à travers des chantiers bénévoles. Les connaissances nécessaires à l’auto-constructeur peuvent être acquises sur d’autres chantiers, lors de formations techniques, ou encore apportées par un professionnel de la paille directement lors du chantier. Aujourd’hui des entreprises proposent de mettre en œuvre la paille dans le cas où les maîtres d’ouvrage ne souhaitent pas passer par l’auto-construction.
© Floissac Luc
à se tourner vers cette filière. Ce mode constructif est particulièrement adapté à la préfabrication et l’industrialisation. 16% des constructions en paille seraient en caissons porteurs39. La technique GREB est un système qui se rapproche du système Paille Porteuse. Paille et fine ossature bois reprennent les charges ensemble. Actuellement, un peu plus de 18% des bâtiments recensés par le site internet du réseau de la construction en paille de Rhône-Alpes utilisent la technique GREB. 10% des bâtiments isolés en paille se font par remplissage d’une ossature secondaire. Les autres systèmes structuraux, dont la CST et la Paille Porteuse, se répartissent les 12% restants40.
Une autre option structurelle est appréciée : les caissons porteurs en bois remplis de bottes de paille. Actuellement, peu d’entreprises en produisent et il est souvent difficile d’avoir un lieu proche du chantier pour les fabriquer. De plus, cela nécessite des machines plus conséquentes pour le transport et la mise en place des caissons. Néanmoins, l’essor de la construction paille amène de plus en plus d’auto-entrepreneurs
39 [RESEAU_RHONE_ALPES_web] 40 [RESEAU_RHONE_ALPES_web]
38 [RESEAU_RHONE_ALPES_web]
28
Les chiffres obtenus par Luc Floissac à partir des données du recensement de l’association Empreinte de 2010, mènent plus ou moins aux mêmes répartitions. La Paille Porteuse y a néanmoins une place plus importante. Les statsistiques passe en effet de 3.5%41, pour le réseau Rhône Alpes, à 6%42 pour l’association Empreinte. On peut raisonnablement considérer le chiffre réel se situe entre ces deux valeurs, soit environ 5%. En 2010, seuls 691 bâtiments isolés en paille avaient pu être recensés par l’association Empreinte, après une étude menée entre 2007 et 201043. Pourtant, aujourd’hui, on estime à 5000 le nombre de bâtiments qui seraient isolés en paille en France. Et chaque année 500 nouvelles constructions en paille verraient le jour d’après le site du RFCP (Réseau Français de la Construction en Paille)44. Si 5% des constructions actuelles sont en Paille Porteuse, cela représenterait environ 250 bâtiments en France.
41 [RESEAU_RHONE_ALPES_web] 42 [FLOISSAC2012] p.49 43 [EMPREINTE_web_2010] 44 [RFCP_web_Historique]
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de données sur les constructions existantes dont nous avons connaissance. Pour le moment, une cinquantaine ont été répertoriées et un questionnaire de retour d’expérience a été adressé aux maîtres d’ouvrages. A l’heure actuelle, le nombre de réponses reçues ne permet pas encore un rendu statistique. Néanmoins une carte a été produite en répertoriant les bâtiments existants50. Ce travail, du groupe PAIPITE est toujours en cours et de nouvelles données de chantiers datant de 2016 (en rouge sur la carte) viennent s’ajouter à l’ensemble.
UN RECENSEMENT PARTIEL Le site du réseau de construction Paille de la Région Rhône-Alpes nous donne une évolution de la courbe de construction dans sa région très impressionnante. Entre 2010 et 2016, le nombre de constructions en paille recensées en région Rhône-Alpes est passé de 55 bâtiments achevés à 14945. Sans compter un grand nombre de projets en auto-construction non déclarés au RFCP. Actuellement près de 85% des constructions en paille, en France, sont des constructions entièrement neuves, 11% sont des extensions ou surélévations de bâtiment, 3% sont des rénovations ou restaurations.46 Les groupes de recherche et de valorisation de la construction paille sont très actifs et mettent de plus en plus en valeur la technique Paille Porteuse. Le groupe Straw Works en Angleterre, fondé par Eileen Sutherland et Barbara Jones (pionnière du renouveau de la construction en Paille Porteuse) a participé à plus de 300 constructions en paille47, dont la plupart en Paille Porteuse. Barbara Jones, faisant partie initialement des Amazonails, est charpentier de formation et convaincue depuis plus de 25 ans par ce mode constructif. Son site référence de nombreuses constructions en Paille Porteuse48
Localisation en 2016 de 56 bâtiment en Paille Porteuse recensés en France (sources multiples, voir tableau en annexe)
En Autriche, Baubiologie recense et innove avec des formes encore jamais essayées en Paille Porteuse49 (Cf *****). Le FASBA, en Allemagne, est lui aussi très actif et met en place de nombreux tests afin de faire valider les différentes techniques de construction en paille. © Laure Gadret
Actuellement en France, une branche du RFCP est désormais dédiée à la recherche sur la Paille Porteuse. La dernière commission Paille Porteuse (PAIPITE) s’est déroulée le 28 mai 2016. Elle a posé les bases du travail à effectuer et a permis durant les Rencontres de l’Eco-construction à Rennes, de sensibiliser et de mettre en relation les nouveaux membres. Nous effectuons avec le groupe PAIPITE un travail de récupération 45 [RESEAU_RHONE_ALPES_web] 46 [RESEAU_RHONE_ALPES_web] 47 [STRAWWORKS_web_Design] 48 [STRAWWORKS_web_Design] 49 [BAUBIOLOGIE_web]
50 [ZEEMAPS_web]
30
PARTIE I
1.5. RÉGLEMENTATIONS SUR LA CONSTRUCTION PAILLE, EN FRANCE ET AILLEURS
Seuls les Etats-Unis et le RoyaumeUni disposent de cadres réglementaires validant les bâtiments en bottes de pailles autoporteurs51(ERP et étages supplémentaires inclus)52. En France, son emploi en construction semble essentiellement limité par des obstacles réglementaires et assurantiels.
répond par la négative ou pas du tout, à une demande de garantie biennale ou décennale, c’est le Bureau Central de Tarification (BCT) qui tranche. Si la technique est jugée satisfaisante, il oblige l’assureur à fournir la couverture demandée57. Les professionnels construisant en paille ont souhaité simplifier ces demandes d’assurances. Ainsi, le travail du RFCP, sous la coordination de Luc Floissac, permet aujourd’hui aux constructeurs de s’en référer aux Règles Professionnelles de la Construction en Paille.
En 1989, le premier permis pour une maison en bottes de paille est délivré à Kortright dans l’Etat de New York53. En 1995, l’Etat du Nevada ordonne aux autorités locales de permettre l’utilisation de la paille dans la construction d’une structure. Cela est fait cependant sans description précise des systèmes constructifs54. Le California Straw Bale Code (HS 18944), datant de 1992, est un ensemble de recommandations qui n’est pas toujours adopté officiellement par les États, comtés ou communes, mais qui est utilisé informellement par la plupart des juridictions55.
En 2012, le Moniteur édite les premières Règles professionnelles du RFCP. Issues d’un consensus entre les différents professionnels, elles n’incluent pas, pour l’instant, la construction paille à structure porteuse. Une annexe aux Règles professionnelles, ou un cahier des bonnes pratiques est en cours de réflexion et viendrait compléter ces prescriptions.
André de Bouter nous apprend en 2009 que seuls les États-Unis (en 1992), la Biélorussie (en 1999) et l’Allemagne (en 2006) avaient adopté officiellement des codes sur la construction en paille56. Depuis, l’Autriche et le Canada fournissent un cadre réglementaire à la construction en paille.
Dans ces Règles Professionnelles, le RFCP explicite les tâches de chaque corps d’état principaux par référence aux DTU et autres textes réglementaires. Dès lors qu’aucun DTU n’existe pour le corps d’état décrits, les travaux à exécuter sont décrits et le texte peut être rendu contractuel. Ces Règles professionnelles permettent aujourd’hui d’obtenir plus facilement une décennale.
A travers le monde, les constructions en paille ne sont pas soumises aux mêmes réglementations. Les statuts et les natures des codes sont variées.
Un particulier ou une entreprise qui construit en paille par l’application des « règles CP 2012 » doit suivre et valider une formation certifiée RFCP ou faire valider ses expériences par ce même organisme.
En France, avant 1995, les « techniques non courantes » en construction étaient exclues des garanties de travaux par une clause. Aux termes d’un jugement en cour de cassation le 25 janvier 1995, cette clause est réputée non écrite. Les « techniques non courantes » et les techniques traditionnelles sont « autorisées de fait » par la loi et imposées aux assureurs (à partir du moment où ces techniques sont « sensées »). Aujourd’hui, si un assureur
De plus des fiches d’auto-contrôle doivent être renseignées et fournies au RFCP. Le RFCP peut ainsi suivre l’évolution des pratiques de chantier et faire un suivi statistique plus vaste.
51 [FORÊT2013] p.3 52 [RFCP2014] p10 53 [DEBOUTER2009] p. 261 54 [DEBOUTER2009], p. 262
Ces règles CP 2012 n’incluent pas encore d’annexe concernant la paille porteuse. Une commission, spécialement dédié à cette thématique, se réunit 2 fois par an, depuis 2013. Cette commission
56 [DEBOUTER2009] p. 268
57 [DEBOUTER2009] p. 267
55 [DEBOUTER2009] p. 263
31
Paille Porteuse, connue également sous le nom de groupe PAIPITE, compte entre 100 et 150 membres. Un noyau dur s’est formé autour de Pascal Legris, Christian Hamani, et Cédric Hamelin entre autre et travaille à l’élaboration d’un cahier des bonnes pratiques ou de règles professionnelles. Le travail de récupération des données initié permettra de comparer les pratiques et de déterminer celles à éviter et celles, au contraire, à préconiser.
Aujourd’hui pour construire en Paille Porteuse, deux barrières sont à franchir, celle de la législation française et celle des préjugés. La première barrière est déjà passée pour ce qui concerne la paille en isolation mais pas encore pour la botte de paille en tant qu’élément structurel. Ce deuxième point ne sera qu’une fois la barrière des préjugés sur la botte de paille tombée. Il faut donc sensibiliser, expérimenter, recenser et analyser les différentes pratiques architecturales en Paille Porteuse.
32
PARTIE II
EXPRESSION TECHNIQUE DE LA PAILLE PORTEUSE
© Laure Gadret
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© Luc Floissac
© Coralie Garcia
© Coralie Garcia
© Coralie Garcia
© Coralie Garcia
34
PARTIE II
2.1. DESCRIPTION D’UN MUR EN PAILLE PORTEUSE tiges filetées métalliques sont à proscrire à cause de la condensation qu’elles provoquent dans les parois). Le sens de pose des bottes est généralement à plat, sens dans lequel la botte résiste mieux à la compression, particulièrement si on utilise de petites bottes (h36xl46).
CONSTITUTION D’UN MUR EN PAILLE PORTEUSE Le schéma conventionnel d’un mur autoportant en bottes de paille est assez simple (ici c’est le principe appliqué à la maison Garcia qui nous sert d’appui de compréhension58). De nombreuses variantes existent, mais nous décrirons cette méthode assez courante issue de la technique Nebraska. A travers son livre, Luc Floissac nous permet de comprendre les fondements de cette technique de construction à l’aide d’axonométries détaillées. (voir figure cicontre)
D’un côté de la botte, les tiges sont pliées. De l’autre, elles sont coupées. Il est préférable de changer le sens des bottes à chaque rangée afin d’obtenir un mur le plus droit possible. On a en général pour un étage de hauteur conventionnelle (entre 2m20 et 2m50) 6 à 7 rangées de petites bottes ou 2 rangées de grosses bottes (h120xl90). Aux angles on prendra garde à faire des joints croisés afin d’assurer le chaînage des murs59.
Dans un premier temps, un soubassement sur fondations évite à la paille d’être en contact avec le sol et l’humidité. Il est essentiel d’éviter les remontées capillaires à travers la lisse basse en bois à l’aide d’un film ou par le biais de tout autre matériau remplissant cette fonction. La paille, comme le bois, doit être au minimum à 20 cm du sol afin d’éviter une dégradation des enduits due aux rebonds de la pluie sur le sol.
Au moment de la mise en œuvre de la botte, celle-ci peut être reficelée manuellement afin de modifier sa longueur ou augmenter sa densité. Les tiges sont replacées dans les angles et la botte est taillée afin de lui donner une forme parallélépipédique quasi parfaite. Des découpes peuvent être pratiquées dans le matériau afin d’inclure un poteau par exemple.
Une lisse basse solide est fixée à ce soubassement. Elle est souvent constituée de 2 bastaings en bois (dont la largeur est comprise entre 155 et 185mm et l’épaisseur entre 55 et 65mm) liés par des entretoises. Ce complexe en échelle est d’une largeur calculée en fonction de la largeur de la botte de paille. Cette lisse basse sert également à fixer les montants verticaux (non structurels) qui accueilleront les pré-cadres et cadres des menuiseries. Le passage des sangles de maintien de compression (les plus fines, n°6 sur la figure) se fait par dessous cette lisse basse (l’axonométrie schématique ci-contre présente une erreur de dessin concernant ce point). Les plus grosses sangles passent également sous cette lisse mais seront par la suite retirées.
La lisse haute, aussi appelée sablière, est particulièrement consommatrice de bois. Une lisse est présente à chaque niveau du bâtiment : au niveau du plancher d’étage et au niveau de la charpente de toiture. Elle assure le chaînage longitudinal des murs, l’équerrage, une part importante du contreventement horizontal et la répartition des charges. Elle doit donc être dimensionnée pour supporter les efforts qui lui seront transmis durant toute la durée de vie du bâtiment mais aussi lors de la compression du mur. Les jonctions aux angles seront particulièrement soignées.
Les rangées de bottes sont disposées en quinconces (l’axonométrie schématique ci-contre présente une erreur concernant ce point) et liées entre elles par des pieux (noisetier, châtaignier, bambou, etc.. les
Les bastaings constituant la lisse haute sont positionnés sur la tranche afin de maximiser leur résistance et à nouveau des entretoises sont positionnées régulièrement
58 [FLOISSAC2012] p.75
59 [FLOISSAC2012] p.63
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entre ces deux pièces de bois. La lisse est isolée et fermée par une membrure en OSB. La lisse est, dans l’idéal, légèrement inférieure en largeur à l’épaisseur du mur. En effet, ce décalage permettra de fixer un matériau support d’enduit.
empêcher la paille de prendre l’eau. Ainsi un enduit (ventilé avec lame d’air) est recommandé même sous un bardage. Les trous présents aux joints entre chaque botte doivent être remplis avec des « poupées » de terre-paille. Une fois ce travail de rebouchage effectué, une première couche de barbotine est appliquée sur le mur, puis une à deux couches d’enduits viennent finir la façade. Les enduits sont dans certains cas renforcés par une trame ou un grillage (zones sismiques). En Allemagne jusqu’à 3 couches d’enduit sont appliquées.60
Des réservations sont faites dans cette lisse permettant à la lisse de descendre le long des montants verticaux sans rencontrer de résistance jusqu’au tassement final du mur. Dans cette logique, on prendra garde à ne pas positionner les entretoises là où les montants verticaux des menuiseries vont venir s’encastrer. Lisse basse et lisse haute ne sont pas liées directement entre elles par une quelconque structure rigide verticale. Ce qui les lie c’est l’ensemble stable formé par la paille, ses enduits, les sangles et les pieux. C’est ce complexe qui donne sa stabilité à l’ensemble. Le contreventement est, pour sa part, assuré par l’ensemble Enduit-PailleEnduit.
Le complexe « enduit-paille-lisses » fonctionne ensemble pour garantir la structure. Suivant les cas, les tableaux des baies reprendront ou non une partie des charges de l’édifice. Les linteaux de ces baies doivent supporter de nombreuses charges dont le poids des bottes qui s’accumulent au dessus de ce linteau ainsi que le poids, subdivisé, de la toiture.
Dans cette mise en œuvre, chaque niveau de mur est compressé avant de commencer le niveau suivant (qu’il s’agisse d’un étage supplémentaire ou de la toiture). Cette pré-contrainte permet d’atteindre plus rapidement le tassement final des bottes de paille. Elle se fait soit artificiellement à l’aide d’outils (notamment au moyen du système fibrehouse ou à l’aide de sangles grosses charges) soit naturellement, par le poids propre de la structure. Plus les bottes utilisées sont denses plus leur tassement final sera faible. Sur une hauteur d’un étage avec des bottes déjà très comprimées on pourra observer un tassement de 2 à 3 cm. Si les bottes sont de faible densité initialement, cette valeur pourra être bien plus élevée.
© Laure Gadret
© Rae Parkinson
Les sangles grosses charges positionnées sur l’ensemble des murs doivent comprimer ensemble, au même rythme et de façon homogène le mur, afin de ne pas perdre la répartition homogène des charges. Une fois les bottes placées et compressées, le mur doit être protégé des intempéries. Si les bottes lors de la mise en œuvre n’ont pas été mouillées et si le tassement final est atteint, les enduits peuvent directement être commencés. Quel que soit le revêtement choisi, il faut
© Rae Parkinson
60 [SNEL2015]
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PARTIE II
2.2 NOTIONS TECHNIQUES DE BASE DE LA BOTTE DE PAILLE en matière inerte tandis que d’autres restent toxiques pendant des années64. Le choix des balles de paille employées se fait en fonction des sensibilités des constructeurs et futurs habitants et doit être étudié au cas par cas.
NOTIONS TECHNIQUES DE BASE DE LA PAILLE La paille est la tige des graminées comprise entre les racines et l’épi portant les grains. Le foin comprend à la fois la tige et les grains et sert d’aliment aux animaux. En plus d’attirer les insectes et les rongeurs, les grains sont riches en hydrates de carbone, ce qui favorise le pourrissement de la paille61.
Il n’y a pas encore d’étude approfondie sur le sujet de la qualité de la paille suivant le type de production agricole choisie mais Tom Rijven (artisan, constructeur en paille et développeur de la technique CST) nous assure que la paille biologique aurait une meilleure résistance à l’humidité grâce à la pellicule de cire qui recouvre naturellement les tiges de paille65. Les fongicides la feraient disparaître. Jacob Wihan affirmait déjà en 2007, après avoir mené une étude sur le sujet, que l’emploi de fongicides augmentait jusqu’à 150% la vitesse de dégradation d’un brin de paille. Une terre fertilisée chimiquement augmente le taux de nutriment dans les tiges et aide à la prolifération des bactéries et des champignons tout en réduisant les défense naturelles de la paille. Une paille biologique contient moins de nutriments et se voit plus résistante à la biodégradation. 66
La composition de la paille la rend très résistante à la traction, qualité non négligeable en construction. Composée de microfibres lignocellulosiques, elle a une résistance à la traction supérieure à bien des bois de résineux62. Le silice contenu dans la paille est l’élément qui détermine sa résistance au feu et à la pourriture. Plus la paille en contient, plus elle est résistante. La paille de riz est privilégié sur ce plan car son taux de silice approche les 20%. De plus, on remarque au microscope que sa surface est hérissée et de fait les brins assemblés dans une botte de paille de riz ont une meilleure cohésion. Cependant, le facteur de la disponibilité favorise l’emploi de la paille de blé en construction aujourd’hui.
