OstĂŠoporose post mĂŠnopausique conduite et suivi du traitement
Pr Erick Legrand Service de Rhumatologie, Inserm U922 CHU Angers
Quand dĂŠbuter un traitement mĂŠdicamenteux ?
La décision est prise en tenant compte
du contexte clinique : ménopause, corticothérapie, hypogonadisme, maladie inflammatoire des fractures : nombre, localisation, conditions de survenue, conséquences et du résultat de la densitométrie
Dans tous les cas, la patiente doit donner son accord pour le bilan paraclinique et un traitement de fond prolongé
Situation
Recommandation Précautions
Clinique
pour traiter
Fracture vertébrale
T-score < -1
Biologie
Fracture ESF
T-score < -1
Biologie
Fracture périphérique
T-score < -2
Biologie
AFSSAPS janvier 2006
Situation
Recommandation Précaution
Clinique
pour traiter
Absence de fracture
T-score < -2.5
Biologie
avec facteur de risque ménopause précoce, maigreur, tabac, ATCD familial, maladie inflammatoire, traitement inducteur de perte osseuse…
Absence de fracture mais Corticothérapie
AFSSAPS janvier 2006
T-score < -1.5
Biologie
Les signes d’alertes Femme non ménopausée Homme < 70 ans Amaigrissement, fièvre, signes viscéraux Cancer récent Signes neurologiques CRP élevée, augmentation des α 2 globulines Pic monoclonal ou Hypogammaglobul < 6 gr/l Hypercalcémie ou Hypocalcémie< 2 mmoles/l
Comment évaluer la gravité de l’ostéoporose?
La gravité de l’ostéoporose, qui va conditionner les choix thérapeutiques, dépend :
1- Du nombre et de l’intrication des facteurs de risque Ex : ménopause + maigreur + prednisone + tabagisme
2- De l’importance de la diminution de la densité osseuse T-score = -3, le risque fracturaire est multiplié par 8 T-score = -4, le risque fracturaire est multiplié par 16 MarshallD et al. BMJ 1996
3- De la présence et du nombre et de la sévérité des fractures vertébrales La présence d’une fracture asymptomatique multiplie par 2.2 le risque de fracture 1.7 le risque de fracture de l’ESF 7.4 le risque de fracture vertébrale 2.7 le risque de décès
(Pongchaiyakul C, JBMR 2005)
Il est capital de réaliser des radiographies 1- Devant toute douleur rachidienne après 55 ans 2- Devant une réduction de taille > 3 cm (/ 20 ans) 3- Devant une réduction de taille de 2 cm, entre deux consultations 4- Après 70 ans +++ 5- Après fracture ESF+++ 6- Si T-score < -3 7- Si OP + corticothérapie ou traitement inducteur de perte osseuse (Siminoski, Osteoporosis Int 2005)
Après une première fracture vertébrale, 20% des femmes vont présenter une nouvelle fracture dans un délai d’un an
Baseline
7 ans
OstĂŠoporose Qui et comment traiter?
Remarques prĂŠalables
I- Ne pas se précipiter! La décision thérapeutique est prise, dans le calme, après 2 consultations, devant un bilan biologique normal, en tenant compte de 3 paramètres…
1. Des facteurs de risque clinique 2. Du résultat densitométrique 3.
Des fractures +++++++
Si la densitométrie est difficile à obtenir (sujets âgés, non mobiles, peu coopérants)
1.Il faut traiter les patient(e)s avec une fracture de l’ESF +++
2.Il faut traiter les patient(e)s qui ont une fracture vertébrale indiscutable sur les radiographies, non traumatique
II- Identifier les patientes prioritaires 1-Après une fracture de l’ESF ++++ Diminuer la mortalité 2-Après une fracture vertébrale +++ prévenir la récidive et le handicap 3-Après une fracture périphérique ++ Prévenir la récidive 4-Devant une densité basse avec facteurs de risque prévenir la première fracture
III- Améliorer les connaissances de la patiente 1- Expliquer la maladie avec des mots simples Fragilité osseuse, fractures spontanées, réduction de la taille sont plus simples que ostéoporose, densité minérale osseuse, capital osseux…
2- Donner le résultat de la densitométrie à la patiente avec un compte rendu lisible pour le profane; s’assurer qu’elle a compris le résultat.
