Vitamine D… bien plus qu’une simple vitamine ! Mickaël ROUSIERE Service de Rhumatologie Hôpital Saint-Antoine (APHP), Paris site : www.larhumato.fr Larhumato La Rhumato Saint Antoine
Le fol engouement pour la vitamine D ! Les examens de biologie explorant le métabolisme phosphocalcique : une sur-prescription du dosage de la vitamine D ?
Et pourtant… le prix de l’acte a pourtant été baissé à 3 reprises depuis 2007 Points de repère n° 34 - janv 2011. Les actes de biologie médicale : analyse des dépenses en 2008 et 2009
La Vitamine D : une hormone qui ne porte pas son nom !
Forme active : 1,25 (OH)2 vitamine D
Rôle le mieux connu : métabolisme phospho-calcique et osseux • stimulation de l’absorption intestinale de calcium et de phosphates • optimisation du produit phospho-calcique (minéralisation et croissance) • rétro-contrôle négatif sur la sécrétion de PTH
Véritable hormone (action endocrine, paracrine et autocrine)
Récepteur spécifique (VDR) sur de nombreux tissus
Régule l’expression de nombreux gènes
Le statut en vitamine D est représenté par le dosage sérique de 25(OH) vitamine D, qui suit un cycle saisonnier
Quelles sont les consÊquences cliniques de l’insuffisance en vitamine D ?
Complications d’un déficit en vitamine D Complications classiques d’un déficit
OSTEOPOROSE RACHITISME
OSTEOMALACIE
Les consÊquences de l’insuffisance en vitamine D
Complications d’un déficit en vitamine D : risque fracturaire
Etude OPRA Suède 1604 femmes Âgées de 75 ans PTH : + 37 %
(p < 0.001)
Gerdhem P, Osteoporos Int 2005
Effet de la supplémentation en vitamine D sur le risque fracturaire •
Méta-analyse fondée sur 12 essais contrôlés, randomisés, en double aveugle
•
Analyse des données individuelles de 31.022 patients âgés de plus de 65 ans
•
Modèle de Cox en régression avec analyse en quartiles
•
3 770 fractures non vertébrales
•
1 111 fractures de hanche
• Quelle que soit la dose de vitamine D, on observe : – une diminution du risque de fracture de hanche de 10 % HR = 0,9 (IC95 : 0,8-1,01) – une diminution du risque de fractures non vertébrales de 7 % HR = 0,93 (IC95 : 0,87-0,99) Bischoff-Ferrari HA et al. Osteoporos Int 2010
Effet de la supplémentation en vitamine D sur le risque fracturaire : effet dose Fractures de la hanche
1,4
1,4
1,2
1,2 HR (IC95)
HR (IC95)
Fractures non-vertébrales
0 0,8 0,6
0 0,8 0,6
0,4
14 %↓
0,2 0,0
0,4
30 %↓
0,2 0,0
Témoins
0-360
361-637 638-719 792-2000
Dose de vitamine D
HR = 0,86 (IC95 : 0,76-0,96)
Témoins
0-360
361-637 638-719 792-2000
Dose de vitamine D
HR = 0,70 (IC95 : 0,58-0,86) Bischoff-Ferrari HA et al. Osteoporos Int 2010
Vitamine D et mortalité post-fracture
Etude de registre finlandais 23.615 patients > 50 ans Au décours d’une FESF âge moyen 76,8 ans
Vit D : HR=0.74 [0.0.66-0.83]
Nurmi-Lüthje I et al. J Bone Miner Res 2011
Suppléments en vitamine D et mortalité Méta-analyse de 18 essais randomisés, contrôlés (57311 patients) Apports en vitamine D moyens de 528 UI/J (300 à 2000 UI/j)
Autier P et al. Arch Intern Med 2007
Saison, vitamine D et mortalité par cancer
Etude de registre Norvège 15,618 patients âgés de 16-80 ans dosage de 25 (OH) D Suivi : mortalité par cancer
à 3 ans du diagnostic
Porojnicu A et al. J Steroid Biochem Mol Biol 2007
Vitamine D : au delà des effets osseux… Actions extra-osseuses potentielles
• Présence de récepteurs à la vitamine D (et 1-α α-hydroxylase) • Capacité de transformer la vitamine D en sa forme active (calcitriol)
Cianferroti L et al. PNAS 2007
Insuffisance en vitamine D et risque de chutes déficit en vitamine D calcémie
Faiblesse musculaire
PTH résorption osseuse
augmentation du risque de chutes
augmentation du risque fracturaire
Statut en 25 (OH) vitamine D et performances musculaires • Etude OPRA (Suède) Femmes âgées de 75 ans PTH : + 37 %, p < 0.001 Temps d’activité extérieure : - 34 %, p < 0.001 Temps de marche : + 19 %, p < 0.001 Force du quadriceps : - 9 %, p = 0.09 Test d’équilibre : - 23 %, p =0.019
Gerdhem P, Osteoporos Int 2005
Statut en 25 (OH) vitamine D et performances musculaires â&#x20AC;˘ Etude australienne 463 hommes et femmes 70-90 ans, suivis pendant 12 mois
Menant JC, Osteoporos Int 2011
Prévention des chutes et suppléments en vitamine D chez des adultes institutionnalisés
Broe KE et al. J Am Geriatr Soc 2007
Autres potentiels effets extra-osseux de la vitamine D
Récepteur à la vitamine D (VDR) présent dans de multiples tissus
Effet immuno-modulateur (PR, lupus, diabète, SEP…)
Effet anti-infectieux : rôle du calcitriol dans la synthèse de peptides antimicrobiens (cathélicidines ) = antibiotiques endogènes
Effet anti-tumoral : études observationnelles (certains cancers moins fréquents si taux de vitamine D les plus élevés)
Effet cardio-vasculaire : études observationnelles (HTA, AVC et calcifications artérielles)
Comment sont ĂŠtablies les valeurs recommandĂŠes de 25 (OH) vitamine D ?
