Supplément juridique n o i t a r é n u rém lité riat a éta cial r g c e E s so
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Droit du travail / Droit Social
Supplément gratuit à La Libre Belgique réalisé par la Régie Générale de Publicité - 24 Avril 2010
Avant-Propos
Sommaire Avant-Propos ...............................3
Table ronde: Les principaux aspects juridiques du télétravail...............4 Le règlement de travail : un ensemble de règles au service de l’entreprise et des travailleurs ? Le cas de la CCT 100..................11 Licenciement collectif & discrimination........................15 Travailleur salarié et faux indépendant : un peu de clarté.........................16 Harmonisation du statut ouvrier-employé ou l’écueil du licenciement abusif pour les employés......................17
Nous souhaitons tout d’abord remercier nos partenaires chaque fois plus nombreux qui nous permettent de publier ces suppléments. Pour ce troisième supplément juridique, nous avons choisi de traiter du droit social et du droit du travail. Au coeur de l’actualité, le droit social et le droit du travail sont des matières en constante évolution et à l’implication prépondérante dans nos vies actives. Fruit d’un savant exercice de concertation entre les acteurs concernés, le cadre juridique du travail est un ensemble complexe qui nécessite souvent le recours à des spécialistes pour éclairer les décisions.
Les mesures anti-crise................18 Le contrôle par l’O.N.S.S. des frais propres à l’employeur.............................19 Quel contrôle de l’employeur sur l’utilisation du courrier électronique et l’usage du web par le travailleur ?.......................20
Ces spécialistes se prononcent dans les pages qui suivent sur leur sujet de prédilection. La qualité des participants à nos tables rondes rend le débat traité passionant. Cette fois-ci nous débattions sur le Télétravail. Ce phénomène grandissant n’est pas sans conséquences juridiques, tant pour l’employé que pour l’employeur. Vous en trouverez un aperçu étayé dans les pages qui suivent.
Bibliothèque...............................22 Le nouveau Code Pénal Social est presque arrivé............23
Nous vous retrouverons bientôt pour le supplément du prochain trimestre lequel portera sur le droit de l’environement. Bonne lecture, Harold Grondel
Supplément gratuit à La Libre Belgique réalisé par la Régie Générale de Publicité - 24 Avril 2010 Rue des Francs,79 - 1040 Bruxelles Tèl:02.211.28.49 - Fax:02.211.28.70 Editeurs responsables: Emmanuel Denis, Henry Visart Coordination et publicité: Luc Dumoulin (02/211 29 54) luc.dumoulin@saipm.com
Rédaction: Coordination: Harold Grondel Rédacteurs: Leen Cornil, Veronique Pertry, Nathalie Alen, Astrid Delarue, Clémentine de Beco, Damien Stas de Richelle, Thierry Duquesne, Daniel Binamé, Michel Strongylos, Antoine Rasneur, Olivier d’Ursel, Valéry Vermeulen, Harold Grondel.
MISE EN PAGE: Azurgraphic sprl Photos: martin D’Haese, www.Photos.com. Internet: www.lalibre.be
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Dossier Droit du travail / Droit Social
Table ronde
Les principaux aspects juridiques du télétravail A l’occasion de la réalisation de ce supplément consacré au droit social et au droit du travail, nous avons eu le plaisir d’accueillir, Mme Nathalie Alen, du practice group « Social Law » de l’Institut des juristes d’entreprise, pour animer notre table ronde consacré aux aspects juridiques du Télétravail. Comme à l’accoutumée dans nos suppléments juridiques, d’éminents spécialistes de la matière ont accepté notre invitation. Nous les en remercions vivement. Vous trouverez ci-dessous le compte rendu de leurs échanges.
Les intervenants du débat organisé à «La Libre Belgique» : Assis de gauche à droite: Thierry Duquesne (NautaDutilh), Nathalie Alen (Institut des Juristes d’Entreprise), Daniel Binamé (Partena Guichet d’Entreprises)
Debout de gauche à droite: Harold Grondel (LexGo.be), Antoine Rasneur (Taquet, Cleese &Van Eeckhoutte), Damien Stas de Richelle (Dla Piper), Luc Dumoulin (RGP), Laurence Durodez (lexgo.be)
Dossier Droit du travail / Droit Social
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Table ronde
Antoine Rasneur
Thierry Duquesne
Daniel Binamé
Nathalie Alen
Nathalie Alen
Damien Stas de Richelle
Laurence Durodez
Harold Grondel
3 juillet 1978) souligne que le travailleur qui effectue du télétravail est bien soumis à cette même loi sur les contrats de travail… Ceci pour insister sur le statut de salarié ‘ordinaire’ et ce par crainte de confusion quant au lien de subordination notamment.
Pour débuter, pourriez-vous préciser l’origine de la législation en matière de Télétravail ?
Antoine Rasneur Le point de départ de cette législation est une demande à la fois sociologique et des organisations syndicales. Les organisations syndicales ont conclu un accord cadre au niveau européen, qui a eu pour conséquence une transposition en Belgique : la Convention collective de travail n°85. Auparavant, notre législation comprenait déjà des textes relatifs au travail à domicile. Leurs origines remontent notamment aux couturières à domicile, et au développement du travail à façon à domicile en général. Les développements en matière de nouvelles technologies ayant entrainé une modification importante des possibilités de travail à domicile, ces nouvelles formes d’occupation entraient difficilement dans le cadre prévu pour un travail à façon des ouvrières. Au- delà de ces textes spécifiques, la modification en 2006 de la loi sur les contrats de travail (loi du
Damien Stas de Richelle C’était effectivement une vraie crainte. La mise en doute du lien de subordination pouvant supprimer la protection offerte par le contrat de travail. Les travailleurs craignaient de s’entendre dire : « Vous n’êtes pas salarié parce qu’il manque l’élément essentiel du contrat : le lien de subordination ». Le problème est que cette crainte a entrainé une pression sur le législateur lorsqu'il s'est penché sur la question de savoir comment intégrer le télétravail dans l'arsenal des mesures qui gouvernaient déjà le travail à domicile. Ce qui différencie le télétravail du travail à domicile est essentiellement le fait que le télétravailleur utilise des technologie de l'information, ce qui n'est pas nécessairement le cas du travailleur à domicile. Par une formulation que l'on peut qualifier de «curieuse»,
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Dossier Droit du travail / Droit Social
Table ronde
Antoine Rasneur
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Daniel Binamé
Nathalie Alen
le législateur a donc opté pour ne pas exclure le télétravail de la notion de travail à domicile (telle qu'elle est définie par la loi relative aux contrats de travail), tout en excluant les télétravailleurs des règles spécifiques qui régissent le statut du travailleur à domicile.
Nathalie Alen Qu’est-ce alors que le télétravail ? Est-ce un travail effectué à titre structurel en dehors des bureaux de l’employeur ? Peut-il être occasionnel ?
Thierry Duquesne Selon la définition de la CCT 85, « le télétravail est défini comme une forme d'organisation et/ou de réalisation du travail, utilisant les technologies de l'information, dans le cadre d'un contrat de travail, dans laquelle un travail, qui aurait également pu être réalisé dans les locaux de l'employeur, est effectué hors de ces locaux de façon régulière et non occasionnelle». Donc, la distinction s’opère sur le fait que la technologie de l’information est l’élément clef dans la réalisation du travail, effectué par un travailleur depuis son domicile ou depuis un autre lieu. Très rapidement, les partenaires sociaux ont voulu exclure ce qu’on appelle le télétravailleur ‘mobile’ comme par exemple le représentant de commerce qui est essentiellement sur la route, et occasionnellement à la maison pour remplir ses rapports. Ses prestations à domicile sont occasionnelles, cela fait partie de l’organisation personnelle de son temps de travail, de sa méthode de travail et ce n’est donc pas du télétravail au sens de la CCT.
Damien Stas de Richelle
Laurence Durodez
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que le télétravailleur est quelqu'un qui communique le résultat de son travail par des moyens électroniques. C’est donc le mode de communication du travail qui est visé aussi. Un télétravailleur n’est donc pas quelqu’un qui rédige un rapport et l’apporte au bureau le lendemain mais bien une personne qui pour tout ou partie de son travail le délivre à distance par des moyens électroniques.
Antoine Rasneur Un des points clefs de la volonté du législateur est de systématiquement garder une égalité entre les travailleurs en télétravail, et ceux restés dans l’entreprise et notamment d’éviter l’isolement. Même si cela peut paraître difficilement conciliable dans les faits en raison de l’éloignement, il est essentiel d’inclure le travailleur dans la vie sociale de l’entreprise. Ainsi on viellera à ne pas oublier d’associer les télétravailleurs à une sortie annuelle de l’entreprise, à une fête du personnel, aux fêtes de fin d’années....
Nathalie Alen Le télétravail serait-il dans ce cas possible à temps plein ? Ne supprimerait-il pas tout lien direct avec l’entreprise ?
Antoine Rasneur Rien ne s’oppose à du télétravail à temps plein. Le texte de la loi mentionne qu’il faut préciser « le cas échéant » les jours et heures de présence en entreprise. Il semble dès lors possible de conclure un contrat sans présence dans l’entreprise. Cependant, c’est uniquement sur base volontaire de la part de l’employé lequel peut toujours refuser la proposition de télétravail.
Antoine Rasneur Ce qui sous-tend la législation, c’est donc l’utilisation des nouvelles technologies sans oublier en toile de fond, mais non sans une importance cruciale, l’aspect sociologique de ces nouvelles méthodes de travail et la conciliation du travail et de la vie privée. On ne dispose en outre, à l’heure actuelle que de peu d’informations ou de statistiques en matière de travail à domicile et de télétravail. Cependant, d’importants efforts sont actuellement consentis par le SPF emploi, travail et concertation sociale. Nous devrions bientôt disposer d’éléments pour analyser les nombreuses formes de travail à domicile et de télétravail, et ainsi en mesurer leur importance.
Damien Stas de Richelle Il est important de souligner qu'une activité exercée en dehors des locaux de l'employeur peut ne pas relever du champ d'application de la règlementation sur le télétravail, comme par exemple les prestations effectuées par le délégué médical, mais avoir été réglée de manière spécifique au niveau de l'entreprise dans le cadre de conventions collectives de travail ou de conventions individuelles.
Damien Stas de Richelle Il faut également prévoir les conditions et modalités de retour au travail dans les locaux de l'entreprise ainsi que les modalités d'avertissement, ce qui laisse très clairement comprendre que le télétravailleur doit pouvoir réintégrer l’entreprise à tout moment. De même, l'employeur doit veiller à prendre toute mesure visant à prévenir l'isolement du télétravailleur par rapport au reste de l'entreprise, isolement qui risque d'être plus sérieux en cas de télétravail à temps plein. Même si un délai de réintégration existe, il faut être conscient du fait que des difficultés organisationnelles peuvent se poser. En effet, dès lors qu’il devient télétravailleur à temps plein, il n’aura vraisemblablement plus d’espace de travail dans les locaux de l’employeur, d’éventuels assistants, secrétaires qui lui auraient été réattribués… Enfin, lors de son retour en entreprise, il ne bénéficie pas d’un régime de protection particulière, contrairement au cas du travailleur en crédit temps par exemple.
Nathalie Alen Et ce droit de retour concerne la même fonction ?
Thierry Duquesne
Damien Stas de Richelle
Il est intéressant de comparer comment les Etats membres de l’Union Européenne ont transposé dans leurs législations les travaux européens. Ainsi, la transcription en droit hongrois précise
Oui naturellement, c’est un salarié comme n’importe quel autre, qui doit pouvoir faire valoir ses droits. Sa fonction est reprise dans son contrat, et il peut la réintégrer.
