Haute-Garonne, patrimoine et art de vivre

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Haute-Garonne

patrimoine & art de vivre

loubatières



Histoire

Préhistoire haut-garonnaise : le peuplement d’une vallée 7 Les temps antiques : Volques, Convènes et Romains 11 Le millénaire médiéval : des Wisigoths au XVe siècle 19 Renaissance et temps modernes : retour sur l’Ancien Régime entre Lengadòc et Gasconha 29 La période révolutionnaire : naissance de la Haute-Garonne 35 Le XIXe siècle et le temps des notables : révolutions et transformations 42 Le XXe siècle 57



Le millénaire médiéval : des Wisigoths au XVe siècle Si l’on en croit Abel Hugo, frère du célèbre écrivain, dans son guide Département de la Haute-Garonne (1835), « À part quelques ruines d’églises et quelques débris de châteaux forts du Moyen Âge » il ne resterait que très peu de vestiges de cette période. Faisait-il référence, parmi tant d’autres exemples, à l’église Saint-Martin de Mauran, à la chapelle SainteMatrone de Mazères qui dépendait des Templiers de Montsaunès perdue au milieu des champs là où était initialement le village ? Sans doute ne connaissait-il pas les églises fortifiées qui ont résisté aux affres des conflits depuis l’époque médiévale comme Saint-Victor de Montesquieu-Volvestre, Saint-Pierre du Plan, ou bien encore Saint-Martin des Hospitaliers de Saint-Jean de Jérusalem à Poucharramet, sans oublier toutes les églises médiévales comme la basilique romane Saint-Just de Valcabrère ou l’église gothique Notre-Dame-des-Miracles d’Avignonet-Lauragais où se sont écrites des pages noires du catharisme… Quant aux « débris de châteaux forts » nous pouvons voir ceux du château comtal de Salies-du-Salat, de Roquefort-sur-Garonne qui, à la confluence de la Garonne et du Salat, permettait de surveiller la navigation par radeaux, du château comtal d’Aurignac construit dans les décennies 1230-1240 par Bernard IV comte de Comminges, de Fronsac… Quoi qu’il en soit, ces mots nous ramènent au Moyen Âge, période de mille ans qui commence par les invasions barbares au Ve siècle, que les remparts de Tolosa et Lugdunum ne contiennent pas, et à la chute de l’Empire romain d’Occident, dont le dernier empereur n’avait guère d’influence sur les provinces de Narbonnaise et de Novempopulanie. Au cours de ce millénaire médiéval, une nouvelle civilisation émerge, de nouveaux pouvoirs et structures politiques se mettent en place, transformant considérablement et profondément le territoire et ses habitants… C’est aussi à partir du XIe siècle que s’élèvent les églises, romanes puis gothiques, des villes et campagnes de Haute-Garonne. Les clochers se dressent au lointain, le son des cloches rythmant la vie quotidienne et religieuse, et leur hauteur devient signe de puissance de la communauté. De ce foisonnement architectural il demeure la cathédrale Saint-Étienne reconstruite à partir de 1071 et dont les travaux s’achèvent au XVIIe siècle, celles de Saint-Bertrand-deComminges et de Rieux-Volvestre, la basilique Saint-Sernin où convergent les pèlerins, les collégiales à l’instar de Saint-Pierre et Saint-Gaudens, de style roman, ou celle de Saint-Félix-Lauragais de style gothique, les abbatiales comme l’église des Jacobins, sans oublier les nombreuses et parfois modestes églises médiévales des villages de Haute-Garonne.

Page de gauche. La nef romane de la basilique SaintSernin à Toulouse. Gravure des ruines du château de Castelvieilh dans le Luchonnais, par Louis-Philippe Bichebois (1801-1850).

Des invasions barbares à l’An Mil « L’invasion des barbares visita de bonne heure la Narbonnaise, écrit V. A. Malte-Brun dans La France illustrée (1881), dès 405, les Vandales de Crocus viennent y tourbillonner et se faire écraser près d’Arles par le second Marius. Le gros de leur nation arrive l’année suivante, passe sur le pays 19


Première page du registre d’arrêts du Parlement de Toulouse de l’année 1572.


