Donald C. Cushenbery Rita Crossley Cushenbery
VIVRE... après le décès de son conjoint
Copyright © 1991, 1997 by Donald C. Cushenbery & Rita Crossley Cushenbery Originally published in English under the title Coping with Life after Your Mate Dies Published by Baker Books Grand Rapids, Michigan 49516-6287, USA All rights reserved.
Les textes bibliques sont tirés de la Bible Segond revue, Nouvelle Edition de Genève, 1979
© et édition La Maison de la Bible, 2000, 2011 Ch. de Praz-Roussy 4bis CH-1032 Romanel-sur-Lausanne E-mail: info@bible.ch Internet: www.maisonbible.net Photo de couverture: © koszivu - Fotolia.com ISBN édition imprimée 978-2-8260-3364-6 ISBN format epub 978-2-8260-0324-3
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D’après un très vieil adage, deux réalités de l’existence sont inéluctables: la mort et les impôts. Ces deux événements, indifférents à la situation financière et au statut social, finiront très certainement par nous toucher. L’homme ou la femme qui “pèse” plusieurs millions de francs sera confronté à son dernier souffle aussi sûrement que le sans-abri, réfugié sous un pont ou dans un taudis en bord de route. Beaucoup éludent la pensée de la mort parce qu’ils s’y trouvent seulement confrontés lors des funérailles d’un ami ou d’un parent âgé qui a mené une vie longue et heureuse. Mais nous savons tous que la vie est fragile et que le soudain crash d’un avion ou d’une voiture, ou encore une maladie dévastatrice peut anéantir les espoirs et les rêves de personnes de tout âge. Tous nos lecteurs ont à l’esprit les chutes d’avions plus ou moins récentes. Certains ont peutêtre eu connaissance du crash aérien survenu en Floride, non loin de Miami en mai 1996. En embarquant, les 110 passagers en route pour Atlanta ne se doutaient pas qu’ils perdraient la vie; mais l’avion a piqué du nez avant de s’écraser dans une région marécageuse. La plupart des corps étaient mutilés à un tel point qu’ils n’ont pas pu être identifiés. Ces gens n’ont pas eu de seconde chance. Des dizaines
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Vi v re . . . a p r è s l e d é c è s d e s o n c o n j o i n t de parents ont été plongés dans un deuil inattendu. Des familles entières ont été décimées. Le chagrin subsistera toute une vie pour les conjoints survivants. Nous ignorons combien de temps nous vivrons, en dépit des progrès de la médecine et de tous nos efforts pour prolonger la vie, par le biais d’exercices appropriés et d’habitudes de vie positives et prudentes. Je connaissais un coureur de marathon acharné et consacré, qui consommait uniquement de la nourriture biologique, achetée dans un commerce spécialisé. Sa pression artérielle ressemblait plutôt à celle d’un adolescent qu’à celle d’un homme de quaranteneuf ans. Et pourtant, un matin, en parcourant ses trois kilomètres habituels, il a été tué sur le coup par un chauffard ivre qui ne s’était pas arrêté au feu rouge. Ce coureur physiquement en bonne santé a laissé derrière lui une veuve esseulée et trois enfants en âge scolaire. Au cours de votre vie, vous avez sans aucun doute connu la perte d’un ou plusieurs êtres aimés, mais celle d’un conjoint est extrêmement traumatisante. Vous lisez probablement ce livre parce que vous avez été récemment confronté au décès de votre conjoint et aux dures réalités de la solitude, de l’absence d’un compagnon et des soucis matériels associés à un tel événement. Peu importe que votre conjoint ait été chrétien, la souffrance actuelle que provoque son absence demeure lancinante. Certains peuvent connaître un processus de deuil intense pendant six mois à deux ans. Mais d’autres seront confrontés au même chagrin jusqu’à l’heure de leur propre mort. La durée nécessaire à chaque individu pour atteindre la résolution de son deuil dépend de plusieurs facteurs. Si le décès a été soudain ou totalement inattendu, la période de deuil peut se prolonger pendant un temps considérable. Dans ce cas également, le degré de dépendance par rapport au conjoint est déterminant. Ainsi, par exemple, un mari peut avoir entièrement assumé les aspects financiers du ménage, y compris les factures courantes. S’il meurt soudai-
