Paysages énergétiques à venir

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PAYS A G E S ÉNERGÉTIQUES À VENIR

DREAL Nord-Pas-de-Calais

Lucile Dif I Jérôme Burrows I Quentin Debenest I Théo Calvet I Anthony Augier



L’adynaton (substantif masculin), du grec ἀδύνατον adynaton (« impossible »), est une figure de style qui consiste en une hyperbole inconcevable.



TABLE DES MATIÈRES Avant-Propos ��������������������������������������������������������6 Territoires & scénarios ��������������������������������������������9 Plan guide ����������������������������������������������������������27 Système �������������������������������������������������������������37 Profondeur de l’horizon ����������������������������������������47 Imagine ��������������������������������������������������������������55 Conclusion ���������������������������������������������������������64

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AVANT-PROPOS


Durant près de trois siècles, l’industrie minière a creusé, extrait, exploité le soussol d’une portion du territoire européen au point de forger un véritable paysage artificiel. Le Bassin Minier du Nord-Pas-de-Calais, partie française de l’exploitation de la veine de charbon, est un des exemples les mieux conservés de ce que furent ces territoires : d’agricole, la présence de la houille en a fait le lieu de la prospérité énergétique française. Chaque puits s’accompagnait de sa cité permettant d’accueillir et d’attirer les travailleurs qui voudraient bien descendre sous la terre en échange d’un confort relatif à la surface, comprenant le logement, mais également l’école pour les enfants et l’église pour la foi. Villes, services et aménagements dépendaient donc de la ressource charbon, et de l’argent qu’elle représentait. Mais la mono-industrialisation qui portait ce système n’était pas durable et la perte totale en 1990 de cette manne nourricière a entrainé la rupture du dispositif. Ce sont les témoins de cet âge d’or — cités, cavaliers, chevalement, terrils — qui sont à l’origine de la reconnaissance universelle de ce vaste territoire comme un « paysage culturel évolutif » marquant. La labellisation par l’UNESCO a donné une nouvelle visibilité au bassin. Poursuivant son histoire énergétique, des acteurs du territoire ont alors engagé des réflexions sur les énergies renouvelables et leurs implantations, à tel point que l’essayiste Jeremy Rifkin en a fait l’un des exemples pour l’application de ce qu’il nomme la Troisième Révolution Industrielle. Mais L’implantation de moyen de production d’énergie d’origine renouvelable n’est pas un moyen de remplacer le charbon. Il ne peut s’agir d’un simple basculement d’une forme d’énergie à une autre. Il faut réinventer un système qui, de la même manière que la mine avait influencé une manière de vivre en communauté, d’habiter et de considérer son territoire, va permettre de créer des relations où l’énergie ne sera qu’un élément parmi d’autre. C’est dans un contexte où les projets éoliens, solaires ou géothermiques se font plus nombreux et plus pressants sur ce territoire, que la DREAL et la Mission Bassin Minier ont souhaité faire intervenir des étudiants paysagistes. Ils souhaitaient trouver des outils pour répondre plus efficacement aux projets que présentaient les entrepreneurs, selon les opportunités foncières et économiques plutôt que selon un projet global. Nous avons mis de côté l’idée de donner une boite à outils paysagère et législative en préférant dessiner le paysage à venir, pour que les collectivités et l’état puissent construire ensemble ce paysage et se placer dans une position d’acteur. Ainsi, les formes à venir de ce nouveau paysage pourront être co-élaborées d’une manière plus démocratique en diminuant la pression d’un marché trop puissant. Ce document est une synthèse de la méthodologie que nous avons employée afin de dessiner un avenir énergétique et paysager pour le bassin minier. Au-delà des outils que nous avons développés et que nous présentons ici, il s’agit pour nous de décrire la manière dont nous avons fait émerger une vision pour le bassin, avec comme pierre angulaire le traitement de l’implantation éolienne. C’est donc sur la création d’un paysage que nous avons concentré notre attention, afin de trouver une cohérence pour éloigner les peurs de la banalisation des espaces, et donner une nouvelle attractivité au territoire. 7



1 TERRITOIRES & SCÉNARIOS


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Les flèches déterminent où le regard s’appuie et où le regard peut se déployer jusqu’aux horizons plats des paysages du Nord. Sources : IGN, géoportail

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du mides u h s e Espac nciennois Vale

Valenciennes

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Territoires de la Pévèle et des plaines marécageuses de la Scarpe, et s’ouvre sur les grands Le Bassin minier interagit avec ses plateaux agricoles artésiens. territoires limitrophes selon deux relations Le bassin ouest correspondant à la 2ème croisées d’adossement et d’étendue : veine découverte en 1852 à Oignies (relief Le bassin Est correspondant à la 1ère veine vallonné, beaucoup de cités minières, et découverte en 1720 à Fresnes sur Escaut de terrils plus imposants) est adossé aux (relief doux, peu de cités minières, peu de crêtes de l’Artois et s’ouvre vers la grande terrils, et de plus petites envergures) est plaine de la Lys. adossé aux massifs forestiers des versants Adossement & Étendue