Composition de la paille selon le type de céréale
La teneur en azote contenue dans la paille varie d’un modèle de culture à un autre et influence le constructeur dans le choix de sa paille. En effet, un modèle de production n’utilisant pas de fertilisants (pour la plupart à base d’azote) produira des plantes moins riches en azote. L’azote accélère la décomposition des plantes dans le sol, une botte issue de ce type de culture aura plus de risque de pourrissement63. Aujourd’hui, malheureusement, la grande majorité des cultures emploie des fertilisants.
Blé
Orge
Concernant la toxicité ou non de la paille suite à l’emploi de pesticides, cela varie en fonction des produits utilisés et du moment de leur projection sur les cultures. Certains pesticides se dégradent rapidement
Riz
© [DEBOUTER2009]
61 [DEBOUTER2009] p.30 62 [DEBOUTER2009] p.26 63 [DEBOUTER2009] p.27
64 [DEBOUTER2009] p.27 65 [RIJVEN2007] 66 [ATBA2009]
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Une fois formées, les bottes de paille sont acheminées vers leur lieu de stockage et devront être stockées à l’abri de la pluie et ventilées. Les méthodes de stockage sont décrites en détails dans les Règles Professionnelles de la construction en paille70.
LA BOTTE DE PAILLE : DU CHAMP AU MUR La paille est un matériau résolument contemporain. Comme nous l’avons vu précédemment, près de 3 millions de tonnes de paille seraient disponibles pour la construction. La paille de blé est la plus disponible et la plus utilisée en construction. De nombreux types de céréales peuvent être employées : chanvre, seigle, orge, riz, etc., cependant les garanties décennales seront plus facilement obtenues pour un matériau connu et dont les données sont mesurables et comparables : la paille de blé. De fait, les Règles Professionnelles de construction en paille sont basées sur des tests effectués avec cette céréale.
Avant la mise en œuvre, le stock de paille doit être contrôlé. Cette étape est essentielle et évite de mettre en œuvre des bottes non conformes pour la construction. « Le contrôle doit porter sur l’humidité relative, la masse volumique et les dimensions des bottes. Il est réalisé au minimum sur 10 bottes et ce, toutes les 20 bottes ». Si l’une des bottes testées dépasse les valeurs autorisées : la botte est rejetée et toutes les bottes du lot sont à contrôler.71 Les bottes ne doivent surtout pas présenter de signes de pourrissement (odeur, tâches sombres, filaments blancs). Il faut connaître l’historique des balles de paille afin d’éviter celles ayant subit trop de changement d’humidité. Même sèches, elles peuvent présenter des signes d’un mauvais conditionnement antérieur.
Après la moisson, qui sépare la céréale de la tige, la paille est laissée en champs, sous forme d’andains. Le passage des andains aux bottes de paille est effectué à l’aide de presses mécaniques. Les premières moissonneuses occasionnaient à l’origine des pertes de l’ordre de 60 à 70% de la matière paille. L’amélioration des machines a fait baisser ce chiffre à 20%. Les botteleuses fournissent aujourd’hui des bottes de paille de bien meilleure densité qu’en 1950.67 Cette densité est essentielle pour la mise en œuvre du matériau. Dans les Règles Professionnelles de construction en paille, la masse volumique minimum recommandée est de 80kg/m3 (sur base sèche)68 pour la mettre en œuvre en tant qu’isolant. La technique Nebraska nécessite des bottes bien plus denses.
Croquis de principe du stockage des bottes de paille à l’extérieur préconisé par les Règles Pro Paille
La botteleuse comprime les tiges en galettes, en orientant les brins de paille dans un même sens (plus ou moins régulièrement suivant la qualité des andains formés préalablement). Ces galettes d’environ 10cm sont comprimées entre elles au fur et à mesure, puis liées par des ficelles. Plus les brins sont longs, meilleure sera la botte de paille. La pression exercée sur la paille et la longueur sont réglables sur la machine, tandis que la base et la hauteur de la botte sont fonction de la presse utilisée69.
© [RFCP2014]
67 [WIKIPEDIA_web_Botte] 68 [RFCP2014] p.27 69 [RFCP2014] p.23
70 [RFCP2014] p.126-127 71 [RFCP2014] p.126
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LES DIFFÉRENTS TYPES DE BOTTES Les balles rondes (1m de hauteur et 1m à 1,3m de diamètre) et les très grosses balles (120cmx120cmx240cm) sont peu utilisées en construction. Certains constructeurs les achètent parfois afin de fabriquer eux-même des bottes plus petites ou de les utiliser dans un mélange terrepaille. En France les tailles de bottes de paille sont relativement standardisées. Suivant la botteleuse et la taille de son canal de presse, les bottes de paille ont différentes dimensions et différentes densités. • Les « mini » bottes : 25cm de hauteur, 45cm de base et 50 à 120cm de longueur • Les « petites » bottes : 37cm de hauteur, 47cm de base et 50 à 120cm de longueur • Les bottes « moyennes » : 50cm de hauteur, 70cm de base et 110 à 200cm de longueur • Les « grosses » bottes : 80cm de hauteur, 120cm de base et 230cm de longueur. Les pratiques varient d’un concepteur à un autre, et en fonction du projet, mais globalement, en France, la botte de paille la plus utilisée est la petite botte de paille (37x47x120). Barbara Jones et Straw Works diffusent largement leur travail à travers des formations mais également par un site internet (proposant des détails techniques) ainsi que des livres (Building with straw bales, A practical manual for self-builders and architects, édité en 2015).
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CONTRÔLE DES BOTTES
elles doivent être ventilées.
Les Règles Professionnelles de la construction en paille et le travail de Straw Works nous permet de définir ce qu’est une bonne botte de paille en construction :
Tout type de céréale peut être employé tant que les règles ci-dessus sont respectées. Cependant, Barbara Jones préconise l’emploi de paille seigle. Contenant naturellement des fongicides, cette céréale est plus résistante que les autres au pourrissement. La paille de blé d’hiver vient pour elle en second choix. Étant donné les conditions dans lesquelles il a poussé, il est souvent plus résistant que d’autres céréales.
• Sa teneur en eau (sur poids sec de la paille) doit être inférieure à 20% d’humidité. Entre 20 et 30% d’humidité relative, son stockage est fortement déconseillé et sa mise en œuvre interdite72. Les Règles Pro paille n’incluent pas actuellement le mode constructif étudié ici, la Paille Porteuse. Néanmoins, les mêmes critères de sélection des bottes devraient être appliquées.
Une longueur moyenne minimum en champ de 25cm est recherchée par les constructeurs en bottes de paille77. Il est préférable néanmoins d’employer des brins d’une longueur comprise entre 30 et 45cm78. Le champ d’origine doit être sélectionné avec soin. L’agriculture conventionnelle a depuis plusieurs dizaines d’années sélectionné les variétés produisant le moins de déchet et donc ayant les tiges les plus courtes. Dans les années à venir, la valorisation des coproduits en agriculture pourrait peut-être faire changer cette tendance.
• Les bottes de pailles doivent être denses et compactes. La botteleuse doit être réglée sur la compression maximale lors de la fabrication des balles de paille. Les bottes maintenues avec 2 ficelles, la densité doit être comprise entre 100 et 155 kg/m373. • Les ficelles qui la maintiennent doivent être très tendues (il doit être difficile de passer ses doigts sous ces ficelles)74, et doivent être éloignées des bords de la botte de paille d’au minimum 10cm, sans jamais glisser des coins de la botte de paille. Des ficelles en chanvre ou en sisal auront un meilleur impact environnemental qu’en polypropylène. Toutefois ces trois types de ficelles sont recommandées pour les bottes. Les Règles Pro paille nous précisent que les ficelles employées doivent avoir une résistance à la traction minimale de 120 kPa (ficelles type 350)75. L’emploi de câble et de métal est à éviter car cela crée des points de rosé qui amènent l’eau à se condenser dans le mur autour de ces matériaux froids.
En Paille Porteuse on cherche à un même niveau (RDC ou niveaux supérieurs) à avoir un tassement des murs régulier qui transmettrait les charges de façon égale. Il semble donc logique qu’une mise en œuvre de bottes de densité quasi identique dans tous les murs facilite ce résultat. Néanmoins aucune vérification en laboratoire ne nous permet de confirmer cette idée. La densité des bottes étant primordiale en paille porteuse, le temps de contrôle des bottes et de préparation de ces dernières risque d’être plus conséquent que dans une mise en œuvre de ce matériau en tant que simple isolant.
• Les bottes doivent avoir un aspect régulier. Un soin particulier doit être porté sur les angles. • Les bottes doivent être au moins 2 fois plus longues qu’elles ne sont larges76 (excepté dans les cas où une botte est recoupée pour finir une rangée) • Les bottes stockées doivent être mises hors-sol et hors d’eau rapidement après leur récupération. Pour éviter la condensation et l’augmentation de leur taux d’humidité, 72 [RFCP2014], p.22 73 [JONES2015] 74 [JONES2015] p.46 75 [RFCP2014] p.126 76 [JONES2015] p.46
77 [DEBOUTER2009] p.30 78 [JONES2015] p.46
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Partie coupée des galettes formant la Botte de paille
Contrôle d’humidité de la botte de paille
© http://lagencenatachabook.blogspot.fr/
humidimètre © http://maison-paille-passive44. over-blog.com/ Contrôle du poids de la botte de paille
Botte de paille Avant/Après remodelage
© RFCP
Crochet peseur © http://oikos-ecoconstruction. com/
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PARTIE II
2.3. LA BOTTE DE PAILLE FACE AUX DANGERS EXTÉRIEURS réaction au feu de deux types de parois : un pan de toiture incliné à 45° au dessus des flammes, et un mur en ossature bois, isolé en bottes de paille (avec des liteaux fixés à chaque rangée) et enduit à la chaux de chaque côté.
En matière de sécurité incendie, on distingue deux choses : la résistance au feu et la réaction au feu. La réaction au feu est l’aptitude d’un matériau à s’enflammer et à contribuer à un départ d’incendie. Tandis que la résistance au feu pour sa part, étudie le temps durant lequel l’élément de construction testé joue son rôle de limitation de la propagation d’un incendie.
En France, les essais de réaction au feu sont normalisés et conformes à la NF EN ISO 11925-2 (décembre 2002). Deux critères sont alors observés : la combustibilité et l’inflammabilité. Ainsi, depuis 2010, le matériau botte de paille (défini comme isolant en construction) a obtenu le classement E. L’éprouvette (89x60x250mm) exposée à un brûleur durant 15 secondes s’est enflammée mais la flamme est restée inférieure à 15cm. De plus l’éprouvette s’est éteinte avant les 20 secondes réglementaires d’observation79. Cet essai a permis de classer le matériau botte de paille dans la Classe E. Cet essai servira d’appui pour les tests de 2012, décrit ci-après.
RÉACTION AU FEU Les premiers tests au feu ont été effectués aux Etats-Unis, dès 1993. Des murs en bottes de paille enduits sur les deux faces ont résisté aux flammes durant pas moins de deux heures (voir annexe 04). Lors de l’essai de l’an 2000 au NouveauMexique, les murs composés d’ossature bois et de plâtre se sont effondrés au bout de 35 minutes alors que ceux en bottes enduites ont résisté au test des 40 minutes. En 2001, l’Autriche puis le Danemark valident des essais sur des murs en ballots de paille enduits. En 2002, l’association Ausbale, en Australie, reproduit les conditions de test au feu selon les normes australiennes. Bohan Dorniak, porte-parole du groupe, conclut que les ballots de paille enduits devraient être classés « matériau non combustible » selon le Code australien relatif aux feux de brousse. Peut-être est-ce le cas depuis lors. Tous ces tests nous montrent à quel point le sujet est pris au sérieux. La paille en construction à une résistance réelle aux flammes très éloignée de l’idée préconçue que l’on peut s’en faire.
Eprouvette d’essai de réaction au feu (voir [FCBA2010_feu])
[FCBA2010_feu] Essai au feu LEPIR II, effectué en 2009 pour le groupe scolaire d’ISsy -les-Moulineaux
Le Texas, aux Etats-Unis, valide en 2005 la résistance de murs en bottes de paille enduits, 10 ans après les premiers tests d’échelle 1 (effectués au Nouveau-Mexique). Les tests sont pour la première fois effectués sur des murs en Paille Porteuse. Incluant, en outre, des variantes de mise en œuvre, comme le sens de pose (« à plat » ou « sur champ ») et la présence ou non d’un renfort de structure inclus dans l’enduit (treillis métallique). En France les premiers tests aux flammes datent de 2004. Le CEBTP, actuellement situé à Mérignac, observe la
© Gaujard Technologies Scop 79 [FCBA2010_feu]
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français M1. Cette ancienne classification allant de M0 à M4 (de l’incombustible au combustible) n’est aujourd’hui appliquée que pour les matériaux d’aménagement intérieur80.
RÉSISTANCE AU FEU La résistance au feu pour sa part, étudiant la capacité de limitation de la propagation d’un incendie, et sa durée, peut être validée de plusieurs manières. En France, en 2009, un essai de type LEPIR II est effectué sur une paroi en caisson de bois remplis de paille. Ce test est demandé par Bois & Construction afin de valider la construction d’un ERP (Établissement Recevant du Public), le groupe scolaire d’Issy-les-Moulineaux. Cet essai permet de déclarer la façade proposée conforme aux exigences ERP. Mais cela est valable uniquement pour les façades de ce bâtiment (voir figure ci-contre).
COMPORTEMENT AU FEU D’UN MUR EN PAILLE PORTEUSE De nombreux tests au feu ont été effectués sur des murs en paille en tant qu’isolant et sur le matériau botte de paille seul, mais pour l’instant le seul test porté à notre connaissance sur un mur en Paille Porteuse reste celui effectué par les laboratoires Intertek de San Antonio au Texas. En 2006, une équipe réunit tout le matériel nécessaire à cet essai coûteux mais essentiel. Conformément à l’ASTM E-119, 2 murs sont testés à une température comprise entre 900 et 1000°C81.
Les essais français organisés par le FASBA et le RFCP, en 2010, ont permis d’attribuer à ce matériau la classe E. Un test de résistance au feu est effectué 3ans plus tard. En 2012, un mur en bottes de pailles et en ossature de bois massif, enduit à la chaux, a été testé selon les normes de l’essai SBI (Single Burning Item) par le FCBA et le MPA (le FCBA étant l’organisme référent pour ce genre de test en France et le MPA étant son homologue allemand). Le RFCP et le FASBA (organisme de promotion de la construction en paille en Allemagne, très souvent représenté par Dirk Scharmer) ont uni leurs moyens afin de faire rentrer ce type de paroi dans les normes incendies européennes. Conformément à l’EN 13501-1 : 2007, ce type de mur a obtenu le classement Euro-classe B-s1,d0.
Le premier mur en Paille Porteuse est formé de bottes de 40cm de large posées à plat. Le mur est compressé à 8,76kN/m avant la pose de l’enduit. Une première couche d’enduit en terre est appliquée et 10 jours plus tard, une seconde couche d’enduit vient recouvrir la première pour obtenir un enduit final de 25mm d’épaisseur. On obtient au total un mur d’épaisseur 45cm. Une fissure de 8mm de large est apparue lors des manipulations du mur sur la face extérieure du mur. Elle n’a pas été réparée avant l’essai. Placée devant un four de 3m sur 3m, la paroi est testée durant une heure. Après 25 minutes de test, des fissures sont apparues sur les deux faces et ont par la suite augmenté en taille et en nombre. Les fissures ont permis une combustion profonde du matériau paille. Les bottes du reste du mur n’ont subi une carbonisation que sur 7 à 10cm, excepté au niveau des rebouchages trop hâtifs faits avec seulement de la paille en vrac, peu dense et sans argile.
La classe B signifie que le mur en bottes de paille enduit à la chaux forme un complexe combustible mais ininflammable (d’après le tableau d’équivalence avec l’ancienne classification française). Son classement s1, s pour smoke (la valeur s allant de s1 à s3), est excellent et démontre que la quantité et la vitesse de dégagement de fumée sont faibles. De plus, il est à noter que ces fumées ne sont pas toxiques, contrairement aux isolants synthétiques de type polystyrène. Et enfin, d0 (d pour droplets) valide le fait qu’un incendie sur ce type de paroi ne produira aucun débris (aucune gouttelette et aucun débris enflammé n’a été observé durant le test). L’euroclasse B-s1,d0 correspond à l’ancien classement
Un test vérifie la solidité de l’ouvrage à l’aide de la pression obtenue avec une lance à incendie. Le reste de l’enduit s’est détaché, mais les bottes de pailles, elles, n’ont pas bougé malgré leur combustion partielle. 80 [WIKIPEDIA_web_Feu] 81 [DEBOUTER2009] p.214-217
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Le second mur en Paille Porteuse est formé de bottes posées sur chant cette foisci. Le mur fait donc 35cm d’épaisseur. Il est renforcé sur les deux faces par un grillage métallique à maille hexagonale, fixé dans les bottes de paille grâce à des agrafes de 15 à 20cm de long. Une première couche d’enduit ciment-chaux est appliquée et 10 jours plus tard, une seconde couche de cet enduit vient recouvrir la première pour obtenir une épaisseur d’enduit finale de 25mm. Placée comme la première paroi face au four de 3m sur 3m, la paroi est testée durant 2 heures cette fois-ci.
de mise en œuvre est important. En effet la paille en vrac présente sur chantier (issue de la manipulation des bottes) est un matériau très inflammable car peu dense. Un chantier employant la paille doit être rigoureusement et régulièrement nettoyer afin d’éviter tout incident.
Après 20 minutes, des fissures apparaissent sur la face exposée à la chaleur du four et augmentent également en taille et en nombre. Sur la face extérieure, aucune fissure n’apparaît. Au bout des 2 heures de test, l’enduit est bombé du côté de la face exposée aux flammes. Maintenu par le grillage à 25cm de la paille, il ne protège plus les bottes. Les liens en polypropylène maintenant les bottes de paille ont fondu durant l’essai, mais la compression de l’ensemble du mur a gardé la cohésion des bottes. Les bottes correctement placées et ajustées restent donc intactes même si leurs liens sont rompus.
Nettoyage d’un chantier en Paille Porteuse
© https://maisonpaillecouhy65.wordpress.com/
Les bottes sont également carbonisées sur plusieurs centimètres mais la stabilité de l’ouvrage se vérifie lors du test de la lance incendie.
Nos connaissances sur les différents systèmes constructifs et leur résistance au feu nous permet d’affirmer la résistance au feu d’un bâtiment en Paille Porteuse. Il manque désormais à l’Europe de faire valider de la même manière qu’au Texas des murs en Paille Porteuse. Aux Etats-Unis, dès 2001 les murs en bottes de paille obtiennent la certification de résistance au feu de classe F90. C’est l’équivalent d’un mur de béton de 25cm d’épaisseur82. Cette classification n’est pas nécessaire pour du logement individuel mais devient essentielle pour l’utilisation de ce système constructif pour des ERP ou du logement collectif.
Néanmoins, il convient de rappeler ici que le risque d’incendie durant la phase 82 [SCHMIDT_web]
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QUELS SONT LES RISQUES DE DÉGRADATION D’UN MUR EN PAILLE PAR LES INSECTES OU LES ANIMAUX ?
