La ferme de Roquesaltes, un enseignement architectural

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Ce mémoire dresse le portrait de Roquesaltes, une ferme inscrite dans un territoire particulier : les Grands Causses, situés à l’Est du département de l’Aveyron et qui forment une entité géographique à part entière. Ce sont de hauts plateaux calcaires séparés les uns des autres par des gorges profondes que l’eau a creusée. La construction étudiée nous dispense une leçon d’architecture par sa justesse en terme de compréhension d’un site, alors que de nos jours, le projet est trop souvent déconnecté de son environnement et apparaît comme un objet ou une œuvre artistique propre à son concepteur. Le territoire hostile des Grands Causses a généré une architecture caractérisée par la modestie des moyens mis en œuvre et un sens des priorités. Comme le montre notre étude contextuelle et historique, de l’appropriation des contraintes d’un site va naître une réflexion permettant au bâtisseur de tirer parti de ses dernières. L’architecture Caussenarde peut être un enseignement pour notre vision actuelle du projet. Elle pose la

LA FERME DE ROQUESALTES, UN ENSEIGNEMENT ARCHITECTURAL

question de l’économie de moyens, du rapport au site et des usages. Enfin elle introduit la prépondérance du matériau et sa mise en œuvre dès la phase de conception. Les problématiques environnementales et le climat économique actuel devraient nous pousser à envisager d’autres manières de construire : l’analyse de Roquesaltes peut nous apporter des réponses à ce sujet.

Mémoire de Master, Séminaire Patrimoine et Projet, année 2014 Etudiante : Meryl Carriere Enseignants encadrants : Camille Bidaud, Vanessa Fernandez, Laure Jacquin, Philippe Prost Directeur de mémoire : Philippe Prost ENSA Paris-Belleville, 60 Boulevard de la Villette, 75019, Paris



La ferme de Roquesaltes, un enseignement architectural

Mémoire de Master, Séminaire Patrimoine et Projet, année 2014 Directeur de mémoire : Philippe Prost Enseignants encadrants : Camille Bidaud, Vanessa Fernandez, Laure Jacquin, Philippe Prost Etudiante : Meryl Carriere ENSA Paris-Belleville, 60 Boulevard de la Villette, 75019, Paris 1



Sommaire Introduction

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Première Partie : La ferme inscrite dans un territoire

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Chapitre 1 : Les grands causses, un territoire atypique

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Un ensemble géographique aux caractéristiques contraignantes

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L’appropriation du site au fil de l’histoire

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L’économie rurale comme un impact sur le paysage

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Chapitre 2 : Des constructions typiques

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Un aspect caractéristique issu du territoire

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L’habitat Caussenard, un type architectural

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Deuxième Partie : Analyse architecturale de Roquesaltes

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Chapitre 1 : Étude historique et mise en contexte

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Singularité du Causse Noir

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Histoire et témoignages : évolutions de la ferme depuis 1652

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L’implantation de la ferme, partie intégrante du paysage

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Chapitre 2 : Étude architecturale et des usages de la ferme

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Un programme mixte, entre habitat et activité agricole

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Des solutions constructives comme outils de travail

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De l’importance de l’eau, des solutions architecturales

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De la circulation de l’air

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Troisième partie : Étude constructive d’un bâtiment minéral

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Chapitre 1 : Des fondations aux murs

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Différents types de fondations

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Le traitement du sol

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De la construction des murs

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Propriétés thermiques et mécaniques

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L’enduit, une peau respirante

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Chapitre 2 : Traitement des ouvertures

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Recensement des portes et fenêtres

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Techniques constructives associées

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Chapitre 3 : Plancher : Le choix de la voûte

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Étude des différents types de voûtes

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Un savoir, fruit de l’expérience commune

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Étude de la mise en œuvre

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La toiture

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Conclusion

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Glossaire

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Bibliographie

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Introduction J’ai voulu analyser et comprendre le patrimoine de ma région : des fermes simples, d’apparence modeste et issues d’une société rurale. Pour ce faire j’ai décidé d’étudier Roquesaltes, une ferme située à 3km de Saint André-de-Vézines (Aveyron, France), un lieu particulier où j’avais l’habitude d’aller. Avec le recul et mes cinq années d’étude en architecture je décide de poser un nouveau regard sur cette ferme, la comprendre au delà de son apparence et de son intégration paysagère. C’est par la mesure, l’observation et le recueil de témoignages que je souhaite analyser cette architecture non spectaculaire, qui découle d’une compréhension fine du site sur lequel elle s’implante. Il me semble intéressant de revenir sur le bon sens et la logique constructive de ces hommes, à l’heure où les constructions sont souvent conçues comme des objets déconnectés de leur site, tant par l’usage des matériaux que par leur intégration. A travers mon mémoire, j’ai voulu me pencher sur l’étude d’une architecture sans architecte, intimement liée à son territoire. J’ai souhaité baser cette étude sur le relevé et cet exercice s’est avéré complexe en raison du peu de temps qui m’a été accordé sur place. Le relevé doit être mis en corrélation avec une étude historique, économique et sociale de la civilisation à l’origine de cette architecture, car cette dernière est née d’usages. Alors que ce mémoire avait initialement pour but de trouver un moyen de préserver la ferme de Roquesaltes, je me suis rendu compte au cours de mes recherches que la question fondamentale ne résidait pas dans l’avenir de la ferme mais plutôt dans l’analyse de celle-ci. Parce qu’elle fige la ferme dans son état actuel en retraçant son passé, et parce qu’elle propose des hypothèses ou des interprétations basées sur des témoignages, cette étude est un moyen de sauvegarder Roquesaltes par le travail de mémoire. Jusqu’à présent, aucune étude n’a été réalisée sur la ferme de Roquesaltes du point de vue de l’architecte. Marc Parguel1 a réalisé plusieurs ouvrages concernant le village de Saint André-de-Vézine et ses environs, dont une monographie qui aborde la ferme d’un point de vue historique. Certains ouvrages abordent les caractéristiques typologiques de l’habitat Caussenard2, le propos dresse alors le portrait d’un ensemble de constructions en se basant sur des exemples particuliers mais ne propose pas l’étude et la compréhension d’une ferme précise. Ce type d’ouvrage présente le portrait typologique d’autres régions de France comme la Bretagne, la Bresse, le Languedoc ou la Picardie, sans rentrer dans le détail d’analyse que je propose ici. J’ai donc choisi de détailler et d’interpréter l’implantation, l’architecture et les techniques de construction de la ferme, pour en extraire et comprendre la logique qui bien qu’ancienne, peut se révéler extrèmement actuelle, dans une dynamique de conception locale et durable. Il m’a semblé intéressant d’aborder le sujet par l’analyse d’une ferme précise qui est à la fois représentative d’une typologie architecturale et d’une civilisation. Ce travail permet de comprendre une construction à différentes échelles, et permet une analyse fine des systèmes apportés comme solutions à l’environnement et aux usages. Commençons par dresser le portrait d’un territoire et de son architecture. Les Grands Causses, situés à l’Est du département de l’Aveyron, forment une entité géographique à part entière. Ce sont de hauts 1

PARGUEL Marc, La petite Histoire de Saint André de Vézines, histoire du village et de ses environs des origines à nos jours, Agm imprimeur Millau, 2004 PARGUEL Marc, Roquesaltes Donjon naturel du Causse Noir, Lacour, 2005

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AUSSIBAL Robert, VALES Louis, SOLASSOL Pierre, Bâtisseurs des Grands Causses, Los Adralhans, 1990 7



plateaux calcaires tels que le Causse Méjean en Lozère, le causse Noir ou du Larzac séparés les uns les autres par des gorges profondes que l’eau a creusée. Ces espaces ont des points communs et des différences, mais surtout une architecture particulière qui découle des caractéristiques morphologiques du terrain. C’est cette architecture authentique que nous tenterons d’analyser afin de comprendre une intelligence et une logique constructive. La transmission orale du savoir, la modestie des moyens mis en œuvre et un sens nécessaire des priorités imposé par les modes de vie, amènent cette architecture à être l’expression d’une culture locale et la résolution d’un impératif fonctionnel. C’est par l’analyse d’une construction représentative située sur le Causse noir que nous proposons de comprendre les facteurs déterminants de cette architecture. Comment a-t-elle su tirer une intelligence architecturale et constructive de ses contraintes environnementales ? Quels sont les dispositifs techniques mis en œuvre pour répondre à ces contraintes ? Nous tenterons de faire la lecture d’un ensemble de bâtiments mis au point par une société rurale générant un ensemble de logiques, d’usages et de conceptions. L’architecture qui en découle se rattache aux matériaux locaux et à des techniques et savoir-faire particuliers. Les conditions de vie difficiles et les moyens dérisoires impliquent une réflexion nécessaire pour une économie de moyen et d’énergie. C’est cette richesse de bon sens et de pragmatisme dont on peut tirer une leçon d’architecture et que l’on peut qualifier de patrimoine. A l’image des différentes échelles de conception du bâtiment, de son implantation dans le site jusque dans l’agencement des pierres, notre étude veut mettre en exergue chaque solution technique répondant à une nécessité environnementale, fonctionnelle et sociale. Au travers d’une première partie, nous proposons de réaliser une étude de contexte autour de Roquesaltes pour comprendre ses environnements naturel, économique et social. Nous aborderons des thèmes tels que la géologie, la géographie et le climat. Ce territoire comporte également une histoire et une économie particulières qu’il conviendra d’exposer afin d’appréhender la relation entre l’homme et une nature hostile mais apprivoisée ; fondement de paysages préservés car respectés et inscrits au patrimoine mondial de l’Organisation des Nations Unies pour l’Éducation, la Science et la Culture (UNESCO). Nous proposons également de dresser un portrait de la typologie architecturale dite « Caussenarde » dans laquelle s’inscrit la ferme de Roquesaltes. Elle regroupe des caractéristiques communes liées à la production agricole dont la lecture sera un outil pour comprendre la ferme étudiée. Nous procéderons ensuite à l’analyse architecturale de Roquesaltes qui permettra de déterminer en quoi elle est issue et se démarque de la typologie précédemment exposée. C’est par l’exploitation des relevés et des observations effectués sur place que nous établirons une description de la ferme. L’analyse a pour but d’expliquer comment Roquesaltes a su tirer parti de son environnement dans sa logique d’implantation et quelle stratégie est mise en place face à la géologie et au climat. Pour répondre à ces questions, des thèmes tels que la récupération des eaux (particulièrement rare sur le Causse) ou la circulation de l’air seront abordés. Nous traiterons également la question de l’usage et nous verrons que chaque élément d’architecture, structurel ou non, répond à un besoin précis et important ; rien n’est laissé au hasard ou à l’ornementation. 9



La troisième et dernière partie apporte une analyse constructive de la ferme étudiée. Après la compréhension d’un fonctionnement général, nous verrons que le matériau permet lui aussi de répondre à certaines problématiques. Nous étudierons à une échelle plus fine les caractéristiques de Roquesaltes afin de comprendre comment chaque élément peut répondre aux problématiques géologiques et climatiques. La ferme est construite d’un unique type de pierre collecté sur le site ou à proximité, le calcaire. Cette exclusivité n’empêche pas différentes mise en œuvre de la matière, exploitant ses différentes propriétés suivant la partie qu’elle compose, du mur à la toiture en passant par la voûte.

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Figure 1 : Carte du sud-ouest de la France


Première Partie : La ferme inscrite dans un territoire Roquesaltes s’inscrit dans le territoire des Grands Causses appartenant à la commune de Millau (Aveyron, France). Analysons pourquoi ce territoire constitue une entité paysagère à part entière et comment cela influence la création architecturale, que ce soit pour des raisons géographique, historiques ou encore économiques. Nous étudierons notamment comment Roquesaltes établit des liens avec les caractéristiques de cette région.

Chapitre 1 : Les grands causses, un territoire atypique Un ensemble géographique aux caractéristiques contraignantes L’étude de la géographie est primordiale, elle permet de comprendre l’environnement de la zone étudiée. Cet environnement, nous le verrons par la suite, est un élément déterminant dans la conception de Roquesaltes et à plus grandes échelle de l’architecture Caussenarde. La ferme est située dans l’Aveyron, un département français au nord-est de la région Midi-Pyrénées, dans le sud-ouest de la France. Campé sur les contreforts du Massif Central, ce département occupe un vaste amphithéâtre ouvert à l’ouest. Le plateau de l’Aubrac et les Grands Causses viennent marquer les limites du département à l’est. Cette situation confère à ce territoire un aspect continental de moyenne montagne, où la combinaison d’une géologie complexe et d’un relief étagé a généré une grande diversité de milieux. Des conditions géologiques extrêmes ont longtemps isolé le département des grands axes d’échanges. Singulièrement peu nombreux et urbanisés, c’est en exploitant le potentiel agronomique des sols que les hommes ont fondé l’ancienne province du Rouergue, dont l’Aveyron reprend approximativement les limites aujourd’hui. Le relief de moyenne montagne impose un cadre physique géologique omniprésent, il s‘exprime dans une alternance de plateaux aux espaces largement ouverts et de vallées profondes où le regard s’oriente. Les moyens technologiques actuels permettent de plus en plus de s’émanciper des contraintes engendrées par la topographie (exemple du viaduc de Millau), mais l’on reconnaît souvent le rapport qui liait la construction humaine à la géographie locale. La zone d’étude est située à l’Est du département, elle se limite à la région dite des «Grands Causses». Cette région est reconnue en tant que paysage depuis le 19ème siècle. La ferme étudiée est implantée sur le Causse Noir, ce dernier faisant partie de la famille des Grands Causses. Les caractéristiques qui vont être exposées révèlent à quel point ce territoire semble hostile et contraignant pour l’implantation de l’homme, de son habitat, et de son activité. Elles permettront par la suite d’analyser la ferme, en ayant à l’esprit son environnement pour mieux comprendre les motivations et les choix des bâtisseurs qui l’ont érigée.