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Table ronde
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Quel formalisme faut il suivre en tant qu’employeur dans le cas du télétravail?
Est-ce qu’une manière de résoudre le problème de couverture d’accident du travail n’est pas de contracter une assurance accident vie privée pour le travailleur ? La complémentarité des deux couvertures évite-t-elle tout problème ?
Antoine Rasneur Il faut prévoir une convention individuelle (ou un avenant au contrat de travail). La Convention collective précise les éléments essentiels à reprendre dans ces documents : • Fréquence du télétravail et éventuellement jours et heures pendant lequel le télétravail est exécuté ou les jours et heures de présence dans l'entreprise ; • Moments et périodes où le travailleur doit être joignable et suivant quels moyens ; • Modalités de prise en charge des frais et coûts liés aux équipements nécessaires au télétravail ; • Moments auxquels le télétravailleur peut faire appel à un support technique ; • Modalités de retour au travail dans les locaux de l'entreprise et le cas échéant le délai d'avertissement et/ou la durée du télétravail et son mode de renouvellement. • Lieu ou les lieux où le travailleur a choisi d’effectuer son travail. Ce dernier point a été modifié en 2008. Il a une incidence essentielle sur la législation en matière d’accidents du travail. On doit bien entendu pouvoir déterminer où se trouve un travailleur lorsqu’il est victime d’un accident afin de déterminer si le sinistre est couvert. C’est tout l’apport de cette précision.
Thierry Duquesne En cas d'accident à l'occasion de l'exécution de son travail, le travailleur est en principe automatiquement couvert par l'assurance contractée par son employeur. Mais il faut que l'accident survienne dans le cours et par le fait de l'exécution du contrat de travail. En complétant le texte de la CCT - à savoir fixer le lieu d’exécution du travail et la période pendant laquelle le télétravail peut s'effectuer, les partenaires sociaux ont permis d'appliquer la législation sur les accidents du travail aux télétravailleurs. En effet, en ne déterminant pas le lieu et les périodes durant lesquelles le travail devait s’effectuer, on s’exposait à de nombreux conflits portant sur la nature de l'accident. S'agissait-il ou non d'un accident de travail? Le lieu et la période convenue durant laquelle le travail peut s’exécuter permet de baliser la situation du travailleur au moment des faits.
Damien Stas de Richelle Pour compléter l’aspect sur le formalisme nécessaire à la mise en place du télétravail, il me semble utile de souligner, que la loi prévoit des sanctions pour l’absence de convention, mais pas pour les lacunes éventuelles dans la convention. Les textes précisent ,en effet qu’en cas d’absence de convention, le télétravailleur peut mettre fin, et ce de façon immédiate et unilatérale, à sa situation de télétravail. Il peut donc réintégrer les locaux de l’entreprise. Ce qui est sanctionné est donc le défaut d’écrit mais pas le défaut d’écrit conforme.
Thierry Duquesne Cela me semble de bon ton. Ce que recherche le travailleur, c’est de bénéficier d’une flexibilité dans l’exécution de son travail. En effet, faire du télétravail tout en imposant un horaire strict n’a pas de sens. On ôte là une partie même de l’essence de ce mode de travail, un des piliers du mécanisme. Pour prendre un exemple, si quelqu’un choisit de rester à la maison pour pouvoir aller chercher ses enfants à l’école et s’en occuper, et ensuite se remettre au travail, il va de soi qu’on ne peut lui ôter cette flexibilité ! Dès lors, un travailleur a avantage à réclamer une couverture complémentaire vie privée.
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Thierry Duquesne
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Antoine Rasneur Je pense qu’une couverture assurance du travail doit pouvoir suffire. En effet, si l’accident survient sur le lieu et dans les périodes prévues dans la convention de télétravail, ce sera à l’assureur de prouver que ce n’est pas un accident du travail. Si un des deux éléments n’était pas rencontré, il incombera alors au travailleur ou à l’employeur de démontrer que c’est un accident de travail. Il ne faudrait pas faire naître le sentiment auprès du travailleur que, comme il bénéficie d’une couverture vie privée complémentaire, qui le couvre à tout moment du jour et de la nuit, qu’il peut prester quand bon lui semble.
Nathalie Alen La télétravail entraine-t-il des spécificités au niveau des conditions de travail ?
Antoine Rasneur Les spécificités du télétravail demandent normalement des informations écrites complémentaires sur des questions telles que le département de l'entreprise auquel le télétravailleur est rattaché, son supérieur immédiat ou autres personnes auxquelles le télétravailleur peut adresser des questions de nature professionnelle ou personnelle, les modalités pour faire rapport, etc. On a donc veillé à souligner le lien de subordination et ce en réponse aux craintes évoquées ci-avant.
Daniel Binamé Il est cependant tout à fait essentiel puisque ce lien de subordination sera l’élément déterminant pour faire la distinction entre un employé et un faux indépendant. Cette spécificité des conditions de travail est donc à observer à la lettre pour éviter tout problème ultérieur et garantir la protection du travailleur. C’est pour cette raison qu’on l’a spécifié de façon précise dans la législation.
Thierry Duquesne Les conditions de travail sont visée à l’article 7 de la CCT. Il ressort de cet article la volonté de mettre sur un même pied les télétravailleurs et les travailleurs ordinaires, de leur garantir les mêmes droits. En effet, cet article précise que «le télétravailleur bénéficie des mêmes droits en matière de conditions de travail que les travailleurs comparables occupés dans les locaux de l'employeur ». Si les conditions de travail d'un travailleur ordinaire ne sont pas nécessairement transposables à un télétravailleur, il se dégage malgré tout du texte de la CCT une volonté de favoriser un principe d’égalité et d’éviter de s’aventurer dans des distinctions par catégorie de travailleur.
Damien Stas de Richelle Les conditions d'octroi de chèques repas, par exemple, ne sont pas nécessairement transposables aux travailleurs à domicile, surtout si celles-ci sont spécifiques à l'entreprise. En effet, rien ne s'oppose à ce qu'au-delà des conditions fixées par la réglementation pour exclure les chèques repas de la notion de rémunération, l'employeur subordonne l'octroi des chèques repas à une présence effective dans l'entreprise. Or, par définition les télétravailleurs ne sont pas
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Laurence Durodez
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tout le temps présents dans l'entreprise. Peuvent-ils alors prétendre au chèque repas pour le jour non présent dans l'entreprise? Dans l'hypothèse où cet avantage leur est refusé pour les jours non présents dans l'entreprise, ne pourrait-on pas conclure à une différence de traitement par rapport aux travailleurs ordinaires de l'entreprise ? Une certaine prudence s'impose donc lors de la transposition de ces avantages aux télétravailleurs.
Nathalie Alen Comment sont déterminés les horaires de travail ?
Thierry Duquesne L’article 8 spécifie que « Le télétravailleur gère l'organisation de son travail dans le cadre de la durée du travail applicable dans l'entreprise ». Selon ma lecture des textes, il y a lieu de respecter le temps applicable en entreprise et laisser au travailleur de la latitude quant à la manière dont il va effectuer cet horaire.
Antoine Rasneur Normalement, la convention de départ doit au minimum reprendre les moments ou périodes où le travailleur est joignable, ce qui cadre les horaires d’exécution de son travail.
Nathalie Alen Cependant celles-ci peuvent-elles être de durée cumulée inférieure au temps de travail ? Imaginons qu’un travailleur doive prester 8 heures sur une journée mais être joignable durant 5 heures ?
Damien Stas de Richelle Je ne vois pas de lien direct entre le temps de travail et la période durant laquelle le travailleur doit être joignable. Il se peut tout à fait qu’ils diffèrent. Le fait que le travailleur ne soit pas dans une période où il doit être joignable ne veut pas dire qu’il ne travaille pas.
Nathalie Alen Quels sont les moyens de contrôle sur le travailleur ?
Antoine Rasneur Le premier contrôle, c’est celui de l’exécution de la tâche elle-même. Prenons l’exemple d’un travailleur d’un service de ressources humaines qui décide de préparer les paies de son domicile, il dispose de toutes les applications nécessaires (accès au logiciel du secrétariat social, aux systèmes de commande de chèques repas, etc). Le premier contrôle sera de voir si les paies sont bien effectuées.
Damien Stas de Richelle Etant donné la volonté du législateur de faire du télétravailleur un travailleur aux conditions de travail les plus identiques pos-
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sibles à celles d’un travailleur dans l’entreprise, il est important que les mécanismes de contrôle et d’évaluation du travail soient identiques pour les télétravailleurs comme pour tous les autres travailleurs de l’entreprise.
sion de perte de contrôle du travailleur. L’absence de lien visuel et physique ne permettrait pas, selon eux, de gérer de la même façon un télétravailleur.
Il va de soi que des critères subjectifs entrent en ligne de compte : présence à son bureau, attitude. On veillera donc à ce que les critères objectifs soient semblables.
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Daniel Binamé Il est cependant inévitable que l’absence de lien visuel avec le travailleur crée une volonté de contrôle supérieure de l’employeur. Il faut dès lors être prudent quant aux méthodes mises en place et éviter toute discrimination.
Damien Stas de Richelle L’argument principal invoqué par les entreprises qui ne désirent pas s'engager dans la voie du télétravail est d’ailleurs cette impres-
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Cependant les employeurs peuvent monitorer l’activité des employés par l’utilisation de logiciels spécifiques…
Damien Stas de Richelle Si c’est possible techniquement, légalement, leur mise en place semble délicate. En effet, la CCT 81 précise les cas de finalité des contrôles et ce de façon exhaustive : Le contrôle de données de communication électroniques en réseau n’est autorisé que lorsque l’une ou plusieurs des finalités suivantes est ou sont poursuivies :
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Table ronde
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1° la prévention de faits illicites ou diffamatoires, de faits contraires aux bonnes moeurs ou susceptibles de porter atteinte à la dignité d’autrui ; 2° la protection des intérêts économiques, commerciaux et financiers de l’entreprise auxquels est attaché un caractère de confidentialité ainsi que la lutte contre les pratiques contraires ; 3° la sécurité et/ou le bon fonctionnement technique des systèmes informatiques en réseau de l’entreprise, en ce compris le contrôle des coûts y afférents, ainsi que la protection physique des installations de l'entreprise ; 4° le respect de bonne foi des principes et règles d’utilisation des technologies en réseau fixés dans l’entreprise. ? ».
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rents au travail à domicile (ex.: chauffage, l’électricité, etc.) qui sera soit fixée de commun accord, soit fixée à 10 % de la rémunération. Le télétravail ne peut pas prétendre à cette indemnité.. L’employeur prend uniquement en charge les frais de connexion et de communication liés au télétravail.
Damien Stas de Richelle On peut d'ailleurs se demander pourquoi le télétravailleur, qui effectue ses prestations à son domicile, ne pourrait pas prétendre à une indemnisation comparable à celle du travailleur à domicile. Dans certains cas, leur situation est comparable. Une précision dans les textes aurait permis de clarifier les choses à cet égard.
Il semble difficile de justifier un contrôle de l’activité du travailleur distant par une de ces finalités.
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Antoine Rasneur
Pour clôturer, comment mettre en œuvre les règles de prévention en matière de santé et sécurité?
La convention 81 concernant la protection de la vie privée s’applique mutatis mutandis. L’employeur peut prendre les mesures pour contrôler l’aspect professionnel du travail et informe le travailleur des restrictions, par exemple d’installation de programmes sur l’ordinateur de l’entreprise. L’employeur doit aussi préciser les modalités d’utilisation des moyens mis à disposition à des fins privées.
Nathalie Alen Faut-il prendre des mesures spécifiques en matière de protection des données ?