4- Affirmer que le traitement, prévu pour une période de 4 à 5 ans, améliore la solidité osseuse et réduit le risque de fracture
5- Informer les patientes dès la première prescription sur Les modalités de prise Les objectifs thérapeutiques : réduire le risque de nouvelle fracture (et non diminuer les douleurs) Les effets indésirables attendus… mais bénins
IV- Corriger la carence en vitamine D 1- Ne prescrire du calcium que si la patiente refuse les produits laitiers : 3 par jour sont suffisants 2- Doser la 25 hydroxy vitamine D Normal, Taux > 75 nmol/l: Uvédose 1 ampoule/ 3 mois 25 < Taux < 75 nmol/l : Uvédose 1 ampoule par mois pendant 3 mois puis 1 par trimestre Carence, Taux < 25 nmol/l : Uvédose 1 ampoule/mois pendant 4 mois puis 1 ampoule tous les 3 mois
Avantages et inconvénients comparés des traitements disponibles au cours de l’OP post ménopausique chez une patiente dont le bilan biologique est normal +++
Le THS
Avantages
Réduit les symptômes climatériques +++ Réduit le risque de fracture vertébrale (-50%) et périphérique (-30%) Réduirait le risque de cancer du colon (-15%)
Le THS
Inconvénients
variables selon les modalités thérapeutiques : dose, durée, voie d’administration, choix du progestatif Augmente le risque de phlébite et embolie pulmonaire (RR X 2) de cancer du sein (RR X 1.2)
La population cible du THS
Femme entre 40 et 55 ans En particulier si ménopause précoce Avec des symptômes de ménopause Penser à Suspendre le traitement si alitement ( risque de phlébite)
Le Raloxifène Avantages Réduit le risque de fracture vertébrale (-40%) Réduit le risque de cancer du sein (-60% à 8 ans)
Inconvénients Augmente le risque de phlébite (RR X 2) Efficacité antifracturaire non démontrée sur l’ESF
La population cible du raloxifène Femme entre 50 et 70 ans Sans ATCD de fracture de l’ESF Pas plus d’une fracture vertébrale Sans symptômes de ménopause
Trois précautions : 1.Ne pas le prescrire si ATCD de phlébite 2.Ne pas le prescrire si bouffées de chaleur 3.Suspendre le traitement si alitement
Les bisphosphonates Avantages Réduit le risque de fracture vertébrale (-50 à 70%) le risque de fracture de l’ESF (-30 à 40%) Formes galéniques multiples : comprimé quotidien, hebdomadaire, mensuel, IV trimestriel, IV annuel
Inconvénients Risque d’ostéonécrose de la mâchoire : 1/100.000 Prise à jeun indispensable Syndrome pseudogrippal pour les formes IV
La population cible des bisphosphonates Femme entre 65 et 90 ans Capable de respecter les conditions de prise à jeun ou donnant son accord pour un Traitement IV
Trois précautions : 1.Examiner la bouche; si mauvais état dentaire, différer le traitement, le temps des soins dentaires 2.Ne pas prescrire l’alendronate si oesophagite récente 3.Pour la voie IV : prévenir du risque de fièvre, myalgies et prescrire du paracétamol 3gr/j pendant 48H
Le Ranélate de Strontium Avantages Réduit le risque de fracture vertébrale (-40%) Réduit le risque de fracture périphérique (-15%) Efficacité démontrée après 80 ans
Inconvénients Excès de phlébites (RR 1.4) Dress syndrome Uniquement en prise quotidienne Pas d’AMM aux USA (?) Population cible : Femme > 70 ans, Echec ou refus des BP oraux ou IV
Le Tériparatide Avantages Réduit le risque de fracture vertébrale (-65%) Réduit le risque de fracture périphérique (-50%) Amélioration de la formation et de la qualité osseuse Bonne maintenance thérapeutique (> 80% à 1 an)
Inconvénients Voie SC quotidienne Coût X 10
Le Tériparatide Population cible Ostéoporose sévère : deux fractures vertébrales En première intention (ou après échec des BP) OP sévère + corticothérapie
Précautions Absence d’irradiation Absence de cancer Absence d’hyperparathyroïdie Surveiller la calcémie à M3 et M6
Les Traitements ne sont pas concurrents mais complémentaires au fil du temps
Ménopause précoce------Cancer du sein---Fractures multiples 40 ans
50 ans
60 ans
70 ans
90 ans
THS-----------Raloxifène----------Bisphosphonates---------Ranelate ---OP Sévère --------Tériparatide--------
Organisation du suivi Consultations M3
M6
M12
Puis tous les ans
Tolérance, Réalité des prises, Fractures (?) Mesurer la taille
Organisation du suivi Biologie M3 : 25 OH Vitamine D (si carence sévère) M12 : Rien ou 25 OH Vitamine D Réserver le dosage des marqueurs du remodelage osseux aux situations problématiques
Organisation du suivi DensitomĂŠtrie + radiographies du rachis Bilan initial Puis Ă 4 ou 5 ans
Quelle durée de traitement pour cette première séquence thérapeutique?