RISQUES LIÉS À L’EAU L’eau est le pire ennemi de la paille et de tout type de construction. Deux règles sont à respecter : éviter la pénétration d’eau liquide et gérer la pénétration de vapeur d’eau dans les murs. En construction, toute condensation est dangereuse pour les matériaux (d’origines végétale, minérale ou organique). Leur dégradation entraîne bien souvent une forte dégradation de la qualité de l’air. Seul un support physique est nécessaire au développement de moisissures et la paille en est un.
Depuis 2010, un rapport du FCBA83 nous permet d’affirmer que les termites survivent moins bien dans la paille que dans des dispositifs contenant du bois. Les termites peuvent se nourrir de la paille mais cet aliment n’est pas suffisamment nutritif pour la survie des termites à long terme. Sur les différentes éprouvettes testées, la survie moyenne s’élève à seulement 17% des termites. La Paille Porteuse employant moins de bois pourrait donc être préférée à une structure à ossature bois. Notons qu’aucune attaque de termite n’a été recensée jusqu’à présent84 sur les murs correctement séparés du sol.
Les Règles Professionnelles de la Construction en Paille sont très claires sur la sélection des bottes et sur leurs conditions de mise en œuvre. Si ces mêmes recommandations sont suivies en Paille Porteuse, il ne devrait pas y avoir de problème d’humidité.
Pour ce qui est de la présence d’insectes ou d’acariens, elle est généralement due à un problème d’humidité. Si ce point est contrôlé, il ne devrait pas y avoir de risque pour les murs en Paille Porteuse.
Un humidimètre sert à contrôler les bottes. Les bottes dont la teneur en eau est inférieure à 20% sur poids sec sont stockées au mieux dans un hangar, à défaut sous une bâche, en suivant le schéma préconisé par les règles professionnelles87. Il n’est pas nécessaire de contrôler toutes les bottes à l’aide de cet instrument. Un contrôle visuel de la totalité des balles de paille et un contrôle à l’humidimètre d’une dizaine de bottes sur la totalité (à raison d’un contrôle toutes les 20 bottes) est suffisant88.
Enfin le risque de présence d’animaux dans les murs est particulièrement présent durant la phase de chantier, avant d’enduire les murs. Les espaces entre les bottes offrent des cavités confortables pour un rongeur. Mais la paille contient de la silice, élément qui la rend difficile à ronger85. De plus, la densité des bottes de paille (100 à 155 kg/ m3 préconisé par Barbara Jones en Paille Porteuse) ne permet pas un déplacement aisé des rongeurs dans les bottes de paille86. En revanche un panneau isolant de densité comprise entre 10 et 40 kg/m3 (c’est le cas des rouleaux de laine de verre, de roche, de ouate de cellulose, de certaines laines de bois, etc.) est bien plus accessible aux rongeurs. Dans tous les cas, un système de protection (grilles, enduits, plaques, etc.) doit être pensé à la conception, quelque soit l’isolant choisi.
Les Règles Professionnelles établissent une liste des facteurs influant sur les performances des murs remplis en bottes de paille. Ils sont aux nombre de sept89 : • Une densité insuffisante de la paille • Une dégradation du parement • Une pénétration d’eau dans la paroi • Un défaut d’étanchéité à l’air (si étanchéité à l’air il y a) • Une pénétration puis un blocage interne de la vapeur d’eau • Une condensation de vapeur d’eau (du par exemple à un pont thermique, ou un matériau froid (métal) inclus dans les bottes de paille) • Une migration d’eau dans la paroi par capillarité
83 [FCBA2010_termites] 84 [DEBOUTER2009] p.246 85 [FLOISSAC2012] p.26 86 [DEBOUTER2009] p.248
87 [RFCP2014] p.127 88 [RFCP2014] p.126 89 [RFCP2014] p.30
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Teneur en eau sur poids sec de la paille
© [RFCP2014] Facteurs d’altération potentiel à l’échelle du bâtiment
1-Densité insuffisante de la paille 2-Dégradation du parement (fissure,fente) suite à choc, percement, etc. 3-Eau pénétrant dans la paroi (pluie, ruisselement, arrosage accidentel, ou eau d’origine intérieure, liée aux équipements, ux usages, etc) 4-Défaut d’étanchéité à l’air 5-Pénétration puis blocageinterne de la vapeur d’eau 6-Condensation de vapeur d’eau (ponts thermiques, etc.) 7-Migration d’eau par capillarité
© [RFCP2014]
Parmi ces facteurs, celui de la densité de la paille ne devrait à priori pas concerner la technique de construction en Paille Porteuse. Cependant, il faut veiller à bien remplir les joints présents entre deux bottes de pailles avec un mélange terre-paille le plus dense possible.
Les autres facteurs sont fonction de la conception et de la mise en oeuvre avant tout. En Paille Porteuse, il n’y normalement pas de matériau risquant de créer une condensation par choc thermique. Les broches liant éventuellement les rangées de bottes entre elles ne doivent pas être en métal, les lisses basses doivent être isolées91. La plomberie ne doit jamais être dans un mur en paille. Une fuite ne serait pas facilement détectable et très difficilement réparable. D’autre part, les tuyaux d’eau froide sont des points où se condense la vapeur d’eau (le taux d’humidité de la paille augmentant localement). On peut séparer les tuyaux de la paille en les plaçant dans des tubes PVC inclinés, mais cette technique ne doit être que ponctuelle. La plomberie passera donc préférablement par les vides sanitaires, les planchers et les cloisons intérieures qui le permettent.
La dégradation du parement est fonction de la mise en œuvre et de l’entretien de celui-ci. La maison de Werner Schmidt construite en 2002, la Haus BraunDubuis (voir annexe 08), n’a pas eu pour l’instant besoin de ravalement de façade90. Les enduits, s’ils sont préparés et appliqués correctement, accrochent extrêmement bien à la paille.
90 [SNEL2015]
91 [DEBOUTER2009] p.195
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Règles Pro sont suivies). Un mur en paille ne nécessite normalement pas de pare-vapeur. La construction en Paille Porteuse n’a donc pas à suivre ce DTU.
IMPORTANCE DE LA CONCEPTION FACE AUX RISQUES DE CONDENSATION La source principale d’humidité est en générale celle contenue dans les matériaux utilisés dans la construction. Le béton contient plus de 150 litres d’eau par m3.. La paille mise en œuvre a normalement une humidité variant de 13% à 20%. Les poutres en bois peuvent contenir plus de 25% d’humidité. Il faut en général entre deux et trois ans pour qu’un bâtiment « sèche » complètement92.
Dans le cas où un pare-pluie serait installé sur la face extérieure du mur (dans le cas d’un bardage par exemple), le DTU 31.2 préconise une perméance à la vapeur d’eau supérieure à 0,5 g/m².h.mmHg (soit 1,04x10-9 kg/m².s.Pa) et un Sd inférieur à 0,18m94. Il faut néanmoins vérifier cette valeur par le calcul (voir figure ci-dessous).
La vapeur d’eau contenue naturellement à l’intérieur de la paroi doit pouvoir s’échapper de celle-ci. Une lecture sérieuse des Règles Professionnelles de la construction en Paille est primordiale. Le coefficient de diffusion à la vapeur d’eau, Sd, doit être connu, calculé et pensé dès la phase de conception (voir figure ci-dessous) en Paille Porteuse comme pour tout autre technique constructive.
En construction en bottes de paille enduites, il est inutile et même non souhaitable d’utiliser les films pare-vapeur, frein-vapeur, ou encore pare-pluie95. Leur utilisation augmente le nombre de matériaux de construction (une plaque à enduire doit être fixée) et leur mise en œuvre, si elle est mal réalisée, augmente les risques de condensation en cas de défaut d’étanchéité à l’air. En outre, le complexe enduit-paille participe à la performance structurelle de la technique de la Paille Porteuse. De nombreux tests de structure sont effectués sur le principe de mur sandwich : enduitpaille-enduit, et démontrent l’importance des enduits. L’emploi de film empêcherait ce complexe. Des adhésifs peuvent être employés localement au niveau des cadres de fenêtres, et des jonctions mur/plancher et mur/toiture. Les boîtiers électriques fixés dans le mur doivent être correctement scellés96.
La norme française, à travers le DTU 31.2 concernant les constructions à ossature bois continue à imposer un pare-vapeur93. Or, les murs en paille ne réagissent pas de la même manière que les murs à ossature bois. La botte de paille enduite a une résistance à la diffusion de la vapeur d’eau assez élevée et de meilleures capacités de stockage de l’humidité. En entrant dans la paroi, la vapeur d’eau, en faible quantité, se diffuse lentement. Les murs en paille ont donc la capacité d’absorber et de diffuser cette vapeur sans dommage (toujours dans le cas où les valeurs Sd préconisées par les
94 [DEBOUTER2009] p.203 95 [DEBOUTER2009] p.203 96 [DEBOUTER2009] p.197
92 [DEBOUTER2009] p.180 93 [DEBOUTER2009] p.200
Règles à observer suivant les parements intérieurs et extérieurs
© Laure Gadret (source [RFCP2014])
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En effet, les murs de cette dernière auraient tendance à provoquer des allergies certainement dues à la présence de moisissure dans le mur99. Nous ne savons pas comment étaient contrôlées les bottes il y a 100 ans. Leur taux d’humidité n’était pas mesuré avant leur mise en œuvre et les revêtements n’étaient pas choisis en fonction de leur perspirabilité. Malgré cela, sa structure supporte toujours les aléas climatiques, son poids propre et celui de la charpente.
GESTION DE DÉGÂTS LIÉS À L’HUMIDITÉ En cas de problème d’humidité dans un bâtiment déjà construit, si la zone à traiter est petite (fuite sous une fenêtre, fissure repérée rapidement, etc.), un séchage naturel peut suffire. En pratique, une teneur en eau de 39% sur base sèche peut être atteinte sans développement de microbien, mais par mesure de sécurité, la teneur en eau ne devrait jamais dépasser 25% d’humidité97. Le séchage artificiel peut parfois être employé avec succès, mais l’air expulsé entraîne un fort apport d’oxygène qui peut accélérer l’échauffement de la zone humide et provoquer l’augmentation des bactéries et champignons ainsi que sa décomposition. On considère que 4 à 5 litres pénétrant par une fuite entraîne un « très petit volume d’humidité » dans la paroi qui, si elle est séchée « très » rapidement n’entraînera pas nécessairement de décomposition98.
La maison Braun-Dubuis, construite en 2002 est aujourd’hui encore comme neuve. Une extension à été réalisée sous la maison qui originalement était construite sur pilotis. Plus de dix ans après, les enduitssont comme neufs. Aucune fissure n’est apparue et les habitants sont toujours aussi satisfaits de la forte masse thermique de la maison qui leur restitue la chaleur durant les périodes d’hiver très froides100.
Si le degré de décomposition semble trop élevé (chaleur émanant de la zone, odeur de moisissure, tâches noires visibles, etc.), il est probable qu’une partie du mur soit à déposer. Des mesures précises doivent être prises à l’aide d’un thermomètre à compost, au centre de la botte.
Un mur en ossature bois sera avantageux dans ce cas, mais des solutions peuvent certainement être trouvées pour un mur en Paille Porteuse. Cependant, la structure fonctionnant comme un ensemble compact, le travail ne sera pas aisé et le mur remonté n’aura plus les mêmes qualités structurelles. Il serait préférable avant toute opération de tenter un séchage naturel, quitte à déposer une partie de l’enduit, de protéger la façade par une bâche relativement éloignée du mur, pour permettre un séchage plus efficace. Il n’y a pour le moment aucun témoignage de dépose d’un mur en Paille Porteuse suite à un problème d’humidité.
La Haslow House a été construite en Paille Porteuse en 1913. Depuis, elle est toujours debout mais serait, d’après les habitants, sujette à ce genre de problème. 97 [DEBOUTER2009] p.172 98 [DEBOUTER2009] p.171
99 [HENRY_web_2012] 100 [SNEL2015]
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PARTIE II
2.4. LA BOTTE DE PAILLE : QUALITÉS ISOLANTES ET STRUCTURELLES données par André De Bouter (voir annexe 08), la valeur d’affaiblissement acoustique obtenue correspond à celle d’un mur en ossature bois avec isolant en panneau.
ISOLATION PHONIQUE DE LA BOTTE DE PAILLE Un mur en Paille Porteuse aura l’avantage face à un mur en ossature bois. Le bois transmet le son. La Paille Porteuse est un complexe enduit-paille-enduit et permet donc d’obtenir le système masseressort-masse, l’un des grands principes de l’acoustique. L’étanchéité à l’air influence beaucoup l’isolation acoustique des murs. La pose d’un enduit améliore les performances du mur, surtout lorsque ceux-ci sont réalisés à partir de matériaux poreux.
La valeur d’affaiblissement acoustique d’un mur en Paille Porteuse doit certainement se rapprocher de la valeur moyenne trouvée par l’université d’Eindhoven en 2003, qui était de 53dB. Une paroi isolante d’un indice 50dB peut rendre des sons très fort (instruments de musique, stéréo) presque inaudibles103. La Paille Porteuse pourrait donc se révéler très intéressante pour l’isolation phonique. Déjà, des autoconstructeurs choisissent ce mode constructif pour des studios de musique (chantier effectué durant l’été 2016 à La Chapelle Saint Rémy).
Les premiers tests ont été effectués en 1995, en Pennsylvanie, sur un mur de 50cm d’épaisseur, mais ce n’est qu’en 2003 que l’on obtiendra les premières valeurs d’indice d’affaiblissement acoustique de la paille. Un étudiant de l’Université technique d’Eindhoven aux Pays-Bas mesure l’indice d’affaiblissement acoustique sur un mur en bottes de paille posées à plat, revêtu d’un enduit terre. Les bottes utilisées ont une densité comprise entre 120 et 130 kg/ m3. Il conclut qu’un mur bien conçu et sans ponts phoniques avait un affaiblissement phonique moyen de 53dB101.
En 2008, des essais aux bruits aériens ont été menés par le FASBA (sous la direction de Dirk Scharmer) à l’Institut d’Acoustique et de Physique du Bâtiment. Le mur testé est en ossature bois, rempli de bottes de paille dont le sens des fibres est parallèle au sens du mur. Les mesures de l’isolation acoustique dans le banc d’essai (selon DIN EN ISO 140-1), donnèrent comme résultat pour un mur en bottes de paille de 356 mm d’épaisseur enduit de terre sur les deux faces, l’indice pondéré d’affaiblissement acoustique en laboratoire Rw,P = 45 dB102 (valeur présente sur le site du RFCP (voir annexe 05). Le rôle du bois dans ces tests n’est pas à négliger.
En comparant cette valeur à celles
101 [DEBOUTER2009] p.237 102 [IAB2008]
103 [DEBOUTER2009] p.241
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jonctions entre niveaux. Cela vaut en Paille Porteuse comme dans toute autre technique de construction.
ISOLATION THERMIQUE DE LA BOTTE DE PAILLE Plusieurs notions de thermique du bâtiment vont être utilisées pour comprendre le comportement d’un mur en Paille Porteuse : la conductivité thermique (λ), la résistance thermique (R), le coefficient de transmission thermique (U).
Le site du RFCP nous donne deux valeurs de λ obtenues par le groupe FASBA en Allemagne, variant en fonction du sens des fibres par rapport au mur. Ainsi, une botte dont les fibres sont perpendiculaires au sens du mur aura une conductivité thermique supérieure à une botte posée sur chant (0,08 contre 0,052). Ces valeurs correspondraient à une botte dont la densité avoisine les 100kg/m3
La conductivité thermique (coefficient λ) qui définit la capacité d'un matériau à transmettre la chaleur par conduction s'exprime en W/m.°C (en degrés Celsius) ou en W/(m.K) (en degrés Kelvin). Plus sa valeur est faible, plus le matériau est isolant.
La résistance thermique d’une petite botte de 47cm de base, posée à plat, sera donc :
La résistance thermique (R) se calcule en divisant l'épaisseur du matériau par le coefficient λ : R=e/ λ, et s'exprime donc en m².K/W. La résistance d'une paroi est la somme des résistances thermiques qui la composent. Plus sa valeur est grande, plus la paroi est isolante.
R=e/λ = 0,47/0,08 = 5,875 m².K/W Posée sur chant, une petite botte obtient une résistance thermique différente : R=e/λ = 0,37/0,052 = 7,115 m².K/W
Le coefficient de transmission thermique (U, ou anciennement K) est l'inverse de la résistance thermique. U=1/R. U s'exprime en W/(m².K). Plus U est faible, plus la paroi est isolante.
La mesure de la conductivité thermique (λ) est rendue difficile par les méthodes employées. Il faut parfois couper des tranches de botte. En Autriche, l’ouverture de l’appareil de mesure ne faisait que 20cm de large. Les tests français du CSTB ont été effectué sur des « bottes » reconstituées de 50x50x5cm ou de 50x50x10cm et de densité 66 kg/m3 104. C’est deux fois moins dense que les bottes employées généralement en Paille Porteuse.
La chaleur se déplace du chaud vers le froid, par conduction, par convection ou par rayonnement. Les capacités isolantes de la paille éviteront les déplacement par conduction. L'étanchéité à l'air cherche pour sa part à éviter les déplacements par convection.
Plusieurs facteurs vont influencer ces données, comme le type de paille employée, la teneur en eau de la botte, sa densité, les vides laissés entre les bottes, l’orientation des fibres, la densité de l’enduit utilisé dans les interstices, la nature et l’épaisseur des enduits et la présence, ou non, de baies.
Il existe plusieurs méthodes pour obtenir les performances thermiques d’un mur. On peut tester le mur par « méthode de la plaque chaude », de la « sonde thermique », de la « boîte chaude gardée », par le contrôle de performance en conditions réelles, par modélisation, ou encore par thermographie infrarouge des murs.
Alors qu’un isolant conventionnel peut risquer de se tasser dans le temps, de laisser des vides d’air et créer ainsi des ponts thermiques non négligeables, la botte de paille employée dans des murs autoportants n’aura pas ce problème. Le mur entier étant constitué de l’isolant et qui plus est, déjà compressé à son maximum lors de la mise en œuvre, aucun vide d’air n’apparaîtra.
Le CSTB a par exemple obtenu des résultats sur un mur en ossature bois de 36cm d’épaisseur, isolé en paille, et enduit à la chaux. La résistance thermique (R) obtenue est de 4 m².K/W. Le CSTB luimême explique les différences obtenues par la présence de l’ossature bois et par le remplissage avec du mortier de chanvre des interstices entre les bottes. Le conductivité thermique (λ) obtenue serait alors plus proche de 0,095W/(m.K)105.
Gardons néanmoins à l’esprit que la performance générale du bâtiment dépendra également de l’isolation au niveau du sol, de la toiture et de la gestion de toutes les
104 [DEBOUTER2009] p.227 105 [DEBOUTER2009] p.227
50
Ce résultat se rapproche de celui faisant foi aux Etats-Unis, effectué en 1998. Le mur testé est un mur précontraint de type Paille Porteuse, constitué de petites bottes posées à plat, et donc d’une épaisseur de 46cm à laquelle on ajoute celle des enduits ciment-sable. La résistance thermique obtenue est alors de 4,8 m².K/W, le lambda serait alors de 0,099W/(m.K)106.
