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Sarah Maldoror cinéma tricontinental

AÏDA BRUYÈRE

NEVER AGAIN

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Aïda Bruyère est de cette génération qui, ayant grandi avec les réseaux sociaux, les clips-vidéos et les tutoriels sur internet, accumule depuis l’adolescence des images trouvées, des photographies du quotidien et des notes vocales sur d’anciens ordinateurs ou téléphones portables. Née en 1995 au Sénégal de parents français et belges, Aïda Bruyère vit au Mali avant de s’installer à Paris pour ses études d’art. Les images qu’elle conserve de sa jeunesse et celles qu’elle travaille à l’échelle d’installations et de fanzines, sont empreintes par leurs sujets comme par leurs formes des différentes cultures au sein desquelles elle a grandi. L’expression des identités dans l’espace social, à travers notamment le maquillage, les postures et les accessoires, sont au cœur des œuvres qu’elle réalise, ou qu’elle conçoit en collaboration avec des artistes, des danseuses et des photographes.

Aïda Bruyère est née en 1995 au Mali. Elle vit aujourd'hui à Paris. Scolab Six continents ou plus Avec l’exposition « Never Again », Aïda Bruyère interroge les enjeux de la représentation et l’écriture de soi à l’ère des réseaux sociaux et en temps de fermeture des boîtes de nuit et des lieux d’exposition. Un collage sonore emplit l’espace vide de musique hip hop, dancehall, reggaeton, afrobeat et balani, et se voit ponctué de messages vocaux personnels.

Dans l’installation aux allures de club abandonné sont rassemblés un décor prélevé dans une boîte de nuit et des flyers annonçant une programmation passée, ou peut-être annulée. Aïda Bruyère y convoque aussi bien des femmes dont les représentations et les actions manifestent des formes d’émancipation et d’autonomisation, que des images de corps féminins érotisés et globalisés, tandis qu’au sein des espaces de liberté que sont les lieux de vie nocturne, les identités se construisent aussi avec, et en réaction à des images préconçues des corps.

→ Le gurlz blunt Suggestives et schématisées : certaines représentations de femmes qui ornent les boîtes de nuits participent à la construction d’archétypes féminins désincarnés et globalisés. Celle qui est déployée dans l’exposition est issue de l’arrière-plan de photographies réalisées par l’artiste avec ses amies dans une discothèque de Bamako. L'artiste se saisit de cette représentation par un jeu de transferts à partir d’une reproduction en peinture qu’elle a photographiée. Les mots qui accompagnent l'image font référence à une pratique sororale consistant à partager entre femmes un joint préparé par des femmes.

→ Fanzines et autoédition La présence des flyers sur le sol renvoie à une pratique d'Aïda Bruyère : celle du fanzine et de l'autoédition. Un fanzine (contraction de l'expres-sion anglaise « fanatic magazine ») est une publication, imprimée ou en ligne, périodique ou non, institutionnellement indépendante, créée et réalisée par des amateurs passionnés pour d'autres passionnés.

PISTES PÉDAGOGIQUES

Primaire L'exposition n'est peut-être pas la plus adaptée à un très jeune public.

Collège Identifier des caractéristiques (plastiques, culturelles, sémantiques, symboliques) inscrivant une œuvre dans une aire géographique ou culturelle et dans un temps historique. Interroger la création musicale à la croisée des diverses influences et traditions.

Lycée

Supérieur Mettre en relation l'observation des productions plastiques avec les images présentes dans l'environnement quotidien des élèves, garder un regard ouvert à la pluralité des représentations.

Histoire de l'art, histoire de la musique, cultural studies, anthropologie, études postcoloniales, études féministes.

MAXWELL ALEXANDRE

NEW POWER

Né dans une famille catholique à Rocinha, une favela de Rio de Janeiro, Maxwell Alexandre envisage la peinture comme une « pratique prophétique ».

À la manière d’un DJ marqué par l’héritage de la culture hip-hop, l’artiste sample de nombreuses références – des archives intimes, des scènes de rue ou d’actualité, des références à l’histoire de l’art, aux cultures populaires ou à la publicité – pour révéler des cartographies chaotiques sous tension. Autant de paysages de corps aux visages inachevés qui s’entrechoquent, toujours peints sur du papier brun en écho au terme « pardo » utilisé pour blanchir les afro-brésilien·ne·s.

Au Palais de Tokyo, l’artiste présente la série « New Power », une quarantaine de pièces assemblées et superposées de manière à transformer la peinture en environnement politique.

Maxwell Alexandre est né en 1990 à Rio de Janeiro (Brésil), où il vit et travaille. Ancien rollerman professionnel, il a cofondé « A Noiva - L’Eglise du Royaume de l’Art » , un lieu indépendant qui soutient la création alternative brésilienne. Scolab Six continents ou plus « Pretos no topo » [Les Noirs au sommet] est devenu un slogan dans le rap local. J’ai d’abord analysé ce phénomène de loin, puis j’ai voulu montrer ses implications dans l’art contemporain et souligner que c’est là que se trouvent les gagnants, car c’est là que se concentre le capital intellectuel. Il ne s’agit pas seulement d’argent, mais de contrôler le récit et l’image. (…) Aujourd’hui j’occupe une position de pouvoir dans ce jeu, mais je sais que mon statut n’est pas la norme, les acteurs travaillant dans ce champ sont pour la plupart blancs. Lors des vernissages, les Noirs se retrouvent le plus souvent à servir ou à nettoyer, même lorsqu’ils sont euxmêmes le sujet de l’exposition. C’est pourquoi il est important non seulement que l’artiste noir occupe son espace de représentation à un moment comme celui-ci, mais également que la communauté l’occupe physiquement, car la présence du corps noir dans ces espaces est politique. » Ainsi, Maxwell Alexandre met en lumière les corps noirs dans leur puissance et élabore une peinture de l’émancipation. → New power Reprenant le titre d’une chanson du rappeur brésilien BK, ces peintures minimalistes ciblent le monde de l’art contemporain, ses cubes et autres « lieux-blancs », autant de territoires de pouvoir où les luttes raciales et sociales se sclérosent. Une série qui opère un renversement de pouvoir similaire à celui réalisé en 2018 par le clip APESHIT de Jay-Z et Beyoncé au Louvre.

PISTES PÉDAGOGIQUES

Primaire Questionner le monde en s'engageant dans une approche sensible et curieuse, garder un regard ouvert à la pluralité des représentations.

Collège Interroger et situer œuvres et démarches artistiques du point de vue de l’auteur et de celui du spectateur.

Lycée Questionner les inégalités et les discriminations de la vie quotidienne, leur gravité respective au regard des droits des personnes.

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