Aymeric et Colombe de VACHON (et Aubin, Cyprien & Arnaud)
91 boulevard Auguste Blanqui 75013 Paris - France Tél.: +33 (0)1 58 10 74 80 Courriel : contact@fidesco.fr www.fidesco-international.org blog.fidesco.fr
Développeur de programme Coordinateur de programme LP4Y: Life Project 4 Youth Hear Us Program Iligan City – Philippines
Adresse postale : c/o Congregation of the Holy Spirit (Spiritans) Lugait 9025 Misamis Oriental Philippines
Date : novembre 2013 Courriel : cdevachon@yahoo.fr Skype : aymeric.devachon
En mission aux Philippines
Rapport de mission n°7
Dans la prison
Visite de famille
En formation, Aymeric signe
En mission aux Philippines
EDITO
Chers parrains, chère famille, chers amis, Nous sommes revenus en France depuis un mois maintenant et nous sommes heureux de vous donner des nouvelles des quatre derniers mois que nous avons passés dans notre mission aux Philippines. Nous avons été bien occupés par l’intégration de nouveaux jeunes sourds qui ont démarré le programme et demandent alors une attention toute particulière les premiers mois. Nous avons aussi continué à accompagner l’intégration en entreprise de plusieurs seniors. Le programme prison se poursuit bien et nous avons pu aider plusieurs jeunes sortis de la prison. Cette période s’est terminée par le passage de relais avec Dave et Chelsea, le couple de volontaires FIDESCO américain qui nous remplace. Confiant dans la poursuite de la mission par la nouvelle équipe, nous avons quitté Iligan fin septembre, la tête pleine de beaux souvenirs et de riches relations créées.
Petit rappel de notre mission pour resituer ce rapport : Nous sommes partis en octobre 2011 pour 2 ans aux Philippines sur l’île de Mindanao à Iligan. Notre mission est de gérer un centre de formation professionnel pour jeunes sourds créé par LP4Y (Life project 4 Youth qui œuvre à l’intégration de jeunes exclus). Nous sommes en lien localement avec la communauté des Pères Spiritains. Nous avons aussi démarré depuis février 2013, un programme pilote pour des jeunes dans la prison d’Iligan. LE PROGRAMME HEAR US
Elles révisent en même temps que Almer, jeune sorti de prison, dans la Hear Us House. C’est un grand challenge pour elles car l’examen est en Filipino, leur 3ème langue après la langue des signes et l’anglais. On attend avec impatience leurs résultats !
Le programme « Hear Us » pour les jeunes sourds Depuis Avril, de nombreux jeunes ont quitté le programme pour un nouveau travail ou un autre projet et nous avons pu accueillir de nouveaux jeunes sourds. C’est l’occasion de rendre visite à de nouvelles familles, de découvrir de nouvelles histoires d’exclusion plus ou moins criantes (cf. encadré portraits de nouveaux jeunes page suivante).
Accompagnement en entreprises L’accompagnement en phase de démarrage est très importante et nous visitons le lieu de travail régulièrement les premières semaines et premiers mois. Ces derniers mois, nous suivions 11 jeunes sourds en situation professionnelle. Nous abordons avec les jeunes leur activité professionnelle et leur prise d’autonomie : comment se passe la relation avec ton patron, avec tes collègues, comment peux-tu améliorer la bonne compréhension des instructions, ton petit business ne tourne pas suffisamment comment peux-tu le faire rebondir, réussis-tu
Admission parallèle pour le diplôme de High School (niveau baccalauréat) Un jour par semaine les jeunes suivent des cours pour passer en admission parallèle le diplôme de High School. Julie-Anne et Joanna sont très fières d’avoir réussi en mai le concours qualificatif et révisent studieusement pour leur examen en octobre.