Thierry Duquesne
Damien Stas de Richelle Il n’y a pas d’autre moyen que de prévoir que le conseiller en prévention ait accès au lieu où va s’ exécuter le travail. On peut considérer que c’est une violation de la sphère privée, mais dès le moment où le travailleur choisit ce lieu privé pour exécuter son travail, le conseiller souhaitera le visiter. Le travailleur a cependant le droit de refuser l’accès. Si le travailleur s’y oppose, et c’est son droit le plus strict, le conseiller devra se contenter de fournir des recommandations.
Antoine Rasneur
La CCT prévoit que l’employeur rappelle au travailleur quelles sont les règles en matière de protection des données et demande au télétravailleur de se conformer aux règlements en vigueur. Si les partenaires sociaux ont estimé bon de rappeler ce qui pourtant s’impose à tout employé, c’est parce qu’ils anticipaient le problème spécifiquement lié au télétravail.
Pour ce qui est du contrôle par l’inspection sociale, les contrôles sont rendus délicats du fait de l’absence d’une base de données des télétravailleurs. Les inspections se passent dès lors généralement en deux temps. Un contrôle en entreprise fait état de conventions de télétravail, et cette découverte peut engendrer une inspection quelques jours plus tard chez le travailleur à son domicile.
Nathalie Alen
Damien Stas de Richelle
Quelle est l’influence du télétravail sur la rémunération du travailleur ?
Il revient au conseiller de prévention de tenir compte dans ses rapports de la situation de télétravail de certains travailleurs, et d’émettre les recommandations nécessaires.
Harold Grondel Il ne faut pas introduire de distinction entre les travailleurs qui travaillent normalement au sein de l’entreprise et ceux qui bénéficient du régime du télétravail, ni acter de modification en cas de modification du régime. Cependant, la CCT prévoit que l’employeur doit prendre exclusivement en charge les coûts de connexions et communications liées au télétravail.
Harold Grondel Ces mesures sont dans l’intérêt du travailleur lui même.Dés lors s’ il refuse les visites et/ou ne suit pas les recommandations émises par l’entreprise, celle-ci ne peut être tenue pour responsable. Il faut aussi souligner que le télétravail permet de faciliter l’accès à la vie professionnelle à des personnes handicapées.
Thierry Duquesne Il faut souligner qu’un travailleur à domicile ordinaire bénéficiera d’une indemnité due au titre de remboursement des frais inhé-
Propos recueillis par Harold Grondel, General Manager LexGo: www.lexgo.be
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Astrid Delarue
LE REGLEMENT DE TRAVAIL : un ensemble de règles au service de l’entreprise et des travailleurs ? Le cas de la CCT 100
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ouvent considéré comme un peu désuet, on se souvient vaguement avoir pris connaissance du règlement de travail, au moment de son entrée en fonction de l’entreprise, et après plus rien. C’est vrai que le règlement de travail est également assez « fastidieux » à lire, même s’il est fondamental d’en prendre connissance. Il fixe en effet l’ensemble des règles qui définit les conditions dans lesquelles le travail doit s’exécuter dans l’entreprise. Il détermine précisément les conditions générales de travail e/ou donne aux travailleurs toute l’information nécessaire sur le fonctionnement et l’organisation du travail dans l’entreprise. Le règlement de travail s’impose tant dans le secteur privé que dans le secteur public. Pourtant même si le contenu, la procédure d’établissement et de modification du règlement de travail sont encadrés par la loi, il peut devenir un outil de communication et de dynamisation de la politique sociale de l’entreprise, dès lors qu’il sait s’imposer comme instrument de suivi de la législation sociale et comme outil de dialogue et de concertation au-delà des seules obligations réciproques qui s’établissent entre l’employeur et le travailleur. Le règlement de travail est, en effet, obligatoire pour l’employeur dès lors qu’il engage pour la première fois un travailleur. Il s’applique à tous les travailleurs de l’entreprise sans distinction. La notion de travailleur doit s’entendre au sens large de telle façon qu’il n’y a pas lieu de distinguer, si le travailleur est occupé à temps plein ou partiel ou encore s’il est ouvrier ou employé, stagiaire ou étudiant ... Toutefois, rien n’interdit l’entreprise de mettre en place des règlements distincts pour diverses catégories de travailleurs (ex : ouvriers/employés), et pour diverses sections de l’entreprise. L’employeur et le travailleur sont liés par les dispositions contenues dans le règlement de travail, et sont tenus de les respecter. Toutefois, même une fois adopté au sein de l’entreprise, l’employeur et le travailleur peuvent y déroger individuellement et par écrit. Tel est le cas lorsque les parties insèrent certaines clauses particulières dans le contrat de travail. Le règlement de travail n’est donc pas un outil figé, mais sait s’adapter aux situations particulières de travail que l’entreprise et/ou le travailleur peuvent rencontrer. Il convient à ce stade de préciser que le règlement de travail s’élabore – tant en ce qui concerne son établissement que ses modifications - dans le cadre d’une procédure de concertation entre l’employeur et ses travailleurs. Bien évidemment, selon qu’il existe existe ou non un conseil d’entreprise, la procédure varie. C’est au conseil d’entreprise qu’il revient d’établir et de modifier le règlement de travail, qui entrera en vigueur dans les 15 jours après la date de l’accord. En l’absence de conseil d’entreprise, l’employeur établit le projet de règlement de travail (ou de modification) et l’affiche dans l’entreprise. Dans les 15 jours de l’affichage, les travailleurs peuvent faire part de toutes remarques utiles dans un registre spécialement prévu à cet effet et mis à leur disposition. Ils peuvent aussi faire directement leurs observations au fonctionnaire du Contrôle des lois sociales. Le règlement de travail contient toute une série de mentions obligatoires (voir encadré), qui ne doivent être reprises dans le règlement de travail que pour autant qu’elles soient nécessaires à l’organisation et au fonctionnement du travail dans l’entreprise. Inutile par exemple de mentionner les procédures de travail en équipe si l’entreprise ne fonctionne pas ainsi. Le règlement de travail s’adapte aux besoins de l’entreprise.
Ce qui est véritablement intéressant, c’est la possibilité d’insérer dans le règlement de travail, des mesures propres à l’organisation de chaque entreprise, et ainsi d’adapter le règlement de travail souvent perçu comme rigide, à l’évolution du mode de travail au sein de l’entreprise et à son environnement. Le réglement de travail peut, par exemple, s’intéresser à l’usage d’internet au travail et au contrôle des comunications électroniques, à la possibilité et aux conditions d’utilisation d’une vidéosurveillance, aux conditions de mise à disposition et d’utilisation d’un GSM... par le biais de la rédaction de clauses spécifiques. De ce point de vue, le règlement de travail peut devenir un véritable outil de communication au service de l’entreprise et de ses travailleurs. Le règlement de travail peut également devenir un un outil de mesure de l’adaptabilité de l’entreprise à l’évolution de la législation sociale et du bien-être au travail. L’évolution de la législation sociale et sa complexité ne sont toujours évidente à suivre pour l’employeur et les travailleurs. Le règlement de travail, en qualité d’outil de concertation et de dialogue, peut être utilisé par les uns et par les autres, pour se mettre à jour avec la législation récente et la diffuser au sein de l’entreprise. Elaboré sur des principes de concertation, il crée un socle de règles et de valeurs communes à l’entreprises et contribue ainsi à asseoir la culture de l’entreprise.
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Astrid Delarue
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A ce titre prenons, l’exemple de la récente Convention Collective de Travail n° 100 (ci-après la CCT 100) qui prévoit la mise en place d’une politique préventive en matière d’alcool et de drogue dans les entreprises privées. La problématique relative aux effets, dans le milieu du travail, de la consommation d’alcool et/ou de drogues fait en effet l’objet, depuis le 1er avril 2009, d’une nouvelle réglementation : la CCT 100 relative à la mise en œuvre d’une politique préventive dans l’entreprise. L’objectif est d’agir avant que les problèmes ne surgissent et d’éviter qu’ils ne surgissent. L’approche préconisée est plus de s’attacher à mettre en évidence les dysfonctionnements engendrés par une consommation problématique que de la consommation elle-même. La CCT 100 rappelle que l’approche des problèmes liés à l’alcool et à la drogue doit être envisagée dans le cadre d’une analyse de fonctionnement globale. Il s’agit d’interpeller le travailleur ayant un éventuel problème d’alcool ou de drogue sur la base de son dysfonctionnement en termes de prestations de travail et de relations sociales. La politique préventive établie dans la CCT 100 s’appuie sur deux axes. Elle doit d’une part faire partie d’une politique intégrale en matière de santé et de sécurité au travail, et d’autre part, s’inscrire dans une politique globale du personnel, dans le cadre de laquelle le fonctionnement du travailleur est suivi, discuté et évalué. Dans cette perspective, le règlement de travail constitue un excellent support de réflexion et de mise en œuvre d’une politique au sein de l’entreprise. La CCT 100 n’oblige nullement l’entreprise à modifier son règlement de travail, elle peut se contenter d’annexer au règlement de travail une déclaration qui peut être minimaliste et simplement énoncer la réflexion et le respect des principes de la CCT 100. Si au contraire, l’entreprise souhaite aller plus loin et mener une réflexion de fond, en vue de mettre en place des règles et des procédures à respecter concernant la détention ou la consommation d’alcool ou de drogue sur le lieu de travail, il conviendra de modifier le règlement de travail. Il est clair que choisir cette voie, c’est faire le choix de s’attaquer à deux tabous : l’alcool et la drogue. Mener une telle réflexion en profondeur en y associant l’ensemble des partenaires sociaux, voire au delà comme par exemple le corps médical ou des psychologues spécialistes des addictions, signifie donner au règlement de travail une dimension qui va bien au-delà d’un ensemble d’obligations. Insérer une véritable politique préventive en matière d’alcool et de drogue dans le règlement de travail, c’est décider que la santé des travailleurs est essentielle pour l’entreprise, que l’entreprise a conscience de l’importance de cette problématique, qu’elle souhaite jouer rôle important dans la prévention et/ou le traitement des difficultés rencontrés par son personnel et qu’elle est à leur écoute. De même, la CCT 100 rend possible la mise en place de tests préventifs, mais uniquement si des conditions strictes de fond et de forme sont respectées et moyennant la modification du règlement de travail. La confiance réciproque des partenaires dans le cadre de l’élaboration de ces tests, même très encadrés, témoignent de la volonté de s’inscrire dans une véritable politique sociale et de faire jouer au règlement de travail, un rôle de véritable vecteur de communication interne au sein de l’entreprise.
Les éléments d’informations à mentionner obligatoirement dans le Règlement de travail : • Les horaires de travail : y inclus les horaires réguliers de travail ; les horaires de travail des travailleurs à temps partiel ; les horaires des équipes successives ; les horaires flexibles ; les jours et heures d’accessibilité de l’entreprise pour les travailleurs qui sont occupés en dehors ;
• Les modes de mesurage et de contrôle du travail pour déterminer la rémunération ;
• Le mode, l’époque et le lieu de paiement de la rémunération ;
• Les délais de préavis et les motifs graves justifiant la rupture du contrat de travail sans préavis, ni indemnité, par l’une ou l’autre des parties, sous réserve du pouvoir d’appréciation des cours et tribunaux ;
• Les droits et obligations du personnel de surveillance ;
• Les pénalités, le montant et la destination des amendes et les manquements qu’elles sanctionnent, ainsi que le recours ouverts aux travailleurs concernant ces pénalités ;
• L’endroit où l’on peut atteindre la personne désignée pour donner les premiers soins et l’endroit ou se trouve la boîte de secours, ainsi que les noms des médecins désignés par l’employeur à qui peuvent s’adresser la victime d’un accident du travail ;
• La durée des vacances annuelles, leurs modalités d’attribution ou la référence aux textes légaux les fixant. Si des vacances annuelles collectives sont prévues, leurs dates ;
• Les noms des membres du conseil d’entreprise, du comité pour la prévention et la protection au travail, de la délégation syndicale ;
• L’adresse des services d’inspection chargés de la surveillance de l’application des dispositions légales et réglementaires relatives à la protection des travailleurs ;
• La mention des conventions collectives de travail et/ou accords collectifs conclus au sein de l’entreprise et régissant les conditions de travail ;
• La mention des jours fériés, des jours de remplacement, des modalités d’application du repos compensatoire.