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Roquesaltes

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Figure 2 : Carte géologique

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Roquesaltes

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Grands Causses

Avant Causses

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Mont du Levezou

Figure 3 : Coupe schématique du relief

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Géologie3 La ferme de Roquesaltes est implantée sur le Causse noir. Ce dernier est délimité par les gorges de la Dourbie, du Tarn et de la Jonte. Les plateaux et gorges des Grands Causses constituent, avec les AvantCausses, deux parties interdépendantes, ayant en commun un substrat constitué de terrains sédimentaires déposés par la mer jurassique à l’ère secondaire. Les plateaux se caractérisent par une diversité de terroirs directement liée à la nature des sols. Les versants des gorges sont caractérisés par un bâtit particulier (murets de terrasses, bâtits troglodytes…). Les Grands Causses s’identifient visuellement par leur couronne de falaises qui les encerclent sur une grande partie de leur périmètre. Ils se caractérisent par une composition faite de calcaires, dolomies4 et chailles5 du Jurassique moyen et supérieur. Sur les dolomies, les terrains sont sableux et propices aux forêts de pins sylvestres. C’est notamment le cas de Roquesaltes et d’une grande partie du Causse Noir. Ci-contre la carte géographique de la zone étudiée. Nous pouvons voir que la zone des Grands Causses est majoritairement composée de calcaire formés à l’Ère Secondaire. Cette époque constitue une période importante de sédimentation. Progressivement, la mer (issue d’un océan) s’installe sur la zone étudiée et des sédiments calcaires et dolomitiques vont se déposer durant 90 millions d’années. Ces socles géologiques constituent une ressource de matériaux non négligeable, mais laissent entrevoir la dureté de la vie sur des plateaux essentiellement minéraux. En effet cette caractéristique pose le problème de la fertilité des sols rendant l’activité humaine difficile. Relief Les Grands Causses constituent un ensemble de quatre plateaux que sont le Méjean, le Noir, le Larzac et le Sauveterre, isolés par des gorges. Seuls les trois derniers concernent le Parc naturel régional des Grands Causses. Cet ensemble de hauts plateaux dont l’altitude varie de 800 mètres à plus de 1000 mètres (1247 m pour le Méjean) connaît d’importantes transformation internes dues aux failles qui les composent. C’est un paysage dit «Karstique», modelé par l’action de l’eau qui s’infiltre dans le sous sol. L’eau va d’abord dissoudre la roche, puis la redéposer pour créer des formations caractéristiques comme les dolines, les vallées sèches ou encore les reliefs ruiniformes. La présence spectaculaire de ces reliefs d’origine dolomitique imprime sa marque au paysage et a toujours sollicité les imaginations. Le chaos dolomitique de Roquesaltes situé à une altitude de 840 m en est un exemple majeur. L’altitude de ces plateaux apporte un climat aux hivers froids et aux été arides, et même si les dolines sont cultivées au maximum de leurs capacités, elles restent des espaces fragiles, subordonnés au variations climatiques. L’altitude de ces plateaux qui imposent que l’eau les fuit par la gravité, et les phénomènes d’infiltrations viennent contraindre encore un peu plus cet environnement hostile. 3 4 5

Informations recueillies sur paysageaveyron.fr. La dolomie est une roche sédimentaire carbonatée composée d’au moins 50 % de dolomite, c’est-à-dire d’un carbo nate double de calcium et de magnésium. Chailles : accident siliceux dans les calcaires marins, en masses ovoïdes de 1 à 30 cm, de teinte brune, se différen ciant des silex par leur cassure mate non translucide et l’absence de patine par manque de limite tranchée avec le calcaire. 15


Roquesaltes

Figure 4 : Carte de l’emprise des Grands Causses, Avant Causses et des gorges

Figure 5 : Diagramme paysager, le modèle Karstique

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Hydrographie Rappelons que se sont les Rivières du Tarn de la Jonte et de la Dourbie qui ont séparé les plateaux par de profondes failles. Elles prennent leurs sources sur les massifs granitiques du Mont-Lozère et de l’Aigoual. L’hydrographie des Grands Causses et des Avant-Causses est caractérisée par des circulations souterraines qui apparaissent sous forme de résurgences en périphérie de plateau, au contact de zones imperméables, pour finir à alimenter les rivières précédemment nommées. Ces infiltrations signifient que l’eau est rare et difficilement accessible au cœur du Causse, elle ne circule pas à l’air libre et les sources (résurgences) sont exceptionnelles. C’est l’élément le plus contraignant pour la vie et pour l’homme. Ceux qui vont s’établir sur ce territoire et notamment à Roquesaltes, vont chercher à récupérer cette richesse en mettant en place des systèmes constructifs ingénieux. Cela va également avoir un impact sur la végétation des Grands Causses, générant une flore particulière. Végétation La végétation autour de la ferme est caractéristique du Causse Noir sur lequel elle s’implante. Soumis aux influences méditerranéennes tempérées par l’altitude, les Grands Causses comportent une végétation aux caractéristiques méditerraneo-montagnardes. Le pin sylvestre au nord et à l’est (Causse Noir et Causse de Sauveterre essentiellement) marque l’influence montagnarde. Le pin noir en reboisement est très présent sur ces mêmes territoires. L’image naturelle forte de la steppe est en fait la conséquence d’une occupation très ancienne et d’un déboisement à la fois pastoral6 et industriel (production de poix et poteries). Cette absence de bois est en partie responsable du caractère des constructions caussenardes qui sont, comme Roquesaltes, essentiellement minérales. Malgré l’importance visuelle dominante de la steppe, les plateaux sont constitués d’une mosaïque de terroirs : boisements, parcours, dolines7 cultivées et ségalas8 bocagés. Les boisements varient notablement d’un Causse à l’autre et suivant la surface de chacun, l’ouest du Causse Noir est devenu le secteur le plus boisé à l’opposé des milieux ouverts du Larzac au nord ouest. La spécificité de ces milieux leur permet d’abriter une flore d’une grande richesse patrimoniale et endémique (orchidées, plantes steppiques...). Le contraste que l’on observe entre l’aspect végétal des Grands Causses et des Avant Causses est essentiellement dû à la nature du sous-sol et non aux facteurs climatiques. Cette succincte description du cadre géographique de l’étude permet de comprendre les principales contraintes auxquelles les habitants installés à Roquesaltes ont du faire face. La géologie, le relief et l’hydrographie de ce site comportent des caractéristiques défavorables à l’implantation de l’homme et de son activité. Cependant, de tout temps l’homme a choisi de s’y installer : retraçons cette histoire.

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Pastoralisme : décrit la relation interdépendante entre les hommes, leurs troupeaux et leur environnement. Doline : dépression de forme circulaire qui jonche la surface des grands causses. Le fond de la doline est couvert par un sol argileux qui permet de retenir l’eau nécessaire à la culture, autour le calcaire draine rapidement l’eau. Ségalas : terres à seigle. 17


Figure 6 : Forêt de pins sur le Causse Noir

Figure 7 : Paysage steppique, Causse Méjean

Figure 8 : Le buis, végétation emblématique du Causse


L’appropriation du territoire au fil de l’histoire L’histoire de l’occupation du site de Roquesaltes est, comme pour toute architecture isolée, très fragmentaire. Un ouvrage de Françoise Gales9 nous informe sur l’histoire de Millau, une ville en relation avec son patrimoine Caussenard, tandis qu’un autre ouvrage nous renseigne sur l’économie et la vie rurale en Rouergue10. Cette partie de l’étude aborde des repères historiques qui concernent le territoire dans lequel s’inscrit Roquesaltes. Les témoignages et points historiques recueillis et réalisés par Marc Parguel11 nous permettrons de corréler l’histoire du territoire à celle de la ferme, nous permettant d’appréhender l’évolution d’une société rurale qui est bien différente de celle que nous connaissons aujourd’hui. Comme le suggèrent des traces d’occupations sur l’ensemble des Causses de la commune de Millau, le peuplement de la partie méridionale du Rouergue semble très ancien. Les traces de présence humaine sur les Grands Causses remontent à plus de 400 000 ans ainsi que l’attestent les grottes rupestres ou les abris sous roche appelés « balmes ». D’après les études de Monsieur Balsan, archéologue, nous savons que le site de Roquesaltes fut occupé à cette époque. Dès le néolithique, les hommes s’installent temporairement dans des abris liés à la cueillette et à la chasse. Puis, ils investissent progressivement les plateaux pour s’adonner à l’agriculture et à l’élevage ; dès la fin de cette période, les pauvres ressources naturelles sont activement exploitées. L’archéologie révèle que sur les Causses, les activités domestiques sont liées à la production agropastorale mais aussi à la fabrication d’outils, de haches de pierre ou de gaines de hache en bois de cervidé. Les populations, installées au moins épisodiquement, vivent dans des bâtiments de pierres sèches ou dans des abris sous roche ; elles enterrent aussi leur morts sous des dolmens qui constituent de véritables nécropoles réparties sur les trois causses. Tout semble alors indiquer une occupation stable de ces plateaux. Les Causses au Moyen Âge L’habitat rural est généralement implanté en des lieux attrayants, proche des dolines aux sols fertiles ou des voies de communication. Roquesaltes, bien qu’isolée des voies de communication, possède une doline cultivable et une source, deux éléments privilégiés pouvant expliquer l’implantation d’une habitation rurale. Les forêts ont été rapidement défrichées au profit de maigres pâturages épierrés. Le parcellaire des cultures est alors signifié par des murets de pierres (comme c’est le cas à Roquesaltes). Le seigneur de Mont Méjean (paroisse de Saint André-de-Vézines) était propriétaire de tous les biens immeubles et les confiait le plus souvent en emphytéose à des cultivateurs qui étaient tenus de payer un cens12. Bien que l’on y cultivait des céréales malgré la pauvreté du sol : froment, avoine et seigle sur les rares terroirs fertiles qui autorisaient une certaine auto-subsistance, l’économie y était essentiellement tournée vers l’élevage, comme dans tout le Rouergue méridional. Les Causses sont en effet propices à l’élevage de porcins mais 9 10 11 12

GALES Françoise, Millau le patrimoine des Causses, patrimoine Midi Pyrénées, 2010 Colloque (2004; Rodez), Terre et Paysannerie en Rouergue (X-XXe siècle), Société des lettres, science et arts de l’aveyron, 2004 PARGUEL Marc, Roquesaltes Donjon naturel du Causse Noir, Lacour, 2005 Il s’agissait le plus souvent d’une petite quantité de grain et/ou d’une part des fruits. 19


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Figure 9 : Carte des bergeries et jasses remarquables

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aussi et majoritairement d’ovins, activité qui se développera de manière extensive à partir du milieu du XIIe siècle. Cette activité est à l’origine des paysages que nous côtoyons encore aujourd’hui et qui fait leur particularité, constructions et murets en pierre sèches participes à la qualité paysagère du territoire. Après le traité de Corbeil en 1258, la vicomté de Millau passe sous domination française mais la vie des campagnes, comme la vie urbaine, reste inchangée. Le Causse Noir, que ne traverse aucune voie de communication majeure, est davantage le territoire des Millavois que celui des Français. L’évolution de la ville aura donc un impact direct sur les fermes implantées sur le plateau. En effet celles qui pratiquent l’élevage ovin vont dépendre de Millau et de ses fluctuations économiques (laine, lait, cuir, etc…) Après le traité de Brétigny en 1360, le Rouergue est cédé aux Anglais. Millau, qui passe sous leur domination, devient la principale ville de leur frontière orientale. Son commerce demeure florissant et cette occupation à peu, voire pas d’incidence négative sur la vie des campagnes. Comme l’atteste le trafic commerçant, la ville est à l’époque, au même titre que Rodez, Cahors et Saint-Flour, un des plus importants carrefours du centre de la France. Au XVe siècle, après les ravages causés par la peste, Millau connait une nouvelle phase de prospérité. Les trois premiers quarts du siècle confirment le rôle majeur de la ville au sein du Rouergue. Elle est un important centre drapier, dont la production est destinée à l’exportation. Au début du XVIe siècle, malgré l’état dégradé de ses routes, Millau demeure un centre d’échanges important. Dans la ville l’activité dominante est centrée sur le travail de la peau et du cuir : un débouché direct de l’élevage ovin. Sur les Grands Causses l’élevage intensif demeure la règle comme aux périodes antérieures, les pâturages secs conviennent aux brebis. Il est probable que cette période de dynamisme soit favorable à l’agrandissement des fermes comme celle de Roquesaltes. L’activité économique de Millau relie la ville aux fermes des Causses. Ainsi, si le commerce prospère, les troupeaux s’agrandissent ainsi que les fermes. Le Calvinisme et les guerres de religions : Le calvinisme apparait en Rouergue aux alentours de 1558 et à Millau, l’hérésie est prêchée publiquement. En revanche les villes voisines demeurent catholiques, d’où découle en partie la virulence de la guerre civile qui agite le pays jusqu’à l’Édit de Nantes, en 1598. Pendant plus de soixante-dix ans, des affrontements sanglants opposent catholiques et protestants. Les vexations que subissent les familles protestantes les contraignent à quitter la ville et à abandonner leurs activités mégissières. Millau se trouve ainsi privée des citoyens les plus dynamiques de son économie. C’est dans ces années, autour de 1660, que l’on voit apparaître la ferme de Roquesaltes dans les écrits. Elle est vendue par le seigneur de Montméjean, mais les habitants auront des difficultés à payer leurs impôts et le seigneur reprendra ses terres13. Cette apparition tardive ne signifie en rien que l’histoire de la ferme ne lui est pas antérieure, c’est une époque au cours de laquelle il devient plus commun de retrouver des écrits sur des actes notariés de la sorte.

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PARGUEL Marc, Roquesaltes Donjon naturel du Causse Noir, Lacour, 2005 (Jean Birebent, Notes d’Histoire sur Saint André-De-Vézines - 1934-37). 21



Les Causses de la Révolution au début du XXe siècle Au XVIIIe siècle, la France est gagnée par l’esprit des lumières. L’Édit de Tolérance de 1778 qui leur accorde la liberté de culte et une reconnaissance de leur religion réformée, permet le retour des protestants. Ils rapportent de leur exil un savoir-faire à l’origine de l’industrie gantière qui donne un nouvel élan économique à la ville de Millau. La construction de nouvelles voies de communication désenclave la ville et favorise aussi la reprise du commerce et des échanges. L’élevage massif d’ovins sur les plateaux, qui comptent en 1753, 150 000 bêtes, participe aussi fondamentalement à cet essor. L’abondance du fumier tiré de cet élevage bonifie les terres, toutefois, les aléas climatiques font obstacles au développement de l’agriculture. Les techniques et les moyens dont disposent les paysans demeurent archaïques jusqu’à l’apparition de la mécanisation, vers 1890 dans les exploitations les plus aisées. L’araire au timon rectiligne et dont seul le soc est en métal, ne fait qu’égratigner la terre, et la majorité des outils, généralement en bois, est fabriquée à la main, dans chaque ferme. Il faut attendre 1850 pour que se généralise l’emploi des petits outils métalliques de provenance extérieure. En conséquence, les productions se montrent peu variées orientées principalement vers les céréales et le froment. Nous pouvons penser que Roquesaltes fonctionnait sur le même schéma, les terres cultivées produisaient entre autres de l’orge, du millet, du blé noir, du sarrasin, des appâts pour les perdreaux et quelques pommes de terre. Après la révolution, l’essor de l’industrie fromagère de Roquefort favorise le développement des campagnes comme celui de la ville. Il accompagne celui de la ganterie qui investit le marché international. Sur les Causses, la modernisation suscitée par l’utilisation des fourrages artificiels (séchés en grange), un meilleur soin apporté au bétail et le remplacement de la race ovine traditionnelle du Larzac par la race «Lacaune» adaptée au terrain et meilleure productrice de lait destiné au Roquefort, induit une modification importante dans l’organisation des fermes. Les troupeaux s’agrandissant, les bergeries ne correspondent plus aux besoins : de nouvelles sont bâties, surmontées d’un fenil destiné à stocker le fourrage nécessaire à l’alimentation des bêtes durant les 5 mois de traite. Les dimensions des bergeries croissent de manièrent spectaculaire. Il est possible que la ferme de Roquesaltes se soit agrandie à ce moment-là et que l’on y ait construit un bâtiment supplémentaire destiné à l’élevage et au stock de fourrage. Elle fait partie des petites fermes qui subsisteront pour un temps aux côtés des grandes fermes productrices de lait de brebis. L’économie rurale comme un impact sur le paysage Les Grands Causses sont des territoires purement ruraux, éloignés des bourgs importants et imposant des conditions de vie difficiles. Le Causse Noir est le plus enclavé de tous et la ferme de Roquesaltes est éloignée de la route principale. Cette autarcie nécessite une autonomie productive. Après une époque où l’agriculture est majoritairement céréalière, la pauvreté naturelle des sols conjuguée au climat difficile, induit une économie basée sur l’élevage ovin de type extensif, où les troupeaux se déplacent sur le territoire et pâturent sur de grandes étendues. Les dolines s’étendent et se déforment sous le besoin croissant en culture fourragères, les traces de ces cultures sont encore visible de par les murets de pierre qui les délimitent. Le progrès du machinisme agricole entraine l’augmentation des zones cultivables (concasseur de roches notamment). Jusqu’à la fin du XXe siècle, les brebis sont essentiellement élevées pour la laine, 23



tissée dans les fermes et vendue sur les foires, ainsi que pour la viande. Ce n’est qu’au début du XXe siècle, lorsque l’industrie fromagère se développe, que le revenu principal des troupeaux devient le lait, source encore première de l’économie caussenarde actuelle. Cette importance de l’élevage ovin a conduit à la mise en place d’un modèle économique uniformisant qui semblerait aujourd’hui remis en cause au même titre que d’autres types d’agricultures productivistes. L’exploitation du buis a longtemps été une activité complémentaire aujourd’hui c’est celle du bois des plantations de résineux. Cette économie rurale basée sur l’élevage et la culture va modeler et fabriquer les paysages que nous connaissons aujourd’hui. A Roquesaltes par exemple, des murets de pierres délimitent champ, jardin, et parcelle. Ce sont des éléments témoins de la production et de l’économie d’autrefois, qui aujourd’hui font partie intégrante du paysage. Les Grands Causses constituent une entité géographique singulière au caractère hostile, l’implantation de l’homme dans cette région prouve toutefois que certains lieux étaient pourvus des propriétés suffisantes au développement de la vie. Ainsi les hommes habitant sur les plateaux ont bâti leur société et leur économie sur l’agriculture. La ferme de Roquesaltes aujourd’hui en ruine témoigne du déclin de cette société. Nous allons voir en quoi l’architecture est intrinsèque à cet environnement et en quoi on peut l’interpréter au regard de ce qui a été mis en exergue dans ce premier chapitre.

