Le Kuriboh Farceur 1
1 Edito 2 J'ai connu un type comme ça... 3 Soyons clairs 4 Un train de retard 5 Fin d'une journée de pluie 6 La Fuyarde 7 Personne ne lui a dit 8 Sainte Bonne-Aventure 9 La pluie 10 Tombeau de feuilles vertes pour John Pine 11 Charles Péguy 12 Gamins, Gamines 13 Un train de retard 14 Soyons clairs 15 La bonne étoile
Edito Il s'en est cogné des kilomètres de chemin cailloux et goudrons avec pour compagnon imaginaire sur l'épaule la bestiole de dessin animé qui donne son nom à la présente livraison. Il se présente aujourd'hui chez vous, les pieds sales et le baluchon usé jusqu'à la corde.
Ne lui refusez pas un verre ! Il vous le rendra au centuple.
J'ai connu un type comme ça... Il était persuadé qu'un jour Le monde se mettrait à l'envers Et que perché sur les racines Il pourrait pisser vers le ciel Il trainait dans toute la ville son corps chiffoné répétant la même litanie toujours en rade d'une clope ou d'une flamme de briquet. Il vivait dans le désordre et la
saleté médicamenté jusqu'à l'os café eau plate et jamais une goutte d'alcool. J'ai rarement vu des yeux plus embrumés. Songez un peu à la paire de semelles qui devait porter pareil corps pareil masse d'ombres et de muscles sans jamais gémir ni se plaindre. Dans cette ville il faisait partie du paysage et il avait
pris du quartier la couleur gris sale. Je crois pouvoir affirmer que le nuage des longs dimanches d'ennui le suivait jusqu'à l'intérieur de son appartement et prenait racine dans la crasse de la cuisinière et dans les cendriers plein à ras-bord trempés de café froid. Et l'autre qui tournait sans fin sur son vélo en criant après des fantômes puis
passait la fin d'après-midi au vidéo club rêvant devant les étalages de films pornos Qu'est-ce qu'ils deviennent à la fin ?
Soyons clairs... Je n'aurais pas l'humilité de dire que je suis artiste, je suis un bricoleur prétentieux J'écris depuis 20 ans et j'ai arpenté tous les blogs, toutes les scènes slams, tout les open-mic où je pouvais étre lu ou entendu. Je ne crois pas à la postérité et je n'écris pas pour laisser une trace mais bien pour
disparaître.
Un train de retard Ils sont tous partis Mes amis Ils sont tous partis Et moi je suis Resté ici Je traine encore sur ces pavés En essayant d'effacer des mes oreilles Le bruit fantôme des verres Des rires quand nous trinquions L'éclat des sourires encore
Planté au fond de la rétine Ils sont tous partis Mes amis Ils sont tous partis Et moi je suis Resté ici Elles est partie aussi celle-là Sur la main de laquelle Je n'ai jamais osé poser la mienne A qui aujourd'hui donne-t'elle Ses baisers, son cou et qui passe
La main dans ses cheveux ? Ils sont tous partis Mes amis Ils sont tous partis Et moi je suis Resté ici
Fin d'une journée de pluie J'entends la ville Qui remue et bouge autour de moi et mes pensées m'échappent au fil de l'eau, de l'eau qui court dans les gouttières et les caniveaux Charriant la crasse, les papiers gras Les restes de kebab et les merdes de chiens
Soleil de fin de journée quand les nuages se dissipent illumination tardive dans le goudron des trottoirs les flaques comme des écailles de poisson j'aimerais y faire pousser un jardin
La Fuyarde Elle montait à l'arbre en s'accrochant A l'écorce avec les dents Ses vêtements loques déchirées Collés de boue et de sueurs Seconde couche à sa peau mat ils Partaient en lambeaux petit à petit Jour après jour à manger Les animaux avant qu'ils ne refroidissent
Ses yeux brillaient à nouveau Et ses lèvres rougissaient Elle avait commencé à l'hopital les dents plantées dans le biceps d'un brancardier Les muscles durs et chauds Cédant entre les incisives Et le corps s'effondre dans un cri De douleur et de rage impuissante. Hop par la fenêtre et elle avait couru couru couru
De toute la force de ses pieds nus (et de la force elle n'en manquait pas) Sur la route de goudron elle en est sûre Ils ont essayé de lui rouler dessus Ils l'ont visé en bagnole Ils ont du penser son corps fragile Et qu' elle allait fuir affolée Mais elle a sauté sur le capot En hurlant un langage
incompréhensible La peur de leur vie et elle ne les a même pas touchés Enfin si Un seul Il avait cru l'attraper et aujourd'hui Il a mal aux yeux qu'il n'a plus Ebloui pour l'éternité Du haut d'un arbre elle observe L'horizon et attend Le retour des oiseaux.
