Journal du Village des notaires, No27

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n°27 janvier 2012

Toute l’équipe du Journal du Village des Notaires

vous souhaite une bonne année

2012

www.village-notaires.com

Management d’une étude notariale 10

Un « Open Space » agréable à vivre ? C’est possible !

Le viager comme substitut Au crédit bancaire

Actualités des partenaires

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DOSSIER SPÉCIAL

Fondations & Associations pour dons et legs

Veille et actualités juridiques

24

Droit notarial de l’entreprise - II

Livres

&

14

agenda

34

Les instruments essentiels de la prévoyance

4



Édito

Le Journal du Village des Notaires

P a r S a ra h - L o u i s e G e r va i s

est publié par Legiteam 17 rue de Seine 92100 Boulogne RCS B 403 601 750

Directeur de la publication Pierre Markhoff Mail : legiteam@free.fr

Chers lecteurs, Abonnements legiteam@free.fr Tél : 01 70 71 53 80

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Ont aussi participé à ce numéro

« Qu’est-ce qui marche à quatre pattes le matin, à deux le midi et à trois le soir ? ». Si Œdipe reconnaît immédiatement dans cette énigme du Sphinx la destinée de tout Homme 1, la perte d’autonomie qu’entraîne la vieillesse n’est pourtant pas un sujet auquel on prend plaisir à se confronter.

Conseil privilégié des familles, le notaire doit cependant souvent remplir ce rôle de messager chagrin en informant ses clients les solutions les plus adaptées au bon déroulement de leur fin de vie. L’officier public se chargera par exemple d’éclairer les familles sur la vente en viager qui permet de s’assurer une rente régulière tout en conservant, si on le souhaite, l’usufruit de son bien (p.14). Parmi les instruments essentiels de prévoyance, on pourra également penser aux assurances dépendances ou au mandat de protection future qui permet à toute personne juridiquement capable de désigner à l’avance celui ou celle qui aura la charge de la gestion de son patrimoine ainsi que l’étendue de son mandat (p.4). Si, pour défaut d’optimisme, de telles mesures ne figurent pas sur la liste des bonnes résolutions de ce début d’année, il serait néanmoins dommage de les négliger. Anticiper la perte d’autonomie, quelle soit matérielle ou physique, permet à chacun d’envisager son futur plus sereinement et de pacifier les relations entre les ayant droits. Le Journal du Village des Notaires vous propose donc deux dossiers consacrés aux mécanismes de prévoyance. Vous pourrez également compléter ces informations à l’occasion de la Semaine d’Information sur les droits des familles, organisée sous le patronage du Ministère des Solidarités et de la Cohésion Sociale, par les notaires de Paris, de Seine-Saint-Denis, du Val-de-Marne et des Hauts-de-Seine du 13 au 17 février 2012. Toute l’équipe du Journal du Village des Notaires vous souhaite une excellente année 2012 ! Bonne lecture !

Sarah-Louise Gervais

Florian Saux Tiphaine Paulus-Diverrès

Diffusion

5.000 exemplaires

Œdipe, Sophocle. Trad. « c’est l’Homme qui au matin de sa vie se déplace à quatre pattes, qui au midi de sa vie marche avec ses deux jambes et qui au soir de sa vie s’aide d’une canne, marchant ainsi sur trois pattes » 1


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Les instruments essentiels de la prévoyance est un contrat permettant à une personne capable juridiquement de désigner, de façon prospective, la personne qui gérera son patrimoine en cas d’incapacité future. Un instrument de protection souple

L

prévoyance est liée à la question de la dépendance c’est-àdire aux troubles du comportements ou des atteintes physiques liés à l’âge. Cette préoccupation est de plus en plus actuelle dans une société qui est confrontée à un défi démographique lié à l’augmentation de l’espérance de vie et au vieillissement de la population. Ainsi comme le précise Claude Martin, directeur de recherche au CNRS et spécialiste des politiques sociales et de la dépendance, « même si vivre plus vieux ne veut pas dire que l’on devient automatiquement dépendant, nous allons être de plus en plus nombreux à être confrontés à la perte d’autonomie ».

Ainsi, la prévoyance qui permet de mieux appréhender l’éventuelle dépendance se matérialise à travers l’utilisation de deux outils principaux qui sont le mandat de protection future et l’assurance dépendance. I. Le mandat de protection future, un instrument juridique de prévoyance

La loi du 5 mars 2007 réformant la protection des majeurs a introduit le mandat de protection futur dans le paysage juridique français permettant de mettre en place, par anticipation, les modalités de protection d’une personne vulnérable. Applicable depuis le 1er janvier 2009, c’est le décret du 30 novembre 2007 qui est venu préciser ce régime. Le mandat de protection future

L’intérêt de ce nouvel outil juridique réside dans le fait qu’il est désormais possible de souscrire un régime de protection différent des trois régimes de protection traditionnels qui sont la sauvegarde de justice, la curatelle, la tutelle sans impliquer l’intervention d’un juge. En effet, à défaut d’avoir réalisé un mandat de protection future et lorsque la personne ne peut plus pourvoir seule à ses besoins, le juge des tutelles sera saisi afin d’ordonner le placement sous un des régimes de protection judiciaire existant. Mais de telles mesures sont longues et peuvent être lourdes à mettre en place. Ainsi, il est possible de bénéficier d’un régime de protection plus souple, adapté à sa volonté en précisant dans le mandat l’étendue des prérogatives qui seront confiées au mandataire. Deux formes de mandat de protection future Le mandat peut prendre deux formes celle d’un acte sousseing privé ou celle d’un acte notarié. Dans le premier cas, le mandat de protection future peut être rédigé sur papier libre



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ou à l’aide d’un modèle gratuit établi par décret et mis à disposition par le Ministère de la Justice à l’adresse suivante : https://www.formulaires.modernisation.gouv.fr/ gf/cerfa_13592_02.do. Il peut aussi être établi sur papier libre mais il devra être contresigné par un avocat. Dans ce cas, pour plus de précaution, il est possible de faire enregistrer le mandat à la recette des impôts du domicile du mandant, moyennant la somme de 125 euros. Cependant, lorsque le mandat est effectué par acte sous-seing privé, il ne pourra pas, en principe, porter sur des actes importants tels que la vente d’un bien immobilier et devra se limiter à des actes de gestion courante du patrimoine. A l’inverse, lorsque le mandat est rédigé par acte notarié, l’intervention du notaire permet d’attribuer au mandataire des pouvoirs plus importants tels que l’accomplissement d’actes patrimoniaux. De plus, le notaire devra recueillir l’acceptation du mandataire et contrôler ses actions. La mise en œuvre du mandat Le mandat ne produit aucun effet tant que le mandant est en mesure de s’occuper de lui et qu’il conserve toutes ses facultés. Lorsque ce n’est plus le cas, un médecin agréé inscrit sur une liste établie par le procureur de la République doit examiner le mandant afin de constater son inaptitude et établir un certificat médical. Le mandataire se présente au greffe du tribunal d’instance muni du mandat et du certificat médical daté de moins d’un mois pour que le greffier

contrôle le mandat. Il vérifie si les conditions prévues par la loi sont remplies et si le mandat est accompagné des pièces requises. Lorsqu’il considère le mandat valide et sa mise en œuvre justifiée, le greffier appose son visa sur le mandat qui produit alors ses effets. Ainsi, conformément au contrat de mandat et plus largement aux dispositions du Code civil, le mandataire désigné agira en nom et place de la personne nécessitant la protection dans la limite de ses fonctions, à l’instar d’une procuration. Selon le degré de pouvoir accordé par le mandant au mandataire et la forme du mandat, il effectuera les actes d’administration et de gestion nécessaires et utiles aux biens du mandant. Par principe, le mandataire ne pourra pas effectuer un acte de disposition en vendant ou en donnant des biens, excepté si la volonté du mandant va dans ce sens et que le mandat de protection future a été dressé par acte notarié ou que le juge l’autorise expressément sur demande du mandataire et dans l’intérêt du mandant. De plus, le mandataire peut se voir confier la protection de la personne, du patrimoine ou des deux à la fois, selon les modalités prévues par le mandat. Les conditions financières de l’exécution du mandat y compris la rémunération du mandataire et du contrôleur des activités devront être prévues par le mandat. Il devra être précisé s’ils agissent à

titre gratuit ou contre rémunération et dans ce dernier cas l’indication de la périodicité et de la somme versée devront être indiquées. Le contrôle du respect du mandat Afin d’instaurer un système de contrôle, garantie de la protection de la personne vulnérable, le mandataire devra, lors de la mise en œuvre du mandat, réaliser un inventaire du patrimoine et rendre compte annuellement de sa mission à la personne désignée par le mandat. Si des difficultés surviennent lors de l’exécution du mandat et que les intérêts du mandant sont menacés, toute personne qui y a intérêt peut saisir le juge des tutelles, y compris le mandant. Le juge devra prendre toutes les mesures qui s’imposent pour préserver le mandant. En ce sens, afin de remplir pleinement sa mission, il a le pouvoir de contrôler, de compléter et parfois même révoquer le mandat. De plus, dans le cas ou le mandataire ne respecte pas ses obligations, sa responsabilité pourra être recherchée. En effet, l’article 1991 et 1992 du Code civil relatifs aux obligations du mandataire précise que « le mandataire est tenu d’accomplir le mandat tant qu’il en demeure chargé, et répond des dommages-intérêts qui pourraient résulter de son inexécution » ou lors de fautes commises dans la gestion. Le mandat de protection future est donc un outil de protection juridique qui s’adapte


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à la volonté des personnes souhaitant anticiper la mise en place d’un régime de protection lorsque leurs facultés seront altérées.

en cas de perte de capacité contre paiement des cotisations afin que la personne concernée finance la solution qui lui convient au mieux.

II. Les assurances dépendances, un outil financier de prévoyance

Selon les garanties choisies, l’état de dépendance partiel peut être reconnu et pris en charge. Dans ce cas, le montant de la rente versé correspondra à un pourcentage de la rente prévu en cas de dépendance totale.

