Table des matières
1Remerciements . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 11. Arrêté net . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 12. Déracinement total . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 13. Lo Fu Zai . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 14. Ultime défi . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 15. Nouvelle orientation . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 16. Course poursuite en Arabie saoudite . . . . . . . . . . 17. Désespoir et violence . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 18. Pris au piège . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 19. Dans les geôles de Nicosie . . . . . . . . . . . . . . . . . 10. L’étrange visiteur . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 11. Enfin libre! . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 12. Dieu manifeste sa puissance . . . . . . . . . . . . . . . 13. Retour à Londres . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 14. Douloureuse leçon . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 15. Bullington . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 16. Restauré par la grâce . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . Epilogue . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
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Remerciements
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e livre est l’aboutissement d’un long parcours, sur lequel de nombreuses personnes m’ont accompagné. Premièrement, j’aimerais remercier Sara, ma femme et meilleure amie, pour son soutien précieux et ses bons conseils. Toujours prompte à m’encourager, elle sait aussi me faire des remarques très utiles. Son sourire et son calme me font du bien, car le travail dans lequel nous sommes engagés est vraiment épanouissant, mais parfois aussi moralement épuisant. Merci à mes garçons, Ethan et Jacob, qui me disent: «Papa, tu nous manques vraiment quand tu n’es pas là», et qui me rappellent, lorsque je rentre à la maison, que les papas sont là pour jouer, raconter des histoires, faire des bisous et des câlins. Ce livre n’aurait pas pu voir le jour sans la participation active d’Angela Little, la meilleure coéquipière du monde. La première fois que nous nous sommes rencontrés, le courant est tout de suite bien passé entre nous, et son enthousiasme à toute épreuve était contagieux. Merci d’avoir accepté de mener à bien ce projet. Merci d’avoir compris mon cheminement.
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Merci au mari d’Angela, Phil. Ton soutien et tes encouragements m’ont été précieux. Merci à votre fils, Samuel, qui a généreusement accepté de «se passer» de sa maman de nombreuses fois. Je suis reconnaissant à la famille d’Angela et à tous les amis qui l’ont soutenue durant ce travail. Je pense particulièrement à Gordon et Dorothy Little, Tony et Linda Smith et Chris et Linda McIntire pour leur aide pratique et leurs encouragements. Merci à toi, Malcolm (Down), et à toute l’équipe de Authentic Publishing pour votre enthousiasme, votre courage et votre foi quant à ce projet. Mes remerciements aux membres du conseil d’administration de l’organisation pour laquelle je travaille, qui me conseillent fidèlement dans mon activité: Rob Land, Martin Eady, Sara Anthony, David Coleman, David Duell, Patrick Russell-Mott, Tina May, Jane Christian et Luke Dobson. A mes mentors: George Verwer, Steven Hembery, Gwyn Jordan, David Chadwick et Paul Wilcox. Merci pour vos conseils de sagesse qui m’ont guidé et qui ont été une bénédiction pour ma vie et mon travail. Et, enfin, merci à toi, ami lecteur, de prendre le temps de lire mon histoire. Tony Anthony
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Chapitre 1
Arrêté net
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hane D’Souza est méconnaissable. Les gardiens ramassent son corps lacéré sur le sol de la cellule et le hissent sur une civière plutôt sale. Il a été battu, blessé, violé et meurtri de toutes les façons possibles. Des mares de sang dessinent de grosses taches violacées sur le béton glacé. Alors qu’ils le conduisent vers l’aile de l’hôpital, des traînées sanglantes se répandent comme un serpent dans les sombres couloirs. Les quelques hommes qui se sont rassemblés pour voir se dispersent. Nous savons tous qui est l’auteur des terribles blessures de ce jeune Sri Lankais, mais personne n’ouvre la bouche. Les autorités ne s’en préoccupent pas d’ailleurs. Cela leur fera un prisonnier, «fylakismenos» comme ils disent, de moins dans l’aile B. Bientôt, ce sera le tour d’une prochaine victime. Il n’y aura pas d’enquête, pas de condamnation pour l’agresseur, pas de justice pour mon ami. C’est un jour ordinaire à la prison centrale de Nicosie1. Nous formons un triste mélange d’hommes pervertis: assassins, dealers, escrocs en tout genre, gangsters, ban1
Capitale de Chypre, dans l’intérieur de l’île. (N.d.E.)
