23 minute read

Emma Peters

Next Article
DOSSIER FREE-PARTY

DOSSIER FREE-PARTY

u sique m

© Elisa Parron

Advertisement

À fleur de peau

Emma Peters a connu un succès fulgurant sur le web grâce à des reprises acoustiques de titres de variété française mais surtout de rap. Plus que Doudou d’Aya Nakamura et Angela de Hatik, c’est son interprétation de Clandestina, de Lartiste, qui la propulse sur le devant de la scène. Aujourd'hui, la Lilloise ne se cache plus derrière les paroles des autres. Elle défend un premier album (Dimanche) balayant un large spectre d’émotions. Soit quatorze chansons où la douceur de la pop et de la bossa se frotte à des textes intimes et directs. Rencontre.

Propos recueillis par Camille Baton Lille, 06.10, Le Splendid, 20h, 27€, le-splendid.com Bruxelles, 02.12, Botanique, 19h30, 24,50>20,50€, botanique.be

Quel est votre parcours ?

Je suis née dans une famille de mélomanes. On écoutait beaucoup de musique avec mes parents et on chantait à la maison les dimanches. Naturellement, j’ai commencé la guitare à 13 ans, juste quelques accords pour m’accompagner. Puis, avec le temps, mon entourage m’a conseillé de poster mes productions sur les réseaux sociaux.

Était-ce une façon de vous lancer ?

Plutôt une manière de s'amuser. Vers 17 ou 18 ans, j’ai publié mes premières vidéos sur YouTube. Petit à petit, j'ai créé un rendez-vous avec mes abonnés. Mes reprises du dimanche soir étaient principalement des covers de rap français, parce que j’adore ça ! Malgré un nombre croissant de vues, je ne pensais pas que cela mènerait quelque part.

Comment choisissiez-vous ces reprises ?

En écoutant un morceau, je savais instantanément si je pouvais y apporter quelque chose. Et puis, je retenais des textes de rap formidables pour répondre aux critiques faciles sur cette musique. Certains accueillent mieux la voix d’une petite blonde avec une guitare classique que celle d'un grand mec tatoué !

« Mon amour du rap a façonné mon franc-parler »

Ensuite, comment avez-vous envisagé vos propres compositions ?

J’ai longtemps cru que je n’étais pas capable d’écrire des chansons. Ce n’est pas rien d’assumer ses propres textes. Je me suis cachée derrière les mots des autres pendant très longtemps et ça m’arrangeait bien. Ça a donc été un long processus.

Comment présenteriez-vous votre premier album, Dimanche, sorti en mars dernier ?

Il est traversé de tous les styles musicaux écoutés à la maison, dont beaucoup de variété française. C’est donc un album très chanté. Je suis aussi sensible aux mélodies. Mes années de guitare classique apportent une patte bossa nova et jazz. Et puis, mon amour du rap a façonné mon franc-parler et une certaine crudité.

Quel est votre rapport à la scène ?

Comme j'ai surgi sur les réseaux sociaux en plein confinement, c’est la dernière facette du métier que j’ai découverte. J’étais terrifiée à l’idée de monter sur scène. J’étais déjà angoissée pendant mes exposés à l’école... Mais aujourd’hui ça va mieux et j’ai la chance d'avoir un public bienveillant.

MR GISCARD Cool suprême

© DR

Trois ans après un titre du producteur Dombrance dédié au président qui aimait les diam’s, voici que Giscard ressurgit dans l’actualité musicale. Assisteraiton à une réhabilitation sous l’auspice du cool, comme en avait bénéficié on ne sait trop comment Jacques Chirac ? Dans le cas de Mr Giscard, l’Élysée est cependant bien loin : ce jeune homme tire son nom de scène de son prénom Valéry, voilà tout. Enfin, bien loin, c’est vite dit : ce Réunionnais d’origine est installé en Seine-Saint-Denis, d’où le désabusement qui parcourt les mésaventures chantées de ce slacker 2.0 – « faut qu’on s’casse de là, c’est trop triste de passer sa vie dans le 9.3 », clame-t-il sur JVP. Dans le panthéon des je-men-foutistes assumés, Mr Giscard se situe quelque part entre Chaton (pour la poésie douce-amère) et Mathieu Boogaerts (pour la candeur de son phrasé bouche mi-close). Il traduit avec nonchalance la lassitude de la génération Covid sur des rythmes funk, un Jack’s au miel toujours près des lèvres, dont il saisit à la fois l’amertume et le sucre. Mathieu Dauchy