L’assurance dépendance permet de conserver une indépendance financière même dans des situations qui peuvent s’avérer coûteuses, en cas de perte totale ou partielle d’autonomie. A titre individuel, la garantie dépendance peut être proposée dans deux types de contrats : le contrat de prévoyance et le contrat d’assurance-vie. Dans ces deux contrats, à l’instar de nombreux produits d’assurance, un capital sera versé

Les contrats d’assurance qui sont destinés à couvrir le risque de dépendance évoluent en permanence afin de s’adapter aux besoins de la population et de renforcer la prévention. Certains incluent de nos jours, des prestations en nature tels que les services à la personne. En effet,

aujourd’hui, les assurances proposent des services complémentaires tels que les services d’assistance à l’assuré dépendant pour trouver un établissement spécialisé, mettre en place des services d’aide à domicile...

Le contrat d’assurance prévoyance est, quant à lui, un instrument d’anticipation financier du coût engendré par la perte d’autonomie essentielle. Prévoir, permet ainsi de sauvegarder pleinement la volonté de la personne qui pourrait nécessiter plus tard une protection. Ces outils sont complémentaires et offrent une prévoyance sur mesure.

Johanna Leplanois Rédaction du Village des notaires

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Un « Open Space » agréable à vivre ? C’est possible ! férents types de modularité. Les cloisons amovibles sont souvent choisies pour leur souplesse de transformation de l’espace. C’est leur qualité acoustique qui détermine une grande partie du confort de travail. Le mobilier de bureau et de classement, l’organisation de la partie informatique du poste de travail sont bien sûr des éléments qui nécessitent d’être choisis avec le plus grand soin en fonction de la réalité pratique de la tâche de l’employé qui occupera cet espace.

L

’ « open space » ou « espace paysagé » est un mode d’aménagement de l’espace de travail qui progresse régulièrement. Aujourd’hui 60% des entreprises l’utiliseraient. Mais il ne suffit pas de faire tomber quelques cloisons pour réussir la création de bureaux paysagés. Et l’enjeu est de taille car c’est du confort de travail et de la productivité des employés dont il s’agit, sans parler des conséquences éventuelles sur l’équilibre psychologique des plus sensibles à l’environnement de travail. Le plus grand avantage perçu est le gain de place qui va de 10 et 40 % de la surface par personne. Il est donc possible de « loger » sur une même

surface globale beaucoup plus de postes de travail. Par voie de conséquence, si la surface par employé diminue, le volume attribué à chacun diminue dans la même proportion ce qui peut entraîner, si l’on n’y prend garde, des nuisances sonores, une luminosité insuffisante et une perte importante d’intimité. Mais l’effet peut être contraire avec un sentiment d’isolement dans un espace réduit et insuffisant. C’est dès le début du projet qu’il convient de prendre en compte toutes ces données afin d’organiser l’espace, de choisir le mobilier, l’acoustique ou l’éclairage. Outre le gain de place, l’open space permet d’opter pour dif-

Il est nécessaire aussi de veiller à ce que l’occupant de cet espace individuel au sein d’un volume collectif puisse se l’approprier et le personnaliser. Un tiroir personnel, un mode de classement rationnel et pratique, un bureau assez vaste pour suffire à la tâche, un siège confortable et assez mobile rendront le poste agréable. Au moment de la conception de l’ensemble il faut aussi veiller au passage de câbles afin d’éviter que tout le monde se prenne les pieds dans les câbles d’ordinateur ou d’éclairage. Cet éclairage est l’un des éléments déterminants de la réussite d’un open space. Un bel éclairage d’ambiance complété par des éclairages individuels personnalisables est un gage de confort. Le reproche le plus fréquent fait au mode open space est



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celui d’être bruyant donc fatiguant et stressant. Ajoutés à ceux des transports en commun, par exemple, ces ressentis négatifs rendent vite la vie au travail insupportable. Pour réduire ces nuisances, c’est dès l’élaboration des plans qu’il faut agir. Dans la phase ultime, après la détermination des matériaux pour les cloisons, le choix du mobilier de bureau et de classement est important. Il faut veiller à ne pas introduire de matériaux trop réverbérant. Photocopieur, imprimante partagée, certaines zones engendrent plus de nuisances sonores que d’autres. Quand c’est possible, un espace particulier doit leur être réservé. Les circulations sont aussi importantes. Selon la hauteur des cloisonnements individuels, les déplacements des uns et des autres dans le même open space ne seront pas perçus de la même manière et n’auront pas le même impact sur la concentration et la tranquillité des occupants. Certaines entreprises optent pour un mode d’aménagement « en marguerite » qui fait appel à un mobilier de travail et de classement spécifiques. C’est là l’illustration de la souplesse et de la variété des options possibles offertes par l’open space. Cependant, dans tous les cas, il faut prévoir des bureaux fermés traditionnels afin de pouvoir organiser des réunions, de recevoir des visiteurs dans des conditions de calme et de discrétion souvent indispen-

sables, de permettre à des employés de mener une conversation téléphonique longue ou confidentielle. Le mobilier de ces salles doit être pratique, fonctionnel, confortable et, selon les cas et les possibilités, modulaire. C’est souvent dans ces espaces fermés que l’on trouve les meubles de classement qui contiennent des dossiers soit « froids » ou rarement consultés en attente d’archivage, soit les dossiers dont l’accès doit être protégé ou sélectif. Si vous aménagez un open space, n’oubliez pas de créer ces espaces de réunion et de travail. Ils permettent de s’isoler pour se concentrer plus facilement sans bruit extérieur. Quand on est chef d’entreprise, il n’est pas toujours aisé de concevoir soi-même la création d’un open space. Les sociétés qui conçoivent, fabriquent et installent le mobilier de classement et de bureau ont aussi une fonction de conseil fondée sur leur expérience, leur savoir-faire et des architectes d’intérieur spécialisés. Avec un recul de plusieurs dizaines d’années depuis l’apparition de l’open space, ces spécialistes connaissent et appliquent les règles les plus judicieuses pour le créer. Les mobiliers ont évolué en même temps que les habitudes de travail et les exigences en matière de qualité de l’ergonomie. La vieille chaise de bureau par exemple, a fait l’objet d’un travail de conception faisant appel aux spécialistes de la médecine du travail, aux spécialistes des pathologies de

la colonne vertébrale etc. Le trop fameux et très répandu « mal de dos » est aujourd’hui pris en compte par les créateurs de sièges de bureau pour permettre leur adaptation à chaque morphologie et pour éviter les postures néfastes. Matériaux, formes, couleur, mécanismes et robustesse des tiroirs, portes et accessoires ont considérablement progressé aussi au fil des années et font aujourd’hui du poste de travail un espace qui peut être à la fois confortable, rationnel, esthétique et agréable à vivre. C’est vrai aussi pour un open space quand il est bien conçu et bien aménagé. L’open space de qualité, audelà des quelques difficultés qu’il peut engendrer, peut aussi être générateur de convivialité, de performance collective améliorée et de renforcement de la conscience d’appartenance à une même équipe. Ce n’est pas toujours quantifiable mais cela vaut de l’or. ALP


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Le viager comme substitut au crédit bancaire

L

a crise financière est en train de devenir crise du crédit et commence à avoir des effets très concrets pour les particuliers. Les banques, en manque de liquidités, traitent les demandes de crédits immobiliers avec beaucoup plus de sévérité, les taux augmentent et le marché du neuf montre ses premiers signes de faiblesse. Dans un tel contexte, comment trouver un moyen fiable de réaliser un projet immobilier qui tient à cœur ?

Le viager peut-il constituer une alternative crédible ? Par ailleurs, beaucoup de gens s’inquiètent pour l’avenir de leur retraite et voient dans la vente d’un actif immobilier en viager un excellent moyen de compléter une pension insuffisante. Il semble donc que l’époque soit favorable au développement des transactions en viager puisque les intérêts des vendeurs et des acheteurs paraissent vouloir converger. Pour répondre à ces questions, il convient d’abord de bien définir ce mode de transaction immobilière entre un vendeur et un acheteur. Le viager consiste à céder un

bien immobilier avec un règlement en deux parties. La première consiste à percevoir un capital que l’on appelle « le bouquet », la seconde est constituée par une rente versée par l’acquéreur à échéance régulière et aussi longtemps que le cédant demeure vivant. La rente est en général indexée afin de conserver intacte sa valeur. La clause de révision permet une évolution automatique de la rente suivant l’indice choisi par les parties. Le Code civil offre un choix d’indices comme celui de la consommation fixé par l’INSEE ou encore celui de la construction. Par analogie, on peut donc estimer que le bouquet peut s’assimiler à l’apport de l’emprunteur dans le cadre d’un crédit bancaire, la rente représentant les remboursements réguliers. A ceci près, et le détail est d’importance, que la durée de l’opération et des paiements est, par définition, inconnue puisqu’elle dépend entièrement de la durée de vie du vendeur et, éventuellement de son conjoint, puisque le viager peut être signé sur une ou deux « têtes ». De plus, la vente d’un bien en viager comporte, pour le vendeur, un avantage fiscal fixé en fonction de l’âge qui peut aller jusqu’à 70% de



Interview

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la part imposable. Le contrat de vente est rédigé par un notaire. Ce dernier est aussi un conseil compétent qui peut éclairer vendeur et acheteur sur les obligations réciproques des contractants. Pour le vendeur, le notaire saura apprécier avec précision la solvabilité de l’acheteur et le sérieux de sa démarche, pour l’acheteur, il saura le renseigner sur la sécurité juridique de la transaction envisagée au regard de la présence d’éventuels héritiers du vendeur et de l’état du bien cédé. Le notaire, parfaitement au fait de la fiscalité des transactions viagères, saura aussi informer le vendeur sur les avantages fiscaux liés à la rente. Dès la signature du contrat, la propriété du bien est transférée à l’acheteur. Le bouquet est librement fixé entre le vendeur et l’acheteur. Dans le cadre d’une valeur globale de la transaction, plus le bouquet est élevé et plus la rente sera réduite. L’estimation du bouquet peut être délicate et le rôle de conseil du notaire est particulièrement utile. Un indice de référence régit l’indexation de la rente.