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Vivre avec la peine nement, sa femme peut se trouver plongée dans une dépression intense et prolongée, parce qu’elle manque de la confiance ou de la formation nécessaires pour prendre des décisions financières importantes. D’un autre côté, le degré et la durée du deuil peuvent être amoindris si le survivant possède des capacités d’adaptation suffisantes et se trouve entouré de nombreux amis et voisins attentionnés. La confrontation avec une crise aussi grave que le décès d’un conjoint se trouve adoucie dans la mesure où vous alignez vos sentiments et vos attentes sur les enseignements de Jésus, ce qui implique d’attendre et de faire confiance à Dieu et à son plan à long terme pour votre vie. Sachez tirer un enseignement du cas de Job, qui est demeuré assis sur un tas de cendres pendant une très longue période. Pour devenir spirituellement éveillés et mentalement productifs, nous avons tous besoin de subir un élagage et divers ajustements avant de pouvoir mener une vie chrétienne victorieuse. Il est vain de tenter d’analyser chaque élément négatif de votre vie, si vous faites pleinement confiance à Dieu. Les Ecritures nous disent: “Confie-toi en l'Eternel de tout ton cœur, et ne t’appuie pas sur ta sagesse” (Proverbes 3:5). La première étape consiste donc à vous immerger dans la Parole et à la croire. Il existe plusieurs principes de base dont vous devriez vous souvenir pour affronter votre chagrin. Le fait de reconnaître et de comprendre ces divers aspects vous aidera à replacer votre deuil dans la bonne perspective. Nous tenons à les souligner à ce stade parce qu’il semble exister des malentendus considérables à leur sujet (comme le démontrent certaines des remarques faites par les veufs et veuves que Rita et moi avons rencontrés). 1. Il est à la fois approprié et raisonnable de pleurer le décès de l’être aimé. Certains seront peut-être embarrassés de vous voir pleurer, mais c’est leur problème, pas le vôtre! Dieu nous donne des larmes et comprend qu’elles
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Vi v re . . . a p r è s l e d é c è s d e s o n c o n j o i n t s’intègrent forcément dans le processus de guérison. Elles n’indiquent pas que nous manquions de confiance envers Dieu. Même Jésus a pleuré la mort de son ami Lazare. Le chagrin est l’une des émotions les plus ordinaires chez les êtres humains, croyants ou non. Il est très certainement normal d’exprimer sa peine pour la perte d’un conjoint et il ne serait pas naturel de traiter cette mort comme un événement ordinaire, une nuisance temporaire à évacuer sans faire de sentiment. L’épouse de l’une de nos connaissances est décédée il y a presque six ans. Le veuf n’a déplacé aucune de ses affaires et, à maints égards, il donne l’impression d’accumuler une somme considérable de chagrin irrésolu. Beaucoup de thérapeutes professionnels soutiennent qu'un deuil prolongé dont on ne s'occupe pas peut déboucher sur une dépression durable et d’autres problèmes physiques et émotionnels graves. Malheureusement, certaines personnes pensent qu’elles ne devraient pas afficher les signes de leur chagrin, par crainte que leurs amis pensent qu’elles manquent de foi ou de courage pour mener une vie victorieuse. En outre, certains n’hésitent pas à associer une durée précise au processus de guérison. Permettez-moi de vous donner un exemple. Mon amie Michelle a perdu son mari à l’âge de quarantesept ans dans un accident d’avion. Deux ans plus tard, elle m’a confié que certains de ses amis lui avaient dit qu’elle devrait cesser de pleurer parce qu’elle devait se montrer “forte” et continuer à vivre. Elle a semblé immensément soulagée quand je lui ai assuré qu’il me semblait tout à fait approprié pour elle de manifester la réaction qui lui apparaissait naturelle, comme pleurer le jour de l’anniversaire de son défunt mari. Pour résumer, affronter son chagrin est une question individuelle et le survivant est seul responsable de l’intensité de son deuil. Si vous éprouvez du soulagement à mentionner le nom de votre conjoint défunt pendant la conversation, n’hésitez pas à le faire.