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LE PROGRAMME HEAR US
à dépenser ton salaire raisonnablement et à mettre un peu de coté… ? Nous les soutenons aussi dans les moments plus durs : moqueries de collègues, salaire trop faible, découragements, rythme de travail trop soutenu ou au contraire insuffisant (donc salaire insuffisant), ponctualité. C’est un moment que nous trouvons passionnant car c’est un moment très « business », très professionnel de notre mission et nous voyons également les jeunes se transformer de semaines en semaines sous l’effet de leurs nouvelles responsabilités et de la confiance donnée par leurs patrons. Nous sommes coach et aussi le grand frère-la grande sœur qui accompagnons le jeune. C’est un moment très attachant pour nous et aussi pour le jeune envers nous. Nous rencontrons aussi quelques crises d’indépendance des ces jeunes : les joies et challenges de suivre des ado ou de jeunes adultes : passionnant !
Avec Jay-Ar, pour postuler dans une imprimerie
Avec Argelyn, première journée dans les cuisines d’un restaurant
Mary-Jane et Rafael
Portrait de 3 nouveaux jeunes Rafael, 18 ans, habite a la campagne et n’a été scolarisé que 3 ans entre 9 et 12 ans. Sa famille ne le soutient pas vraiment. Son papa est ivre même en journée et lui vole son argent la nuit ; sa maman n’a jamais fait l’effort de le renvoyer à l’école : à quoi bon envoyer son enfant sourd à l’école, il ne sera pas capable de travailler et de nourrir la famille en retour… Il est d’une vive intelligence et en 2 mois a appris énormément. Il est d’une sensibilité à fleur de peau (exacerbée par son incapacité à s’exprimer par manque de mots) et serait capable de tout laisser tomber pour une bouderie. Nous avons passé beaucoup de temps à discuter avec lui et à travailler avec lui la persévérance et la motivation. Mary-Jane, 19 ans, était aussi sortie du système scolaire depuis 6 ans. 2ème de 10 enfants, elle aide beaucoup pour les tâches ménagères et fait la lessive pour le voisinage ce qui rapporte au peu d’argent à la maison. Nous avons vu cette jeune fille s’épanouir en 3 mois de manière incroyable, notamment dans la vie du foyer. Quand elle est arrivée, son visage était fermé et dur. Elle est maintenant beaucoup plus douce avec sa famille, sourit chaleureusement chaque matin lors de la traditionnelle poignée de main avant de démarrer les trainings. Marjorie a 25 ans. Elle a un mari, sourd comme elle, et une fille (entendante) de 2 ans. Elle était rayonnante et vraiment heureuse de démarrer Hear Us. Malheureusement, elle a arrêté du jour au lendemain car son mari préférait qu’elle reste à la maison plutôt que d’étudier.
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Marjorie et Menchu
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LE PROGRAMME HEAR US
L’activité de saisie informatique
Expérience : Business training via Skype
Nous devons former les nouveaux jeunes et les initier aux pratiques de base pour cette activité. Dès que le processus est routinier, ils apprennent vite et s’enseignent les uns les autres. C’est positif. On cherche toujours à épaissir notre carnet de commandes et nous avons deux pistes principales.
Jean-Patrick, le dirigeant de Clicking Labs a proposé de donner des cours de business aux jeunes de Hear Us, en utilisant uniquement la messagerie Skype. Ambitieux challenge ! Imaginez une quinzaine de jeunes, avec chacun un ordinateur, en train de participer à une formation interactive à distance. Pas évident quand on connait leur niveau d’anglais lu ou écrit… Il a fallu cadrer un peu les règles de communication pour éviter l’avalanche de messages plus ou moins à propos (ex : « love so much the deaf JP thanks forever » alors que Jean-Patrick demandait ce qu’ils avaient retenu du précédent training !). Quelques moments de flottement mais l’expérience valait la peine d’être tentée. Il a fallu aussi débriefer pour vérifier que le sujet avait été compris car le thème était, en toute simplicité : le « lean start-up ». Vous connaissez, vous ?