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Les flèches bleues mettent en évidence la succession de dynamiques urbaines orientées du sud vers le nord, dans le sens de l’écoulement des eaux des rivières affluant le Bassin Minier. Sources : IGN

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Dynamiques Nord Sud Le bassin minier est formé par une grande dynamique urbaine Est/ouest transnationale suivant la veine géologique de houille. Cette dynamique est en réalité construite par une succession de petites dynamiques internes urbaines sud/

nord transversales. Suivant les vallées, les talwegs, la ville s’est concentrée aux bords des cours d’eau dessinant le territoire. Ces dynamiques composent dans cette métropole minière des alternances et rythmes bâtis/non bâtis dégageant des percées agricoles au sein du Bassin Minier.

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Scénarios Afin de permettre la création d’un projet énergétique à l’échelle du bassin minier, nous avons proposé quatre scénarios portant l’éolienne comme pierre angulaire du projet. Ce parti pris est né de l’urgence de la situation. En effet de nombreuses demandes d’implantation font leur apparition à proximité du bassin miner et apportent avec elles leurs inquiétudes quant à la conservation de l’identité paysagère de ce territoire. Il nous a alors semblé qu’il fallait s’appuyer sur cette dynamique de construction éolienne afin d’élaborer un projet cohérent sur l’ensemble du territoire. Il était important de réfléchir sur le dessin d’un parc éolien à grande échelle afin d’éviter la juxtaposition

d’une multitude de petits projets conduisant inévitablement au mitage et à la banalisation du paysage. L’impact à l’échelle du territoire entier, c’est à dire de la région, du parc éolien est ce qui nous intéresse ici : l’impact tant paysager - perceptif et esthétique que sur l’usage du territoire. L’usage des scénarios et la présentation de plusieurs pistes nous permet d’envisager différentes possibilités différentes. Parfois radicales, elles ont le mérite de pousser une idée à son maximum, de voir ses limites et ses avantages. Elles sont aux nombres de 4 et se résument en ces mots : lignes, bosquets, lisières et cellules.

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Les lignes séquencent et structurent le bassin minier selon les dynamiques Nord/Sud. Sources cartographiques IGN

Les mats cadrent des vues sur les éléments phares du bassin minier

Les lignes d’éoliennes viennent jouer avec les terrils ici en orange. Sources : Atelier de l’Isme

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La Ligne La première approche, celle des lignes, s’appuie sur un constat que nous avions fait sur l’implantation urbaine. Il existe des dynamiques internes à cette presque continuité urbaine estouest. C’est donc la juxtaposition de lignes nord-sud qui vient créer cette continuité est-ouest. Poursuivant cette idée, le projet dessine de grandes lignes d’éoliennes venant chercher des accroches aux extérieurs du bassin et en passant par les coupures non bâties que nous avions d’ores et déjà décelées. Il s’agit ainsi de s’inscrire dans le bassin, dans ses dynamiques. Ces lignes mettent en place des jeux de densités et de hauteurs différentes selon leur positionnement. En suivant la ligne d’éoliennes on découvre la richesse du paysage du bassin minier en suivant son évolution nord/sud. Confrontée au patrimoine classé du territoire, par exemple ici les terrils en orange, l’approche par la ligne n’est pas systématique. Elle met en place des jeux de proximité et d’éloignement, crée un rythme pour mettre en tension l’ensemble du territoire par ces nouveaux objets, devenant par là même des composantes du paysage. Le zoom, au nord-ouest de Lens et Loos-en-Gohelle, met en avant avec l’étude menée par l’atelier de l’Isthme le phénomène de co-visibilité entre les terrils et les éoliennes. En effet les zones grises de la carte représentent les cônes de vue sur ce patrimoine. Les lignes passent franchement au travers et donc questionnent la relation entre des éléments productifs passés et des éléments productifs présents. Lorsque l’on se place à hauteur d’homme, cette covisibilité se fait encore plus prégnante. Les mats cadrent des vues, et viennent dans leur mouvement et leur verticalité se confronter à la masse sombre des terrils. Malgré la mise à distance que l’on distingue bien sur la coupe, il y a bien dialogue, confrontation entre le graphisme et la masse. La ligne se fait alors cadre, elle emporte le regard et le paysage et induit une relation territoriale plus vaste que la perception unique que l’on peut en avoir.