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Dossier Droit du travail / Droit Social - Publi-rédactionnel
Interview de Me Damien Stas de Richelle, avocat associé chez DLA Piper
Amener le potentiel humain au cœur du processus de fusion et acquisition: nouvelle tendance ou réalité évidente? Damien Stas de Richelle est avocat associé chez DLA Piper. Il est spécialisé dans les différents aspects du droit du travail et de la sécurité sociale, en particulier les relations collectives de travail et les conflits sociaux. Il conseille des entreprises nationales et multinationales, notamment en matière d'intégration des forces de travail et d'harmonisation des conditions de travail à la suite de réorganisation d'entreprises. L'équipe de DLA Piper compte une 10 d'avocats spécialisés en droit du travail, dont 2 avocats associés. Q- Vous avez participé à une étude portant sur la valeur du capital humain lors d'opérations de fusion et acquisition. Maintenant que les marchés financiers semblent reprendre leur souffle et que de nouvelles opportunités apparaissent, pouvezvous revenir sur les contours de l'étude ? « En 2008, DLA Piper a effectivement participé à une étude, en partenariat avec Watson Wyatt et Mercuri Urval, portant sur les facteurs humains lors de fusions et acquisitions. Nous nous sommes adressés aux PDG de grandes entreprises à travers l'Europe ayant été impliqués récemment dans une opération de fusion ou ayant acquis récemment une nouvelle activité, et ce de manière à recueillir leurs impressions à cet égard. » « L'étude part du constat évident que les fusions et acquissions ne sont généralement abordées par les marchés financiers que sous l'angle de leur importance et de leur taille, et peu, voire pas du tout sous l'angle du volet social. Cela s'explique sans doute par le fait qu'une telle analyse permet aux marchés financiers de déterminer les dernières tendances économiques et de définir de nouvelles opportunités. » « Le climat économique précédant l'étude, jumelé au constat général de consolidation des entreprises à travers l'Europe, ont mis les différentes disciplines entourant les fusions et acquisitions à rude épreuve. La crise financière de ces derniers mois les a sans doute ébranlées plus encore, les soumettant à une longue période de réflexion et de transition. En effet, il n'est plus uniquement question de valorisation des actifs, d'architecture de l'opération, d'équilibrage des garanties fournies, qui bien évidemment restent essentielles à la réussite de la transaction, mais bien de définir une stratégie solide permettant au potentiel humain de s'épanouir pleinement dans la nouvelle structure. Ceci qui implique d'ailleurs que des mesures adéquates soient prises, de manière à rapprocher des environnements qui à l'origine sont parfois fort différents et à intégrer des conditions de travail qui le plus souvent reposent sur des considérations, des réalités et des expériences diverses. L'étude a donc permis de prendre conscience d'une réalité toute évidente: la prise en compte de facteurs humains est un élément clef pour la réussite de pareilles opérations. » Q- L'étude s'est-elle révélée surprenante ? « Les résultats de l'étude ne m'ont pas réellement surpris. Par contre, ils ont confirmé mon expérience et mis en évidence un sentiment partagé par certains acteurs du marché. Ainsi, s'il ne fait pas de doute que la pluspart des fusions et acquissions
ont pour objet principal l'accroissement de parts et marché ou la conquête de nouvelles activités, la surprise vient du fait que l'étude relève qu'une entreprise sur trois place d'autres facteurs en tête des éléments moteurs de l'opération, tels que l'acquisition d'un savoir-faire propre à certains fonctions clefs. Le capital humain est donc plus justement valorisé, ce qui est une bonne chose. Plus surprenant encore, l'étude indique que les caractéristiques liées à l'emploi, la gestion du processus d'intégration et l'analyse des compétences requises ont une vive influence sur la réussite ou l'échec de l'opération. » Q- Quel enseignement en retirer concrètement, surtout qu'aujourd'hui une reprise s'amorce ? « J e suis convaincu, comme le relève l'étude, que le potentiel humain va prendre de plus en plus d'importance dans les futures opérations de fusion et acquisition, précisément en raison de son empreinte grandissante sur le succès final de l'opération. Quelles que soient les considérations financières qui entourent l'opération, sa réussite dépend largement du degré d'implication des collaborateurs, de l'intégration des environnements de travail et de l'hominisation des conditions de travail. Or il me semble que c'est dès le processus de due diligence que l'acquéreur peut prendre les choses en main. Ce processus fait aujourd'hui clairement l'objet d'une évolution, très certainement en ce qui concerne l'analyse des différents paramètres liés à l'emploi (conditions d'emploi, formes diverses de rémunération, cartographie des compétences, accords collectifs etc. ). Le résultat de cette analyse ne sert plus uniquement à informer le potentiel acquéreur des éventuels risques liés à l'opération. L'ensemble de ces éléments, généralement repris dans un rapport détaillé, lui permettent dès le lancement de l'opération d'asseoir sa stratégie quant au processus d'intégration des forces de travail en présence, de décider des éventuelles mesures à prendre à l'égard d'un possible sureffectif, d'anticiper les difficultés en matière d'hominisation des conditions de travail, bref de planifier l'après fusion et de déterminer la durée raisonnable de son retour sur investissement. C'est une évolution qui va s'amplifier et dont les marchés financiers vont devoir tenir compte. » Q- Un dernier conseil ? «A mener le potentiel humain au cœur des fusions et acquisitions est clairement un gage de succès. Il me semble dès lors qu'il y a lieu d'intégrer ces composantes humaines le plus tôt possible dans le processus de discussion entre les parties, et si possible avant que les considérations financières n'enthousiasment et ne monopolisent les débats. »
Une copie de l'étude est disponible sur notre site web www.dlapiper.com ou en prenant contact à l'adresse mentionnée ci-dessous
Damien Stas de Richelle Avocat associé • DLA Piper UK LLP • Avenue Louise 106 - 1050 Bruxelles T.: +32 2 500 1517 • F.: +32 2 500 1605 • damien.stas.de.richelle@dlapiper.com
Dossier Droit du travail / Droit Social
Thierry Duquesne - Associate Partner - NautaDutilh
Licenciement collectif & discrimination
D
ans le cadre d'un licenciement collectif, l'employeur sera amené à faire des choix à différents stades de la procédure (ex.: sélectionner les travailleurs qui seront licenciés, fixer le mode de calcul de primes complémentaires). Sous la pression éventuelle des représentants des travailleurs, il opte parfois pour des choix qui peuvent être considérés comme discriminatoires. La violation des dispositions légales en la matière peut être lourde de conséquences.
1. Rappel du cadre légal Outre certaines dispositions légales spécifiques, trois lois du 10 mai 2007 encadrent la matière de la discrimination. Il s'agit de la loi tendant à lutter contre certaines formes de discrimination (loi discrimination), de la loi tendant à réprimer certains actes inspirés par le racisme ou la xénophobie (loi racisme) et de la loi ayant pour objet la lutte contre la discrimination entre les femmes et les hommes (loi genre). Ces lois établissent le principe d'interdiction de discrimination, directe et indirecte, fondée sur une liste limitative de critères: l'âge, l'orientation sexuelle, l'état civil, la naissance, la fortune, la conviction religieuse ou philosophique, la conviction politique, la conviction syndicale, la langue, l'état de santé actuel ou futur, un handicap, une caractéristique physique ou génétique, l'origine sociale, le sexe, la nationalité, la race ainsi que l'origine ethnique. En d'autres termes, dans le cadre d'un licenciement collectif, l'employeur ne pourra pas fonder un de ses choix, au cours des différentes phases de la procédure, sur la base des critères repris dans cette liste. Une telle décision pourra être jugée discriminatoire. Les sanctions sont lourdes. Les lois discrimination et racisme prévoient que seront nulles les dispositions contraires à leur contenu ainsi que les éventuelles clauses contractuelles contenant une renonciation aux droits garantis par ces deux lois. Cela signifie qu'un travailleur licencié sur la base d'un critère jugé discriminatoire pourrait obtenir d'un tribunal la nullité de son congé et obtenir sa réintégration dans l'entreprise, ce qui entraînera une régularisation des pertes financières subies par le travailleur. A défaut de réintégration, le travailleur aura droit en outre à une indemnité forfaitaire de 6 mois de rémunération ou à la réparation du préjudicie effectivement subi. De même, une indemnité payée dans le cadre du plan social qui serait fixée en tenant compte d'un critère de discrimination pourrait être déclarée nulle. Le travailleur qui s'estime lésé parce qu'il n'a pas reçu une prime jugée discriminatoire, pourra réclamer la réparation du préjudice subi. Enfin, dès qu'il y a présomption de discrimination, il appartiendra à l'employeur de prouver que tel n'est pas le cas.
2. Critères de sélection Lors de la notification de l'annonce de l'intention de procéder à un licenciement collectif, l'employeur doit préciser les critères qui seront pris en considération pour sélectionner les travailleurs à licencier. Généralement, l'employeur sera enclin à choisir des critères "organisationnels" tels que la suppression d'une fonction par exemple, et "qualitatifs" tels que les performances du travailleur, l'analyse de ses dernières évaluations ou encore sa capacité d'intégration dans une nouvelle structure. Face à ces critères pourtant objectifs, les représentants des travailleurs invoquent généralement leur manque d'objectivité et préfèrent comme critères l'âge ou la situation sociale des travailleurs.
Il est cependant manifeste que le seul critère de l'âge ne permet pas de sélectionner les travailleurs à licencier. Quant à la situation sociale, de quoi s'agit-il? Soit la situation sociale doit être associée à la notion de fortune ou d'état civil. Dans ce cas, s'agissant de critères discriminatoires, ils sont illégaux. Soit situation sociale équivaut à situation familiale. Dans ce cas, comment faire le choix entre une mère divorcée ayant trois enfants à charge et un père veuf en charge de son seul fils handicapé? Entrer dans de telles considérations risque non seulement de créer des situations de discriminations directes et indirectes mais également d'obliger employeur et représentants des travailleurs à établir des grilles de comparaison dont la légitimité est plus que douteuse. Pour conclure sur ce premier point, il y a lieu de conseiller à l'employeur de fixer des critères de sélection sur la base de critères non discriminatoires, objectivement évaluables et ne laissant pas la place à des comparaisons intrusives.
3. Plan social A l'occasion de l'élaboration du plan social, il est courant de négocier avec les délégués et les permanents le paiement de primes qui viennent s'ajouter aux indemnités légales. A nouveau, des critères devront être définis pour calculer de telles indemnités. En pratique, l'ancienneté, l'appartenance à une catégorie professionnelle ou le fait d'être attaché à un département spécifique sont souvent des critères retenus pour déterminer le montant de cette prime complémentaire. Ces critères en tant quel tels ne posent pas de problèmes. Mais comment gérer les discriminations indirectes qui peuvent découler d'un choix plutôt que d'un autre? L'employeur court il un risque à payer une prime aux employées du département des ressources humaines (qui sont toutes du sexe féminin), inférieure à celle payée aux ouvriers de l'usine (qui sont tous issus du genre masculin)? Immanquablement, là aussi la prudence s'impose. La tendance des délégués syndicaux est souvent de négocier un plan social par catégorie de travailleurs. Il est toutefois recommandé à l'employeur de prendre un temps d'arrêt en cours de négociations pour prendre la hauteur nécessaire afin d'analyser globalement la population et les primes qui sont payées travailleur par travailleur. Travailler par département, par fonction impactée par la restructuration, etc. reste la meilleure façon de faire.