La première piste est à travers un partenariat avec une entreprise basée à Cebu : Clicking Labs, une start-up d’une cinquantaine de personnes offrant des services de marketing sur internet. Ils ont connu LP4Y par le centre de Cebu et, en août, nous avons eu la chance d’avoir la visite de Jean-Patrick BISSON, le dirigeant canadien. Les jeunes ont présenté leurs compétences. Jean-Patrick a été bien intéressé et il a eu un très bon contact avec les jeunes. Il a l’idée de demander aux jeunes de saisir des offres d’emploi car il souhaite lancer des sites d’offres d’emploi par ville. Dave qui a prévu d’aller à Cebu pour le projet de la prison compte bien aller le voir pour concrétiser le projet.
Stars club (groupe d’anciens) Les jeunes sortis du programme sont appelées « Star », ces étoiles qui éclairent le chemin, font rêver et montrent que cela est possible. Ils entretiennent leurs liens d’amitié et partagent leurs expériences professionnelles. Nous somme heureux de voir la Hear Us House comme un vrai lieu de rassemblement et d’accueil des personnes sourdes d’Iligan qu’ils aient fait partie ou non du programme. Ils étaient près de 30 la dernière séance. Quel bonheur de les voir ainsi chez eux.
Accueil d’un prospect dans la Hear us House
Une autre piste serait de trouver des missions de saisie informatique en ligne. C’est une activité importante aux Philippines. Les témoins de Jehovah à Iligan ont réussi à faire faire certaines prestations par des jeunes sourds alors on voudrait essayer aussi avec les jeunes de Hear Us. De gauche à droite : Angelie, Christel, Dave, Chelsea, Racquel, Norman, Julie-Anne, Adonis, Faustino, Colombe, CJ, Aymeric et Richie Rapport de mission 7 – novembre 2013
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LE PROGRAMME HEAR US
House. Elle était un peu stressée de ne pas travailler assez d’heures chez Jollibee en cuisine. Suite à notre entrevue avec la directrice, elle travaille maintenant 6 jours par semaine. Elle est épuisée mais ravie. Elle est très reconnaissante de son passage chez Hear Us et de nos aides et conseils. Avec notre départ, elle perd un peu une grande sœur et un grand frère.
Initiative KI KI est une organisation locale qui promeut le volontariat au sein de la communauté musulmane, ce qui permet de construire une entraide, une connaissance et une estime réciproque entre chrétiens et musulmans et ainsi promouvoir la paix à Mindanao. En août, nous avons eu la joie d’accueillir deux jeunes volontaires musulmanes pour deux jours d’immersion dans la communauté sourde. Elles ont été ensuite envoyées pour un an à Cebu pour une organisation qui agit pour la protection des enfants sourds contre les abus sexuels (1 enfant sourd sur 3 est victime d’abus sexuels). Leur expérience permettra aussi peut-être de créer des initiatives à Marawi (ville musulmane voisine d’Iligan), où aucune structure éducative n’existe pour les sourds. Nous avons été très heureux de participer à ce partenariat.
Norman est méconnaissable. Il était si stressé 3 ans plus tôt, portant avec difficulté le poids de son enfance martyrisée et méprisée. Il est maintenant épanoui et équilibré dans son rythme de vie, à l’aise et dirigeant sa vie d’une main de maître. Honey qui avait ramassé les premiers légumes du jardin potager en 2012, a soudainement quitté le programme et sa famille ne souhaite pas qu’elle y retourne. Apres une tentative ratée de retour à l’école élémentaire (à 19 ans son niveau scolaire est le CE2 par manque de scolarisation), elle travaille maintenant comme aide et serveuse dans la petite cantine de sa cousine à la campagne. Ses amis sourds lui manquent. Nino et Gelyn, les parents des jumeaux nés en octobre 2012, sont partis du programme en juin pour aider la grand-mère de Nino et aimeraient être accompagnés pour lancer un café internet. Le couple reste toujours très bancal, Nino étant très fier et s’occupant peu de son couple et de ses enfants. Il a malgré tout un grand potentiel et nous prions fort pour qu’il décide d’orienter son énergie et sa rapidité d’esprit vers quelque chose de bon et durable.