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Profitant du phénomène de la ville rue et de l’étalement urbain, la cellule devient légion. Sources : IGN

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Les Cellules Le plan ci-dessous fait l’hypothèse de l’urbanisation future du bassin minier : Lille rejoint Lens et la dynamique de conurbation linéaire se poursuit formant alors des « cellules » non bâties au sein des habitations. On peut les voir des îlots urbains. Dans chaque cellule se trouve un noyau. L’avènement de la ville couloir où toutes les rues sont bordée de façades est alors le prétexte pour renverser l’orientation du regard depuis les habitations vers l’intérieur de la cellule mettant en valeur alors ces espaces de vie. Le noyau induit une nouvelle organisation spatiale, comme un fonctionnement parallèle apportant une qualité de vie. Les voies d’accès aux éoliennes peuvent devenir un réseau routier secondaire, menant vers des espaces publics qui se déploient côté campagne au lieu d’être coincés dans les couloirs de circulations principaux. Le noyau peut être une éolienne, un terril, un lac en fonction des caractéristiques du paysage sur laquelle la cellule se trouve. Contrairement au scénario lisière, les éoliennes s’immiscent progressivement dans le bassin minier selon une esthétique de la disparition entre les mouvements du relief. Au fur et à mesure, le noyau « éolienne » devient noyau terril dans le bassin ouest puis noyau humide avec les marécages formant le bassin Est.

Exemples de cellules

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Des bosquets d’éoliennes s’adossent à l’urbanisation, reprennent sa forme et la tiennent. Sources : IGN

Au pied de l’éolienne, le bosquet implique de nouvelles pratiques

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Les Bosquets Dans ce projet, nous avons cherché à déterminer des surfaces d’implantation éolienne en nous appuyant sur une caractéristique structurelle du bassin minier : les axes, voies et lignes droites issuent du développement urbain. Ces lignes ont donc servi à définir des surfaces attenantes à la ville. L’objectif est de créer une limite de développement de la ville par rapport aux champs, une maîtrise de l’espace par les massifs éoliens. Les éoliennes servent alors à structurer les percées agricoles et maintenir l’espace non bâti, elles jouent donc un rôle sur la maîtrise physique et visuelle du foncier. La succession des massifs éoliens crée une succession de plan à l’horizon rendant compte de la profondeur agricole des percées. Ces groupes de machines longent les cités minières, cadrent la vue et orientent vers les terrils donnent une conscience de l’espace agricole, une orientation. La grande proximité à la ville de ces surfaces peut induire un autre fonctionnement agricole au pied des éoliennes. À la construction du parc éolien, les routes d’accès construites lors de l’installation de l’éolienne peuvent induire un remembrement de l’espace agricole. De ce fait l’éolienne s’insère dans un réseau d’espace et d’usages qui aide àa son acceptabilité par les échelles de proximité qu’elle convoque alors. La principale question qui découle de ce scénario c’est l’acceptation de l’objet éolien par les riverains. L’énergie produite par cet objet étant destinée à une grande communauté il est difficile pour le riverain de voir son intérêt immédiat à vivre près de cette infrastructure. C’est le nouvel espace créé au pied de l’éolienne qui devient la valeur ajoutée principale et immédiate pour les habitants.

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Deux masses éoliennes marquent le seuil du bassin minier. Sources : IGN

Lisières La troisième approche concerne les lisières et donc l’extérieur du bassin. Nous l’avions déjà énoncé, celui-ci peut se décomposer en deux phases relatives à l’histoire de l’exploitation de la veine de charbon. À l’est, l’exploitation la plus ancienne qui se tourne vers le sud et les plateaux arrageois et s’appuie sur les espaces humides et forestiers au nord de Valencienne. À l’ouest en revanche, le bassin s’appuie sur les crêtes de l’Artois et se tourne vers le nord et la plaine de la Lys. Dès lors, le projet considère les abords du bassin comme les principaux potentiels pour 22


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En entrant dans le bassin minier : travelling

s’implanter. Dans l’idée de mettre en scène l’approche de ce territoire, la densité du parc va en s’intensifiant jusqu’à un point de rupture laissant une respiration avant le bassin minier à proprement parler. Il s’agit ainsi de ne pas en modifier l’intégrité et la cohérence patrimoniale, tout en le mettant en scène dans l’approche que l’on en fait. La respiration qui a lieu juste avant de pénétrer dans le bassin à proprement parler rappelle en quelque sorte la sortie d’une forêt dense et la vue soudaine sur la plaine qui s’étend au-delà. On peut voir exprimer cette idée dans le travelling esquissé, qui montre cette progression au sein du vaste champ éolien.