Renaissance et temps modernes : retour sur l’Ancien Régime entre Lengadòc et Gasconha. Au XVIe siècle, début de l’époque moderne, les comtés, vicomtés, jugeries que nous avons vus au Moyen Âge sont désormais des provinces rattachées au royaume de France mais disposant d’une certaine autonomie administrative à travers le Parlement de Toulouse, les pays d’États, les pays d’élections, les municipalités ou encore les communautés d’habitants dans les villages. En 1539, François Ier signe l’ordonnance de Villers-Cotterêts qui impose la rédaction des actes de justice « en langage maternel français ». Néanmoins en Lengadòc et en Gasconha – les deux territoires étant délimités par trois obélisques du XVIIe siècle que l’on peut voir à Portet-sur-Garonne, (chemin du Castelet), entre Noé et Longages (le long de l’A 64) et à SaintÉlix-le-Château (aussi le long de l’autoroute) – les parlers languedociens et gascons se maintiennent dans les campagnes mais aussi dans les villes ; les Jeux floraux dont la fondation est attribuée à Clémence Isaure en 1323 à Toulouse, devenus Académie par lettres patentes en 1694, perpétuent la langue d’oc. De la Renaissance au Siècle des lumières, les architectes et ingénieurs transforment et aménagent l’espace, tracent ou améliorent de nouvelles voies de communication reliant Toulouse aux autres villes (il fallait sept jours et demi pour aller à Paris et trois pour Bayonne), ponctuées de relais de poste et toutes plantées d’arbres à partir de 1720, construisent des infrastructures dont l’une des plus remarquables est le canal royal de Languedoc.

Clémence Isaure, considérée comme la restauratrice des Jeux floraux. Peinture de Jules Lefebvre (1834-1912), huile sur toile.

Essor économique le long de la Garonne, entre pays de Cocagne et Pyrénées : pastel, céréales, marbres et mines… Connu et utilisé depuis l’Antiquité en tant que plante médicinale et tinctoriale, le pastel connaît au XVIe siècle un essor considérable faisant du Lauragais le pays de Cocagne. Cultivé dans un triangle Toulouse, Albi, Carcassonne, la transformation fit la richesse des marchands toulousains dont témoignent toujours les splendides hôtels particuliers de Bernuy ou d’Assézat. Au dernier tiers du XVIe siècle, le pastel fut détrôné par la culture de l’indigotier dans les territoires des Indes occidentales, ce qui ruina l’activité pastelière. Néanmoins l’activité céréalière autour de Toulouse et dans le Lauragais reste une importante activité agricole qui fournit du travail aux campagnes, aux moulins comme ceux de Toulouse (Bazacle et château Narbonnais). Les excédents sont exportés par de lourds charrois vers les provinces déficitaires. En 1549, la bourse des marchands est créée. L’exploitation des marbres reprend dans les carrières de Sost, Signac, Cierp-Gaud (marbre dit rouge sang de bœuf ), Barbazan-Sauveterre (brèche grise des Pyrénées et Noir de Comminges), Marignac, Bouts, Lez et surtout 29


Chênes dans la forêt départementale de Buzet.


Nature et paysages Les Pyrénées en fond de décor 57 Au fil des saisons 59 La Garonne, nécessaire et capricieuse 63 Une végétation et une faune diversifiées 66 Paysages de Haute-Garonne 72