MANSFIELD.TYA

Dernier tour de piste

© Philippe Jarrigeon

C’est un vieux truc du music-hall : la tournée d’adieux qui n’en finit pas. Si Michel Sardou, un gars loyal, honnête et droit, a tenu parole, on se gausse en songeant aux ultimes mais fréquents tours de chant de Charles Aznavour – a priori, là, c’est fini. De Mansfield.TYA, en revanche, on ne s’attendait pas à ça. Mais elles, c’est différent.

C’est plutôt courageux, et classe, de mettre ainsi un point final à 20 ans d’une carrière qui n’en fut pas réellement une. Un chemin, plutôt, jalonné de cinq grands albums, dont le dernier en date, Monument ordinaire, vaut vraiment l’écoute. Fondé du côté de Nantes en 2002 par Carla Pallone et Julia Lanoë, Mansfield.TYA demeure inclassable. On pourrait citer, en vrac, Cowboy Junkies et Dominique A (pour la mélancolie acoustique et minimale), Godspeed You ! Black Emperor et Yann Tiersen, notamment pour l’usage pas vraiment orthodoxe du violon, et un certain goût pour les déflagrations sonores. On décelait, au hasard de quelques paroles, une ironie acerbe, des sentiments planqués derrière un sourire. « Dans le monde du silence, je m'emmerde » glisse par exemple Julia dans Le Monde du silence, sur l’album Corpo Inferno (2015). C’est peut-être moins l’ennui que des activités annexes qui ont eu raison de Mansfield.TYA. Carla est occupée avec Vacarme (où l’on retrouve Gaspar Claus) et Julia, sous l’alias Rebeka Warrior, anime Sexy Sushi et Kompromat. Alors, la lassitude ou la suractivité ? Peut-être, tout simplement, l’envie de laisser un bon souvenir. Pour un groupe, 20 ans, c’est quand même pas mal. Thibaut Allemand

TOURCOING JAZZ FESTIVAL

D’après Quincy Jones, qui s’y connaît un peu, semble-t-il, « le jazz est la musique qui se nourrit de toutes les autres ». On ne lui donnera pas tort, surtout au vu de l’affiche (toujours impeccable) du Tourcoing Jazz Festival. Celle-ci a le chic pour convier légendes d’hier, de demain et surtout d’aujourd’hui. Et, comme le souligne cette sélection, des artistes qui font du jazz "mais pas que". Une musique qui se nourrit de toutes les autres, quoi. Thibaut Allemand

MELODY GARDOT

© Laurence Laborie

Assister à un concert de Melody Gardot, c’est renouer avec une certaine idée de ce jazz vocal et sensuel venu des temps anciens – les légendaires Savoy, Village Vanguard et autres Café Society new-yorkais. Nul passéisme ici : on n’a pas affaire à un Puy du Fou jazz, non, mais on admire un savoir-faire, un feeling croisé jadis chez Billie Holiday ou Bessie Smith. Piochant dans la soul, le blues, la bossa, cette francophile et francophone aux éternels verres fumés chante également dans la langue d’André Manoukian, comme en témoigne son dernier LP, Entre eux deux (2022). Une parenthèse intimiste, qui laisse le temps en suspension.

Tourcoing, 08.10, Théâtre municipal Raymond Devos, 20h, complet !

Tourcoing, 08 >15.10, maison Folie Hospice d’Havré, Théâtre municipal R. Devos, Magic Mirrors, Le Grand Mix (+ Roubaix , Le Colisée • Mouscron, CC Marius Staquet), tourcoing-jazz-festival.com

Sélection / 08.10 : Melody Gardot... // 09.10 : Marcus Miller // 10.10 : Renaud Garcia Fons & Dorantes, Jamie Cullum... // 11.10 : Omar Sosa & Seckou Keita, Guillaume Perret... // 12.10 : Anne Paceo, Cécile McLorin Salvant, Thomas de Pourquery & Supersonic... // 13.10 : Electro Deluxe... 14.10 : Leo Courbot, Daida, GoGo Penguin // 15.10 : Lou Tavano Trio, The Brooks, Acoustic Love Sessions feat. Imany & Faada Freddy, Bachar Mar-Khalifé...

