Institut d’Etudes Politiques de Grenoble Organisation internationale et mondialisation
Mafia et mondialisation
Mafias : Ancrage local, pouvoir transnational.
Céline Torrisi Moris, Master 1 IJFCT Janvier 2009
Monsieur Stéphane La Branche, chercheur enseignant associé EPE de Grenoble, directeur groupe de recherche sur le changement climatique
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Depuis le 11 septembre 2001, les démocraties occidentales n’ont de cesse de focaliser leur attention sur un élément qu’elles considèrent comme leur plus grande menace : le terrorisme. De cette façon elles semblent laisser de côté un autre danger : la criminalité organisée. Le choix des mots n’est pas anodin. L’effet que l’on désire susciter est altéré selon que l’on parle de criminalité organisée ou de mafia. En effet parler de la criminalité organisée confère davantage de pesanteur au discours et peut être davantage de crédit. Cependant parler de la mafia fait souvent sourire, ou suscite une certaine fascination chez les individus. Pourtant ces deux expressions désignent un même phénomène, bien plus redoutable qu’on ne se l’imagine et ce pour plusieurs raisons. D’une part parce que la mafia n’apparaît que comme un mythe pour la grande majorité des individus. D’autre part parce que la lutte contre la criminalité organisée est devenue un objectif secondaire tant au sein des Etats occidentaux qu’au sein des organisations internationales. Enfin parce que contrairement à ce qu’on pourrait nous laisser croire les mafias ont su parfaitement s’adapter au processus de la mondialisation. Ce dernier a même accentué le danger qu’elles représentent. Si la criminalité organisée n’a jamais été un phénomène purement et uniquement sicilien, il n’empêche que le processus de mondialisation, compris comme un processus neutre de diffusion de certaines normes traduites au niveau local par l‘ Etat, a largement favorisé la criminalité organisée lorsqu’il ne l’a pas renforcé. La facilitation des communications et des déplacements, la déréglementation de l’économie, la création d’un espace mondial ouvert ont eu des conséquences néfastes dont le renforcement et l’expansion des mafias. Affirmer que le processus de mondialisation a eu des effets négatifs ne doit pas être interprété comme relevant d’un dialogue altermondialiste. Notre but n’est pas d’expliquer exhaustivement le processus de mondialisation de la criminalité organisée mais d’essayer de voir en quoi la mondialisation a fait des mafias des puissances capables de contrôler un territoire local tout en rayonnant sur la scène de l’illégalité transnationale. Ainsi nous partirons d’un constat : la criminalité organisée est aujourd’hui un phénomène transnational. Mais les mafias présentent une caractéristique particulière : pour exister elles ont besoin d’un ancrage local sans lequel elles sont comme la pieuvre sans la tête, vide de toute capacité d’action. Ce n’est que par souci d’étendre leur puissance qu’elles se sont mondialisées. On se demandera alors comment il est possible qu’une organisation transnationale, illégale, menace d’envergure pour les démocraties les plus solides, organisation à l’origine de nombreux détournements de fond, de catastrophe sanitaire telle la crise des déchets à Naples, retienne si peu l’attention des organisations internationales, des Etats, et des individus ? Selon nous, les mafias sont aujourd’hui des réalités qui ont su tirer profit de la mondialisation mais dont la nature réelle est voilée par la persistance d’un mythe au sein de l’imaginaire collectif. Aussi nous semble-t-il que les mafias opèrent un va et vient constant entre mondialisation et ancrage territorial. Or les Etats et les organisations internationales sont impuissants face à au nouveau visage de la criminalité organisée. En s’appuyant sur l’exemple de la crise des déchets à Naples, symbole de la puissance de la Camorra et de la faiblesse de l’Etat italien on s’attachera à démontrer que la mondialisation permet à la mafia de s’ériger en puissance transnationale en intégrant illégalement l’activité légale(I). Mais elle lui permet également de renforcer sa territorialisation par le contournement discret des normes internationales et nationales (II). Ce contournement est d’autant plus dangereux que les Etats et les individus ne semblent s’attacher qu’aux phénomènes visibles et exceptionnels et non aux phénomènes invisibles et constants comme la criminalité organisée (III).