Quelques nouvelles des jeunes dont nous vous avions parlé dans nos précédents rapports de mission Julie-Anne fait toujours un formidable travail dans l’équipe de comptabilité de Jollibee. Pour la première fois cette année l’inventaire a été clôturé à temps grâce à son travail. Son CDD est prolongé de 6 mois. Elle fait la fierté de sa famille.
Nino et Gelyn et leurs petits jumeaux
Angelie est notre dame au grand cœur et une super guide pour les plus jeunes. Elle est Capitaine de la communauté dans la Hear Us
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En mission aux Philippines
LE PROGRAMME PRISON
La dernière semaine avant notre départ, les jeunes sourds de Hear Us sont venus avec nous en prison. Ils étaient intéressés de découvrir cet univers qui les intrigue d’autant plus qu’ils sont devenus de bons amis d’Almer. La rencontre a été très réussie. Chaque jeune s’est présenté. Ils ont partagé leurs difficultés et leurs joies. Intéressant d’entendre les jeunes de la prison nous glisser à l’oreille : quelle vie difficile d’être sourd ! Et, quelques minutes plus tard, des jeunes sourds nous dire : que ce doit être difficile d’être en prison ! Les deux sont vrais ; quant à ce qui est le plus difficile, c’est une question de perspective…
Le programme avec les jeunes détenus de la prison d’Iligan Le programme dans la prison d’Iligan se poursuit bien. Les jeunes détenus montrent toujours un grand intérêt à suivre les trainings. Certains de nos partenaires étaient sceptiques sur la capacité des jeunes à suivre les trainings en anglais. C’est parfois un challenge mais, au bout du compte, ils apprécient de pratiquer l’anglais et s'améliorent à l’oral pour leur plus grande fierté ! Les jeunes sont aussi reconnaissants de pouvoir penser à leur futur après la prison. Les occasions sont rares pour eux de se projeter au-delà de l’enceinte de la prison. Et pourtant, c’est si important pour eux ! L’histoire de Mai-Mai (cf. plus bas) l’illustre malheureusement bien. Jusqu’à maintenant, nous avons continué sur le rythme de 2 matinées par semaine mais les jeunes ont hâte de pouvoir développer une activité économique comme dans les autres centres LP4Y. Ce sera une activité de confection de bijoux qu’ils vont démarrer rapidement avec Dave.
Les jeunes de Hear Us et les jeunes de la prison (en jaune)
Histoires de sorties de prison Mai-Mai a 24 ans. Elle a un enfant qu’elle ne peut plus voir car il est gardé par la famille de son ex-mari. La famille de Mai-Mai n’est pas d’Iligan et n’a plus de lien avec elle depuis ses 16 ans. Mai-Mai a été libérée début août et s’est retrouvée seule à devoir reprendre sa vie en main. Difficile challenge. Seule aux Philippines, elle s’est donc retrouvée en situation d’extrême vulnérabilité. Et elle est retombée dans ses vieux démons : 1 semaine après être sortie de prison, elle se retrouve à nouveau en prison pour vol. Nous espérons que Mai-Mai reprendra les trainings avec LP4Y et travaillera réellement sur son projet de vie car, sans projet précis et sans famille, le risque d’échec est très élevé. Almer a 23 ans. Si vous vous rappelez notre précédent rapport, c’est celui qui dessinait les membres de sa famille comme des oiseaux et qui se dessinait lui-même en cage. Après 3 ans en prison, la cage s’est ouverte et il a finalement été libéré début septembre. Lorsqu’il était en prison, il avait passé le pré-examen pour pouvoir avoir le niveau high-school (l’équivalent du baccalauréat) en candidat libre. Il est venu nous voir dès le lendemain de sa sortie de prison. Nous l’avons aidé à bâtir les prochaines étapes de son projet de vie qui commence par passer son diplôme. Il vient donc chaque jour dans la Hear Us House pour réviser. Almer nous impressionne par sa motivation et son sérieux. La cohabitation avec les jeunes sourds de Hear Us se passe très bien. Il a encore un long chemin de reconstruction mais nous sommes confiants en son avenir. Rapport de mission 7 – novembre 2013
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Avec Dave, nous visitons la famille d’Almer
En mission aux Philippines
LA VIE A ILIGAN
semaines n’étaient pas de trop pour rencontrer les partenaires pédagogiques, visiter les entreprises dans lesquelles certains jeunes travaillent, présenter nos amis, laisser le temps aux jeunes de créer du lien, apprendre une nouvelle langue, visiter les familles, connaître la ville,… Période intense et bien occupée mais qui nous a permis de réaliser aussi les liens créés, le chemin parcouru en deux ans et la communauté construite autour du Hear Us Program.
