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AU COMMENCEMENT
Revenons à cette introduction que d’aucuns appellent aussi prologue. Le « commencement », auquel Jean se réfère, est évidemment le même que celui auquel Moïse, en son temps, a fait référence en introduction de la Genèse, dont les deux premiers chapitres s’avèrent être, sans surprise, le récit de la création :
Au commencement Dieu (Elohim) créa les cieux et la terre…
Celui-ci marque de manière singulière l’événement extraordinaire de la création, dont le Créateur, étonnamment, porte en hébreu un nom pluriel (Elohim) en lien avec le verbe « créer » qui, lui, est conjugué au singulier et non pas au pluriel, comme il se devrait en pareil cas. D’emblée et en lui-même, ce verbe au singulier avec un sujet pluriel, pose question. Mais avant de tenter d’y répondre, relevons ce qui s’impose clairement quant à la Parole et à son association avec la Lumière tel que nous le lisons.
Tout d’abord, Jean atteste que la Parole s’est incarnée, qu’elle a été faite chair pour devenir visible et audible à tous. En direct, pour les hommes de sa génération, mais en différé depuis, par la Parole écrite, pour les générations suivantes jusqu’à la nôtre (Jean 1.14) :
Et la parole a été faite chair, et elle a habité parmi nous pleine de grâce et de vérité.
Or, cette double qualité – pleine de grâce et de vérité – distingue radicalement cette parole sortie de la bouche de Jésus de toute autre parole ici-bas. Au point qu’il sera dit, à juste titre :
Jamais homme n’a parlé comme cet homme.
Et Jean, tout au long de son Evangile, va suivre le ministère public ou privé de ladite Parole. Laquelle va, sans compter, sans se lasser, dispenser la vérité et la grâce en faveur de tous ceux et celles qu’elle va rencontrer sur son chemin, tant sur le plan individuel que collectif. A commencer par Nicodème, le docteur d’Israël, en recherche de la vérité relative à l’entrée dans le royaume de Dieu. Nous y reviendrons pages 16 et 32.
Par ailleurs, la Parole et la lumière sont associées, de telle sorte que les deux peuvent se confondre. Et se confondre à tel point, que l’incarnation de la Parole est tout autant l’incarnation de la lumière et qu’elles ne font plus qu’une entre elles deux, afin d’éclairer tout homme (versets 9 à 13) :
Cette lumière était la véritable lumière, qui, en venant dans le monde, éclaire tout homme. Elle était dans le
Jamais homme n'a parlé comme cet homme monde, et le monde a été fait par elle, et le monde ne l’a point connue. Elle est venue chez les siens, et les siens ne l’ont point reçue. Mais à tous ceux qui l’ont reçue, à ceux qui croient en son nom, elle a donné le pouvoir de devenir enfants de Dieu, lesquels sont nés, non du sang, ni de la volonté de la chair, ni de la volonté de l’homme, mais de Dieu.
Enfin, si c’est à Moïse qu’est revenue la transmission du don de la loi – fondement de l’Ancienne Alliance en faveur du peuple juif – c’est à Jésus-Christ que nous devons la venue de la grâce et de la vérité, fondement de la Nouvelle Alliance en faveur de tous les peuples, y compris du peuple juif (verset 17) :
La loi a été donnée par Moïse, la grâce et la vérité sont venues par Jésus Christ.
Et Jean d’ajouter au verset suivant :
Personne n’a jamais vu Dieu ; le Fils unique, qui est dans le sein du Père, est celui qui l’a fait connaître.
Ce qui revient à dire que, si le ministère de Moïse en tant que prophète a consisté à faire connaître, au travers de la loi, la volonté de Dieu à son peuple, pour sa part, celui de Jésus-Christ consiste désormais à faire connaître Dieu lui-même, à tous les peuples, à tous les hommes, au travers de la grâce et de la vérité dont il est l’incarnation dans l’histoire de l’Humanité.
Et cette incarnation a subjugué à tout jamais l’apôtre
Jean jusqu’à écrire, émerveillé, dans sa première lettre (chapitre 1.1-4) :
Ce qui était dès le commencement, ce que nous avons entendu, ce que nous avons vu de nos yeux, ce que nous avons contemplé et que nos mains ont touché, concernant la parole de vie, ce que nous avons vu et entendu, nous vous l’annonçons, à vous aussi, afin que vous aussi vous soyez en communion avec nous. Or, notre communion est avec le Père et avec son Fils Jésus Christ. Et nous écrivons ces choses, afin que notre joie soit parfaite.