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I/Les mafias, un pouvoir transnational nourri par les effets néfastes du processus de mondialisation Il ne s’agit pas pour nous de porter un jugement sur le processus de mondialisation en soi mais de montrer combien les conséquences de ce processus ont favorisé les mafias, traditionnellement locales, au point de les ériger en de véritables organisations transnationales. On entend par organisation transnationale un « système d’interaction, dans un domaine particulier, entre des acteurs sociétaux appartenant à des systèmes nationaux différents »1 Les mafias sont bien un système d’interaction en cela qu’elles entretiennent de nombreuses relations entre les différentes unités qui les composent, dans un domaine particulier qui est celui de la criminalité organisée, entre des acteurs sociétaux que sont les entrepreneurs, les politiques, les agents économiques, les individus, bref l’ensemble des composantes de la société. La mafia qui était déjà une réalité mondiale avant la seconde guerre mondiale a su tirer profit du processus de mondialisation pour s’ériger en puissance transnationale (1) et a renforcé son pouvoir en faisant preuve d’une véritable capacité d’adaptation aux transformations provoquées par la mondialisation économique et financière en revêtant un nouveau visage : l’entrepreneur mafieux (2). 1) Un réalité mondiale devenue transnationale La criminalité organisée n’a pas attendu la fin de la guerre froide pour se mondialiser. Les chercheurs tels que Jean-François Bayart précisent que la guerre du Vietnam constitue un point de référence quant à la mondialisation du crime organisé laquelle a commencé par la mise en réseau des mafias dans leur activité de trafic de stupéfiants. La fin de la guerre froide et la chute du mur de Berlin, suivis de la construction de l’Union européenne et de l’ouverture des frontières, ont simplement rendu moins contraignants les différents échanges et les différents trafics organisés et contrôlés parles organisations mafieuses. Les chercheurs sont allés jusqu’à parler de G7 voire de G9 du crime organisé transnational. On compte parmi les pays de ces pendants du G8 légal les Etats-Unis, le Japon, l’Italie, la Russie, la Colombie et le Nigéria. Dans un article publié dans L’économie politique, Mafias banques, paradis fiscaux : la mondialisation du crime, p100 Jean-François Bayart illustre la dimension transnationale de la criminalité organisée par l’exemple suivant : les contrebandiers siciliens se fournissent en opium en Anatolie, en morphine à Istanbul, font travailler les chimistes français dont la production est vendue par les réseaux corses aux gangsters italo-américains ! On citera un autre auteur, Suzan Strange qui s’est égalemnt attachée à étudier le rapport entre mondialisation et mafias. Si l’on s’appuie sur ses écrits, dans The retreat of the State : The diffusion of Power in the World Economy , Cambridge University Press, 1996, elle explique que la mafia incarne le passage du crime organisé transnational en tant qu’acteur non étatique, de l’échelle locale à l’échelle mondiale 2. On voit donc bien s’opérer cette dialectique entre le local et le global. Si elle reconnaît que la mafia est un phénomène ancien, elle précise pour autant que c’est bien l’émergence des réseaux mondiaux reliant les groupes criminels des différents pays qui constitue une nouveauté. Elle soutient que la prolifération des marchés lucratifs illégaux a centralisé les groupes criminels au niveau national et a élargi le champ des interactions transnationales entre organisations criminelles. Il en résulterait alors une sorte de « diplomatie transnationale » entre « mafias nationales », fondée sur un « intérêt commun » à exploiter les marchés illégaux. Cette diplomatie a donné naissance à une prolifération « d’accords informels » qui dénotent selon Strange l’existence d’une « «société internationale » anarchique de mafias comme il en existe une d’Etats »3. Le processus de mondialisation a 1 2
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In http://www.operationspaix.net/Acteurs-transnationaux Suzan Strange The retreat of the State : The diffusion of Power in the World Economy , Cambridge University Press, 1996 p111 Idem. p111-113
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donc eu pour conséquence d’une part le développement d’une société internationale anarchique de mafia en cela que chacune des mafias ancrée dans les différents Etats sont en relation constante, mais il s’est également constitué un réseau transnational en cela que ces relations s’effectuent en passant outre l’acteur étatique. Cependant il faut préciser que c’est un pan bien précis de la mondialisation qui a permis ce passage : la mondialisation économique et financière régie par les lois du capitalisme dit « sauvage ». Dans ce contexte de nombreux problèmes ne sont plus d’ordre national mais d’ordre mondial. Ainsi en est-il du problème du traitement des déchets, nouveau domaine d’activité de la mafia italienne et plus particulièrement de la mafia napolitaine, la Camorra. 