THS : 2 à 10 ans (ménopause précoce) Raloxifène : 8 ans; ne pas le prescrire au-delà de 70 ans Bisphosphonates : 5 à 7 ans, puis pause pendant 2 ans Ranélate de strontium : 5 ans Teriparatide : 18 mois (demande 24 mois en cours)
Quel délai entre la première et la deuxième séquences thérapeutiques?
THS : relai immédiat Raloxifène : relai immédiat Bisphosphonates : pause pendant 2 ans Ranélate de strontium : relai immédiat Teriparatide : relai immédiat, indispensable par des BP
Quelles sont les conséquences de la deuxième séquence thérapeutique
Beaucoup de questions!
Utilisation du Zoledronate après l’Alendronate Mac Clung, Bone 2007 - Etude Randomisée, double aveugle - 225 femmes traitées depuis au moins 1 an par alendronate (4 ans en moyenne) - Alendronate : 70 mg/ sem ou zolédronate : 5 mg /an Gain DMO au rachis à 1 an : Zol : + O.16 % ; Al : + O.8 % La rotation alendronate vers zolédronate n’induit pas de gain densitométrique particulier
Utilisation du denosumab après alendronate David L Kendler , Christian Roux
JBMR Decembre 2009
Effects of denosumab on bone mineral density and bone turnover in postmenopausal women transitioning from alendronate therapy 504 patientes ménopausées Age > 55 ans -2.0 <T-score< -4.0 Alendronate depuis au moins 6 mois Les gains osseux sont supérieurs si rotation de l’alendronate vers le denosumab
Utilisation du ranelate après les bisphosphonates Middleton, Barcelone 2008 Etude ouverte - 120 femmes : 60 ayant pris des BP, 60 naïves - RS : 2g jour + Calcium et Vit D - 96 femmes suivies à 6 mois , 65 femmes à 1 an DMO rachis à 1 an
BP 2.9 %
Sans BP 4.2 %
DMO hanche à 1 an
BP 0.5 %
Sans BP 3.6 %
Utilisation du Tériparatide après l’Alendronate ou le Raloxifène Ettinger B, JBMR 2004
59 femmes, traitées antérieurement par Raloxifene ou Alendronate pendant 18 à 36 mois. TPT 18 mois 6 mois plus tard, DMO rachis : Rlx : +5.2% Al : +0.5% 18 mois plus tard , DMO rachis : Rlx : +10.2% +4.1%
Al :
PTH au cours de l’Ostéoporose résistant aux BP
NS
Femmes + ostéoporose postménopausique -2,2 T-score (moyenne ± ET)
•
-2,0
NS
-2,4
Rachis lombaire Traitées ≥ 12 mois par bisphosphonates avec bonne observance -2,6
•
Col fémoral
-2,8
Hanche totale
< 0,05 Mais-3 avecp ≥ 1 nouvelle fracture ostéoporotique ou ↓ DMO > 3,5 %, -3,2 0
6
12
18
Mois
•
25 femmes PTH 20 µg/j s.c. pendant 18 mois
•
Biopsies à 0 et 18 mois
ASBMR 2008 - D’après Muche B. et al., Berlin, Allemagne, abstract 1172, actualisé
PTH au cours de l’Ostéoporose résistant aux BP DMO (DEXA)
Exemple de BO (µCT)
T-score (moyenne ± ET)
-2,0
Inclusion
NS
-2,2
6 mois
18 mois
NS
-2,4 Rachis lombaire
-2,6
Col fémoral
-2,8 -3
Hanche totale
p < 0,05
-3,2 0
6
12
18
Mois
ASBMR 2008 - D’après Muche B. et al., Berlin, Allemagne, abstract 1172, actualisé
Utilisation sĂŠquentielle tĂŠriparatide/ alendronate F Cosman, JBMR 2009
126 patientes Sous Alendronate depuis au moins 1 ans (I) Teriparatide pendant 15 mois (72) puis de nouveau Alendronate pendant 1 an (49) (II) Puis de nouveau Teriparatide pendant 15 mois (27)
(I) DMO Lombaire 6,2% P1NP + 120% (II) DMO lombaire 4,7% P1NP +60%
Utilisation de l’acide zolédronique après le tériparatide
Réponse densitométrique
22
21
ng/ml
Nombre de patients
0,5
25 20 11 3
2
1
Col Perte
Hanche totale Stabilité
-62,2 % -78,6 % -89,6 % 0
10
60
180
270
365
(ET [%]
9,3
23,7
27,3
52,9
37,6)
Jours
Corps entier
Gain
120
µg/ml
100
Rachis
-49,1 %
0
4
0 Rachis
-47,8 %
0,3
0,1
7 3
0,4
0,2
11
10
Évolution du sCTX (%)
0,6
30
30
Hanche
-17,8 %
Évolution du P1NP (%)
80 60 40
-74,5 %
-75,4 %
-58,1 %
-66,2 %
20
Stabilité
Gain
21/35 (60 %)
11/35 (31 %)
22/35 (63 %)
0 0
10
60
180
270
365
(ET [%]
23,7
14,4
15,4
69,3
29,1)
Jours