Spino ©Andr é

OMAR SOSA & SECKOU KEITA

En 25 ans et autant d’albums le Cubain Omar Sosa, pianiste au toucher sobre et aérien, a sillonné le monde et collaboré avec des musiciens aux horizons divers. Même démarche pour le joueur de kora sénégalais Seckou Keita, plus jeune mais tout aussi curieux – on vous conseille ses deux albums avec la harpiste galloise Catrin Finch. La rencontre Sosa-Keita a donné lieu, comme attendu, à des merveilles de jazz joyeusement impur, syncrétisme de kora mandingue et d’envolées afrocubaines. Un duo au sommet !

Tourcoing, 11.10, Théâtre municipal R. Devos 19h, 29 > 21€ © Emily Dennison

GOGO PENGUIN

Ces trois-là se sont rencontrés sur les bancs de la Royal Northern College of Music de Manchester… et se sont souvent retrouvés, ailleurs et hagards, sur la piste de pas mal de clubs interlopes. D’où l’omniprésence du groove dans leur son. Ainsi piano, contrebasse et batterie organisent des agapes électroniques et, pour tout dire, assez remuantes. On y entend, pêle-mêle, Philip Glass et Aphex Twin, Steve Reich et Squarepusher, Erik Satie, Brian Eno ou Massive Attack. Une autre idée du jazz.

Tourcoing, 14.10, Le Grand Mix, 20h, 25/21€

© Alexandre Lacombe THOMAS DE POURQUERY & SUPERSONIC

En 2011, le saxophoniste et chanteur Thomas de Pourquery fondait Supersonic, projet hommage au free jazz spatial de Sun Ra. Après quelques années de pause, ce « groupe de rock déguisé en jazz », comme le qualifie l’intéressé, s’est donné une nouvelle mission : viser la Lune. L’équipage, composé entre autres d’Arnaud Roulin et Laurent Bardainne (Tigre d’Eau Douce, Poni Hoax) embarque cuivres, clavier, piano, Moog ou synthétiseurs, et pourrait bien alunir avant l’autre Thomas…

WET LEG

Les reines d'Angleterre

© Hollie Fernando

On se dit parfois que la pop tourne en rond. Qu’on n’invente plus rien. Que tout a été dit. Et puis, il suffit de quelques accords et d’une mélodie bien troussée pour que l’on replonge. Ainsi de Chaise Longue, single de Wet Leg qui devint la bande-son de notre été 2021 – et des saisons suivantes. Restait donc à les voir en concert.

Ah, la scène… Non pas que ce soit un passage obligé mais, lorsqu’on a dans les mains des titres tels que Wet Dream (et son clin d’œil à Vincent Gallo), on se dit que cette tension ne peut prendre tout son sens que là – et sans filet. Si le succès est tombé (très) rapidement sur les deux Britanniques, elles ont su prendre les choses à merveille. C’est à dire à la légère. Pourquoi s’en faire ? Cette approche détendue de la chose leur a permis de livrer l’un des meilleurs concerts de la dernière Route du Rock, à Saint-Malo. Oh, certes, elles étaient presque à domicile – l’île de Wight n’est pas si loin de la cité corsaire. N’empêche, Rhian Teasdale et Hester Chambers, soutenues par une section rythmique discrète, ont fait ce qu’elles savaient faire de mieux : entonner des petits hymnes de pop punk mutine et altière, aux forts relents 90’s – Pavement et Breeders dans le rétroviseur, et tous les possibles en ligne de mire. Alors, parviendront-elles à se renouveler ? Voire, tout simplement, à réitérer l’exploit ? À vrai dire, on s’en fiche. Wet Leg n’est peut-être qu’une parenthèse enchantée, pour elles comme pour nous. Mais c’est également l’aspect éphémère de cette pop qui la rend si précieuse. Thibaut Allemand

© Luka Booth

FISHBACH

Le premier essai de Fishbach, encensé par des oreilles qu’on tient en haute estime, nous renvoyait quand même à Rose Laurens ou Desireless. On n’avait donc pas insisté. En 2022, l’Ardennaise a sorti Avec les yeux et cette fois nos esgourdes ont compris. Qu’elle ne jouait pas, et s’inscrivait dans cette lignée de misfits de la pop française, moqués (Mylène Farmer) ou vénérés (Christophe), pour des raisons qui parfois nous échappent. Les guitares hard-FM, les envolées lyriques et les poses compassées de Fishbach sont clivantes. Mais finalement, c’est la moindre des choses que l’on peut attendre d’une artiste, non ? T.A.