2) Le nouveau visage : l’entrepreneur mafieux Sans entrer dans le détail des définitions on affirmera qu’il est indéniable que des liens étroits unissent criminalité organisée et criminalité économique dans leur quête éperdue de profits. Ces vingt dernières années l’expansion considérable des marchés financiers internationaux est allée de pair avec l’explosion de la criminalité économique et organisée transnationales que l’on peut qualifier de branche de la criminalité organisée en général. Dans son livre de 2001, Le marché fait sa loi. De l’usage du crime par la mondialisation, (éd. Mille et Une Nuits) Jean de Maillard, magistrat, s’adresse directement à la question des liens entre mondialisation et criminalisation. Il y développe une thèse opposée à celle de Jean-François Bayart selon laquelle l’augmentation de la puissance des activités économiques frauduleuses serait assimilée à la perte de pouvoir en général des Etats dans le contexte de mondialisation économique incontrôlable et ingouvernable. Nous partageons ce point de vue même s’il est à contrebalancer avec celui de Jean François Bayart4 qui affirme que les relations entre l’Etat, la criminalité et la mondialisation ne sont pas un jeu à somme nulle5. Sans nous plonger au cœur de ces débats nous nous contenterons de dire que le desserrement global des contraintes engendrées par le processus de mondialisation économique a rendu poreuses les frontières entre le licite et l’illicite et a permis aux mafias de déplacer leurs centres d’activité à l’image des délocalisations effectuées quotidiennement par les entreprises. Peut-on dire qu’il existe une analogie entre l’organisation mafieuse et l’entreprise ? Selon Pino Arlacchi, sociologue, la transformation des mafias dans les années 1970 réside en cela qu’elles deviennent entrepreneuriales. Elles sont à la recherche de débouchés pour leurs productions, de nouveaux marchés pour accroître leur capital. Ainsi elles parviennent à pénétrer le légal par l’illégal. Aujourd’hui il n’existe plus de frontière méthodologique entre les approches de la délinquance en col blanc et celles des mafias, autrement dit entre délinquants entrepreneurs et entrepreneurs délinquants. On voit donc que les mafias ont su s’adapter au processus de mondialisation, elles ont su en adopter les règles du jeu au point de devenir source de dynamisme et d’expansion de la machine capitaliste. Elles ne la bloquent plus. « De statut d’improductif et marginal, le mafieux a conquis une position de force créatrice et motrice de l’économie de marché »6. L’exemple de l’appropriation du marché de traitement des déchets par la Camorra illustre parfaitement ces propos. Pourquoi trouve-t-on des décharges abusives en Campanie ? Non pas parce que les Napolitains sont des surproducteurs de déchets mais parce que les problèmes du traitement des déchets et notamment des déchets spéciaux est devenu au cours des dernières années un problème mondial qui se répercute au niveau local. Les règlementations internationales relatives au traitement des déchets étant de plus en plus strictes (cf. le nombre de directives européennes 4
Ancien directeur du Céri, enseigant en relations internationales à Science Po Paris, direteur de la revue Critique Internationale. L’économie politique, Mafias banques, paradis fiscaux : la mondialisation du crime, Editorial, Christian Chavagneux, p7. 6 GAYRAUD Jean-François, Le monde des mafias, Géopolitique du crime organisé, Odile Jacob édition, juin 2008, p69 5
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relatives à ce sujet), les coûts se faisant de plus en plus élevés , les industriels doivent se débarrasser à bon compte de leurs résidus. Ainsi répondant aux lois du libéralisme économique mais passant outre le principe de concurrence loyale tant prônée par l’Union européenne, la Camorra baisse le prix de marché du traitement des déchets de 80%. On assiste ainsi à un investissement massif de profits illégaux sur des marchés légaux par la création d’entreprises mafieuses légales et la gestion d’activités mafieuses légales et illégales selon les critères de l’entreprise. Ainsi les mafias possèdent un nombre croissant d’entreprises légales et les gèrent avec des méthodes de manager. Elles travaillent dans deux sphères parallèlement la sphère légale et la sphère criminelle. La libéralisation des marchés a permis à l’entreprise mafieuse d’être légale par sa production et mafieuse par sa propriété. Le mafieux parvient à appliquer ses valeurs à l’économie de marché. Le sociologue Pino Arlacchi compare l’entrepreneur mafieux avec l’entrepreneur de Schumpeter : innovateur, rationnel, agressif. Il reprend l’expression de « processus de destruction créatrice »7 car la mafia parvient à introduire ses propres règles dans le monde du travail et de l’économie libérale tout en répondant aux exigences de monopole, maximisation des profits et avantages concurrentiels. Cependant il ne faut pas réduire la mafia seulement à une entreprise chose qui serait trop simplificateur. On constate donc l’échec de la volonté exprimée dans les années 1990 par des organisations internationales telle le Gafi, (Groupe d’ Action financière internationale) d’éviter la contagion des économies saines par les capitaux criminels. Créer des entreprises constitue une modalité supplémentaire du contrôle politique et social d’un territoire, élément primordial de la puissance des mafias par lequel elles parviennent à contourner sans grande difficulté les différentes normes internationales de lutte contre la criminalité organisée.