Les Pyrénées en fond de décor De moins de 100 mètres à sa limite nord, à l’aval de Villemur-sur-Tarn, à 3 222 mètres au Pic de Perdiguère, point culminant du Luchonnais : la Haute-Garonne présente une belle amplitude altitudinale. Des hauteurs dominant Toulouse, les Pyrénées dessinent le fond lointain, surligné de blanc jusqu’en mai, d’un premier plan de plaines et de collines. Remontant la vallée de la Garonne, les montagnes peu à peu se rapprochent mais le paysage pendant un long moment ne change guère. Et soudain, passé Martres-Tolosane, le trajet s’anime : l’autoroute qui filait droit se met à serpenter entre des hauteurs boisées, dominées par la masse imposante et proche du Cagire. L’entrée dans la montagne est brutale, mais la topographie hautgaronnaise ne se réduit pas à cette simple confrontation : haut et bas pays présentent en leur sein bien des nuances, qui concernent aussi la géologie, contribuant à la diversité de paysages. Les Pyrénées haut-garonnaises sont peu étendues, dans un département qui s’effile vers le sud, mais elles possèdent tous les attributs de la haute montagne, y compris de petits glaciers, aujourd’hui menacés de disparition par le réchauffement du climat. Les plus hauts sommets appartiennent à la zone axiale pyrénéenne, ensemble géologique constitué de granites, schistes et calcaires paléozoïques. À l’avant, dans les secteurs de Saint-Bertrand-deComminges et d’Aspet, affleurent les terrains un peu plus récents de la zone dite nord-pyrénéenne, calcaires plissés selon un axe est-ouest. Le relief a été façonné par les torrents mais aussi les glaciers quaternaires. On doit à ces derniers, outre le creusement de cirques à haute altitude comme les Boums de Venasque, la morphologie particulière de la haute vallée de la Garonne, alternant petits bassins – Marignac, Frontignan-de-Comminges – et passages resserrés comme à Saint-Béat. Les Petites Pyrénées, modestes alignements culminant à 600 m, constituent l’ultime avant-poste de la chaîne, que la Garonne tranche par la cluse de Boussens.

Page de gauche. Brumes matinales dans le Comminges. Ci-dessous. Promenade aux environs de Cintegabelle.

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Ci-dessous. La végétation profite des moindres interstices entre les briques pour se développer. En bas. Dès la fin de l’hiver, sur les bords du Touch et à la Ramée, on peut admirer dans les secteurs de prairies humides la floraison des fritillaires pintades, espèce protégée en Haute-Garonne.

Même le faucon pèlerin y trouve gîte et nourriture remplaçant les parois rocheuses dont il était coutumier par les clochers des églises et cathédrales ! La végétation colonise rapidement les friches industrielles ou urbaines, notamment les buddleias, raisins d’Amérique, ou les daturas stramoines. Les nombreux espaces verts toulousains comme le Jardin des Plantes, le parc de La Reynerie ou la base verte de La Ramée à Toulouse renferment beaucoup d’espèces d’arbres introduites auxquelles la faune locale (écureuils, chouettes, pics) s’est bien adaptée. Mais on peut aussi trouver en périphérie toulousaine des espèces rares et protégées comme le rosier de France, la jacinthe de Rome ou l’orchis lacté.

Les espaces naturels protégés Une superposition d’espaces protégés La Haute-Garonne possède une multitude d’espaces protégés comme les Zones Naturelles d’Intérêts Écologique Faunistique et Floristique (ZNIEFF) (21 % du territoire), les 12 zones Natura 2000, les 14 arrêtés préfectoraux de biotope (comme le Ramier de Bigorre à l’aval de Toulouse), les 2 réserves naturelles régionales comme la confluence Ariège/Garonne, les 3 réserves biologiques domaniales ou forestières gérées par l’ONF (comme la montagne de Rié et ses genévriers thurifères, unique station pour la région)… Natura 2000 et les procédures de concertation La présence en Haute-Garonne de 62 espèces animales (dont 34 espèces d’oiseaux) et de 4 espèces végétales inscrites dans les directives européennes « Habitats, Faune, Flore » de 1992 et « Oiseaux » de 1979 a justifié le classement de 7,5 % du département dans le cadre de Natura 2000 (12 sites). Cette directive impose le maintien de ces habitats et de ces espèces dans un bon état de conservation tout en réalisant un travail de concertation au sein de chaque site lors de l’élaboration du Document d’Objectifs (DOCOB). Les principaux habitats concernés sont les corridors fluviaux, les zones humides, les pelouses et les prairies, les forêts et les habitats rocheux. Les espèces les plus rares ou menacées font aussi l’objet de Plans Nationaux d’Action (PNA), c’est le cas de l’ours, du desman des Pyrénées, des chauves-souris, du gypaète barbu, du grand tétras, du lézard des Pyrénées ou du saumon atlantique. La trame verte et bleue en Haute-Garonne Une des dernières politiques mises en œuvre en matière d’environnement est la mise en place de la Trame verte et bleue (TVB) en 2014. Elle a pour objectif de favoriser ou de restaurer les continuités écologiques permettant la circulation d’un noyau de biodiversité à un autre. Cette nouvelle procédure est très originale par sa volonté de ne pas se contenter de prendre en compte les « hauts lieux » de biodiversité, mais au contraire la « biodiversité ordinaire » tout aussi menacée par l’homogénéisation des territoires agricoles ou les ruptures de trames écologiques engendrées par l’urbanisation.