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dits, violeurs, terroristes, tous issus de la pire espèce et entassés dans cette prison pestilentielle de Chypre. Il y a bien des lois, mais ce ne sont pas celles des autorités. Nous respectons tous un code de violence, indispensable à notre survie. Il faut toujours regarder derrière soi. C’est chacun pour sa peau, et le sang coule souvent; c’est presque une habitude. Cependant, Shane et moi avons conclu une sorte de pacte. Et face à ce qui vient de se passer, une sombre et dangereuse rage s’empare de moi. Al Capone ou «Alcaponey», comme l’appellent les Grecs, est un homme terrible, pervers, obscène. Personne ne connaît son vrai nom. C’est un criminel mentalement dérangé. Mais la Cour ne s’est même pas donné la peine de le diriger vers un asile psychiatrique; elle s’est contentée de l’envoyer en prison. Alcaponey est l’un des pires. Ce Cypriote barbare est un solitaire qui parle à peine sa propre langue. Condamné pour meurtre et viols multiples, il a été reconnu comme psychopathe. Alors que nous autres passons nos journées à nous droguer, commettre de petits larcins (comme voler des cigarettes ou du chocolat qui peuvent servir de moyen d’échange) ou faire des travaux manuels, lui passe son temps à mutiler et à violer les autres détenus. C’est un condamné à perpétuité, dont le but est de nous faire vivre l’enfer. Voyant combien il a maltraité Shane, je me jure de le venger. Alcaponey a une tête de plus que moi, il est plus costaud, ses bras sont gros comme mes cuisses, mais je sais que je peux le vaincre. Je sais que je peux le tuer à mains nues, pour lui faire payer toutes les atrocités qu’il a commises, et venger ainsi le sang de mon ami. Dans les jours qui suivent, un vent de folie envahit la prison. Tout le monde sait ce que j’ai l’intention de faire. Ce ne sera pas joli à voir. J’attends juste le bon moment pour agir. Deux semaines s’écoulent et, chaque jour, je
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sens monter la colère, tant j’ai envie de le faire souffrir. Je ne veux pas le tuer tout de suite, je veux qu’il me supplie de l’achever. Je suis un champion de kung-fu, et j’ai l’intention de briser tous ses os en mille morceaux. Je peux le faire facilement à mains nues, mais ces derniers temps, je me promène beaucoup avec une lame de rasoir. La plupart des hommes font comme moi. Nous les sortons des rasoirs et les cachons sous notre langue ou à d’autres endroits discrets où il n’est pas facile de les découvrir. Cela ne dérange pas vraiment les gardiens, ils s’en réjouissent presque d’ailleurs. Certains même font semblant de ne rien voir. Qu’en ont-ils à faire que des détenus soient retrouvés mutilés ou violés, avec une lame de rasoir plantée dans la gorge? Gammodi bastardos! Un juron retentit et soudain, je suis projeté contre le mur. Le hurlement d’Alcaponey résonne dans le sombre et triste couloir de la prison. Je suis contrarié de m’être laissé prendre par surprise, mais l’adrénaline court dans mes veines. Le moment est venu, je suis prêt à affronter ce démon. Il s’appuie de tout son poids contre moi, son nez contre le mien; son haleine fétide me soulève le cœur. Une lame acérée pénètre dans mon cou, et bientôt elle me tranchera l’artère jugulaire. Je saisis son visage graisseux avec une de mes mains, et mon pouce s’enfonce dans son orbite pour tenter de lui crever un œil. Nous nous empoignons, je calcule rapidement mes mouvements. Je sais à tout moment que je peux recevoir un coup mortel, mais cela m’est égal. Rien n’a d’importance. Je peux mourir, mais je veux le tuer avant. Je veux son sang. Je peux facilement lui arracher l’œil et lui déchirer les oreilles avec mes dents. Une folie furieuse m’habite, mais soudain, il semble y avoir autre chose. En l’espace de quelques instants, je réalise qu’une