II/ Renforcer la territorialisation par et pour le contournement des normes internationales et nationales. La lutte contre la criminalité organisée a presque toujours occupé une place secondaire dans les objectifs des Etats et des organisations internationales. Le fait est qu’elle a toujours été dépassée par des phénomènes plus visibles et plus frappants comme la lutte contre le communisme durant la guerre froide et la lutte contre le terrorisme depuis les années 2000. La réforme du FBI de Robert Muller engagée huit mois après les attentats du septembre 2001 témoigne de ce constat. De profondes réformes des objectifs et des structures ont été engagées reléguant la lutte contre la criminalité organisée nationale et transnationale au sixième rang. Autant dire qu’elle a été mise aux oubliettes. 1) Des normes et des institutions qui existent mais qui manquent d’efficacité A Palerme le 15 décembre 2000 124 des 148 pays représentés sur les 189 Etats membres de l’ONU ont signé une convention contre la criminalité organisée8. Mi août 2003 on comptait 147 signataires et 47 ratifications. Cette norme est aujourd’hui entrée en vigueur. Parmi les pays non ratificateurs on retrouve à l’époque la Chine, la Colombie, le Japon, la Russie les Etats-Unis et l’Italie. Les pays ratificateurs s’engagent à renforcer la coopération, à harmoniser leur législation, à faciliter les procédures d’extradition, à faciliter la levée du secret bancaire. Il y eut beaucoup de négociations sur des protocoles additionnels. Le but de cette convention est de criminaliser des comportements qui ne sont pas punissables par le droit positif des Etats membres des Nations Unies. Il existe un immense besoin d’harmoniser les législations nationales et la transposition en droit interne de la notion de criminalité organisée peut en être le moyen. Mais il s’avère que l’on trouve très peu d’invocation de cette convention par les Etats ou la société civile. Pour garder l’exemple de la crise des 7 8
Idem. p169 Convention des Nations Unies contre criminalité transnationale organisée.
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déchets à Naples que l’on a suivi avec beaucoup d’attention, presqu’aucune des associations de lutte contre les actions de la Camorra ne fait référence, dans ses écrits ou dans ses manifestations, à la Convention. Discrédit envers l’Etat et les organisations internationales, manque de moyens législatifs ? La réponse est délicate. Toujours est-il que cette Convention aurait pu être citée par le biais des instances européennes puisque les Communautés européennes ont ratifié cette convention d’une seule et même voix. On peut alors s’interroger sur le rôle des instances européennes de lutte contre la criminalité organisée que sont Europol et Eurojust. En 1997 un plan d’action contre la criminalité organisée débouche sur la création d’Europol, de l’Office européen de lutte antifraude et d’Eurojust. Une fois de plus nos recherches sur l’invocation de ces instances par les acteurs locaux au cours de la crise des déchets est restée sans succès. S’il est vrai qu’il existe toujours le problème de l’inexhaustivité des recherches, il n’empêche que cette absence de ressource nous apparaît révélatrice de l’existence d’un sentiment d’impuissance au sein des organes de contrôle et donc de la puissance de la Camorra dans le contournement de ces normes. Plusieurs raisons expliquent ce phénomène. D’une part les nombreux blocages politico administratifs, d’autre part l’inadaptation du droit et des procédures vis-à-vis de ce type de criminalité. Le caractère ethnocentrique des systèmes pénaux rend difficile les relations entre les systèmes pénaux internationaux. Il existe donc une
inadaptation des
mécanismes de coopération judiciaire pourtant à la base d’institutions telles Europol ou Eurojust. Des vides demeurent encore aujourd’hui quant aux réponses à apporter face au phénomène mafieux. Faut il privilégier la prévention, la répression, les sanctions pénales, civiles ou administratives. Faut-il apporter des réponses étatiques ou sociétales ? On remarque donc que l’aspect transnational de la criminalité organisée soulève des difficultés juridiques et judiciaires. La mondialisation a permis l'expansion transnationale des mafias mais ce processus trouve encore des difficultés à s’établir au sein des organes de contrôle. Il s’agit de mettre fin à une situation où « le marchand circule librement en Europe mais pas le gendarme »9 On observe donc des difficultés interne du droit dues à l’extranéité, à l’empilement d’articles de lois et de conventions alors même qu’on a de plus en plus besoin d’harmoniser les lois. Le premier obstacle à la coopération internationale est donc la disparité des corpus législatifs. Leur application à l’échelle locale est donc particulièrement difficile d’autant plus que le contrôle du local constitue un élément primordial de la puissance de la mafia. 