4. Travailleurs protégés Réclamer le paiement d'une prime en contre partie de la levée de la protection des travailleurs protégés est discriminatoire. Premièrement, tant la loi sur le conseil d'entreprise, celle sur le CPPT que la loi de 1991 qui règle le licenciement des membres de ces organes, prévoient que le mandat de ces travailleurs ne peut entraîner ni préjudice ni avantage spéciaux pour l'intéressé. Octroyer un avantage particulier à un travailleur protégé en raison de son mandat est donc illégal. Les cours et tribunaux confirment cette analyse. Deuxièmement, la loi discrimination vient d'ajouter un nouveau critère de discrimination à savoir la conviction syndicale. Sur la base de la loi discrimination, tous les travailleurs licenciés dans le cadre d'un licenciement collectif, non protégés, seraient fondés à réclamer à leur ancien employeur, devant le tribunal du travail, des dommages et intérêts équivalents à l'indemnité payée par l'employeur aux travailleurs protégés à l'occasion de la levée de leur protection.
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Dossier Droit du travail / Droit Social
Daniel Binamé - (Partena Guichet d’Entreprises)
Travailleur salarié et faux indépendant :un peu de clarté
U
n travailleur salarié est une personne qui est liée par un contrat de travail et qui accomplit un travail sous l’autorité, la direction et le contrôle d’un employeur contre paiement d’une rémunération. Un travailleur indépendant est toute personne physique exerçant une activité professionnelle pour laquelle elle n’est pas liée par un contrat de travail (ouvriers ou employés) ou un statut (administrations publiques). Les éléments constitutifs d’un contrat de travail sont classiquement au nombre de trois : la prestation, la rémunération et le lien de subordination. Le critère primordial permettant de distinguer une activité indépendante d’une activité salariée est l’absence de lien de subordination dans le chef de l’indépendant. Peu importe le type de contrat de travail, le lien de subordination existe dès qu’une personne (l’employeur) peut exercer son autorité sur une autre (le travailleur). En pratique, il suffit que cette autorité soit potentielle, elle ne doit pas être exercée effectivement et de façon continue.
Les définitions de base sont arrêtées depuis longtemps mais dans la pratique, il s’est avéré que la différence n’était pas toujours facile à établir et qu’il existait des zones d’ombres entre les deux statuts. Lorsqu’une relation de travail en réalité salariée, est dissimulée sous la fausse étiquette d’une activité indépendante ( soit à l’initiative de la personne même, soit à l’initiative du donneur d’ordre), il y a violation de la loi et les parties s’exposent dès lors à de lourdes sanctions. Nous entrons ici dans toute la problématique des « faux indépendants ». Le « faux indépendant » est celui qui est assujetti au statut social des travailleurs indépendants, mais qui, en réalité, travaille sous l’autorité d’un employeur avec un lien de subordination manifeste. Il travaille donc sous les mêmes conditions de travail qu’un travailleur salarié mais sans bénéficier d’un contrat de travail. Pour les employeurs, le recours aux faux indépendants leurs permet d’éviter le paiement de certaines charges patronales normalement dues dans le cadre d’un travail salarié. Cette fraude permet également d’échapper à toute une série de dispositions qui protègent les travailleurs.
La loi énumère les principes fondamentaux permettant de distinguer un contrat de travail d’une collaboration indépendante. Elle consacre 4 critères généraux pour déterminer s’il existe ou non une relation d’autorité et un lien de subordination entre les parties, et donc d’évaluer la relation de travail entre celles-ci : • La volonté des parties telle qu’elle est exprimée dans leur convention pour autant qu’elle soit conforme à l’exécution effective de celle-ci ; • La liberté d’organiser le temps de travail ; • La liberté d’organiser le travail ; • La possibilité d’exercer ou non un contrôle hiérarchique. La loi établit le principe selon lequel les parties choisissent librement la nature de leur relation de travail, mais également que l’exécution effective du travail doit être en concordance avec la nature de la relation telle que décidée par les parties. La qualification donnée par les parties au contrat est donc primordiale car si les faits ne viennent pas contredire cette qualification, le juge devra nécessairement en tenir compte. Par contre, si la qualification faite par les parties de la relation de travail ne correspond pas au travail effectué, cette dernière sera requalifiée. Le juge tiendra compte de la situation de fait afin d’établir un éventuel lien de subordination et pour cela il va notamment tenir compte des critères de distinction suivants : • L’absence de participation par le travailleur dans les gains ou les pertes de l’entreprise ; • L’absence d’investissement dans l’entreprise avec du capital propre ; • L’absence de responsabilité financière ou de pouvoir de décision dans l’entreprise ; • La garantie de paiement périodique ; • Le fait de n’avoir comme client qu’une seule et unique entreprise ;
Pour les travailleurs, ils doivent bien réfléchir avant de s’engager dans ce type de relation car cela comporte toute une série d’implications, notamment en matière de paiement de cotisations sociales et du précompte professionnel. D’autre part, ils ne pourront bénéficier ni de préavis ou d’indemnités compensatoires en cas de rupture de contrat, ni du salaire garanti pendant la période d’incapacité de travail suite à une maladie ou un accident.
• Le fait de ne pas être soi-même employeur (ex : possibilité de recruter du personnel) ;
Ce statut de « faux indépendant » a fait couler beaucoup d’encre… Le législateur a voté la loi-programme du 27 décembre 2006 publiée au Moniteur belge du 28 décembre 2006, pour tenter de répondre à ce flou, à cette insécurité et vise à lutter contre les « faux indépendants ».
• L’absence de pouvoir de décision concernant la facturation aux clients.
• Le fait de ne pas pouvoir organiser librement son temps de travail ; • L’existence de procédure de contrôle interne, avec sanctions à l’appui ;
Enfin, la loi a également prévu une politique préventive par la création d’une Commission de règlement de la relation de travail
Dossier Droit du travail / Droit Social
Damien Stas de Richelle - Avocat Associé chez DLA Piper UK LLP
Harmonisation du statut ouvrier-employé ou l'écueil du licenciement abusif pour les employés
L
e débat sur l'harmonisation du statut ouvrier-employé est loin d'être clos, que du contraire. Il empoisonne la concertation sociale entre les organisations syndicales et les représentants des employeurs depuis plus de 10 ans maintenant. Pourtant, plus personne ne conteste aujourd'hui que la Belgique est quasiment le dernier pays de l'union européenne à opérer une distinction entre ouvrier et employé, notamment à l'égard des dispositions qui gouvernent la rupture du contrat de travail. Tout le monde s'accorde donc pour dire qu'un statut unique est indispensable, non seulement pour faire face aux critiques sans cesse renouvelées que le système belge est largement discriminatoire, mais surtout, et peut-être même avant tout, pour répondre de manière efficace aux exigences du marché de l'emploi, qui demandent des mesures simples et évidentes à mettre en ouvre, surtout en période de crise comme celle que nous venons de traverser. Bien que le Premier Ministre Yves Leterme ait récemment réussi à remettre la concertation sociale sur les rails après un blocage de plusieurs semaines, force est de constater qu'on est loin d'un accord. Le group de 10 planche sur un accord qu'on n'annonce pas avant l'été 2011 (!), soit dans un peu plus d'un an. Si les choses sont si compliquées, c'est précisément par ce qu'aucun consensus ne semble se dégager parmi les différentes propositions qui sont envisagées pour harmoniser les règles gouvernant notamment la rupture du contrat de travail. Il n'y a pourtant pas trente-six mille solutions et les organisations patronales et syndicales le savent bien. On ne dénombre en réalité que 3 grandes orientations, soit on ramène le statut des employés à celui actuellement en vigueur pour les ouvriers, soit on porte le statut des ouvriers à celui actuellement en vigueur pour les employés, soit on identifie un tout nouveau statut, s'inspirant par exemple de ce qui se fait à l'étranger. Penchons-nous brièvement sur ce que les 2 premières orientations pourraient signifier concrètement. (1) Ramener le statut des employés à celui actuellement en vigueur pour les ouvriers, reviendrait à permettre à l'employeur de notifier des délais de préavis plus courts pour tout le monde. En effet, la loi du 3 juillet 1978 relative aux contrats de travail fixe, pour les contrats de travail d'ouvrier, la durée du préavis en cas de rupture émanant de l'employeur à 28 jours. Ce délai est porté à 56 jours en cas de service ininterrompu chez le même employeur pendant 20 ans. Notons toutefois que la convention collective de travail n° 75 du 20 décembre 1999 a porté les délais de préavis à observer par l'employeur à 35 jours en cas d'ancienneté de 6 mois à moins de 5 ans, à 42 jours en cas d'ancienneté de 5 ans à moins de 10 ans, à 56 jours en cas d'ancienneté de 10 ans à moins de 15 ans, à 84 jours en cas d'ancienneté de 15 ans à moins de 20 ans et à 112 jours en cas d'ancienneté de 20 ans et plus. Ces délais supplémentaires ne valent cependant que de manière supplétive, c'est-à-dire pour autant que le secteur d'activité dont relève l'employeur n'ait rien prévu de plus intéressant par rapport à l'application pure et simple des dispositions de la loi relative aux contrats de travail.
Dans la mesure où les employés ne jouissent pas actuellement d'un tel système, ils leurs incombent, dans l'hypothèse où dans le cadre de leur licenciement ils s'estimeraient victime d'un abus de droit de la part de l'employeur, d'établir une faute dans le chef de l'employeur et de démontrer un dommage particulier qui diffère de celui causé par le licenciement lui-même. La jurisprudence des cours et tribunaux se montre d'ailleurs particulièrement sévère quant à la charge de la preuve qui pèse sur eux. En termes de faute, les employés doivent aujourd'hui établir qu'en faisant usage de son pouvoir de licencier, l'employeur a manifestement dépassé les limites de l'exercice normal de ce pouvoir par un employeur prudent et diligent. Quant au dommage, ils doivent démontrer que celui-ci découle des circonstances qui ont accompagné le licenciement, comme par exemple le fait qu'à l'occasion du licenciement l'employeur a gravement nui à la réputation de l'employé, en le calomniant ouvertement devant des collèges de travail. Une fois les éléments constitutifs de l'abus de droit établis, reste encore à se prononcer sur les dommages et intérêts auxquels les employés pourraient prétendre. A défaut d'évaluation forfaitaire fixée par la loi, comme dans le cadre du régime de licenciement abusif pour les ouvriers, les décisions judiciaires procèdent généralement à une réparation équitable du préjudice, surtout lorsqu'il est impossible de déterminer le montant exacte du dommage. Etendre le régime du licenciement abusif aux employés, dans le cadre de l'harmonisation du statut ouvrier-employé, consisterait donc en une véritable révolution, puisque les employés bénéficieraient, au même titre que les ouvriers, du renversement de la charge de la preuve quant au motif exact du licenciement. Un tel revirement ne pourrait cependant résulter d'une conséquence non voulue d'une harmonisation inaboutie entre les 2 statuts. (2) A l'inverse, porter en matière de licenciement le statut des ouvriers à celui actuellement en vigueur pour les employés reviendrait à alourdir considérablement la charge qui pèse déjà sur les employeurs à cet égard. La durée du préavis à observer par l'employeur en cas de rupture du contrat de travail d'un employé est fixé par la loi à au moins 3 mois par période entamée de 5 ans de service chez le même employeur. Plus encore, dès lors que la rémunération de l'employé dépasse un certain seuil (fixé pour l'année 2010 à 30.327 €), la durée du préavis doit être fixée par convention conclue au plus tôt au moment où le congé est donné, soit par le juge, sans jamais pouvoir être inférieure au 3 mois par période de 5 ans d'ancienneté. Il va de soi que dans le cadre de cette seconde orientation, où la situation des ouvriers serait équivalente à celle des employés, les ouvriers viendraient à perdre le bénéfice du régime du licenciement abusif et de l'indemnisation forfaitaire de 6 mois qui s'ensuit. Le travailleur qui s'estimerait encore victime d'un abus de droit aurait, comme c'est actuellement le cas pour les employés, à établir la faute de son employeur et le dommage distinct qu'il aurait subi.