Chapitre 2 : Des constructions typiques Un aspect caractéristique issu du territoire A Roquesaltes, sur le Causse Noir ou sur les autres Causses (Sauveterre inclus), l’homme s’est adapté au climat et a joué des matériaux pour vivre, sinon survivre, cultiver et produire. Cette adaptation aux contraintes géologiques, topographiques et climatiques vont faire émerger une architecture dite caussenarde. Essentiellement minérale elle est issue des exigences liées aux matériaux trouvés sur place et aux techniques de mise-en-œuvre associées. Le calcaire est collecté en surface ou tiré du sous-sol, extrait aux abords du chantier ou dans une carrière proche. Taillé plus ou moins grossièrement, il sert à l’élévation des murs des édifices ou, débité en plaques, il forme des lauzes pour les toits et des «fréjals» pour les sols. La mise en œuvre varie en fonction des besoins et de la richesse des occupants. En règle générale, les bâtiments sont constitués d’une maçonnerie de blocage à parement de moellons équarris, ébauchés ou bruts, seules les chaînes d’angles, les encadrements de baies et les pierres d’évier sont travaillées avec soin. Les moellons servent également à appareiller les voûtes et sont scellés au mortier de chaux. Assemblés en pierres sèches, ils caractérisent les cabanes, « cazelles 14», les murs de clôture ou murs de soutènement des terrasses agricole qui permettent à l’eau de s’évacuer vers l’extérieur. Des fours ménagés à mi pente des Causses permettaient autrefois la transformation des moellons de 14

«Cazelle», «chazelle», «casèle». Terme régional désignant des abris de pierres sèches, des «cabanes», pour bergers ou cantonniers. Elles sont généralement bâties en encorbellement et peuvent être couvertes de lauzes. Selon les zones ou les régions elles sont appelées capitelles, bories, orris, gariottes, cadoles... 25


Figure 10 : Ferme de Sauveterre, Causse de Sauveterre

Figure 11 : Ferme de Ricardès, Causse de Sauveterre


calcaire en chaux. Mélangée avec le sable dolomitique, le «sabel», et de l’eau, la chaux était le liant du mortier nécessaire aux constructions mais aussi à celui de l’enduit qui couvre certaines façades. Le bois, essentiellement du pin sylvestre, est rarement employé dans les maisons et les bergeries caussenardes. Il est le plus souvent utilisé sous forme de plancher, il sépare alors l’espace des combles dans les maisons, et le rez-de-chaussée du fenil dans la bergerie. Il est également utilisé comme pannes dans les bergeries non voûtées où il conditionne l’espacement des arcs qui portent la toiture. Très réglementée depuis le Moyen Âge, la coupe du bois a directement limité l’usage du bois d’œuvre dans la construction. Sur le Causse Noir, les consuls édictent à cette période et jusqu’à la Grande Révolution une interdiction de coupe, afin de protéger les forêts communales de défrichements et de coupes illicites. L’habitat Caussenard, un type architectural La lecture de la typologie architecturale dans laquelle s’inscrit Roquesaltes est primordiale à l’analyse qui sera réalisée dans la suite de cette étude. Elle permet d’appréhender des éléments caractéristiques de ces constructions, et sera un outil d’interprétation pour l’étude de la ferme. La ferme de Roquesaltes est isolée sur le Causse Noir, elle s’implante sur une zone cultivable. On peut remarquer que cette dépendance entre terre fertile et implantation est usuelle sur le territoire15. La grande majorité des fermes sont isolées, réparties inégalement sur le territoire. Le Causse Noir est le plus inhospitalier des Grands Causses, il ne compte que quatre fermes majeures : Le Cade, les Privats, Lauglanou et Betpaumes. Roquesaltes est une ferme plus modeste, isolée des axes de communications. De manière générale, on peut noter que le bâtiment d’habitation et celui d’exploitation se jouxtent et sont parfois même confondus sous un même toit. Ils sont l’expression d’une organisation sociale traditionnelle entièrement liée aux ressources agricoles et pastorales. La ferme caussenarde comprend ainsi principalement maison, citerne, étable, dépendance, aire à battre, four à pain et bergerie. Les déficits documentaire et archéologique rendent la datation des fermes incertaine. Cependant, des aménagements caractéristiques, tels que l’encadrement des baies ou les modes de construction signalent des constructions datant des XVe - XVIe siècles, mais la grande majorité des fermes semblent avoir été levées (ou réédifiées) au XIXe siècle. La topographie du terrain, la disponibilité et le caractère des matériaux, ou les périodes de construction, entraînent de nombreuses variantes à la ferme caussenarde. Les bâtiments sont dispersés, alignés, en équerre, en U, ou encore élevés autour d’une cours intérieure entourée de haut murs et accessible par un portail. Ces constructions doivent avant tout être fonctionnelles, la question de l’esthétique en tant que telle n’intervenant pas durant la conception.

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On en dénombre une vingtaine sur le Causse du Larzac, qui constitue un axe de circulation majeur entre le bas Languedoc et le Massif Central. Source : GALES Françoise, Millau le patrimoine des Causses, patrimoine Midi Pyrénées, 2010. 27


Figure 12 : Habitation (haut) et bergerie (bas), ferme de Hyelzas, Causse MĂŠjean


L’habitation Dans les fermes, la maison d’habitation est généralement située en hauteur, disposée sur trois niveaux. Elle est le premier élément bâti et à l’origine le seul. Le rez-de-chaussée est voûté et abrite, dans un premier temps, le cheptel. Plus tard, il fera office de lieu de stockage du bois, des outils aratoires16, il servira aussi d’étable pour les bœufs, les mules et plus rarement, à nouveau de bergerie, mais pour quelques animaux seulement, à isoler du troupeau. Des fentes d’éclairage percées dans les murs protégés du vent apportent une lumière parcimonieuse. On y trouve parfois aussi un accès à la citerne ménagé dans le sous-sol. L’étage essentiellement destiné à l’habitation est éclairé par de rares et étroites fenêtres. Elles ont parfois été élargies dans la seconde moitié du XIXe afin d’accroître la luminosité, alors que les conditions de vie s’amélioraient et que les revenus permettaient d’installer des huisseries vitrées. La pièce, généralement unique, est équipée d’une cheminée, d’un potager (sorte de fourneau) et parfois d’un évier ; il s’agit de la cuisine. Placé dans l’angle, un escalier usuellement de bois conduit sous les combles qui abritent le grenier, seulement éclairé par des petites lucarnes logées sous une lourde toiture et qui fait aussi la spécificité de la typologie caussenarde. Lorsque la famille s’élargit, il n’est pas rare que ce dernier niveau abrite une chambre. Selon une formule courante, l’étage et les combles sont ménagés sous une même voûte en berceau, le plancher qui les sépare prend naissance à la construction. Pour accéder à l’ensemble, un escalier extérieur à perron appelé un « balet », est accolé à la maison. Il est parfois couvert d’un toit à une pente constitué de lauzes calcaire. Le même matériau est employé dans les toitures des autres bâtiments dont la pente n’est jamais très importante. Elles s’ornent généralement d’une cheminée dont la souche quadrangulaire, solidaire du mur-pignon, est constituée de quatre pierres verticales appelées «billettes», portant une lame de calcaire. Enfin, de grandes dalles de calcaire polies, les « fréjals », agencées avec soin, constituent les sols du rez-de-chaussée et du premier niveau. La bergerie La bergerie est l’élément complémentaire de la ferme caussenarde. Si dans un premier temps, les ovins occupent le rez-de-chaussée du bâtiment principal, dès l’augmentation du nombre de têtes de bétail, des bergeries spécifiques dites « Jasses » (bergeries emblématiques des Causses) accueillent le cheptel. Elles sont bâties à proximité immédiate du bâtiment principal, dans son prolongement ou sa perpendiculaire. Elles sont généralement surhaussées afin d’abriter le fenil destiné à stocker le fourrage nécessaire à l’alimentation des brebis. Nous verrons par la suite que Roquesaltes possède une « Jasse », surement apparue à une époque de dynamisme économique. Selon un mode de construction qui fait leur spécificité, ces bergeries sont voûtées en berceau ou bien couverte d’une charpente portée par des arcs diaphragmes régulièrement espacés. On y pénètre habituellement par un portail ménagé dans le mur-pignon précédé d’un auvent. A l’extérieur, des contreforts cantonnent la poussée des arcs. Elles sont aérées par de petites fentes aux allures de meurtrière protégées du vent. Les granges-bergeries qui apparaissent dans un second temps permettent de donner aux troupeaux de 16

Aratoire : qui sert au travail de la terre, du labourage. 29



brebis laitières un fourrage artificiel pendant les cinq mois de traite. Parfois aménagées à mi pente, elles permettent que le fourrage stocké à l’étage sous de grands arcs diaphragmes, soit accessible de plein pied. Constructions complémentaires Dans la ferme se trouvent aussi l’étable surmontée d’un pailler, une soue et d’autres bâtiments annexes élevés en fonction des productions agricoles. L’architecture caussenarde n’obéit à aucune règle de distribution précise, ils se répartissent donc autour de l’aire à battre ou d’une cour comme c’est le cas à Roquesaltes. Le four à pain ou «fournil» apporte un complément indispensable à chaque ferme. Il se présente généralement sous la forme d’une pièce quadrangulaire à laquelle est accolée le four. Il est équipé d’une cheminée et parfois contigu à une cuve de lessive, en pierre. Il n’est généralement pas accolé à la maison pour des raisons évidentes de sécurité. On présume que la ferme étudiée possédait un four à pain, mais cette partie hypothétique est trop endommagée pour en être certain. Un pigeonnier complète parfois l’équipement de la ferme. Il se résume habituellement à une série de trous alignés ou disposés en pyramide, au-dessus d’une pierre d’envol, et ouverts sur un comble aménagé qui abrite quelques nichoirs. La ferme de Roquesaltes n’en possède pas. L’eau Sur ce territoire pauvre en eau, la citerne est un élément primordial. Chaque ferme en possède plusieurs, elles sont destinées à l’utilisation de la famille mais servent aussi à abreuver les animaux ou à arroser le jardin potager. Parfois, le sous-sol de chacune des parcelles bâties dispose d’une réserve d’eau qui montre que chaque maison, bergerie ou écurie pouvait être autonome en eau. La mise en œuvre de la citerne varie peu : totalement ou partiellement enterrées, aux forts murs maçonnés, elle est voûtée et son parement interne est revêtu d’un enduit imperméable. Dans un angle, une percée de la taille d’un homme permet d’y descendre. Habituellement elle est surmontée d’une petit kiosque permettant de tirer de l’eau du réservoir, qui se présente sous la forme d’une construction quadrangulaire couverte de larges dalles calcaire et close d’un vantail. Les citernes sont disposées en divers points de la ferme : au rez-de-chaussée des maisons, à l’angle des jardins, mais aussi parfois dans l’épaisseur des murs. Les poulies qui permettent de ramener les seaux du fond du bassin ont généralement disparues, comme les éléments qui les portaient. Les citernes sont principalement alimentées par les eaux pluviales. Chaque toit de maison, grange, bergerie ou soue donne l’occasion de récupérer des eaux de pluie. L’eau est collectée depuis les toits via des chéneaux de pierre ou de bois ménagés à la base du versant du toit et qui reposent sur des corbeaux ou sur un sur-épaississement du mur. Habitation complémentaire A côté de ces fermes se développent également des maisons modestes, seulement équipées de jardins clos de mur de pierre, élevées en bordure des rues du village. Selon le modèle habituel, elles présentent deux ou trois niveaux, un rez-de-chaussée généralement voûté servant de lieu de stockage ou de local d’artisan 31



et un étage réservé à l’habitation. Cette forme se décline en un large éventail dépendant de la richesse du propriétaire ou du locataire. Parfois intégrées dans la cour de la ferme initiale, les maisons les plus modestes signalent les habitats d’ouvriers agricoles ou de journaliers ne possédant ni bête de labour ni ovin. Elles témoignent d’une période, le milieu du XIXe, durant laquelle ils étaient nombreux à louer leur force de travail pour assurer leur subsistance. La ferme étudiée est située sur un territoire aux caractéristiques contraignantes, de par sa géologie, son relief et son hydrographie. Ces plateaux essentiellement minéraux, ne disposent peu ou pas des ressources nécessaires à l’implantation de l’homme et de son activité. La pauvreté des sols alliée au climat de moyenne montagne rendent toute culture difficile. De plus l’eau ne reste pas sur les Causses mais s’infiltre via des réseaux souterrain, et de part son absence elle est la plus grande entrave à la vie et à la présence de l’homme. Pourtant l’histoire nous montre que dès le néolithique ce dernier à choisi de s’implanter à Roquesaltes et plus généralement sur les Causses, au sein de sites qui bénéficiaient de qualités suffisantes à sa survie. Petit à petit est apparu l’agropastoralisme, une agriculture intimement lié à un l’élevage pastoral : un système extensif, où les troupeaux se déplacent sur le territoire et pâturent sur de grandes étendues. C’est par cette activité que les hommes vont subsister sur les Causses, pour autant ils sont tributaires des fluctuations économiques et du dynamisme de la ville de Millau dont ils dépendent en tant que fournisseurs de matières premières. Roquesaltes et les fermes du Causse devront donc assurer leur auto-subsistance afin de franchir les périodes de crises. De ces caractéristiques géographiques, liée à une économie basée sur l’agropastoralisme va naître une architecture territoriale dite Caussenarde. Si l’on observe l’ensemble des habitations présentes sur le Causse on s’aperçoit rapidement qu’elles ont des points communs, ces derniers vont permettent de définir une typologie architecturale. A l’image de Roquesaltes, ces constructions sont réalisées en pierre calcaire le plus souvent ramassées sur place, cette matérialité leur permet de se fondre dans leur paysage. Le fonctionnement général des fermes allie habitation et activité agricole, il s’agit que la ferme devienne un outil de production en plus d’être une maison et un foyer. Face à la grande problématique de l’eau, l’architecture sera aussi un moyen de trouver des dispositifs de récupération de cette richesse. Cette architecture est intimement reliée à son environnement dont elle va tirer parti malgré ses nombreuses contraintes. Cette étude du contexte de la ferme nous a permis d’appréhender les facteurs déterminants de cette conception, car Roquesaltes, et l’architecture caussenarde en général, ne peuvent être dissociées de leur site , de leur environnement et de leur fonction. La lecture de la typologie introduite dans cette première partie nous laisse entrevoir des principes architecturaux. Ces principes sont des caractères généraux en réponse à un territoire, mais n’ont pas été étudiés à partir d’un site précis. C’est ce que nous tenterons de développer dans la deuxième partie de ce mémoire, en l’appliquant à la ferme de Roquesaltes. Nous verrons comment la dialectique avec le site s’établit à l’échelle d’une parcelle ou d’un bâtiment. Par la mesure et l’analyse des plans de Roquesaltes, nous verrons en quoi la ferme répond, ou se dégage des caractéristiques typologique précédemment établies. Comment réussit-elle à tirer parti de son environnement et par quels systèmes ?

