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Musée de la fête foraine

Jean-Paul Knott © Eugène Galegos

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© Musée de la Fête Foraine

elles se déroulaient il y a plus d’un siècle. Au sein d’un espace de 1 300 mètres carrés sont réunis carrousels antédiluviens, orgues mécaniques, stand de tir à la carabine à plomb, mailloche, bouffe balles… on en passe.

Art libre – Flamboyantes, ingénieuses, luxueuses parfois, toutes ces pièces sont issues de la collection de Didier Vanhecke, qu’il a patiemment bâtie durant une trentaine d’années en traînant dans les brocantes ou les ventes aux enchères. « J’ai acheté mon premier cheval de bois à l’âge de 18 ans, à la braderie de Lille. C’est à ce moment-là que tout a commencé », se souvient le quinquagénaire. Les années ont passé, les trésors se sont accumulés. Pourquoi cette passion ? « Parce que l’art forain est un art populaire témoignant d’un travail de sculpture, de peinture et de décoration exceptionnel, et cela dans tous les styles : rococo, baroque, art déco, art nouveau... ». Cet ancien marionnettiste, désormais producteur de spectacles (Divan Production) est intarissable sur le sujet, et pourrait parler des heures des Français Gustave Bayol, Coquereau et Maréchal, du Belge Devos, de l’Allemand Friedrich Heyn dont il exhibe un "éléphant banquette" en partait état.

Derrière toutes ces pièces se cache aussi l’histoire oubliée d’une tradition prégnante dans les pays d’Europe du Nord et aux États-Unis, où le spectacle côtoie la vulgarisation scientifique. « Imaginez-vous à la fin du xixe siècle : il n’y a pas un zoo dans le pays. La première fois que la population voit un animal sauvage, c’est dans les fêtes foraines, resitue notre hôte. Dans les villages, on découvre également comment on duplique la voix avec des cylindres de cire, les premiers films des frères Lumière, des Vaudeville, la fée électricité même… ».

Ils nous font tourner la tête…

On danse aussi grâce aux bals itinérants, ici reproduit dans un Magic Mirrors (ou Palais des Glaces) à taille réelle, avec ses alcôves, ses 800 miroirs biseautés, ses sièges en velours… Parmi ces attractions d’exception, citons enfin ce carrousel britannique datant de 1895 et signé Orton et Spooner où s’ébattent quelques paons en bois « très fréquents dans le bestiaire anglais. En France, l’animal porte malheur car il représentait la monarchie. Depuis la Révolution, les forains les évitaient ». Ici, les têtes ne tombent plus, elles

tournent ! Julien Damien

Musée de la fête foraine Saint-André-Lez-Lille - 136 rue Félix Faure, visites guidées sam & dim : 10h30, 15>10€ www.museedelafeteforaine.com

© Musée de la Fête Foraine

© Musée de la Fête Foraine

NAME FESTIVAL

Electrosensible

Frappée de plein fouet par la crise sanitaire, la musique électronique espère un nouveau souffle. À Roubaix, le NAME est l’un des tout premiers festivals à réanimer la nuit. Forcément spéciale, cette édition convie la crème du genre, entre têtes chercheuses et invités de marque, dans les starting-blocks après une looongue parenthèse.

Comme un pied de nez au sinistre Covid : l’affiche du festival présente un couple de personnes âgées s’embrassant à bouche que veux-tu. « C’est l’amour qui résiste », sourit Sabine Duthoit, la porte-parole de l’événement, lequel peut aussi compter sur la fidélité de ses ouailles. « Cette édition est un report de l’affiche de 2020, et beaucoup ont préféré garder leur ticket plutôt que de demander un remboursement ». Les artistes ont également joué le jeu. On retrouve bien sûr la marraine, la Berlinoise Ellen Allien (tout est dit) mais aussi quelques têtes d’affiche, dont la désormais superstar Nina Kraviz, qui n’a pas oublié son premier passage au NAME il y a tout juste dix ans. Parmi les autres sommités, on citera la Britannique Paula Temple mais aussi la première venue de Charlotte de Witte, qui donneront à la Condition Publique des allures de rave (éveillée). Des rythmes et des lettres – Beaucoup de femmes donc (pas une nouveauté ici), pour un festival plus « inclusif » que jamais. En témoigne la venue de Jennifer Cardini (pour qui le festival a exaucé son souhait de b2b avec Âme), productrice d’une techno raffinée et militante LGBT. En marge du dance-floor, la Française rencontre l’autrice Anne Pauly (prix du livre Inter pour Avant que j’oublie) à la médiathèque La Grand-Plage, afin de causer engagement et contre-culture lors d’une soirée… electrosensible. Julien Damien

Roubaix, 08 & 09.10, La Condition Publique, 22 h-06 h, une nuit : 40,20 > 25,20 € pass deux nuits : 65,20 > 41,20 €, www.lenamefestival.com SÉLECTION / 08.10 : Artbat, Damon Jee, Ellen Allien, FJAAK, Nina Kraviz, Vladimir Dubyshkin, Âme, Frank… // 09.10 : Adana Twine, Âme b2b Jennifer Cardini, APM001, Charlotte de Witte, Paula Temple b2b SNTS, David Asko… NAME BY DAY : Lille, 08 & 09.10, Gare Saint-Sauveur, 18 h-00 h + RENCONTRE JENNIFER CARDINI & ANNE PAULY : Roubaix, 09.10, Médiathèque La Grand-Plage, 20 h 30, gratuit

