Concours europan 2019 - Projet remarqué par le jury

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Pays de Dreux (FR)

La nuit tombe aux abords de Tremblay-les-Villages. Au cœur des paysages du Thimerays, dans l’immensité des champs, se tient à la croisée des chemins un abri, un refuge, un caravansérail. Ce lieu est au carrefour des routes des gens d’ici et des gens de là-bas. Ce lieu est le point de rencontre et de convergence des habitants de Tremblay-les Villages et du Pays de Dreux avec les voyageurs au long cours et les routiers qui sillonnent ce tronçon de l’axe européen qui relie la péninsule ibérique au nord de l’Europe. Lors de la requalification de la route nationale qu’elle longeait en autoroute, la zone d’activité s’est muée en caravansérail. Il accueille en son sein, dans une même enceinte, la conjugaison des activités artisanales, des services pour les différents usagers de l’autoroute, et également une offre de services pour les habitants du coin. Cohabitent ainsi bureaux, entrepôts, atelier, des services mutualisés entre les différences entreprises de la zone d’activités, distribution de carburant, atelier mécanique, petite hôtellerie, restauration, café, activités de loisir, accès au numérique, tiers-lieux, permanence des services de l’état, des services sociaux et d’autres organismes. Les rencontres et les échanges se font entre les salariés des entreprises, les usagers de l’autoroute et les habitants car les services qui leur sont

proposés sont entremêlés et profitent à tous. Cela a contribué à multiplier les débouchés de chacun de ces services. Ils ont aisément atteint la taille critique qui les ont rendu viables et pérennes alors qu’elle est souvent difficile à atteindre dans les territoires peu denses. Regroupés, chacun a bénéficié de l’attractivité de l’autre, par effets de réseau et de proximité. Le point névralgique, là où se trouvent la majorité de ces services, est l’ancien bâtiment de bureaux de l’usine Brancher Kingswood. Disséminés dans les anciens bureaux, la proximité des services est maximale. La réutilisation des bureaux de l’usine s’est faite dans une logique de réemploi pour diminuer les frais d’installation. La logique de réemploi a également été à l’œuvre pour le reste de la zone d’activités actuelle. Au fur et à mesure des fermetures et des ouvertures d’entreprises, les bâtiments ont aussi mué. En effet, leur structure métallique a été réemployée pour construire de nouveaux bâtiments organisées en bande et en couronne autour des anciens ateliers de l’usine Brancher Kingswood qui a laissé la place à un parc d’un genre particulier. Démantelée, sa structure métallique a été conservée sur place pour marquer l’histoire du lieu, des plantes grimpantes sont venues s’y accrocher. La dalle a été fracturée, des plantes légères dansant aux vents sont apparues spontanément entre les interstices ainsi créés.

Ce remodelage a été plus dense, pour éviter la perte d’espace du bâtiment isolé au milieu de son trop grand terrain. Les espaces libérés tout autour ont progressivement été rendus à la pleine terre. Des arbustes pionniers, tels les bouleaux et leurs écorces blanches, se sont parsemés dans une strate basse et fleurie, composée d’essences de phytoépuration permettant en partie de dépolluer ces sols. Ceci a été rendu possible grâce à une gestion innovante du foncier : le foncier de la zone d’activité devenu caravansérail a été intégré à la zone autoroute, cependant la communauté de communes a conservé la gestion du foncier dédiée aux activités artisanales ainsi qu’aux différents services ouverts à tous de sorte que les prix sont restés accessibles. L’accès au caravansérail est libre. En effet, la barrière de péage de Tremblay-les-Villages a été paramétrée de telle manière que ceux qui rentrent puis ressortent par cette barrière ne payent pas. Grâce au caravansérail, Tremblay-les-Villages est devenu une étape et un véritable lieu de services et de rencontres, tant à une échelle locale qu’à une échelle multinationale. L’autoroute n’y est pas un espace à part, fonctionnant en vase clos, mais une véritable opportunité d’échanges.

