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Loki Lonestar
Loki Lonestar Get
Sam uel Dega sne Maryl ène Eytier
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Nutcase, Micropoint, Lady La Fée, HeYs, Screwdrivers… En 20 piges, le performeur a eu cent vies. Et autant de hors-pistes musicaux… Réunionnais, c’est exilé entre Paris et Berlin qu’il sort son 3 e album solo, version rock électro.
En mal de qualificatifs, ceux souhaitant un mot-totem pour justifier une cohérence dans le parcours déglingué et labyrinthique de Loki Lonestar se retrouveront vite à sec. Hébétés. Hagards. Mais sûrs d’avoir vécu une expérience singulière... Essayons : “polymorphe” ? “Caméléon” ? “Suractif” ? Décidément trop kawaï pour étiqueter le Gremlin, dont le pseudo partage une paternité avec le frère de Thor et la croisade du cow-boy... Un intitulé résumant pourtant déjà le geste : une association antinomique, avec l’énergie tribale comme fil rouge. Un boum-boum punk et synthétique qui empeste la fin du monde... On ne fera pas mieux. Lui ? Il préfère parler de son art comme d’un « voyage initiatique ». Et à défaut de promettre de grands soirs, assure au moins les petits matins qui chantent. À coups de boutoir et de gueule de bois (pas étonnant d‘y croiser Didier Super, autre destructeur de mondes). Le but de Loki ? « Créer une musique universelle ». À bien y regarder on décèle dans le performeur une dimension de prédicateur échappé de films comme Mad Max ou Apocalypto, évoquant sans cesse « l’éveil nécessaire des consciences », sa «transformation intime pour ensuite assurer
celle du monde »… On se rappelle surtout que Loki est le nom du dieu nordique de la discorde, impulsif et capable de métamorphoses, convoqué chaque fois en dernier recours pour mettre fin à des déséquilibres dont il est le plus souvent la cause.
Sa transcription musicale en fait une sorte de sorcier électro brûlant de la bande autant que la rétine, se goinfrant au buffet des Prodigy et autres Punish Yourself pour mieux pisser dans la soupière. Lonestar y parade en roi de cœur, quin’aime-pas-en-meurt. «Bien sûr que la révolution est anarchique! Mais elle est depuis longtemps en marche et laisse le choix d’y participer ou non. Nous sommes ce que nous faisons demain. » Pour preuve ? L’anagramme de son single “We Are The Future” ressemble tout de même étrangement au “WTF“ (= What The Fuck). Taquin ? On prête à l’artiste toutes les malices… L’ironie ne s’arrête pas là : Loki a participé à l’émission Popstars. Comme ça. Pour voir. Pour apporter de la diversité, de la contradiction. « Je voulais faire face en exprimant qui je suis. Sans aucun interdit. On ne peut pas à la fois critiquer un système et ne pas s’impliquer! » Le programme s’est arrêté en 2013. L’artiste, lui, a continué... Et c’est sur le paillasson de La France a un incroyable talent qu’il s’est récemment essuyé. Vous ne l’avez pas vu à la télé ? Le passage a été coupé... Loki reste en marge, le freak, dans l’angle mort de l’entertainment. Mais c’est justement son refus des normes et son rejet des standards qui lui permettent de revendiquer un « universalisme », voire qui l’ont poussé à maintenir «une curiosité envers toutes les cultures, sans exception ». La voilà, sa volonté d’inclusion à tout prix. Sa table-rase.
Au moment où on lui parle, Loki Lonestar revient d’ailleurs d’une mini-tournée en République Tchèque [un groupe hip-hop local, Sodoma Gomora, participe d’ailleurs à son album]. Cette communion apatride tant recherchée, c’est ici qu’il l’a trouvée. «C’est un public… survolté! En feu. C’est incroyable d’entrer sur scène avec une salle remplie de personnes souhaitant du lâcher-prise et de la surprise, qui souhaitent se laisser porter. » Pourtant, ses origines ne laissaient pas imaginer une greffe aussi rapide… De sa Réunion natale, il regrette d’ailleurs le «manque d’exposition et de soutien des institutions envers les scènes metal». Mais y loue une envie moins pressante de reconnaissance de la part des artistes, rendant «la musique underground plus aventureuse. Affranchis de la volonté de plaire à tout prix, nous sommes ainsi libérés des petites cases. Les mélanges et l’expérimentation sont permis… » Une absence de cages et de jugement qu’il semble également retrouver aujourd’hui à Berlin où, du chaos, est née l’urgence des rapprochements et la créativité salvatrice… Le voilà donc le leitmotiv, la genèse de sa colonne vertébrale ; ce désir de random permanent ! Car c’est bien en mixant la grammaire de différentes cultures, époques et esthétismes, que Loki Lonestar a su créer sa novlangue et la fondre dans une œuvre globale. Référencée et pourtant novatrice.
Lors de l’enregistrement censuré de La France a un incroyable talent, le juré Éric Antoine avait conclu : « Du talent, certes ! Mais je ne sais pas si la France est prête… » Croyez-vous que Loki se serait découragé ? Peuh ! « Peut-être peut-on plutôt lui demander?», avait-il alors rétorqué, du défi plein les yeux. C’est en mars que l’artiste aura sa réponse. i
Show No Mercy Atypeek music
«Une invitation électro-rock vaudou à la transe et la danse… » C’est sur cette accroche que se refilent sous le manteau les premières copies du brûlot. Car il y a du Marilyn Manson dès l’introductif “The Insergent” avec ses gueulantes de fond de gorge et son pont dominé par un Didier Super foutraque. On croit entendre La Phaze sur “Sehnsucht” (dont le substantif allemand fut aussi utilisé pour un des albums de Rammstein). Si on oubliera le dispensable “Mellow D” avec Manu (ex-Dolly), c’est par contre sur le single shakaponkien “We Are The Future” que le cri de ralliement fera corps... Idem avec “Ambition” qui semble emprunter ses explosions à un Nine Inch Nails remixé par les Chemical Brothers. Quant à “Play”, le titre calme momentanément le jeu à la Filter… L’ensemble évoque ainsi l’excellente B.O. du film (raté) Spawn, mélangeant—en guise de clin d’œil à celle rock/rap de Judgment Night—le meilleur des groupes metal/électro des 90s... Qui s’en plaindra ?