Bruxelles, 14.10, Théâtre National, 20h30, 28/23€, theatrenational.be (+ Mansfield. TYA, au Festival des libertés) // Tourcoing, 15.10, Le Grand Mix, 20h, 21 > 6€, legrandmix.com

LEWIS OFMAN

Ce jeune Français a déjà filé un coup de main à Lana Del Rey, Vendredi-sur-Mer, Carly Rae Jepsen, Fakear ou encore Rejjie Snow. Quant à son premier LP, il l’a réalisé en compagnie du britannique Tim Goldsworthy (Unkle, le label Mo’Wax, LCD Soundsystem…). Hédoniste et faussement légère, sa pop dance parle à tous, même si les grincheux évoqueront une musique “commerciale”. L’intéressé répond tranquillement avec Un amour au Super U. Imparable, non ? T.A.

musi q u e

THE LIBERTINES

Les revenants

Profondément émouvant ou absolument pathétique ? Il y a forcément un peu des deux, dans des proportions qui restent à définir, lorsqu'on considère un groupe reformé après plusieurs années. D’autant que, dans le cas des Libertines, on avait affaire depuis le début à des feux follets encapsulés dans une lampe-tempête. Autant dire qu’on n’aurait pas pensé les revoir sur scène en 2022.

Le début du siècle fut marqué de leur empreinte, qu’ils doivent aussi aux Clash, aux Smiths ou aux Only Ones. La paire de songwriters, la vingtaine à peine entamée, brûlait tout sur son passage. Entre 2002 et 2004, elle livra une poignée de chansons inusables sur un premier LP ramassé et un second, dispersé. Et puis plus rien, ou presque. Un troisième album dispensable en 2015, précédé de frasques en veux-tu en voilà, que l’on n’énumérera pas ici – faute de temps, faute de place. Et d’intérêt surtout.

Retour forcé ?

Vingt ans plus tard, donc, The Libertines rééditent leur premier fait d’armes (voir p. 56) dans à peu près toutes les versions. L’occasion pour eux de remonter sur les planches. Pas une première. Depuis 15 ans désormais, à intervalles irréguliers, Pete, Carl et les deux autres se retrouvent sur scène. Une question de vie ou de mort ? De loyer, certainement. Peter Doherty, en marge de la promotion de l’impeccable The Fantasy Life of Poetry and Crime (avec Frédéric Lo) reconnaissait ouvertement que cette reformation était amicale, certes, mais également pécuniaire – il savait qu’il ne vendrait pas aussi bien ce disque intimiste que le mythe des Libs. Cynisme ? Franchise désarmante, plutôt. À l’image de ces deux lads qu’on aura vu vieillir – et pas si mal, finalement. Thibaut Allemand

SAMPA THE GREAT

Black is beautiful

© Travys Owen

Le cœur en Zambie et la tête à Londres, l’incandescente Sampa Tembo, aka Sampa the Great, rebat tranquillement les cartes du rap. Cette poétesse et musicienne mêle culture africaine et hip-hop, chante aussi bien en bemba (sa langue maternelle) qu’en anglais. Entre tradition et modernité, elle s'annonce comme l’une des voix les plus épatantes de la scène contemporaine.