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Figure 13 : Emprise du Causse Noir, vue aérienne

Figure 14 : Roquesaltes, parties détruite et restaurée

Partie détruite

Partie restaurée, propriété privée


Deuxième Partie : Analyse architecturale de Roquesaltes Chapitre 1 : Étude historique et mise en contexte

Nous avons vu dans la première partie que la ferme étudiée s’inscrit dans une entité paysagère : les Grands Causses. Ce territoire aux multiples facettes partage une géographie, une histoire et une économie commune, cependant chaque Causse présente aussi des caractères spécifiques. L’analyse architecturale de Roquesaltes nécessite une compréhension plus fine du site particulier sur lequel elle s’implante. Singularité du Causse Noir Le Causse Noir est le plus petit des Grands Causses avec une surface de 200 km2, dont une partie est classée au patrimoine Mondial de L’UNESCO et comporte la mention Site Natura 2000 pour la particularité de sa faune et de sa flore. Nommé Causse Noir en raison de ses grandes forêts de pins, la déforestation qui a commencé au Moyen-Âge a laissé derrière elle un Causse au paysage steppique. La protection des forêts et le reboisement ont permis aux pins noir et sylvestre de s’implanter à nouveau sur le territoire. Roquesaltes17, située à 3 km au sud de St André-de-Vézines, est un important donjon naturel du Causse Noir (ensemble pittoresque de rocs dolomitiques ruiniformes). Ces tours de roche, hautes de 50 m ont été habitées dès la préhistoire. Le site de Roquesaltes présente des caractères qui se sont montrés favorables à l’implantation de l’homme (notamment la présence d’une source, élément indispensable à la survie de l’homme). Nous verrons comment au fil de l’histoire les habitants du site se sont appropriés le lieu. Histoire et témoignages : évolutions de la ferme depuis 1652 Bien que très isolées, les traces de présence humaine sur le site de Roquesaltes remontent au Néolithique. Les imposants rochers dolomitiques comportent des aspérités qui servaient d’habitat aux époques préhistoriques. Des traces de feux et des ossements, mais aussi des tessons de poteries, des pointes de flèches en silex et des meules en grès de facture néolithique y ont été retrouvés18. D’après des découvertes (poteries datées) qui ont été faites sur le site, on présume que les rochers de Roquesaltes ont également été occupés durant l’âge de fer (750 - 50 av J-C). Des porteries gauloises datant de la période Gallo-Romaine ont été retrouvées sur les rochers de Roquesaltes ainsi que du verre, qui viennent confirmer la présence passée d’hommes à cet endroit précis. On retrouve par ailleurs la mention de «Rocas Altas» (y voir une autre écriture de Roquesaltes) dans un texte daté du XIIème siècle. Élaborons un bref historique de la ferme à proprement parler : 1652 - Construction de la ferme de Roquesaltes 1666 - La famille Bru est propriétaire de la ferme 17 18

Roquesaltes : Rocas Altas, de racine prélatine roca : roc, roche, rocher, pierre et Alta : haut, élevé. A 400 m au nord de Roquesaltes M. Balsan a découvert en 1937, un ossuaire (grotte simple d’environ 4,50 mètres sur 2 mètres de large) qu’il a pu classer à la fin du Néolithique. Louis Balsan évalua à 25 le nombre d’individus inhumés dans l’ossuaire. 35


1948

Figure 15 : Photographies historiques de Roquesaltes.


1731 - 4 foyers (représentés par des feux) à Roquesaltes : les familles Baumel, Grégoire, Grailhe et Valès. C 1868 - 12 habitants vivent sur le site XIXe - Les familles Vernhet et Fourgeaud sont propriétaires et habitent le site. XXe : Les familles de moins en moins nombreuses, quitteront la ferme. C’est en 1937, que les derniers habitants (Vernhet) quittent la ferme pour s’établir à Millau. Les bergers encore en activité de Saint Andréde-Vézine y font paître leurs brebis et trouvent refuge dans la bâtisse, mais cette activité s’éteint elle aussi. 1958 : Rachat de la ferme par Henri Cartayrade, début d’aménagement touristique du site qui tombe pourtant dans l’oubli car trop isolé des voies de communication. 1968 : Écroulement de la couverture du « balet » (balcon). 1975 : Monsieur Delagnes est propriétaire d’une partie de la ferme qu’il décide de restaurer. 2006 : Rachat du site par la communauté de commune La ferme est laissée aux aléas du climat depuis des années, elle abrite quelques squatteurs de passages puis est interdite d’accès au public. Les lauzes abîmées de la toiture laissent de la place aux infiltrations qui font des dégâts considérables (effondrement des voûtes intermédiaires). Le Parc Régional des Grands Causse réalise des préconisations afin d’essayer de figer ce processus de dégradation (mise en place de tirants, consolidation à l’aide de béton, défrichage et dégagement des zones en ruine). Ci-dessous un témoignage qui nous permet de visualiser les différents éléments de la ferme et leurs fonctions. Il permet de conforter certaines hypothèses concernant les usages19. « Je situe les années 1919-20-21 à l’époque où j’ai passé les vacances scolaires à la ferme de Roquesaltes... Je suis sur le balcon sous l’arche en vieilles pierres. Devant moi se profilent les écuries qui longent la bâtisse; au dessus des paillers, réserves de paille et de foin. A l’étable, une paire de bœufs, un cheval ; au dessous du balcon l’écurie du porc, le poulailler; ensuite la cour de la ferme, entourée par un mur et fermée par un clédon ; au milieu un puits, à son abord des abreuvoirs taillés dans un tronc d’arbre. Tout à l’heure une centaine de brebis viendront se désaltérer. Il existe en bordure de la ferme quelques lopins de terre, des champs plus ou moins rocailleux où il est difficile de faire pousser quelques céréales. On cultive un peu de blé, de l’orge, un peu d’avoine, parfois dans les scotchs du millet et des pommes de terre. L’herbe est rare, des buis rabougris et des genévriers; en bordure des sentiers, des ronces, des églantiers. Dans les ravins quelques bois de pins résineux (...) tout est précieux.» Un tel historique de la ferme permet de redonner vie à ce lieu qui semble être aujourd’hui une simple construction de pierres abandonnée. Nous l’avons vu précédemment, la vie sur les Causses était rude, pourtant la ferme de Roquesaltes à abrité jusqu’à quatre familles. La vie s’organisait alors autour de l’activité agricole tout en respectant le paysage.

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Témoignage de Léontine Juliette Baumel recueilli par Marc Parguel en 2003, PARGUEL Marc, Roquesaltes Donjon naturel du Causse Noir, Lacour, 2005 37


L’écho de Roquesaltes au chaos rocheux

« Clapàs » aux abords de la ferme

Figure 16 : Roquesaltes et ses alentours

Intégration paysagère de la ferme

Jardin de Roquesaltes


L’implantation de la ferme, partie intégrante du paysage Située à proximité d’un «événement paysager» qu’est le chaos de Roquesaltes, la ferme se fond dans le site par sa matérialité. Les pierres prélevées sur place pour construire le bâtiment s’oxydent et prennent la teinte des roches et cailloux aux alentours, donnant l’impression que la ferme fait partie intégrante du paysage. Le calcaire peut rester clair et suivant l’éclairage du bâtiment il peut ressortir ou non sur le paysage. Les couleurs du Causse sont celles du calcaire et de la végétation : les taches vert vif et brunes des dolines, terres cultivables, pelouses et des quelques rares arbres (frênes, noyers, divers fruitiers). Des taches de couleurs plus orangées apparaissent également, elles sont formées par les buissons de genévriers ou de buis. Des notes plus sombres proviennent de la plantation récente de pins sylvestres. La totalité forme une palette de couleur où se mêlent le gris, le brun, le beige, le jaune et le vert avec une dominante tirant vers le gris, l’ocre ou le vert suivant la saison Sur les photos suivantes on peut observer la variance des couleurs suivant les saisons. La première photo montre que suivant le point de vue, la ferme constitue un ensemble avec le chaos rocheux. La deuxième prise au début de l’automne met en avant la corrélation entre la couleur ocre de la végétation et des murs. La quatrième se situe dans le jardin bordant la ferme, implanté dans une doline cultivable, il revêt une couleur très vive traduisant la fertilité de ce lopin de terre. Roquesaltes s’intègre au paysage, se confond parfois même avec le rocher. C’est une construction qui non seulement préserve la qualité paysagère du site, mais y contribue fortement. On accède à Roquesaltes par un chemin de terre étroit qui serpente dans la végétation. Le terrain se caractérise par son chaos dolomitique, mais aussi par sa faible amplitude topographique. A une altitude d’environ 840 mètres, le site s’ouvre au sud avec la cour de la ferme, un jardin et une clairière. Cette implantation reprend la logique des constructions caussenardes qui s’implantent sur des sites permettant d’allier protection contre le vent et le froid et la possibilité d’une activité agricole . Le bâtiment s’adosse à la topographie par un épais mur démuni d’ouverture sur sa façade Nord. Ceci constitue déjà une protection contre le vent du Nord. A l’inverse, la façade Sud de la ferme possède des ouvertures en rez-de-chaussée et au premier niveau donnant sur la cour centrale. Celle ci est très ensoleillée et à l’abri des vents. Ces ouvertures permettent d’apporter lumière et ventilation à l’intérieur de la bergerie. L’aile Ouest du bâtiment se développe sur 3 niveaux et comporte la partie habitation, les ouvertures étant exclusivement au sud et à l’ouest. Cette aile du bâtiment permet de protéger la cour du vent d’ouest. Cette vue aérienne de Roquesaltes et son chaos rocheux met en évidence la position de la ferme dans un site à la végétation clairsemée, on observe aussi une doline en partie cultivée, une route d’accès restreinte et des chemins pédestres. La ferme était composée d’un ensemble de bâtiments dont certains n’en sont plus que des traces et d’autres sont encore sur pieds. Cour, potager, champs et chemins sont bordés de murets en pierres sèches, de haies ou de clôtures. Ces éléments, les murets de soutènement et les enclos à bétail complètent la trame construite du paysage. L’aire à battre et la « lavogne » constituent aussi des éléments forts du paysage caussenard.

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Figure 17 : Vue aérienne de Roquesaltes

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Figure 18 : Orientation de la ferme et vents dominants

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Figure 19 : Coupe élévation Sud-Est et Coupe élévation Sud-Ouest

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Les murets (« Clapàs ») constituent des tas de pierres plus ou moins hauts, ils sont des traces de l’activité de culture (cf figure 16). Les paysans débarrassaient la terre de ces pierres qu’ils entassaient au fur et à mesure en différents endroits, travaillant ainsi leurs champs plus facilement. L’épierrage constituait un travail constant car à chaque labour des pierres remontaient à la surface. Les « Clapàs » sont arrondis car les pierres les constituant sont brutes (pas d’équarrissage) et empilées grossièrement, à la manière d’un tas plus que d’un muret. Par sa seule implantation, la ferme fait preuve d’une certaine dextérité de ses bâtisseurs dans l’exploitation des qualités naturelles du terrain. La construction est orientée de manière à se protéger des intempéries, et à bénéficier de la chaleur et de la lumière dispensée par le soleil, tout en conservant un maximum de terrain exploitable. Tout semble mis en œuvre de manière optimale et réfléchie, témoignant d’un savoir probablement empirique et partagé par les hommes de l’époque. Les Croquis ci-contre traduisent les priorités de la ferme en terme d’implantation . Le premier croquis montre le choix d’implantation de la ferme par rapport aux vents, elle se positionne de sorte à ne pas les recevoir frontalement, et ainsi éviter les déperditions thermiques. La cour de la ferme est donc orientée plein Sud pour profiter de la lumière du soleil que ce soit en hiver ou en été. La façade Sud Est comporte la majorité des ouvertures de la ferme, elles permettent d’amener lumière et ventilation.

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Figure 20 : Plan Masse

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Chapitre 2 : Étude architecturale et usages de la ferme Un programme mixte : entre habitat et activité agricole Nous l’avons abordé dans l’analyse de la typologie architecturale : l’habitat rural Caussenard est entièrement lié à l’activité agricole. Ainsi chaque espace, circulation, ouverture est pensé afin de répondre à une nécessité d’usage. La description de la ferme nous montre que la construction mêle l’espace d’habitation à l’espace destiné aux animaux et à l’activité agricole. Au rez-de-chaussée se trouvaient les animaux. Les familles les plus aisées possédaient des bœufs qui servaient au travail de la terre, au transport du bois, des pierres, du fumier et du foin. Un cheval ou une mule venait parfois s’y ajouter. Il y avait aussi la bergerie avec les brebis qui fournissaient le lait, la viande et la laine qui était traitée dans les gorges, ainsi qu’un porc, un poulailler et des lapins. Les espaces en rezde-chaussée communique entre eux et servent par ailleurs à apporter de la chaleur au niveau supérieur. On accède au premier étage via le «balet», ce terme désigne le traitement architectural de l’entrée de l’habitation. L’escalier à deux volées droites débouche sur un balcon qui donne sur la porte d’entrée. Ce palier est couvert, abrité par une avancée de toiture reposant sur un système de voûtes et de piliers. L’entrée ainsi protégée, s’ouvre sur un espace qui, l’été, prolonge la salle commune : la cuisine. C’est la pièce principale du foyer et cette dernière est équipée d’une cheminée située en entrant à gauche, et d’une souillarde munie d’un évier qui était situé dans l’angle de la pièce, proche de la citerne (qui servait à plusieurs foyers). La cuisine communiquait à l’époque avec une seconde pièce qui était alors la chambre des parents ou des grands-parents. Au dernier étage se trouvaient les chambres dont une pouvait accueillir un salarié (berger ou autre). Il pouvait également y avoir une partie réservée au salage du cochon parfois appelée le charnier. Cet étage pouvait également être utilisé comme galetas, on entreposait les récoltes de céréales. Il existait un autre foyer dont il ne reste aujourd’hui que la porte, on entrait sur une pièce équipée d’un lit et d’un escalier qui menait au grenier. L’analyse de l’habitation laisse transparaître une organisation familiale très différente du modèle que nous connaissons aujourd’hui. Les famille étaient de type élargie20, l’espace commun primait sur les espaces individuels, il était l’espace de vie de l’habitation. Les chambres étaient communes et n’avaient pas la fonction de lieu personnel ou individuel comme ça peut être le cas aujourd’hui. La répartition du programme dans la ferme nous montre l’inter-dépendance qui existait entre les hommes et leurs animaux. Les habitants se servaient de la chaleur des animaux pour chauffer leur lieu de vie, ils bénéficiaient aussi de leur production (viande, peau, lait, force de travail). En contre partie les animaux sont soignés par l’homme qui subvient à leurs besoins. Cette mixité est renforcée par la circulation du bâtiment.