2) La territorialisation, élément de puissance Les organisations mafieuses sont enracinées localement et sont étroitement liées à une population donnée. Ce sont des sociétés secrètes hiérarchisées qui ont une origine ethnique, clanique ou familiale. (Par exemple les 5 grandes familles de New York, les Corleone de Sicile, le clan des Casalesi en Campanie). Elles remplacent l’Etat sur une portion de son territoire : le droit de la violence légitime n’appartient plus à l’autorité étatique mais une autre entité impose l’ordre. C’est exactement ce qu’il se passe dans la Région de Naples où la Camorra remplace l’Etat. Pour se faire une idée de la puissance de la Camorra dans cette région on conseille la lecture du livre de Roberto Saviano, Gomorra, viaggio
nell’impero economico e nel sogno di dominio della camorra. Collezione Strade blu, Mondadori, 2006, 331p. Le monopole de l’activité de traitement des déchets par la Camorra lui confère le statut de puissance comme la définit Aron : « capacité d’une unité politique d’imposer sa volonté aux autres unités ». En outre c’est une puissance d’essence militaire, autonome (elle donne des ordres et n’en reçoit pas). Ainsi elle se soustrait à l’Etat par le contrôle territorial. Le 9
L’économie politique, Mafias banques, paradis fiscaux : la mondialisation du crime, Gilles Favarel Garrigues, Jean Cartier-Bresson , H. Richard Friman, Nicolas Queloz, Denis Robert, Jean-François Bayart, Jean de Maillard, Alternatives conomiques, numéro 15, 3e trimestre 2002, p23
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gouvernement perd tout son rôle : l‘Etat ne protège plus sa population. Pourtant de nombreuses directives communautaires concernent le traitement des déchets et le crime environnemental. Incapacité ou manque de volonté de la part de l’Etat pour traduire les normes globales et notamment les directives européennes ? Pour tenter de répondre à cette interrogation il faut nous appuyer sur des éléments de culture politique. Nous pensons qu’il existe un certain déterminisme national dû au poids de la culture politique. « La mafia n’est pas un cancer né par hasard sur un tissu sain »10. On expliquerait alors la victoire de la Camorra et des autres mafias italiennes par le rôle peu déterminant de l’Etat dans la lutte contre la criminalité organisée. Il se pose ici le problème du coût marginal de la politique publique engagée, lequel doit être égal au bénéfice marginal pour la société d’une réduction de la délinquance. L’attitude des gouvernements italiens successifs face à la crise des déchets à Naples, dont l’état d’urgence dure depuis 14 ans, témoigne de cette inaction. 11 Evidemment il existe aujourd’hui une interpénétration des sphères politiques et criminelles. Mais il s’ajoute à cela le problème des politiques publiques de lutte contre la criminalité organisée : les politiques publiques se concentrent sur la dimension internationale et non sur la dimension locale. En outre elles ont tendance à détourner l’attention de la criminalité en « col blanc », c'est-à-dire de la fraude et se concentrent sur des éléments traditionnels comme la lutte contre l’impôt mafieux. Il faut s’intéresser à la dimension locale de la mafia. Le territoire revêt de multiples fonctions mais il sert surtout de base de repli, d’affirmation de la souveraineté. Par exemple il existe en Italie 4 groupes sur 4 régions. Ces organisations mafieuses apparaissent souvent dans des territoires en difficulté comme un moyen de s’en sortir, un moyen d’ascension sociale pour les plus démunis. Illusion bien évidemment. On pourrait appliquer à la Camorra l’analyse que S.STRANGE a fait de Cosa nostra, la qualifiant de « modèle d’un contre gouvernement organisé »12 . On se réfère une fois de plus à l’analyse de S.Strange qui en 1996 note déjà que le pouvoir croissant de la mafia pourrait changer les relations symbiotiques de la mafia avec l’Etat donnant naissance à des manifestations de violence et de répression gouvernementale. Elle conclut du cas de l’Italie que « les problèmes ne commencent, en bref (comme dans les relations entre Etats), que lorsque les gouvernements d’Etats ayant jusqu’ici toléré la coexistence d’une autorité non étatique rivale, perçoivent un important changement dans l’équilibre du pouvoir qui vient menacer leur propre survie »13 . Mais malheureusement demain n’est pas la veille : si le gouvernement Berlusconi III a envoyé l’armée dans la région de la Campanie, ceci n’est pas le signe d’un retour de