Par contre, on peut se poser la question de savoir si l'objectif d'une telle orientation consisterait également à étendre aux employés le régime du licenciement abusif, dont aujourd'hui seuls les ouvriers bénéficient.
A titre de comparaison, le travailleur qui est licencié alors qu'il est resté au service de son employeur pendant une durée de 16 ans, bénéficierait, sous le statut unique "ouvrier", d'un préavis de 84 jours (soit un peu moins de 3 mois), le cas échéant complété par une indemnité pour licenciement abusif de 6 mois, soit un total de près de 9 mois, et sous le statut unique "d'employé", d'un préavis d'au moins 12 mois.
La loi impose en effet à l'employeur qui licencie un ouvrier pour des motifs qui n'ont aucun lien avec son aptitude ou sa conduite ou qui ne sont pas fondés sur les nécessités du fonctionnement de l'entreprise, de l'établissement ou du service, de payer à cet ouvrier une indemnité pour licenciement abusif, correspondant à la rémunération de 6 mois. Ce régime d'indemnisation forfaitaire a vu le jour dans l'unique but de compenser la différence de traitement qui existe à l'égard des ouvriers en matière de fixation des délais de préavis. Il est particulièrement sévère dans le chef de l'employeur, car en cas de contestation, la charge de la preuve des motifs du licenciement lui incombe entièrement.
Reconnaissons, en guise de conclusion, que la tâche des négociateurs au sein du group des 10 est particulièrement ardue, eu égard aux intérêts, parfois divergeant, en cause. Face à un débat dont on pourrait croire qu'il s'enlise, on ne peut qu'applaudir l'initiative d'avoir désigné à titre d'experts Arnout De Koster et Michel Jadot. Il faut en effet s'assurer que le statut unique puisse recueillir l'assentiment de tous, tout en évitant le piège des dommages collatéraux, comme celui de voir apparaitre une extension du régime du licenciement abusif aux employés… si telle ne résulte pas d'un accord explicite entre les partenaires sociaux, ce qui au stade actuel des choses est peu vraisemblable.
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Michel Strongylos - Clémentine de Beco - Avocats - elegis-Hannequart & Rasir
Les mesures anti-crise n réponse à la crise économique, le gouvernement fédéral, en concertation avec les partenaires sociaux, a prévu différentes mesures temporaires de crise afin d’adapter le volume de l’emploi et de juguler les licenciements.
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En cas d’accord du travailleur, il bénéficiera d’une allocation versée par l’ONEM dont le montant et les modalités d'octroi sont fixées par le Roi 3.
Ces mesures devaient initialement prendre fin le 31 décembre 2009 mais ont été prolongées au 30 juin 2010. Elles peuvent être synthétisées comme suit :
3. Carte de restructuration pour les travailleurs d’entreprise en faillite
1. Adaptation temporaire de la durée du travail Cette mesure prévoit un abaissement des cotisations de sécurité sociale en cas d’instauration dans l’entreprise d’une réduction temporaire et collective de la durée du travail. Elle s’applique à l’ensemble du secteur privé ainsi qu’aux entreprises publiques autonomes. L’introduction de ce régime s’effectue moyennant la conclusion d’une convention collective de travail d’entreprise. Elle instaure la réduction des cotisations ONSS en cas de diminution du temps de travail hebdomadaire des travailleurs d’un quart ou d’un cinquième. Cette diminution correspond à un montant forfaitaire, par trimestre et par travailleur concerné, soit 600 EUR en cas de réduction de la durée du travail d'un cinquième et 750 EUR en cas de réduction de la durée du travail d'un quart. Si cette mesure s'accompagne de l'instauration temporaire de la semaine de quatre jours, les montants de la réduction de 600 et 750 EUR sont respectivement portés à 1000 et 1150 EUR. La réduction de la durée du travail implique une diminution au prorata du salaire brut. Dès lors, la convention collective de travail doit prévoir une compensation salariale qui s’élève au moins à _ du montant de la réduction forfaitaire des cotisations de sécurité sociale 1.
2. C rédit-temps de crise et la suspension de crise des employés Ces mesures sont applicables aux entreprises ressortissant essentiellement du secteur privé. Pour bénéficier de ces mesures, les entreprises doivent apporter la preuve qu’elles sont en difficulté, c’est-à-dire une diminution substantielle du chiffre d’affaires de la production ou des commandes ou un recours important au chômage temporaire pour les ouvriers. Elles doivent également être liées soit par une convention collective de travail sectorielle ou d'entreprise, soit par un plan d'entreprise. Ainsi, lorsque l’employeur remplit ces deux conditions, il peut décider : • de suspendre totalement ou partiellement l’exécution du contrat de travail de ses employés ; • d’introduire pour eux un régime de travail à temps réduit (appelé également crédit-temps de crise ou crédit-temps employé).
2.1. Suspension de crise L'employeur a le choix entre la suspension complète (pendant maximum 16 semaines) ou partielle (pendant maximum 26 semaines) de l'exécution du contrat de travail durant le premier semestre 2010. Dans ce cas, l’employeur est tenu de verser aux employés un supplément aux allocations de crise, par jour non travaillé 2.
2.2. C rédit-temps de crise (réduction individuelle et temporaire des prestations) L’entreprise en difficulté peut proposer à tout travailleur à temps plein une convention portant sur la réduction d'1/5ème ou de moitié de ses prestations pour une période de minimum 1 mois et maximum 6 mois.
Une carte de « restructuration » est octroyée aux travailleurs licenciés, au plus tard le 30 juin 2010, à la suite d’une faillite, d’une fermeture ou d’une liquidation d’entreprise. Elle a une durée de validité de 6 mois. Les travailleurs en possession de la carte, qui reprennent le travail auprès d’un nouvel employeur, bénéficient d’une diminution des cotisations personnelles de sécurité sociale de 133,33 EUR pour les employés et de 144 EUR pour les ouvriers dont la rémunération ne dépasse pas 1.956,90 EUR (pour le travailleur de moins de 30 ans) ou 4.000 EUR (pour le travailleur de plus de 30 ans). Le nouvel employeur bénéfice, quant à lui, d’une réduction forfaitaire des charges patronales de sécurité sociale à concurrence de 1.000 EUR par trimestre, durant le trimestre de l’engagement et les 4 trimestres suivants. Pour les travailleurs de moins de 45 ans cette période est suivie par une période de 16 trimestres, avec une réduction forfaitaire de 400 EUR par trimestre. Pour obtenir la réduction, le salaire trimestriel de référence du travailleur ne peut pas dépasser, au moment de l’engagement, 5.870,71 EUR s’il est âgé de moins de 30 ans et de 12.000 EUR s’il est âgé de plus de 30 ans.
4. Octroi d’une prime lors du licenciement d’un ouvrier Tout ouvrier licencié a désormais droit à une prime de 1.666 EUR, sauf en cas : • de licenciement pour motif grave ; • de licenciement pendant la période d’essai ; • de licenciement en vue de la pension ou de la prépension ; • de licenciement dans le cadre d’une restructuration si l’ouvrier peut s’inscrire dans une cellule pour l’emploi. Cette prime est prise en charge à concurrence d’un tiers par l’employeur et du solde par l’ONEM. L’employeur peut être dispensé de son paiement, moyennant certaines conditions, lorsque l’ouvrier a bénéficié, en 2010, d’une mesure de suspension du contrat de travail ou d’une mesure de réduction collective du temps de travail.
Premier bilan L’ONEM a déjà publié un rapport interne concernant l’efficacité des mesures de crédit-temps de crise et de la suspension temporaire du contrat de travail. Celui-ci indique que les moyens qui ont été effectivement accordés aux entreprises sont en-deçà des prévisions et que dès lors peu d’entreprises y ont recours. Cette frigidité des employeurs est probablement une conséquence des multiples conditions et procédures à respecter pour la mise en œuvre de ces différentes mesures. 1. L’octroi de cette compensation salariale ne peut avoir pour effet que le salaire brut du travailleur concerné soit supérieur au salaire brut qu’il percevait avant l’instauration de la mesure. 2. Ce supplément doit être au moins équivalent à celui accordé aux ouvriers du même employeur qui sont en chômage temporaire par manque de travail. S’il n’y a pas d’ouvrier occupé dans l’entreprise, ce supplément doit être au moins équivalent à celui prévu par la convention collective de travail conclue au sein de la commission paritaire dont relèverait l’employeur s’il occupait des ouvriers. En l’absence de montant fixé dans une convention collective de travail, ce supplément doit être fixé à au moins 5 EUR par jour pendant lequel il n’est pas travaillé. 3. En l’absence d’arrêté royal, les montants de l’allocation sont les suivants : • En cas de réduction d’1/5ème : 188 EUR ou 248 EUR. selon que le travailleur ait moins ou plus de 50 ans ; • En cas de réduction à mi-temps : 442 EUR.
Dossier Droit du travail / Droit Social
Antoine Rasneur - Avocat Associé - Taquet, Clesse & Van Eeckhoutte
Le contrôle par l’O.N.S.S. des frais propres à l’employeur
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epuis ce 1er avril, en cas de contestation quant au caractère réel des frais à charge de l’employeur, ce dernier doit en démontrer la réalité notamment au moyen de documents probants. En l’absence de tels éléments, l’O.N.S.S. pourra effectuer d’office une déclaration supplémentaire. Quelle est la portée juridique et pratique de cette modification légale apportée par loi-programme du 23 décembre 2009 sous le chapitre «fraude sociale» ? Contrepartie du travail effectué en exécution du contrat de travail, la rémunération est, en principe, soumise aux cotisations sociales. Les remboursements par l’employeur des frais exposés par le travailleur pour accomplir son travail, sont des frais propres : aucune cotisation n’est due. La limite entre «rémunération» et «frais professionnels» n’est pas toujours évidente : sont visés, par exemple, les frais de représentation, de bureau à domicile, de téléphone ou de documentation. La Cour de cassation a rappelé en 2002 qu’« il appartient à l’O.N.S.S., chargé de percevoir les cotisations de sécurité sociale, d’établir que lesdites sommes ne constituent pas le remboursement de tels frais ». Cette jurisprudence était suivie par les juridictions de fond. La preuve que les sommes versées par l’employeur sont en réalité de la rémunération reposait sur l’O.N.S.S. Mais la rigueur de ce principe était atténuée : l’employeur devait participer à la charge de la preuve. Dès le moment où l’O.N.S.S. avançait des forfaits de frais déraisonnables au vu des fonctions ou faisant double-emploi, l’employeur devait prouver qu’il s’agissait de frais lui incombant réellement et démontrer le mode de fixation du forfait.