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Une végétation et une faune diversifiées

Ci-contre. Busard Saint-Martin mâle. L’espèce est en déclin important à l’échelle nationale. En Haute-Garonne, on peut apercevoir son vol lourd au-dessus des parcelles cultivées sur lesquelles il prélève sa nourriture. Ci-dessous. Il faut grimper sur les coteaux situés au sud de Toulouse, pour mieux comprendre le rôle de corridor que jouent les cours d’eau et leur ripisylve serpentant à travers la plaine. Plus cette ripisylve est large et préservée, plus les écosystèmes présents seront riches.

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Économie La géographie et les ressources 85 L’économie des siècles passés 88 L’économie aujourd’hui 92 l’aéronautique 93 le secteur spatial 96 l’électronique, l’informatique, les communications 98 L’industrie chimique… 101 d’autres filières économiques 105 les supports du développement économique 108

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la haute-garonne – patrimoine & art de vivre

Le secteur spatial

En haut. Salle des prévisions au centre Météo-France de Toulouse. Au-centre. Suivi depuis le Centre spatial de Toulouse de la 1re opération de recette en vol de l’EPM (European Physical Module) installé dans le laboratoire Columbus de la station spatiale internationale. En bas. La cité de l’Espace à Toulouse.

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Si l’aéronautique haut-garonnaise a derrière elle une longue histoire, celle de l’espace est plus récente mais tout aussi remarquable. C’est dans les années 1960 que commence l’aventure spatiale à Toulouse. La France a alors une vision de sa politique industrielle : le 4e plan (1962-1965) décide en 1964 de la localisation du Centre national d’études spatiales (Cnes) à Toulouse. C’est l’élément fondateur, au même titre que le marché dévolu à Latécoère en 1917 l’a été pour l’aéronautique. L’installation du Cnes se fera peu à peu entre 1968 et 1972. Très vite, sous la houlette d’Hubert Curien qui deviendra ministre de la Recherche quelques années plus tard, le Cnes met en place un important programme de lanceurs et de satellites. Des industriels s’y associent, tels Alcatel, Matra, Arianespace ou Thomson. Des succès s’ensuivent qui portent des noms que le public apprend à connaître : les balises Argos, Spot image, Ariane, Topex-Poseidon, Rosetta… Le département devient une place forte en matière d’observation de la terre, de nombreux laboratoires se développent : le Centre d’Étude Spatiale des Rayonnements, le Groupe de Recherche de Géodésie Spatiale, l’Observatoire du Pic du Midi… Ce pôle sera conforté par l’arrivée de Météo France en 1991 (en 1982 pour le département Recherche et l’École) : c’est un acteur majeur de l’observation terrestre qui a lancé en 1977 Météosat, le premier satellite météorologique géostationnaire européen. Aujourd’hui l’industrie spatiale française représente un chiffre d’affaires de 6,9 milliards, le Cnes est très présent dans le secteur de l’observation, des télécommunications, des nouveaux lanceurs et de l’exploration (Rosetta, mission martienne). Les deux maîtres d’œuvre implantés à Toulouse, Airbus DS et Thales Alenia Space France, emploient localement 5 000 salariés. Le secteur a de belles perspectives de développement – les besoins au niveau mondial sont estimés à 1 400 satellites pour les dix prochaines années – mais le contexte concurrentiel et l’approche « business » de l’espace obligent à revoir les modèles industriels (arrivée des Chinois et des Indiens, nouvelles demandes des grands acteurs de l’internet…) et à intégrer de nouvelles exigences de rentabilité. L’innovation est ici encore la clé du succès économique, cela est aussi vrai pour la conception des nouveaux satellites que pour celle des lanceurs ou pour le montage de nouveaux modèles économiques. Avec aujourd’hui 12 000 emplois répartis dans 260 entreprises, la métropole haut-garonnaise est le leader européen pour la conception et la réalisation de systèmes spatiaux et de leurs applications.

