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L’ÉVÉNEMENT DE LA VÉRITÉ

l’univers la catégorie, somme toute fort récente, d’un « avoir-été »… et par suite celle de quelque chose comme une « histoire-de » l’univers) – ; par quoi un véritable « récit des origines », avant de s’intéresser à de (supposés) « événements » tels que le Big Bang, ou la formation de la Terre, ou l’apparition de la vie sur celle-ci, etc., doit d’abord se focaliser-sur la naissance du temps – qui n’a donc pas toujours « existé » –… et même, plus profondément, sur ce mystérieux passage d’« univers réel » à « monde vrai » qui a constitué le véritable « commencement de tout » : ce qu’on a coutume, en effet, d’appeler « origine » ; mais « origine » dont on comprend aussi qu’elle ne correspond à aucun « début » situé dans le temps (puisque ce « temps » n’avait pas « commencé » !) : si bien aussi peut-être que rédiger quelque chose comme un « récit des origines » – celui qui s’intitulerait par exemple L’Événement de la vérité – suppose de la part de son scripteur, non pas de plonger-en la dimension de ce temps : puisque d’invention relativement « récente », mais plutôt de tenter de correspondre, dans le présent d’une telle rédaction (de ce « récit des origines ») à ce qui, de cette « origine », est, d’une certaine façon, encore-toujours en venue… vers nous les scripteurs et autres « rêveurs définitifs ». Où l’on comprend aussi en quoi consiste l’« erreur » de tous ces littérateurs qui, pour écrire eux aussi leur propre « récit des origines » – où les équations ont seulement remplacé les phrases (mais c’est toujours, si l’on y songe, de la « littérature ») – vont chercher infiniment loin dans le gouffre de l’espace-et-du-temps ce qui, en réalité, est tout proche et comme « frappant à leur porte » : cette « origine » même qui, pour être « racontée », n’a nullement besoin de télescopes orbitaux et autres « chantiers de fouilles » en Afrique australe (ou orientale). Pour ce qu’écrire un tel « récit des origines » suppose, non de revenir au début de l’« univers réel » – qui, de toute façon, se dérobera toujours à nos investigations –, mais, en (r)ouvrant par un seul « regarder-vers-le-haut », toute dimension de « lointain », de (ré)éditer l’expérience du commencement du « monde vrai » ; et expérience qui, n’étant rien d’autre que celle de cet « Événement de la vérité », (re)commence en réalité tous les jours ; par quoi cette « origine », loin d’avoir eu lieu une fois « il y a très longtemps », vient en vérité à nous à chaque instant : tout se passant comme si c’était « à chaque instant » que se (re)dépliaient « devant l’attente de nos yeux » les dimensions, toujours jeunes et neuves, d’espace et de temps. Ce que l’on peut encore exprimer en disant que la « Création du monde » a lieu chaque matin que le ciel fait… lorsque sa lumière, déchirant les ténèbres grises et indistinctes de l’« univers réel », (r)amène par un premier rayon trouant en un éclair silencieux – celui-là même de cet « Événement de la vérité » – toute cette con-fusion qui précède l’aube un peu de « vrai » sur ce monde ; mais « vrai » suffisant pour que chaque chose (de ce monde) se (re)mette à correspondre-à son « ce-qu’elle-est » et, par un tel passage de « réel » à « vrai », (re)couvre sa singularité (de chose qui n’« est » que dans la mesure où elle « est ce qu’elle est »… et pas « autre chose »). Ce que j’appelle ici l’« Événement de la vérité » n’est donc rien d’autre que ce processus – dont le spectacle de l’aube n’est bien sûr qu’une image un peu plus « parlante » et colorée : « enluminure » ou « illumination » (au sens rimbaldien) – par lequel chaque chose, comme touchée par le doigt de cette « lumière du vrai », se (re)met, après ce temps de nuit et d’in-distinction, à « être ce qu’elle est » : affirmation qui peut sonner comme une formidable évidence/sublime banalité – comment les choses pourraient-elles être « autre chose que ce qu’elles sont » ? –, mais affirmation dont le « celava-de-soi », pourtant, mérite d’être interrogé à fond et en premier par tout scripteur désireux de rédiger quelque chose comme un (nouveau) « récit des origines ». Où l’on retrouve ici encore, par la précision de cet « en premier », l’idée – déjà avancée dans mon précédent Bruit du temps (au moment justement de l’introduction de cette notion, opposée à celle de « littéraire », de « scripturaire ») – que ce même « scripturaire » et son illustration ne sont rien d’autre finalement qu’une question de préséance… accordée à cet « Événement de la vérité » sur tous les autres (« événements ») –à son « commencement » sur tous les « débuts » – ; et « préséance » qui explique notamment pourquoi tout ouvrage de facture authentiquement « scripturaire » ne peut prendre à partir d’un moment que la forme d’un « récit des origines »… qui lui-même, à partir de ce même « moment » : celui donc de la séparation rédhibitoire entre « littérature » et « scripturature » – entre ouvrages qui toujours s’efforcent de (re)venir à un « début » et ceux qui se contentent de laisser-venir à eux un/le « commencement » –, ne peut en effet prendre pour titre que celui de ce (présent) Événement de la vérité. Si bien aussi que, pour un scripteur : c’est-à-dire pour un auteur ayant enfin apostasié toutes les catégories de ce « littéraire », entrer dans l’entreprise de la rédaction d’un tel Événement, c’est, comme je l’annonçais déjà dans ce Bruit du temps, prendre le risque (littéraire) de ne plus écrire que des platitudes du genre de celles, déjà ébauchées plus haut, de ce « les choses

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sont ce qu’elles sont » et autre « le temps passe » ; mais « platitudes » dont on comprend aussi, dès lors, qu’elles sont, sous leur apparence de « dire d’évidences », les formulations s’approchant peut-être le mieux de ce qui est ici appelé l’« origine » : au sens où cette « origine » n’est rien d’autre que le nom de la (divine) « éviden(ce) » qui a présidé, en le mouvement d’une séparation rédhibitoire entre « univers réel » et « monde vrai », à tout « commencement » – « Création » –… de ce « monde » même ; et « éviden(ce) » à laquelle, si l’on veut écrire quelque chose comme un (nouveau) « récit des/de l’origine », il faut bien toujours re-venir : au risque, on l’a vu, de rédiger un livre, selon, parfaitement « plat » – ce qui serait tout de même un comble pour l’(ex-)auteur de cet « Europe et la Profondeur » –… ou alors totalement illisible – un de ces ouvrages dont Kafka disait qu’ils sont « plus faits pour être écrits que pour être lus » – ; mais « risque » qui, dans les deux cas : platitude et/ou illisibilité, ne saurait réellement effrayer un « (authentique) scripteur » : pour ce que celui-ci, ayant apostasié définitivement toutes les catégories du « littéraire » : celles qui justement s’efforcent de prévenir un tel « risque », ne cherche plus qu’à s’enfoncer toujours plus avant dans ce « pays de formes grises » où il sait sûrement que l’origine a sa tanière et aussi bien, sous la forme d’un « dire-de » telles « évidences », sa nocturne racine ; et qui, ayant compris cela, ne voudrait pas, en une telle exploration de la « dimension de ce (pur) scripturaire », progresser toujours plus profondément… jusqu’à déboucher, en lâchant la bride à sa plume, au cœur de ce « royaume des évidences » (qui ne le sont en vérité que lorsqu’on les observe « de l’extérieur » : c’est-à-dire du seul point de vue – étroit, mesquin et limité (toujours peu ou prou « narcissique ») – du « littérateur ») ? Par quoi aussi, à partir d’un moment, « scripturer » et interroger le « cela-va-de-soi » de telles « évidences » viennent comme deux activités « sœurs » qui, plus on avance en l’inspection de leur rapport mystérieux, et plus le livre qui, en le mouvement d’une telle « inspection de l’inouï » (Rimbaud), s’écrit… finit par réaliser pratiquement le (scripturaire) oxymore d’un ouvrage qui, plus il dit de « platitudes », et plus il devient… illisible ; son but étant atteint lorsque son lecteur commence à comprendre que ces platitude et illisibilité ne sont en réalité que les deux facettes d’une même « vérité » plus haute : celle qui est ici appelée « origine » ; et « vérité » qui fait clairement voir (à ce lecteur) que rien n’est plus mystérieux, s’il consent seulement à s’arrêter un instant sur le « cela-va-de-soi » de leur (prétendue) évidence, que de telles « platitudes » (qui ne le sont en réalité que du point de vue « littéraire » – jamais :

« scripturaire »). Par quoi l’on comprend aussi qu’écrire quelque chose comme ce « récit des origines » – dont j’entreprends ici la rédaction sous le titre (lui aussi peu ou prou oxymorique) d’Événement de la vérité – ne suppose de la part de son scripteur que de prendre au sérieux des affirmations que la littérature regarde ordinairement comme de « (sublimes) platitudes » et, bien loin d’essayer, comme le préconise justement cette « littérature », de s’en préserver, de tenter au contraire de « creuser » en ce mode a-byssal-scripturaire leur « cela-va-de-soi » – que par exemple « les choses sont ce qu’elles sont » ou que « le temps passe » –… et cela jusqu’à leur faire avouer les gouffres qu’elles recèlent, et gouffres par où bée, en le mode du « dire silencieux » de son évidence, cette « origine » même ; et qui ne voit que, dans une telle « perspective » : en se contentant d’en suivre la « fuyante (simple et bizarre) », partir seulement de la phrase qui pose (tranquillement) que « les choses sont ce qu’elles sont »… peut très bien conduire son « (innocent) scripteur » infiniment loin dans la direction de cette « profondeur » qui bée en réalité sous une telle « platitude » ; mais platitude qui n’est « plate » que du fait qu’elle est la première « vérité » que les littérateurs, pour rédiger leur propre « récit des origines », commencent par écarter : alors qu’en son « dire-de (l’évidence) » résidait justement, exposée dans « la pleine lumière (de cette évidence) », cette « origine » même.

En cela ce qui est ici appelé « Événement de la vérité » n’est rien d’autre que le mouvement par lequel la chose est ramenée à son « évidence de chose telle qu’elle est (et pas autrement) » ; si bien que rédiger quelque chose comme un « récit des origines » – qui s’intitulerait justement L’Événement de la vérité –, c’est ne rien faire d’autre également que (d)écrire ce mouvement qui, partant de la chose revient-à la chose, et, en le « dire » de la « (de)scription » d’une telle trajectoire orbiculaire, explorer l’intervalle qui toujours se creuse entre la chose et elle-même ; et intervalle qui est celui-là même qu’on a coutume d’appeler le temps ; ce pourquoi aussi tenter de « dire » l’« origine » suppose que ce « dire » épouse la forme d’un « récit (de cette origine) » : par quoi ce « récit (de l’origine) » devient à son tour rien de moins que l’ origine du temps , c’est-à-dire de la dimension par laquelle la chose, en ce mouvement orbiculaire de volte-face, doit passer (« devenir ») pour se retrouver « face-à » son « ce qu’elle est (et pas autrement) » – « face-à » sa vérité – ; et voilà pourquoi aussi sans doute le titre de tout « récit des origines » ne peut être que celui de cet « Événement de

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la vérité » : pour ce que cette « vérité », lorsqu’elle vient (si elle vient), ne peut le faire qu’en la forme d’un « Événement », qui est la forme ordinaire, le rendu-sensible (au « cœur humain »-disant), de la manifestation de la dimension de ce temps. Rédiger quelque chose comme un « récit des origines », c’est donc toujours raconter une histoire ; mais « histoire » qui aurait (eu) lieu, non pas en quelque lointain et peu ou prou « mythologique » –car même la théorie du Big Bang est encore de la mythologie (seulement scientifique) – « avoir-été », mais en réalité tous les jours et à chaque instant : chaque fois que (re)vient nous frapper-et-saisir, de son éclair silencieuxpensif, cet « Événement de la vérité » qui fait que, parce que « le temps passe », les « choses sont (aussi) ce qu’elles sont » (et nous voilà revenus aux « banalités de base » énoncées plus haut). Tout se passant ici comme si, pour empêcher que le « monde vrai » où nous séjournons – i. e. : le monde où les choses sont « vraies » (et pas seulement « réelles ») – ne retombe dans l’informe-et-ennuyeux d’un « univers réel », il fallait qu’à chaque « époque littéraire » un scripteur recommence le long travail (scripturaire) de la rédaction d’un (nouveau) « récit des origines » : c’est-à-dire explique à ses « frères humains »-littérateurs, tel le détective Dupin au préfet de police de Poe, que cette origine, qu’ils vont, dans leurs propres « récits (des origines) », chercher si loin dans les gouffres de l’espace et du temps, a en réalité lieu tout près et à chaque instant : en le mouvement de cet « Événement de la vérité » qui, chaque jour et comme « à leur porte », (re)fait correspondre toutes choses de ce « monde-vrai » à leur « ce qu’elles sont » – à leur évidence de « choses qui sont ainsi et pas autrement » (ce qui, si l’on y songe, n’est jamais gagné : nullement garanti) –… et, en le dire (scripturaire) d’une telle « (cor)respondance) », empêche ce « mondevrai » de retomber dans l’ennui et la vulgarité d’un « univers » qui ne serait que « réel » : c’est-à-dire d’un « univers » dans lequel, si tout « arriverait », rien, faute de « vérité » à l’œuvre en lui, ne signifierait. Et telle est bien toute l’« affaire » – que Dupin qualifierait probablement de « simple et bizarre » – de la pensée : « simple » par ce qu’il ne s’agit en celle-ci que de « dire des évidences », mais « bizarre » parce que rien, si l’on y songe froidement : en « poète et mathématicien », n’est plus mystérieux que ces « évidences »… dont « l’aller-de-soi »… ne va justement, si l’on se donne seulement la peine de questionner à fond leur (apparente) platitude-et-banalité, jamais « de soi » ! La chose la plus étonnante en ce « monde vrai », c’est que les choses, tout en « passant », demeurent ce qu’elles sont – ce que j’ai pu appeler plus haut leur « permanence voyageuse » – ; mais « demeurer » qui paradoxalement, pour « demeurer », a besoin d’un tel « passer » ; c’est-à-dire besoin de ce mouvement par lequel, à chaque instant, les choses sont reconduites-à leur « ce qu’elles sont » – à leur évidence de « choses qui sont ainsi (et pas autrement) » – ; et « évidence » qui, si l’on y songe profondément, constitue tout le mystère de ce « monde (vrai) » : l’erreur commune de tous les littérateurs étant, on l’a vu, d’envisager ce « monde » sous les espèces d’une énigme à résoudre – à commencer donc par celle de son « origine » (de la « cachette » où « Dieu » pourrait bien se dissimuler) – ; et, par un tel présupposé fait, comme « sans y penser », sur ce monde, de toujours manquer ce qui est plus haut que toute « énigme » : le mystère de ce monde… qui lui n’est ni soluble ni in-soluble : seulement « mystérieux » en la forme de l’exposition en pleine lumière – celle donc du « vrai » – de l’évidence de ses choses. Par quoi l’activité de « scripturature » obtient la préséance sur celle de « littérature » : parce que elle, pour écrire son propre « récit des origines », a compris cette chose toute simple que, pour procéder à une telle rédaction, il fallait ne jamais quitter l’œuf de cette « origine » – au risque, on l’a vu, de ressasser infiniment des platitudes et autres « banalités de base » –, tandis que sa (littéraire) rivale, elle, pour rédiger ce même « récit des origines », a commencé par, ces « platitudeset-banalités », tout de suite et d’entrée en écarter l’examen – celui donc de « l’aller-de-soi » de leurs « évidences » – : se condamnant par là à manquer toujours cette « origine » – à chercher partout la cachette d’un « Dieu » qui, parce qu’« évident », ne se cache en réalité nulle part – ; tandis que les scripteurs eux, parce qu’ayant au moins compris ceci que l’examen de tels « aller-de-soi (de l’évidence des choses) » est la condition préalable à toute rédaction de quelque chose comme un « récit des origines » – traduit « théologiquement » : parce qu’ayant au moins compris ceci que « Dieu », bien loin de « se cacher », ne cesse au contraire de « se montrer » (même si cette (divine) auto-monstration constitue en même temps la chose la plus mystérieuse qui soit) –, ont loisir d’assister, comme « en direct » et au seuil de la porte (de leur « maison de scripturature »), à la (sur-)venue vers eux… de cette « origine » même. Et voilà comment aussi, bien que tous les deux désireux de rédiger un « récit des origines », tandis que le littérateur ne saurait commettre que des « petits traités » (peu ou prou toujours in-signifiants), le scripteur, lui, est en mesure de rédiger quelque chose comme un « grand récit » dont l’ultime contrepoint s’intitulerait « L’Événement de la vérité » : puisque c’est là, pour une époque littéraire : la nôtre, le seul titre que puisse prendre un tel « récit des origines ».

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L’« origine » ne peut sans doute être « dite » – à tout le moins : en l’acception d’une fixation de sens (de ce mot d’« origine ») –, mais elle peut être racontée : ce pour quoi toute tentative du « dire (de cette origine) » épouse nécessairement la forme d’un « récit (de celle-ci) » ; et « récit » qui lui-même, à son tour, ne peut prendre que la forme du « (d)écrire » d’un tel « Événement de la vérité » : puisque celui-ci n’est rien d’autre que le mouvement par lequel tout chose est reconduite-à son « origine » et, en une telle « volte-face », se trouve être enfin « ce qu’elle est (et pas autre chose) ». Ce qui est ici appelé le « monde vrai » est donc un monde, en cela toujours différent de l’« univers » platement « réel », où chaque chose correspond à son « origine » ; ce pour quoi aussi, en un tel « monde », du temps est à l’œuvre – ce qui n’est pas le cas de l’« univers réel » (où le « temps », peut-être, passe… mais sans jamais signifier ) – : puisque ce « temps », on l’a vu, n’est rien d’autre que la dimension dans/par laquelle la chose en-vient-à correspondre-à son « ce qu’elle est » – Hegel disait : « la dimension où advient la vérité de la chose » –… et, par suite, l’élément où peut se déployer/être raconté quelque chose comme un « récit des origines ». Ce qui nous amène à cette conclusion que le « temps de l’origine » – en réalité : cet écart entre la chose et sa « vérité » (et non pas quelque lointain et mythologique « avoir-été » où l’origine « aurait eu lieu ») – n’est rien d’autre que l’origine du temps : ce pour quoi il ne peut « y avoir du temps » que dans un « monde (toujours-déjà) vrai » – jamais dans un « univers (seulement) réel » (i. e. : où les choses ne correspondent/« coïncident » pas avec leur « ce qu’elles sont ») – ; le « temps », son « ineffable dimension », venant par là, non pas comme cela qui s’opposerait à la « vérité de la chose » – la croyance à une telle opposition ayant, dès ses débuts, constitué comme le « péché originel » de toute « pensée philosophique » –, mais, bien au contraire, comme cela qui, en le mouvement de cet « Événement de la vérité », autorise la sur-venue en ce monde – dès lors : « vrai » –… de ces « vérité (de la chose) »/« origine (de ce monde) ». Si bien aussi que rédiger quelque chose comme un (nouveau) « récit des origines » – qui dès lors, pour cette époque, ne peut en effet, ou le comprend aussi « dès lors », que s’intituler « L’Événement de la vérité » (seul changeant, pour chaque « époque (littéraire) », le titre d’un toujours même « récit des origines ») –suppose de la part de son scripteur de se focaliser uniquement sur la question du rapport mystérieux que toujours entretiennent « temps » et « vérité » ; et « rapport » qui se dit notamment, comme on l’a déjà ébauché plus haut, en l’oxymore de cette « permanence voyageuse (des choses) » – comment les choses, tout en « passant », peuvent-elles « demeurer » (et réciproquement) ? – ; et « oxymore » qui reçoit lui-même sa « résolution » de la considération (pensive) de ce « fait » que c’est parce que, dans un « monde vrai », les « choses sont ce qu’elles sont (et pas autre chose) » que, en ce même « monde », il peut y avoir quelque « chose » (qui n’en est aucune) comme du « temps » – et réciproquement : que c’est parce que, dans tout « monde vrai », il y a toujours à l’œuvre du « temps » que les « choses (de ce monde) » sont ce qu’elles sont (que ce monde est un « monde vrai » et non quelque vague et peu ou prou insignifiant « univers réel ») – ; par quoi l’on comprend aussi que le véritable objet d’une telle méditation/rédaction (de tout « récit des origines ») ne peut être que cette « réciprocité » même (entre « temps » et « vérité »). Car si la « vérité » est cet « Événement », il vient naturellement que, pour « sur-venir », elle a besoin du « temps », c’est-àdire de cette « dimension » par laquelle, en l’empruntant (en le mouvement d’un mûrissement ), les choses ont loisir d’« être ce qu’elles sont » – ce « monde », d’être « vrai » – ; et (toujours) « réciproquement » : si le temps est bien l’élément d’un tel « mûrissement », alors, pour se déployer/déplier-en l’(ineffable) dimension qu’il « est », il a besoin de cette « vérité (des choses) » ; « temps » et « vérité »/« voyage » et « permanence » n’étant donc ici que les deux composantes – en apparence opposées mais en réalité secrètement tournées l’une vers l’autre (en le mode de cette « réciprocité ») – de ce toujours même « Événement de la vérité ». Et si donc il y a à l’œuvre en ce monde un « secret » – qui n’est aucune « énigme (de ce monde) » : puisque ce « secret » est toujours-déjà connu de tous –, celui-ci « gît » (Follain) uniquement en ce fait d’expérience que les choses, pour « demeurer »en leur « permanence » : en leur « ce qu’elles sont », doivent « voyager » : c’est-à-dire toujours être « passées » comme au tamis de cette (mystérieuseineffable) dimension que nous appelons (peut-être après tout faute de mieux) le « temps » ; par quoi l’on comprend aussi que, dans l’oxymore de cette « permanence voyageuse (des choses) », le mot qui en réalité fait le plus signe-vers cette dimension du « temps » est, non pas comme on pourrait le croire, celui de « voyage », mais bien celui de « permanence » : puisqu’en effet, en ce monde où « tout passe », la seule « chose » qui « demeure »… c’est ce passage même (du « temps »). Le temps « a » son (unique) « vérité » son oxymorique « permanence » – dans son « passage », mais « paradoxalement » – en réalité : « réciproquement » –, c’est ce « passage » même qui

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