La loi-programme renverse la charge de la preuve; l’employeur doit démontrer la réalité des frais et l’O.N.S.S. pourra rectifier la déclaration en l’absence d’éléments probants. En pratique, vu l’atténuation évoquée, la situation de l’employeur ne sera pas complètement modifiée: il devra toujours pouvoir démontrer, notamment à l’aide de justificatifs des frais réels exposés par son travailleur durant une certaine période, la manière de fixer le forfait et son caractère raisonnable. Une preuve souvent avancée est l’accord fiscal. Cependant, depuis la loi du 20 juillet 2005 portant des dispositions diverses, les accords fiscaux ne comportent d’engagements qu’en matière d’impôts sur les revenus. L’O.N.S.S. n’est donc pas légalement tenu de respecter ces accords portant, pourtant, sur le même sujet. Il n’en demeure pas moins que, en application des principes de sécurité juridique et de croyance légitime dans l’administration, ces accords ne peuvent être purement et simplement écartés: la jurisprudence, postérieure à cette loi, est en ce sens. La nouvelle loi programme de 2009 renverse donc la jurisprudence de la Cour de cassation et facilite le travail de l’O.N.S.S. rendu plus difficile depuis 2009 : ses créances se prescrivent depuis lors, non plus par cinq mais par trois ans. S’il convient de lutter contre la vraie fraude sociale, la nouvelle loi n’apporte pas la sécurité juridique aux employeurs souvent confrontés à des nécessités de choix légal de la voie sociale la moins imposée. A l’instar du ruling fiscal, il serait utile de réfléchir à un système mieux réglementé d’accords sociaux individualisés préalables, comme, par exemple, en matière de lutte contre les faux indépendants. Des règles fiscales et sociales similaires, tenant compte des fonctions, tendraient également vers une plus grande sécurité juridique.
L’association Taquet, Clesse & Van Eeckhoutte est un cabinet spécialisé en droit social. Elle compte également des spécialistes reconnus en droit fiscal, en droit des affaires ainsi qu’en droit de l’enseignement et en droit administratif.
TAQUET, CLESSE & VAN EECKHOUTTE OFFRE : • Une approche personnalisée: au-delà d’un conseil juridique ou d’une défense en justice, nos avocats apportent une aide à la décision fondée sur une longue expérience pratique des problèmes rencontrés par les entreprises et les personnes privées. Grâce à la maitrise et la répartition de ses compétences, l’association offre à ses clients un service personnalisé et rapide ainsi qu’une disponibilité totale pour résoudre les problèmes les plus urgents. • Une approche scientifique: association à la pointe du droit pouvant compter sur l’apport scientifique de ses membres dont plusieurs professeurs d’université ou de hautes écoles, elle intervient dans le développement de la doctrine par ses nombreux ouvrages et publications et assure la formation permanente de ses membres et clients par l’organisation de séminaires.
Composée d’une soixantaine d’avocats qui exercent leur activité à Bruxelles, Liège et Gand, cette association constitue un des premiers cabinets belges spécialisés dans le conseil et le contentieux en matière de droit du travail, droit de la sécurité sociale, droit fiscal, droit commercial et des affaires au sens large. Issue du rapprochement entre le cabinet Taquet & Van Eeckhoutte et le cabinet Clesse – Deprez – Neuprez, cette entité constitue un des acteurs juridiques majeurs dans le droit des entreprises. L’association Taquet, Clesse & Van Eeckhoutte offre un service complet, ses avocats accompagnent, conseillent et défendent leurs clients depuis les juridictions de proximité jusqu’à la Cour de cassation.
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niveau national et par les juridictions du pays. Enfin, nous entretenons des relations privilégiées avec des cabinets de niche en droit social et présents sur la scène internationale.
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Olivier d’Ursel - Valéry Vermeulen - van Cutsem Wittamer Marnef & Partners
Quel contrôle de l'employeur sur l'utilisation du courrier électronique et l'usage du web par le travailleur ? Principes généraux et règles particulières : En ce qui concerne les principes généraux applicables en la matière, rappelons que ce sont les articles 8 de la Convention européenne des Droits de l'Homme (CEDH) et 22 de la Constitution belge qui assurent tous deux le respect de la vie privée (et familiale). Ce principe n’est toutefois pas absolu. Il est tempéré par des exceptions permettant de l’écarter face à d’autres valeurs considérées comme plus essentielles pour autant que le recours à l’exception soit nécessaire à l’effet de les sauvegarder. La doctrine retient donc deux exigences indispensables pour qu’une atteinte à la vie privée soit admise : une exigence de finalité et une exigence de proportionnalité. Ce principe s’applique également aux relations de travail. Selon la Cour de cassation, « L’espace professionnel fait également l’objet de la protection garantie par les articles 8 de la CEDH et 15 (22) de la Constitution dans la mesure où les activités qui y sont développées revêtent un caractère privé et où la correspondance confidentielle y est préservée. »
Cette CCT a pour but d'assurer la sécurité juridique et de garantir le respect de la vie privée sur le lieu de travail. Afin de réaliser au mieux cet objectif, certains principes de base doivent être respectés:
Principe de finalité L'employeur peut exercer un contrôle des données des communications électroniques, lorsqu'il poursuit l’une des finalités suivantes : • prévenir des faits illicites, contraires aux bonnes mœurs ou portant atteinte à la dignité d'autrui • protéger les intérêts économiques, commerciaux et financiers de l'entreprise • assurer la sécurité et le fonctionnement technique de l'ensemble des systèmes informatiques • respecter la bonne foi des principes et des règles d'utilisation des technologies en réseau fixés dans l'entreprise. Dans ce dernier cas, l'employeur doit respecter une procédure dite de sonnette d'alarme visant à informer les travailleurs d'une anomalie et d'une individualisation en cas de "récidive".
Principe de proportionnalité
D’autres règles plus spécifiques viennent également compléter le tableau juridique : entre autre, citons la loi du 21 mars 1991 qui prohibe la prise de connaissance du contenu des communications sauf accord préalable de toutes les parties concernées et l'article 314 bis du Code pénal qui consacre le secret de la correspondance et qui érige en infraction toute violation de ce principe.
Le contrôle doit revêtir un caractère adéquat, pertinent et non excessif par rapport aux finalités poursuivies. Au regard de ce principe de proportionnalité, il paraît indispensable de procéder par étape : identification de l’anomalie dans un premier temps (via une collecte de données globales à l’entreprise) et identification de l’auteur dans un second temps.
Jurisprudence :
Principe de transparence
Les litiges relatifs au licenciement d'un travailleur en raison de l'utilisation abusive des moyens de communication électronique (web et mail) foisonnent.
La convention prévoit les procédures d'information et de consultation des travailleurs lors de l'installation du système de contrôle. L'employeur qui souhaite installer un système de contrôle des données de communication électroniques en réseau doit en avertir le conseil d'entreprise, à défaut le comité pour la prévention et la protection au travail, à défaut la délégation syndicale ou, enfin, à défaut les travailleurs.
Les décisions donnent raison tantôt à l'employeur, tantôt au travailleur selon qu'elles accordent la primauté à la protection de la vie privée ou à la nécessité de lutter contre les abus, ce qui ne permet pas d’assurer la sécurité juridique en la matière. La Cour du travail de Liège a récemment considéré que « lorsque le travailleur se trouve sur son lieu de travail, il ne peut en principe se prévaloir du droit au respect de la vie privée. Celle-ci tend à garantir la personne et son cadre familial contre toute ingérence d’un tiers ; elle ne constitue pas un sauf-conduit qui permettrait à un salarié de faire obstacle au droit qu’a son employeur de contrôler son emploi du temps et la manière dont il exécute son contrat de travail. » Suivant cette même décision, il faut opérer la distinction entre ce qui ressort du strict domaine de la vie privée sur le lieu de travail, qui est protégé et ce qui est ou devrait être du ressort de l’activité professionnelle, qui ne l’est pas. Ainsi, suivant cette Cour, l’employeur serait en principe en droit de contrôler le courrier entrant (sauf adressé en nom personnel à l’employé) et sortant (aux frais de l’entreprise) parce qu’il revêt un caractère professionnel.
La Convention collective de travail n°81 du 26/04/2002
Les organismes représentatifs des travailleurs et des employeurs ont signé le 26 avril 2002 une convention collective de travail (CCT) n°81 relative à la protection de la vie privée des travailleurs à l'égard du contrôle des données de communication électroniques en réseau.
En outre, l'employeur devra également avertir par tout moyen approprié les travailleurs concernés de l'existence de ce contrôle. Cette information individuelle doit porter sur l'utilisation de l'outil mis à disposition, les droits et obligations des travailleurs, les interdictions éventuelles, les sanctions prévues en cas de manquement. Modalités d'individualisation des données de communication électroniques en réseau Par individualisation des données de communication électroniques en réseau, on vise l'opération qui consiste à traiter les données de communication électronique en réseau collectées lors d'un contrôle afin de les attribuer à un travailleur particulier. Une fois que cette individualisation aura eu lieu, le travailleur aura un entretien avec l'employeur. Cet entretien lui permettra de se justifier avant que toute décision le concernant ne soit prise et ceci dans le but d'éviter d'éventuels malentendus. Récemment, la Cour du Travail d'Anvers a donné raison à un employeur qui avait licencié un employé pour motif grave pour avoir abusé d’Internet. A l'occasion d’un contrôle du trafic Internet du PC suspect, il est apparu que l'employé avait surfé sur Internet exclusivement pour des affaires privées et envoyé des courriels personnels. On le voit, si cette CCT ne règle pas tous les problèmes liés à la protection de la vie privée des travailleurs, elle a le mérite de poser les grands principes applicables quant à l'utilisation du mail et du Web sur le lieu de travail.
n ANVERS n BRUXELLES n EUPEN n LIEGE n NAMUR
Avocats - Advocaten - Rechtsanwälte - Lawyers
Notre département de droit social (relations de travail, sécurité sociale et droit pénal social) offre aux entreprises, aux administrations et aux particuliers un service complet comprenant notamment : • l’assistance et les conseils circonstanciés relatifs à l’engagement de travailleurs (rédaction de contrats de travail, optimalisation des éléments rémunératoires…), à l’exécution et l’organisation du travail (élaboration ou modification du règlement de travail, régimes de travail, horaires, travail à temps partiel et réductions d’activité tels que créditstemps, prépensions, problématique du harcèlement, ou toute autre situation conflictuelle), et à la rupture des contrats (licenciement, rupture conventionnelle,…) • la gestion des conflits collectifs du travail : négociation avec les organisations syndicales, rédaction de conventions collectives de travail, intervention à l’occasion de licenciements collectifs, fermetures d’entreprise, restructurations, transferts de personnel,… • la consultance en matière de sécurité sociale, essentiellement dans les différends contre l’ONSS : questions portant sur la rémunération soumise ou non à cotisations, statut des travailleurs indépendants et des dirigeants d’entreprise, problématique de la fausse indépendance,… • l’assistance et le suivi à l’occasion d’un contrôle social, les contacts et les démarches auprès des autorités • la représentation en justice devant les juridictions sociales et pénales pour toute affaire contentieuse, lorsque les négociations amiables ne permettent pas d’éviter le conflit.
Notre équipe est composée d’avocats spécialisés, jouissant d’une expérience et d’une compétence reconnue dans leur domaine d’activité. Leur disponibilité fait partie intégrante de la qualité du service rendu, surtout dans les situations urgentes. Notre premier objectif est de permettre à nos clients de toujours bénéficier d’une solution optimale à leur problème, tant sur le plan budgétaire que humain, dans un contexte juridique où les contraintes sont nombreuses.
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Dossier Droit du travail / Droit Social
bibliothèque LARCIER : Droit pénal de l'entreprise Charles-Eric Clesse, François Lagasse Droit pénal de l'entreprise est une nouvelle revue de droit pénal répondant aux spécificités de l’entreprise ! Y sont entre autres trimestriellement abordés via de la législation, des actualités, de la jurisprudence et de la doctrine : le droit pénal social, le droit pénal financier, les infractions fiscales et comptables, le droit pénal commercial et les normes environnementales propres, etc. En résumé, toutes les normes pénales auxquelles sont confrontées les entreprises.