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L’Êolienne fait partie du socle

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2 PLAN GUIDE



Il est nécessaire de créer une forme d’implantation éolienne unique adaptée à un territoire tout aussi singulier. L’installation des machines énergétiques doit pouvoir renvoyer une image forte du bassin minier dans le futur tout en produisant un effet spatial. Cette structure doit trouver sa forme singulière et ne pas entrer en conflit en copiant des structures paysagères existantes. L’éolienne fait peur, car leur accumulation tend à banaliser les paysages sur lesquels elles s’installent. Il est nécessaire de lutter contre ce mitage que l’on rencontre régulièrement en France. Le projet alterne des zones d’implantation concentrées et d’autres où elle en est totalement absente. Comme l’est l’importance de l’alternance bâti/non bâti, trouver un rythme éolien/non éolien est nécessaire. Un trop grand nombre d’éoliennes peut-être étouffant pour l’habitant dans un contexte urbain déjà suffocant. L’horizon ne doit pas être saturé et toujours offrir des possibilités au regard de s’échapper. Aussi libre que les vallées qui dessinent le paysage du sud au nord, le projet prend naturellement une forme fluide, souple, filante à travers le bassin minier. Dans une optique d’ouverture des limites territoriales, les implantations s’échappent vers le nord et le sud. Cependant, ce qui fait la spécificité structurelle du bassin minier est l’ensemble de la conurbation minière qui balaye la région d’est en ouest. Les lignes éoliennes ne nuisent pas à cette particularité paysagère, mais soulignent cette implantation humaine singulière. Au contraire l’extérieur du bassin minier offre de la place pour s’étendre.

Ce sont des endroits relativement ouverts nécessaires pour que les grandes masses éoliennes déploient leurs capacités maximales. En se basant sur les doubles relations d’adossement et d’étendues mises en lumières dans l’analyse, il est alors possible de mettre en valeur la conurbation minière par ses bords, par la lisière éolienne offrant une gradation dans les densités d’implantation. Sans pour autant enfermer l’espace, la complexité du paysage éolien créé naît du bon dosage de la mise en commun des scénarios des lignes et de la lisière. Comme le sont aujourd’hui les terrils et comme l’étaient à l’époque les structures industrielles verticales artificielles, l’éolienne donne des points de repère dans un territoire où l’on peine à s’orienter. Ces signaux annonciateurs sont des outils pertinents de compréhension paysagère globale et autant de point d’appels qui réconcilient l’habitant avec son territoire. L’analyse territoriale a mis en évidence l’importance pour la qualité de vie des interstices transversaux dans le bassin minier. L’éolienne tient ouverts des espacements nécessaires à la qualité de vie. On retrouve l’idée du cellulaire agricole valorisé par un objet énergétique. Enfin l’éolienne offre des relations diversifiées par rapport au patrimoine existant en multipliant les cas de rencontres et d’évitements. Ces relations sont rendues possibles par le séquençage des interventions et l’alternance d’un patrimoine sculptural mystifié et préservé et en d’autres cas des confrontations. Les lignes vont tour à tour enjamber, souligner ou éviter les terrils pour offrir des

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relations diversifiées à l’histoire et instaurer des niveaux de dialogues différenciés entre des objets énergétiques que différentes époques séparent. Ces conditions manifestes qui fondent le projet s’incarnent spatialement par quatre grandes lignes d’éoliennes qui se déploient dans des transversales nordsud et sud-nord. Elles sont secondées, par des implantations perpendiculaires plus denses au nord-ouest dans les plaines de la Lys et au sud-est sur les plateaux arrageois. Ces implantations massives qui visent un meilleur rendement de l’éolien accompagnent la forme naturelle du bassin minier en soulignant ses limites sans pour autant l’enclaver, tandis que les lignes filent à travers lui. Au sud-est cette grande densité éolienne se construit par un changement brusque d’orientation et le resserrement des quatre lignes. D’autres lignes les secondent pour former une densité plus importante. Ce mouvement dessine un grand domaine éolien est-ouest entre Cambrais et Arras, un point de départ duquel s’élancent les quatre lignes transversales.

Le patrimoine classé traversé est ici très important et chaque éolienne devra être placée au cas par cas. La conurbation est délicate à traverser et la ligne doit sinuer à travers les entre-deux et forcer les espaces encombrés. Elle offre ensuite un rapport direct au stockage de l’énergie produite en longeant les revers du Pevèle et ses bassins artificiels supérieurs. La ligne termine sa route au sud de l’agglomération lilloise en franchissant la frontière départementale, connexion supplémentaire entre le bassin minier et la grande ville. Entre Lens et Béthune, la quatrième ligne éolienne trouve une accroche sur les crêtes de l’Artois et marque l’espace ouvert évident entre d’un côté Nœux-les-Mines, Sailly-Labourse, Annequin et de l’autre Bully-les-Mines, Mazingarbe et Noyelleslès-Vermelles. Elle se rattache au nord aux implantations denses et étendues de la pleine de la Lys en formant par angle droit la première de ses successions linéaires éoliennes marquantes l’entrée du bassin minier.