Plus le vendeur est âgé et plus le bouquet est important. Dans le principe, la rente est fixée librement entre le vendeur et l’acheteur mais dans la pratique le notaire intervient. Le montant de la rente est lui aussi fonction de l’âge et de l’espérance de vie du vendeur. La périodicité des versements figure dans le contrat. Le bien immobilier est en général cédé occupé mais dans le cadre d’une transaction visant à faire du bien acquis une résidence principale, le bien doit être libre, ce qui n’est pas le plus simple à trouver. Pour l’acquéreur, on peut considérer qu’une fois le bouquet et la rente fixés, il bénéficie d’un crédit gratuit. Si le vendeur a une durée de vie dans la moyenne statistique ou inférieure, l’affaire aura été équilibrée et chacun y aura trouvé son compte, si le vendeur vit plus longtemps que la moyenne,

l’acheteur aura payé le bien au-delà de sa valeur estimée au moment de la transaction. C’est un risque à courir dans le contexte actuel où monter un dossier de crédit devient plus difficile. De plus il faut noter que dans ce domaine l’égalité homme/femme n’existe pas car les femmes étant réputées vivre plus longtemps que les hommes, le montant de la rente versée à une femme dans une cession viagère sera plus faible que celle versée à un homme dont on estime qu’il en profitera moins longtemps… Comme dans le cadre d’un crédit bancaire, la défaillance de l’acheteur dans le paiement de la rente autorise le


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vendeur à utiliser toutes les voies de droit pour entrer en possession des sommes dues, y compris la vente judiciaire du bien si nécessaire. Par ailleurs, en cas de décès de l’acheteur, ce sont les héritiers qui devront s’acquitter de la rente s’ils veulent conserver la propriété du bien. Dans le cadre d’un viager libre, les héritiers peuvent disposer du bien à leur guise, l’occuper ou le mettre en location. Jusqu’à présent, le viager occupé représentait 95% des transactions. Cela permettait à des vendeurs de demeurer dans les lieux et de percevoir un revenu à vie, de surcroît faiblement imposé. Le viager libre, dont les montants du bouquet et de la rente

sont supérieurs à ceux du viager occupé, pourrait être un produit recherché. Une personne désirant se retirer dans une maison de retraite et en assurer les frais de pension pourra trouver avantage à céder en viager libre l’appartement ou la maison qui était sa résidence principale et elle trouvera facilement preneur. Le viager peut donc, dans la conjoncture qui s’annonce, devenir un moyen bien adapté aux difficultés de l’époque.

ALP

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Interview de M. Hervé Lapous Le viager, une affaire de spécialiste L’expérience d’un homme de l’art

Il y a trente cinq ans qu’Hervé Lapous exerce dans le domaine bien particulier de la transaction immobilière en viager. Sa société, Viager Lapous, existe depuis trente et un ans à la même adresse dans le 15ème arrondissement de Paris au 354 rue Lecourbe. C’est dire que le viager n’a plus de secret pour lui. Mais à chaque fois, à chaque transaction, il apprécie le versant humain de l’échange, la confrontation des expériences, l’approche de vies bien remplies et riches. La spécificité du viager est évidente. Se trouvent en présence des gens qui souhaitent acquérir un bien dans des conditions favorables et d’autres, par définition âgées, qui vendent leur bien immobilier en demeurant dans les lieux. Le vendeur en viager est rarement âgé de moins de 75 ans. Il faut donc à celui qui est l’intermédiaire dans ce genre de transaction une solide dose de psychologie d’une part et une véritable expertise juridique et fiscale d’autre part pour que les choses se passent au mieux entre celui qui vend et celui qui acquiert et n’entrera en jouissance du bien acquis qu’au décès du vendeur. Cette dimension n’est pas neutre on s’en doute. Hervé Lapous estime qu’il faut une formation de dix années pour maîtriser convenablement son sujet, et, dans tous les cas, une formation jamais inférieure à cinq ans. Il y a trente et un ans, quand il a créé sa société, le nombre de spécialistes sur Paris se limitait à trois. Aujourd’hui, les sites internet aidant, on compte une cinquantaine d’offres de conseil et de transaction. De l’avis d’Hervé Lapous, il n’est pas sûr que la sécurité juridique et fiscale des parties s’en trouve améliorée. La profession se trouve en effet confrontée de plus en plus souvent à quelques problèmes d’éthique et le grand public a tendance à s’aventurer à la légère dans des tran-

sactions un peu hasardeuses quant à leurs bonnes fins. Pour construire un contrat de viager solide qui satisfasse les deux parties, il faut prendre en compte toutes les dimensions du problème qui se pose à l’un et à l’autre des signataires. Les aspects juridiques et fiscaux réglés, il est nécessaire de tenir compte de l’environnement patrimonial, familial et humain de la négociation, notamment pour ce qui concerne le vendeur. Il faut prendre le temps indispensable à l’écoute des uns et des autres. Les difficultés ne naissent pas toujours des aspects financiers de l’accord mais, par exemple, de la présence d’héritiers aussi absents de l’entourage quotidien du vendeur que peu désintéressés et soudain soucieux de préserver un possible héritage. Leurs tentatives de circonvenir le vendeur pour le dissuader de vendre son bien portent parfois leurs fruits. On imagine donc la dose de psychologie et de connaissance qu’il faut posséder pour déjouer ce genre de manœuvre qui se termine le plus souvent au détriment du vendeur possible. Il voit disparaître ses héritiers aussi vite qu’ils sont venus l’assurer de leur amour et de leur soutien indéfectible et tout est à refaire : Il y a toujours du Balzac ou du Maupassant dans ces situations. C’est du reste ce qui, du point de vue d’Hervé Lapous, fait une part de l’intérêt de son métier. Il faut croire qu’il le fait bien puisqu’il aime montrer les six cents lettres de satisfaction reçues en plus de trente ans d’exercice. Après tant de temps, il dresse facilement cinq profils de vendeurs en viager. D’abord, ce sont plutôt des vendeuses puisque ce sont à 90% des femmes, veuves. Premier cas, très répandu, celui de la femme de commerçant qui a travaillé toute sa vie auprès de son mari mais qui n’a jamais été déclarée ou quasiment pas et qui se

Interview

retrouve veuve avec une pension de réversion ridicule. Propriétaire des murs d’une boutique et de l’appartement qui va avec, elle vend en viager pour s’assurer une rente et un capital représenté par le bouquet. Deuxième profil, celui de la femme qui, devenue veuve, a des revenus très insuffisants et des enfants qui ne peuvent lui venir en aide. Le viager constitue là encore une solution satisfaisante quand elle possède un actif immobilier. Le troisième cas est, à l’inverse, celui de la femme qui perçoit une retraire suffisante mais dont les enfants sont dans la précarité. Pour les aider, elle vend un bien en viager. Quatrième profil, celui du couple sans enfant qui a cependant des héritiers, neveux ou nièces. La vente en viager d’un bien immobilier suivi d’une donation sur le produit de cette vente permet d’éviter des droits de succession de l’ordre de 60%. Enfin, dernier cas, le plus navrant, celui des enfants qui ont rompu avec leurs parents ; ces derniers le plus souvent ne voient plus non plus leurs petits enfants et décident de vendre en viager un bien qui échappe ainsi à l’héritage. Lorsque mari et femme sont vivants c’est le plus sûr moyen de déshériter. Hervé Lapous a pu, au fil des ans, constater l’évolution du nombre de transactions. Le viager reste marginal mais, en nombre absolu, les transactions ont augmenté fortement. C’est là, selon lui, le résultat d’une plus grande visibilité dans les médias de ce type de vente. On a beaucoup parlé viager avec l’introduction du viager hypothécaire au début du quinquennat de l’actuel président de la République. On constate beaucoup d’offres mais beaucoup moins de concrétisations. C’est dans ce contexte que l’expérience et l’expertise, le savoir-faire du spécialiste, se montrent plus que jamais nécessaires.


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Actualités des partenaires

Interview d’Emmaüs

2012, année du centenaire de la naissance de l’abbé Pierre. C’est l’occasion de poser quelques questions à Madame Brigitte Mary, Responsable des archives du mouvement Emmaüs International. Quels évènements vont célébrer cette naissance ? Le premier et le plus important est l’ouverture au public, le 22 janvier 2012, du Centre Abbé Pierre Emmaüs à Esteville, près de Rouen. C’est dans ce village que repose l’abbé Pierre. Depuis son décès, nombreux sont, chaque année, les visiteurs qui viennent se recueillir sur sa tombe et visiter la maison dans laquelle il a vécu plusieurs années. Nous avons aménagé les lieux pour l’accueil du public, avec le souci que les visiteurs puissent, grâce à une scénographie adaptée, non seulement visiter la maison mais surtout prendre connaissance de l’œuvre de l’abbé Pierre. Le second événement de cette année sera la sortie en librairie, fin août, d’un beau livre publié par les éditions Bayard. Il contiendra de nombreuses archives personnelles de l’abbé Pierre, pour beaucoup, inédites. Emmaüs International, légataire universel de l’abbé Pierre, souhaite ainsi mieux faire connaître toute la richesse et la portée de l’action de l’abbé Pierre au long d’une vie bien remplie. Le livre présentera une sélection de documents couvrant toute sa traversée du siècle : son enfance, la jeunesse, la période monastique chez les Capucins de 1931 à 1939, les années 40 et la résistance, la députation de 1945 à 1951, puis son militantisme actif et constant pour une citoyenneté mondiale. Et bien sûr l’action la plus emblématique de l’abbé Pierre : la création d’Emmaüs en France en 1949 et son développement à travers le monde dès le milieu des années 50. Pendant six décennies, l’abbé Pierre n’a cessé de parcourir le monde pour œuvrer en faveur de la paix et contre les exclusions. Et, puisque l’abbé Pierre était prêtre avant tout, ce livre offrira une sélection de conférences, sermons et correspondances à caractère religieux ou spirituel.

