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L I T T É R AT U R E S DE L’I M AGI NA I R E
ENTREVUE
© Isabelle Stephen
© Geneviève Blouin
Conversation avec le centaure
/ Les Six Brumes célèbrent cette année leurs 20 ans ! Fondée en 2001, la maison d’édition sherbrookoise est actuellement dirigée par Guillaume Houle et Jonathan Reynolds. Elle fut un important vivier de nouveaux talents en plus d’offrir aux lecteurs plusieurs rééditions d’ouvrages introuvables. Les Six Brumes ont également fait paraître un nombre impressionnant de collectifs, le travail d’équipe étant au cœur du fonctionnement de la maison d’édition. C’est ce que montre avec éloquence le plus récent collectif des Six Brumes, Échos du centaure, qui regroupe cinq novellas de grands noms de la science-fiction québécoise. Rencontre avec l’instigateur du livre, Alain Ducharme, ainsi qu’avec les cinq écrivains au sommaire. PROP O S R E C U E I L L I S PA R A R I A N E GÉ L I NA S
Comment avez-vous eu l’idée de ce collectif ? Alain Ducharme : L’idée provient d’une discussion avec Guillaume Houle sur le fait que la science-fiction québécoise ne bénéficie pas de la même visibilité que les autres genres de l’imaginaire. Et pourtant, elle permet d’offrir des perspectives uniques — voire nécessaires. On peut exprimer beaucoup sur notre société à travers la science-fiction. En quoi cet ouvrage s’inscrit-il dans la suite des activités de la République du Centaure ?
LUC DAGENAIS
© Daniel Sernine
ALAIN DUCHARME
Alain Ducharme : La République du Centaure (republique.sixbrumes.com) est un magazine électronique dont la mission est de faire rayonner les littératures de l’imaginaire québécoises en publiant les meilleurs textes, passés et actuels. Une volonté identique habite Échos du Centaure et s’exprime notamment à travers les courts essais qui ponctuent le collectif, entre chacune des novellas (longues nouvelles). Que raconte votre novella au sommaire d’Échos du centaure ? Luc Dagenais : « La déferlante des mères » raconte quelques épisodes de la vie d’Harkadie, guerrière qui évolue au sein d’une armée de mères qui déferle sur le monde. En parallèle, des récits du point de vue de personnages extérieurs à cette déferlante sont présentés. Daniel Sernine : Dans « Les passerelles du Temps », les protagonistes sont à la recherche de sieur Nicolas Dérec, dont le sort n’était pas vraiment précisé à la fin de mon roman Les écueils du temps. La novella se déroule une vingtaine d’années après cet ouvrage. Jean Pettigrew : Dans « Biographie sommaire d’un émetteur-récepteur », le jeune fils d’un président (très déplaisant) des États-Unis devient, au grand dam de son père (nettement raciste), l’ambassadeur de mystérieux extraterrestres qui ont implanté une tour dont la base recouvre tout le désert du Nevada…
JEAN PETTIGREW HUGUES MORIN
DANIEL SERNINE ÉLISABETH VONARBURG
Élisabeth Vonarburg : « Une histoire d’Ikuatèn » narre la façon dont une société, pourtant différente de la nôtre, succombe temporairement aux mêmes travers que nous dans ses relations à sa nature humaine et dans ses relations à une nature moins clémente que ne l’a été la nôtre jusqu’à présent. Hugues Morin : « Nina » propose un mélange de science-fiction et d’espionnage. Un agent de Montréal tente de rejoindre une complice de Laval disparue dans un pays morcelé entre cités-États, provinces affaiblies, et un Québec plutôt indépendant. De quelle façon souhaitiez-vous aborder la science-fiction dans votre texte ?
© Hugues Morin
© Nancy Vickers
Élisabeth Vonarburg : En déplaçant le plus possible la lecture, sur une autre planète, dans une autre société régie par des coutumes et des religions différentes, et avec un personnage différent dans ses genres. Il faut parfois de la distance pour mieux voir. Jean Pettigrew : La littérature de science-fiction est une expérience scientifique. L’objectif de cette novella était de montrer ce qui peut arriver quand une société arrogante qui se targue d’être la plus avancée du monde est soudain confrontée à nettement plus fort qu’elle.