Quelle ferveur de la part de l’apôtre à partager ainsi avec ses chers correspondants sa découverte vivante de l’incarnation du Fils de Dieu. Quel impérieux besoin d’être en communion avec eux et sans délai à ce sujet, et quelle joie enfin de pouvoir l’écrire tel quel à leur adresse.
Quant à nous, quel exemple de témoignage et de foi, de conviction et de volonté, de partager la connaissance du mystère de la piété. 2 Le mystère de l’incarnation de Dieu le Créateur, au sein de la création, au milieu des siens c’est-à-dire au milieu de son peuple terrestre, Israël.
Mais, en retour, que s’est-il passé à l’égard de la lumière ? Les versets 5 et 9 à 11 dans Jean 1, nous apportent la réponse :
La lumière luit dans les ténèbres, et les ténèbres ne l’ont point reçue. Cette lumière était la véritable lumière, qui, en venant dans le monde, éclaire tout homme. Elle était dans le monde, et le monde a été fait par elle, et le monde ne l’a point connue. Elle est venue chez les siens, et les siens ne l’ont point reçue.
2 Mystère de la piété, tel que l’apôtre Paul a été inspiré à le définir dans sa première lettre à Timothée, chapitre 3.16.
A l’unanimité, les ténèbres, le monde et les siens se sont fermés à la lumière, au lieu de s’y ouvrir comme ils auraient dû. C’est pourquoi, les ténèbres continuent de régner dans le monde et au milieu des siens, c’està-dire au sein du peuple juif, jusqu’au jour où, enfin, ce peuple plongé dans les ténèbres de l’incrédulité va reconnaître la divine Lumière et s’ouvrir à elle pour son salut, conformément à la parole prophétique de Zacharie (chapitre 12.10-11) :
Alors je répandrai sur la maison de David et sur les habitants de Jérusalem un esprit de grâce et de supplication, et ils tourneront les regards vers moi, celui qu’ils ont percé. Ils pleureront sur lui comme on pleure sur un fils unique, ils pleureront amèrement sur lui comme on pleure sur un premier-né. En ce jour-là, le deuil sera grand à Jérusalem…
En attendant ce jour-là, tous ceux et celles qui reçoivent la lumière à titre personnel, sont au bénéfice de la conclusion de l’apôtre Jean (versets 12-13) :
Mais à tous ceux qui l’ont reçue, à ceux qui croient en son nom, elle a donné le pouvoir de devenir enfants de Dieu, lesquels sont nés, non du sang, ni de la volonté de la chair, ni de la volonté de l’homme, mais de Dieu.
Sur ce fond sombre, très sombre, toutes ces différentes réceptions de la lumière sont en d’autres termes, des conversions, des nouvelles naissances qui resplendissent d’autant plus pour la gloire de leur auteur divin.
C’est pourquoi, suite à l’appel des premiers apôtres, appel sur lequel nous reviendrons plus tard, il va aller de soi que la nouvelle naissance sera le tout premier sujet que la Lumière incarnée, Jésus de Nazareth, va s’employer à révéler à Nicodème. Ce chef des Juifs, venu de nuit s’entretenir incognito avec le Maître pour ne pas se compromettre aux yeux de ses pairs et du peuple qu’il enseignait, va alors entendre, à sa grande surprise, cette vérité fondamentale.
Lisons le chapitre 3, versets 1-8 :
Mais il y eut un homme d’entre les pharisiens, nommé
Nicodème, un chef des Juifs, qui vint, lui, auprès de Jésus, de nuit, et lui dit : Rabbi, nous savons que tu es un docteur venu de Dieu ; car personne ne peut faire ces miracles que tu fais, si Dieu n’est avec lui. Jésus lui répondit : En vérité, en vérité, je te le dis, si un homme ne naît de nouveau, il ne peut voir le royaume de Dieu. Nicodème lui dit : Comment un homme peut-il naître quand il est vieux ? Peut-il rentrer dans le sein de sa mère et naître ? Jésus répondit : En vérité, en vérité, je te le dis, si un homme ne naît d’eau et d’Esprit, il ne peut entrer dans le royaume de Dieu. Ce qui est né de la chair est chair, et ce qui est né de l’Esprit est esprit.
C’est catégorique, l’homme naturel est interdit de séjour dans le Royaume de Dieu. Par conséquent, il doit impérativement naître de nouveau pour y entrer. Faute de quoi, il est condamné à rester dans les ténèbres du dehors, où il y aura des pleurs et des grincements de dents.
Ne t’étonne pas que je t’aie dit : Il faut que vous naissiez de nouveau.