Comment dĂŠfinir les valeurs seuils ?
Heaney RP et al. J Am Coll Nutr 2003
Holick MF et al. J Clin Endocrinol Metab 2005
Effet de la supplĂŠmentation en vitamine D sur le risque fracturaire : effet dose Le rĂ´le de la dose des supplĂŠments en vitamine D
Prévention des chutes et suppléments en vitamine D chez des adultes de plus de 65 ans 8 études randomisées contrôlées (n=2426)
Bischoff-Ferrari HA et al. BMJ 2009
Quelles sont les valeurs recommandĂŠes de 25 (OH) vitamine D circulante ?
Comment définir les valeurs seuils ? Objectif souhaitable : 30 ng/ml (75 nmol/l) 25 OH vitamine D2+D3 Taux inadéquats
nmol/l
ng/ml
Déficience
< 25
< 10
Insuffisance
25 - 78
10 - 30
Plage souhaitable
78 - 125
30 - 50
Hypervitaminose
≥ 250
≥ 100 Hollis BW et al. J Nutr 2005
Quelle est l’épidémiologie de l’insuffisance et de la carence vitaminique D ? Quelles sont les populations à risque ?
Individu
Mode de vie
7-DHC réductase, 25 OHase, 24 OHase
Alimentation, tabac, vêtement, sport, activités extérieures
Génétique Age, sexe, IMC, phototype
Concentration sérique de la vitamine D
Géographie Climat, Latitude, Nébulosité, Pollution, Saison
Le manque en vitamine D est-il fréquent dans la population ?
30 % > 50 %
Adultes jeunes (40 ans) SUVIMAX (Femmes > 50 ans : 78 %)
Femmes > 65 ans
100 %
Sujets âgés en institution
Le manque en vitamine D est-il fréquent dans la population ménopausée ? Femmes ménopausées • 177 femmes ambulatoires • âge : 64 ans (‹ 75 ans) • ménopause › 5 ans • 8 centres dans 3 régions
Nord 9.5 ± 5.4 Centre 10.8 ± 8.8
Sud 13.3 ± 7.5
Fardelonne P et al. Am J Clin Nutr 1998
Qui traiter sans dosage prĂŠalable indispensable de 25 (OH) vitamine D ? (en France)
Qui traiter sans dosage préalable indispensable de 25 (OH) vitamine D?
Tous les sujets de 65 ans et plus Rapport bénéfices/risques très favorable Economiser le coût de millions de dosages
La possibilité de traiter sans dosage préalable indispensable ne signifie pas qu’aucun de ces sujets ne nécessite de dosage
l’indication reste une décision individuelle malade par malade
sujet âgé jugé à haut risque de carence peut justifier un dosage de 25 (OH) vitamine D pour sa prise en charge, les carences et les taux effondrés proches de 0 nécessitant de mesures particulières Benhamou CL et al. Presse Med 2011
Chez qui effectuer un dosage de 25 (OH) vitamine D afin de dĂŠcider dâ&#x20AC;&#x2122;un traitement ?
Exposition solaire nulle ou quasi nulle (dont vêtements couvrants)
Chutes à répétition
Ostéoporose avérée (primitive ou secondaire, femmes et hommes)
Maladies favorisant l’ostéoporose (PR, Crohn, RCH, hyperthyroïdie, HPT, Cushing, malabsorption, ménopauses précoces, addictions…)
Médicaments inducteurs d’ostéoporose (corticothérapie, héparines, anticonvulsivants, anti-aromatases, les analogues GnRH…)
Pathologie chronique sévère et grossesse Benhamou CL et al. Presse Med 2011
Qui traiter ?
Benhamou CL et al. Presse Med 2011
Comment traiter ?
Quelle vitamine D ?