La première ligne, la plus à l’est se faufile dans les espaces libres entre Aniche et Denain pour se connecter au parc Naturel Régional Scarpe-Escaut. La deuxième plus à l’ouest dessine quant à elle un évitement en effleurant les massifs forestiers et en marquant la tangente à l’est de Douais. La troisième prend place dans l’espace d’interstice stratégique formé entre Douais, Henni Beaumont et Oignies. 30


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Plan guide du projet à l’échelle régionale. Sources : IGN


Représentation de la conurbation minière et ses percées agricoles depuis l’Allemagne jusqu’à la France. Et si la veine minière devenait la ressource énergétique nord-européenne ? Sources : géoportail

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Le plan guide détermine une stratégie énergétique à l’échelle du Bassin Minier et permet une production éolienne de grande ampleur. Aujourd’hui, les projets énergétiques se réfléchissent à l’échelle européenne. Au lieu de parsemer le paysage d’Europe d’installations énergétiques au gré des oppotunités foncières, la veine minière, grâce à sa logique transnationale, peut devenir l’occasion d’imaginer une nouvelle forme d’organisation des moyens de production et le prétexte à la création d’un nouveau paysage. La production d’énergie se décentralise alors pour répondre directement à des besoins plus locaux,

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mais se concentre selon un élément de paysage d’échelle territoriale. Et si la veine minière devenait la ressource énergétique nord-européenne ? On peut voir que le principe des percées agricole que nous avons repéré peut y être développé sur toute sa longueur. Il serait possible de donner une unité au territoire tout en travaillant des variations et déclinaisons internes en fonction des paysages traversés, tout comme nous en avons pris garde au sein de ce projet.



3 SYSTÈME


Exemple d’une application systémique d’un projet énergétique à Trith-St-Léger : l’éolienne produit de l’électricité pour les habitats et pour les pompes qui extraient l’eau du canal pour la stocker dans des bassins haut dans l’attente que la consommation nécessite le fonctionnement des turbines hydroélectriques. Un réseau de production et de traitement de l’ hydrogène est couplé à l’éolienne. Le système agricole bénéficie de la mise en réserve des terres aux pieds du mat.

Les besoins en énergie sont fluctuants, on ne consomme pas toujours à la même intensité. Et la ressource « vent », bien qu’illimitée, n’est pas continue : elle est soumise aux caprices météorologiques. Une machine produisant à partir de cet élément, soit l’éolienne, doit donc se soumettre à ces modulations. L’électricité ainsi produite ne dépend pas d’une demande, mais de conditions indépendantes des volontés humaines. Généralement, lorsque les pales tournent, elles produisent un surplus énergétique par rapport aux besoins réels. Mais lorsque les éoliennes ne fonctionnent pas, il faut savoir compenser le manque. D’où l’intérêt d’une approche systémique. Ce système profite du fait que l’énergie éolienne soit intermittente. Elle doit s’accompagner de divers moyens de production alternatifs comme l’énergie solaire, l’énergie hydraulique, la production d’hydrogène ou la méthanisation. Au-delà de la simple délimitation de zones propices à l’édification de moyen de production d’énergie renouvelable, c’est un véritable système que le projet installe sur le territoire. Ces implantations influent sur l’environnement, l’usage de l’espace et sa forme – c’est-à-dire sur l’ensemble des composantes du paysage.


Le système développé se constitue de plusieurs échelles de productions énergétiques imbriquées. Celles-ci convoquent différentes mesures du territoire, elles se répondent, se réajustent et se complètent. Ainsi, tout en solidifiant le réseau électrique, elles donnent alors les moyens d’exploiter au maximum les capacités du territoire. La structure éolienne se situe à une échelle de production massive, l’échelle régionale, avec une structure paysagère équivalente ; le système hydraulique s’imbrique à l’échelle plus locale, c’est-àdire du département, ou du canton ; tandis que la réflexion sur la méthanisation et le solaire concerne une échelle de production communale, et intéresse la vie quotidienne. À l’heure actuelle, les lacunes de production en énergie éolienne sont compensées par l’énergie nucléaire, mais il faut envisager des alternatives différentes. Cela pose la question de la place que l’on souhaite pour des énergies renouvelables. Elles doivent véritablement devenir notre nouvelle ressource, bien au-delà des anecdotes qu’elles sont aujourd’hui, banalisant nos paysages. Il faut donc leur donner suffisamment de potentiel pour les rendre capables de desservir un territoire. 39


permettent d’envisager en certains endroits, le positionnement de bassins bas Hydro-électricité pour le système hydraulique. Il existe alors L’hyper structure éolienne de un dénivelé de près de 60 m permettant de ce projet génère d’importants surplus créer la force suffisante pour produire de énergétiques. Nous devons compenser l’énergie électrique. l’intermittence de cette production par En l’état actuel, le nord de Douai une force hydraulique suffisamment conséquente pour qu’elle ait la capacité est un de ces milieux humides instables. de stocker au maximum ce surplus dans L’objectif est de retrouver une dynamique des bassins. En effet, il n’est pas possible naturelle du sol et d’y associer une économie de conserver directement l’énergie qui lui conviendrait. Ce fonctionnement électrique produite en trop. Il faut la permet de retrouver une grande richesse dépenser dans un système qui pourra par pédologique, diverses activités, et favorise la suite compenser un manque d’énergie. la biodiversité. L’homme, la faune et la Un système de pompe hydraulique est flore peuvent se développer dans cette idéal pour cela, déplaçant et stockant de installation s’approchant d’une nature l’eau lorsqu’un surplus d’électricité est sauvage. produit. Puis lorsque cette dernière vient à L’éolien génère ainsi des richesses manquer, l’eau est relâchée sur une turbine, sur le territoire apportant de vraies qualités compensant ainsi le manque. de paysage en accord avec les territoires Dans le Bassin Minier, l’eau ne concernés.