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autre bataille fait rage. Cela n’a rien à voir avec Alcaponey, c’est à l’intérieur de moi. C’est comme si une forme de conscience affaiblissait les réflexes qui ont fait de moi le combattant que je suis. Alors que j’essaie de me focaliser sur l’oreille d’Alcaponey, une image me revient sans cesse, un texte que j’ai lu le matin même. C’est l’histoire d’un homme qui a été injustement arrêté et que son ami défend en coupant l’oreille du serviteur de celui qui l’accuse. L’oreille d’Alcaponey est à deux doigts de ma bouche. «Allez, Tony, mords-le! Tu es rapide, tu peux le faire», dit la voix de mon instinct. «Non, attends… ‘Si quelqu’un tue par l’épée, il faut qu’il soit tué par l’épée’…» Mais d’où vient cette phrase? «Allez mon gars, vas-y! Qu’est-ce que tu attends?» Alors que le conflit fait rage en moi, je sens la main d’Alcaponey me saisir à l’aine. Son sourire diabolique laisse apparaître ses dents complètement abîmées. Je me mets à griffer son visage tanné. Puis, la voix revient à nouveau. «Allez! Tu veux te laisser taillader et violer comme Shane?» Qu’est-ce qui m’arrête? Je l’ignore. J’empoigne le corps de cette brute, il me jette sur le sol, mais quelque chose me retient de lui asséner un coup fatal. Les deux voix s’affrontent en moi, une goutte de sueur dégouline le long du visage d’Alcaponey, comme si le temps s’était arrêté. Ce conflit intérieur est celui de toute ma vie, de ma personne, de l’homme que je suis devenu. Je sais quelle voix doit gagner, mais après? Faut-il que je me laisse mutiler comme mon ami? Ou bien dois-je faire confiance à cette nouvelle conscience, cette nouvelle voix qui semble si déterminée, si sûre? Soudain, des mots me viennent aux lèvres. Ils sont calmes, clairs, autoritaires. Alcaponey ne connaît que le grec, mais aussi
Arrêté net
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bizarre que cela puisse paraître, je lui parle anglais. Après avoir prononcé ces paroles, je relâche mon étreinte et j’attends. Dans la seconde qui suit, je sens une onde de choc traverser le corps d’Alcaponey. Il tremble, la chair de poule parcourt sa peau moite. Ses yeux sombres lancent des éclairs de terreur, et je tente de rassembler mes forces pour me préparer à l’assaut. Tout à coup, mon corps sent l’étau se desserrer. Nous restons là, nous fixant l’un l’autre rageusement. Puis, il se détourne et s’enfuit. Comme un possédé, il court en se protégeant la tête avec les mains. Je le regarde disparaître dans l’obscurité. Il pousse un hurlement à vous glacer le sang, qui résonne entre les murs de béton. Je plonge ma main dans ma nuque pour en extirper la lame de rasoir. Elle n’a laissé aucune marque.
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Chapitre 2
Déracinement total
J
e suis âgé de 4 ans lorsqu’un inconnu se présente chez nous. Nous avons rarement de la visite; aussi, à chaque fois que la sonnette retentit, tout excité, je me précipite en haut des escaliers pour regarder. Mon père fait entrer l’étrange personnage et le conduit dans le salon. Cet homme est d’origine chinoise, comme ma mère. Je descends les escaliers pour tenter de jeter un coup d’œil par la porte entrouverte. Les adultes parlent à voix basse, et je ne parviens pas à distinguer leurs propos. De ma cachette, je peux toutefois apercevoir le visage de cet inconnu: son regard est dur et méchant. «Entre, Antonio!» La voix de ma mère me fait sursauter. Faisant bien attention de ne pas regarder dans la direction de l’étranger, je passe rapidement devant lui et tente de me cacher dans les jambes de mon père. Mais ma mère m’attrape et me tire vers elle. Je ne sais que faire. Je regarde mon père, mais il semble perdu dans ses pensées. Il cligne des yeux lourdement, comme s’il avait quelque chose dans l’œil. Tout d’un coup, l’inconnu me saisit au poignet. Apeuré, je tente de lui échapper, mais il me tient ferme-