MYD + BUSY P

© Kevin Millet

Northern Touch

6 Retracer le parcours musical de Myd, c'est cartographier une certaine histoire de la pop électronique nordiste des dix dernières années. Au commencement était Sexual Earthquake In Kobe, formation punk funk synthétique dont Quentin Lepoutre tient les claviers. Déménageant à Paris, Myd tombe sur trois Lillois et fonde Club Cheval, rapidement repéré par Brodinski, qui publie ensuite les premiers EP solos de Myd sur son label Bromance. C'est alors l'envol et les piges tous azimuts, pour des artistes aussi divers que SCH, Georgio ou Theophilus London et Kanye West. Cerise sur le gâteau, une nomination aux César pour la BO de Petit paysan ! Comme une suite logique à ce succès, Pedro Winter aka Busy P l'accueille chez Ed Banger (Justice, M. Oizo, on en passe…) pour son premier LP, Born a Loser – en souvenir du look de ses quatorze ans, mais toujours aussi improbable quelques années plus tard. Celui qui se définit comme le « Benny Hill de l'electro » compose avant tout une musique solaire, qui se prête évidemment aux chaleurs estivales mais traverse allègrement les saisons. Ces morceaux favorisent les cafouillages créatifs et les incidents techniques. Ça n'a l'air de rien mais ça fait un bien fou, face à tant de disques à l'efficacité sans âme. T.A.

Liège, 09.10, Reflektor, 20 h, 24,50 €, www.reflektor.be

CHEVALREX

© Polina Panassenko

Douce mélancolie

6 Vous ne connaissez pas la musique de Chevalrex ? C'est bien triste. Mais vous avez sans doute croisé ses œuvres visuelles : graphiste sous l'alias Brest Brest Brest, Rémy Poncet a signé pas mal d'affiches, de pochettes de disques et... la couverture de LM n° 112. Par ailleurs, ce musicien hyperactif a fondé une structure aussi précieuse qu'indépendante, Objet Disque, qui a notamment défendu les œuvres de Barbagallo, Fabio Viscogliosi ou Pauvre Glenda. Le quatrième LP de Chevalrex, Providence (2021), devrait enfin lui valoir le succès qu'il mérite. Cette pop grand format, tout en pleins et déliés, doit pas mal au travail effectué sur le précédent (Anti Slogan, 2018). Les cordes enluminent une fois de plus les apports de Mocke et d'Olivier Marguerit (alias O). Malgré tout, ces morceaux conservent un aspect artisanal et intimiste – de ces chansons qui ressemblent à des confidences. Les plus touchantes, évidemment. Thibaut Allemand

Oignies, 08.10, Le Métaphone, 20h30, 15/12€, www.9-9bis.com (+ Malik Djoudi)

interview

Propos recueillis par Mélanie Kominek • Photos Luc Manago

LES NÉGRESSES VERTES

Famille heureuse

À la fin des années 1980, alors que le Top 50 règne sur les ondes, de curieux accordéonistes envoient tout valser avec un son métissé, entre punk et chanson réaliste. C’est ainsi que les Négresses vertes sortent Mlah ("tout va bien", en arabe), un premier album aujourd’hui devenu culte. Plus de 30 ans après l’inclassable Zobi la mouche ou Voilà l’été, le groupe de rock alternatif le plus acoustique de France réveille des titres toujours aussi fringants, et la mémoire du chanteur Helno, disparu en 1993. À l’occasion du passage de la joyeuse bande au festival Roubaix à l’accordéon, l'incontournable Stéfane Mellino revient sur l’histoire d’un groupe mythique.

Tout d'abord, pouvez-vous nous rappeler comment sont nées les Négresses vertes ? On est le fruit du mouvement alternatif des années 1980. À l'époque, notre groupe comptait six personnes, dont Helno qui jouait avec Bérurier noir et Lucrate Milk. Paulo était lui un ancien des Maîtres, Isa et moi jouions dans Les Ouvriers.

« ON ÉTAIT UN MÉLANGE DE PROLOS DU SUD ET DE PARIS »

On s’est rencontrés en 1982 et la formation est née en 1987, le temps que chacun se libère de ses obligations. Trois de nos membres travaillaient à l’époque au cirque Zingaro ! Ils ont tout abandonné pour nous rejoindre.

Quelle est la véritable origine du nom du groupe ? À l’époque, on faisait quelques conneries. Helno avait parfois les cheveux verts alors certains ont fait le lien avec notre nom… En réalité, ça vient d’un texte de Helno, La Danse des Négresses vertes. C’était un manifeste antiraciste qui clamait : "Y'en a marre de vos figures blêmes, vos couleurs sont vos problèmes". On pensait d’ailleurs que tout ça, le racisme, les religions, c’était derrière nous. Mais 30 ans après, on est toujours en plein dedans. Rien n’a vraiment changé.

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