CHALEUR SPÉCIFIQUE PORTEUSE
DE LA PAILLE
La chaleur spécifique (C, Cp ou s), également appelée chaleur massique ou capacité thermique massique, caractérise l’aptitude de la matière à emmagasiner une certaine quantité de chaleur quand sa température s’élève d’une certaine quantité. En 2013, le RFCP a demandé au LNE (Laboratoire National de métrologie et d’Essais) de tester deux échantillons de 50mg de paille compressée afin de déterminer leur capacité thermique massique (Cp) entre 23°C et 50°C109 sur deux cycles (avec 4 heures d’écart entre les mesures).
Cependant, en 2011, pendant la rédaction des Règles Pro Paille, le CSTB luimême confirmait que les valeurs à prendre en compte pour les études thermiques sont celles indiquées dans les règles TH-Bât107. André De Bouter nous rapporte les valeurs suivantes108 :
• À T=23°C, les résultats sont 1540 et 1558 J.kg-1.K-1 en cycle 1, et 1338 J.kg-1.K-1 en deuxième cycle.
Petites bottes de paille « produits manufacturés à base de fibres végétales »
• À T=50°C, les résultats sont 1911 J.kg1 .K-1 en premier cycle, et 1618 J.kg-1.K-1 en deuxième cycle.
- masse volumique de 60 à 200 kg/m3 - conductivité thermique λ = 0,065 W/(m.K)
La moyenne serait donc de 1479 J.kg-1.K-1 à 23°C et 1765 J.kg-1.K-1 à 50°C.
Grosses bottes de paille « paille comprimée » ou panneaux de paille industriels
Avec une incertitude relative à 4% :
- masse volumique de 300 à 400 kg/m3
• À 23°C : la capacité thermique serait comprise entre 1420 et 1538 J.kg-1.K-1
- conductivité thermique λ = 0,12 W/(m.K)
• À 50°C : la capacité thermique serait comprise entre 1694 et 1836 J.kg-1.K-1
Ainsi la valeur réglementaire en France de la conductivité thermique (λ) est 0,065 W/(m.K) quel que soit le sens de la fibre et est celle que l’on fournit actuellement aux bureaux d’études.
D’après Dupeux, le béton possède une capacité thermique massique (Cp) de 3300 J.kg-1.K-1 tandis que celle du bois serait comprise entre 1600 et 1700 J.kg-1.K-1 110. Un pisé à 2000 kg/m3 aurait pour sa part un Cp = 1800 J.kg-1.K-1 111.
En calculant les résistances thermiques (R) obtenues en fonction des conductivités thermiques (λ) obtenues dans différents pays (annexe 07), on remarque que presque toutes les combinaisons (sens de pose, densité, taille des bottes) obtiennent des valeurs de résistance thermique égales ou supérieures à 5m².K/W (valeur préconisée par la RT2012).
Les valeurs trouvées pour la paille seule seraient donc plus proches de celles du bois que de celles du béton. Mais c’est sans compter la capacité thermique massique de ses enduits de terre qui doivent jouer un rôle non négligeable dans la capacité des murs en Paille Porteuse à emmagasiner de la chaleur.
106 [DEBOUTER2009] p.222 107 [DEBOUTER2009], p.228 108 [DEBOUTER2009], p.229
109 [LNE2013] 110 [DUPEUX2004] p.124 111 [WIKIPEDIA_web_TerreCrue]
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En conclusion, ces valeurs de conductivité thermique, de résistance thermique, de coefficient de transmission thermique et de chaleur spécifique importent sur la qualité du matériau et donc sur la qualité finale du bâtiment. En Paille Porteuse, les ponts thermiques sont moins nombreux (pas d’ossature bois) et les ouvertures souvent concentrées sur la paroi la plus exposée au soleil. Cet ensemble de trois murs structurels (en U) forme un complexe dont les déperditions de chaleur sont moindres si la construction est correctement réalisées.
Coupe sur mur en Paille Porteuse employant des pieux liant les rangées de bottes
© StrawWorks
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PARTIE II
2.5. DES TECHNIQUES DE MISE EN OEUVRE VARIÉES DIFFÉRENTES MISES PAILLE PORTEUSE
EN
ŒUVRE
Des tiges rigides placées à l’extérieur des bottes (placées en symétrique par rapport à l’axe du mur, et liées deux à deux par des ficelles) amélioreraient par contre sensiblement la rigidité du mur114.
EN
• À plat ou sur chant ? Les essais à plat ou sur chant ont donné des résultats concluants dans les deux cas, bien que légèrement meilleurs dans la position à plat. L’élancement du mur préconisé est le même qu’en maçonnerie, c’est-à-dire une hauteur inférieure ou égale à 6 (ou 7) fois l’épaisseur112. En suivant une règle de 1 pour 6, une botte posée à plat aboutit à une épaisseur de paroi de 46cm et donc à une hauteur de mur d’au maximum 276cm. Une botte posée sur chant donne une épaisseur de mur de 36cm et donc une hauteur maximale de 216cm. Ces deux valeurs sont comprises dans les hauteurs moyennes de logements, mais on préférera un mur dont les bottes sont posées à plat, laissant plus de champ d’action dans la conception (sous-plafond, gaines techniques, plancher, etc..).
Pieux en bois fixés dans la lisse basse
© charpentejuls.blogspot.fr Pieux en bois fixés dans les rangées de bottes
La disposition à plat permet plus facilement l’obtention de mur courbes. Une découpe de la botte pour l’inclusion d’un poteau (montant de fenêtre par exemple) se fera également plus facilement avec ce type de pose et le mur pourra être plus haut. Le seul désavantage de la pose à plat réside dans les qualités isolantes du matériau botte de paille. Mais compte tenu des valeurs de résistance thermique obtenues précédemment, cet argument ne va pas être déterminant.
© paillenthese.blogspot.fr Pieux en bois enfoncés à travers la lisse haute
• Insertion de broche ? Les premiers codes sur la construction paille aux Etats-Unis recommandaient l’emploi de pieux embrochés dans les bottes, ou fixés de part et d’autre du mur. Les fers à béton recommandés à l’époque sont désormais en voie d’abandon113. Il s’est en effet avéré que ce type de matériau pouvait créer des points de condensation, et donc un risque de pourrissement de la paille. Aujourd’hui les professionnels s’accordent à dire que cela apporte peu à la structure.
© Rae Parkinson
112 [FLOISSAC2012] p.63 113 [FLOISSAC2012] p.65
114 [DEBOUTER2009] p.90
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• Doit-on pré-contraindre les bottes ?
terme de temps et dangereuse pour les murs qui, n’étant pas protégés, peuvent subir des dégâts dus aux conditions climatiques. De plus, elle est techniquement difficile à réaliser en évitant les tassements différentielles du bâtiment.
Le phénomène de tassement ne dépend que partiellement du module d’élasticité des bottes. La compression initiale des bottes et la compression de l’espace entre chaque botte est déterminant. Un mur d’une même hauteur initiale (2,5m) peut se tasser de 5 à 7 cm dans le temps ou ne pas se tasser du tout suivant la densité des bottes employées et leur mise en œuvre115. La précontrainte du mur en Paille Porteuse est intéressante afin d’éviter les fissures dues à une application d’enduit avant le tassement finale de la paille.
Le phénomène de tassement naturel est long. Une précontrainte manuelle ou mécanique rigidifie l’ensemble du mur et offre un bon support d’enduit plus rapidement. La qualité de l’enduit n’est pas à négliger au regard de sa fonction de voile contreventant. Plusieurs techniques ont été employées comme l’emploi de câble en acier galvanisé tous les 60 à 120cm, ou de sangles. L’acier ne réagit pas bien à l’enduit et des risques de rouille sont toujours présents. On préfère donc aujourd’hui l’emploi de sangles grosses charges.
Certains architectes et ingénieurs ne contraignent pas toujours leurs murs. C’est le choix qu’ont fait Werner Schmidt et Peter Braun, références de l’architecture en paille en Suisse. Ils emploient généralement de grosses bottes de paille dont la masse volumique est naturellement comprise entre 150 et 160 kg/m3. Un mur de ce type mettra environ 3 mois116 à atteindre son tassement final sous le poids de la toiture, et des étages supérieurs.
Tassement d’un mur en petites bottes par des sangles (bâtiment de Barbara Jones)
Dans le bâtiment de 3 niveaux que le duo suisse à réalisé à Graun, en Italie (voir annexe 08 et Partie III), le tassement naturel observé à la fin de la première phase de chantier, soit après 30 jours, allait de 6% (au RDC) à 3% (à R+2) de la hauteur totale de chaque étage117. Ce bâtiment est construit en grosses bottes de paille (120 x 80 x 250cm) posées à plat. Les bottes les plus basses subissent naturellement un tassement plus important que les autres. Après 2 mois, des charges sont placées à l’intérieur et sont déplacées au fur et à mesure afin d’éviter un tassement différentiel général du bâtiment et pour maintenir les planchers horizontaux. Au bout de 3 mois, le tassement uniforme final de l’édifice est obtenu et des pièces rigides viennent reprendre les efforts horizontaux, verticaux et de cisaillement.
© Rae Parkinson
Tassement d’un mur en grosses bottes par pose de charges (ici la toiture)(bâtiment de Werner Schmidt)
Cette démarche est unique en Paille Porteuse, et concerne un bâtiment à système structurel hybride, en R+2. Un bâtiment de plein pied ou de seulement 2 niveaux ne nécessite pas toute cette logistique. Les tassements naturels seront aussi long à obtenir mais bien plus facilement uniformes. Mais cette technique est contraignante en
© extrait du film [SNEL2015]
115 [DEBOUTER2009], p.91 116 [FLOISSAC2012] p.117 117 [FLOISSAC2012] p.117
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• Quel rôle joue l’enduit en Paille Porteuse ?
Application de la barbotine: création d’une interface enduit-paille d’environ 1,5cm
En Paille Porteuse, l’enduit devient structurel. En terre, en terre fibrée, en chaux, en plâtre, en béton projeté, en ciment, en ciment-chaux, armés ou non, l’enduit peut être réalisé de nombreuses façons. Le choix se fera au cas par cas, en veillant à suivre les prescriptions des Règles Professionnelles paille concernant les coefficients de diffusion à la vapeur d’eau. Le complexe formé enduit-pailleenduit est presque comme un panneausandwich. En cas de contraintes importantes et soudaines (tornades, séismes, etc..) la rigidité de l’enduit sera secondée par la ductilité du matériau paille et sa forte capacité à absorber l’énergie.
© Laure Gadret Application de la première couche d’enduit (de 3 à 5cm)
D’après Peter Braun, “une part d’irrégularité des bottes est souvent sousestimée [...], on oublie généralement que la pénétration de l’enduit dans la paille est d’environ 1à 1,5cm. Cette couche d’interface entre la paille et l’enduit a des caractéristiques de résistance aux charges plus fortes que l’enduit seul”118. Cela rend l’enduit à la fois plus armé et plus ductile. © Cédric Hamelin
Le travail d’analyse des études précédentes est désormais essentiel. C’est dans ce but que Gilles Forêt, chercheur au laboratoire Navier à Paris Est, issu de l’école de Ponts de Paris, Cédric Hamelin, Architecte de l’agence architecture BOHA, membre du RFCP, et Myriam Olivier, chercheuse au Centre d’Études Techniques de l’Équipement se sont associés. Ils nous permettent de faire le lien entre les différentes études sur le comportement de la paille et sur celui des enduits..
Constitution d’un mur en Paille Porteuse (épaisseur finale d’enduit comprise entre 5 et 10cm)
Les enduits a base de terre sont préconisés en paille porteuse, bien qu’ils aient une résistance plus faible. En l’absence de ciment ou de chaux, les enduits ont une
© [FORÊT2013]
118 [FLOISSAC2012] p.114
© [FLOISSAC2012] p.114
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résistance à la compression allant de 0,1 à 1MPa. En présence de liant (ciment, chaux) la résistance en compression peut aller jusqu’à 2,5MPa.
RÉSISTANCE DE LA PAILLE PORTEUSE AUX DIFFÉRENTES CHARGES La Paille Porteuse, un ensemble de matériaux. En construction, le tout est plus solide que la somme des parties.
La résistance en traction est de l’ordre de 10% de la valeur obtenue en compression. Si les enduits sont fibrés cette valeur sera plus grande, mais l’ajout de fibre fait diminuer le module pseudo-élastique de l’enduit (avec liant ou sans). La résistance au cisaillement est 10 fois plus importante avec des fibres (on passe de 0,05MPa à 0,5 Mpa)
La botte de paille est une sorte de brique, souple, hirsute, recouverte d’une peau fine (l’enduit) dont la botte de paille est en quelque sorte tributaire. Particulièrement dans le cas de murs suivant les techniques GREB, CST, et Paille Porteuse. La botte de paille est un nouvel élément structural qu’il faut apprendre à connaître.
Les enduits les plus résistants sont ceux au ciment, mais ils présentent de gros désavantage en termes de perméabilité à la vapeur d’eau et leur grande rigidité entraînent parfois des ruptures et fissurations brutales et prématurées. Des enduits terre-plâtre sont étudiés actuellement.
Les ingénieurs tentent parfois de comparer, à tort, le complexe pailleenduits aux voiles minces de béton, ou aux panneaux à revêtement travaillant. Un mur autoportant en paille enduit est proche des panneaux-sandwichs, mais est plus complexe que cela et constitué de matériaux aux propriétés inconnues. Les enduits employés sont de qualité variable, armés ou non. Le comportement de l’ensemble de la paroi est régi par les liaisons existant entre les différents éléments du mur. Le tout forme un complexe difficilement modélisable. C’est cependant ce que s’emploient à réaliser plusieurs groupes de recherche à travers le monde depuis une vingtaine d’années.
CHARGES VERTICALES Les sollicitations de charges (liées au poids de l’édifice, des occupants, du mobilier, et de son contenu), les sollicitations climatiques (vent et neige sur la toiture), et les sollicitations structurelles exceptionnelles (tels que les séismes) ont un impact sur la conception des bâtiments. Un bâtiment en paille porteuse peut-il répondre à ces exigences ? Le comportement d’un mur face à des charges se caractérise par deux phases : la phase élastique et la phase plastique. En phase élastique, un corps revient toujours à sa forme initiale. Lorsque la déformation devient irréversible, le corps étudié est passé en phase plastique. Un mur en Paille Porteuse semble avoir une phase élastique plus importante que de nombreux complexe structuraux. 56
La première tentative de modélisation structurale d’un mur en Paille Porteuse date de 1996. Employant le modèle de flexion pure des panneauxsandwichs pour le chargement hors plan, le modèle n’a pas bien fonctionné. Depuis, de nombreux essais ont été réalisés et nous permettent de mieux comprendre les propriétés des matériaux employés et d’un mur autoportant en paille. On se rend alors compte de l’importance de la longueur des brins, du type de céréale employé et par extension de l’adhérence des brins au sein de la botte, de leur résistance à la traction, mais aussi du taux d’humidité des bottes et de l’orientation des brins.
Nombreux sont les essais répertoriés depuis 1995, André de Bouter nous en rapporte pas moins de 18 entre 1995 et 2005120. On constate que les défaillances les plus fréquentes sont souvent dues à des problèmes de conception, ou de mise en œuvre de l’enduit. De nombreux facteurs peuvent varier dans un même projet, mais deux sont particulièrement importants: • les enduits (leur résistance, leur épaisseur, leur régularité, leur rigidification par treillis, leur qualité d’adhérence à la paille, leur jonction avec les lisses) • la qualité des bottes
Lorsqu’une charge est appliquée dans le sens vertical sur un mur en paille porteuse, celui-ci peut se déformer de plusieurs façons.
On peut contrôler quasiment tous ces paramètres, à condition d’être très attentif à la conception et à la réalisation (des détails particulièrement). Une méthodologie simplifiée de dimensionnement des murs porteurs en botte de paille est en voie de réalisation.
On observe 5 types de dégradations du mur119 : 1 un voilement général du mur (si la charge appliquée est excentrée)
Pour calculer la charge maximale admissible (Cadminissible en kN) de notre mur en Paille Porteuse, il faut considérer les enduits comme des voiles porteurs fins et connaître leurs qualités d’adhérence et de résistance à la compression (ƒc’), et évidemment bien connaître ses bottes121.
2 un voilement local (dû à une adhérence trop faible de l’enduit, à un treillis mal fixé ou une surface trop irrégulière du mur) 3 un écrasement (souvent localisé au niveau des liaisons, il est dû à une mauvaise conception ou à un problème de dimensionnement)
Cadmissible = ƒc’ . (Ap) / (FS)
4 un glissement (l’enduit glisse par dessus une des lisses dû à un déplacement d’un treillis mal fixé)
Cadmissible exprimé en kN FS (Factor of Safety) étant le coefficient de sécurité appliqué, sa valeur doit être choisie par le concepteur au regard des autres paramètres influençant la qualité des enduits et des bottes de paille. Traditionnellement ce coefficient est de 4 pour les murs porteurs.
5 un écrasement de l’âme (si seule la paille transfert les efforts, celle-ci risque de s’écraser, d’où l’importance des enduits)
ƒc’ étant la résistance à la compression de l’enduit. ƒc’ = ɛ.E’compr ,
ɛ représentant la déformation relative de l’enduit en compression (s’exprime en %) E’compr désignant le module d’élasticité compression de l’enduit sec (en Mpa).
en
Ap est l’aire de la section transversale de l’enduit (en m²)
© [DEBOUTER2009]
120 [DEBOUTER2009] p.99-110 121 [DEBOUTER2009] p.111
119 [DEBOUTER2009] p.97
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Les valeurs obtenues par calcul semblent cohérentes au regard des nombreux tests effectués depuis 1995. Actuellement, le code californien (Health and Safety Code n°18944) limite la charge verticale admissible à 11,7 kN/m sur des murs enduits à la chaux ou à un mélange ciment-chaux.
ESSAIS AU FLUAGE Des essais au fluage ont également été menés. Le tassement de la paille a été constaté dans tout type de construction en paille. Ce tassement peut être compris entre quasiment 0% de fluage et quelques % suivant les bottes employées et les charges appliquées123. Le fluage est le tassement d’un matériau obtenu après plusieurs mois ou plusieurs années (suivant la densité initiale), tandis que le tassement initial est dû à la compression qu’on impose au mur lors de la mise en œuvre.
Beaucoup d’études traitent de la résistance de l’âme en paille seule. L’essai le plus complet ayant été celui de 1999, à l’Université du Colorado, aux Etats-Unis. J. Ruppert et M. Grandsaert étudient 3 types de murs en paille d’orge. La charge ultime la plus faible ayant été obtenue était de 47 kN/ m122. Le Cadmissible du code californien est bien 4 fois moins grand que la valeur mesurée. L’application d’un coefficient 4 de sécurité semble raisonnable.
En paille porteuse, la précontrainte permet de supprimer les espaces entre chaque botte de paille et entre chaque rangée. Le fluage final, bien qu’il soit moindre en paille porteuse, ne sera mesurable qu’une fois le fluage terminé.
Si les bottes sont de mauvaise qualité ou pas assez denses, ou si l’enduit semble mal réalisé, ce coefficient de sécurité sera plus élevé.
Le tassement observé pour un bâtiment d’un seul niveau est généralement de moins de 2% de la hauteur des bottes124. Mais cette valeur peut être plus importante (cf Partie III). La hauteur finale du mur varie en fonction de ce tassement. Mais si un autre type de parement, rigide, est appliqué en plus de l’enduit (un bardage par exemple), les dimensions des plaques, ou des tasseaux, ne seront connues qu’une fois le fluage final atteint.