Vous pensez que le public ne connaît pas déjà tout de l’œuvre de l’Abbé Pierre ? Loin de là ! Les Français ignorent presque tout de son action internationale. Nous devons diffuser sa pensée et son œuvre, poursuivre son action et interpeller l’opinion et les pouvoirs publics. Avec les Archives nationales du monde du travail à Roubaix, où sont déposées les archives de l’abbé Pierre, nous préparons une exposition qui ouvrira en octobre. Ce sera le troisième événement de cette année du centenaire. Comment sont organisées les structures nationales et internationales d’Emmaüs ? Emmaüs International est l’organisation voulue par l’abbé Pierre pour poursuivre son action, en France et partout dans le monde. Sa création intervient en 1971, à Montréal, à la suite d’un événement dramatique. En 1963, l’abbé Pierre se trouvait à bord d’un bateau qui traversait le Rio de la Plata et qui fit naufrage. L’abbé Pierre, d’abord considéré comme mort noyé, reprit connaissance. Ce fut pour lui l’occasion de prendre conscience de sa fragilité et de la nécessité de rassembler les groupes Emmaüs qui s’étaient constitués à travers le monde. C’est ainsi qu’en 1969, une centaine d’associations participèrent à la première assemblée mondiale Emmaüs à Berne (Suisse). Les associations Emmaüs en France sont affiliées à Emmaüs International ; elles sont également affiliées à Emmaüs France qui coordonne leur action et les représente auprès des pouvoirs publics. Parmi les membres français, outre les nombreuses communautés Emmaüs, deux sont bien connus des notaires : Emmaüs Solidarité (la plus ancienne association, créée en 1954) et la Fondation abbé Pierre, créée en 1992, pour le logement des défavorisés comme son nom l’indique. L’association Centre abbé Pierre – Emmaüs a été créée en 2010 pour mener l’action de ce lieu de mémoire et de diffusion de la pensée et de l’œuvre de l’abbé Pierre. Quelle est votre politique en matière de dons et legs ?

En réalité, la part des dons et legs dans les ressources d’Emmaüs International est faible : 0,9 % du budget vient de particuliers et 2% des entreprises sous forme de mécénat d’entreprise. C’est pourquoi, nous souhaitons mieux nous faire connaître. Nous savons bien que nous devons, à chaque instant, ranimer la flamme de la solidarité dans l’esprit du public. Les médias aident beauPour le Centre abbé Pierre – Emmaüs (CAPE) : ACAPE – 280 route de Cailly 76690 ESTEVILLE Tél. 02.35.23.87.76 – Fax 02.35.34.31.85 contact@centre-abbe-pierre-emmaus.org

coup à la mobilisation quand une catastrophe survient mais ceci de façon ponctuelle. Nous ne devons pas répondre seulement dans l’urgence de la catastrophe et sous l’effet de l’émotion. Il est essentiel de centrer notre action sur le long terme : la prévention, l’éducation et la formation, l’économie sociale et solidaire. Emmaüs International désire améliorer sa notoriété auprès des notaires qui sont les relais efficaces auprès d’éventuels donateurs. Quels sont vos projets à plus long terme, au-delà de cette année de célébration ? L’action de fond d’Emmaüs International se poursuit en effet. Elle est dirigée vers la lutte contre la pauvreté et l’exclusion sociale à travers le monde. Depuis 1971, nous soutenons les associations Emmaüs pour accroître leurs moyens d’action dans leur environnement particulier. Depuis 2003, nous développons un programme d’actions collectives en cinq points autour de l’accès aux droits humains fondamentaux pour les plus défavorisés. Le premier porte sur l’accès à l’eau potable et l’assainissement ; son action phare est un programme d’eau potable et d’assainissement avec gestion citoyenne sur le lac Nokoué au Bénin. Le second concerne l’accès à la santé, avec la création de mutuelles de santé pour les plus démunis, dans quatre pays ( Bénin, Burkina Faso, Bangladesh et Inde). Le troisième porte sur l’accès à l’éducation ; nos membres en Afrique, Amérique et Asie mènent depuis fort longtemps des actions dans ce domaine (crèches, écoles primaires, soutien scolaire, éducation non formelle adaptée aux besoins et aux réalités des populations concernées). Nous les soutenons et encourageons l’échange d’expériences. Le quatrième est axé sur les droits des migrants. Cette problématique concerne tous les continents ; raison pour laquelle nous avons publié Visa pour le monde, livre de témoignages de migrants accueillis dans les communautés Emmaüs du monde. Le cinquième programme s’est traduit par la création du Fonds mondial éthique Emmaüs, en coopération avec une banque éthique italienne ; son objectif est l’accès à un crédit bancaire adapté pour des activités économiques ayant une dimension de lutte contre l’exclusion. Comme vous le voyez, notre champ d’action est vaste, toujours en direction des plus défavorisés ; ce programme sera précisé et enrichi à l’occasion de notre prochaine assemblée générale mondiale en mars 2012.

Pour toute information et pour les donations et legs : Emmaüs International 47 avenue de la Résistance 93104 MONTREUIL Cedex Tél. 01.41.58.25.50 – Fax 01.48.18.79.88 contact@emmaus-international.org www.emmaus-international.org


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Droit notarial de l’entreprise (* suite et fin) II – Le droit des procédures collectives Au vue de l’abondance dont fait preuve cette matière, il conviendra d’envisager dans un premier temps l’actualité jurisprudentielle (A). Puis, dans un second temps, l’actualité législative (B). A – L’actualité jurisprudentielle Elle s’illustre tant par des arrêts traitants exclusivement aux entreprises en difficultés que par des décisions relatives au couple face à la faillite d’un des conjoints. • La possibilité pour le liquidateur de provoquer le partage d’une indivision successorale afin de déterminer les droits du conjoint survivant. Première chambre civile de la Cour de Cassation, 12 janvier 2011, n° 09-17.298 En l’espèce, M. décède est laisse pour lui succéder son épouse, avec qui il était marié sous la communauté légale, et son fils. Le conjoint survivant est donataire de la plus forte quotité disponible entre époux ; il opte pour le quart en pleine propriété et les trois quarts en usufruit des biens composants la succession. Cinq ans plus tard, la veuve fait l’objet

d’une liquidation judiciaire. A cette occasion, le liquidateur désigné a demandé à voir ordonner l’ouverture des opérations de compte, liquidation et partage de l’indivision portant sur divers immeubles entre l’épouse survivante et son fils héritier. La cour d’appel d’Orléans, par un arrêt du 12 octobre 2009, a jugé qu’il n’existait aucune indivision entre eux sur ces biens, en relevant que le conjoint survivant était à ce jour propriétaire des cinq huitièmes des biens auparavant communs et usufruitière des trois huitièmes restant, tandis que son fils était, en application de la même donation, nu-propriétaire des trois huitièmes de l’actif communautaire dont sa mère avait reçu usufruit. La Cour de cassation casse la décision de la cour d’appel car celle-ci a violé les articles 815 et 815-17 du Code civil. En effet, le droit en pleine propriété de la veuve ne portait que sur une quote-part de l’universalité des biens de la communauté et le fils était nupropriétaire du surplus, dès lors il existe bien une indivision entre les intéressés quant à la propriété des biens. Il faut en conclure que le liquidateur était en droit de provoquer le partage afin de faire déterminer les biens composant la part en pleine propriété du conjoint survivant.

• Les salaires du conjoint du débiteur compris dans l’actif de la liquidation judiciaire. Chambre commerciale de la Cour de cassation, 16 novembre 2010, n° 09-68.459 En l’espèce deux époux communs en bien ont donné à bail un immeuble. Un litige a opposé les parties quant à l’exécution des travaux réclamée par le preneur. L’époux a été mis en redressement puis en liquidation judiciaire. Le preneur a assigné les époux pour demander leur condamnation au paiement d’une certaine somme au titre des travaux. Les époux bailleurs ont ensuite été condamnés solidairement à payer une indemnité au locataire pour trouble de jouissance. Le preneur a alors saisie le juge de l’exécution d’une demande tendant à la saisie des rémunérations de l’épouse in bonis. La cour d’appel de Versailles le 30 avril 2009, a autorisé la saisie des rémunérations de l’épouse en retenant que «le fait que la partie de la dette des réparations, antérieures à la mise en liquidation judiciaire, mise à la charge de l’épouse ne puisse être recouvrée sur les biens de la communauté compris dans l’actif de la procédure collective, qu’après paiement de tous les créanciers de la liquidation,


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ne s’oppose pas à la saisie des rémunérations de celle-ci à nature de revenus ». Au visa des articles L. 62140 du Code de commerce dans sa rédaction antérieure à la loi du 26 juillet 2005 de sauvegarde des entreprises et les articles 223 et 1413 du code civil, la chambre commerciale de la cour de Cassation le 16 novembre 2010 a cassé et annulé l’arrêt de la cour d’appel selon le motif «que les salaires d’un époux marié sous un régime de communauté sont des biens communs frappés par la saisie collective au profit des créanciers de l’époux mis en procédure collective qui ne peuvent être saisis, pendant la durée de celle-ci, au profit d’un créancier de l’époux, maître de ses biens, la cour d’appel a violé les textes susvisés».

La cassation ne semble pas justifiée car même si les gains et salaires d’un époux sont des biens communs ils ne sont pas pour autant le gage ordinaire de l’ensemble des créanciers de la communauté. En principe, selon l’article 1413 du Code civil les créanciers d’un époux, en qualité de créanciers de la communauté, peuvent poursuivre le recouvrement de leurs créances sur tous les biens communs mais l’article 1414 dispose que les gains et salaires d’un époux ne peuvent être saisis par les créanciers de son conjoint que si l’obligation a été contractée pour l’entretien du ménage ou l’éducation

des enfants conformément à l’article 220. La Cour de cassation s’est fondée sur l’article 1413 alors que les salaires relèvent de l’article 1414 or seul l’article 1413 semble fonder l’inclusion des biens dans l’actif de la procédure collective et donc l’arrêt des poursuites individuelles des créanciers de l’époux in bonis. • Appréciation de la situation de surendettement de l’épouse d’un débiteur en redressement judiciaire. Deuxième chambre civile de la Cour de cassation, 6 janvier 2011, n° 09-7248 Cet arrêt marque la difficulté de distinguer entre procédures du Code de commerce et procédure d’insolvabilité du Code de la consommation quand les dettes appartiennent à plusieurs débiteurs En l’espèce, l’ouverture d’une procédure de surendettement avait été demandée par l’épouse d’un travailleur indépendant soumis à un redressement judiciaire. Une commission de surendettement des particuliers a déclaré recevable la demande de l’épouse de traitement de sa situation de surendettement. Des créanciers ont formé un recours contre cette décision. Le juge de l’exécution du tribunal d’instance de Chalon-sur-Saône, a accueilli le recours et a déclaré la demande de l’épouse irrecevable. L’épouse a alors formé un pourvoi estimant

que ses dettes étant non professionnelles elles pouvaient être traitées par la commission de surendettement (article L.330-1 Code de la consommation). La deuxième chambre civile de la Cour de cassation du 6 janvier 2011 rejette le pourvoi et confirme la décision du juge de l’exécution en affirmant que « ne peut prétendre au bénéfice de la procédure de surendettement des particuliers le débiteur dont le passif est inclus dans la procédure collective de son conjoint.»