Ci-contre. Mise en place des ailes du générateur solaire et essais de fermeture avant fixation sur le satellite Microscope au Centre Spatial de Toulouse.




D’autres filières économiques Derrière ces grands secteurs de l’économie départementale, se trouvent des filières certes de moindre ampleur mais tout aussi indispensables pour l’avenir du territoire : elles sont issues du passé, comme la filière textile ou la filière bois, ou liées à l’évolution récente de la société, comme le tourisme. Le tourisme est un secteur important de l’économie départementale ; il permet notamment de soutenir l’emploi local et de rééquilibrer l’activité entre le sud et le nord du territoire. Au début du XIXe siècle, le pyrénéisme, jusqu’alors réservé à une élite intellectuelle, cède le pas à un tourisme plus bourgeois grâce à la pénétration du chemin de fer. Le thermalisme suscite un engouement « mondain » et les cinq stations thermales de la Haute-Garonne accueillent plus de 50 000 visiteurs par an. Le plateau de Superbagnères est à la mode dès 1912, bien avant la construction du Grand Hôtel et de la première télécabine en 1922. À cette époque, se profile un nouvel engouement pour le ski, avec un premier championnat en 1923 dans le massif de Céciré, sur la pente de Rioumaynade. Plus tard, dans les années 1960, de grandes championnes – Isabelle Mir, Annie Famose et les Luchonaises Ingrid et Britt Lafforgue – contribueront à la promotion des stations pyrénéennes. Aujourd’hui, le fort intérêt de la société pour tout ce qui touche à la nature et à la santé concourt au développement du tourisme pyrénéen. Audelà de la saison d’hiver portée par le ski, avec les stations de Peyragudes, de Luchon-Superbagnères, du Mourtis et de Bourg-d’Oueil, les activités de randonnée, de cyclotourisme, de spéléologie et d’escalade attirent un large public tout au long de l’année. Le thermalisme, moins en vogue de nos jours, s’est tourné quant à lui vers les cures médicalisées (13 000 curistes à Bagnères-de-Luchon). Loin des sommets, la voie d’eau du canal du Midi développe le tourisme fluvial et la « Via Garona » ses 200 km de parcours cyclable, renforçant par ailleurs l’intérêt du public épris de nature. Depuis plusieurs années, le département conforte par ailleurs le tourisme en développant la mise en valeur d’un patrimoine fort diversifié depuis les sites de Saint-Bertrand-de-Comminges, de ses nombreux châteaux (Laréole, Merville…) et halles (Cadours, Montesquieu…) jusqu’aux grottes préhistoriques comme celle d’Aurignac célèbre pour avoir donné son nom à l’époque aurignacienne, l’une des plus remarquables de l’âge de pierre. La métropole joue aussi son rôle grâce à son patrimoine et à son offre originale en matière de tourisme industriel autour de l’aéronautique et de l’espace. En 2015, 65 000 personnes travaillent dans le tourisme dont 19 000 dans l’hébergement et la restauration.

Page de gauche. La station du Mourtis, sur la commune de Boutx étend son domaine skiable entre 1 350 m et 1 860 m d’altitude. Ci-dessous. Canon à neige à la station de Peyragudes (de 1 458 m à 2 261 m). Elle réunit depuis 1988 les stations de Peyresourde (Hautes-Pyrénées) et des Agudes (Haute-Garonne).