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Une famille élargie est un ensemble apparenté de plusieurs personnes vivant dans le même foyer. 45


Répartitions programmatique de Roquesaltes

Chambres Galetas

Stock de fourrage (pailler)

Cuisine Chambre

Chambre Galetas

Ecurie (Bergerie)

Porcherie Poulailler

Étable

Foyer (ruine)

Figure 21 : Plan des répartitions fonctionnelles

O 1

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Circulations au sein de la ferme

Ouvertures intérieures

Ouvertures extérieures

Escaliers endommagés

Figure 22 : Plan schématique des connections intérieures et extérieures

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Figure 23 : Coupe schématique du système de voûte

Figure 24 : Axonométrie partielle de la ferme, partie bergerie

Figure 25 : Croquis des tansferts de charges sur le système des contre-voûtes


Circulation (cf figure 22) La circulation globale du lieu s’organise autour des espaces communs : la cour extérieure et le foyer d’habitation. La plupart des espaces bénéficient de plusieurs points d’accès permettant une fluidité du parcours. La circulation joue aussi avec la topographie : le premier niveau de la bergerie est directement accessible à l’arrière de la ferme pour la rentrée du foin. On remarque que les trois niveaux de la ferme sont accessibles sans avoir à passer par l’extérieur (au premier niveau un passage sous le «balet» permet d’accéder au fenil). Cette fluidité est aujourd’hui entravé car de nombreuses portes ont été bouchées. La circulation contribue à la mixité des programmes. Les espaces, même s’ils ont une fonction précise sont facilement accessibles. Ainsi la limite entre habitation et espace de travail est atténuée, permettant une optimisation du temps notamment. La construction comme outil de travail Roquesaltes est une construction alliant habitation et bâtiment agricole et cette caractéristique découle d’une logique de conception qui tend à se servir de la construction comme d’un outil de travail. La bergerie La ferme de Roquesaltes possède un élément atypique qui la différencie des autres fermes de la région. La bergerie est en partie composée de deux voûtes superposées ; alors que ces deux voûtes sont en général une voûte en panier surmontée d’une voûte plein cintre, la bergerie est ici composée d’une voûte d’arêtes surbaissée surmontée d’une voûte en ogive. La voûte surbaissée est interrompue par des contres voûtes permettant de transmettre les charges de part et d’autres. Ceci permet normalement de dégager des ouvertures. Roquesaltes possède effectivement une ouverture en rez-de-chaussée, mais ces dégagements ont avant tout été réalisés afin de pouvoir faire descendre le fourrage depuis le pailler où il était stocké. Ce système permettait à l’agriculteur de faire directement tomber le foin dans les mangeoires de la bergerie. Aujourd’hui cette voûte est détruite, seules les traces de son assemblage au mur restent visibles. L’aire à Battre Cette zone constituée de grandes dalles de calcaire mises au sol, servait à battre le blé fraîchement récolté afin d’en récupérer les grains. La ferme de Roquesaltes possédant une cour qui jouxte la grange et dessert l’accès aux différents bâtiments ainsi qu’à la citerne. De prime abord, on peut imaginer que c’est cet espace qui faisait office d’aire à battre. Cette position hypothétique de l’aire pose tout de même un problème ergonomique, en effet le plus souvent ce lieu jouxte le fenil où l’on stockait le fourrage pour les animaux (issu des tiges de graminées débarrassées de leurs graines, limitant ainsi le transport de ces dernières). A Roquesaltes l’entrée du pailler étant située au nord de la bâtisse, si l’aire à battre se situait dans la cour, l’agriculteur devait alors faire le tour pour rentrer son foin. Il paraîtrait donc plus pragmatique que cette aire, conformément à l’habitude, se situât en ce second lieu. Or, si nous observons la zone devant le 49


Aire à battre 2

Élévation Sud-Est, aire à battre 1

Aire à battre 1

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Élévation Nord-Est, aire à battre 2

Figure 26 : Croquis des emplacements potentiels de l’aire à battre, la solution retenue est en orange

Figure 27 : Hypothèse de développement chronologique de Roquesaltes


fenil, il n’y a pas ou plus de dalle et l’absence de dallage rend difficile l’interprétation de l’organisation du lieu. Cette zone était souvent exposée aux vents pour écosser les bogues des graines. Si l’on se réfère à la typologie exposée en première partie, selon laquelle la praticité de la construction est privilégiée, l’aire à battre devait se situer en continuité du pailler. Ces deux éléments traduisent l’idée que la construction est bien plus qu’un abris pour ces agriculteurs, elle devient leur outil de travail. Ainsi des solutions techniques sont mises en œuvre pour garantir un fonctionnement optimal de production. Hypothèse des étapes de construction En observant le découpage parcellaire autour de la ferme on peut penser qu’elle s’est construite progressivement, par achat successifs de parcelles. L’habitat se situe en limite de propriété pour préserver au maximum la zone cultivée et pour ne pas la couper par des accès. L’analyse typologique réalisée plus haut nous apprend que les fermes caussenardes se développaient en même temps que le cheptel. Si ce dernier s’agrandissait il fallait alors agrandir la bergerie et l’espace de stockage. Avec l’agrandissement du troupeau, plusieurs salariés pouvaient s’avérer nécessaires pour participer au travail de la ferme. C’est ainsi que des foyers supplémentaires étaient construit, chacun représentés par une cheminée (par foyer, on retrouve une entité familiale, les grands parents, les parents et les enfants) L’hypothèse de construction de la ferme émise dans ce mémoire est la suivante (cf figure 27) , elle s’appuie sur une observation architecturale éclairée par les caractéristiques typologiques abordées en première partie. Nous savons que les fermes caussenardes ont différents modèle d’implantation. Roquesaltes est une ferme qui s’est implantée en L avec une orientation au Sud (ici encore elle répond à la typologie caussenarde). L’habitation est la première construction, avec la bergerie en rez-de-chaussée, vient ensuite la construction d’une aile destinée aux brebis et au stockage du foin (pailler). Une cour pavée de lauzes plates servait peutêtre d’aire à battre21. Dans un deuxième temps nous pouvons penser que deux bâtisses sont venues jouxter la première partie de la ferme. On peut supposer un agrandissement du cheptel entraînant un besoin d’espace supplémentaire, ceci se traduit par en rez-de-chaussée pour les animaux surmontée d’une habitation sur le premier niveau. De plus ces deux corps de bâtiment possèdent chacun un foyer, ils traduisent donc l’existence de deux familles supplémentaires. Une quatrième habitation est venue s’ajouter aux bâtiments pré-existants, cette habitation est aujourd’hui en ruine et il n’y a pas de trace de sa cheminée. Nous savons qu’il y eu jusqu’à quatre foyers à Roquesaltes, or jusqu’à présent nous n’avons pu compter que trois cheminées, il est donc probable que la quatrième appartenait à cette habitation22. 21 22

cf : bâtit complémentaire de l’habitation En 1731, on mentionne 4 feux (habitations) à Roquesaltes : les familles Baumel, Grégoire, Grailhe, Valès. En 1868, il y avait 12 habitants (Dictionnaire des lieux habités de l’Aveyron, Dardé 1868). 51


Circuit de récupération des eaux de pluies

Avaloir

Puits

Puits Puits

Figure 32 : Localisation des puits, citernes et écoulement des eaux

Citerne

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Pour finir la création d’une jasse (bergerie) supplémentaire permettant l’agrandissement du troupeau, elle s’implante en rez-de-chaussée et possède un fenil pour le stock de fourrage. Cette partie appartient aujourd’hui à Monsieur Delagnes qui l’a restaurée pour en faire son habitation principale. La création de la ferme s’est faite petit à petit , la construction que nous connaissons aujourd’hui résulte d’un processus de création. Les différents bâtiments sont apparus en conséquences de l’amélioration de la situation économique du territoire. Malgré son évolution et ses transformations, la conception de la ferme à dû sans cesse tenir compte d’un élément indispensable à son fonctionnement : l’eau. De l’importance de l’eau : des solutions architecturales. Nous l’avons vu en première partie, Roquesaltes est située sur un plateau calcaire dépourvu de cours d’eau circulant à l’air libre. Il existe cependant une source situé à 200 m au nord de la ferme, mais cette résurgence était trop faible pour l’alimentation en eau des hommes et des animaux. Les habitants de la ferme ont donc trouvé des solutions afin de conserver l’eau de pluie, ce sont des systèmes simples incorporés à la construction ou proche de la ferme. Les plans suivants permettent de localiser les citernes encore présentes sur le site. Des gouttières et chéneaux recueillaient les eaux de pluie provenant des toitures jusque dans des citernes. Dans le cas de Roquesaltes ces chéneaux nommés monoxyles étaient en bois (demi tronc évidé en berceau) et reposaient sur des corbeaux en pierre, donnant la pente voulue pour l’écoulement dans la citerne. L’eau rejoignait alors une alcôve maçonnée et enduite, située de préférence à distance de la bergerie. Ces citernes sont soit enterrées soit dans l’épaisseur d’un mur. Des abreuvoirs sont placés à proximité des puits pour les animaux. Roquesaltes possède trois citernes, deux d’entre elles sont enterrées et leur emprise est difficile à déterminer, la dernière est plus facilement localisable puisqu’elle possède un puits au premier niveau. La présence d’un avaloir sur le mur gouttereau laisse à penser qu’une autre citerne était située dans la bergerie, sûrement effondrée puis déblayée, il n’en reste rien aujourd’hui. Ces citernes permettaient l’approvisionnement de la ferme mais ne suffisaient pas toujours à traverser la saison chaude. D’autres techniques, naturelles ou construites vont permettre de recueillir les eaux de pluies.

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Figure 28 : Toit-citerne de la Roujarie avec puits et abreuvoir

Figure 30 : Lavogne naturelle de Roquesaltes

Figure 29 : Croquis schĂŠmatique du toit-citerne

Figure 31 : ChĂŠneaux en bois de la ferme de Hyelzas


La lavogne : Ce réservoir d’eau pluviale était à la base d’origine naturelle, une zone plus argileuse permettait de stocker les eaux de pluies. Le pavage en pourtour n’est pas là pour retenir l’eau mais plutôt pour préserver au mieux sa qualité et sa propreté car il est piétiné par les bêtes. Il existe une lavogne appartenant au domaine de Lacombe à 700 m au Nord de Roquesaltes celle-ci est aujourd’hui une cuvette maçonnée mais il est probable qu’il s’agisse d’un réaménagement de l’ancienne lavogne. La ferme de Roquesaltes possède elle aussi une réserve d’eau naturelle, celle-ci est située dans les rochers qui forment naturellement une sorte de creux où les bêtes venaient s’abreuver, on l’appelle la mare. Le nombre de lavognes est considérable, certains diront qu’il en existe un millier sur la région des grands Causses. Le toit-citerne : A la Roujarie, à quelques kilomètres de Roquesaltes se trouve ce système de récupération des eaux de pluie. Une couverture de lauzes expose sa plus grande surface aux intempéries, sa pente est minimale, juste suffisante à l’écoulement de la neige fondante ou de l’eau de pluie. La toiture à une pente dispose d’une ligne de chéneaux très ouverts sous la rive déversante. L’inclinaison des deux extrémités vers le centre permet la centralisation de l’eau dans un orifice central ouvert sur la citerne. Cette dernière est large et profonde, elle permet un stockage conséquent et au frais. Un puits avec margelle permet le puisage direct de l’eau sur un des côtés du réservoir pour permettre d’y plonger un seau.

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Circulation de l’air dans la bergerie

Figure 33 : Ventilation sur coupe longitudinale

Figure 34 : Ventilation entre le rez de chaussée et le niveau supérieur

O

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De la circulation de l’air La ventilation joue un rôle essentiel au sein d’une ferme. Dans la partie habitation elle permet d’assainir l’air et dans les parties non habitées elle joue un rôle primordial dans le stockage du foin et est nécessaire aux bonnes conditions de vies des animaux. Aucune information n’est disponible à ce sujet appliquées aux fermes caussenardes, mais l’étude de Roquesaltes montre qu’elle n’a pas été laissée au hasard. Dans la plupart des fermes caussenardes, la bergerie est située au dessous de l’habitation et ce fut le cas également aux débuts de Roquesaltes (avant l’agrandissement de la ferme). L’association de l’architecture en voûtes et de l’épaisseur de la maçonnerie constitue un système thermique ingénieux. La chaleur des bêtes du sous-sol est restituée au premier niveau tout en protégeant les habitants des émanations irritantes voire toxiques d’ammoniac causées par les brebis (fermentations des litières, moisissures de foin ou des particules organiques). La seconde partie de la ferme résultant de son agrandissement accueillait les animaux en rez-de-chaussée et le « fenil » (ou pailler) au premier niveau. De petites ouverture appelées «fenestrous» au sud, à l’est et à l’ouest permettent de créer des courants d’air et de ventiler cette partie du bâtiment Ces ouvertures sont situées en rez-de-chaussée mais également au premier niveau et sur les façades à pignons. L’hiver, ces lucarnes étaient remplies avec de la paille et du tissu afin de protéger les animaux du froid. La particularité de la voûte d’arêtes surbaissée, évidée sur ses côtés, permet une circulation de l’air de bas en haut, ventilant la réserve de fourrage stockée à l’étage. Le foin était ainsi maintenu à une température raisonnable (risques d’échauffement liés à la fermentation) et dans une moindre mesure séché s’il avait été rentré humide. La circulation de l’air est également favorisée par les murs en pierre. Dans les bâtiments non habités, les murs sont laissés nus d’enduit pour des raisons économiques, gardant ainsi des propriétés de porosité et permettant une forme de ventilation. A l’inverse, dans la partie habitation ils sont enduits pour s’isoler des températures extérieures, supprimant partiellement la circulation de l’air. Par ailleurs, la porosité et l’épaisseur des murs permettent une circulation de la vapeur d’eau qui provoque un effet de climatisation en été (phénomène thermodynamique de refroidissement par évaporation). L’absence de mortier ou d’argile dans la toiture permet à l’air de circuler, évitant ainsi des condensations et des altérations des pierres sur leurs faces intérieures. Ce système permet également de participer à la ventilation du bâtiment. A l’échelle de l’air, le bâtiment est globalement poreux, il respire. Le savoir-faire à plusieurs reprises évoqué lors de cet exposé, se retrouve dans la maîtrise de concepts architecturaux avancés tels que la ventilation, la condensation et la thermique. L’analyse architecturale de Roquesaltes nous permet de comprendre le lien qu’elle établit avec son site. De prime abord il semble impossible de dissocier la ferme de son paysage, en effet sa matérialité lui permet de s’intégrer harmonieusement à ce lieu spectaculaire. Il est important de souligner que c’est un lieu habité depuis le Néolithique puisqu’il dispose d’un abri naturel que constitue le chaos dolomitique et d’une source d’eau, denrée précieuse en ces lieux. L’historique de Roquesaltes montre qu’au fil du temps, l’homme à su trouver sur ce site les ressources qui lui étaient nécessaires. Malgré l’apparente poésie des lieux, la vie sur le Causse n’est pas évidente, l’homme va alors faire de l’architecture un instrument dont il va se servir pour survivre. Dès l’implantation 57



de la ferme dans le site on remarque qu’une réflexion est portée sur l’orientation, la ferme doit récupérer le maximum de lumière et se protéger des vents tout en permettant la ventilation des espaces. L’organisation de la ferme mixe habitation et parties réservées à l’activité agricole, ainsi le temps est rentabilisé et le lieu de travail est ergonomique. Mais ce principe de rentabilité va plus loin lorsque des techniques constructives comme la voûte d’arêtes surbaissée vont venir aider l’agriculteur dans son travail quotidien. D’autre part, l’eau est primordiale à la survie de l’homme en ces lieux. La source naturelle permet de répondre à ce besoin mais durant la saison chaude elle n’est pas suffisante. La construction va une nouvelle fois jouer un rôle, les toitures vont récupérer les eaux de pluies qui seront guidées jusque dans les citernes. Tout ce système est permis par l’architecture qui va s’adapter aux contraintes géographique du lieu. Un accent sera également porté sur la ventilation, élément indispensable à l’habitat et au bâtiment agricole. Ainsi l’étude architecturale de Roquesaltes à l’échelle du projet nous permet de comprendre comment non seulement elle s’adapte au site, mais aussi quels dispositifs ont été pensés en réponse aux contraintes environnementales. Ni architecte, ni maçon, l’agriculteur va se poser les questions nécessaires à la conception de tout projet architectural : l’orientation, la topographie, les usages, la circulation, la récupération des eaux de pluie, la ventilation. Tout ces éléments montrent que dans cette réflexion, la ferme fusionne avec son site, en ce sens où elle où elle s’évertue à composer avec ses contraintes. Nous verrons à présent que cette symbiose s’exprime à une échelle encore plus restreinte : le matériau. Le fait qu’il soit récolté sur le site participe à l’intégration paysagère de la ferme, mais nous verrons que par sa mise en œuvre il va également participer à l’adaptation au site. Du sol à la toiture, les techniques de construction associés à ce matériau sont variées et réfléchies. L’analyse constructive de la ferme permet de comprendre comment la matière apporte, elle aussi, des solutions à l’habitat rural Caussenard.

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Figure 35 : Mur fondÊ sur la roche et franchissement d’un sol meuble


Troisième partie : Étude constructive d’un bâtiment minéral Cette partie nous permettra de comprendre comment la mise en œuvre du matériau peut répondre à certaines problématiques. Nous l’avons vu précédemment, la conception et l’architecture de la ferme sont indissociables de sa fonction et de son environnement. Il s’agit maintenant de comprendre comment le matériau va participer à cette logique. Le choix de la pierre réside en plusieurs raisons : le bois fait défaut sur les Causses, il est difficile de débiter des sections qui pourraient servir de poutres. De plus il est difficile de lutter contre l’incendie dans ce territoire privé d’eau, la structure en bois est donc déconseillée. Enfin pour soutenir les lourdes toitures de calcaire la charpente en bois s’avère peu résistante. Si la ferme est presque exclusivement construite en pierre, nous verrons que cette matière est riche de propriétés et de mises en œuvre possibles. Notre analyse se développera à une échelle plus restreinte que lors de la seconde partie et selon les étapes de construction, des fondations à la toiture.