Des dettes traitées par une procédure collective commerciale ne peuvent pas justifier l’ouverture d’une procédure civile de surendettement. Depuis le 1er janvier 2006, le travailleur indépendant ne peut plus bénéficier d’une procédure de surendettement des particuliers puisqu’il peut bénéficier d’une procédure collective du Code de commerce et cet arrêt démontre que son conjoint ne le peut pas non plus si les dettes sont traitées dans le cadre d’une procédure collective. C’est une lecture extensive de l’article L.330-1 du Code de la consommation qui est faite dans cet arrêt. • L’avance de trésorerie qualifiée d’actif disponible par la Cour de cassation : une rupture avec la jurisprudence antérieure. Chambre commerciale de la Cour de cassation, 16 novembre 2010, n° 09-71.278


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En l’espèce, une filiale avait bénéficié d’avances afin de ne pas être en état de cessation des paiements et de pouvoir mener à bien la cession de l’une de ses propres filiales. Malgré cela, le tribunal a ouvert une procédure de redressement judiciaire à l’encontre de la société en cause et a fixé provisoirement la date de cessation des paiements au 31 décembre 2008, par un jugement du 20 février 2009.

antérieure dite « Smoby » (Cass. com., 24 mars 2009, n°08-12.212), en effet, la solution inverse était retenue par les juges. Ces derniers se fondaient sur le fait que « les relations économiques de sociétés au sein d’un groupe ne sauraient conduire en droit chacune de celles-ci à renoncer à recouvrer ses créances ». Cette solution semble définitivement obsolète.

La cour d’appel de Riom, le 23 septembre 2009, confirme le jugement aux motifs que « les avances de trésorerie faites par des sociétés d’un groupe de sociétés sont exigibles et ne peuvent être considérées comme un prêt à moyen terme ni comme des fonds propres » De ce fait, la société était bien « en état de cessation des paiements dès avant le 31 décembre 2008 et c’est au minimum à cette date que peut être fixée provisoirement la date de cessation des paiements »

Ce revirement de jurisprudence suit l’orientation donnée par l’ordonnance du 18 décembre 2008 qui apporte une précision fondamentale : « le débiteur qui établit que les réserves de crédit ou les moratoires dont il bénéficie lui permettent de faire face au passif exigible avec son actif disponible n’est pas en état de cessation des paiements ». Les avances en trésorerie entre sociétés d’un même groupe sont de l’essence même de cette structure car elles permettent une souplesse de gestion et peuvent participer au sauvetage d’une société en palliant ses difficultés financières passagères.

La Cour de cassation casse l’arrêt rendu par la cour d’appel en disposant qu’ « une avance de trésorerie qui n’est pas bloquée ou dont le remboursement n’a pas été demandé constitue un actif disponible ». En l’espèce, si la cession souhaitait par la société s’effectue à un prix honorable, une telle avance permettrait à cette société de se redresser en rendant disponible un de ses éléments d’actif. Cet arrêt constitue une rupture avec la jurisprudence

• Le candidat repreneur évincé dépourvu de tous recours. Chambre commerciale de la Cour de cassation, 14 décembre 2010, n° 10-17.235 En l’espèce, la société a fait une offre de reprise du bien immobilier, appartenant à une société en liquidation judiciaire et dans lequel elle

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exploitait son activité. Cependant, la situation de la société candidate à la reprise était particulière car, à l’expiration du bail qui lui avait été consenti, elle occupait sans droit ni titre l’immeuble cédé. Ainsi, par une ordonnance du 1er septembre 2009, son offre de reprise est rejetée par le jugecommissaire qui ordonne la vente par adjudication judiciaire de l’immeuble « libre de toute occupation ». La société a donc formé un recours contre cette ordonnance ; qui de ce pas est déclaré irrecevable par le tribunal. La cour d’appel de Versailles, le 11 mars 2010, admet son appel-nullité considérant que le tribunal a commis un excès de pouvoir en déclarant irrecevable le recours de la société occupant l’immeuble et a consacré l’excès de pouvoir du juge-commissaire qui a ordonné implicitement à cette société de libérer les lieux. Le liquidateur forme un pourvoi en cassation. La Cour de cassation casse, sans renvoi, l’arrêt d’appel au motif que « n’ayant aucune prétention à soutenir au sens des articles 4 et 31 du Code de procédure civile le candidat évincé n’est pas recevable à interjeter appelnullité ». N’émettant pas de prétention, le candidat repreneur dont l’offre a été rejetée n’a pas, comme en matière de plan de cession1, la qualité de partie et ne peut contester l’ordonnance du juge-commissaire. L’appelnullité contre le jugement


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d’irrecevabilité de son recours ne lui est ouvert qu’en cas d’excès de pouvoir. Or, la Cour de cassation n’approuve pas la cour d’appel d’avoir considéré qu’en ordonnant la vente de cet immeuble « libre de toute occupation », le juge-commissaire a commis un excès de pouvoir consacré par le tribunal. • L’ assouplissement de la jurisprudence en matière de déclaration de créance par le mandataire. Assemblée plénière de la Cour de cassation, 4 février 2011, n° 09-14.619 En la matière de déclaration de créance effectuée par le chef de file d’un pool bancaire2, tant en son nom personnel qu’au nom de chacun des établissements membres du pool, appartient-il à ce dernier de produire un pouvoir spécial et écrit de chacun des membres du pool lors de la déclaration des créances ou dans le délai légal de cette déclaration ? C’est à cette question qu’une assemblée plénière a répondue dans cet arrêt. En l’espèce, la société, tant en son nom personnel qu’au nom de trois établissements de crédit constituant le groupement dont elle était «le chef de file», a déclaré des créances au titre d’un crédit-bail au passif de la liquidation judiciaire. La cour d’appel de Paris, le 26 février 2009, sur renvoi après cassation (Com., 3 octobre 2006, n° 04-11.024), décide

qu’après la mise en redressement puis liquidation judiciaires de la société, le tribunal a étendu cette procédure à une autre société du groupe sur le fondement de la confusion des patrimoines. Ainsi, la société tant en son nom personnel qu’au nom des établissements de crédit constituant le groupement dont elle était « le chef de file », a déclaré des créances au titre d’un créditbail et ce régulièrement donc les créances ainsi déclarées sont admises. Les sociétés débitrices et leur liquidateur judiciaire font grief à l’arrêt de la cour d’appel de déclarer régulières les déclarations de créances. En effet, la déclaration des créances équivaut à une demande en justice. La personne qui déclare la créance d’un tiers doit, si elle n’est pas avocat, être munie d’un pouvoir spécial, donné par écrit, avant l’expiration du délai de déclaration des créances. En cas de contestation, il peut en être justifié jusqu’au jour où le juge statue. La Cour de cassation dans son arrêt de rejet du 4 février 2011, dispose que « la cour d’appel, qui a constaté que la société avait justifié, pour chacune des sociétés dont elle avait déclaré la créance, d’un pouvoir spécial écrit délivré dans le délai imparti pour effectuer la déclaration, en a exactement déduit que cette déclaration était régulière ». Ainsi, tout en réaffirmant le principe de la nécessité d’un

pouvoir spécial et écrit, produit dans le délai légal de la déclaration à défaut d’accompagner celle-ci, en atténue quand même singulièrement la rigueur sur le plan probatoire, admettant qu’il puisse en être justifié jusqu’au jour où le juge statue. Le sort du créancier se trouve enfin unifié qu’il procède à la déclaration de sa créance par voie de préposé ou de mandataire. Assouplissement qui, bien entendu, ne profite pas qu’au seul pool bancaire, que l’attendu de l’assemblée plénière ne mentionne d’ailleurs pas en particulier, mais à tous les créanciers. Jusqu’ici, en effet, malgré certains flottements, la Cour de cassation s’en était tenue à une subtile distinction. Alors que la preuve de la délégation de pouvoirs a toujours pu être rapportée jusqu’à ce que le juge statue sur l’admission de la créance, par la production de documents ayant, ou non, acquis date certaine (Com. 14 déc. 1993, Bull. civ. IV, n° 471), il apparaissait acquis, en revanche, que le pouvoir donné au mandataire ad litem devait accompagner la déclaration de créance ou être produit dans le délai de celleci (Com. 19 nov. 1996, Bull. civ. IV, n° 277). La question, ainsi posée à l’Assemblée plénière, saisie dans cette affaire sur second pourvoi après cassation, n’est pas nouvelle, puisque la même formation plénière avait déjà eu l’occasion d’y répondre, il y a tout juste dix ans, et déjà sur second pourvoi1. Ce qu’elle avait fait de la façon la plus