l’Etat d’autant plus le retrait des troupes de Naples a eu lieu en décembre dernier. L’Etat semble se poser du côté de la mafia plutôt que de la condamner. en témoigne le décret loi de juillet 2008 du gouvernement italien visant à la condamnation du citoyen en cas de dépôt abusif de déchets dans les rues de l’agglomération napolitaine. L’application du principe européen du « pollueur payeur » outre passe l’activité de la Camorra dans la région pour se concentrer sur la responsabilité individuelle. On voit donc que la non application des normes internationales au niveau local relève pour le cas Italien en grande partie du rôle du gouvernement qui semble composer avec la Camorra. Les directives européennes sont transposées en droit interne
10
G. Falcone, M. Padovani, Cosa Nostra , N°/Austral 1992
11
Cf . Dossier de politiques publiques, La crise des déchets à Naples Le Cavaliere et « la crisi dei rifiuti » : analyse du travail de légitimation et de résolution des conflits. Torrisi Céline décembre 2008, 34p
12 13
Suzan Strange The retreat of the State : The diffusion of Power in the World Economy , Cambridge University Press, 1996, p110 Idem. p.120
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comme en témoigne l’adoption par le Parlement italien de la directive européenne du 19 novembre 2008 relative aux déchets. Cependant leur application n’est pas contrôlée. La criminalité transnationale organisée est encore en grande partie un agenda juridique et judiciaire des organisations internationales sans grand soutien politique des citoyens ou des élites. Il existe le besoin d’un débat plus vif sur ce thème pour préciser la notion et améliorer la connaissance de la perception de la mafia par les acteurs concernés que sont les banques, les services de police, la société civile, les ONG, les individus. Cependant on demeure perplexe quant au rôle des individus vis-à-vis de la criminalité internationale. Malgré la résonance internationale de la crise des déchets à Naples de nombreux récits de vie témoignent de l’inexistence du phénomène mafieux dans l’esprit des individus. Comment interpréter cela ? L’individu ne serait-il pas le levier d’action premier de la lutte contre la mafia ? III/ La mafia et les individus : le négationnisme comme ressource, l’engagement comme menace. On exclura dans cette dernière partie portant sur le rôle de l’individu, les personnes ayant à faire directement à la mafia. En effet il est difficile de porter un jugement sur la responsabilité d’individus vivant sous la menace constante de la mafia et ne bénéficiant pas ou peu de la protection de l’Etat. L’échec du passage d’une norme internationale à l’échelle locale relève également selon nous de la volonté des individus de faire appliquer cette norme et de mobiliser les moyens propice à cette mise en œuvre. Deux dynamiques caractérisent l’action des individus face à la mafia, le négationnisme individuel qui apparaît comme une véritable ressource pour la criminalité organisée (1) et l’engagement qui en constitue une menace relative (2). 1/ Le négationnisme individuel « La plus belle des ruses du diable est de vous persuader qu’il n’existe pas » Charles BAUDELAIRE Comme l’explique Jean François Gayraud dans le Monde des Mafias14 il y a eu pendant des années la propagation d’une idée fausse tant par les Institutions universitaires, politiques que médiatique, idée selon laquelle la mafia n’existe pas. Ceci a été permis par un triple discours de négation, de relativisation et de folklorisation du phénomène mafieux. Bien que difficilement, ce mur a été brisé par les nombreux témoignages de repentis et les maxi procès. Un autre discours que l’on entend encore parfois en Italie est celui d’un certain racisme envers les Italiens du Sud. Le penchant de ce discours aux Etats-Unis est celui du racisme des Anglo-saxons envers les italo-américains. Retenons quelques exemples parlants. Tout d’abord le rôle de l’ancien directeur du FBI Hoover. La position de Hoover au cours de sa direction du FBI de 1924 à 1972 illustre que le rôle d’un seul individu peut être primordial dans la survie ou la renaissance d’une organisation. On tient ce dernier pour responsable de l’ancrage de la mafia aux Etats-Unis. L’étude de ce personnage montre combien le rôle d’individus agissant singulièrement dans une configuration de pouvoir déterminée, peut être déterminant dans l’évolution de certains faits sur la scène nationale et internationale. Ainsi le négationnisme de Hoover quant à l’existence de la mafia, traduit en pratique par un « pacte de non-agression mutuel »15 avec Cosa Nostra italo-américaine a conduit à l’enracinement durable de Cosa Nostra dans la vie politique économique et sociale américaine. Dans un contexte de guerre froide Hoover considère le phénomène mafieux comme une invention, une diversion face au parti communiste, 14