La vitamine D, de préférence au cours du repas, sauf • 25 (OH) vitamine D (Dégrogyl) : IHC, inducteurs enzymatiques • 1,25 (OH)2 vitamine D (Calcitriol) ainsi que la 1 (OH) vitamine D (Un-Alpha) : IRC, hypo et pseudo-hypoparathyroïdie, Diabète Phos
Plutôt la D3 (Uvédose, ZymaD …) que la D2 (Stérogyl) si supplémentation avec des doses espacées
Seule ou associée à un supplément en calcium ( observance !) Benhamou CL et al. Presse Med 2011
Quelle est la bonne dose de vitamine D nécessaire chaque jour ? consensus d’experts
800-1200 UI vitamine D par jour
statut vitaminique D satisfaisant 25(OH) vitamine D ≥ 30 ng/ml (75 nmol/l) Benhamou CL et al. Presse Med 2011
Comment prescrire un traitement systématique (ou traitement d’entretien) ? Objectif : maintenir 25(OH) vitamine D ≥ 30 ng/ml (75 mmol/l)
Supplémentation intermittente • 1 amp UVEDOSE tous les 2 à 3 mois
ou Supplémentation quotidienne • 800-1200 UI/j en vitamine D3 ou D2 Les doses sont majorées si : • malabsorption • syndrome néphrotique • obésité Souberbielle JC et al. Ann Endocrinol 2008
Comment prescrire un traitement d’attaque en cas d’insuffisance en vitamine D ? Objectif : obtenir 25(OH) vitamine D ≥ 30 ng/ml (75 mmol/l)
25(OH) vitamine D <10 ng/ml • 1 amp UVEDOSE/2 semaines pdt 2 mois (4 amp) 25(OH) vitamine D entre 10 – 20 ng/ml • 1 amp UVEDOSE/2 semaines pdt 1.5 mois (3 amp) 25(OH) vitamine D entre 20 – 30 ng/ml • 1 amp UVEDOSE/2 semaines pdt 1 mois (2 amp) Souberbielle JC et al. Ann Endocrinol 2008
Pas de vitamine D à forte dose annuelle ! Étude contrôlée, randomisée, monocentrique 2426 femmes de plus de 70 ans (moyenne : 76 ans) ambulatoires 500 000 IU/an de cholécalciférol ou placebo (3 à 5 ans)
Sanders KM et al. JAMA 2010
Faut-il contrôler l’évolution du taux de 25 (OH) vitamine D sous traitement ?
OUI s’il existe un dosage pré-thérapeutique • Objectif : vérification de l’efficacité (taux > 30 ng/ml) • Aide aux modalités du traitement d’entretien (doses, intervalles) • A faire 3 mois après la dernière ampoule du traitement d’attaque
Benhamou CL et al. Presse Med 2011
Les aliments enrichis en vitamine D ou l’exposition solaire régulière peuvent-ils couvrir les besoins ?
Les apports en vitamine D
L’alimentation occidentale n’apporte que 100 à 200 UI de vitamine D par jour… pour des besoins estimés entre 800 et 1200 UI par jour
Les aliments enrichis sont à considérer comme un apport additionnel minime : ne pas en tenir compte !
L’exposition solaire quotidienne 30
minutes par jour pendant 3 semaines
d’environ en
30 % de la surface corporelle
France, entre juin et octobre
N’apporte que 10.000 UI de vitamine D…
L’exposition solaire : moins fréquente et moins efficace chez le sujet âgé
Quesada JM et al. J Clin Endocrinol Metab 1992
adapté de Lips et al. Endocr Rev 2001
Diminution de la production endogène avec l’âge
Diminution du précurseur dans l’épiderme (r = - 0,89)
Production cutanée : 2,3 fois moins que chez l’adulte jeune MacLaughlin J et al. J Clin Invest 1985 Holick MF et al. Lancet 1989
Production endogène de vitamine D et utilisation des écrans solaires 8 sujets sains
jours
Un indice UV 8 réduit la synthèse de vitamine D de 92,5 % Un indice UV 15 réduit la synthèse de vitamine D de 99 % Matsuoka LY et al. J Clin Endocrinol Metab 1987
Production endogène de vitamine D et couleur de la peau
Clemens TL et al.. Lancet 1982
Vitamine D : conclusions La revue des effets extra-osseux de la vitamine D, en complément de ce que l’on sait de ses effets osseux, indique : 1. qu’il est être très utile de s’interroger sur le statut vitaminique D de nos patients 2. qu’il est sage de mesurer le taux de la 25 (OH)vitamine D chaque fois que l’on a un doute sur une insuffisance ou une carence 3. qu’il est toujours très important de veiller à ce que les apports minimums quotidiens en vitamine D soient d’au moins 800 UI/j pour avoir un taux sérique > 30 ng/ml
Merci de votre attention â&#x20AC;Ś
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