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manque pas, mais il y a peu de débit. Il est nécessaire d’augmenter ce débit pour produire efficacement et aller chercher les hauteurs pour employer la force hydraulique. On profite ici de l’opportunité donnée par le relief du versant du Pévèle pour placer des bassins en position haute. L’exploitation minière a modifié certaines conditions du sol et du soussol : en forant dans des espaces à l’origine humides, ou par des affaissements de sol, les nappes phréatiques sont devenues plus affleurantes. Les compagnies minières ont implanté tout un système de pompes pour mettre à l’abri d’inondations industries et habitats. Les zones ainsi protégées, toujours soumises au pompage, nous

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Cette ébauche dessine des bassins de production énergétique. Le milieu y devient alors véritablement marécageux en position basse dans la plaine de la Scarpe (en vert) ; tandis que, par la planéité que dessinent les étendues d’eau, des ouvertures entre les boisements sont ménagées sur les versants du Pévèle (en bleu) mettant alors en scène le paysage du Bassin Minier. Sources : IGN

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second essai distingue l’horizon éolien, de l’horizon des terrils. L’espace nait ici de la Spatialité confrontation des plans dans la perception. Quelle spatialité entraine la création On peut alors parler de profondeur, tant d’une ligne éolienne au sein du Bassin spatiale que temporelle. Minier ? Quel rapport entretient la ligne avec la ville ? La ligne avec les terrils ? La ligne et les terres agricoles ?

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Une série de tests en maquette, plan et coupe représentant le territoire entre Oignies et Evin Malmaison nous permettent maintenant d’entrer dans une échelle de production énergétique de proximité. La ligne accompagne un réseau d’espace de production de biomasse. Ceuxci s’implantent sur les espaces pollués résultant de l’activité industrielle. Les plantes sont choisies pour leur usage dans la phytoremédiation de sols. Par ailleurs, ces vastes espaces cultivés et entretenus sont complétés par des espaces publics qui les relient aux communes avoisinantes, et font le lien avec le terril. Ce dernier repose alors au sein de vastes champs de phragmites, île thermophile de vie sauvage et spontanée. La ligne n’est pas une structure systématique, le rythme qui la compose est donc très important. Chaque maquette et plan teste cette rythmique par la densité des mâts, et leur hauteur. Un premier essai fait passer la structure éolienne dans le même alignement que les terrils. Ils font partie intégrante de la ligne. Cette dernière confronte alors dans le temps et l’espace différents moyens de production d’énergie et d’horizons perçus. Tandis qu’un 42


Tests en maquette de l’implantation d’une ligne éolienne entre Oignies et Evin Malmaison.

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Éoliennes et phytoremédiation, mise à l’épreuve du concept sur le territoire d’Oignies : le positionnement de la ligne d’éolienne permet la mise en place d’espace de traitement des sols. Entre les deux villes, plusieurs qualités d’espaces se succèdent : à proximité directe des habitations, deux parcs (en rouge) dessinent les limites des espaces de dépollution (quadrillés) . Le terril est laissé à un état semi-sauvage, tout en usant de sa topographie pour y implanter des bassins pour de la production hydroélectrique. Sources : géoportail, IGN

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4 PROFONDEUR DE L’HORIZON


Coupe technique permettant de comprendre les rapports de taille dans notre perception. Cette coupe permet de répondre à la question « quand est-ce qu’une éolienne parait plus petite qu’un terril ? » »

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Si le dessin en maquette et plan permet de saisir la relation entre les espaces, et leur impact territorial, il nous faut étudier de manière égale ce que l’on voit. Le paysage est d’abord affaire de perception humaine, et ce sont donc ces perceptions-là que nous devons dessiner et comprendre. Le premier des outils invoqués est une coupe permettant de saisir la bonne distance, la bonne mesure dans la composition des plans. Celle-ci démontre à partir de quel instant une éolienne parait plus petite qu’un terril, quand ce dernier est au premier plan. Pour exemple, une éolienne de 150 m me paraitra plus petite, si je suis placé à près d’un kilomètre de distance, si elle est au-delà de 1650 m. Mais ceci n’évoque qu’une situation particulière.