11/35 (31 %) ASBMR 2009 - D’après Tuthill K. et al., Cleveland, États-Unis, abstr. FR0351, actualisé
Combinaison PTH et acide zolédronique? 412 femmes ménopausées (âge : 65 ans) ostéoporotiques PTH + acide zolédronique (n = 137), PTH seule (n = 138) et acide zolédronique seul (n = 137) Variations DMO à 1 an
Variations DMO (%)
ZOL 5 mg + PTH(1-34) 20 µg 9 8 7 6 5 4 3 2 1 0
PTH(1-34) 20 µg
ZOL 5 mg
3 2,5 2 1,5 1 0,5 0
13
26
39
52
Rachis lombaire Semaines
0
0
13
26
39
52
Fémur total Semaines
ASBMR 2009 - D’après Cosman F. et al., New York, États-Unis, abstr. 1025, actualisé
Après une séquence thérapeutique initiale, l’évolution de l’ostéoporose peut être Favorable
Absence de nouvelles fractures Amélioration ou stabilisation de la densité osseuse
Le deuxième traitement peut avoir plusieurs objectifs Prolonger le résultat initial Adapter le traitement à l’évolution du risque (risque de fracture de l’ESF)
1- Prolonger le résultat initial, avec une rotation des traitements THS
---------------------------
Raloxifène (Sein++)
Raloxifene
-------------------------
Bisphosphonates (FP++)
Bisphosph
-------------------------
Ranelate de strontium (?)
2- Adapter le traitement à l’évolution des risques Le risque de fracture de l’ESF croît avec l’âge, le handicap neurosensoriel… mais aussi celui de phlébite/EP Raloxifene
70 ans
Bisphosphonates
Ibandronate
70 ans
Autre BP
Après une séquence thérapeutique initiale, l’évolution de l’ostéoporose peut être Défavorable
L’évolution de l’ostéoporose peut être
Défavorable
- Nouvelle(s) fracture(s) non traumatique +++ - Diminution significative de la densité osseuse
Après 5 ans de Risédronate
50
(fx=107)
Contrôle
*
Risédronate 5 mg
40
*
49 %
50 %
30 (fx=65) 20 10 0 0
1
2
3
4
5
ans
* p < 0.001 Hosking D. et al., P.577W, ECTS 2001
S Adami, JBMR, 2006
Dans la vraie vie
ICARO Study
880 patientes ménopausées fracturées avec un traitement antirésorptif depuis 1 à 5 ans alendronate (53.2%), risédronate (15.8%) ou raloxifène (11.2%) suivi médian 2 ans (1- 4.5 ans)
25% des patientes avec une nouvelle fracture Incidence fracturaire annuelle 8.9%
Après une séquence thérapeutique initiale, l’évolution de l’ostéoporose peut être Défavorable
Mauvaise observance
Efficacité insuffisante
Mauvaise observance 1-Avouée par la patiente 2-Suspectée lors de l’interrogatoire réticences exprimées vis-à-vis du traitement terrain intolérant et allergique (à tout) troubles mnésiques rendant l’observance impossible 3-Confirmée éventuellement par l’évolution défavorable des marqueurs?
Les marqueurs du remodelage osseux augmentent après la fracture
76 malades, 77 ans, 28 fractures vertébrales, 46 fractures de l’ESF NTX : 86 ± 58
->
214 ± 137
CTX : 416 ± 300
->
850 ± 611 Tahara et al. J Orthop Sci 2007
Mauvaise observance 1-Réticences : pédagogie, délai de réflexion, reprendre le même traitement 2- Effets secondaires : les analyser puis changer de molécule, mais pas forcément de classe 3- Oublis répétés, troubles mnésiques, patiente polymédicamentée : voie IV, voie SC
Efficacité insuffisante
Pourquoi?
Sous estimation initiale de la gravité de l’ostéoporose Fractures vertébrales méconnues (Radio, VFA) Dépression de la formation : corticothérapie, alcoolisme Handicap neurosensoriel majeur avec chutes répétées Evolution de la perte osseuse en raison de comorbidités Corticothérapie ++++ Anti estrogènes , surtout anti androgènes (+++) Consommation de toxiques
Efficacité insuffisante Ostéoporose, grave avec plusieurs fractures vertébrales Privilégier le tériparatide BP injectables si refus ou CI du tériparatide Ostéoporose grave avec plusieurs fractures périphériques Tériparatide si 2 FV Discuter Zoledrolate ou Denosumab