Chapitre 1 : Des fondations aux murs

Les fondations d’un bâtiment sont primordiales, elles assurent la transmission et la répartition des charges de cet ouvrage dans le sol. Le sol (ici, majoritairement composé de dalles) va lui aussi jouer un rôle important bien qu’il n’intervienne pas dans la structure. Il participe à l’isolation entre le terrain naturel et l’intérieur du bâtiment. Différents types de fondations Les fondations forment la partie structurelle qui s’oppose au tassement et aux infiltrations. Nous verrons les différents types de fondations que possède la ferme étudiée et comment elles s’adaptent aux contraintes géologiques du terrain. Le choix du terrain est important, il permet la stabilité du bâtiment. C’est pourquoi on choisit de préférence du rocher. Roquesaltes s’implante sur une zone où le rocher est affleurant, cette caractéristique permet au bâtiment de s’appuyer directement sur ce dernier. Cette solution permet de s’assurer de la résistance du terrain et d’éviter les problèmes de tassement. Si le mur est bâti directement sur le rocher il épouse la forme de ce rocher, comme c’est le cas à Roquesaltes dans la plupart des pièces en rez-de-chaussée. On observe ce phénomène à l’extérieur de la ferme sur la façade pignon Nord Est. Une autre solution consiste à démarrer le mur directement sur la terre avec une base de pierres suffisamment larges et solides pour répartir les charges et éviter un enfoncement de terrain, puis une déstabilisation de la structure. A propos de cette seconde technique, même si le terrain semble stable et solide, il est nécessaire d’asseoir le mur sur un rang uniforme de pierres épaisses et plus larges que l’on appelle «semelle». Ces blocs lourds et épais sont disposés en boutisses et calés avec soin pour éviter qu’ils ne pivotent sous le poids de la maçonnerie supérieure. Cette semelle est aménagée dans ce qui s’appelle une tranchée de fondation, c’est à dire à une vingtaine de centimètres de profondeur. Dans certain cas, un mur doit franchir une partie de sol instable (meuble, humide ou sableux), surtout 61



dans les zones d’affleurements rocheux. Ces arcs curieux, perturbant la rythmique de certains murs servent à décharger le poids de ces derniers de part et d’autre d’une partie du sol trop meuble, risquant de mettre en péril la stabilité du bâtiment. On observe ce système sur la façade Nord Ouest du bâtiment. Traitement du sol Les sols sont constitués de grandes dalles de calcaire accolées que ce soit pour les parties intérieures ou extérieures de la ferme. Pour les pièces intérieures situées au rez-de-chaussée on réalise sous le dallage du sol, un hérisson qui empêche l’eau de stagner. Ce système permet de protéger les murs des remontées par capillarité. Il est constitué de pierres tout-venant et de cailloutis de calage, et fait au moins 10 centimètres d’épaisseur. A l’extérieur (sur la cour ou l’aire à battre), les dalles sont plus ou moins jointives selon le soin que l’on veut apporter à cette surface. Le but est avant tout de niveler et de tenir propre la cour éprouvée par les nombreux passages des hommes et des animaux. Dans les pièces d’habitation, des joints au mortier de chaux sont réalisés entre les dalles afin d’avoir un sol cohérent. Ce procédé est aussi utilisé sur certaines aires à battre afin d’éviter les pertes de grains. Il ne reste aucune trace des dalles extérieures à Roquesaltes, celles-ci ont sûrement été récupérées au fil du temps. En revanche elles sont encore présentes au sol des pièces du premier niveau de l’habitation. Les murs en pierre de Roquesaltes, d’apparence commune et frustre jouent en réalité plusieurs rôles importants. Tout d’abord un rôle structurel car ils portent les planchers, la charpente ou la voûte chargée de sa couverture. Par endroit ils contiennent de l’eau (citernes) ou soutiennent la terre. Ils doivent résister à des contraintes verticales de compression résultant des descentes de charges mais aussi des contraintes horizontales liées aux poussées. Ces murs ont aussi pour but de protéger les hommes et les animaux de leur environnement extérieur. Suivant l’usage, un enduit viendra améliorer ce rôle de protection. Antinomiquement à cette précédente fonction, ils doivent laisser circuler les habitants, leurs animaux, l’air et la lumière. Ils sont donc percés d’ouvertures dont les dimensions et l’emplacement sont déterminés en fonction des besoins. L’eau, facteur primordial comme nous l’avons vu a plusieurs reprise, doit aussi circuler et être stockée, et les murs sont un vecteur de ces fonctions. Comme enceinte pour les citernes ou comme support pour les corbeaux et les chéneaux ils contribuent à la mobilité et à l’immobilité de l’eau. De la construction des murs Les pierres qui ont servi à construire les murs de Roquesaltes ont été ramassées à proximité, on les appelle «pierres de ramassage». Elles contribuent à donner une architecture caractéristique de la région, en accord avec le paysage. Ces pierres issues de roches affleurantes ont subi un processus d’érosion : une désagrégation physique sous l’action des eaux, du gel, du vent et des racines de végétaux et une altération chimique et biochimique principalement sous l’action de l’eau. Ces pierres vont ensuite s’appeler moellon, elles seront brute de ramassage ou partiellement taillée selon les murs et usages de la ferme. Les murs de la construction supportant les voûtes sont constitués de deux parements et sont très épais. Le 63


Moellon

Boutisse Fourrure Semelle 130 cm Figure 36 : Profil de mur en coupe verticale

Figure 37 : Profil de mur en coupe horizontale

Figure 38 : Profil de mur en coupe longitudinale


vide entre les deux parements est comblé par un remplissage de terre et de cailloux, de chaux ou de terre qui permettait de freiner l’infiltration du vent, sans l’empêcher pas de rentrer. Les moellons se calent de manière à ce que les joints se croisent systématiquement. Les plus belles pierres sont retaillées pour obtenir les faces intérieures et extérieures du mur. Les petites pierres servent à remplir l’espace résiduel en queue de pierres entre les deux parements, c’est la fourrure. Lorsque le mur est monté il faut que le lit de pierre reste le plus horizontal possible, plutôt penché vers l’extérieur pour éviter les infiltrations. Certaines pierres appelées boutisses traversent le mur pour bloquer en liaisonnant les deux parements et ainsi donner plus de cohésion à la maçonnerie. Une juste répartition des boutisses est essentielle à la bonne tenue d’un mur. Elles sont parfois en saillies sur la face intérieure ou extérieure du mur servant ainsi de corbeau. Les vides entre les deux parements sont comblés à l’aide d’un mortier réalisé à partir de sable, de chaux et d’eau ; il permet de retenir les cailloutis de la fourrure. Ce mortier peut avoir une couleur caractéristique car il est parfois « coupé » avec de la terre pour des raisons économiques. Les murs sont plus épais à la base, la variation d’épaisseur est intégrée progressivement en donnant au parement extérieur une légère inclinaison (3 à 5 cm sur toute la hauteur du mur), c’est ce qui s’appelle donner du fruit, ou donner du pied. Dans le cas de Roquesaltes avec ses voûtes superposées, le mur a une épaisseur d’environ 80-100 centimètres en partie supérieure et 100-140 centimètres voire plus pour la voûte inférieure. Les murs pignons qui ne reprennent pas la poussée des voûtes ont une épaisseur égale de haut en bas On remarque que les murs de Roquesaltes ne sont pas homogènes, constitués d’appareils plus ou moins grands avec des moellons plus ou moins équarris. La façon dont les pierres sont placées, taillés sur leur face en parement vont donner différents aspects à chaque mur. Cela détermine le contour, la finesse ou la grossièreté d’un assemblage, appelé l’appareillage. Pour les pierres d’origine stratigraphique comme la plupart des calcaires, l’appareillage est en opus assisé. Cet appareillage sera plus ou moins fin selon les façades de la ferme. La finesse du mur peut dépendre de l’orientation, par exemple on remarque qu’à Roquesaltes, les façades Nord de la ferme sont plus grossières que les autres. Dans la majorité des constructions on privilégie le traitement de la façade Nord (intempéries), ici c’est la façade Sud qui semble plus travaillée. L’explication la plus probable vient du fait que les ouvertures sont situées au Sud, par conséquent l’appareillage devait y être plus fin pour intégrer l’encadrement à la construction. Une seconde hypothèse vient appuyer ce choix : la pluie dominante venant du Midi, l’appareillage est plus fin pour protéger les murs de l’érosion. L’état de surface du mur, permet un ruissellement qui ne vient pas détruire la maçonnerie et un enduit est rajouté sur la partie habitation.

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Figure 39 : Chaînage d’angle

Figure 40 : Mortier de couleur rougeâtre («sabel»)


Propriétés thermiques et mécaniques La stabilité d’un mur en pierre repose sur le calage par son propre poids. Chaque pierre est posée de façon à ce que le poids des pierres supérieures contribue à la stabilité de l’ensemble. Les boutisses permettent d’augmenter la résistance du mur et la terre argileuse utilisée en comblant les interstices a un rôle isolant. Le mortier de calage agit selon le même principe mais permet d’améliorer les performances du mur. Les murs de Roquesaltes ne sont pas bien isolants, ils laissent passer froid et chaleur. En revanche leur inertie est intéressante grâce à leur masse : ils mettent longtemps à se réchauffer et à se refroidir. Cette propriété d’inertie est favorable au transfert de la vapeur. L’humidité est toujours transmise de la plus haute pression vers la plus basse. C’est à dire de l’intérieur du mur vers l’extérieur. Ce phénomène va permettre de créer un effet de climatisation, que l’on appelle aujourd’hui le «confort d’été». Cette migration de la vapeur n’est permise qu’à condition que le mur soit poreux, c’est pourquoi on préférera les revêtement à la chaux. Les murs en pierre sont également sujets aux infiltrations d’air. Dans son habitation par exemple, l’homme va chercher à s’en protéger (par un enduit de parement extérieur et/ou intérieur), dans d’autres cas cette propriété du mur sera bénéfique à la ventilation : la bergerie en est un exemple. Les murs sont reliés entre eux par des chaînages d’angle qui articulent le mur pignon avec le mur façade (cf figure 39). Au niveau du parement extérieur les pierres panneresses sont croisées, c’est ce que l’on appelle le « harpage ». On choisit de belles pierres épaisses et longues pour une meilleure tenue. Les murs sont également reliés à la voûte : ce lien est progressif, le départ de voûte s’appuie sur le mur par le biais des premières pierres taillées en angle obtus. Dans le cas des voûtes superposées , le sol sur la première voûte est constitué d’un dallage de pierre sur un cailloutis, ce dernier rajoute du poids et permet aux pierres de se bloquer entre elle et ainsi solidifier la voûte. Les murs gouttereaux sont ceux qui reçoivent les poussées importantes de voûtes L’enduit, une peau respirante L’enduit à la chaux est appliqué sur le parement du mur traditionnel. Il joue un rôle d’étanchéité à l’air comme à l’eau sans être totalement imperméable : il ne fait pas barrage à l’évaporation de l’eau contenue dans le mur. On le trouve plus particulièrement sur les façades exposées aux intempéries, ceci dans un souci d’économie. Roquesaltes est exposée à la pluie venant de l’ouest et du Midi, ceci explique que seul ce côté de l’habitation ai été enduit, contrairement à la partie nord. Son rôle concerne avant tout le confort de la l’habitation, en supprimant les courants d’air et en limitant le passage des rongeurs à l’intérieur ou en surface. Il peut dans certains cas avoir une fonction décorative mais ce n’est pas le cas de Roquesaltes. Il est constitué d’un mélange de chaux naturelle et d’agrégats de granulométrie variée (le sable et la terre) avec de l’eau. Il prend le nom de « sabel » car le sable qui le constitue est tiré de la corrosion de la roche dolomitique. Il est appliqué en plusieurs couches sur le mur à protéger et sa prise se fait lentement à l’air. Lorsqu’il a pris, le mortier appliqué en enduit reste une matière naturelle, telle une enveloppe de pierre calcaire respirante : une peau pour le bâtiment. 67


Figure 41 : Portes et fenĂŞtres de Roquesaltes


Chapitre 2 : Traitement des ouvertures Les murs que nous venons de décrire ne doivent pas entraver la circulation du bâtiment, à plusieurs égards. Les ouvertures qui y sont pratiquées permettent le mouvement des personnes, des bêtes, de l’air et de la lumière. Recensement des portes et fenêtres Les fenêtres de Roquesaltes et celles des fermes caussenardes sont en général petites et elles sont toujours dans un rapport plus haut que large, afin de minimiser leur surface. Ce format s’explique par le climat (hiver froid) mais également par le prix élevé du verre à l’époque. La largeur des ouvertures était également restreinte en raison de l’importante charge transmise par le linteau, autrement ce dernier devait avoir une section très importante ou être soutenu en son milieu. Les fenêtres d’aération de la grange sont encore plus petites et appelées «fenestrous», elles servent à laisser circuler l’air et la lumière. On peut supposer que les portes de Roquesaltes étaient pleines et faites en bois de pin, trouvé dans la région. Il est difficile de dire si les portes actuelles sont d’origines ou non, bien que faites de bois brut est vraisemblablement ancien. On peut remarquer sur ces photos la variation de leur encadrement. Le principe constructif d’une porte est simple, il était possible pour un paysan de réaliser lui-même ses menuiseries, grâce à un banc de menuisier et certains outils de base. Les portes en rez-de-chaussée donnant sur la bergerie et l’écurie sont plus larges afin de laisser passer les animaux. Techniques constructives associées Les ouvertures, qu’il s’agisse des portes ou des fenêtres, sont construites avec le mur en pierre : le bâtisseur place le seuil ou l’appui et continu de monter le mur de part et d’autres. Il posera ensuite les pierres de jambages sur les extrémités du seuil. Puis il continue de monter le mur et les jambages composés de panneresses, d’étançons et de boutisses, jusqu’à hauteur du linteau qui reposera dessus. Il est alors important de disposer une pierre homogène, offrant de bonnes qualités mécaniques et que l’on peut tailler. Appui, jambage et linteau reprennent les charges du mur : la qualité de la pierre est donc primordiale. On remarque que l’encadrement des portes et fenêtres ne tranche pas avec le reste du mur, ils sont fait du même matériau. Il existe plusieurs types et formes de linteaux, Roquesaltes elle-même en comprend un certain nombre. Un linteau peut prendre des aspects très divers suivant la portée qu’il a à franchir : pierre ou bois, monolithe ou matériau composé. Plus la forme sera arrondie, plus les charges seront réparties sur les appuis. Le linteau est souvent surmonté d’un arc de décharge. Linteaux droit, linteau monolithes Le linteau droit est sans doute le plus simple à réaliser, dans la mesure où la pièce aura une section suffisamment importante pour résister aux charges appliquées. Roquesaltes possède ce premier type de linteau sur ses ouvertures de petite taille, prévues pour le passage des hommes seulement (70-90 69


Figure 42 : Etapes de construction

Figure 43 : Encadrement légendé

Figure 44 : Différents types de linteaux, Roquesaltes


centimètres). Les fenêtre possèdent elles aussi un linteau droit. Plus la portée à franchir est grande plus la section conséquente impose de trouver une pierre lourde. Si cette pierre s’avère trop lourde on utilisera un linteau composé. Linteaux composés Un linteau composé de plusieurs pierres est généralement courbe : en anse de panier ou plein cintre et plus rarement en arc brisé. Roquesaltes en possède plusieurs types. Se sont des arcs appareillés qui fonctionnent comme des voûtes qui sont composés de plusieurs pierres ou claveaux (2 à 5, voire plus), chacune taillée en fonction de sa place dans le système. L’ensemble tient en place par l’effet de la poussée que les pierres exercent l’une sur l’autre. Le sommier, situé à la naissance de l’arc, commande l’inclinaison des pierres qui suivent. La clef de voûte, pierre centrale de l’arc, vient bloquer le tout. Certains arcs se passent de clef de voûte, comme à Roquesaltes où l’arc d’une porte est réalisé à partir de la taille de deux bloc de pierre en «demi-cintre». Les deux portes sur le mur gouttereau, destinées au passage des animaux, sont constituées d’un linteau composé qui permet de reprendre une portée plus grande. Décharge de Linteaux Nous l’avons énoncé plus haut, un linteau reprend les charges du mur ainsi que les charges supérieures comme la toiture. Il subit alors un effort de flexion qui se traduit par un effort de compression dans sa partie supérieure et un effort de traction dans sa partie inférieure. C’est cette traction qui peut causer la rupture du matériau laissant apparaître une fracture au niveau du linteau. Il est donc important de trouver la section suffisante, mais il existe un moyen de décharger le linteau via un dispositif architectural. Cette solution va modifier la répartition du poids du mur sur le linteau en la concentrant sur les appuis. C’est le même principe mécanique que celui utilisé pour la voûte. La décharge peut prendre plusieurs formes et le cas de Roquesaltes permet d’en rencontrer quelques unes. Pour les grandes portées comme celles du rez-de-chaussée, on peut voir dans un mur un arc clavé doubler l’arc de l’encadrement, sur les plus petites ouverture deux pierres sont disposées en «accent circonflexe». L’importance de la décharge va dépendre du poids du mur qu’elle supporte (hauteur, épaisseur) et des propriétés mécaniques du linteau. Ce système permet de concentrer l’essentiel des descentes de charges sur les appuis soulageant ainsi la partie centrale du linteau. Pour les portes de granges ou d’étables qui ont de grandes portées comme pour les «fenestrous» de petites dimensions, le principe reste le même. Sauf que pour ces derniers, la portée est très restreinte et donc la décharge n’est pas nécessairement dictée par des motifs mécaniques mais par un souci esthétique (homogénéité de la façade) ou par une habitude de mise en œuvre, le bâtisseur déchargeant systématiquement ses linteaux, qu’elle qu’en soit la portée.