La perspective permet d’imaginer plus clairement ce que nous verrons. Des premiers essais nous ont permis de comprendre les points de vue clés qui doivent être étudiés complètement : lorsque le terril est au premier plan ; lorsque la ligne est au premier plan ; et enfin lorsque les deux cohabitent, entre les deux points de vue privilégiés. Trois lieux sur la ligne servent à tester et fixer des règles pour son implantation, par l’usage de la perspective, et donc l’expérience ce que nous verrons. Tout d’abord au nord, à Oignies, où ont pris place les maquettes et plans. Ensuite au centre entre Auby et Courcelle-lès-Lens, deux communes très proches. Enfin au sud, entre Esquerchin et Quiéry deux communes plus éloignées, aux portes du Bassin.

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Premier essai, au plus près du terril

Plan de repérage des points de vue

Note : La code coloré permet de repérer les points de vue. Angle vert, ciel vert ; angle rose, ciel rose ; angle orange, ciel orange.

Deuxième essai, plus éloigné du terril

Troisième essai, variation de densité

Ici nous sommes donc à nouveau à Oignies. La position de la ligne se trouve au plus proche du terril dans cette hypothèse. La forme de celui-ci, plutôt plate, rend plus difficile la différenciation des plans avec la structure éolienne lorsqu’elle en est trop proche. Il nous faut donc éloigner la ligne. Les plans se différencient plus nettement, et l’espace se fait plus lisible. L’effet de profondeur est primordial dans la bonne composition des structures paysagères. Cependant, la ligne garde une grande présence face à l’élément patrimonial. Mais la ligne n’est pas systématique et doit réagir à ce qui l’entoure. En modifiant la densité, et en la diminuant progressivement à l’approche du terril, la dynamique créée permet de donner de l’importance à ce qui entoure la ligne, crée un effet signal. La ligne, par sa capacité à réagir tout en ayant sa structure propre, appartient au paysage.

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Plan de repérage des points de vue

Premier essai, pleine densité

Nous sommes ici entre Courcelles et Auby, au centre de la ligne. La proximité entre les deux communes ne laisse aucune possibilité de disposition des machines. La structure s’insère au milieu de l’ouverture laissée. Or de cette manière, elle a tendance à créer une limite, une frontière. Mais en utilisant un principe similaire à Oignies, en modifiant la densité à l’approche du pincement entre les communes, la frontière se fait moins opaque, et produit un effet de mise en scène plutôt que de séparation. Deuxième essai, variation de densité

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Plan de repérage des points de vue

Premier essai, à l’exact milieu

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Deuxième essai, plus proche d’Esquerchin

Enfin, nous sommes maintenant entre Esquerchin et Quiéry-la-Motte. Ces deux communes sont plus éloignées que dans la situation précédente et permettent de tester la distance à la structure éolienne. Tout d’abord ici au centre. L’influence de part et d’autre est similaire, et l’impact relativement réduit. En décalant vers l’est la ligne sont importance se décle également. D’un côté elle disparaît quasi complètement, de l’autre elle est bien plus présente. Cependant, l’urbanisme et l’habitat dans chaque commune ne s’orientent pas de la même manière. Ainsi à l’ouest, les jardins et pièces à vivre se tournent vers la ligne, tandis qu’à l’est jardins et pièces à vivre se tournent vers le nord ou le sud. En décalant la ligne de ce côté-ci, elle ne devient pas plus importante dans le quotidien, tout en étant spatialement moins systématique.

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5 IMAGINE


« On rêve avant de contempler. Avant d’être un spectacle conscient, tout paysage est une expérience onirique. On ne regarde avec une passion esthétique que les paysages qu’on a d’abord vus en rêve. (...) L’unité d’un paysage s’offre comme l’accomplissement d’un rêve souvent rêvé (...). Mais le paysage onirique n’est pas un cadre qui se remplit d’impressions, c’est une matière qui foisonne. » Gaston Bachelard, l’eau et les rêves, Edition José Corti, 1978


Lorsque l’on aborde le processus de paysage, on parle volontiers de programmation, de technique, de réalisme, mais on évoque assez peu la notion d’imaginaire et cela sans doute parce qu’elle évoque trop souvent aux yeux de certains une forme abstraite dans le projet, quelque chose de nébuleux, de si personnel au concepteur qu’elle résonne comme une histoire invraisemblable et irréalisable. L’imaginaire n’a pas nécessairement à voir avec la faisabilité et le réalisme de tout bon projet de paysage. Pourtant on peut s’interroger sur la part d’imaginaire que contient un projet de paysage. En quoi les qualités d’anticipation, d’invention, de représentation et de transmission convoquées dans le projet relèvent-elles de l’imaginaire ? Dans quelle mesure le paysagiste au moment de la conception met-il en place des dispositifs qui font appel à l’imagination ? Et dans quels buts ? Plutôt que de répondre définitivement à ces questions, l’ambition de ces quelques lignes est de les illustrer ou de les incarner par la présentation de pratiques projectuelles, éventuellement artistiques, qui renvoient au projet de paysage. L’imaginaire s’inscrit dans une démarche expérimentale et prospective. En choisissant d’intervenir sur les paysages du Bassin Minier il faut tenir compte des caractéristiques existantes de ce territoire telles que son histoire axée autour de l’extraction du charbon, sa verticalité artificielle ou encore son développement urbain. Mais il faut aussi prendre en compte les hypothèses liées à