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classique, jugeant, après avoir rappelé le ferme postulat prétorien selon lequel « la déclaration des créances équivaut à une demande en justice  », que « la personne qui déclare la créance d’un tiers doit, si elle n’est pas avocat, être munie d’un pouvoir spécial donné par écrit », étant précisé que « la recherche d’éléments de preuve d’un mandat tirés des circonstances de la cause ne peut suppléer l’absence de production d’un pouvoir spécial et écrit lors de la déclaration ou dans le délai légal de cette déclaration ». La même solution, souvent critiquée pour sa sévérité et son manque de considération pour la spécificité du pool bancaire, allait encore se retrouver dans des décisions ultérieures rendues par la chambre commerciale (Com. 30 janv. 2007, n° 05-17.141). Elle trouve sa justification dans la circonstance que le chef de file, n’étant pas un organe social légalement habilité à représenter le pool, fût-il constitué sous forme de société en participation, faute de personnalité morale de celui-ci, relève du droit commun du mandat. Aujourd’hui, il semblerait que l’assemblée plénière procède à un revirement de jurisprudence en assouplissant la déclaration de créance sur le plan probatoire. En effet, elle admet que la condition du pouvoir spécial puisse être établie par le créancier jusqu’au jour où le juge statue. B – L’actualité législative Deux grandes nouveautés se-

ront traitées : la sauvegarde financière accéléré et l’ordonnance n° 2010-1512 du 9 décembre 2010 portant adaptation du droit des entreprises en difficulté et des procédures de traitement des situations de surendettement à l’EIRL. • La sauvegarde financière accélérée est arrivée (SFA). Les articles 57 et 58 de la loi 2010-1249 du 22 octobre 2010 de régulation bancaire et financière apporte quelques retouches au régime des procédures collectives. Sa principale innovation réside dans l’institution d’une nouvelle procédure : la sauvegarde financière accéléré (déjà surnommée SFA par les praticiens). La sauvegarde financière accélérée porte bien son nom. Elle est financière pour ne concerner que le comité des établissements de crédit et éventuellement l’assemblée des obligataires des grandes entreprises. Elle est accélérée pour être circonscrite dans un délai d’un mois. Elle est une sauvegarde, une procédure préventive, dont la première phase, obligatoire, est une conciliation assurant la prénégociation du plan que le tribunal pourra arrêter rapidement. La sauvegarde financière accélérée entrera en vigueur à compter du 1er mars 2011. Une fois de plus en matière de droit des entreprises en difficulté, la pratique ouvre la voie au législateur : la SFA consacre l’expérience d’un « prepackaged », plan à la

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française dont l’inspiration vient du droit américain, plus précisément du « prepackaged restructuring plan ». Cette procédure qui est une variante de la sauvegarde est originale. En effet, elle est une procédure préventive semi-judiciaire car sa première phase est d’abord contractuelle (le passage par la conciliation est obligatoire). Puis, elle est semi-collective car elle ne concerner que les créanciers financiers et les grandes entreprises. En effet, elle ne vise que les entreprises fortement endettées à l’égard de leurs établissements de crédit, éventuellement de leurs obligataires (C. com., art. L. 628- 1, dern. al.). Elle n’est offerte qu’aux entreprises pour lesquelles la constitution de comités de créanciers est obligatoire (C. com., art. L. 628-1, al. 2). La nouvelle procédure est donc sélective discriminant entre les débiteurs et les créanciers. La SFA est une procédure doublement préventive. Procédure hybride, elle conjugue deux techniques préventives, l’une contractuelle, la conciliation, l’autre judiciaire, la sauvegarde, en les rendant complémentaires. La souplesse contractuelle permet la préparation et la finalisation du futur plan de sauvegarde ; la contrainte judiciaire, une fois le plan arrêté par le tribunal, permet de lier les créanciers financiers affectés par la procédure. Cette alliance se retrouve dans les conditions d’ouverture de la nouvelle


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procédure : le débiteur doit être engagé dans une procédure de conciliation en cours (C. com., art. L. 628-1), le tribunal statue sur l’ouverture de la procédure après rapport du conciliateur sur le déroulement de la conciliation et sur les perspectives d’adoption du projet de plan par les créanciers concernés (C. com., art. L. 628-2). Le débiteur ne doit pas être en cessation des paiements mais rencontrer « d’insurmontables difficultés » (C. com., art. L. 620-1). Deux techniques au service de la SFA, mais elle est un unique instrument de redressement : le conciliateur, en principe, est nommé administrateur (C. com., art. L. 628-3), le dépaysement de la conciliation vaut pour la SFA (C. com., art. L. 628-7). La SFA est doublement accélérée. Vouée au traitement précoce des difficultés et à l’efficacité du redressement anticipé du débiteur la SFA est rapide par essence. D’une part, le plan doit être arrêté dans le mois, (prorogeable une fois) qui suit son ouverture (C. com., art. L. 628-6), à défaut la procédure prend fin. D’autre part, le délai minimum accordé dans l’article L. 626-302 aux comités de créanciers pour se prononcer sur le plan proposé passe de quinze jours à huit jours. A travers cette nouvelle procédure, le chef d’entreprise est incité par le législateur à recourir aux procédures de prévention des difficultés. Il faut en conclure que lorsqu’il

est confronté à des difficultés, le chef d’entreprise ne doit pas hésiter à obtenir la désignation d’un mandataire ad hoc ou d’un conciliateur le plus en amont possible. • L’ordonnance n°2010-1512 du 9 Décembre 2010 portant adaptation du droit des entreprises en difficulté et des procédures de traitement des situations de surendettement à l’entrepreneur individuel à responsabilité limitée. Le livre IV du Code de commerce a été retouché en vue de l’adapter à l’entrepreneur individuel à responsabilité limitée. Cette ordonnance, publiée au Journal officiel du 10 Décembre 2010, règle la question de l’étanchéité du patrimoine en cas de procédures collectives. Elle permet à un entrepreneur individuel de limiter le gage de ses créanciers professionnels aux biens qu’il aura décidé d’affecter à un patrimoine professionnel qu’il détient séparé de son patrimoine personnel. Le nouvel article L.680-1 du code de commerce souligne qu’en matière d’EIRL il convient de raisonner désormais en termes de patrimoine et non de personne. Seule l’activité à l’occasion de laquelle les difficultés seront apparues subira la procédure collective ouverte à l’encontre du patrimoine affecté, le ou les autres patrimoines demeurant in bonis. Un entrepreneur pourra donc se trouver soumis à une procédure collective au titre

d’une activité et du patrimoine qui y est affecté, tout en poursuivant une activité distincte, à laquelle un autre patrimoine est affecté, et indifférente aux effets de la première procédure. Le principe de la séparation des patrimoines n’est toutefois pas absolu, en raison d’un souci de protection des créanciers. Cette séparation n’est pas parfaitement étanche et les notions de fraude, de faute et d’abus pourront être utilisées comme mécanismes correcteurs (des nouveaux cas de faillite personnelle et de banqueroute ont été introduits). Une action en réunion des deux patrimoines est également prévue pour restaurer l’unité patrimoniale, ajouté à cela un nouveau cas de nullité relative de la période suspecte apparaît en vue de neutraliser l’affectation intervenue après la cessation des paiements (article L.632-1 du Code de commerce). En cours de procédure collective ouverte à l’égard d’un patrimoine affecté, l’article L 680-6 du Code de commerce prévoit une exception à l’interdiction faite au débiteur de modifier l’affectation d’un bien compris dans le patrimoine faisant l’objet de la procédure. Si le débiteur est dessaisi cette prérogative lui échappera néanmoins. De plus une extension de procédure d’un patrimoine vers un autre peut intervenir en cas de confusion entre les patrimoines concernés en cas de «relations financières


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anormales» entre les patrimoines selon l’article L.621-2 du Code de commerce. Enfin d’autres dispositions ont également été modifiées telles que la responsabilité pour insuffisance d’actifs ou la reprise des poursuites individuelles en cas de clôture de la liquidation judiciaire pour insuffisance d’actifs. L’entrepreneur se trouve en définitive dans une situation identique à celle d’un gérant d’EURL. III – Le droit commercial Dans un souci d’homogénéité et selon notre volonté de nous inscrire dans la continuité de nos précédents travaux en droit commercial, nous introduirons la présente section par une brève actualité concernant le contrat de fiducie. Précédemment, nous avons relaté la constitution d’un registre national des fiducies permettant la lutte contre l’évasion fiscale, le blanchiment des capitaux et le financement du terrorisme. A ce titre, une réponse ministérielle visant à améliorer la transparence et la régulation du système financier français, en date du 4 novembre 2010, fait écho au décret n°2010-219 du 2 mars 2009. La ministre de l’économie, de l’industrie et de l’emploi précise que le trust n’existe pas en droit français et que la fiducie a été instituée de manière à ce que soit assuré un haut degré de transparence. Elle rappelle que les contrats et leurs avenants doivent, à peine de nullité, être enregistrés auprès du

Veille et actualités juridiques

service des impôts compétent et faire apparaître l’identité du ou des constituants et fiduciaires, ainsi que celle du ou des bénéficiaires. Ces brefs éléments, visant à militer en faveur du renforcement de la transparence des sociétés et des constructions juridiques, ont pour finalité de rappeler que le ministère participe activement aux travaux de l’OCDE et du GAFI comme en témoigne l’actualisation et la conservation des informations assurées par le registre national des fiducies. Dans le cadre de cette étude, nous analyserons les sujets suivants : les modalités de révision des loyers (A), le conflit entre le privilège spécial du bailleur d’immeuble et le droit du vendeur sous réserve de propriété (B) et enfin la résolution du bail commercial (C). A – Les modalités de révision des loyers : une faculté encadrée • Les indices applicables à la révision légale des loyers. Une dualité d’indices trimestriels existe pour la révision légale des baux commerciaux, à savoir l’indice du coût de la construction (ICC) ou l’indice des loyers commerciaux (ICL) dans la mesure où il est applicable dans un secteur d’activité défini par le décret n° 2008-1139 du 4 novembre 2008. Ces indices peuvent également être retenus pour une indexation conventionnelle dite « clause d’échelle mobile ». La valeur de ces indices pour le troisième trimestre 2010

vient de paraître ; elle s’élève à 1520 pour l’indice du coût de la construction et à 102,36 pour l’indice des loyers commerciaux. L’indice du coût de la construction progresse de 1,20 % sur un an, de 5,34 % sur 3 ans et de 32,75 % sur 9 ans. Quant à l’indice des loyers commerciaux, il est en hausse de 1,14 % sur un an. • La prise en compte de l’activité du sous-locataire comme critère de détermination de la modification d’éléments de la valeur locative. Troisième chambre civile de la Cour de cassation, 8 décembre 2010, n° 09-70.784 En l’espèce, Mme X, Mr Y et la société Foncière du littoral méditerranéen, propriétaire d’un immeuble situé à Cannes ont donné à bail cet immeuble à usage commercial, à la société Mac Donald’s France et pour partie sous loué à la société le Grand Café. Les propriétaires ont assigné la locataire devant le juge des loyers commerciaux pour voir fixer le loyer du bail renouvelé.