Personne ne lui a dit Un verre de mauvais Alcool de poire et de riz Une cigarette sans filtre dont la simple vision Donnait mal à la gorge Elle disait pouvoir lire L'avenir dans les rêves Personne n'a jugé utile De lui dire qu'on ne pouvait pas Lire l'avenir dans les rêves
Sainte Bonne-Aventure Tenant ma main à plat Dans la sienne moitié moins grande Tenant ma main dans la sienne Comme elle aurait tenu une carte à jouer Suivant les lignes de ses doigts minuscules Elle dit "Ca sent mauvais pour toi par ici
Alors remonte dans le train Et laisse passer deux gares Trouve à t'occuper Mais surtout ne descends pas Avant la troisième" Puis elle repartit laissant accroché A ma veste quelques mèches De ses longs cheveux noirs Et mes narines Mes narines certains soir saignent encore Du souvenir de son parfum
La Pluie La pluie est venue S'installer en s'appuyant Sur sa canne de bois neuf
Tombeau de feuilles vertes pour John Pine J'aimerais vous parler d'un type avec une voix qui sonne comme la vérité D'un type avec une voix qui sonne Comme une main sur l'épaule. Ce type est mort l'autre jour Ce type est mort et sa voix N'a pas l'air de le savoir Ce type est mort l'autre jour Ce type est mort et sa voix N'a pas l'air de le savoir
Charles Péguy Charles Péguy chassant la poussière De dessus ses yeux fatigués Soulève les stores de ses paupières et tourne la tête Vers les cieux inespérés Du fond de sa tombe il compte Les moutons, les obus et les bombes Il soupire Charles Il a du mal à dormir Charles Et plus d'un siècle de sommeil se monnaye bien
D'une ou deux insomnies Le voilà qui repousse les draps de son lit Et gratte à plein doigts Sa barbe neigeuse Sa barbe toute remplie De poèmes jamais écrits Et il essaie, il essaie De les écrire aujourd'hui Avec ses mains pleines d'écorce Et de la suie en guise d'encre.
Gamins, gamines... Je les ai vu Gamins, gamines Même pas encore Touché des lêvres leur vingt printemps Au fond des corps d'enfants Je les ai vu Gamins, gamines Tirant sur un pétard Comme pour prier l'ennui De partir en fumée
Je les ai vu Gamins, gamines Et j'en ai même connus Tombés accros avant De rentrer au collège Je les ai vu Gamins, gamines Rêver d'ailleurs Et puis revenir poumons noircis Yeux rongés et l'âme Couverte de bleus
Un train de retard Ils sont tous partis Mes amis Ils sont tous partis Et moi je suis Resté ici Je traine encore sur ces pavés En essayant d'effacer des mes oreilles Le bruit fantôme des verres Des rires quand nous trinquions L'éclat des sourires encore
Planté au fond de la rétine Ils sont tous partis Mes amis Ils sont tous partis Et moi je suis Resté ici Elles est partie aussi celle-là Sur la main de laquelle Je n'ai jamais osé poser la mienne A qui aujourd'hui donne-t'elle Ses baisers, son cou et qui passe
La main dans ses cheveux ? Ils sont tous partis Mes amis Ils sont tous partis Et moi je suis Resté ici
Soyons clairs... Et ici j'y suis toujours et c'est de là que je parle. De là que je conclus ce premier jet du Kuriboh Farceur. Le nom d'un monstre de jeu de carte et de dessin animé pour porter mes paquets de mots à l'écriture aléatoire. Je crois que le destin est le maquillage du hasard et j'écris pour la paix que cela procure et pour communiquer. Peu de choses
me procurent autant de paix : rêver de casser des dents et la musique de Horace Andy. Un dernier poème et je souhaite vous revoir bientôt. Prenez soin de vous.
La Bonne Etoile C'est là qu'elle brille Au dessus des toits Et elle fait la nique aux gratteciels Lumière de miel première du soir Et dernière du matin Ordonnatrice des pluies d'été Point fixe dans la danse du hasard Le coup de dés à l'élégante boiterie La bonne étoile