ses éventuelles mutations futures, comme la mise en place du plan Rifkin autour de la Troisième Révolution Industrielle ou encore l’implantation d’énergie renouvelable (l’éolien). En effet, la mise en perspective d’hypothèses et des caractéristiques d’un territoire induisent des changements déterminants dans la conception du paysagiste, cela le place dans une situation inédite qui alimente directement son imaginaire. Au sens où il doit fonder son projet sur un site présent qui a été et qui va muter. C’est-à-dire que le paysagiste doit inventer un site en train de muter en proie à des modifications morphologiques non avérées (non visible), à des modifications qui ont eu lieu et qui ont laissé des traces parfois invisibles. Il faut établir les conditions pour une transformation. Le paysagiste opère par l’imaginaire comme un scénariste en prenant en compte l’invisible, l’inévitable et l’imprévisible. Si l’imaginaire a besoin de se nourrir de son environnement pour s’élaborer, à l’inverse le monde réel à besoin de puiser dans l’imaginaire pour construire un monde en devenir. L’imaginaire comme outil de projet de paysage peut se concevoir comme cet élément dynamique du processus de conception : « (…) cette expérience féconde qui met en dialogue un monde réel et un monde à inventer. » (C. Guezengar, La Fiction comme outil de projet de paysage. A travers l’expérience pédagogique de l’atelier de projet Grand territoire rural dans l’estuaire de la Loire, Carnet du paysage n°17, Des défis climatiques, Actes Sud, 2008) C’est sans doute dans ce va-et-vient que se forge tout projet de paysage.

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« L’éolienne est un horizon vertical » P. Palacio, entretien

Les illustrations sont au même titre que toute forme de dessin un moyen de transmettre un imaginaire, la vision, l’intuition d’un paysagiste à propos d’un territoire.

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« Il y a un côté terrifiant dans cette machine, il y a une part de monstruosité. » P. Palacio, entretien

L’objectif n’est pas d’imposer cette vision, cet imaginaire, mais de les partager afin que le partenaire enrichisse le regard qu’il porte sur son territoire.

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« Aujourd’hui l’éolienne nous parait surnaturelle, peut-être parce qu’elle est profondément naturelle ? » P. Palacio, entretien

Ces illustrations accompagnent le propos du projet, mais elles ont pour ambition d’influencer à tel point notre partenaire qu’il finisse par s’approprier cette conception, de telle sorte qu’il l’applique à tous ses projets. 63


CONCLUSION


Lorsque nous avons entamé cette étude, lorsque nous avons annoncé notre volonté d’utiliser les machines éoliennes comme pierre angulaire du projet, une attente et des inquiétudes sont apparues. En effet le projet use d’une ingénierie dont la perception jusqu’ici est avant tout négative, et la taille du dispositif et des engins mis en place par le projet dépasse complètement l’échelle humaine : c’est une échelle géographique, de territoire. Les éoliennes malgré tout ne portent pas encore vraiment de valeur esthétique, mais fascinent ou effraient tout au plus. Nous avons donc décidé d’entamer la transformation des perceptions pour sortir des simples termes législatifs et techniques qui président encore à l’implantation des parcs, et faire advenir la possibilité de donner des avis esthétiques. Nous avons dessiné une composition qui s’inscrit dans son paysage, qui possède sa propre structure qui n’entre pas en conflit avec ce qui l’entoure. Et partant de là les inquiétudes sur la qualité préservée des points de vue marquants — par exemple — sont devenues inutiles, puisque les nouvelles structures énergétiques s’inscrivaient, faisaient paysage. Cette étude n’est qu’un premier pas. En tant que paysagiste nous avons donné les premières pistes et les premiers outils pour faire évoluer les attentes et les manières de faire, pour que les décideurs soient à l’origine des projets et n’aient plus à les subir. Nous avons étudié les relations visuelles entre les plans et les tailles, nous avons cherché à spatialiser, non dans la logique du moindre mal, mais dans le dessin et dans la mise en place d’un système énergétique ancré géographiquement. Mais ce qu’il nous a fallu avant tout réaliser, ce qui fut le travail le plus long repose sur la modification, non des regards, mais des imaginaires. Durant les mois de cette étude, nous n’avons eu de cesse que de montrer, pour permettre d’imaginer, ce que devrait être un paysage éolien. Parce que la technique ou la loi ne sont que des contraintes mouvantes, et parce que l’imaginaire est la manière la plus puissante de faire changer le regard des gens, des habitants, et de partager ainsi une vision, nous revendiquons, en tant que paysagistes, le recours à l’évasion.

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