Caravansérail Au carrefour des routes des gens d’ici et des gens de là-bas

TREMBLAY-LES-VILLAGES


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Pays de Dreux (FR)

Il est midi ce 31 août et la fête de la moisson bat son plein à l’entrée du village de Brezolles. Les enfants courent dans les champs, les adultes profitent d’un rafraîchissement à l’ombre des arbres. On voit de loin l’étendard de la fête, ce gros ballon rempli d’hélium qui émerge au-dessus des champs et des arbres. A chaque occasion, il annonce à tous les habitants du plateau de Thymerais la tenue d’une de ces fêtes qui jonchent le calendrier des réjouissances locales, entre comices agricoles, fête de la cueillette, démonstrations agricoles, fête des métiers de la zone d’activités en plus de cette fête des moissons. Certaines de ces fêtes sont l’occasion de se retrouver et de communier autour du cycle des saisons et des cultures, de renouer ce lien au sol nourricier, à la terre et à son rythme ; d’autres sont l’occasion d’afficher sa fierté du travail accompli, agricole ou non. A chaque fois, on y exprime et on y célèbre l’identité rurale du village ainsi qu’un certain mode de vie, et ce, depuis le remodelage de la zone d’activités de Brezolles et le lancement de la ceinture paysagère. Chacune de ces fêtes met en valeur une des composantes de cet écrin de verdure que constitue cette ceinture paysagère, nourricière et différenciée tout autour du village qui a englobé la zone d’activités. La ceinture paysagère, c’est autant de prairie, de lisière forestière, de champs, d’arboriculture, de forêt, de maraîchage, de ripisylve, de plan d’eau, en lien et en extension

au réseau de parc existant du village, dans la continuité de l’étang sur la Meuvette et du parc Saint-André. C’est un nouveau lieu de promenade pour les Brezollois et les touristes, mais aussi de sorties pédagogiques pour que les élèves puissent découvrir d’où provient ce qui arrive dans leurs assiettes. Les élèves viennent des écoles alentours mais aussi d’écoles situées jusque dans l’est de la région parisienne, toujours à moins de 150km de là, suivant la logique de circuit court. La fête de la moisson se déroule sur un champ avec sa buvette en bordure. Ce bâtiment est en fait, en dehors des fêtes, la maison commune de la zone d’activités. C’est son restaurant et son café qui sont convertis en buvette à chaque événement. On trouve également dans la maison commune différents services mutualisés pour les entreprises : gestion administrative (comptabilité, ressources humaines, juridique), gestion informatique, plateforme de mutualisation des achats, de la collecte des déchets non courants, de gardiennage, de maintenance et d’entretien du bâti et de l’extérieur. La maison commune est portée par les entreprises de la zone d’activités. Elle est ouverte aux habitants pour certains de ses services, mais surtout, elle est ouverte à toutes les entreprises locales, tous secteurs d’activité confondus. Bénéficier des services de la maison commune sans avoir à s’implanter sur la zone d’activités les a fait essaimer un peu partout dans le village et les villages

alentours. Leur installation a été facilitée car cela leur permis de limiter leurs frais de démarrage puis d’exploitation et leur a ouvert la porte du réseau des entrepreneurs locaux. De nombreuses entreprises sont également arrivées sur la zone d’activités. Elles ont pu s’y faire une place, avec et aidées par la maison commune, alors que le remodelage de la zone d’activités s’est fait à périmètre constant. Comment ? Parce qu’il s’est fait dans une logique d’optimisation et de densification, libérant beaucoup de foncier, avec comme moteur principal le « remembrement » des activités de l’entreprise TIB qui lui a permis de poursuivre son développement sans avoir à déménager. Certaines de ces entreprises participent pleinement au développement de la ceinture paysagère, la synergie est forte : mutualisation des achats et des moyens pour les cultures, gardiennage collectif des machines agricoles, transformation et conservation des produits agricoles, logistique de la distribution, en particulier pour les circuits courts, valorisation pédagogique et touristique… L’offre est complète, dans un souci d’intégration horizontale mais également verticale. Avec des petites entreprises dans le village, d’autres dans la zone d’activités et avec sa ceinture paysagère, nourricière et différenciée, tout le village redevient zone d’activités.