Il se passe encore beaucoup de choses excitantes sous la bannière Ninja Tune. Kae Tempest avait cassé le bitume, Young Fathers posé une nouvelle couche et Black Country, New Road coulé un asphalte neuf. Sampa the Great est la plus récente incarnation de ce que les Londoniens nomment leurs artistes ground-breaking, soit ceux qui "remodèlent les fondations". Coïncidence : The Return, le premier album de la rappeuse et productrice zambienne, sortait la même année que le Grey Area de Little Simz (2019). Si l’on peut rapprocher les deux rappeuses par leur flow tranchant, la palette de Sampa paraît plus large, entre jazz, boom-bap, soul et afrobeat. Décidée à promouvoir le zamrock, genre né de la volonté de son pays d’origine de privilégier la production locale, celle qui vit désormais en Australie revendique dans son deuxième disque (As Above, So Below) son africanité. Spotify l’a d'ailleurs intégrée à sa playlist "Equal Africa", vantant les "Africaines qui cassent les codes" (traduction artisanale de "The fiercest African women making waves"). Ça ne veut pas dire grand- chose, on le concède. Au-delà des étiquettes, le mieux est encore de la découvrir sur scène. Mathieu Dauchy

© Olivier Metzger

THE LIMIÑANAS

Comment ça, y a pas de justice en ce bas-monde ? Voyez plutôt l’impeccable trajectoire des Limiñanas. Issu de la scène garage perpignanaise (citons les fameux Beach Bitches), le couple n’a jamais perdu espoir. Fidèle à ses idéaux, il a cumulé durs boulots à l’usine et enregistrements dans la cuisine. Gorgés d’influences sixties, de guitares fuzz, textes pince-sans-rire et instrumentaux cinématographiques, les morceaux du (désormais) groupe séduisent des figures de toutes les scènes indépendantes, d’Anton Newcombe à Étienne Daho, en passant par Peter Hook, Laurent Garnier ou Pascal Comelade. Quant aux planches, ils les crament sans coup férir. T.A.

22.10, Oignies, Le Métaphone, 20h30, 20/17€, 9-9bis.com

BICEP

Voici 15 ans, comme beaucoup d’autres fouineurs de bacs, les Nord-Irlandais Matt McBriar et Andy Ferguson tenaient un blog, Feel my Bicep, compilant leurs découvertes. La playlist homonyme se trouve d’ailleurs sur Spotify. Passé à la production, le tandem propose une tech-house volontiers hypnotique, chargée de sub-bass et de breakbeats. Pas un hasard si Coldcut, autre tête chercheuse, les a pris sous son aile via le label Ninja Tune. T.A.

KENDRICK LAMAR

Un prophète

© Renell Medrano

Dès 2013 on avait flairé tout le potentiel de ce jeune protégé de Dr. Dre, issu comme lui de Compton. En fait, tout le monde a rapidement compris que le good kid marquerait de son empreinte le rap. Kendrick Lamar a dépassé toutes les prévisions : il est en passe de devenir une icône.

Cette année, Mr. Morale & The Big Steppers, le cinquième disque de Kendrick Lamar, a nourri une mythologie déjà dense. En 19 morceaux foisonnants d’idées, le trentenaire élargit encore son spectre musical et s’affranchit des canons pop : aucun titre n’a le gabarit d’un tube. Pourtant, on tient bien là le plus grand album rap de l’année. Surtout, Lamar s’y livre comme peu de ses semblables avant lui, abordant des thèmes inexplorés comme la transidentité de membres de sa famille. Il faut dire que le Californien a connu plusieurs révolutions, dont celle de la paternité. Mr. Morale... est d’ailleurs orné d’une photographie le montrant avec ses enfants. Kendrick y est coiffé d’une couronne d’épines, un flingue à la ceinture – tout est dit. En moins de dix ans, le gamin de Compton a reçu 14 Grammy Awards, un prix Pulitzer, est devenu une figure du mouvement Black Lives Matter, qui a brandi son titre Alright comme un étendard. Le tout en s’imposant avec éclat dans l’entertainment mondial, signant la musique de Black Panther et s’affichant au casting du plus magistral des halftime shows du Superbowl aux côtés de Dr. Dre, Snoop Dogg et Eminem – qu'il est en train, doucement mais sûrement, de dépasser. Mathieu Dauchy

et aussi…

SAM 01.10

CHLOE + UÈLE LAMORE…Mons-enBaroeul, Salle Allende, 20h, 10>7€ GASPARD ROYANT Béthune, Le Poche, 20h30, 12/10€ MUSE & PIANO : VARIATIONS GOLDBERG PAR DAVID FRAY Lens, Louvre-Lens, 20h30, 14>5€ ADIEL, ADRIATIQUE, ELLEN ALLIEN, WHO MADE WHO, DAVID ASKO... Roubaix, La Condition Publique, 22h, 1 j : 39 > 24€ • 2 j : 64 > 39€ DIM 02.10