LARCIER : Le harcèlement - Gerassimos Zorbas Cet ouvrage traite du harcèlement (moral et sexuel) dans son intégralité en droits français, luxembourgeois et belge, sans oublier la fonction publique européenne. Un index performant vient le parfaire.
Droit pénal de l'entreprise • la seule et unique revue de droit pénal de l'entreprise; • la pertinence des sujets; • la publication des dernières décisions de jurisprudence importantes; • des sujets d’actualités abordés sous un regard pratique; • une veille législative et réglementaire.
Anthemis – Groupe S : Les rémunérations alternatives / Comment doper (le salaire de) vos travailleurs ? La problématique de la rémunération occupe une place centrale dans les relations entre employeur et travailleur. Aujourd’hui, les entreprises ne se limitent plus au paiement du salaire de base et proposent généralement un « package » composé d’une série d’avantages extralégaux. Sous la pression fiscale et parafiscale particulièrement élevée, l’employeur tente ainsi d’échapper à l’obligation de cotisation et d’imposition sur les rémunérations et indemnités par toutes les voies (légales) possibles. L’imagination est au pouvoir dans ce domaine, elle a fait naître de nombreuses formes alternatives de rémunération. De la sacrosainte voiture de société au nouveau système de bonus, ces avantages contribuent en outre à fidéliser le travailleur qui en bénéficie. La question qui se pose est de déterminer si tel ou tel avantage alternatif constitue ou non de la rémunération imposable et/ou passible des cotisations de sécurité sociale. Le présent ouvrage brosse de façon concrète un panorama des avantages les plus fréquents. Pour chaque avantage, le régime social et fiscal est abordé tant pour le travailleur que pour l’employeur. Quand cela est nécessaire, les aspects de droit du travail sont également analysés.
Cette édition 2010 intègre : • la nouvelle législation fiscale concernant les voitures de société ; • le nouveau système d’éco-chèques ; • la mise à jour des montants ; • plusieurs précisions et/ou interprétations nouvelles. Destinés aux responsables RH, aux directeurs administratifs et financiers, aux chefs d’entreprises et à leurs conseillers : avocats, fiscalistes, experts comptables, cet ouvrage pratique contient de nombreux exemples, des modèles de conventions utiles et des tableaux comparatifs éclairants. En complément de l’ouvrage, les différents modèles sont proposés à la vente. Ils peuvent être téléchargés sur le site www.anthemis.be.
BRUYLANT : Droit du travail ou droit de la concurrence sociale ? Marc RIGAUX Marc Rigaux est professeur ordinaire à la faculté de droit de l’Université d’Anvers, où il enseigne le droit du travail et dirige le groupe de recherche en droit social. Depuis 2002 il est assesseur à la Section de la législation du Conseil d’État. Ses publications se situent essentiellement dans les domaines du droit des relations collectives du travail et de la théorie du droit du travail. Dans le présent essai l’auteur s’interroge sur le devenir du droit du travail, qu’il perçoit comme une correction sociale marginale au marché libre du travail et à la concurrence sociale. Certains phénomènes laissent supposer qu’on assiste à une mutation et à une évolution d’un droit du travail protecteur vers un droit de la concurrence sociale responsabilisant. L’inégalité économique entre le travailleur et son employeur constitue de moins en moins un facteur d’importance dans la conception du nouveau droit du travail. Le travailleur, censé être devenu autonome, décide librement et consciemment de ses actes et en est pleinement responsable. La concurrence sociale, autrefois désignée comme source d’exploitation et d’exclusion sociales, est perçue comme bénéfique pour la qualité du travail. Le législateur n’est plus appelé à corriger la compétition entre les travailleurs ; il doit seulement l’accompagner et en sanctionner les abus manifestes. L’internationalisation et l’européanisation du marché du travail ont profondément modifié les rapports de force entre le travail et le capital. Les législateurs du travail nationaux n’arrivent plus à contrôler et à gérer convenablement le marché du travail et la concurrence sociale qu’il génère. Le droit de la dignité de l’Homme au travail semble (re)mis en cause. En se penchant sur les causes structurelles de cette évolution, l’auteur propose en toute modestie quelques démarches juridiques et institutionnelles, destinées à sauvegarder l’essentiel du droit de la protection des travailleurs. L’ouvrage est conçu comme un libre propos. Bien que l’analyse de l’auteur parte d’une réalité juridique belge, ses réflexions et conclusions paraissent facilement transposables vers d’autres systèmes juridiques européens. Le fait que toute sa démarche se situe sur le plan plus abstrait des principes, n’y est sans doute pas étranger…
Dossier Droit du travail / Droit Social
Véronique Pertry - Leen Cornil - Eubelius
Le nouveau Code Pénal Social est presque arrivé.
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ébut mai, le Sénat devrait en principe voter le nouveau Code Pénal Social. Le nouveau Code devrait jouer un rôle clé dans un droit social efficace et moderne. Le nouveau Code aura des conséquences pour tous les employeurs, les employés et les assurés sociaux. Me Véronique Pertry, avocate et professeur à l’UA et Me Leen Cornil, avocate, toutes deux associées chez Eubelius, ont suivi de près la genèse du nouveau Code et ont déjà examiné ce mastodonte de plus de 300 articles pour vous.
Quels sont maintenant les objectifs de la réforme qui trouve ses racines dans le nouveau Code Pénal Social?
« En 1986, je suivais en tant que jeune juriste, le cours Droit pénal social de la Licence Spéciale en Droit Social à l’ULB », se rappelle Me Pertry. « Le professeur traitait à l’époque de manière étendue du projet du nouveau Code Pénal Social dont il espérait qu’il deviendrait rapidement une loi. Apparemment, il était trop optimiste…». Il semble que le projet de “Code de Droit Pénal social”, qui depuis 2001 avec la création de la Commission de réforme du droit pénal social a été remis sur les rails, soit sur le point d’aboutir finalement à une vraie loi. A tout le moins, le projet de loi introduisant le Code Pénal Social a été adopté par la Chambre le 3 décembre 2009 et devrait, après évocation par le Sénat, normalement être adopté par ce dernier début mai 2010. Le droit social, à savoir conjointement le droit du travail et le droit de la sécurité sociale, devrait alors disposer d’un Code Pénal Social à part entière.
• l’inscription des infractions et des sanctions dans un schéma répressif cohérent avec la création de quatre échelons de gravité avec quatre niveaux de sanctions (au lieu de 16 niveaux de sanctions de peines d’emprisonnement et 40 niveaux d’amendes actuellement !). De plus, en cas de violation de niveau 3 et 4, le juge peut également imposer temporairement une interdiction d’exploiter, une interdiction professionnelle ou la fermeture de l’entreprise,
Le droit social a-t-il tant besoin de la mise en œuvre du droit pénal social qu’un code spécifique a dû être établi ?
Toutes les infractions des législations sociales sont-elles vraiment énumérées dans le nouveau Code Pénal Social?
« Ce n’est pas maintenant, avec l’apparition du nouveau Code Pénal Social, que le droit pénal social surgit, que du contraire”, précise Me Cornil. “Le droit social, apparu dans les années 1880, a connu une croissance exponentielle, surtout après la deuxième guerre mondiale. La plupart des législations sociales d’aujourd’hui contiennent déjà des dispositions pénales qui la plupart du temps se trouvent à la fin des lois y relatives." De ce fait, le droit social pénal est aujourd’hui particulièrement désordonné, dispersé et manque énormément de cohérence. De plus, les dispositions pénales sont bien souvent formulées de manière lapidaire. Ainsi, “les contraventions aux dispositions ou à certaines des dispositions qu’une certaine loi édite sont punies, sans spécifier ni le comportement ni l’omission sanctionné”. Souvent, la loi incrimine aussi par la même phrase tous les manquements aux arrêtés d’exécution, encore à prendre. "Une telle approche, qui a certes l’avantage de faciliter considérablement le travail du législateur, perd de vue, comme l’a rappelé la Cour Constitutionnelle, que le principe de légalité des incriminations exige que les comportements incriminés soient clairement déterminés », précise Me Pertry.
C’était en tout cas le but. Le Code Pénal Social contient donc environ 120 articles qui réécrivent chaque incrimination. Simultanément, les incriminations dans les législations sociales existantes sont supprimées. Cet exercice n’a jusqu’à présent pas été étendu aux infractions aux CCT rendues obligatoires. C’est dommage parce que les textes des CCT manquent souvent, justement à cause de leur caractère de compromis, de précision et de clarté juridique, ce qui se révèle difficilement conciliable avec la sanction (pénale) de leur violation. De même en ce qui concerne le bien-être au travail, la plus grande partie du travail de réécriture des incriminations doit encore avoir lieu.
En plus, sur le plan de la forme, le droit pénal social actuel ne constitue pas un ensemble coordonné; ses multiples dispositions sont dispersées dans chacune des lois qu’elles sanctionnent. Le droit pénal social actuel manque également de cohérence et de proportionnalité. « Des manquements de même importance ne sont pas punis par des peines identiques, mais par contre des manquements d’importances variables sont punis d’une peine identique » critique Me Cornil. Les sanctions possibles sont caractérisées par un manque de diversité. De telles défaillances mènent à une certaine inefficacité du droit pénal social conduisant au non-respect du prescrit du droit social et rendant sa réforme nécessaire. Déjà en 2006, deux étapes importantes se sont produites dans la réforme du droit pénal social avec deux lois datant du 3 décembre 2006 qui ont modifié certaines dispositions de droit pénal social d’ordre procédural. La plus grande partie de la réforme se trouve à présent sur la table du Sénat.
Les objectifs sont nombreux et certes ambitieux. Me Cornil énumère les plus importants : • la codification de la matière, ce qui a pour but de lui donner une harmonie, • la diversification et le renforcement des actions préventives, • l’amélioration du respect des droits fondamentaux, notamment le droit de la défense et la légalité des incriminations,
• la généralisation du système d’amendes administrative dans toutes les matières, • la dépénalisation des infractions les moins graves et l’élimination de la peine d’emprisonnement dans tous les cas sauf pour les infractions les plus graves, • l’adaptation des pouvoirs de l’inspection du travail aux besoins d’une meilleure prévention et d’une politique moderne de recherche.
« Indubitablement, il y aura surement l’une ou l’autre incrimination qui sera oubliée. Les incriminations reprises dans le Loi sur les Pensions Complémentaires du 28 avril 2003 sont déjà introuvables dans le nouveau code. En outre, beaucoup dépendra de la discipline du législateur dans le futur. » ajoute Me Pertry. Il ne faut pas non plus perdre de vue qu’il s’agit ici d’un Code Pénal Social fédéral. Les infractions aux décrets et ordonnances dans le domaine du droit social régionalisé n’y sont pas reprises, par exemple dans la matière régionalisée du placement des travailleurs. A partir de quand le nouveau Code Pénal Social entrera-t-il en vigueur ? Il appartient au roi de le déterminer, au plus tard un an après la publication de la loi. Me Pertry conclut : « Dans tous les cas la pénétration réelle du nouveau codex dans le fonctionnement quotidien des employeurs, travailleurs, assurés sociaux et praticiens du droit social demandera beaucoup plus de temps, notamment de par l’ampleur de la modification. Jusqu’à aujourd’hui, la sanction se trouve à la fin de la loi sociale. Dans le futur, seule une référence générale au Code Pénal Social (sans numéro d’article !) sera reprise. On peut donc s’attendre à ce que le praticien passe, certainement au début, pas mal de temps à « éplucher » le nouveau code. Heureusement qu’il existe de nos jours des outils de recherche électronique !»
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