Si d’autres matériaux reprennent en partie les charges, et si les bottes employées sont plus denses et plus large, se coefficient peut diminuer (cf Partie III)
© [FORÊT2013] 123 [DEBOUTER2009] p.113 124 [FLOISSAC2012] p.63
122 [DEBOUTER2009] p.106
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CHARGES HORIZONTALES
Essai au fluage
Deux charges horizontales dynamiques sont souvent prises en compte : l’impact d’objet, dû à des vents violents, et les secousses sismiques. Le vent est la charge horizontale hors plan la plus fréquente en construction. La poussée du vent provoque en général des désordres sur la structure dans sa globalité et rarement sur le mur seul, sauf si celui-ci n’est pas contreventé. Le calcul d’une force variable comme l’est celle du vent est finalement simplifié en considérant cette force comme uniforme.
© serge bonnardon
Des essais en laboratoire ont été effectués depuis 1996 pour vérifier la tenue des murs en botte de paille enduits126. Cela a également été vérifié empiriquement. En effet, certaines constructions aux Etats-Unis ont résisté à des tornades127.
Essai au cisaillement
Des ingénieurs ont mis en place des essais (objet (poutre en bois) projeté à 160 km/h perpendiculairement au mur128) permettant de simuler les impacts occasionnés lors de tornades ou d’ouragans. Malheureusement les rapports d’essais ne donnent pas toutes les informations qui permettraient une comparaison aux comportements in situ. Le type de céréale et surtout les dimensions du treillis employé et la qualité de séchage des enduits manquent cruellement.
© [FORÊT2013]
ESSAIS DE CISAILLEMENT Il existe peu d’étude de cisaillement de l’interface paille-enduit. La photo ci-dessus montre deux petites bottes collées par un enduit. Trois vitesses d’essai ont été appliquées. L’interface paille-enduit subit est endommagée mais ne subit aucune rupture brutale.
L’étude du comportement des murs soumis à un chargement hors plan a permis certaines observations. La première fissure apparaît au moment du changement de mode de la paroi (du mode non fissuré au mode fissuré). Celui-ci arrive bien au-delà des charges de service tolérées, mais pourrait néanmoins occasionner des désordres si le mur est sous-dimensionné ou si le mur subit de fortes secousses sismiques. Dans les deux cas, les fissures sont des risques très importants d’infiltration d’eau dans les parois.
Les réactions observées doivent être quantifiées et modélisées afin de gérer les points singuliers d’une construction.125
En zone sismique, l’emploi d’un treillis est fortement recommandé ainsi qu’une adhérence parfaite à la paille. Les premières fissures apparaissent quand
125
126 DE BOUTER, 2009, p.118 127 FLOISSAC, 2012, p.64 128 [DEBOUTER2009] p.132
[FORÊT2013]
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les contraintes dans la face du mur tendu dépassent la résistance à la traction de l’enduit. Encore une fois, c’est la qualité des enduits qui est primordiale.
les unes de autres ainsi qu’éloignées des angles de l’édifice afin de ne pas fragiliser la tenue globale de l’édifice.
En système parasismique, on souhaite obtenir souplesse et ductilité afin de guider les efforts vers les liaisons ou vers des éléments qui peuvent s’étirer afin d’absorber l’énergie de la secousse sans s’effondrer.
Maquette en Paille Porteuse, échelle 1, soumise aux tests de résistance aux séismes (projet PAKSBAB)
Des renforts horizontaux peuvent être mis en place à raison d’une entretoise en OSB toutes les 2 ou 3 rangées de bottes, par exemple. Ces planches sont conçues au cas par cas, incluant des réservations pour les montants des différentes baies prévues dans le bâtiment. Les renforts verticaux seront les pieux liants le rangées de bottes, le treillis fixé avant d’enduire, les sangles ou encore des tiges liées deux à deux à travers le mur.
© University of Nevada Reno [YOUTUBE2010]
L’Université du Nevada a effectué sous la direction de Darcey Donovanen, en 2009, un test de sismicité élevé sur un mur en paille129. Les résultats ont été probants et montrent un bâtiment qui ne s’effondre pas malgré l’intensité de l’énergie à absorber. La capacité d’absorption de la paille et son élasticité en compression ont largement participé à la solidité de l’édifice. L’enduit réagit aux séismes en se fissurant et en s’écrasant mais la structure ne présente pas de risque d’effondrement, même à la fin de la séance de test. En zone à risque sismique élevé, le treillis doit recouvrir complètement les faces externes et internes du mur. On prendra garde à permettre un cheminement continu des charges de la toiture jusqu’aux fondations, assurant un chaînage des différents éléments de la structure. Comme l’écrit Luc Floissac , « la charpente du toit qui vient reposer sur ce type de mur est dans l’idéal symétrique et répartit les charges équitablement. Une toiture asymétrique est bien plus complexe» 130. Encore une fois ce sont les choix de conception qui permettent de bons résultats (répartition la plus uniforme possible des murs extérieurs en bottes de paille, respect des proportions entre longueur du mur et ouvertures, trumeaux pensés en conséquence). Les baies devront être suffisamment espacées 129 voir vidéo [YOUTUBE2010] 130 [FLOISSAC2012] p.63
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modélisations doivent être réalisés. À chaque site et projet correspondront un ou plusieurs types de mur. La fonction du bâtiment, sa forme, les envies architecturales, les risques sismiques, le climat, influenceront ces choix.
CONCLUSIONS STRUCTURELLES Un mur en Paille Porteuse possède une résistance et un comportement qui dépendent de six facteurs principaux, résumé par André de Bouter131 :
Aujourd’hui le conservatisme du monde du bâtiment préférera souvent des murs à ossature bois remplis de paille à la technique Nebraska avec des murs en bottes de paille autoportants. La Paille Porteuse n’est autoportante et contrevenante qu’en R+1 jusqu’à présent. Le R+2 étant atteint par des systèmes hybrides ingénieux, mais comme le dit l’ingénieur Peter Braun luimême,« Les méthodes de calcul prédictif relèvent encore du domaine expérimental, du « bricolage scientifique empirique » 132.
• raideur et résistance des lisses basses et hautes • attaches servant à fixer l’armature de l’enduit à ces éléments de structure (lisses) • raideur de la pile de bottes de paille • résistance et raideur de l’ensemble armature-enduit • fermeté du support en parties haute et basse de l’enduit (au niveau des lisses)
L’ossature bois permet plus de fantaisie architectural et accepte plus facilement des transformations après construction. En cas de dégâts des eaux une paroi en ossature bois sera parfois plus facile à réparer. En outre, la frilosité des assureurs, des banques et des décisionnaires vis-à-vis de la Paille Porteuse décourage souvent les constructeurs, qui se reportent sur un type de construction connu et validé par tous.
• compétence et soin apporté à la conception, à la réalisation des travaux et au séchage de l’enduit
Le dimensionnement d’un bâtiment en Paille Porteuse n’échappe pas à la règle de base en construction pour mener à bien une étude technique : le bon sens. Désormais les tests à mener pour étudier la Paille Porteuse ne servent plus à répondre aux grandes questions populaires : Ce bâtiment risque-t-il de brûler ? Risquet-il de s’effondrer en cas de tempête ou de séisme ? Est-il thermiquement et phoniquement intéressant ? Comment réagit-il à l’humidité ?
La Paille Porteuse peut être préférée à l’ossature bois pour plusieurs raisons. La diminution des dépenses en bois serait un premier argument. Ce type de construction peut être plus abordable en autoconstruction et ce, si la forme du bâtiment reste simple. Le fait de ne pas avoir d’ossature bois porteuse permet de ne pas forcément faire appel à un charpentier sur les phases de chantier propres à l’édification des murs porteurs. Dans les régions pauvres en bois, l’emploi de ce type de structure est particulièrement intéressante. De petites surfaces de bâtiments en paille porteuse sont plus rapides à construire qu’en ossature bois. Cet argument pourrait dans les années à venir intéresser fortement l’habitat d’urgence à travers le monde. Déjà au Pakistan, un programme d’aide à la reconstruction fonctionne depuis 2006 (voir Partie III). La Paille Porteuse aurait une ductilité et une absorption de l’énergie plus importante qu’une ossature bois sous des charges sismiques dynamiques.
Ces questions ont déjà largement été étudiées et la légitimité de la paille en construction vérifiée. Les tests actuels cherchent désormais à améliorer cette technique constructive, au même titre que les recherches sur d’autres types de structures (béton, bois, bambou métal, etc...). Les essais en laboratoire et les savoirs empiriques ne peuvent que travailler ensemble vers l’amélioration d’un système structurel séculaire. Les types de murs en paille en usage aujourd’hui sont très nombreux et certaines techniques sont actuellement écartées. La technologie de la construction en Paille Porteuse est en plein développement mais pour avancer, des tests en laboratoire et des 131 [DEBOUTER2009] p.153
132 [FLOISSAC2012] p.63
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PARTIE III
TRADUCTION ARCHITECTURALE D’UNE TECHNIQUE CONSTRUCTIVE
© Werner Schmidt
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PARTIE III 3.1. LA FORME ARCHITECTURALE CONTRAINTES ET ATOUTS
PAR
La botte de paille est un matériau dont les dimensions varient en fonction de la botteleuse employée. Aujourd’hui 90%133 des bottes de paille employées en construction sont fournis par les agriculteurs présents à moins de 50km du site de construction. La conception du mur et la conception du bâtiment sont fonction des bottes choisies.
LA
TECHNIQUE
CONSTRUCTIVE,
très contents . Elle était, à l’époque de la construction en 2010, étudiante en DUT Génie Civil et effectuait un stage au RFCP. Aujourd’hui, Coralie Garcia s’est spécialisée en performance énergétique et confort de l’habitat à Toulouse et conseille les autoconstructeurs, les aide dans les démarches d’organisation de chantier et de conception de leur habitat. Elle est co-présidente pendant quatre ans au RFCP. Forte de son expérience, elle est désormais coordinatrice du groupe de travail ITE (Isolation Thermique par l’Extérieur).
Les professionnels de la construction en paille que j’ai rencontrés sont unanimes : une maison pensée en auto-conception doit être la plus simple possible. A première vue, la technique Nebraska est facile à mettre en œuvre. Cependant, la conception dépend énormément d’un matériau nouveau dont les règles de mise en œuvre en tant qu’isolant sont les seules à avoir été publiées en France jusqu’à ce jour. Les professionnels travaillent actuellement à un guide des bonnes pratiques et enjoindront dans celuici les auto-constructeurs à faire preuve de prudence.
Le plan de la maison Garcia apparaît dans l’ouvrage de Luc Floissac. On note en effet une démultiplication des point durs. Cette maison comporte dix angles à gérer, autant de points où les efforts ne sont pas transmis de la même façon.
LA PAILLE PORTEUSE POUR DES FORMES SIMPLES La paille porteuse a ses limites, particulièrement quand il s’agit d’autoconstruction/auto-conception. Les charges étant reprises par un matériau inconnu des professionnels du bâtiment mais aussi des auto-constructeurs. Il faut souvent simplifier au maximum la forme pour éviter toute malfaçon.
Malgré un concept de base assez simple (deux U inversés), la répartition des charges s’effectue entre dix angles et 9 parois, présentant des ouvertures. Le contreventement Est-Ouest n’est assuré que par deux parois. Pour la partie habitée, 3 murs se repartissent les charges : le mur « nord », le mur « est » et le mur de séparation avec le garage/ atelier à l’ « ouest ». Ce troisième mur récupère également les efforts appliqués sur la partie garage. La partie garage travaille également à travers trois parois, les deux autres étant celles au sud et à l’est. La paroi « sud » de la partie habitation est visiblement trop ouverte pour reprendre des efforts de contreventement qui lui sont appliqués. Ces deux U inversés fonctionnent ensemble et les enduits appliqués sur les murs ont été renforcés par un treillis à mailles carrées afin d’augmenter leur résistance aux efforts de cisaillement.
Susanne Körner et Tilman Schäberle sont un couple d’architectes et d’autoconstructeurs, leur conseil aux autoconstructeurs : « Il faut au minimum participer à un chantier en paille avant de se lancer dans l’autoconstruction et participer à toutes les étapes du chantier. »134 Ce n’est que comme cela que l’on peut se rendre compte de l’importance de chaque étape et de la complexité du tout. Dans un entretien téléphonique avec Coralie Garcia, celle-ci m’a confié que la forme choisie par elle et ses parents pour la maison familiale n’était pas le meilleur choix, même si aujourd’hui ils en sont
La toiture de cette maison est à une seule pente et végétalisée. Un unique pan de toiture est rare en Paille Porteuse. La
133 [FLOISSAC2012] p.22 134 [SNEL2015]
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Maison Famille Garcia
Maison Famille Garcia
© Luc Floissac © Coralie Garcia Maison conçue par Pascal Thepaut, à Trélivan, Bretagne
Maison conçue par Pascal Thepaut, à Trélivan, Bretagne
© Luc Floissac
© Luc Floissac Construction d’une Paillourte à Concoret, Bretagne
Modification d’une botte de paille pour architectures circulaires
© asso par nature Chambres d’hôtes en Paille Porteuse (Werner Schmidt)
© Rae Parkinson Chambres d’hôtes en Paille Porteuse, plan (Werner Schmidt)
© Werner Schmidt
© Werner Schmidt
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du bâtiment ne fait pas tout, il faut savoir donner de l’importance à des éléments qui amélioreront d’une autre façon l’espace de vie : une terrasse bien réalisée, une pergola, une orientation bien choisie.
répartition la plus homogène possible étant recherchée, on privilégie 4 pans de toiture ou 2. Dans une conception comme celleci, la répartition des charges de la toiture sera difficilement homogène dans tous les cas. Il faut concevoir les bâtiments avec précaution car à une plus grande échelle et avec une plus grande prise au vent, cela pourrait causer des problèmes structuraux importants. Il serait possible, même à cette échelle, d’observer des désordres non négligeables : voilement général du mur ou un écrasement au niveau des liaisons, entraînant la fissuration de certains enduits. Si des fissures apparaissent, elles devront être rebouchée rapidement.
En Paille Porteuse, une autre forme intéresse grandement les constructeurs. Un plan simplifié n’est pas automatiquement parallélépipédique. La stabilité du cercle est bien connue. Aujourd’hui, les autoconstructeurs emploient par exemple ce principe à travers la construction de « paillourtes », autrement dit, des yourtes en paille.
Nous pouvons lui comparer la maison de Pascal Thépaut, à Trélivan, en Bretagne. De forme plus simple, elle offre globalement la même surface habitable.
Que la forme de base soit parallélépipédique ou non, en forme de cercle ou non, pour un projet plus complexe, faire appel à des ingénieurs et architectes s’avère essentiel. L’architecte Werner Schmidt nous ouvre de nouvelles possibilités par son travail avec des grosses bottes de paille. Il parvient par exemple à appliquer le principe de plan circulaire en paille porteuse sur deux niveaux (voir aussi 3.2. et annexe 08). Ce cercle de 7,8m de diamètre est répété sur les deux étages. Une double hauteur centrale laisse la lumière de l’ouverture zénithale éclairer les deux niveaux (voir figure ci-après).
La forme globale en U de la maison assure une cohésion globale de l’ensemble. L’emploi de grosses bottes de paille, de 70cm par 120cm et de longueur variable, incite à une conception sobre. On observe que les ouvertures des deux chambres au nord ont été réunies en une seule trame non porteuse. Le mur « nord » n’a pas subi trop de percement, aucune baie ne se trouve trop proche d’un angle. Il a été conçu afin d’avoir des trumeaux suffisamment importants et peut continuer à remplir son rôle contreventant. Dans une maison en paille porteuse très ouverte à la lumière, la paroi « sud » est préférablement faite en ossature bois. Les poteaux peuvent reprendre les charges en cas de doute sur la capacité portante d’une trame.
Fort de son expérience, il met son savoir au service d’une autre architecte en Italie : Margareta Schwarz. Avec Werner Schmidt, ils utilisent la stabilité naturelle du cercle et du demi-cercle et l’associent à des parois rectilignes en paille porteuse. L’association de la courbe et de la droite leur permettent de construire des chambres d’hôtel d’une forme unique à l’aide d’une technique et d’un matériau récemment redécouvert.
Dans le plan de cette maison, des détails de conception des parois intérieures sont visibles . Ce choix, qui peut sembler minime, offre en réalité de la singularité aux espaces. Les deux cloisons courbes par exemple, renvoient sans aucun doute la lumière, et créent une ambiance propre à ses habitants.
La forme de base est donc un V arrondi. Cette forme est multipliée et offre ainsi deux façades radicalement différentes à cet ensemble de chambres d’hôtes.
Une conception simplifiée avec seulement quatre jonctions de mur à joints croisés fait gagner du temps, tant au moment de la construction ds lisses qu’à la mise en œuvre des bottes. La forme seule 67
LA PAILLE ARCHITECTURE L’ÉPAISSEUR
près de 2m40. Encore une fois, des poteaux en bois reprennent les charges de la lisse haute. La lisse et le plancher qui reposent dessus font à eux deux près de 30cm d’épaisseur. Dans l’espace de la cuisine (voir figure ci-contre) seul le faux plafond vient nous révéler ces informations structurelles. Il joue sur cette épaisseur et vient comme une trace marquer l’épaisseur réelle des murs et celle de la ceinture de bois. Dans ce bâtiment, des parois en bois à l’intérieur des murs reprennent les charges du bâtiment.
PORTEUSE, UNE QUI HABITE
Le fait de construire en Paille Porteuse nécessite de prendre en compte l’épaisseur du mur dans le dessin architectural. Un mur conventionnel fait entre 40 et 45cm, un mur en Paille Porteuse constitué de petites bottes posées à plat fait entre 50 et 55cm. Choisir de petites bottes de paille changera sensiblement notre rapport aux parois, mais construire avec de grosses bottes de paille le changera du tout au tout. La Paille Porteuse nous invite à habiter l’épaisseur, à la mettre en valeur.
Dans la maison construite à Glarus (en annexe08) l’architecte exacerbe le creusement. La baie est encadrée par une épaisseur conséquente de paroi, ce qui accentue le contraste entre la face du mur restant dans l’ombre et l’encadrement lumineux de la fenêtre. L’épaisseur de la paroi est habitée, elle est vivante. Ce travail peut être comparé à celui de Martin Rauch, maître en l’art de la terre pisée en architecture (voir figures ci-contre).
Dans les régions montagneuses et froides où travaille Werner Schmidt, l’emploi de grosses balles de paille se justifie. L’architecte choisit la pose à plat, obtenant alors des murs d’une épaisseur de 1m20. Pour anecdote, nous notons que dans l’un de ses projets, l’espace de transformation, de séchage et de stockage de plantes, à Densbüren, en Suisse (voir annexe 08), l’épaisseur de la paroi est telle que l’architecte peut venir encastrer un caisson de bois porteur, épousant la forme circulaire du plan (figure ci-contre). Il y glisse un cabinet de toilette,qui devient presque imperceptible de l’intérieur.
Le travail de l’épaisseur est très perceptible sur ces maisons constituées de grosses bottes de paille. Ce sera moins le cas avec l’emploi de petites bottes de paille, mais néanmoins, un travail est possible. C’est à nous de magnifier ces épaisseurs. En architecture, la massivité a toujours été symbole de force, de protection. Les architectures de terre, de béton, de pierre, savent en tirer profit et cherchent même à l’atteindre. La Paille Porteuse est une technique qui y mène. Sa massivité est essentielle tant structurellement que symboliquement.