GAYRAUD Jean-François, Le monde des mafias, Géopolitique du crime organisé,Chapitre 2, Les mafias puissances discrètes et occultées p40-49 15
Idem. p49-53
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ennemi numéro 1. J.F. Gayraud explique qu’au 20ème siècle il existe aux Etats-Unis deux grandes institutions le FBI et Cosa Nostra. L’absence de confrontation entre ces deux institutions s’explique par le fait que celle-ci nuirait aux intérêts de chacune. Hoover a donc choisit la quantité comme critère de reconnaissance de ses luttes et non la qualité. De façon caricaturale Hoover a privilégié la lutte contre des criminels comme Bonnie&Clyde plutôt que contre Cosa Nostra. Il faudra attendre la mort de Hoover et l’élection du Président Nixon pour que la lutte contre la criminalité organisée soit véritablement engagée. Ainsi ce n’est qu’en 1981 qu’eut lieu la première attaque contre les cinq grandes familles de New York. Une analyse psychologique tend à affirmer que l’être humain a tendance à réfuter les phénomènes nouveaux. Il se concentre davantage sur ce qui est familier, connu, contrôlé. On dénote une certaine peur de l’Etat devant un combat perdu d’avance, on parle alors de cécité volontaire. De nombreux individus ont contribué à alimenter le négationnisme quant à l’existence de la mafia comme
Giuseppe Pitré ou encore l’ancien Président du Conseil italien Vittorio
Emmanuele Orlando. Cependant la circulation et la diffusion de l’information à l’échelle mondiale rendue possible par les nombreux moyens de communications et notamment internet nous laisse perplexe face au silence des individus. Ces derniers semblent s’attacher à des idées fausses. Le problème réside en cela que les individus sont attachés à un sens imaginaire du mot mafia. On s’est livré à interroger diverses personnes, de nationalité différente (italienne, française, canadienne, allemande). Si l’échantillon ne peut être tenu comme représentatif il n’empêche que 9 fois sur dix reviennent les stéréotypes du « Parrain », d’un phénomène propre à la Sicile ou au Sud de l’Italie, si ce n’est propre au village de Corleone ! Il existe donc un problème d’appréhension du phénomène au niveau individuel. Ceci vient peut être de la définition à laquelle on se réfère souvent : « modo di essere, di sentire e di operare »16. Cette définition renvoie à des réalités siciliennes et désigne la perfection entendue comme un attribut typiquement sicilien. Une fois de plus le poids culturel est à l’œuvre. Les individus s’attachent au mythe et cela pose un problème de représentation. Le mot « mafia » est lourd d’évocation fantasmatique dans l’opinion publique. En tant que sociétés secrètes elles fascinent. Il est absolument nécessaire de remettre en cause l’image traditionnelle de la mafia. S’il est vrai que le poids du mythe a un rôle non négligeable nous demeurons convaincus que les individus ne voient pas car ils ne veulent pas voir. Les nombreuses conversations entretenues avec des personnes italiennes témoignent de la persistance d’un négationnisme individuel. Soit par peur des représailles et c’est le cas des populations du Sud de l’Italie. Soit par cécité. De nombreux italiens du Nord se disent navrés de ce qui se passe dans le Sud. Dans le cas de la crise des déchets certains vont même jusqu’à accuser les Napolitains d’être des êtres « sporchi », sales, n’ayant aucun sens de la propreté ni du respect de la nature. Si le silence des personnes dont la vie est menacée directement par la mafia est compréhensible, des comportements comme celui cité ci-dessus sont à nos yeux des plus incompréhensibles si ce n’est intolérables. Une personne est même allée jusqu’à nous affirmer que l’auteur de Gomorra, Roberto Saviano n’aurait écrit ce livre que pour bénéficier des droits d’auteurs, la grande partie des faits relatés dans ce livre relevant de l’invention ! On observe donc une double invisibilité de la mafia : une invisibilité objective relevant de sa dimension de société secrète et une invisibilité plus redoutable, l’invisibilité subjective résultant de la cécité des observateurs. L’action individuelle de lutte contre la criminalité organisée au niveau local est-elle possible ? Des figures comme les magistrats Falcone et Bassolino tous deux assassinés par la mafia sont des exemples tout comme le journaliste et écrivain Roberto Saviano. Il s’avère que l’impact de leur engagement ne peut être considéré comme une menace pour les organisations mafieuses, que si la société est assez mature pour accueillir et accepter leur propos.