SOOLKING Lille, Le Splendid, 19h, 30€ ÁSGEIR + HEBE Bruxelles, Botanique, 19h30, 27,50>21,50€ FEMI KUTI + CAMILLA GEORGE Louvain, Het Depot, 20h, 28>25€ LUN 03.10

HOT CHIP Bruxelles, AB, 20h, 34/33€ MER 05.10

LOUIS CHEDID & YVAN CASSAR Lille, Théâtre Sébastopol, 20h, 61>36€ SCH Lille, Le Zénith, 20h, 55>40€ Encensées par Madonna (eh oui!), remixées par Massive Attack, Fat Boy Slim ou William Orbit, les Négresses vertes sont l’une des formations françaises les plus célèbres à travers le monde. Et cela grâce à une musique qui a mêlé dès ses débuts, en 1987, guinguette, raï et flamenco, jazz et rhythm&blues… Bref, l’un des derniers monuments de la vague alternative (Bérurier Noir, La Mano Negra, Les Garçons bouchers) qui, si elle n’a pas changé la face du rock, a fait tomber pas mal de barrières. T.A.

Hem, 07.10, Le Zéphyr, 20h, 43 > 34€, zephyrhem.fr

JEU 06.10

ANDRÉ MANOUKIAN Hem, Le Zéphyr, 20h, 35/31€ ASIAN DUB FOUNDATION… Villeneuve d'Ascq, La Ferme d'en Haut, 20h, 15>12€ TÊTES RAIDES Calais, CCGP, 20h30, 22>11€ VEN 07.10

GASPARD ROYANT Wasquehal, The Black Lab, 20h, 22,90€ ILLUSIONS SONORES. JUSTIN TAYLOR Lille, Opéra, 20h, 10>5€ AYO + GAËL RAKOTONDRABE Arras, Théâtre, 20h30, 22>12€ BERNARD LAVILLIERS Lille, Le Zénith, 20h30, 58>39€ PAULA TEMPLE + KAS:ST + APM001 + LA MVERTE Lille, L'Aéronef, 22h, 28>20€ SAM 08.10

ECHT! + MADMADMAD… Lille, L'Aéronef, 20h, 10>5€ KASABIAN Bruxelles, Cirque Royal, 20h, 39,24€ THE VERY BEST OF JOHN WILLIAMS Lille, Nouveau Siècle, 20h, 90,50>39,90€ DIM 09.10

THIS IS AMERICA (VANESSA WAGNER & WILHEM LATCHOUMIA) Arras, Théâtre, 15h & 16h, 22>12€ LUN 10.10

DJ KRUSH + MR CRITICAL Bruxelles, Botanique, 19h30, 22,50>16,50€ JAMIE CULLUM Roubaix, Le Colisée, 20h, 43/39€

MAR 11.10

BJØRN BERGE Bruxelles, Botanique, 19h30, 18,50>15,50€ EINSTÜRZENDE NEUBAUTEN Lille, L'Aéronef, 20h, 33>25€ IMANY Bruxelles, Bozar, 20h, 74>25€ MER 12.10

KEMMLER Roubaix, La Cave aux Poètes, 20h, 23€ LE CONCERT D'ASTRÉE Lille, Opéra de Lille, 20h, 10>5€ JEU 13.10

FINDLAY Lille, L'Aéronef, 20h, 10>5€ MESSE EN UT DE MOZART Lille, Nouveau Siècle, 20h, 55>6€ VALD Lille, Le Zénith, 20h, 41€ VEN 14.10

© Romain Garcin

DEMAIN RAPIDES + BRUIT BLANC Roubaix, La Condition Publique, 20h, gratuit VALD Bruxelles, Palais 12, 20h, 45>36€ JEAN-LOUIS MURAT Oignies, Le Métaphone, 20h30, 20/17€ SAM 15.10