La vie à Iligan Anniversaire de mariage Nous avons eu la joie de célébrer nos 10 ans de mariage à Iligan avec nos amis chez les Spiritains, dans la belle montagne de Pindugangan. Cela a été une belle fête préparée avec attention avec Jay le volontaire DCC qui travaille pour les pères Spiritains. Nous avons renouvelé nos vœux de mariage, pratique assez habituelle aux Philippines.
La nouvelle équipe : Dave, Christel Hazel et Chelsea
Dave sera responsable du programme de la prison et de l’activité de saisie informatique ; Chelsea sera responsable du programme Hear Us et du foyer de la Hear Us House. Ils auront l’appui de Christel Hazel, jeune volontaire philippine qui donnait des coups de main depuis 1 an pour le programme Hear Us, et qui a intégré officiellement l’équipe de volontaires LP4Y depuis juillet dernier. Elle continue ses études à l’université en éducation pour enfants à particularités et, lorsqu’elle n’a pas cours, elle aide pour les trainings avec les jeunes de Hear Us. Nous lui avons aussi demandé de jouer un rôle dans la vie de la maison et pour cela, de dormir du lundi au vendredi dans la Hear Us House. Elle est très positive et pleine d’entrain. Elle a assisté au dernier séminaire des volontaires LP4Y près de Manille et les échanges étaient très intéressants car elle apportait son point de vue philippin. L’appui de Christel Hazel va être déterminant dans la période de démarrage de Dave et Chelsea car elle est à l’aise en langue des signes.
Nous étions entourés d’une trentaine de jeunes sourds et d’environ autant d’amis entendant. Un beau moment de partage et de convivialité ! Certainement, un anniversaire de mariage atypique dont nous nous souviendrons. La semaine suivante, nous sommes partis quelques jours en amoureux dans la province de Bukidnon pour découvrir une région magnifique entourés de champs d’ananas ! Accueil de Dave et Chelsea et mise en place de la nouvelle équipe Fin août, Dave et Chelsea sont arrivés à Iligan. Américains, mariés depuis 5 ans, ils sont aussi volontaires FIDESCO et vont poursuivre les missions ici. Nous avons été ravis de passer un mois avec eux pour leur passer le relais et qu’ils apprennent les rudiments en langue des signes. Quatre
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En mission aux Philippines
LA VIE A ILIGAN
le département de l’éducation, les entreprises partenaires, les écoles pour sourds, des officiels de la ville, … Une belle fête pour Hear Us et qui nous permet de partir confiants vu la qualité de l’équipe qui prend le relais et compte tenu des liens qui ont pu être créés à Iligan. Juste avant notre départ nous avons pris le temps de donner un message personnalisé à chaque jeune et, le soir, nous avons organisé une « despedida » avec nos amis. La Hear Us House était, à nouveau, bien remplie et nous terminions d’accumuler les souvenirs que nous allions emmener avec nous de retour en France.