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Vivre avec la peine 2. Chercher l’aide d’autrui pendant son deuil n’est pas un signe de faiblesse personnelle. Le décès d’un être aimé représente un événement majeur dans la vie de tout être humain sensible. A moins d’être exceptionnel ou doté de capacités de résistance précises, il y a de fortes chances pour que vous ayez besoin d’aide pour vous adapter à votre nouvelle vie. Adressez-vous à un pasteur; peut-être votre église a-telle un diacre, une diaconesse qui pourrait vous aider dans ces circonstances. Une ancienne connaissance qui a passé par cette épreuve serait aussi un appui bienvenu. Si vous avez accès à Internet, vous avez la possibilité de contacter des individus ou des groupes de personnes touchées par le décès d’un conjoint. Les Pages Jaunes électroniques dressent la liste des divers sites consacrés au deuil. Il est également possible de vous connecter à des forums de discussion qui rassemblent des personnes plongées dans une situation similaire à la vôtre. Vous pourriez laisser un message exprimant votre désir de communiquer avec d’autres personnes endeuillées. Vous recevrez probablement rapidement des réponses par voie électronique. En fait, certains utilisent depuis une longue période déjà le courrier électronique pour entretenir une relation sociale avec une personne habitant ailleurs dans le monde. Une veuve ou un veuf dans un autre pays peut aussi vous donner des conseils utiles pour affronter votre situation précise. Les tarifs d’accès à Internet sont généralement raisonnables. A un niveau plus personnel, montrez-vous ouvert au soutien offert par les membres de la famille et les amis. 3. La crise du deuil peut servir de stimulant et vous pousser à vous engager dans des activités créatives, à la fois dans l’église et à l’extérieur. Plus vous vous isolerez longtemps de vos amis et de vos voisins, et plus votre période de deuil sera prolongée. Un bénévolat dans un hôpital local vous permettrait de constater rapidement que nom-
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Vi v re . . . a p r è s l e d é c è s d e s o n c o n j o i n t breux sont ceux qui affrontent à la fois des blessures physiques et émotionnelles. De telles expériences peuvent montrer que la mort ressemble à une bénédiction quand elle survient enfin à l’issue d’une maladie prolongée. Les parents qui se sont tenus pendant des années au chevet d’un bienaimé plongé dans le coma peuvent témoigner qu’il existe des circonstances pires que la mort. 4. Votre chagrin est significativement différent de celui des autres. Un ami de longue date, chrétien et veuf comme moi, est venu me voir peu de temps après les funérailles d’Elfrieda et m’a dit: “Je sais exactement ce que tu ressens. J’ai enterré ma femme l’année dernière.” J’avais envie de lui répondre qu’il n’avait pas perdu ma femme. Même si Elfrieda était restée alitée longtemps avant son décès, j’étais déprimé, seul, et je savais que personne ne pouvait réellement s’identifier à mon cas. La dépression et le sentiment d’être seul sont des émotions courantes après le décès d’un conjoint, mais jamais deux personnes n’éprouvent les mêmes sentiments. J’ai observé une grande diversité de réactions parmi mes amis endeuillés. Je me souviens d’Eloïse, qui a assisté au décès de son mari à l’âge de soixante-six ans. Elle en avait soixante-trois à l’époque. Environ un mois après l’enterrement, elle m’a dit qu’elle allait désormais entreprendre de longs voyages en autocar avec ses amies. Pendant les quarante-deux dernières années, elle n’avait pas pu le faire pour trois raisons: son mari n’aimait pas les voyages en car, il pensait que les voyages étaient une perte d’argent et il répugnait à quitter son fauteuil douillet et sa télévision. A sa manière, elle pleurait sa disparition, mais elle avait aussi le sentiment de pouvoir désormais faire ce qu’elle n’avait jamais pu entreprendre auparavant. Etrangement, elle éprouvait un sentiment de liberté. Harold, un autre de mes amis, a manifesté un chagrin très différent. Sa femme et lui avaient visité trois fois