Vie villageoise Célébrer le mode de vie rural

BREZOLLES


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Pays de Dreux (FR)

Il fait beau en ce mardi après-midi d’automne à Saint-Lubin-desJoncherets. Le ciel est clair et pourtant, il y a tempête. Tempête sous les crânes dans l’espace commun. La session de brainstorming bat son plein. La salle est encore réservée pour une demi-heure avant la réunion du conseil de quartier, donc il va vite falloir sortir quelque chose de tous ces échanges. Malheureusement, grande perturbation à la fenêtre : le passage des chèvres devant le poulailler provoque un concert de caquètement et de bêlement qui empêche toute concentration. Même si ça n’est pas toujours le cadre le plus propice à la concentration, c’est pourtant bien le cadre que recherchait chacun des membres de la communauté de Saint-Lubin. La campagne à la ville ? L’agriculture urbaine ? Très peu pour eux ! Suivant la citation apocryphe attribuée à Alphonse Allais « Il faudrait construire les villes à la campagne, l’air y est plus sain », ils cherchaient un cadre de vie plus proche de la nature, une meilleure qualité de vie, plus de confort, plus de place, moins de pollution, moins de bruit, un rythme de vie moins frénétique sans pour autant s’isoler et s’extraire radicalement de leur mode de vie actuel. Parmi eux, des urbains mais pas que : des ruraux, locaux ou non, qui ont eu l’occasion de goûter aux grandes villes durant leurs études et qui souhaitent s’installer dans un lieu hybride, entre ville et campagne.

Ce nouveau quartier de Saint-Lubin réunissait toutes les qualités pour les séduire, avec une véritable synergie entre le cadre de vie rural et un mode de vie urbain. Situé à moins d’une heure de la Porte d’Auteuil en voiture avec l’arrivée de l’autoroute ou encore à 1h15 de la gare Montparnasse moyennant un quart d’heure de vélo vers la gare de Nonancourt, c’est la possibilité d’aller à un rendez-vous à Paris en faisant l’aller-retour en une demi-journée. Un véritable double ancrage, local et métropolitain.

retrouvée et durable dans des matériaux comme le bois, la pierre, le torchis, la paille, la terre, qui donne un caractère unique au lieu.

Pour le cadre de vie, c’est la promesse tenue d’un paysage agroforestier habité. Il est marqué en ce moment par la récolte des pommes, des poires et des noix, mais par sa variété, il réserve des surprises tout au long de l’année, au rythme de la terre et des saisons. Les lisières des forêts proches, propices à la balade, abritent des végétaux nourriciers indigènes. Un paysage de grands arbres dédiés à la production de bois et de fruits borde l’autoroute, avec au sol des cultures traditionnelles de la région, blé et colza. Plus près se déroulent des prairies fleuries plantées de vergers aux fruitiers diversifiés, autant de grands espaces pour vaches, chèvres, moutons et poules. Au contact des habitations, on trouve plus de couleurs avec la culture de légumes et de fleurs, à l’échelle du maraîchage ou du potager. Les maisons et bâtiment ont été construits avec un souci de préserver la perméabilité du sol et de manière

Tout ce beau monde s’est rencontré durant la constitution de la communauté. Porté à l’origine par un partenariat entre les collectivités locales, fondé plutôt sur une charte que par un plan précis, le projet a laissé une large marge de manœuvre à ses futurs habitants dans la définition concrète du quartier. Différentes formes d’accès cohabitent, propriété privé, copropriété, habitat partagé, logements coopératifs… Liées par la charte, tous partagent cette même volonté que ce quartier se distingue par la qualité de son cadre de vie et qu’il ne soit pas que résidentiel, ou encore pire, dortoir, comme tant de lotissements dans des situations géographiques comparables. Qu’il y ait ce mélange permanent entre habiter et activités, qu’ils s’agissent de travailler, de se cultiver, de se rassembler… Autrement dit, une certaine harmonie entre le dynamisme de l’urbanité et la qualité de vie du milieu rural.

Il y a de tout dans la communauté de Saint-Lubin : des graphistes, des menuisiers, des artistes, des maraîchers, des agriculteurs, des prestataires de services de soins à domicile, une crèche, un comptable… Certains travaillent de chez soi, d’autres dans des locaux communs.

S’accampagner « Il faudrait construire les villes à la campagne, l’air y est plus sain » Alphonse Allais (apocryphe)

SAINT-LUBIN DES JONCHERETS


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