BOB DYLAN Bruxelles, Forest National, 20h, 129,50>118,50€ DAYMÉ AROCENA Armentières, Le Vivat, 20h, 18>2€ GAUVAIN SERS Valenciennes, Le Phénix, 20h, 29/25€ QUATUOR ÉBÈNE Lille, Opéra de Lille, 20h, 23>5€ THE FLESHTONES + THE BOBBY LEES Lille, L'Aéronef, 20h, 10>5€ YANISS ODUA + ALMÄ MANGO Calais, Centre Culturel Gérard Philipe, 20h30, 18>9€ ODEZENNE Bruxelles, Th. National, 21h, 30/25€ DIM 16.10

ÁSGEIR Tourcoing, Le Grand Mix, 18h, 19>11€ YOUSSOU N'DOUR Bruxelles, Théâtre national, 20h30, 35/30€ MAR 18.10

Durant les seventies, Saint-Preux ou Richard Clayderman tentèrent un syncrétisme entre la musique classique et la variété. Un demi-siècle plus tard, Sofiane Pamart rapproche la composition pianistique de la variété d’aujourd’hui : le rap. Cela tient davantage à son ethos (être le meilleur) qu’à ses compositions, gorgées de références à Chopin, Debussy ou Ravel. Mais cela en dit long, aussi, sur une musique (le classique) bien plus accessible qu’il n’y paraît pour la jeune génération. Rassurant ! T.A.

La Louvière, 12.10, Le Théâtre, 20h, 30 > 8€, cestcentral.be

GAËTAN ROUSSEL Lille, L'Aéronef, 20h, 29.80€ SEUN KUTI & EGYPT 80 Lille, Le Spendid, 20h, 26,80€ TINDERSTICKS Anvers, De Roma, 20h, 39/37€ VILLAGERS Brugge, Koninklijke Stadsschouwburg, 20h, 24>6€ MER 19.10

SUM 41 Bruxelles, Forest National, 18h30, 36,84€ JEU 20.10

THE SOFT MOON Tourcoing, Le Grand Mix, 20h, 14>6€ VEN 21.10

H.F THIÉFAINE Hazebrouck, Espace Flandre, 20h, 45€ TIMBER TIMBRE Tourcoing, Le Grand Mix, 20h, 16>8€ SAM 22.10

PETER KERNEL + TROBAR CLUS… Villeneuve d'Ascq, La Ferme d'en Haut, 20h, 8/5€ SNIPER Lille, Le Splendid, 20h, 29€ MALIK DJOUDI Arras, Théâtre, 20h30, 22>5€ FUN LOVIN' CRIMINALS Brugge, Koninklijke Stadsschouwburg, 20h, 24>6€ DIM 23.10

STING Lille, Le Zénith, 20h, 150>73€ MAR 25.10

HERMAN DUNE Lille, Auditorium du Conservatoire, 20h, 19 > 11€

MER 26.10

EDITORS Bruxelles, Forest National, 20h, 57>51€ VEN 28.10

DEEP PURPLE Lille, Le Zénith, 20h, 79,50>57,50€ JEANNE ADDED Lille, L'Aéronef, 20h, 28>20€ THEO CROKER Marcq-en-Barœul, ColiséeLumière, 20h30, 26 > 20€

SAM 29.10

SELAH SUE Anvers, De Roma, 20h, 34>32€ REGARDE LES HOMMES TOMBER… Béthune, Le Poche, 20h30, 12>10€ DIM 30.10

YOUSSOUPHA Lille, Le Splendid, 19h, 32€ LUN 31.10

EZRA FURMAN + THE GOLDEN DREGS Bruges, Cactus Muziekcentrum, 20h, 21>14€

The Libertines Up The Bracket - 20th Anniversary

(Rough Trade Records)