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Figure 45 : DiffĂŠrentes dĂŠcharges de linteaux


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Figure 46 : Voûte brisée, ogive

Figure 47 : Voûte d’arêtes surbaissée

Figure 48 : Cintres de bois servant à la mise en oeuvre des voûtes, Hyelzas


Chapitre 3 : Plancher , le choix de la voûte Nous l’avons vu en amont de l’étude, le choix de la voûte comme guise de plancher se fait en fonction de la disponibilité des matériaux à proximité du site. Le site de Roquesaltes possède des affleurements rocheux, ainsi que des champs que l’on a épierré, ces réserves de pierre permettant de dresser la ferme. Le principe constructif de la voûte permet de couvrir un volume sans utiliser de bois et d’obtenir une structure susceptible de porter des charges importantes. Il est par ailleurs la seule solution technique connue permettant de faire tenir entre-elles des pierres qui ne reposent pas verticalement les unes sur les autres. Étude des différents types de voûtes Les fermes caussenardes sont érigées avec une structure de voûtes recouvertes de lauzes calcaires. Ce savoir-faire, largement utilisé à la période romane, utilise un coffrage en bois sur lequel étaient agencées les pierres sur chant (cf figure 51 page suivant), liées par un mortier de chaux, de sable et de bresel. La ferme de Roquesaltes comprend plusieurs types de voûtes, elles font notamment sa particularité .Comme la plupart des maisons Caussenardes, elle est construite sur le principe de deux voûtes superposées. Généralement, la voûte principale est brisée, s’apparentant à une voûte en ogive suffisamment haute pour permettre la construction de deux étages avec un plancher. C’est alors une voûte plate et plus basse dite en «anse de panier» qui vient jouer ce rôle. Dans sa partie bergerie, la ferme de Roquesaltes fonctionne selon le modèle évoqué, à ce détail près que sa voûte basse n’est pas en «anse de panier» mais en arêtes surbaissée (elle doit se terme à sa hauteur, qui est moindre que la moitié de sa largeur). La voûte d’arête est l’intersection de deux voûtes simples, c’est le mode de construction le plus ancien que l’on retrouve souvent en sous-sol. Par endroit, des poutres équarries supporteront un plancher, mais nous ne nous attarderons pas sur ce dispositif (cf figure 49 page suivante) latérales. Roquesaltes possède une voûte d’arêtes surbaissée, d’apparence quasiment plate, défiant les lois de la gravité. Un savoir fruit de l’expérience commune A l’époque où ces voûtes étaient réalisées, la transmission du savoir était essentiellement orale, c’est par le partage de la pratique que le savoir-faire se communiquait. On ne parlait pas résistance des matériaux ni calculs de structure, mais ces hommes, agriculteurs, trouvaient le moyen d’élever des voûtes en construisant des murs en conséquence de leurs poussées latérales. Roquesaltes possède une voûte d’arêtes surbaissées d’apparence quasiment plate, défiant les lois de la gravité. On avait une connaissance toute empirique qui permettait d’appréhender les forces obliques, et pour cela certaines règles connues de tous faisaient loi23.

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Informations tirées du livre MASSOT Jean Luc, FUSTIER - DAUTIER Nerte, POULIN Claude, Maison rurale et vie Paysanne en Provence, SERG/ Berger Levrault, 1975 75


Repérage, mise en oeuvre, et assemblage des voûtes.

Voûte brisée ou en ogive Figure 49 : Plan de repérage des voûtes

Voûte d’arêtes surbaissée O 1

5

10

Plancher sur poutres équarries


Figure 50 : Schéma de descente de charges

Cailloutis, terre ou débris Pierres posées sur chant Lit de mortier Planches sur cintres en bois

Figure 51 : Schéma de mise en œuvre

Figure 52 : Assemblage de départ de voûte

O

1

5m

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Étude de la mise en œuvre Les voûtes les plus répandues dans la typologie Caussenarde utilisée à Roquesaltes, sont les voûtes en blocage de maçonnerie. Elles permettent de grandes dimensions et toute la solidité désirable avec de nombreux matériaux de base : moellons bruts, même petits, pierre de réemploi... Il est possible de reconnaître ce genre de voûtes car il comporte sur l’intrados, l’empreinte des planches de coffrage ayant servies à la monter. Le déroulement des opérations se faisait selon plusieurs étapes : on commençait par mettre en place un cintre de charpente au galbe de la voûte, que l’on recouvrait d’une couche de mortier assez grasse, sur toute sa surface. On procédait ensuite à la mise en place de moellons plus ou moins équarris posés à l’équerre de la surface, parallèlement à l’axe des parties de voûte ; ils devaient être bien ajustés avec un marteau et maçonnés avec le mortier. La partie supérieure, le sommier, était ensuite rempli avec n’importe quel débris, même de la terre, et ce, jusqu’à niveler la voûte de manière à disposer à l’étage d’une surface plane. Une fois que le mortier était bien pris on pouvait procéder au décoffrage. Ce principe permettait de réaliser des voûtes en berceaux aussi bien que des voûtes d’arêtes avec toutes les pénétrations souhaitées. De plus, la terre qui venait combler le dessus de la voûte servait d’isolation. Une fois décoffrée, on pouvait faire apparaître les moellons de la voûte s’ils avaient des dimensions correctes, en repiquant le mortier de base et en grattant légèrement les joints, de manière à produire un intérieur esthétique. La toiture La voûte et sa couverture de dalle calcaire constituent un ensemble : le toit. Le poids des dalles contribue à son maintien. En effet, plus elle est chargée mieux elle se comporte, car la cohérence de l’ensemble dépend de la pression exercée par chaque pierre sur sa voisine. La toiture a pour but d’abriter les habitants et les animaux, elle sert aussi à diriger les eaux de pluie vers les chéneaux en bois. De plus, la technique de pose des lauzes employée permet à la toiture d’avoir un rôle dans la ventilation de l’ouvrage. La technique de pose des lauzes Les lauzes sont posées à même la voûte, cette dernière étant recouverte d’un lit de cailloutis qui permet d’imposer la pente du toit. Celle-ci peut varier de 30 à 60% et est déterminée par le rayon de courbure de la voûte supérieure et par la hauteur du mur. Si elle était trop marquée, les dalles de couverture posées sans fixation risqueraient de tomber. C’est la pression que vont exercer les pierres les unes sur les autres qui va accroître l’adhérence au lit inférieur. L’absence de mortier ou d’argile permet un renouvellement de l’air intérieur, conférant au bâtiment des propriétés saines pour l’habitat et évitant des condensations et des altérations de la pierre sur leurs faces intérieures. Les lauzes sont posées en rangs horizontaux à partir du bas, le premier étant le «rang d’égout» en saillie d’une vingtaine de centimètres par rapport au nu du mur. C’est ce rang qui permettra aux eaux de pluie de rejoindre le chéneau. Les autres rangs sont ensuite calés de façon à couvrir le joint du rang précédent

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Figure 53 : Toiture de lauzes, ferme de Hyelzas

Figure 54 : Toiture de lauzes de Roquesaltes, vue depuis le ÂŤbaletÂť

Figure 55 : Ensemble des toitures de Roquesaltes


en laissant environ un tiers apparent. Des lauzes progressivement plus petites sont utilisées en allant vers le haut de la toiture. Traitement des points délicats Certaines parties de la toiture sont assez délicates à couvrir, il faudra leur apporter une attention particulière afin de garantir leur étanchéité. Lorsque la toiture couvre une intersection de voûte, elle forme une noue convexe en arrondi. Ceci crée une surface conique nécessitant l’emploi de lauzes en trapèze plus étroites en bas qu’en haut. Le faîtage est également un élément primordial de l’ouvrage, il est situé à l’intersection des deux versants, au sommet de la toiture. Les lauzes sont alors posées à plat ou légèrement penchées, pour éviter les infiltrations. Le dernier rang du côté soumis au vent dominant recouvre l’autre pan, pour des raisons évidentes d’aérodynamisme. A cet endroit, un mortier de chaux est utilisé pour assurer la stabilité de l’ensemble. Sur les rives, les lauzes sont retaillées sur la tranche et posées en saillie de 15 à 25 centimètres. L’étude des différents éléments composant la structure du bâtiment nous permet de voir comment un même matériau peut répondre à différentes problématiques. C’est sa mise en œuvre qui va faire en sorte de répondre à un besoin, il peut protéger, transmettre une charge, s’élever pour dégager un espace, être poreux à certains égards, imperméable à d’autres... L’étude constructive de la ferme nous permet de comprendre quels liens forts elle établit avec son site, et notamment de quelle manière elle est connectée à la géologie. On a le sentiment que Roquesaltes, à la manière du chaos rocheux, à été engendrée par les lieux. Les pierres qui la constituent, prélevées en grande majorité à proximité, participent à cette impression. Mais c’est bien d’un savoir faire qu’elle est née, et l’étude du travail de l’homme et des différentes techniques employées pour construire Roquesaltes, révèle une faculté à tirer parti des propriétés de ce matériau brut et unique. L’agriculteur est allé chercher la roche affleurante, et a composé avec elle pour édifier les murs, ayant ainsi la garantie d’un sol résistant. Ces parois respirantes qui participent à la ventilation de la ferme ont été construites plus ou moins grossièrement suivant leurs orientation et la taille des pierres disponibles. Un enduit également minéral vient protéger l’habitation des vents et de la corrosion, tel une peau. Les ouvertures pratiquées permettent d’amener de l’air et de la lumière dans la construction, chacune étant dimensionnée en fonction de son usage (air, lumière, passage d’animaux). La voûte minérale s’assemble à ces murs épais, recouverte de terre, elle isole la partie réservée aux animaux de l’espace habitable tout en permettant de chauffer ce dernier. Elle permet également de soutenir la lourde couverture composée de lauzes. Le poids de ces dernières leur permet d’être posées sans mortier et ainsi de favoriser le passage de l’air. Le site de Roquesaltes ne propose pas de matériaux variés, ce qui peut paraître contraignant au premier abord. Les hommes ont donc réfléchi et trouvé, au fil du temps et des essais, des techniques constructives permettant au matériau de répondre aux besoins de la construction. Leur approche du matériau est totalement différente de celle que nous pouvons avoir aujourd’hui. Non seulement il est prélevé sur place dans un souci d’économie mais surtout il fait partie intégrante du processus de conception. Le bâtisseur fait en sorte, par différentes mises-en-œuvre, qu’il participe à la logique de la construction.

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Conclusion

La ferme de Roquesaltes est aujourd’hui dans un état de ruine car c’est une habitation conçue pour répondre aux usages agricoles d’une société rurale aujourd’hui disparue. En raison de phénomènes de mondialisation socio-économiques, Roquesaltes est désormais désertée car obsolète pour les nouveaux systèmes de production. Un certain savoir faire associé à une logique particulière ont été nécessaires à la construction de cet ensemble. Lors de cette étude, nous avons questionné cette ferme du point de vue de l’architecte, pour en tirer ce qu’elle a à nous apprendre. Les réponses qu’elle apporte à des impératifs font appel à une conception, un savoir faire et des techniques judicieuses. La construction étudiée nous dispense une leçon d’architecture par sa justesse en terme de compréhension d’un site, alors que de nos jours, le projet est trop souvent déconnecté de son environnement et apparait comme un objet ou une œuvre artistique propre à son concepteur. Le territoire hostile des Grands Causses a généré une architecture caractérisée par la modestie des moyens mis en œuvre et un sens des priorités. Comme le montre notre étude contextuelle et historique, de l’étude et de l’appropriation des contraintes d’un site, vont naître une réflexion permettant au bâtisseur de tirer parti de ses contraintes. Roquesaltes est donc une ferme qui préserve la qualité naturelle du site sur lequel elle s’implante. Sa construction et ses abords participent à l’harmonie paysagère. Elle nous démontre comment l’architecture peut composer avec son milieu naturel, par sa matérialité, son orientation et le jeu des différents niveaux de sa construction avec la topographie. On peut également tirer un enseignement de la gestion des ressources mise en œuvre au sein de ce bâtiment. Comme nous l’avons vu, la problématique principale du territoire est l’absence d’eau. C’est par la construction que la ferme a développé des systèmes permettant de récupérer cette richesse vitale. Le traitement de l’air, via les techniques de ventilation basiques mais efficaces mises en œuvre, est également un élément indispensable à toute construction, il permet d’assurer un espace de vie sain et la pérennité de l’ouvrage. Tous ces éléments témoignent d’une réelle réflexion quant à la construction, rien n’est laissé au hasard. Mais le tour de force de cette architecture est de répondre à toutes ces problématiques par l’utilisation exclusive d’un matériau : la pierre calcaire. Chaque élément architectural, des fondations à la toiture, s’adapte encore une fois à des caractéristiques environnementales et à des usages, par les différentes mises en œuvre de cette même matière première.


L’architecture vernaculaire Caussenarde peut être un enseignement dans notre vision actuelle du projet. Elle pose la question de l’économie de moyens, du rapport au site et des usages. Enfin elle introduit la prépondérance du matériau et sa mise en œuvre dès la phase de conception. Ce sont des considérations trop absentes des processus de conception actuels classiques. Les problématiques environnementales et le climat économique actuel, devraient nous pousser à envisager d’autres manières de construire. Il me semble possible de poser un nouveau regard sur une architecture vernaculaire pourtant jugée passéiste par les adeptes du modernisme au XXe siècle, en s’inspirant du processus de conception qui se base sur le matériau. Elle s’inscrit pleinement dans les problématiques de notre époque et peut en partie répondre aux questions actuelles sur l’avenir d’une architecture pérenne en s’appuyant sur l’emploi de matériaux locaux aux vertus bioclimatiques. Certains architectes essaient de renouer en innovant avec cette ancienne logique architecturale, en la mettant au service de l’environnement et de ses occupants. Des architectes tels que Simon Vélez ou Martin Rauch réinterprètent d’anciens matériaux délaissés, et tout en les rattachant à leur contexte, ils mettent au point des procédés constructifs viables pour l’architecture.