16
Encyclopedia Universalis, vol. 10. p286a
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2/ L’engagement : le besoin d’une société mûre Si les Etats et les organisations se montrent impuissants face à la criminalité organisée c’est peut être à cause du manque d’engagement et de convictions des individus qui constituent la société civile. Il est délicat d’analyser l’engagement des individus dans la lutte contre la crise des déchets par exemple. La société civile napolitaine ne fait pas preuve d’une conscience écologique qui pourrait la conduire à justifier ses actions, à proposer des alternatives d’action mais également à s’inscrire dans des réseaux bien spécifiques. Ses revendications sont fondées sur la peur et l’exaspération. Plus que d’une société civile, on est tenté de parler, à l’image d’ Illaria Casillo d’un « conservatisme fondé sur du communautarisme »17. Les mobilisations citoyennes seraient ainsi une sorte de mobilisation pré-politique sans véritable rationalité défensive. La pertinence sociale des mobilisations est réelle mais la structure de la société civile napolitaine peut être interprétée comme une explication globale de la réalité dans ses différentes composantes dynamiques. Cette société civile est encore rattachée aux logiques du clientélisme et des figures charismatiques. Elle est passive et demeure en attente de solutions. Au sein de cette société civile la Camorra est une sous-culture dominante. A Naples l’immondice représente un fait social total car il rend visible le réseau des rapports sociaux, les nœuds et les logiques qui font fonctionner la société Napolitaine. Les citoyens de Naples seraient donc en partie responsables de la crise ? La réponse à cette question est bien délicate mais certains comme par exemple le fameux journaliste Giorgio BOCCA n’hésitent pas à dénoncer la « complicité des citoyens » dans la crise des déchets 18. Les citoyens n’ont pas recours à une organisation mondiale pour arrêter les projets de la Camorra. Il n’y a pas d’utilisation stratégique du global pour influencer le national et le local. L’attitude de la société civile à Naples témoigne de l’échec du passage d’une norme internationale en valeur et à son intégration par les individus. Il apparaît particulièrement difficile de se démarquer d’un processus omniprésent. D’autant plus que si les révélations sont nombreuses elles ne sont pas crues. Les esprits doivent être murs pour accueillir les vérités neuves et dérangeantes. Dès lors comment interpréter le succès du livre de Saviano ? Début d’intéressement ? Son succès pourra être proclamé si et seulement si sa lecture est suivie d’une véritable prise de conscience de la part de chacun des individus particuliers de l’importance et du nouveau visage du phénomène mafieux. Ceci est rendu d’autant plus difficile il est vrai, par le rôle des médias. Ces derniers ne parlent de la mafia que quand il y a une arrestation, des assassinats etc. . Ils ne relatent que des événements accidentels et épisodiques et pourtant ils sont pris pour l’essentiel. En plus ils effectuent des détours par l’histoire qui nous éloignent du présent. Comprendre l’attitude des individus face au phénomène mafieux demande certainement d’avoir recours à plusieurs explications mais nous en retiendront une que nous tenons comme primordiale. Selon nous les individus, tout comme les Etats se mobilisent peu face au phénomène mafieux d’une part parce que l’information ne vient pas à eux. Au contraire pour connaître la criminalité organisée il faut fournir un véritable « effort » d’intéressement. D’autre part il se trouve que les individus comme les Etats ne se sentent concernés que par des phénomènes visibles qui constituent une menace directe pour eux ou leur entourage et encore ceci est à nuancer (si l’on prend l’exemple du développement durable et participatif on se rend compte que le réveil citoyen est long !). BIBLIOGRAPHIE
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