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Concert de clôture du festival 31 Notes d'été au château de Laréole, 2016.


Culture

les arts de la scène et de la rue 114 musique(s) ! 124 faire des images 130 littÊrature 138 des accents et des langues 143


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En haut. Le logo du Ring de Blagnac, lieu créé et géré par le Théâtre2 l’Acte, est signé Ronald Curchod. Ci-dessus. 1572, Massacre à Paris, de Christopher Marlowe, création de la compagnie Théâtre2 l’Acte, fondée en 1968 par Michel Mathieu.

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20 heures devant mille personnes. Des gangs d’étudiants font la claque ou noient les acteurs sous les huées. Parfois, il y a des spectacles d’automates, des bals privés et on tire des feux d’artifice ! Bientôt, l’opéra devient le spectacle à la mode et se constitue peu à peu un fort public d’aficionados aux jugements terribles et définitifs. Puis, ce sera le règne de l’opérette et du boulevard. Cette brève histoire des planches nous conduit à la fin de la guerre, en 1945, quand quatre étudiants du conservatoire, Sarrazin, Duby, Nègre et Turck, sortent remontés comme des pendules d’une représentation d’Hernani au Capitole. Les voilà bataillant pour faire vivre leur propre troupe, le Grenier de Toulouse, avec les moyens du bord. Ils font faillite, se redressent, repartent, investissent l’Espoir de la rue du Taur, montent sur les planches des petites villes, embauchent Daniel Sorano, se font construire un théâtre à colonnades sur les allées Jules-Guesde, dans le quartier des jardins, des étudiants en médecine et du Muséum, puis un nid à la Digue. Ils, c’est surtout Maurice Sarrazin, qui raconte ces tribulations comme si c’était un roman, « imaginaire vie ». Il a formé à Paris et à Toulouse un bon nombre de comédiens, des aigles et des Stan Laurel, et certains sont devenus à leur tour d’étonnants metteurs en scène et directeurs de théâtre. Le Sorano, une fois Sarrazin parti, aura connu toute sorte d’incarnations et de troupes. Jacques Rosner a marqué la scène nationale (qui s’est transportée avec lui au TNT) avec un ton grave et ses riches mises en scène d’O’Neill et Hugo. Matras et Batlle, ayant hérité des clefs du Grenier au début des années 2000, ont rempli le théâtre, soir après soir, avec des facéties ou des drames légers. Puis, durant huit ans, le Sorano est devenu le fief baroque et slave de Didier Carette, d’Ex-Abrupto et de leurs invités, le lieu de vastes projets ébouriffants autour d’une Cerisaie ou d’un cabaret kafkaïen. Celui qui reprend le flambeau avec ses propres idées et obsessions, l’envie de donner des outils à la jeunesse et des (l)armes aux spectateurs, s’appelle Sébastien Bournac. Dans le bouillonnement de 1968, des artistes voudront changer radicalement la donne, bousculer, outrager, réveiller la société, ou lui rendre sa vérité poétique ; le théâtre 2 l’Acte de Michel Mathieu, aujourd’hui établi au Ring de la route de Blagnac, le théâtre du Pavé de Paul Berger (Francis Azéma le dirige à présent), la Cave Poésie de René Gouzenne. La scène européenne du Garonne, un théâtre installé depuis 1988 dans les bâtiments d’une ancienne usine de pompage des eaux du fleuve, produit et présente des formes contemporaines. Il y a ceux qui trouvent ça difficile, pointu, snob, d’un avant-gardisme forcené, et les autres qui s’abonnent année après année parce qu’ils savent qu’on les nourrira là de spectacles intransigeants et parfois drôles. Une fois avalée la bière sur la terrasse audessus de la digue et du fleuve, avec vue sur le pont des Catalans, vous descendez dans une salle de brique et de fer où vous attend un collectif flamand, bosniaque, new-yorkais ou parisien, de théâtre ou de danse, sans metteur en scène ou avec un visionnaire à sa tête, qui va jouer son existence sur le plateau en mode burlesque ou tragique, sans parole ou le verbe haut. On donne ici des vaudevilles étranges et des cérémonies effarantes qui mordent dans le gras, défendent la langue ou la liberté, montrent le corps comme vous ne l’avez jamais vu, en utilisant des dispositifs vidéo ou rien.