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Vivre avec la peine l’Europe, deux fois l’Amérique du Sud et au moins une douzaine de fois diverses régions des Etats-Unis. Quand il a trouvé son épouse décédée d’une attaque foudroyante à l’âge de soixante-douze ans, il a été dévasté. Il est tombé dans une grave dépression et a dû recourir à l’aide professionnelle d’un médecin pour l’aider à surmonter sa profonde douleur. Comme vous pouvez le constater, Harold et Eloïse ont tous deux connu du chagrin, mais son effet sur eux s’est avéré assez différent. En résumé, personne n’a jamais expérimenté précisément la même peine que vous. N’essayez pas de vous conformer à une série de normes rigides. Trouvez de bons conseils auprès d’un groupe de soutien, d’un pasteur ou d’un conseiller professionnel et organisez votre vie de façon à pouvoir développer un maximum d’expériences significatives. 5. Dieu ne vous a pas abandonné. Quand un être cher nous est enlevé après avoir partagé notre vie pendant de nombreuses années, nous avons tendance à penser que l’amour de Dieu nous a quittés. N’oubliez jamais que Dieu vous aime toujours. Romains 8:38-39 nous dit: “Car j’ai l’assurance que ni la mort ni la vie, ni les anges ni les dominations, ni les choses présentes ni les choses à venir, ni les puissances, ni la hauteur ni la profondeur, ni aucune autre créature ne pourra nous séparer de l’amour de Dieu manifesté en Jésus-Christ notre Seigneur.” Vous ne devriez pas laisser votre dépression vous amener à douter de l’existence de Dieu ou à croire que Dieu accorde son attention à tout le monde sauf à vous. Même Jésus a éprouvé cet intense sentiment d’isolement quand il était sur la croix et qu’il a crié: “Mon Dieu, mon Dieu, pourquoi m’as-tu abandonné?” (Matthieu 27:46). 6. Le temps et la patience soulageront partiellement votre douleur présente. Bien que cela vous semble impos-
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Vi v re . . . a p r è s l e d é c è s d e s o n c o n j o i n t sible en ce moment, Dieu utilise le temps pour guérir nos blessures. Nous devons croire et comprendre que notre Père céleste est sagesse et bonté incarnées et qu’il a un plan souverain pour notre vie. Le décès d’un conjoint peut sembler à la fois ultime et injuste, mais ayez l’assurance que Dieu sera avec vous pour le restant de vos jours, quel qu'en soit le nombre. Notre seul espoir dans cette affliction, et toutes les autres, consiste à garder à l’esprit les nombreuses promesses que Dieu nous a adressées et à croire qu’elles seront toutes respectées. 7. Ne comptez pas sur des paroles de réconfort de vos amis ou parents pour soulager soudainement et miraculeusement votre douleur. La perte du conjoint que vous aimiez profondément ressemble un peu à un accident dans lequel vous vous briseriez plusieurs os. Une douleur intense et un choc profond vous traversent le corps. Dans une telle situation, aucune personne sensée ne s’attendrait à observer une guérison instantanée. Bien que la douleur finisse par s’atténuer et que la blessure guérisse lentement, il vous reste des cicatrices pour vous rappeler cet événement traumatisant. La vie sera-t-elle jamais la même? Bien sûr que non. Vous ne remplacerez jamais le conjoint que vous avez perdu, parce que personne d’autre ne possède son identité physique ou son caractère. Récemment, Rita et moi avons rencontré une veuve de soixante-dix ans dont le mari était décédé cinq ans auparavant après une brève maladie. Elle éprouvait encore beaucoup de difficultés à affronter son chagrin parce qu’elle était très dépendante de lui. Pendant notre entretien, elle a mentionné qu’elle pourrait se remarier “si seulement elle trouvait un homme comme son premier mari”. La vérité est qu’il n’existe aucun homme, nulle part, qui soit exactement semblable à son premier mari! Chercher indéfiniment une telle personne est une entreprise tout à fait désespérée et entrave ses chances de bonheur futur.
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