« Despedida » Une semaine avant notre départ, nous avons organisé un passage de relais officiel entre nous et la nouvelle équipe. Cela a été l’occasion de diplômer officiellement Norman, Angelie, Richie et Julie-Anne de la fin de la formation LP4Y : ils sont passés par toutes les étapes et ont achevé la dernière étape d’intégration dans la vie professionnelle avec notre accompagnement. Maintenant ils vont pouvoir voler de leurs propres ailes et accompagner les plus jeunes. A l’occasion de ce passage de relai, tous les partenaires les plus importants du programme étaient présents : les Spiritains, l’université MSU IIT,
APRES 2 ANS AUX PHILIPPINES
Nous réalisons la chance que nous avons en France !
construire son avenir dans la peur ou avec un sentiment de menace constant.
• D’avoir l’eau en tournant le robinet. Geste banal pour nous mais qui n’est pas le lot quotidien de tant de personnes sur terre. Qui plus est, elle est potable ! Grosse surprise pour Aubin à son retour !
• D’avoir de l’électricité en permanence. A Iligan, nous avons eu fréquemment des coupures de 2 ou 3 heures par jour. Enervant pour nous dans la gestion de nos trainings ou de l’activité de saisie informatique. Très pénalisant pour n’importe quelle activité économique sérieuse.
• D’avoir la plupart de nos frais de santé pris en charge. Nous avons expérimenté, aux Philippines, que le principal sujet lorsqu’on est malade ou avant une opération est le budget ou l’achat des médicaments et des pansements. En France, on en ignore souvent le coût.
• De pouvoir trouver des lieux de silence facilement. • D’avoir de nombreux jardins publics avec des formidables structures pour les enfants. A Iligan, nous avons mis 1 an à trouver une balançoire publique qui était dans un état assez lamentable.
• De pouvoir choisir des études, souvent gratuites, y compris au niveau universitaire. Les Philippins nous regardent avec des grands yeux ronds quand nous leur disons cela... La plupart des autres étrangers aussi.
• De ne pas subir de catastrophes naturelles dévastatrices. Les typhons sont fréquents aux Philippines. On en a vécu 2 en 2 ans dont 1 particulièrement dévastateur (près de 2000 victimes dans une ville de 300 000 habitants !). Chaque année, ce sont des milliers de personnes qui subissent les violences climatiques comme on vient de voir récemment avec le typhon Yolanda. Les principales victimes sont très souvent parmi les pauvres qui n’ont pas d’autres lieux pour
• De ne pas être inquiets pour notre sécurité en raison d’instabilités politiques, de rebellions ou de menaces terroristes. Il y a deux mois, 60 000 personnes fuyaient des combats de rues entre rebelles et gouvernement à Zamboanga, une des principales villes de Mindanao. Pas facile de
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En mission aux Philippines
APRES DEUX ANS AUX PHILIPPINES
• L’amour des enfants. Nous avons eu la chance de vivre notre mission en famille avec de jeunes enfants et même d’avoir notre petit Arnaud né là-bas. Les Philippins sont joueurs, patients et doux avec les enfants. Pour l’anecdote, notre vol pour rentrer en France était en trois morceaux avec une escale à Manille et une escale dans le Moyen-Orient. On a pu voir progressivement s’amoindrir le degré de tolérance des passagers et du personnel de bord pour supporter l’agitation de nos enfants…
se loger que les zones inondables et dangereuses. • De vivre dans un système globalement honnête et juste. La corruption est vraiment une épine dans le pied des Philippines pour pouvoir se développer. • De ne pas être choqués chaque jour des écarts colossaux entre la minorité riche et la majorité très pauvre. Vous trouvez peut-être que nous avons une vision idyllique de la France alors qu’il existe bien des situations difficiles en France. Certes, mais nous pensons que la vie est globalement plus facile, plus confortable et que la société est plus juste ici, en tout cas de notre point de vue occidental.