Au-delà d’un emploi pratique de ces parois, Werner Schmidt sait faire disparaître, oublier l’épaisseur, ou bien en tirer partie en offrant de réels cocons à ses habitants. Pour les propriétaires de la BraunDubuis House (en annexe 08), l’architecte fait disparaître la paroi de paille (voir figure ci-contre). Les habitants ne ressentent pas l’épaisseur des murs de 1m20. La façade « sud » est une structure de poteaux porteurs en bois massif sur lesquels viennent s’appuyer deux poutres imposantes en bois, soutenant ainsi le plancher d’étage et la charpente de toiture. L’épaisseur peut disparaître au profit de la légèreté et de la lumière.
Mud Hall at Gund Hall, Harvard/GSD (Anna Heringer et Martin Rauch)
D’autres choix de conception et d’esthétique mènent parfois à un travail de l’angle de façon précise. La maison construite à Merenschwand en Suisse (en annexe 08) a cette particularité d’être ouverte sur la totalité d’une façade et dans ses angles sur
@Iwan Baan
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Espace de transformation, de séchage et de stockage de plantes, à Densbüren, Suisse (Werner Schmidt)
© Werner Schmidt
© Werner Schmidt Maison individuelle “Haus Braun-Dubuis”, à Disentis - Mustér, Suisse (Werner Schmidt)
Thermes de Vals, Suisse (Peter Zumthor)
© www.chronotes.net.jpg
© Werner Schmidt Maison individuelle, à Glarus , Suisse (Werner Schmidt)
Rauch House (Martin Rauch)
©Beat Bühler
© Werner Schmidt Maison individuelle et espace de concerts privés, à Merenschwand , Suisse (Werner Schmidt)
Station Fire, à Santo Tirso, Alvaro Siza
© Joao Morgado
© Werner Schmidt
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© Werner Schmidt
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PARTIE III
3.2. LA HAUTEUR EN PAILLE PORTEUSE LIMITÉE PAR SES CAPACITÉS STRUCTURELLES botte de paille est formée de galettes. Ces mêmes galettes sont formées de brins de paille toujours pliés dans le même sens. Le côté « plié » et le côté « coupé » de la botte de paille est inversé à chaque rangée. Les rangées de bottes de paille sont brochées les unes aux autres et la lisse haute, à laquelle sont également fixés des pieux, vient finir ce travail de lien. Les montants des baies, comme dans toute construction en Paille Porteuse, coulissent à travers la lisse haute. Les mêmes opérations sont réalisées au second niveau.
LE R+1 DÉJÀ VALIDÉ PAR L’EXPÉRIENCE Actuellement, la construction en Paille Porteuse est courante sur du R+1. Dans d’autres pays, cette technique est même validée par les autorités délivrant les permis de construire, notamment aux EtatsUnis et en Grande-Bretagne.
Charpentier de formation, Barbara Jones est l’une des pionnières de la technique Nebraska. Sa connaissance en structure bois lui a permis de réduire toujours plus la quantité de bois utilisé sur chantier grâce à cette technique constructive. Sur son site internet sont référencées pas moins de 20 réalisations en Paille Porteuse. Depuis plus de 25 ans, Barbara Jones est convaincue par ce système. Son association de constructeurs en paille Straw Work (issue du bureau d’étude Amazonails) est une référence dans le milieu de la construction en paille.
Le bureau d’étude Straw Works a conçu en 2009 des logements collectifs en duplex à murs autoportants en paille, à Waddington en Grande-Bretagne (en annexe 08) (voir figure ci-après). Le bâtiment proposé par Jacob Wihan et Barbara Jones devait, à la demande du maître d’ouvrage, démontrer qu’il est possible de construire en employant presque exclusivement des matériaux bio-sourcés135. Ici, les fondations doublées reposant sur un lit de graviers sont composées à l’extérieur de briques de terre cuite et l’intérieur de plaques de verre cellulaire. Entre les deux, des granulats isolants recyclés viennent isoler les fondations. Ce sandwich fait la largeur du mur en bottes de paille, et supporte le poids entier de l’édifice. Cette technique serait courante en Angleterre, mais très peu connue en France. La lisse en bois en « échelle » repose sur ce soubassement, des pieux sont enfoncés dans chaque entretoise la constituant et les bottes viennent s’y embrocher. Une 135 [FLOISSAC2012] p.68
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Monter un bâtiment sur deux niveaux est plus long et le bâchage/ débâchage des murs plus compliqué. Travailler à l’abri des intempéries est alors essentiel. La technique que Barbara Jones applique à la plupart de ses chantier est ici employée de nouveau. Une grue vient déposer au dessus du chantier le plancher intermédiaire puis la charpente de toiture sur une structure métallique provisoire. En périphérie de cette structure métallique, des bâches sont également tendues136. Cette méthode permet de travailler sur le chantier à l’abri des intempéries.
bâtiment en paille porteuse. Cependant la toiture est ici portée par une structure métallique. Les murs ne portent que leur poids propre. Ces bâtiments ne sont pas les seuls à atteindre le R+1 en Paille Porteuse. Comme on l’a vu sur des bâtiments de plus petite dimension (voir III.1), la forme circulaire est tout à fait adaptée à cette technique constructive. L’architecte Werner Schmidt réemploie ce principe en proposant un bâtiment sur deux niveaux en grosses bottes porteuses(figure ci-contre). L’épaisseur des murs est ici plus conséquente mais il semblerait possible que cette forme architecturale puisse être construite avec des bottes de paille plus petites. Correctement liées entre elles, des petites bottes de paille pourraient tout à fait avoir la cohésion nécessaire pour reprendre les efforts liés à cette forme architecturale.
L’écocentre Pierre et Terre à Riscle en France, est lui aussi construit en Paille Porteuse sur deux niveaux137. Construits en grosses bottes de paille posées sur chant, les murs atteignent une épaisseur de 80cm à laquelle il faut ajouter celle des enduits. Le plancher intermédiaire est soutenu par les murs autoportants mais également par plusieurs poteaux et un mur en terre pisé. La charpente de la toiture, constituée de fermette, repose pour sa part uniquement sur les murs. Une autre particularité de la conception réside dans l’encastrement du plancher intermédiaire dans la lisse (voir figure ci-contre). La façade sud, très ouverte, est en ossature bois porteuse sur laquelle viennent se poser les allèges de fenêtres. Luc Floissac relève à juste titre la capacité isolante de ces parois : « durant la vague de froid de février 2012, le bâtiment a fonctionné sans chauffage malgré trois semaines consécutives de grand froid, avec des températures inférieures à -10°Cpendant plusieurs jours d’affilée »138. Un bâtiment en Paille Porteuse peut atteindre de grands volumes et offrir un espace confortable thermiquement et hygrométriquement.
La construction à étage doit être impérativement être conçue avec prudence. Heidi Snel, à travers son enquête sur les constructions en paille 139, nous rapporte les conseils de professionnels. Dirk Scharmer dont le rôle au FASBA est extrêmement important depuis plusieurs années (construction, expérimentation, tests en laboratoire) reste prudent et rappelle que les tassements différentiels doivent être calculés précisément. L’emplacement des menuiseries change la façon dont les efforts sont transférés.
Le bâtiment de Barbara Jones et de Jacob Wihan est celui qui maximise au mieux la petite botte de paille comme élément structurel. Les baies exposées au sud sont de petites dimensions contrairement à l’écocentre. La casse automobile construite en autoconstruction par l’entreprise DD auto’p à Moras-en-Valoire (figure ci-contre) (annexe 08) reste à ce jour le plus grand 136 [JONES2015] p.102-105 137 [FLOISSAC2012] p.92-95 138 [FLOISSAC2012] p.94
139 [SNEL2015]
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Logement collectif, à Waddington, GrandeBretagne (Straw Works)
© Straw Works
© Luc Floissac (source StrawWorks)
Écocentre Pierre et Terre, à Riscle, dans le Gers, France (Jean-Marc Jourdain)
© Pierre et Terre Espace de transformation, de séchage et de stockage de plantes, à Densbüren, Suisse (Werner Schmidt)
© Luc Floissac
© Werner Schmidt
© Werner Schmidt
Casse automobile, à Moras-en-Valloire, France
© Thibaut Degand
© Thibaut Degand
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L’INGÉNIERIE AU SERVICE PROJETS EN PAILLE PORTEUSE
permet d’atteindre le R+2.
DES
Des fondations solides, mais néanmoins basiques, sont mise en œuvre. Des longrines de 10cm de haut sont coulées tous les 50 cm et permettent de ventiler la dalle complexe qu’elles soutiennent. Cette dalle est en effet isolée en grosses bottes de paille. Sur les longrines sont disposées des planches sur lesquelles sont placées les bottes. En périphérie de ce premier platelage, une lisse de chaînage sera le support des murs en Paille Porteuse. Sur les bottes de paille sont placés les éléments d’un plancher contre-cloué. La dalle en chaux et terre cuite repose sur ce plancher de mur à mur.
Des bâtiments en R+1 sont donc possibles en Paille Porteuse mais l’architecture ne doit pas se cantonner à une technique constructive et c’est le croisement des savoirs qui améliore sans cesse la connaissance des bâtisseurs. Construire plus haut en Paille Porteuse est peut-être possible mais n’ayant pas d’exemple existant à donner, sera présentée ici une solution hybride trouvée pour parvenir à du R+2.
C’est un bâtiment conçu par Peter Braun et Werner Schmidt qui nous intéresse. L’Immeuble Fliri, à Graun, en Italie.
Le nombre de rangées de bottes de paille varie en fonction de l’étage. En effet, c’est au rez-de-chaussée que les charges seront les plus importantes. Les tassements mesurés à la fin du chantier sur ce niveau sont de l’ordre de 8% de la hauteur des bottes. Ainsi, au RDC 5 rangées de grosses bottes posées à plat sont empilées en quinconce. Au premier étage, 4 rangées sont empilées et au dernier niveau, les charges étant moins importantes, on ne place que 3 rangées, atteignant ainsi une hauteur de mur de 2m40 (2m30 environ à la fin du fluage). Une grande ouverture zénithale apporte beaucoup de lumière à ce dernier étage et la hauteur sous plafond est celle de la toiture en bois massif. Isolée en grosses bottes, la toiture isole complètement l’habitat malgré les chutes de neiges importantes de la région.
Werner Schmidt est né en 1953 et compte à son actif pas moins de 22 réalisations en paille et 11 projets non réalisés ou en cours de réalisation. Il obtient son diplôme d’architecte en 1978 à l’école d’Ingénieur de Winterthur. Spécialiste de la Paille Porteuse, il utilise en général de grosses bottes et n’hésite pas à tenter de nouvelles formes. Les réalisations audacieuses qu’il propose ne sont pas à la portée des auto-constructeurs. Elles permettent de vérifier que la paille n’a pas l’obligation de se cantonner à des formes simples si le travail de conception en amont est poussé en détails. Peter Braun s’est formé pour sa part à l’EPFZ (École polytechnique fédérale de Zurich) et il dirige désormais le Bureaux d’architecture et d’ingénierie Normal Office à Fribourg. Son frère est le propriétaire de la maison Braun-Dubuis, la première conçue en Paille Porteuse sur deux niveaux par le duo Schmidt-Braun, en 2002 (annexe 08). Heidi Snel dans son premier film était allée visiter cette première maison. Dix ans plus tard, elle filme les étapes de construction de l’immeuble de Richard Fliri et Yvonne Aschoff, conçu à nouveau par le duo architecte-ingénieur.
Des poteaux aux quatre coins du dernier étage servent de repères. Les murs en paille seront compressés jusqu’à atteindre l’exacte hauteur de ces poteaux. Comme expliqué précédemment (Partie III.4), des charges sont placées 2 mois après le début du chantier et déplacées au fur et à mesure afin d’éviter les tassements différentiels. Le tassement final des bottes varie de 4% à 8% de leur hauteur140. La dernière rangée de bottes qui initialement dépassait les poteaux de 10 à 15 cm atteint, après 3 mois, la hauteur des poteaux d’angle141 . La dernière lisse de chaînage y est fixée définitivement.
Construit à Graun en Italie, ce bâtiment est un système hybride employant les qualités structurelles de la Paille Porteuse, celles de plancher contreventant et de parois rigides insérées en seconde phase du chantier. Ce système complexe
Les charges climatiques sont très importantes (dûes à la neige et aux tempêtes notamment). Il faut ajouter à cela le poids 140 [FLOISSAC2012] p.117 141 [SNEL2015]
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de chaque plancher (dalle pleine en bois sur laquelle repose une chape et dont la finition est en terre cuite). Les cloisons des chambres sont en briques alvéolaires maçonnées et sur les 2 niveaux des murs de refend en ossature bois permettent de contreventer et de reprendre les charges, mais en ajoutent aussi. Les charges de service sont donc importantes.
Immeuble Fliri, à Graun, en Italie (Werner Schmidt)
Pour Peter Braun, dont les propos sont rapportés par Luc Floissac142, dans une construction de ce type, on s’appuie à un tiers sur l’expérience, à un tiers sur les calculs et à un tiers sur les réglages en fin de chantier. « Les méthodes de calcul prédictif relèvent encore du domaine expérimental, du « bricolage scientifique empirique »143 ». Le calcul est de la responsabilité de Peter Braun, mais c’est à l’architecte de corriger sur le terrain, surtout dans une expérimentation de cette envergure et destinée à être habitée.
© Werner Schmidt
L’analyse faite lors de la conception du bâtiment amène l’architecte et l’ingénieur à faire des choix structuraux : • Les cloisons sont des murs de refend afin d’éviter des déformations trop importantes dans les parties centrales des murs porteurs, dues aux ouvertures.
© Werner Schmidt
• Les encadrements des fenêtres sont renforcés. • La charpente de la toiture est liée verticalement aux fondations à l’aide de tirants métalliques allant des arbalétriers aux fondations, le long des murs. • Les sections de bois utilisées pour les lisses (bois collés 3 plis) sont importantes. • Les planchers s’appuient sur la totalité de l’épaisseur des murs (création de ponts thermiques). • Des cales en bois sont ajoutées sous les bottes du premier étage pour compenser le manque de hauteur
142 [FLOISSAC2012] p.112 143 [FLOISSAC2012] p.63
© Werner Schmidt
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Chronologie Simplifiée de l’immeuble Fliri (Werner Schmidt)
© Luc Floissac
© Luc Floissac
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Comme on l’a vu précédemment, le code californien limite la charge admissible à 11,7 kN/m, valeur qui correspond bien, après mesure, à un coefficient 4 de sécurité (voir Partie II.4) (la plus faible « charge ultime » obtenue à l’Université du Colorado en 1999 ayant été mesurée à 47kN/m).
par les encadrement de fenêtre renforcés et les cloisons centrales. Les planchers en bois massif redirigent les forces vers tous ces éléments et en particulier vers les angles, plus rigides. La somme des charges indiquées sur le schéma ci-contre, issue de l’ouvrage de Luc Floissac, est d’un total de 440 kN. Les cadres de fenêtres sont conçus pour supporter jusqu’à 170kN. Les charges arrivant dans chaque angle sont réparties à chaque fois entre deux baies et peuvent ainsi supporter jusqu’à 340kN. Si les murs de paille ou les enduits avaient une défaillance locale, ces cadres se mettraient en charges et pourraient reprendre la quasi totalité des charges.
D’après les calculs effectués pour l’immeuble Fliri, une charge de 4 tonnes est admissible pour un mur de 100cm d’épaisseur144, soit environ 40kN au mètre linéaire (le mur ici fait 120cm). En effet la modélisation effectuée par Peter Braun et son bureau d’étude montre que le mur reste stable jusqu’à 8 tonnes par mètre linéaire. En supposant que la charge ne devrait pas dépasser 4 tonnes, leur coefficient de sécurité est donc 2. Ce qui au regard des études menées au Colorado serait un choix osé si le bâtiment n’était qu’en Paille Porteuse.
Des calculs statiques ont été faits afin de prévoir le comportement du bâtiment durant trois phases du chantier distinctes. En effet, le poids propre du bâtiment se modifie lors de la mise en œuvre. La première phase dure un mois,, la structure principale est mise en place. Après 2 mois, la seconde phase consiste à gérer les tassements différentiels, à placer les pièces rigides structurelles (cloisons, encadrements de fenêtre, chapes). Après quatre 4 mois de tassement, les enduits sont appliqués et aident à stabiliser définitivement le bâtiment. La troisième phase est celle d’utilisation de l’édifice, après 4 mois de construction et de gestion des tassements. Les calculs de charge réalisés par Peter Braun sont pensés pour chacune de ces étapes de la vie du bâtiment.
Pour ce bâtiment complexe, la charge maximale supportée par la paille seule ,au RDC, serait de 69kN/m (les charges climatiques, propres au bâtiment et de service étant inclues), le risque de flambage étant situé à 80kN/m. Le schéma (figures du bas de la page ci-contre) représente en bleu les efforts de traction et en rouge les efforts de compression. On y remarque que les matériaux choisis sont fonction des efforts maximum à supporter. Ainsi, les encadrements de fenêtres et les cloisons du RDC seront bien plus solides qu’aux étages. Plusieurs facteurs influencent la capacité réelle de ce bâtiment. Tout d’abord, le module d’élasticité (E) employé pour calculer la charge maximale admissible est un peu plus faible que la réalité. Le calcul effectué a été fait sur un mur de 1m d’épaisseur alors que celui de l’immeuble Fliri était d’1m20. En outre, les angles du bâtiment sont plus rigides et les charges admissibles ne sont donc pas les mêmes sur chaque section verticale du bâtiment. De plus, les enduits et leurs capacités structurelles ne sont pas pris en compte correctement. Sur 1 à 1,5cm l’enduit pénètre dans la paille. Cette interface est plus résistante aux charges que l’enduit seul145 La transmission des efforts au niveau de la transition paille/enduit joue un rôle extrêmement important. Enfin, les charges verticales sont également reprises 144 [FLOISSAC2012] p.113 145 [FLOISSAC2012] p.114
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La gestion des tassements différentiels se fait à l’aide de plusieurs outils :
Ce bâtiment nous apprend que si nous souhaitons développer la construction en Paille Porteuse il ne faut pas être intégriste, il faut concevoir son bâtiment avec un maximum de ressources disponibles. La paille comme isolant n’utilise pas toutes les capacités structurelles de la paille mais la Paille Porteuse ne peut répondre à toutes les structures.
• Des étais mis en place en phase 1 sont réglés au bout de 30 jours et viennent accompagner ou guider les tassements. Leurs hauteurs sont réglées au fur et à mesure jusqu’à leur retrait définitif après 4 mois. • Des charges sont déplacées dans le bâtiment afin de maintenir l’horizontalité des planchers et faire ainsi en sorte de diriger les forces le plus uniformément possible.
Atteindre le R+2 en Paille Porteuse est difficile techniquement et prend beaucoup de temps. Les sections de bois employées pour répartir les forces sont plus que conséquentes. L’argument de la diminution de l’emploi du bois ne tient pas ici.
• Lorsque les pièces rigides sont placées (au début du troisième mois), le tassement final n’étant pas encore atteint des cales sont placées pour stabiliser ces pièces et permettre les descentes de charges.