La Cour d’appel a soutenu pour justifier l’absence de déplafonnement du loyer que l’augmentation du nombre de congressistes dans la ville n’avait pas présenté d’intérêt pour le commerce de restauration rapide exploité par la société Mac Donald’s France, et par ailleurs l’activité de la sous-locataire ne devait pas être pris en compte comme critère de détermination de la modification de certains éléments de la valeur locative.


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Un pourvoi est formé et la Cour de Cassation dans un arrêt du 8 décembre 2010 vient censurer le raisonnement de la cour d’appel sur le fondement de l’article L145-34 du Code de commerce en affirmant qu’ « en statuant ainsi, alors que l’intérêt que présente une telle modification doit être appréciée au regard de la ou des activités commerciales exercées dans les locaux loués, sans qu’il y ait lieu d’exclure de cet examen l’activité d’un sous locataire, la cour d’appel n’a pas donné de base légale à sa décision. » D’une part, il est à préciser que cet arrêt effectue une stricte interprétation de l’article L145- 34 du Code de commerce. En effet, ce dernier prévoit qu’en cas de renouvellement du bail commercial, le loyer renouvelé peut être déplafonné sans référence à un indice et fixé la valeur locative à condition qu’une des parties prouve des modifications notables intervenues au cours du bail expiré. D’autre part, la Cour de cassation accepte de prendre en compte l’activité exercée par le sous-locataire des locaux commerciaux pour apprécier l’évolution des facteurs de commercialité. L’arrêt semble consacrer une nouvelle règle. En effet, pour la première fois à la Cour de Cassation prend en compte l’activité du bailleur qui est plus large que celle du preneur car elle comprend l’activité du sous-locataire. Pour le cas où le bail serait notarié, il est possible de prévoir des clauses de révision conventionnelles qui pourront à présent prendre en compte

l’activité du sous locataire pour la modification des éléments de la valeur locative. B – Le conflit entre le privilège spécial du bailleur d’immeuble et le droit du vendeur sous réserve de propriété Chambre commerciale de la Cour de cassation, 16 novembre 2010, n° 09-70.765 En application d’une part, d’une ordonnance de référé condamnant le preneur au versement d’une provision sur les loyers impayés et d’autre part, d’une ordonnance du juge de l’exécution ordonnant la vente aux enchères des meubles garnissant les lieux loués, les bailleurs ont fait procéder à une saisie-vente des biens précités. Suite à la saisie, le fournisseur du preneur conteste la vente aux enchères des biens, certes présents dans les locaux commerciaux, mais vendus sous réserve de propriété, ce qui suscite l’interrogation suivante : la vente sous réserve de propriété, d’un bien mobilier à un preneur à bail commercial, fait-elle échec à l’exercice du privilège du bailleur d’immeuble ? Tout d’abord, la Cour d’appel de Paris, en date du 3 septembre 2009, répond à cette question en ordonnant la restitution des meubles, au profit du vendeur, au motif que le privilège du bailleur d’immeuble ne saurait primer la revendication en propriété exercée par le vendeur. En effet, ce dernier étant resté propriétaire des biens vendus (par l’effet de la clause de réserve de propriété stipulée dans le contrat

de vente conclu avec le preneur), l’assiette du privilège se trouve limitée au patrimoine du preneur dans le lequel les meubles litigieux ne sont jamais entrés. Face à une telle position des juges du fond, la chambre commerciale de la Cour de cassation se voit dans l’obligation de casser l’arrêt rendu par la Cour d’appel. Au visa de l’article 2332 du code civil, dont il est ici fait une stricte application, les Hauts Magistrats rappellent que le privilège porte sur « le prix de tout ce qui garnit la maison louée » sans distinction de propriété. Ainsi, conformément à la jurisprudence antérieure (troisième chambre civile de la Cour de cassation, 24 juin 2009, n°08-14357), les juges affirment que le privilège du bailleur prime le droit de propriété du vendeur. Ce dernier ne peut exiger le retrait de la vente aux enchères des biens vendus au preneur sous réserve de propriété. Le motif soulevé par la Cour d’appel de Paris selon lequel les biens ne sont jamais entrés dans le patrimoine du débiteur se trouve dès lors écarté : ce qui compte, selon l’article 2332 du code civil, c’est la présence du bien dans les lieux loués. Par conséquent, la qualité de propriétaire se trouve relayée au second plan. Enfin, il semble légitime d’insister sur le fait que cette solution est très protectrice des intérêts du bailleur. L’arrêt prévoit que tous les biens sont soumis au privilège, même s’ils appartiennent à un tiers, mais une limite est posée : la preuve que le bailleur connais-


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sait l’origine des meubles au moment de leur introduction dans l’immeuble permet d’écarter l’application du privilège (rappel de la solution jurisprudentielle édictée depuis l’arrêt de la première chambre civile de la Cour de cassation du 12 mai 1969 n°67-14485). Néanmoins, cette limite est à relativiser car une telle preuve sera, en pratique, difficile à rapporter sauf hypothèse dans laquelle le vendeur informerait, préventivement, le bailleur de sa qualité de propriétaire. Ainsi, en sa qualité de conseil, lors de la conclusion d’un bail commercial, il appartient au notaire de proposer au bailleur la conclusion d’un contrat de cautionnement pour garantir le recouvrement des loyers : conseil assez classique en la matière mais qui reste tout de même plus protecteur du créancier bailleur en cas de connaissance de la qualité propriétaire d’un tiers (solution de l’arrêt commenté) comme en cas d’insuffisance de valeur des biens garnissant les locaux commerciaux. C – La résolution du bail commercial • L’affirmation de la sanction de la nullité de la clause résolutoire d’un bail commercial stipulant un délai de quinze jours pour son acquisition. Troisième chambre civile de la Cour de cassation, 8 décembre 2010, n° 09-16.939 En l’espèce, la société civile immobilière (SCI) Challenge, propriétaire de locaux à usage

commercial a donné à bail ses locaux à la société en nom collectif (SNC) Le Longchamp. Ce bail prévoyait qu’à défaut de paiement d’un seul terme de loyer à son échéance exact ou d’exécution d’une seule des conditions du bail et quinze jours après un simple commandement de payer ou une sommation d’exécuter contenant mention de la clause restée sans effet, le bail serait résilié de plein droit. La SCI a délivré à la SNC Le Longchamp un commandement visant la clause résolutoire du bail, puis l’a assignée en acquisition de la clause. Après un premier jugement, la Cour d’Appel de Rennes, le 10 juin 2009, a prononcé la nullité de la clause résolutoire de plein droit insérée au bail. La SCI Challenge a formé un pourvoi en Cassation. Le bailleur a plaidé la nullité de la seule stipulation erronée pour éviter la nullité totale de l’action. La troisième chambre civile dans un arrêt du 8 décembre 2010 affirme que « la cour d’appel a retenu à bon droit que la mention dans la clause résolutoire insérée au bail d’un délai de quinze jours tenait en échec les dispositions d’ordre public de l’article L. 145-41 du Code de Commerce aux termes duquel toute clause prévoyant la résiliation de plein droit ne produisant effet qu’un mois après un commandement demeuré infructueux, en a justement déduit que, l’article L. 145-15 du même code édictant la nullité de toute clause ayant pour effet de faire échec aux dispositions de l’article L. 145-41, la clause résolutoire insérée au bail litigieux

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était nulle ». Dans le même sens, jugeant que doit être annulée la clause résolutoire impartissant au locataire un délai de huit jours pour s’exécuter, Paris, 28 sept. 2005, Gaz. Pal. 16-17 juin 2006. 28, obs. C.-É. Brault ; Loyers et copr. 2006, n° 37, obs. Brault. La Cour de cassation déduit de ces textes la nullité de la clause résolutoire du bail commercial stipulant un délai de quinze jours pour son acquisition. Cependant, l’article L.145-41 n’oblige pas que la clause résolutoire mentionne le délai d’ordre public d’un mois, il interdit seulement qu’une clause produise ses effets avant ce délai. Aussi, le commandement comprenait la mention d’un délai d’un mois conformément à l’article sus cité. Mais la Cour de Cassation a retenu la sanction de la nullité. Cette solution se justifie par la volonté des juges de sanctionner le comportement du bailleur. En effet, la mention dans le bail d’un délai non conforme au délai de droit public entraîne la confusion chez le preneur concernant le temps qu’il dispose pour satisfaire ses obligations, dans le même sens, Cass. 3e civ., 3 oct. 2007, n° 06-16361, FS-P+B : Bull. civ. 2007, III, n° 161. Dans cette décision, la Cour de Cassation semble étendre la solution à l’atteinte aux dispositions de l’article L.14541, sa jurisprudence aux termes de laquelle en présence d’une clause contraire au droit au renouvellement, une cour d’appel ne peut prononcer une autre sanction que la nullité


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édictée par l’article L.145-15 Civ. 3e, 23 janv. 2008, Bull. civ. III, n° 11 ; D.2008. AJ 349, obs. Rouquet ; RTD civ. 2008. 292, obs. Fages ; JCP 2008. II. 10083, note Auque. Le statut des baux commerciaux étant impératif, lors de la rédaction d’une clause résolutoire insérée au bail notarié, le notaire devra veiller à respecter les dispositions du statut au titre desquelles figurent les articles L145-41 et L145-15 et suivants du Code de commerce. Aussi, face à de nombreux droits reconnus au preneur une clause résolutoire valable, ce qui suppose le respect de l’article L145-41, permettra au bailleur de récupérer son bien plus facilement en cas de manquement à ses obligations par le preneur. • Le légitime refus d’une inconstitutionnalité de l’article 1722 du Code civil. Troisième chambre civile de la Cour de Cassation, 4 janvier 2011, n° U 10-19.975 En l’espèce, la société Discothèque Le Malibu, en liquidation judiciaire pose la question de la constitutionnalité de l’article 1722 du Code civil au regard du principe constitutionnel du respect de la propriété privée garanti par les articles 2 et 17 de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen de 1789. L’article 1722 du code civil dispose que « si, pendant la durée du bail, la chose louée est détruite en totalité par cas fortuit, le bail est résilié de plein droit ; si elle n’est détruite qu’en partie, le preneur peut,

suivant les circonstances, demander ou une diminution du prix, ou la réalisation même du bail. Dans l’un et l’autre cas, il n’y a lieu à aucun dédommagement ».