• Solidarité entre générations. Solidarité familiale. Les jeunes ont toujours le souci de partager avec leurs proches (parents, frères et sœurs, neveux,…) ce qu’ils pourront gagner dans le futur. Cette solidarité vient certainement pallier un système de protection social quasi-inexistant mais elle crée un soutien plus personnel entre les personnes.
Nous voudrions aussi vous partager les traits de la culture philippine que nous avons le plus apprécié durant ces 2 ans.
• Sens de la fête et joie de partager de bons moments ensemble. Aux Philippines, toute occasion est prétexte à fiesta. On fête les saints patrons, les commémorations historiques, les fêtes religieuses. Nous étions étonnés par l’investissement mis dans la célébration des anniversaires par exemple. Souvent, cela devenait un sujet de tension quand nous refusions que les jeunes utilisent une grande part de leurs économies pour acheter un gâteau et de la nourriture à partager pour fêter leur anniversaire. Les Philippins aiment célébrer. Ils aiment être en groupe, en bandes, en clan, en famille. Ils aiment être en réseau. Il ne faut pas s’étonner qu’aux Philippines, Facebook soit si populaire!
• Positive attitude. Nous avons été frappés, durant ces deux années, par l’optimisme et la joie de vivre de la population philippine. Même après des événements douloureux, leur capacité à rebondir et à décider de prendre la vie du bon côté nous a désarmé plus d’une fois. • Le sourire et la gentillesse. La joie de vivre s’exprime dans les sourires, des petits enfants aux plus âgés. Cela frappe tout visiteur. Cette gentillesse ne veut pas dire qu’on devient les meilleurs amis en quelques heures. On est en Asie, l’apprivoisement prend du temps.
Fiesta avec notre groupe de cours de français
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En mission aux Philippines
APRES DEUX ANS AUX PHILIPPINES
• Religiosité – confiance – humilité. Nous avons mis ces trois mots ensemble car nous avons l’impression qu’ils sont liés pour les Philippins. La religion est très importante et marque la société. Nous nous sommes souvent dit que leur joie de vivre venait probablement aussi de leur confiance en Dieu. Et puis, ce sont des gens humbles aussi sans doute parce qu’ils se savent créature aimée de Dieu. Ils savent reconnaitre ce que la vie leur offre comme un cadeau de Dieu.
• Nous avons apprécié de travailler en couple et nous avons pu compter sur nos complémentarités en toute confiance. Cette expérience en famille, avec deux enfants, puis trois, sera aussi certainement très marquante pour notre famille même si nos enfants sont encore très jeunes. Nous pensons que nous serons plus ouverts à l’étranger et plus sensibles à la pauvreté après ces deux années. • Nous avons aussi énormément apprécié de participer à l’aventure LP4Y pendant ces deux années. Le développement de l’ONG est impressionnant. Nous étions moins d’une dizaine de volontaires à notre premier séminaire et nous étions plus de 25 à notre dernier. Cela montre le développement des programmes et le nombre croissant de jeunes qui sont ainsi accompagnés. Nous avons vraiment adhéré à l’esprit de LP4Y d’accompagner des jeunes exclus par l’entreprenariat et la responsabilisation. Les partages que nous avons pu avoir avec JeanMarc et Laure Delaporte, les fondateurs de l’ONG ainsi qu’avec les autres volontaires ont vraiment été passionnants. Nous étions vraiment bien entourés pour accompagner des situations parfois déroutantes avec les jeunes.
Et vous partager ce que nous avons aimé dans notre mission : • Rencontrer les Philippins. Apprendre à les connaitre et à les aimer. Notre situation assez isolée d’autres étrangers nous a vraiment mis au cœur de la culture philippine. • Avoir l’opportunité d’accompagner de jeunes adultes dans leur projet de vie. Nous avons été très heureux d’être témoins de leurs progrès, de voir leur confiance en eux se développer. Quelle joie d’avoir pu accompagner certains d’entre eux depuis le 1er jour dans le centre LP4Y jusqu’à leur intégration professionnelle !