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Glossaire (extrait de l’ouvrage écrit par LESCURE Jean et MERLIN Jacques, Maisons des Cévennes, Architecture vernaculaire au coeur du Parc national, Le Rouergue, 2010) Agrégat. Matériau d’origine minérale qui provient le plus souvent de la désagrégation de roches et qui entre dans la composition du mortier et du béton pour leur donner leur résistance et leur consistance. Il s’agit le plus souvent de sable, de gravier, de cailloux... Les agrégats roulé (si prélevés dans le lit des cours d’eau) ou concassés (extrait en carrière), doivent être débarrassés de toutes terres et boues. Aire à battre, aire de battage. Surface extérieure dallée, serrée ou taillée à même le rocher, sur laquelle les récoltes de céréales étaient battues (au fléau ou à l’aide d’un rouleau tiré par des bœufs, mules, mulets) pour séparer le grain. Un muret (parfois aussi le rocher) la clôturait afin d’empêcher l’éparpillement pendant le battage, et se servir du vent. Appareil, appareillage. Assemblage déterminé d’éléments taillés d’une construction en pierres. On parle également d’appareil ou d’appareillage pour les maçonneries ordinaires. Les différents types d’appareillages (appelés également «opus») varient selon l’origine géologique des pierres, le soin apporté ou non à leur préparation, et la façon dont elles sont ajustées entre elles. Appui. Élément de maçonnerie formant la partie inférieure d’une baie, sur lequel repose la fenêtre. L’appui désigne également toute pièce ayant rôle de supporter ou reprendre des charges. Le terme désigne enfin un élément sur lequel on peut prendre appui : barre d’appui, rampe d’appui (balcon, escaliers...), etc. Arc de décharge. Arc bâti dans l’épaisseur du mur au-dessus du linteau dont le parement affleure sur le nu du mur pour déplacer la répartition de la charge du mur situé sur l’extrados de l’arc au droit des appuis du linteau. La décharge peut aussi être réalisée par un double linteau ou encore par un bâti en encorbellement, lequel est parfois coffré par des planches épaisses ou des lauzes. Argile. Roche sédimentaire meuble, imperméable, qui, imbibée d’eau, est grasse au toucher et peut être façonnée. En se dessécheant elle de devient dure et se rétracte. Assise. Couche de pierres appareillées dans un mur, de hauteurs semblables pour former un lit aplani relativement régulier. C’est aussi le dessous d’une pierre dans son sens de pose. Désigne enfin la base ou la fondation d’un ouvrage supportant des charges. Auvent. Petit toit, généralement en appentis, couvrant un espace à l’air libre devant une porte donnant sur l’extérieur, une façade. Berceau. Forme de voûte dont le tracé est obtenu par la translation d’un arc générateur. Il existe autant de types de voûtes en berceau que de types d’arc, tant dans la forme que dans la direction.

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Boutisse. Littéralement, «qui va d’un bout à l’autre». Pierre à bâtir qui occupe toute la largeur d’un mur et qui contribue de ce fait à assurer la liaison du parement intérieur avec le parement extérieur. Dans le cas d’un mur très large ou de pierre trop petites, il peut être réalisé une chaîne de boutisses. Cailloutis. Fragments de pierres de petites dimensions. Capillaires (remontées), capillarité. On parle de remontées capillaires pour évoquer le cheminement de l’eau qui remonte des nappes phréatiques dans le sous-sol (ou des eaux de ruissellement infiltrées) vers les fondations et les murs. Elles sont l’une des origines de l’humidité qui nuit aux enduits et maçonneries. «Cazelle», «chazelle», «casèle». Terme régional désignant des abris de pierres sèches, des «cabanes», pour bergers ou cantonniers. Elles sont généralement bâties en encorbellement et peuvent être couvertes de lauzes. Selon les zones ou les régions elles sont appelées capitelles, bories, orris, gariottes, cadoles... Chaîne d’angle. Structure verticale de renforcement des angles des murs, maçonnée en harpes, la plus longue partie de la pierre étant alternativement tournée vers un côté de l’angle ou vers l’autre. Généralement appareillée avec soin. Chanfrein. Surface oblique obtenue en abattant l’arête d’une pierre, d’une pièce de bois, de métal etc. Chant, champ. Tranche d’un élément. Une pierre de chant ou sur chant est posée verticalement, sur son côté le plus étroit (on dit aussi : pose en délit). Charnier. Local ou partie de pièce (souvent dans les combles) où l’on sale et conserve le cochon. Châssis. Cadre d’une fenêtre. On distingue châssis dormant (fixe) et châssis ouvrant. Chaux. Liant obtenu par calcination du calcaire. Les chaux se divisent en deux catégories bien distinctes, selon que la prise s’effectue ous l’action du gaz carbonique de l’air (chaux aérienne) ou sous l’action de l’eau (chaux hydraulique). Chéneau. Rigole ménagée à la base d’un toit et canalisant les eaux de pluie vers un tuyau de descente. Autrefois taillés dans du bois ou réalisés en terre cuite selon les régions, ils sont généralement en zinc ou en cuivre actuellement (syn. de gouttière). Clapàs (occ). Tas de pierres. Sur les Causses, les pierres extraites des champs au fur et à mesure des labours sont accumulées en tas informes, formant des réserves de utilisées lors des constructions. Très caractéristiques des paysages caussenard ou de certaines garrigues. Claveau. Pierre en forme de coin, élément de l’appareil d’une plate bande ou d’un arc composé. Le claveau


central est la clef, le premier claveau est le sommier. Dans le cas d’une voûte, le claveau est appelé voussoir. Clef. Claveau central d’un arc ou d’une voûte, qui, posé le dernier, bloque les autres pierres dans la position voulue. Coffrage. Forme en bois de charpente servant de moule pour la mise en œuvre d’un voûte en pierres. Forme en matériaux divers (bois, fer...) servant de moule pour tenir un talus ou jusqu’à la prise d’un ouvrage en béton (ou mortier). Pose de cette forme. Corbeau. Petit support engagé perpendiculairement dans la maçonnerie courante, dont la saillie en porteà-faux sert d’appui. Il peut être en pierre de taille ou en bois. Utilisé pour soutenir un balcon, un manteau de cheminée, un débord de toiture. Dormant. Partie fixe de la menuiserie d’une baie, scellée dans la maçonnerie (cadre dormant). Désigne aussi les parties verticales de l’embrasement. Ébrasement. Évasement de la baie vers l’intérieur de la pièce pour laisser entrer la lumière et faciliter l’ouverture d’une menuiserie ouvrante. Égout, égoutier. En couverture, extrémité inférieure en saillie d’un pan de toit d’où s’écoulent les eaux de pluie qui sont recueillies pas une gouttière ou un chéneau. Les lauzes d’égout, dites aussi égoutier, sont de grandes taille et composent le premier rang en bas de toiture. Embrasure. Espace évidé dans un mur pour le percement d’une baie, élargi depuis l’intérieur de la pièce pour accéder à la menuiserie et, dans le cas d’une fenêtre, favoriser l’entrée de la lumière (voir ébrasement). Empochement. Trou ménagé dans un mur pour recevoir une solive. Encorbellement. Construction établie en porte-à-faux sur le nu d’un mur et supportée par des consoles ou des corbeaux profondément ancrés dans le mur. Saillie obtenue par un ou plusieurs corbeaux superposés (balcon, corniche, tourelle). Technique de construction de voûtes en pierre qui vient déborder sur la précédente. Enduit. Revêtement fait d’un mortier que l’on utilise pour recouvrir les murs d’une construction et que l’on applique en une ou plusieurs couches successives. L’enduit à pour but de protéger la maçonnerie des intempéries, et lui donne un aspect différent suivant sa teinte et son mode de finition. Etançon. Dans un jambage en pierre de taille, élément posé debout, ne dépassant guère la largeur du tableau, sans emprise vers le parement ou l’épaisseur, placé entre une boutisse et une paneresse. Extrados. Surface extérieure (supérieure) convexe d’un arc ou d’une voûte (à l’opposé de l’intrados).

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«Fenestrou». Terme régional désignant une ouverture de petite taille. Finition. Se dit de la dernière couche d’un enduit au mortier, de granulomérie et d’épaisseur fines. Elle peut être traitée de différentes façons : jetée, fouettée, brossée, talochée. Fourrure. Remplissage grossier entre deux parements d’un mur. Doublage pour renforcer une structure. «Frejals» (occ). Dalles équarries épaisses et jointives de calcaire dur au sol d’une habitation caussenarde. Fruit. Orientation oblique de la face d’un mur par rapport à la verticale, la base étant plus large que le sommet, afin de lui donner plus de stabilité. On parle de fruit aval pour le parement extérieur visible d’un mur de soutènement, et de fruit amont pour son parement intérieur. Contre-fruit : inclinaison d’un mur dont la tête se trouve en surplomb par rapport au pied. Cette inclinaison correspond à un déversement qui exprime un désordre pouvant avoir des origines diverses et entrainer la chute de l’ouvrage. Harpe, harpage. De «harper», empoigner. Saillie des pierres d’attente servant au raccord d’une construction voisine. Alternance de boutisses et de panneresses, ou d’éléments courts et d’éléments longs (chaînes d’angles, lauzes de rives). Hérisson. Le hérisson est une couche formée de blocs de pierre qui sont posés sur le chant à même le sol et qui permettent de créer une couche isolante et ventilée entre la terre et le sol du rez de chaussée. Désigne aussi le couronnement en pierres clavées arrondies des murets de pierre sèches. Hourdage. Maçonnerie grossière (pierre et mortier). De façon générale remplissage à l’aide de matériaux divers (torchis, briques, tuileaux, pierres) des espaces vides des maçonneries : arcs, cloisons, pans de bois ou de métal, planches, voûtes... Imposte. Partie supérieure d’une porte ou d’une fenêtre, fixe ou ouvrante, séparée de leur battants par une traverse dormante. Intrados. Face intérieure d’un arc, d’une voûte ou d’une plate bande, dont le tracé suit une courbure concave variable (à l’opposé de l’extrados). Jambage. Montant latéral d’une baie, taillé en angle, et supportant le linteau (syn. de pied-droit). Joint. Interstice entre deux éléments de maçonnerie, comblé par un matériau de liaison qui solidarise ces derniers. Selon leur épaisseur, les joints sont dit maigres ou gras ou beurrés. Les joints visibles sont les joints de parement. Joint vif. Joint sec entre deux pierres, d’une épaisseur infime dans mortier.


Larmier. Corps horizontal saillant du nu du mur, destiné à écarter les eaux de pluie. Réalisé en pierre de taille, il est rainuré d’une goutte d’eau en sous-face. Des lauzes épaisses incorporées dans le mur peuvent faire office de larmier. «Lavogne». Terme régional. Particularité des causses. Mare naturelle ou artificielle, réalisée dans ce cas en tapissant une cuvette d’argile pour y retenir l’eau de pluie. Sert à abreuver les brebis. Lucarne. Fenêtre de toit. Ouverture ménagée dans un pan de toiture pour donner du jour et de l’air aux combles. Suivant la forme et l’emplacement, on distingue les lucarnes de façade, les rampantes... Modillon. Ornement saillant répété de proche en proche sous une corniche. Contrairement au corbeau, le modillon a une fonction plus décorative que porteuse. Moellon. Pierre de construction de petit format, dont les faces sont le plus souvent, très sommairement dressées. Mortier. Mélange humide de chaux (ou de ciment) et de sable, c’est à dire de liant et d’agrégat, durcissant au séchage, utilisé à la liaison des éléments maçonnés, pour enduire, coller, ragréer, jointer, obturer, sceller... Mur gouttereau. Mur qui reçoit l’égout du toit par opposition au mur pignon. Noue. En charpente comme en couverture, angle rentrant qui résulte de la rencontre de deux versants de toit (l’inverse est l’arêtier). Parement. Face apparente d’un ouvrage de maçonnerie. Panneresse. Se dit d’une pierre qui est plus longue en parement qu’en pénétration dans le mur. Pierre sèche. Mode de construction avec mise en œuvre de la pierre et calage sans adjonction de mortier. Rive (de toit). bordure de toit en saillie sur le pignon ce qui désigne aussi bien une charpente qu’un pan de couverture sur ses côtés. Seuil. Dalle de pierre ou pièce de bois, en travers et à la base des jambages de l’ouverture d’une porte. Parfois employé pour une fenêtre. Soue. Petit bâtiment abritant le cochon. Tout-venant. Mélange de pierres, cailloux et sables non triés et de calibres variés.

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Bibliographie ALLOULA Malek, BALPE Pierre, BERGOUNIOUX Pierre, BON François, MICHON Pierre, SURMONT Jean-Jacques, Causses et Vallées, Les presses du Languedoc, 1994. AUSSIBAL Didier BRIANE Gérard, Paysage de l’Aveyron : Portrait et enjeux, Edition du Rouergue, 2007 AUSSIBAL Robert, VALES Louis, SOLASSOL Pierre, Bâtisseurs des Grands Causses, Los Adralhans, 1990 BOUVIALA Alain, CROUZAT Germain, GILBERT Gérard, Autrefois les paysans : vie quotidienne bâtit traditionnel, Los Adralhans, 2007. CAGIN Louis, NICOLAS Laetitia, Construire en pierre sèche, Eyrolles, 2011 CAYLA A., Architecture paysanne du Rouergue et des Cévennes, édition serg, 1975 COIGNET J. et L, Maçonnerie de pierre : matériaux et techniques, désordres et interventions, édition au pied du mur, 2007 GALES Françoise, Millau le patrimoine des Causses, patrimoine Midi Pyrénées, 2010 GIROU J , BURUCOA CH , Causses et Cévennes, Gorges du Tarn, Arthaud, 1957 LESCURE Jean et MERLIN Jacques, Maisons des Cévennes, Architecture vernaculaire au coeur du Parc national, Le Rouergue, 2010 MARRES Paul, Les Grands Causses: étude de géographie physique et humaine. Le labeur humain, Volume 2, Imprimerie Arrault, 1935 MARTEL Edouard-Alfred, Les Causses Majeurs, édition du Beffroi, 2000 MASSOT Jean Luc, FUSTIER - DAUTIER Nerte, POULIN Claude, Maison rurale et vie Paysanne en Provence, SERG/ Berger Levrault, 1975 PARGUEL Marc, Saint André de Vézines, La vie du village autrefois, repro-service Millau, 2004. PARGUEL Marc, La petite Histoire de Saint André de Vézines, histoire du village et de ses environs des origines à nos jours, Agm imprimeur Millau, 2004


PARGUEL Marc, Roquesaltes Donjon naturel du Causse Noir, Lacour, 2005 ROUIRE J, ROUSSET C, Causses, Cévennes, Aubrac - Guide Géologique Régionaux, Masson et Cie éditeurs, 1973 SOLASSOL Pierre, CARTAYRADE Marie-Jo, Le Causse Noir, Vagabons des Grands Causses, 2008 TROCHET J.R, Les maisons paysannes en France, edition créaphis, 2007 Colloque (2004; Rodez), Terre et Paysannerie en Rouergue (X-XXe siècle), Société des lettres, science et arts de l’aveyron, 2004 VIRENQUE Jean, En parcourant Le Larzac sur les chemins de l’Histoire, imprimerie nouvelle Saint Afrique, 1973

Crédits photographiques Paysageaveyron.fr : figures 1, 2, 4. Bruno Monginoux - www.photo-paysage.com : figure 7. Carte IGN du Parc Régional des Grands Causses, Patrimoines et Paysages. Année 2000 : figure 9. AUSSIBAL Robert, VALES Louis, SOLASSOL Pierre, Bâtisseurs des Grands Causses, Los Adralhans, 1990, p 19, p 22 : figures 10, 11 Google Earth : figure 13. Photos Hitoriques collection Parguel : figure 15. Géoportail : figure 17. Photo prise par Marc Parguel : figure 30. LESCURE Jean et MERLIN Jacques, Maisons des Cévennes, Architecture vernaculaire au coeur du Parc national, Le Rouergue, 2010, p 202-204 : figures 42, 43, 44 (dessin), 50. Le reste des documents ou photographies apparaissant dans le mémoire sont personnels.

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