La résidence Jules Ferry construite en 2014 à Saint-Dié-les-Vosges en France, atteint le R+7. Ce bâtiment est en caissons bois porteurs remplis de bottes de paille. Il bénéficie d’une excellente isolation et son système structurel permet la préfabrication en atelier ainsi qu’un montage rapide sur chantier.
Afin d’atteindre le R+2, il a fallu jouer avec une symétrie quasi parfaite de l’édifice. Ce système s’applique pour une forme carrée rigoureuse. De plus, pour ne pas perdre un seul m² du contreventement pris en charge par chaque plancher, l’escalier a été placé à l’extérieur de l’édifice. Dans un sens, cela permet une séparation nette de chaque niveau (chaque étage accueillant un appartement indépendant). Pour l’instant c’est à l’aide de système hybride que l’on monte plus haut.
La vocation de la Paille Porteuse estelle d’aller plus haut ?
Construit en 2008, Luc Floissac nous rapporte en 2012 que le bâtiment n’a subit aucune fissuration liée aux charges146. L’édification de cet immeuble de 3 niveaux a été complexe et longue. Elle a nécessité de nombreux calculs en bureau et un temps sur chantier très conséquent. Atteindre cette hauteur n’a été possible qu’avec une répartition extrêmement rigoureuse des charges et une symétrie parfaite de l’édifice. Sans compter le fait que les grosses bottes de paille posées à plat peuvent supporter jusqu’à 5 tonnes au mètre linéaire et que ce facteur a été déterminant. La technique Paille Porteuse seule n’aurait pas pu parvenir à ce résultat sans la reprise des charges par d’autres éléments structurels. Intégrer ces éléments dans la structure est plus qu’essentiel. 146 [FLOISSAC2012], p.118
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PARTIE III
3.3. LES CAPACITÉS STRUCTURELLES DE LA PAILLE PORTEUSE AU SERVICE DE L’ARCHITECTURE montagneuse de Azad Kashmir. Ces régions fortement exposées subissent aussi de grandes variations de température suivant les saisons. Les bâtiments doivent être efficace thermiquement et résistants structurellement., Concernant les matériaux locaux, les production de riz vont attirer l’attention de Werner Schmidt. Une grande quantité de paille de riz étant brûlée, Werner Schmidt propose de revaloriser ces déchets agricoles. Il conçoit un système de presse manuelle et dessine un prototype de maison employant un minimum de bois. Pour la pré-compression des murs, il propose un système de sangles de pré-compression simples en ficelles. Des bambous, liés 2 à 2 de chaque côté du mur viendraient renforcer le mur.
L’ARCHITECTURE PARASISMIQUE La vocation de la paille porteuse n’est peut-être pas de chercher à atteindre plus de hauteur. D’autres capacités pourraient être bien plus intéressantes. Les essais de résistance aux séismes menés à l’Université du Nevada et dirigées par Darcey Donovan entre 2008 et 2009 ont fourni des résultats plus que satisfaisants sur des structures simples en Paille Porteuse. Ce travail a été effectué dans le cadre du projet PAKSBAB (Pakistan Straw Bale and Appropriate Building).
Les bâtiments construits en régions montagneuses pakistanaises sont extrêmement exposés aux séismes qui les détruisent quand ils sont réalisés avec des matériaux non adaptés aux mouvements puissants provoqués par un tremblement de terre.
Le système développé par Darcey Donovan et son équipe (Shannon Whitnack, Surkhab Khan et Bill Donovan) est plus simple car ne nécessite pas de pré-compression et fait appel à un autre matériau très accessible qui participe à la résistance de l’ensemble : des filets de pêche. Comme dans le projet de Werner Schmidt, l’idée est d’apporter des presses manuelles dans ces régions, fabriquer les bottes de paille avec les céréales locales et transmettre aux populations locales un certain mode constructif de la technique Paille Porteuse. Elle est ici spécialement pensée pour répondre aux problématiques du lieu. Les fondations intègrent des filets de pêche à maille serrée. Le filet est posé au sol, les fondations en béton ou en pierre reposent dessus. Puis ce même filet est glissé sous la lisse basse. Cette lisse est recouverte d’une couche de résine anti-remontée capillaire. Les petites bottes de paille sont empilées en quinconce. Des tiges de bois sont fixées deux à deux de chaque côtés du mur, puis la lisse haute est mise en place. Le poids de la toiture vient accélérer le fluage des murs et quelques mois après une première couche de barbotine est appliquée. Les filets sont alors appliqués contre le mur et fixés à la lisse haute. Intégré aux autres couches d’enduit, le filet augmente la résistance déjà grande de la Paille Porteuse.
C’est le séisme du 5 octobre 2005 qui a amené Darcey Donovan à se lancer dans des recherches afin de concevoir des bâtiments parasismiques à moindre coût. Accompagnée par Surkhab Khan, « chargé de programme adjoint » et « aide au développement des projets », elle parvient à convaincre les autorités de l’aider. Le but premier de PAKSBAB est de valoriser ces bâtiments à travers le Pakistan mais aussi à travers toute zone sismique ne pouvant accéder à des méthodes plus coûteuses. L’emploi d’un maximum de matériaux locaux est donc évident. Ces régions sont fortement exposées aux séismes mais subissent aussi de grandes variations de température d’une saison à l’autre. Les bâtiments proposés doivent donc protéger du froid et de la chaleur.
Werner Schmidt avait été contacté lui aussi par la fondation Aga Khan après le séisme de 2005. Elle lui avait alors demandé de développer des bâtiments résistant aux séismes pour la région 80
Projet PAKSBAB mené au Pakistan par Darcey Donovan et son équipe
© Darcey Donovan - PAKSBAB
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Chronologie des projets réalisés dans le cadre de PAKSBAB
2006 : Centre pour la communauté des femmes à Jabori
2006-2007 : Hillkot Residence
2007 : 3 Maisons d’une pièce à Mansehra et Shinkiari
2008 : Programme de développement de la communauté, Gul Khan Ghoria Bibi, Qalandarabad
2009 : Maison des employés de l’hôpital Christian Bach
2001-2012 : Maisons accessibles aux personnes en fauteuil roulant pour les patients de SCIPPER
2012 : 10 Maisons pour Ingénieurs Sans Frontières, Denmark © D. Donovan -PAKSBAB
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Test sur murs renforcés avec des filets inclus dans l’enduit (UNR, PAKSBAB 2008)
Dans une présentation visuelle de Darcey Donovan147, elle nous fait part de 7 projets appliquant cette technique de Paille Porteuse renforcée. Il y aurait près de 18 bâtiments construits dans les régions montagneuses au nord de la ville de Mansehra. Les premières constructions étant une réussite, Darcey Donovan parvient à organiser des tests de résistance aux secousses sismiques entre 2008 et 2009. Sponsorisés par le Earthquake Enfineering Research Institute (EERI) et NSF-NEES , les essais sont effectués à l’Université du Nevada, à Reno. 4 murs sont testés, avec ou sans renforcement par les filets, avec succès. Et enfin, un prototype de maison à échelle 1 passe également les tests avec succès. D’une superficie d’environ 60m² (14’ x 14’ (pieds)) et d’une hauteur de 3m, la maison testée est réalisée avec des filets à mailles serrées (n°12) et passe sans soucis les 8 niveaux de secousses programmées. Les rapports sont disponibles sur le site de l’Université du Nevada 148 et la vidéo du test est en ligne149. Un rapide tour d’horizon des tests effectués sur des murs en briques, en parpaings ou en pierre nous fait prendre la mesure de la supériorité de la Paille Porteuse.
© University of Nevada, Reno
Test sur maison renforcée avec des filets inclus dans l’enduit (UNR, PAKSBAB 2009)
Cette technique constructive est actuellement développée dans les zones rurales montagneuses du Pakistan mais également dans d’autres régions du monde. Depuis, à Bali, les presses manuelles dessinées par les architectes Frank Hyde et Jeni Kardinal de Dual Dimension Architect, sont employées pour construire des maisons en botte de paille.
© University of Nevada, Reno
Les autorités urbaines y trouveraient un avantage au regard des dégâts causés par les séismes dans les zones à forte densité de population. En Europe les treillis métalliques sont employés pour répondre aux exigences parasismiques et la recherche continue à travailler sur des solutions de plus en plus efficaces. Les capacités de la botte de paille ne sont pas encore toutes connues.
147 [DONOVAN_web_2012] 148 [UNR_web] 149 [YOUTUBE2010]
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DES CAPACITÉS EXPLOITÉES
ENCORE
fois des voûtes en Paille Porteuse. Ce travail est filmé par Heidi Snel152 et retranscrit sur le net au travers de blogs153.
NON
Gernot Minke fait partie de ces architectes et ingénieurs qui expérimentent de nouvelles formes avec des matériaux ancestraux.Il est né en 1937 à Rostock en Allemagneet étudie l’architecture et l’urbanisme.Il est diplômé en 1964. Assistant de Frei Otto pendant quatre années (6468), il a depuis 1979 son propre cabinet d’architecture écologique en parallèle de ses autres activités.
Accompagnés par un groupe d’une trentaine de constructeurs bénévoles, Gernot Minke et Piet Karstedt construisent leurs premières voûtes en Paille Porteuse en 2011 au Wangeliner Garten, à Wangelin, dans le nord-est de l’Allemagne . Les participants sont de tout âge et de tout pays : Allemagne, Belgique, Portugal, Japon, Chine, Pologne, Canada, Espagne et se rencontrent autour de cette expérience unique.
Il obtient le grade de docteur en architecture en validant sa thèse sur l’efficacité des structures en 1969. Depuis 1967, il participe activement au développement de coques en bois nervuré, de structures à base de pneumatiques renforcés, de membranes conçues pour des activités sportives et de structures légères pour des maisons et crèches.
Le premier workshop de Septembre 2011 consiste à ériger 5 voûtes en Paille Porteuse. Une grande structure en toile permet d’effectuer le travail à l’abri des intempéries. Cependant une tempête durant la deuxième semaine a réussi à mouiller certaines bottes qui ont atteint des taux d’humidité très élevés. Elles seront remplacées dans la mesure du possible. Dans le cas où elles feraient partie d’une arche autoportante, elles seraient vérifiées avant l’application d’enduit.
De 1974 à 2001, Gernot Minke est professeur à l’université de Kassel et directeur du Building Research institute, département Architecture. Il dirige alors plusieurs travaux de recherche sur les « lowcost housing », les techniques en terre, en bambou et en pierre ponce résistantes aux séismes. Il développe des techniques de construction de dômes en adobe et de climatisation de bâtiments passifs.
Sur le chantier les fondations et les sous-bassement ont été mis en place au préalable. Les voûtes sont construites sur 50cm d’épaisseur de gravier et de verre expansé. Un isolant et un géotextile nontissé viennent couvrir ces mélanges.
Il donne depuis 1967 des conférences à travers le monde. Ses ouvrages sont édités en allemand,en italien, en espagnol et en anglais et certains réédités plusieurs fois150. Son travail avec la paille commence en 2000 avec Dittmar Hecken à l’Université de Kassel. S’ensuivent de nombreux projets qui le mènent à employer la paille comme isolant de voûtes en bois151.
Des arches en béton cellulaire forment les entrées des 5 voûtes. Le fournisseur de ces blocs de béton cellulaire se trouve à environ 15km du chantier. Le charpentier Michael Rückert a ainsi pu fabriquer sur mesure des coffrage de bois adaptés aux dimensions des blocs produits dans la région.
Gernot Minke, à travers son travail a pu constater que les formes rondes (voûtes ou dômes) résistaient mieux aux tremblements de terre. En combinant ces informations à ses nombreuses connaissances sur le comportement des matériaux et aux études menées sur les capacités portantes de la botte de paille à l’Université de Kassel, il décide de réaliser avec Piet Karstedt pour la première
Des structures en bois sont placées et servent de guides à la construction des voûtes. Les bottes de paille sont taillées en cônes de façon précise. Les dernières rangées et celle de la clé de voûte sont déterminantes. Pour effectuer ce type de
150 [MINKE_web_CV] 151 [MINKE_web_Galerie]
152 [SNEL2015] 153 [NORINKA_web]
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Voute en Paille Porteuse, Workshop sous la direction de Gernot Minke, à Wangelin, Allemagne 2011
© Baubiologie
© Norinka
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Chronologie des projet en Paille de Gernot Minke
Versuchsbau, Universität Kassel 2000 (mit Dittmar Hecken)
Waisenhaus, Kaliningrad, Russland 2003 (mit Friedemann Mahlke)
Tonstudio, Westerwald Friedemann Mahlke)
2004
(mit
Wohnhaus, Sentinele do Sul, Brasilien 2005 (mit Marcio D'Avila)
Seminarhaus, Tamera/Portugal 2006
Strohballentonne Bad Schussenried, 2006
Lasttragende Strohballen-Wohntonnen, Tamera/Portugal, 2007
Bürogebäude in Hrubý Súr, Slowakei 2010: (mit Createrra)
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construction, Gernot Minke a conçu un outil spécial pour la découpe des bottes. Deux scies électriques sont placées de part et d’autre d’un support horizontal de la largeur de la botte de paille. Chaque scie peut être inclinée avec une précision au demi-degré près. Les bottes de paille des arcs porteurs doivent s’encastrer les unes aux autres sans avoir besoin de combler d’éventuels vides. Afin d’éviter tout joint, les bottes de pailles sont taillées très précisément. Cette machine est essentielle à l’édification d’une voûte en Paille Porteuse.
L’INNOVATION EN PAILLE PORTEUSE Ces deux exemples d’innovation liée à la Paille Porteuse montrent que beaucoup de portes ont été ouvertes et que bien des techniques restent encore à découvrir ou à améliorer. Nous remarquerons que ces deux travaux ont une dimension sociale importante. Elles partent toutes les deux d’une volonté première de concevoir des bâtiments résistant aux séismes. Dans le travail de Gernot Minke, il est fascinant de voir comment le croisement des connaissances sur les formes structurelles et l’étude des capacités antisismiques de la Paille Porteuse permet de concevoir des bâtiments réunissant tous les atouts contre les secousses les plus violentes. Les voûtes et la paille participent ensemble à atteindre un but social et humanitaire.
Certains espaces verticaux peuvent être visibles entre les bottes. Ils sont dus aux ficelles des bottes et sont remplis consciencieusement avec un mélange dense de terre-paille. Une fois la totalité des rangées de bottes mises en place, des sangles sont placées tout les 40cm le long des voûtes afin de pré-contraindre les bottes. Le pré-cadre en bois peut alors être retiré. Après une semaine, la première des cinq voûtes était terminée et autoportante. Un deuxième workshop en Novembre 2011 a consisté à aménager l’intérieur de chaque voûte et à terminer la toiture de l’édifice. Dans chaque voûte, une dalle de 10 cm de terre battue recouvre le sol. Des tuyaux de coton remplis d’argile sont assemblés pour former le mobilier et les cloisons intérieures. Une toiture végétalisée va ensuite recouvrir les voûtes en paille. Chaque voûte est enduite à l’extérieur d’un mélange plâtreargile sur 6cm, cela accentue la stabilité des voûtes et gère les migrations d’eau. Les espaces entre chaque voûte sont remplis de graviers et de verre expansé, 15cm de terre sont ensuite étalés sur ce complexe. D’après le site de Gernot Minke, il semblerait que l’architecte ait renouvelé l’expérience au Chili, en novembre dernier (2016)154. Avec cinq années de recul sur les premières voûtes en Paille Porteuse, Gernot Minke a certainement amélioré la technique.
154 [MINKE_web_Index]
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CONCLUSION
QUELS ENJEUX ET QUELLES POTENTIALITÉS RÉELLES DE CETTE TECHNIQUE CONSTRUCTIVE?
CONCLUSION Au début de ce mémoire avait été soulevée la question de la légitimité de la Paille Porteuse et quels étaient les enjeux et les potentialités de cette technique constructive. Cette simple question en soulevait bien d’autres. Quelle est la pertinence de la construction en Paille Porteuse et son impact réel en France ? La Paille Porteuse est-elle un mode constructif sûr ? Y a-t-il des limites infranchissables par cette technique ? La Paille Porteuse peut-elle se révéler être LA solution dans certaines situations ? , Nous avons vu que cette technique contemporaine est en fait un héritage ancien des premiers colons du Nebraska. Nous avons démontré dans la première partie que la botte de paille, déchet de l’agriculture, était disponible en très grande quantité pour le secteur de la construction. La botte de paille est l’écomatériau qui consomme le moins d’énergie à sa fabrication. Au delà de réduire les risques environnementaux et sanitaires (considérant tout particulièrement la santé des habitants et usagers du lieu ainsi que celle des artisans), la paille permet des économies de ressources et s’inscrit dans un cadre local de développement équitable. Matériau biosourcé, aussi appelé agromatériau, la paille est totalement recyclable. La Paille Porteuse utilise pour sa structure ces bottes de paille. Néanmoins, avec cette technique, l’économie de bois d’œuvre n’est pas flagrante. De nouvelles techniques pourraient être développées dans le futur. Cédric Hamelin, architecte à Nîmes, cherche actuellement un moyen d’y parvenir. Son constat est que la lisse haute est de la matière « perdue » dont les dimensions imposantes servent en vérité à supporter la forte précontrainte lors de la mise en œuvre. Après cette étape, une lisse de dimension plus raisonnable pourrait suffire à porter la charge de la toiture. L’idée serait donc d’employer une lisse spéciale pour la pré-contrainte qui pourrait être réemployée par la suite. Cette technique pourrait se développer dans les années à venir. Le prix de la Paille Porteuse équivaut au prix du conventionnel. L’amélioration de la technique et la réduction d’utilisation de bois pourraient réduire les coûts de construction. Depuis une dizaine d’année, la construction en paille vit un véritable boom en France. Les autres pays d’Europe vivent aussi la même chose. De plus en plus de personnes s’intéressent à la construction en Paille Porteuse. Il y a fort à parier que des solutions de plus en plus économiques vont être développées. Le recensement des bâtiments en paille en France ne couvre qu’une petite partie du nombre de constructions estimé. La Paille Porteuse ne représente que 9% de ces chiffres. Un recensement plus précis de la Paille Porteuse est important dans ce contexte. Le travail du RFCP (Réseau Français de la Construction en Paille) est, comme son nom l’indique, de créer du lien entre les différents acteurs. J’ai, au cours de mon travail, continué le recensement de Coralie Garcia et de Pascal Legris. J’ai référencé plus de 50 bâtiments en Paille Porteuse et envoyé des questionnaires aux auto-constructeurs afin d’avoir des retours d’expériences. Il semble important, dans une idée de partage de connaissances et de multiplication des savoirs, de continuer ce travail auprès des architectes, maîtres d’œuvre, ingénieurs et autoentrepreneurs qui utilisent cette technique constructive.
La Paille Porteuse emploie un matériau dont les qualités techniques et la durabilité sont désormais validées. Les Règles Professionnelles de la Construction en Paille publiées en 2012 nous donnent toutes les clés de compréhension concernant le choix des bottes, leur stockage, les conditions de mise en œuvre mais aussi le choix des parements. Les travaux d’André de Bouter et de Barbara Jones nous permettent d’avoir une approche du matériau plus large. Les connaissances qu’ils nous apportent permettent d’adapter nos choix au mode constructif étudié ici : la Paille Porteuse.