Avec Jean-Marc et Laure Delaporte, fondateurs de LP4Yen 2009
• Au cours de ces deux années, nous avons aussi été très heureux d’être partenaires des prêtres Spiritans. Ces prêtres venus d’Afrique, en mission aux Philippines ont vraiment un rayonnement étonnant. Nous avons découvert l’Eglise en mission pour d’autres pays. Nous étions heureux de partager avec eux nos
• Nous avons aussi été touchés et heureux d’être au service des plus pauvres et des plus négligés : les personnes handicapés, les personnes en prison. Peu de mains leur sont tendues et ils nous exprimaient l’importance des programmes pour eux.
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En mission aux Philippines
APRES DEUX ANS AUX PHILIPPINES
• Savoir gérer des projets en environnement incertain et dans une culture différente avec souplesse et ouverture.
expériences de mission loin de notre pays d’origine.
• Tenir le cap d’un projet et être persistant ! Mettre le Bon Dieu dans le coup !
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Prendre du plaisir à créer des liens.
• Être plus proches des pauvres. Nous n’avions pas expérimenté de partager de façon si intime la vie de personnes exclues dans notre propre pays. Non pas parce qu’il n’en existe pas, mais que nous ne prenions pas de temps pour cela dans notre vie quotidienne. Nous espérons que nous garderons cette attention aux personnes dans le besoin.
Dernière soirée avec les Pères Spiritains et nos fidèles amis : Jay (volontaire DCC), Leonor, Father Illah, Fr Martin, Fr Ben, Angeli, Iris, Pebble.
Et enfin, ce que nous avons appris et que nous espérons conserver
• Être plus patients et gentils, en particulier vis à vis des enfants.
• Une attitude plus positive. Les Philippins nous ont appris à décider d’être heureux en toutes circonstances. C’est une belle leçon que nous souhaiterions garder.
• Prendre du plaisir à découvrir d’autres cultures. • Etre exposés à des personnes et dans des lieux que nous n’aurions probablement jamais rencontrés en France.
• Accepter l’inattendu. Français et ingénieurs de surcroit, nous sommes si attachés à tout planifier. A force de devoir nous adapter tous les jours à des situations nouvelles, nous pensons que nous sommes plus adaptables pour être disponibles à des événements inattendus.
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Expérimenter la joie de donner !
En mission aux Philippines
CONCLUSION
Au moment de partir en mission, il y a 2 ans, nous avions commencé à réaliser la chance que nous avions de pouvoir nous rendre disponible pour partir 2 ans en service à l’autre bout du monde. Nous avons eu la chance d’entendre cet appel et de pouvoir y répondre. Aujourd’hui, nous réalisons à quel point nous avons été « gâtés » par ces deux années. Ce fut une très belle aventure, une mission pas simple tous les jours, mais riche et pleine de sens. Nous avons été comblés dans nos attentes, expérimentant d’être au service chaque jour. Nous sommes donc reconnaissants à vous tous, nos parrains, qui nous avez soutenus fidèlement et accompagnés. Merci à FIDESCO de nous avoir bien préparés et accompagnés. Merci à notre partenaire LP4Y qui nous a confié ces beaux projets à Iligan et qui nous a fait confiance. Merci à la communauté des Pères Spiritains d’Iligan pour leur amitié et leur soutien dans la mission. Et enfin merci à nos amis d’Iligan qui nous ont si bien accueillis et veillaient tendrement sur nous. Nous sommes de retour à Angers, vous êtes les bienvenus pour nous rendre visite, échanger quelques nouvelles ou parler des Philippines. Nous vous embrassons. Aymeric et Colombe 6 rue Hippolyte Maindron – 49000 Angers
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Ay : 07 85 69 71 76, Co : 07 85 69 71 80
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