Lorsque parut cet album voici vingt ans, certains le snobèrent. Quelques mois plus tôt, des gamins BCBG fantasmant le CBGB avaient tout renversé – le premier album des Strokes, ce n’était pas rien. Alors, The Libertines, l’inévitable "réponse anglaise", rien de plus ? Non. The Strokes devinrent par la suite des Phoenix américains (c’est un compliment) quand nos Britanniques se consumèrent. À l’instar d’autres tandems créatifs (Beatles, Stones, Kinks, Depeche Mode, Smiths, Oasis…), Carl Barât et Pete Doherty, rejetons vénères de l’Angleterre de Tony Blair, fonctionnaient à deux. En couple même, un amour platonique (?) les unissant. Ce premier disque, condensé d’énergie pure et de refrains imparables, de dérapages à peine contrôlés et de grâce incarnée, se voit donc réédité en de multiples versions (dont un coffret que les intéressés, à l’époque, n’auraient sans doute pu s’offrir). Outre les singles et les live, son intérêt réside dans les démos : confirmation que tout était en place, la "production" de Mick Jones (The Clash) consistant à ne toucher absolument à rien. La classe à l’état brut, tout simplement. Qui a créé pas mal de vocations. Et pourrait, par-delà la nostalgie des quadras, en susciter de nouvelles, qui sait ? Thibaut Allemand

Clark Body Double

(Warp) Figure discrète mais importante de l’electronica britannique, Chris Clark a signé neuf albums chez Warp… avant de filer chez Deutsche Grammophon. Son troisième disque pour la maison de Sheffield n’en fut pas moins, en 2002, un classique inclassable (IDM ? Abstract hiphop ?) joliment réédité pour son vingtième anniversaire. Pour le dire vite, avec ses broken beats, ses textures retravaillées et son ambiance mélancolique, Body Riddle s’inscrivait dans la lignée des travaux d’Aphex Twin. On y entend des xylophones ou des pianos que le Cornouaillais n’aurait pas reniés. Vingt ans plus tard, cet album n’a pas pris une ride et se voit enrichit d’un LP supplémentaire, 05.10, comprenant remixes et pistes inédites. L’occasion de relire un chapitre méconnu du grand grimoire Warp. Thibaut Allemand

Lomepal Mauvais ordre

(Pinéale) Après les succès de Flip et Jeannine, puis un burn-out et une longue période de questionnements, Lomepal est de retour avec un troisième album où il se réinvente comme jamais. Connu pour ses textes très personnels, Antoine Valentinelli (pour l’état civil) privilégie cette fois la fiction pour mettre en scène son chaos intérieur. Le skater se glisse dans la peau d’un personnage pour chanter des histoires d’amour (Prends ce que tu veux chez moi), assumer ses failles (À peu près), ses excès en tous genres (Tee) et son vague à l’âme (Le Miel et le vinaigre). Musicalement, ce grand fan des Beatles ouvre plus encore son jeu, entre rap, electropop, chanson française (Maladie moderne) et rock, sans aucun effet de réverbe ni autotune. Authentique, quoi. Camille Baton

(Drag City) Ce bon vieux Bill serait-il passé de l’autre côté du miroir ? C’est en tout cas ce que le titre du huitième album de l’ex-Smog laisse présager. En fait, rien de tout cela. On retrouve, dès les premières notes égrenées, le timbre chaleureux et sépulcral du natif de Silver Spring (Maryland). Ces mots tristes réconfortent, ce sont des berceuses pour adultes. Et puis le tout s’ouvre peu à peu : douce transe (Partition), talk-over pour jazz squelettique (Naked Souls), folk ensoleillé soutenu par des chœurs féminins (Natural Information). Une heure en suspension. Discrètement, mais sûrement, Callahan se pose aux côtés de Dylan (sans la pose) de Lou Reed (sans la cruauté) de Cohen (sans la messe). En réalité ? Une leçon de songwriting, tout simplement.

Thibaut Allemand

Aloïse Sauvage Sauvage

(Capitol / Universal Music) Aloïse Sauvage fut révélée il y a deux ans avec Dévorantes en concassant rap, electro et chanson française. Elle opérait alors une sorte de syncrétisme entre Diam's (le sens du refrain), PNL (la voix autotunée) et MHD (l'afro-trap). Pour son deuxième album, la musicienne, circassienne, danseuse et actrice pousse l'éclectisme encore plus loin. Au fil de ces 14 titres se bousculent sonorités zouk, egotrip musclé (Focus) ou ballades plus lyriques (Aime-moi demain et son accompagnement piano-violons). Si les textes parlent toujours d'amour lesbien (Joli danger, sommet de sensualité) ils sont aussi plus politiques. Crop Top évoque ainsi les féminicides, le consentement ou les tenues "inappropriées" pour s'imposer comme un hymne féministe et guerrier – sauvage, quoi. Julien Damien

This article is from: