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Prends-en d’la graine !

Pour venir au monde, presque toutes les plantes poussent à partir d’une graine. Mais réenchantons donc notre perception de ces minuscules grains qui ne sont pas si banals qu’il y paraît et qui détiennent des records à couper le souffle…

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1. Un record nutritionnel

Les oiseaux et rongeurs ont tout compris car ils nous mangent, nous sommes riches en fibres, en protéines, en antioxydants et en graisses bonnes pour la santé, qui sommes-nous ?

• La graine de tournesol est source de folates et de vitamine B et E. Elle protège le système immunitaire et apporte des antioxydants à notre corps.

• La graine de sésame dispense, en plus des antioxydants, du zinc, du calcium et un certain nombre de vitamines. Aha ! des concurrentes ?...

• Je vois que la graine de citrouille s’empresse de lever la main : source de protéines (les végétariens lui disent merci), de magnésium, de fer, de zinc et de vitamine B, celle-ci dispose de quelques acides aminés, bons pour diminuer le stress.

• Le chanvre fait partie aussi des champions de cette catégorie, avec des oméga 3 et 6, des fibres pour la digestion et des phytostérols, contre le cholestérol. Un indispensable pour mieux digérer la dinde de Noël ! Dans le même registre, prendre 15 mL de graines de lin par jour pourrait faciliter notre transit ;-)

• Et puis un petit top 5 des autres graines à la mode (plus onéreuses, mais toutes plus bonnes pour la santé les unes que les autres): les graines de chia, de quinoa, d’épeautre, de sarrasin et d’avoine.

Bref, en plus de créer assez rapidement un effet de satiété, ces graines apportent plein de bonnes choses à notre organisme.

2. Voyage, voyage !

Tout le monde connaît le si poétique taraxacum officinalis (ou pissenlit), mis à l’honneur par le plasticien franco-vietnamien Duy Anh Nhan Duc au musée Guimet l’an dernier pour faire vivre aux visiteurs le voyage initiatique de ces graines fragiles, symboles de l’enfance. Nul n’ignore que les pépins des fruits, une fois mangés par les animaux et ingérés, pourront coloniser un nouveau continent. Mais passons la seconde pour évoquer des voyages autrement plus rapides et palpitants : les plantes qui explosent ! Pour propulser leurs graines, les plantes concurrencent le Schtroumpf farceur :

• Le baguenaudier : Cette plante a tant égayé les promenades des enfants dans le Midi qu’on a inventé à partir de son nom le verbe “baguenauder” ! A vous de faire éclater ces petites cosses (amusement et contribution à la biodiversité garantis) !

• Le genêt d’Espagne : les 2 moitiés de la gousse se tire-bouchonnent puis éclatent sous l’effet de la chaleur pour nous faire un petit lancer de graines à 3 mètres. Mais ce n’est rien si on le mesure au hura crepitans, un arbre poussant en Amérique sous un climat tropical, qui projette carrément à 70 mètres par seconde les morceaux de son fruit à 25 mètres de distance.

• La version “lama” avec le concombre d’âne : la plante crache sur le museau des herbivores un liquide auquel elle mêle ses graines. En broutant d’un air courroucé, l’herbivore outré par ce manque de savoir-vivre ne manquera pas de disperser les précieuses graines.

• Enfin, de nombreuses autres plantes à cosses permettent de produire mille et une nuances d’explosions : du crépitement des cosses de bourrache au claquement des gousses de glycine, que de bruits satisfaisants !!

3. Germinons en Germinal

Germinal, c’est le mois qui commence le premier jour du printemps dans le calendrier révolutionnaire. C’est le temps de se laisser surprendre par la force et la résilience de ces petites graines !

Après plusieurs mois de dormance pour les graines, c’est la germination : l’enveloppe de la graine est altérée par des alternances de chaud et de froid (finalement, ça sert à quelque chose les giboulées de mars !) et par certains micro-organismes, ce qui rend la graine perméable à l’eau et fait sortir de terre nos petites pousses.

D’ailleurs, celles-ci ne sortent pas de nulle part, car la rencontre du pollen et de l’ovule, à l’origine de la formation de la graine, a déjà engendré un embryon - ou plantule-, avec le kit de démarrage mini racines + mini tige + mini feuilles (que l’on nomme les cotylédons). La plantule a également à disposition un bon garde-manger pour ses premiers jours, d’où la richesse nutritive des graines. Maintenant, c’est le moment émotion : de nombreuses graines, chaque année, ne survivent pas. Parce qu’elles pourrissent, sont consommées ou parce qu’elles atterrissent un jour au mauvais endroit, l’aventure s’arrête là pour nos amies.

Afin d’éviter tout débat sur la fin de vie, les inégalités des chances de germer et la dignité graminée, passons vite à la rubrique suivante…

4. Art et graines

J’ai vu perler une petite larme au coin de votre œil quand j’évoquais le destin tragique de tant de consœurs graines, alors voici de quoi leur rendre hommage.

• Emerveillez-vous devant l’histoire de Jacques et le haricot magique et sa réécriture par Michel Butor (parce qu’on aimerait tous que les graines à maison existent), ou bien découvrez les mythes qui entourent les masques Ciwara en forme d’antilope, mais aussi de graine en train de germer.

• Contemplez les photographies à couper le souffle de Paul Starosta, où vous retrouverez vos artistes préférés concurrencés (et bien souvent dépassés) par les graines aux tournures de statuettes d’Afrique de l’ouest, de médailles napoléoniennes, de vases Art nouveau, de sculptures cubistes ou de specific objects minimalistes.

Visionnez et revisionnez les vidéos de germinations accélérées et d’explosions ralenties des cosses, notamment celles de la chaîne du Smithsonian. C’est tellement beau et satisfaisant !

• Parez-vous de vos plus beaux atours en graine de larme de Job, d’acai, de réglisse, d’abrus precatorius, de toloman…

• Graines que vous retrouverez d’ailleurs en très grandes quantités au Musée du Quai Branly, composant les jetons du jeu de l’awale (apparu vers le Ve siècle de notre ère en Ethiopie), incorporées à des masques ejumba (Afrique de l’Ouest), montées pour servir de talisman en Thaïlande,

Comme quoi les graines, malgré leur petite taille, ont frappé l’imagination de nombreux artistes dans le monde, ont pulvérisé de nombreux records et rendent la nature pleinement nourricière.

Blandine

Sources :

- Collections numérisées sur le site du Musée du Quai Branly

- Site du musée Guimet

- Site du Smithonian Institute

- Sites de Santé Magazine et de Noovomoi

- myriad-online.com/resources/docs/awale/francais/background.htm

- Les plantes qui puent, qui pètent et qui piquent, A. Pontoppidan et L. Hignard, éd. Gulf Stream, 2009.

- L’Almanach de la nature. 12 mois d’observations et de découvertes, Catherine Perrin, éd. Delachaux et Niestlé, 2005.

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