La Revanche des semis, installation du Phun Ă Rieux-Volvestre dans le cadre des Pronomade(s) en 2016.



De la terre à l’assiette Jardin divers 152 Grandes cultures et pop culture 161 La clef aux pâtres 163 Des débouchés et des bouchers 165 L’apport de la forêt 166 Le 31, bel et bien Bio 168 Courts circuits 169 La folie locavore 170 Et demain ? 171 Cassoulet : le plat-pays 173 Marchés des villes, marchés des champs 176


la haute-garonne – patrimoine & art de vivre

La ferme du Petit Renaudis à Rieux-Volvestre accueille des stagiaires en woofing. Là, ils peuvent s’occuper des brebis de race Manech (têtes noires et têtes rousses), qui est une pure race laitière du Pays Basque.

Agrotourisme : un truc de wwoof Aujourd’hui encore, une partie des citadins du département est issue, à une ou deux générations près, du monde paysan. Pourtant, les urbains ont généralement rompu le lien avec la ruralité. D’où l’utilité du réseau Bienvenue à la ferme, qui donne depuis 1988 à tout un chacun l’occasion de pénétrer dans une exploitation agricole, de parler avec ses paysans et de mettre un visage sur les produits qu’il achète. En Haute-Garonne, ce réseau animé par la chambre d’agriculture réunit 112 adhérents développant une activité d’accueil ou de vente directe, et signataires d’une charte de qualité. Visites, balades, rencontres, nuits en gîtes ruraux, dégustations, initiations, découverte… l’éventail des offres et des animations est très large. En plus de favoriser le lien entre la campagne et la ville, ces opérations offrent aux paysans de nouveaux débouchés.

Les nouvelles générations ont trouvé leur propre moyen de renouer le dialogue avec les paysans et de découvrir leur cadre de vie : le wwoofing. Comme son nom le laisse supposer, ce mouvement ne vient pas d’Occitanie mais d’Angleterre. WWOOF est l’acronyme de World Wide opportunities on Organic Farms. Sa philosophie repose sur un échange de bons procédés : le visiteur offre sa force de travail 4 à 7 heures par jour et, en échange, le paysan assure le gîte et le couvert. La chose est ultra-développée en Angleterre et en Australie, et commence à gagner la France. Dans le département, on compte une quarantaine de fermes sur le seul réseau wwoof France, dont une petite dizaine dans les environs immédiats de la Ville rose. 162


La clef aux pâtres En montagne, la pérennité des élevages ovins dépasse largement les seuls intérêts de ceux qui y vivent. Le pastoralisme, puisque c’est de cela qu’il s’agit, joue en effet un rôle clef dans le maintien de l’équilibre fragile entre les trois piliers de la montagne : économie, tourisme et environnement. Par chance, les intérêts des acteurs de chacun de ces piliers sont la plupart du temps identiques. Non content de participer à la croissance harmonieuse des ovins, les estives sont le terrain de jeu favori des randonneurs et bénéficient, pour quelques-unes d’entre elles, de l’inscription au programme européen Natura 2000. Autre exemple : les ovins, qui se nourrissent des tapis herbeux des estives, maintiennent l’herbe rase, matelas indispensable à la bonne tenue de la neige et donc à la pratique du ski (trois estives du département sur quarante au total sont situées sur des domaines skiables). L’activité des bergers de montagne dans les cantons de Bagnèresde-Luchon, Saint-Béat et Aspet, participe également à la protection de l’environnement, à la lutte contre la désertification et prévient aussi bien les avalanches que les feux de forêt. Pourtant, depuis le début du XXe siècle, la forêt ne cesse de progresser sur les terres pastorales, occupant des espaces vidés de ses paysans, dégradant les abords des villages de montagne et diminuant l’attractivité de ces territoires. Plusieurs dispositifs ont été mis en place, par la Chambre d’agriculture comme par le Conseil départemental, pour maintenir ces activités et assurer la cohérence du développement rural. Estive sur le Cagire. Brebis et agneaux au salon « Les Pyrénéennes » à Saint-Gaudens en 2015.