Le liquidateur de la société demanderesse soutenait « qu’est sérieusement contestable la constitutionnalité de ce texte qui permet qu’un preneur à bail commercial soit privé de sa créance d’indemnité d’éviction, et donc d’un de ses biens, sans que cette privation soit justifiée par un intérêt général, sa justification relevant d’un intérêt privé consistant à libérer le locataire de l’obligation de payer le loyer lorsque la chose louée est détruite par cas fortuit ». Pour la Cour de Cassation la question n’est pas nouvelle, et ne présente pas un caractère sérieux. Par conséquent, les juges ont pu considérer dans leur arrêt du 4 janvier 2011 que l’exclusion de tout dédommagement quand le bail est résilié de plein droit à la suite de la disparition de la chose fortuite prévue à l’article 1722 du Code civil « ne fait manifestement que tirer la conséquence nécessaire de la disparition de l’objet même de la convention que les parties avaient conclu et poursuit un objectif d’intérêt général en assurant, lors de l’anéantissement de leurs relations contractuelles dû à une cause qui leur est étrangère, un équilibre objectif entre leurs intérêts respectifs ». C’est au regard de l’article 61-1 de la Constitution, qui autorise la saisie du Conseil constitutionnel lorsqu’une disposition législative porte atteinte aux

droits et libertés garantis par la Constitution, que la Cour de Cassation a pu considéré que le renvoi de l’article 1722 du Code civil devant le Conseil constitutionnel n’était pas justifié car cet article ne remet en cause le droit de propriété garanti par la Constitution. Par conséquent, les juges ont pu affirmer que l’article 1722 du Code civil n’est pas contraire à la Constitution. La non constitutionnalité de l’article est rejetée faute de sérieux et de nouveauté de la question posée. En ce qui concerne le sérieux de la question, la demande de dédommagement n’est pas justifiée car la destruction de la chose objet du contrat entraîne la disparition de l’objet du contrat mais aussi de sa cause. Par conséquent, l’absence de cause et d’objet permettent l’extinction des obligations des deux parties. De plus, la Cour de Cassation considère que la question n’est pas nouvelle ce qui empêche de transmettre cette question au conseil constitutionnel. IV – Le droit fiscal En matière de droit fiscal, l’actualité essentielle concerne la loi de finance pour 2011 (A). Afin d’être complet dans cette discipline, nous relaterons le cas particulier de la théorie de l’abus de droit rendu dans un arrêt relatif au bail commercial (B). A – Loi de finances pour 2011 et loi de finances rectificative pour 2010 Les deux lois de finances adoptées par le Parlement en


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décembre dernier contiennent de nombreuses dispositions à destination des actionnaires ou associés personnes physiques. Elles marquent un durcissement de la fiscalité supportée par l’actionnaire. Trois dispositions sont de nature à dégrader la rentabilité des investisseurs, que ceux-ci

soient des investisseurs personnes physiques ou des investisseurs personnes morales : l’imposition forfaitaire des dividendes chez la société mère quel que soit le montant des frais et charges supportés par cette dernière ; les nouvelles dispositions en matière de sous capitalisation limitant la déductibilité des frais financiers ; les mesures anti abus ayant pour objet notamment de limiter la déduction des pertes constatées lors de la cession de titres de participation. L’adoption de la loi de finances pour 2011 vient confirmer le durcissement annoncé de la fiscalité du capital pour les actionnaires personnes physiques. Ces mesures s’appliquent, sauf mention contraire, aux revenus perçus et aux cessions réalisées à compter du 1er janvier 2011. Une des mesures les plus remarquées est la majoration, à compter du 1er janvier 2011, des taux d’impôt sur le revenu frappant les revenus de capitaux mobiliers et les plusvalues de cessions mobilières et immobilières, aboutissant à une harmonisation de ces impositions au taux de 19 %. Le taux du prélèvement social sur les revenus du patrimoine et sur les produits de placement

est relevé. En conséquence, le taux global des prélèvements sociaux comprenant la CSG, la CRDS, le prélèvement social et ses contributions additionnelles est porté de 12,1 % à 12,3 %. D’autres mesures viennent, en outre, modifier les règles d’assiette et les modalités de taxation de certains revenus du capital. La suppression du seuil d’imposition des plus-values de cession de valeurs mobilières à compter du 1er janvier 2011 permet d’uniformiser le régime des prélèvements sociaux et celui de l’impôt sur le revenu. Lorsque l’option pour le prélèvement forfaitaire libératoire n’a pas été exercée, les dividendes perçus demeurent soumis au barème progressif de l’impôt sur le revenu, après application de l’abattement proportionnel de 40 % et de l’abattement fixe. Le crédit d’impôt égal à 50 % du montant des dividendes, est supprimé, et ce dès l’imposition des revenus perçus en 2010. Parallèlement, la loi de finances rectificative pour 2010 apporte quelques aménagements, applicables dès le 1er janvier 2011, à certaines exonérations relatives aux plus-values de cession de valeurs mobilières et de droits sociaux. En matière d’options de souscription ou d’achat d’actions (stock-options) la loi de finances pour 2011 relève de 40 % à 41 % le taux applicable au gain réalisé. Les dispositifs de réduction d’impôt sur le revenu et d’ISF au titre de souscriptions au capital de PME, soit directement, soit par l’intermédiaire d’une société holding ou d’un fonds,

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ont été entièrement refondus et harmonisés. La loi recentre la portée de l’avantage fiscal sur les PME ayant de réels besoins en financement, tant en matière d’investissements directs que d’investissements indirects. Plusieurs règles anti abus concernant l’ensemble des dispositifs ont été créées. Ces règles sont applicables aux souscriptions effectuées à compter du 13 octobre 2010. Dans le cadre de la mesure de réduction de 10 % de certains crédits et réductions d’impôt sur le revenu compris dans le champ du plafonnement global des avantages fiscaux, le taux de la réduction d’impôt sur le revenu accordée au titre de l’investissement au capital d’une PME, ou d’un fond d’investissement est diminué de 10 %. Enfin, plusieurs mesures intéressent directement l’actionnaire ou porteur de parts notamment en matière de propriété intellectuelle. B – L’abus de droit et l’appréciation de la fictivité d’un bail commercial Conseil d’Etat, 17 novembre 2010, n° 314291, min. c/ SCI Ram Le présent arrêt met en exergue un montage juridique et fiscal assez saugrenu que le Conseil d’Etat n’a pas manqué de sanctionner sur le fondement de l’abus de droit. En l’espèce, deux actes notariés sont conclus le même jour. Dans le premier, une SCI acquiert la propriété d’un immeuble comprenant des locaux à usage commercial et


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d’habitation. Dans le second acte, un bail commercial, stipulant à la charge du preneur une indemnité pour dépréciation de l’immeuble, est conclu entre l’associé majoritaire de la SCI (à titre personnel) et le vendeur. Face à un tel raisonnement, l’Administration fiscale engage un contentieux sur le fondement de l’abus de droit car la scission artificielle, en deux actes apparemment réguliers, de la transaction unique de vente enferme une communauté d’intérêts de la SCI et de son gérant. Ce dernier n’ayant jamais eu l’intention d’occuper les locaux pris en bail. De plus, l’absence de paiement des loyers permet de qualifier le bail commercial de fictif. La Cour Administrative d’Appel de Lyon, le 31 décembre 2007, rejette la demande de l’Administration fiscale. Les magistrats apprécient les divers transferts de propriété de l’opération et refusent de prononcer un abus de droit. En l’absence de constatation d’un prix anormal, la seule interposition du gérant ne saurait suffire pour conclure à une fictivité du montage juridique.

Le Conseil d’Etat annule l’arrêt rendu par la Cour Administrative d’Appel et énonce la solution suivante : « Considérant toutefois, que, quelle que soit la valeur réelle de l’immeuble, en l’absence de tout élément présenté par M. Meir A établissant la réalité des projets commerciaux justifiant la prise à bail du local commercial qu’il n’a jamais occupé effectivement, et de la communauté d’intérêts manifeste entre M. Meir A et la SCI Ram, l’administration apporte la preuve qui lui incombe de ce que le bail commercial était fictif et avait pour seul objet de permettre de dissimuler une partie du prix de vente de l’immeuble et la véritable nature du versement effectué par la SARL Dami B qui doit être regardé comme un droit d’entrée dû à la SCI Ram ». Le Conseil d’Etat retient la fictivité et l’abus de droit car d’une part, la finalité de l’ensemble des opérations doit être appréciée dans son ensemble et non chaque acte de manière isolée et d’autre part, aucun élément de nature à établir la réalité du projet commercial n’a été relevé. Dès lors, l’interposition du gérant

est fictive : cette intervention a contribué à dissimuler une partie du prix de vente. Par conséquent, l’Administration fiscale est fondée à requalifier l’opération et donc à intégrer le droit d’entré versé par la SARL au résultat de la SCI imposable entre les mains des associés dans la catégorie des revenus fonciers. En sa qualité de rédacteur d’acte, cette solution intéresse le notaire qui devra informer les parties de la fictivité d’un tel montage contractuel et par conséquent, du risque de requalification en abus de droit. Bien que l’opération soit juridiquement valable, le notaire devra déceler le risque et prévenir les cocontractants de l’éventuelle intervention de l’Administration fiscale en cas d’abus de droit. Travail réalisé par Terence TASTU, Charles-Henry  TOURNAIRE, Maëva TURC, Geoffrey SANCHEZ, Vanessa VERGARA, Aurélie VIDAL. Master II Droit Notarial - Promotion 2010-2011Faculté de droit de Montpellier www.lounotari.fr


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Service des successions 3 rue Duguay-Trouin 75006 Paris Tél. 01 44 39 77 77 Fax 01 44 39 77 85 www.unicef.fr



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