Nous avons vu que la botte de paille avait obtenu le classement européen E et qu’un mur 90
en ossature bois rempli de paille fait partie depuis 2012 de l’Euroclasse B-s1-d0. Nous avons vu également que la paille n’était pas suffisamment nutritive pour que les termites s’y installent et que la silice contenue dans la botte de paille et la densité de celle-ci n’en font pas un élément intéressant pour la nidification d’animaux. Pour ce qui est des risques liés à l’humidité, le plus grand vient de l’eau et la conception doit se faire avec précaution. Les origines sont connues et les solutions aussi. Encore une fois, on ne saurait que trop conseiller une lecture sérieuse des Règles Professionnelles de la Construction en Paille. En prenant en compte la variété des mises en œuvre de la Paille Porteuse, nous avons pu estimer les résistances thermiques de plusieurs combinaisons. Les paramètres varient selon la densité des bottes, leur dimension et leur sens de pose. Nous avons constaté qu’en employant de petites ou très grosses bottes, les résistances thermiques sont excellentes. De plus, l’utilisation d’enduit de terre augmente les capacités de la paroi à conserver puis à restituer la chaleur. Ces qualités d’isolation se retrouvent également à travers les résultats obtenus en 2003 sur des tests de résistance acoustique. Une paroi en bottes de paille autoportante isolerait naturellement d’environ 53dB. Dans notre analyse des différents tests effectués, nous avons vu que les tests en laboratoire ont été multipliés et ont porté tant sur les charges verticales qu’horizontales mais encore sur la résistance au cisaillement. La résistance et le comportement d’un mur en Paille Porteuse dépend de nombreux paramètres. La seule botte de paille ne fait pas tout. La qualité des lisses, du treillis intégré à l’enduit, la raideur des rangées de bottes de paille, la qualité de l’interface enduit-paille sont autant de facteurs influençant les résultats finaux de résistance du mur. Le dimensionnement d’un bâtiment fait bien plus appel au bon sens qu’à l’application de calculs. La technique constructive va en s’améliorant dans tous les domaines de la construction. Les essais en laboratoires et les savoirs empiriques ne peuvent que travailler ensemble vers l’amélioration d’un système structurel séculaire.
Les techniques de construction en paille font appel aux techniques traditionnelles comme aux ruptures culturelles et techniques. Si aujourd’hui les constructeurs reviennent à ces méthodes c’est pour les faire évoluer et les faire correspondre à la société actuelle. Loin d’une rétrocession, c’est une avancée majeure, basée sur des expérimentations de terrain. Paradoxalement, la mise en œuvre de la Paille Porteuse semble la plus simple et la plus rapide des techniques de construction en paille mais est en fait la plus complexe et doit suivre impérativement un certain nombre de règles. Nous avons pu comparer la maison de la famille Garcia à celle conçue par Pascal Thépaut et voir que la simplicité de l’enveloppe facilite la mise en œuvre. Nous avons également abordé la pertinence structurelle des formes circulaires. La Paille Porteuse, par son épaisseur, peut devenir un appui déterminant dans un projet d’architecture et peut être comparée au travail de la terre pisée ou d’architectures monolithiques. Nous avons compris que la Paille Porteuse fonctionnait en R+1 mais que sa mise en œuvre au-delà d’un certain nombre de niveaux dépendait énormément des capacités de transmission des charges de la paille. Le poids propre de l’édifice joue un rôle essentiel dans le calcul des charges. Werner Schmidt et Peter Braun parviennent à atteindre le R+2 grâce à des calculs complexes et au sens pratique des deux professionnels. La technologie de la Paille Porteuse ne se suffit pas à elle même pour atteindre ces hauteurs et elle est étroitement liée aux éléments en bois reprenant les charges et les efforts de contreventement tant verticaux qu’horizontaux. Nous avons finalement vu en quoi la Paille Porteuse pouvait devenir une réelle solution dans certaines conditions. Sa ductilité et sa solidité permettent de projeter de nouveaux systèmes parasismiques qui seraient issus de matériaux locaux. Elle se révèle une solution 91
économique et sa technique rigoureuse peut être transmise facilement aux populations des régions fortement touchées par les séismes. La capacité de la botte de paille à produire des voûtes autoportantes est également une nouvelle révolution et ouvre de nouvelles portes.
Tous ces éléments nous permettent aujourd’hui de visualiser les potentialités de la Paille Porteuse. Le développement de cette technique est justifié et porteur d’avenir. Par la validation des disponibilités de la paille en France nous validons tous les types de construction en paille. L’économie nécessaire du bois d’œuvre nous permet de penser que la Paille Porteuse sera une des solutions envisageables si elle est encore améliorée dans les années à venir. La Paille Porteuse a aujourd’hui besoin d’un guide de mise en œuvre clair, n’empêchant pas de nouvelles solutions. Ce cadre technique permettrait un cadre législatif qui faciliterait l’obtention de garantie décennale. Cela rassurerait les futurs constructeurs et permettrait une diffusion plus large de cette technique en France.
Aujourd’hui, certaines expériences architecturales n’ont pas encore été faites en Paille Porteuse. La place de cette technique en milieu urbain se pose. Actuellement, des bâtiments en maçonnerie sont isolés en paille. L’interface paille-maçonnerie peut être gérée. Les dents creuses urbaines pourraient accueillir un projet en murs autoportants en bottes de paille. Seule la question de l’espace viendrait freiner cette idée. L’espace en ville doit être économisé et un projet en ossature bois remplie de petites bottes de paille posées sur chant semblerait plus pertinent. Le travail de récupération des données est plus que jamais nécessaire. Les professionnels de la construction en Paille Porteuse de tous pays enjoignent les auto-constructeurs à la plus grande prudence quant aux expérimentations architecturales. David Einsenberg aux EtatsUnis, architecte et pionnier des constructions en bottes de paille, est le premier à avoir rédigé des directives concernant l’utilisation de bottes de paille en construction. Le RFCP dirigé par Dirk Eberhard et Gabriel Martinez travaille actuellement sur deux recherches. Le groupe Isolation Thermique par l’Extérieur (ITE) coordonné par Coralie Garcia et le groupe Paille Porteuse (PP) sous la coordination de Pascal Legris et Christian Hamani (connu également sous le nom de PAIPITE), travaillent à la rédaction de règles de bonnes pratiques de la construction en Paille Porteuse. Les retours de questionnaires liés au recensement que nous avons effectué pourraient se révéler être une véritable mine d’information concernant les différentes pratiques. Leur analyse permettra d’établir celles qui fonctionnent et celles qui sont à éviter absolument.
En France, Corentin Desmichelles est le premier architecte à avoir obtenu une décennale pour la construction d’une maison en Paille Porteuse. En Grande-Bretagne, la Paille Porteuse est déjà validée comme technique constructive. Le système de garantie n’est pas le même qu’en France. C’est l’obtention du permis de construire qui a valeur de garantie. Le travail de Barabara Jones est considéré comme la référence en Paille Porteuse. Son ouvrage est dédié aux architectes et concepteurs mais aussi aux autoconstructeurs. En Allemagne, l’architecte Friederike Fuchs nous affirme que « l’association allemande de construction en Bottes de Paille veut soutenir le développement de constructions en murs de Paille Porteuse. Elle veut faire plus de tests pour soutenir les demandes individuelles de permis de construire et pour aider les projets à venir »155. Le Premier Ministre de l’économie de Basse-Saxe, Olaf Lies, a mis 5 millions d’euro dans un bâtiment public isolé en paille. La question de la production des matériaux et des réglementations autour de la réduction de gaz à effet de serre amènent les instances européennes à se tourner vers les matériaux bio-sourcés. Pour Olaf Lies« ces bâtiments en paille deviennent des solutions incontournables »156. 155 [SNEL2015] 156 [SNEL2015]
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La botte de paille en tant qu’élément structurel a été validée par l’expérience. Nous avons près de cent ans de recul sur la technique Paille Porteuse et tous les tests en laboratoire ont été effectués et continuent à améliorer ce mode constructif. Ces savoirs-faire empiriques attendent d’être validés par des systèmes de prévision et de contrôle efficaces. La construction en paille est un bel exemple de l’importance de la mise en commun des connaissances techniques et pratiques des ingénieurs, des artisans, des auto-constructeurs et des architectes.
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100
ANNEXES
ANNEXES
101
ANNEXE 01: USAGES DES MATÉRIAUX BIOSOURCÉS DANS LES CONSTRUCTIONS (HORS BOIS D’OEUVRE)
TERRACREA, p.41
ANNEXE 02: COÛT EN EUROS TTC PAR M² D’ISOLANTS (HORS POSE) POUR R=5 M².K/W
Source: https://www.picbleu.fr/
102
ANNEXE 03: COMPARAISON DE DIFFÉRENTS MATÉRIAUX ISOLANTS POUR R=5 M².K/W Feuille1
MATERIAUX Polyuréthane + plaque plâtre 140 mm Polystyrène extrudé (HFC) (panneaux) 45 kg/m3 Polystyrène extrudé (HFC) (panneaux) 25 kg/m3 Fibre de Bois (panneaux rigides) 280 kg/m3 Fibre de Bois (panneaux souples) 110 kg/m3 Polystyrène expansé PSE (panneaux) 30 kg/m3 Polystyrène expansé PSE (panneaux) 10 kg/m3 Chanvre-chaux (brique) Ouate de Cellulose (panneaux) 70 kg/m3 Ouate de Cellulose (panneaux) 40 kg/m3 Laine de Verre (rouleaux) 40 kg/m3 Laine de Verre (rouleaux) 10 kg/m3 Chanvre-chaux 250 kg/m² Laine de Lin (panneaux-rouleaux) 35 kg/m3 Recyclage Fibres Textiles (panneaux-rouleaux) 30 kg/m3 Laine de Lin (panneaux-rouleaux) 25 kg/m3 Recyclage Fibres Textiles (panneaux-rouleaux) 10 kg/m3 Chanvre (panneaux-rouleaux) 45 kg/m3 Chanvre (panneaux-rouleaux) 20 kg/m3 Liège noir expansé (panneaux) 150 kg/m3 Liège noir expansé (panneaux) 110 kg/m3 Fibre de Bois (panneaux souples) 55 kg/m3 Fibre de Bois (panneaux souples) 35 kg/m3 Laine de Roche (rouleaux) 30 kg/m3 Liège noir expansé (vrac) Béton Cellulaire Ouate de Cellulose (vrac) Laine de Mouton (panneaux-rouleaux) 30 kg/m3 Laine de Mouton (panneaux-rouleaux) 10 kg/m3 Bottes de Paille 120 kg/m3 Bottes de Paille 80 kg/m3
ENERGIE GRISE PRIX TTC au m² kWhEp/UF pour R=5 185 52 185 35 185 25 122 90 122 40 81 29 81 14 79 60 76 40 76 30 62 14 62 5 60 30 53 30 53 29 53 20 53 20 52 40 52 20 43 70 43 60 43 35 43 20 37 70 35 30 34 40 21 7 16 30 16 20 5 6 5 4 Page 1
103
Épaisseur en cm pour R=5 14 17,5 14,5 24 18,5 19 16 35 19,5 19,5 21 18 30 19 20 19 19 21 19 21 19 19,5 18 19 23 22 21 22,5 17 25 20
Résistance à la vapeur d'eau 200 200 80 5 3 100 20 1 2 1 1 1 10 2 3 1 2 2 1 30 5 5 1 1 5 3 1 2 1 2 1
Source: https://www.picbleu.fr/
ANNEXE 04: TABLEAU DES ESSAIS AU FEU RÉALISÉS (non
104
exaustif)
Ouvrage: Rapports: Sites Web:
De Bouter, 2009, p.209-218 CSTB, 2009 ; FCBA, 2010 ; FCBA, 2012 ; FCBA, 2010 www.astm.org, page consultée le 19/12/16 http://www.lemoniteur.fr/article/l-incendie-qui-autorise-a-construire-en-paille-des-erp-sur-deux-etages-1059777, page consultée le 19/12/16
ANNEXE 04: TABLEAU DES ESSAIS AU FEU RÉALISÉS (non
105
exaustif)
ANNEXE 05: PRINCIPALES CARACTÉRISTIQUES DU MATÉRIAU BOTTE DE PAILLE
http://rfcp.fr/informations-techniques
ANNEXE 07: EXEMPLES D’INDICES D’AFFAIBLISSEMENT DE DIFFÉRENTES PAROIS
De Bouter, 2009, p.242
106
De Bouter, 2009, p.225-232 et http://rfcp.fr/informations-techniques
Il est à noter que les valeurs obtenues en dernière ligne, pour les grosses bottes, sont certainement faussées. En effet, seule la dernière colonne, issue des résultats obtenus par les règles Th-Bât (2005) prend en compte la densité, bien supérieure, des grosses bottes de paille.
ANNEXE 07: RÉSISTANCE THERMIQUE OBTENUE PAR EXTRAPOLATION DES DONNÉES CONNUES
107
ANNEXE 08: FICHES D’IDENTITÉ DE BÂTIMENTS EN PAILLE PORTEUSE
© Coralie Garcia
© Luc Floissac
© Luc Floissac © Luc Floissac
© Coralie Garcia
© le télégramme
Maison individuelle, dans le Minervois, en Aude, France
Maison individuelle, à Trélivan, en Côtesd’Armor, France
Entreprise: MV d’autoconstruction)
Maître d’Oeuvre: Pascal Thépaut Bureau d’étude: Pascal Thépaut
Habitation
(95%
Année de construction: 2010/2012 Temps de construction: 20 mois
Année de construction: 2011/2012 Temps de construction: 12 mois
Surface habitable: 88m² (35m² de garage)
Surface habitable: 140m² (35m² de garage)
Floissac, 2012, p.75-81
Floissac, 2012, p.87-91
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ANNEXE 08: FICHES D’IDENTITÉ DE BÂTIMENTS EN PAILLE PORTEUSE
© Werner Schmidt
© Werner Schmidt
© Werner Schmidt
© Werner Schmidt
Espace de transformation, de séchage et de stockage de plantes, à Densbüren, Suisse Architecte: Werner Schmidt et Margareta Schwarz
Chambres d’hôtes, à Lana, Italie Architecte: Werner Schmidt et Margareta Schwarz
Année de construction: 2013/2014 Temps de construction: 10 mois
Année de construction: 2006 Temps de construction: 4 mois
Surface habitable: 80m² (48m² au rdc et 32 à l’étage) Ouverture zénithale: 8m² (diamètre 1m80)
Surface habitable: 126m²
www.atelierwernerschmidt.ch
www.atelierwernerschmidt.ch
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ANNEXE 08: FICHES D’IDENTITÉ DE BÂTIMENTS EN PAILLE PORTEUSE
© Werner Schmidt
© Werner Schmidt
© Werner Schmidt
© Werner Schmidt
Maison individuelle “Haus Braun-Dubuis”, à Disentis - Mustér, Suisse
Maison individuelle, à Glarus , Suisse
Architecte: Werner Schmidt
Architecte: Werner Schmidt
Année de construction: 2001/2002 Extension en 2013 Temps de construction: 7 mois
Année de construction: 2007/2008 Temps de construction: 7 mois
Surface habitable: 105 m²
Surface habitable: 190 m² (+40m² de chambre froide)
www.atelierwernerschmidt.ch
www.atelierwernerschmidt.ch
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ANNEXE 08: FICHES D’IDENTITÉ DE BÂTIMENTS EN PAILLE PORTEUSE
© Rae Parkinson
© Werner Schmidt
© Rae Parkinson
© Werner Schmidt
Maison individuelle et espace de concerts privés, à Merenschwand , Suisse
© Luc Floissac
Architecte: Werner Schmidt
Logements collectifs, Grande-Bretagne
Système Hybride (Bois lamellé-collé, paille porteuse)
à
Waddington,
Architectes: Jacob Wihan et Barbara Jones Bureaux d’études: Amazonails et Straw Works
Année de construction: 2010 Temps de construction: 7 mois
Année de construction: 2009/2010
Surface habitable: 186 m² (+108m² de soussol)
Surface habitable: 170 m²
www.atelierwernerschmidt.ch
Floissac, 2012, p. 68-74
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ANNEXE 08: FICHES D’IDENTITÉ DE BÂTIMENTS EN PAILLE PORTEUSE
© Pierre et Terre
© Thibault Degand
© Thibault Degand
©Luc Floissac © Thibault Degand
Écocentre Pierre et Terre, à Riscle, dans le Gers, France
Casse automobile, à Moras-en-Valloire, France
Architecte: Jean-Marc Jourdain Bureau d’étude thermique: Nolwen Miegebielle (Ty Maya éco-solutions)
Année de construction: 2008/2009 Temps de construction: 12 mois Surface habitable: 900 m²
Année de construction: 2010/2011 Temps de construction: 6 mois Surface habitable: 345 m² Floissac, 2012, p. 68-74
ddauto-p-sarldegand.over-blog.com/
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ANNEXE 08: FICHES D’IDENTITÉ DE BÂTIMENTS EN PAILLE PORTEUSE
© Werner Schmidt
© Werner Schmidt
© Werner Schmidt
© Luc Floissac
Immeuble Fliri, à Graun, Italie Architecte: Werner Schmidt Bureau d’étude: Peter Braun Année de construction: 2007 Temps de construction: 8 mois Surface habitable: 276m² www.atelierwernerschmidt.ch
Floissac, 2012, p.107-120
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ANNEXE 09: QUESTIONNAIRE DE RETOUR D’EXPÉRIENCE EN PAILLE PORTEUSE
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ANNEXE 09: QUESTIONNAIRE DE RETOUR D’EXPÉRIENCE EN PAILLE PORTEUSE
© Laure Gadret - Document rédigé dans le cadre de mon mémoire en lien avec le travail du groupe PAIPITE du RFCP
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REMERCIEMENTS
REMERCIEMENTS
Je remercie mon directeur de mémoire, Jean-Jacques Soulas, avec qui les discutions autour de mon sujet m’ont menée à développer mon regard critique. Merci à l’équipe pédagogique qui encadrait ce séminaire, notamment à Aline Barlet et à Chantal Callais. Leurs questions et conseils avisés m’ont ouverte à des réflexions plus larges sur mon sujet.
Je remercie le RFCP et les Chantiers de l’Isle-d’Abeau d’avoir mis en place pour l’an une formation dédiée aux étudiants des métiers du bâtiment. J’ai pu à cette occasion me former auprès de Cédric Hamelin (Boha Architecture), Noé Solsona (MV Habitation) et Emmanuel Deragne (Accompagnateur à l’autoconstruction en paille). Je les remercie également de leurs conseils. Merci à Christian Hamani, Cédric Hamelin, André de Bouter, Cédric Daniel (plate-forme de chantier participatif Twiza) et Pascal Legris pour les nombreux documents qu’ils ont mis à ma disposition. Merci à Coralie Garcia et Pascal Legris pour le temps qu’ils ont pu m’accorder, et qui ont permis de répondre à mes interrogations.
Je remercie Aurélien et Priscilla qui m’ont accueilli sur leur chantier d’enduit sur Paille Porteuse de la Chapelle-Saint-Rémy en Juillet 2016. Et également Bertand et Agnès Vendeville, qui m’ont permis de mettre participer à la mise en place d’une extension en Paille Porteuse en Août 2016. Je remercie également ma mère, Nathalie Lourdais, pour son aide précieuse, et son regard extérieur avisé.
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LAURE GADRET - Janvier 2017 - ENSAP Bordeaux Directeur de Mémoire : JEAN-JACQUES SOULAS