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TABLE DES MATIÈRES histoire par Jean-Christophe Sanchez préhistoire haut-garonnaise : le peuplement d’une vallée les temps antiques : volques, convènes et romains le millénaire médiéval : des wisigoths au xve siècle renaissance et temps modernes : retour sur l’ancien régime entre lengadòc et gasconha la période révolutionnaire : naissance de la haute-garonne le xixe siècle et le temps des notables : révolutions et transformations le xxe siècle

7 11 19 29 35 42 57

nature et paysages par Gérard Briane & Bertrand Desailly les pyrénées en fond de décor au fil des saisons la garonne, nécessaire et capricieuse une végétation et une faune diversifiées paysages de haute-garonne

57 59 63 66 72

économie par Alain Dreuil et Delphine Bouillier la géographie et les ressources l’économie des siècles passés l’économie aujourd’hui l’aéronautique

85 88 92 93


le secteur spatial l’électronique, l’informatique, les communications l’industrie chimique d’autres filières économiques les supports du développement économique

96 98 101 105 108

culture par Greg Lamazères les arts de la scène et de la rue musique(s) ! faire des images littérature des accents et des langues

114 124 130 138 143

de la terre à l’assiette par Sébastien Vaissière jardin divers grandes cultures et pop culture la clef aux pâtres des débouchés et des bouchers l’apport de la forêt le 31, bel et bien bio courts circuits la folie locavore et demain ? cassoulet : le plat-pays marchés des villes, marchés des champs

152 161 163 165 166 168 169 170 171 173 176


Haute-Garonne patrimoine & art de vivre

Jean-Christophe Sanchez historien

Gérard Briane géographe

Bertrand Desailly géographe

Alain Dreuil ingénieur

Delphine Bouillier archiviste

Greg Lamazères journaliste

Sébastien Vaissière journaliste

La Haute-Garonne a été créée en 1790, mais ses racines plongent jusque dans la Préhistoire et le département conserve les traces des riches influences politiques, économiques et culturelles qui se sont succédé sur son sol au cours des millénaires. Sa géographie elle-même, depuis la haute montagne des Pyrénées et les coteaux du Lauragais jusqu’à la vaste plaine de la Garonne, reflète sa diversité. Diversité des paysages, de la faune et de la flore, mais aussi des activités humaines. L’agriculture d’abord, et la manne du pastel à la Renaissance ne doit pas faire oublier les activités ancestrales de cultures céréalières et d’élevage toujours florissantes. L’industrie ensuite, qui n’a cessé de se développer depuis le début du XXe siècle avec l’aviation, la chimie, l’espace, les nouvelles technologies… L’art de vivre en Haute-Garonne, qu’il s’agisse de culture ou de gastronomie, se pratique au quotidien. De nombreuses manifestations irriguent le territoire tout au long de l’année jusque dans les plus petits villages. Les produits locaux approvisionnent la table des Haut-Garonnais comme celle des restaurateurs et, sur les marchés, légumes, fromages, viandes et volailles et vins d’ici s’exposent sur les étals pour le plus grand bonheur des habitants comme des visiteurs. Multiple, à la fois rurale et urbaine, enracinée dans son histoire et tournée vers l’avenir, la Haute-Garonne est à découvrir et à redécouvrir avec ce livre.

ISBN 978-2-86266-745-4

35 € 9 782862 667454

www.loubatieres.fr

Textes de

Pont sur le canal du Midi, à Deyme (ph. Juien Gieules) ; Saint-Bertandde-Comminges (ph. CD31 / Aurélien Ferreira).


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