Constats et propositions pour le renforcement et la coordination

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CONSTATS ET PROPOSITIONS POUR LE RENFORCEMENT ET LA COORDINATION DES ATELIERS DE FRANÇAIS LANGUE ÉTRANGÈRE EN MILIEU ASSOCIATIF SUR LE TERRITOIRE DE RENNES MÉTROPOLE

Rennes - Septembre 2013


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Présenté par Les associations ---------------------- Agir ABCD, Amitiés Kurdes de Bretagne, Coallia, L’essor, La Croix Rouge, Langue et Communication, Les Trois Maisons, Maison des Squares, MJC Bréquigny, Réseau Louis Guilloux, Restos du Coeur, Sauvegarde de l’Enfance à l’Adulte 35, Secours Catholique, Secours Populaire et Solidarité Bretagne Cambodge, Les centres sociaux ------------------ Carrefour 18, Centre de la Lande, Champs Manceaux, Ty-Blosne, Villejean, Les bibliothèques -------------------- Champs-Libres, Clôteaux-Bréquigny, Triangle, Médiathèque Lucien Herr, Les lycées publics -------------------- Jean Jaurès et Victor et Hélène Basch, Le centre de l’Enfance de Chantepie, La mission Mineurs isolés étrangers du Conseil Général 35


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Sommaire P3

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Présentation de la démarche

Bref historique de la mobilisation associative pour l’intégration par la langue

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Les besoins partagés par les structures associatives

Les missions de coordination préconisées

P21 Annexe : La formation linguistique au sein des politiques publiques d'intégration

P8 Les bénéficiaires des ateliers de français en milieu associatif

P18 Conclusion


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Présentation de la démarche

L’apprentissage linguistique est un vecteur primordial de l’intégration des personnes étrangères en France. Faute de moyens financiers, les dispositifs d’État (CAI et hors CAI1) ne parviennent pas à répondre à la forte demande de formation linguistique. Sur le territoire de Rennes Métropole, les personnes dans le besoin se sont naturellement tournées vers les associations qu’elles fréquentaient, lesquelles ont su adapter leurs projets associatifs et leurs activités à cette demande toujours grandissante d’apprentissage du français.

Depuis une dizaine d’années, les structures associatives pallient au manque d’apprentissage linguistique et tentent de s’organiser, en interne comme en externe, afin d’apporter des solutions concrètes aux problèmes des personnes en demande d’intégration. Le 13 septembre 2012, une réunion interassociative a permis de dresser un bilan de ces solutions techniques, qu’elles soient mises en œuvre par des professionnels ou par des bénévoles, dans des centres sociaux, des équipements de quartier, des associations caritatives, ou autres structures associatives. 17 structures différentes ont alors exprimé des besoins redondants. S’en est suivi le 4 décembre 2012 une réunion d’échanges entre acteurs associatifs et représentants de l’État et des collectivités territoriales, qui préconisaient de continuer à travailler entre associations et d’émettre des propositions.

C’est l’axe que les structures mobilisées ont choisi de suivre. Amitiés Kurdes de Bretagne, les centres sociaux Carrefour 18 et Ty-Blosne, Langue et Communication, et la Maison des Squares ont constitué un comité pour organiser la mobilisation et mettre en place des groupes de travail sur deux thématiques spécifiques : le parcours d’apprentissage et la prise en charge linguistique des mineurs isolés étrangers. Toutes les personnes concernées, professionnels, bénévoles et apprenants, ont pu ainsi construire ensemble des propositions concrètes de coordination des ateliers de français langue étrangère2 sur le territoire de Rennes Métropole.

CAI : Contrat d’Accueil et d’Intégration, cf Annexe page 16 2 Le terme « français langue étrangère » regroupe ici toute l’offre, ateliers sociolinguistiques et alphabétisation compris. 1


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40 personnes ont participé aux groupes de travail : • 18 salariés, • 15 bénévoles et • 7 apprenants, représentant • 15 associations, • 2 bibliothèques municipales, • 2 lycées publics, • 1 établissement public départemental, • 1 collectivité territoriale.

Voici le détail des structures participantes : Parcours d’apprentissage 15 structures - Amitiés Kurdes de Bretagne - Agir ABCD - Bibliothèque Clôteaux- Bréquigny - Bibliothèque Triangle - Centre social Carrefour 18 - Centre social Champs Manceaux - Centre social Ty-Blosne - Centre Social Villejean - Langue et Communication - Les Trois Maisons - Maison des Squares - MJC Bréquigny - Restos du Cœur - Secours Catholique -Solidarité Bretagne Cambodge

Mineurs isolés étrangers 6 structures - Association l’Essor - Centre de l’Enfance de Chantepie (DAMIER : dispositif d’accueil des mineurs isolés étrangers) - Conseil Général (Mission mineurs isolés étrangers) - Lycée Jean Jaurès - Lycée Victor et Hélène Basch - Sauvegarde de l’Enfance à l’Adulte 35 (Dispositif AMIE - accueil des mineurs isolés étrangers) - Langue et Communication - Maison des Squares - Amitiés Kurdes de Bretagne


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Bref historique de la mobilisation associative pour l'intégration par la langue

2002/2003 • Mise en place d’un groupe de travail constitué de professionnels du secteur social et de responsables associatifs autour des questions d’intégration sur le territoire du Blosne. Ce groupe engage une réflexion plus particulièrement sur l’accompagnement des micro-entreprises du territoire, les modes de garde et l’apprentissage du français pour les personnes d’origine étrangère. • Les cours de quartier pour les personnes d’origine étrangères, animés par le CLPS depuis un grand nombre d’années, s’arrêtent, faute de financements. • Les centres sociaux TY Blosne, Carrefour 18 et les champs Manceaux, la Maison des Squares et l’association Solidarité Bretagne Cambodge mettent alors en place des temps d’apprentissage du français spécifiques, appelés les ateliers « parlons français ». • Un groupe de travail « citoyen du monde » coordonné par la chargée de mission « politique de la ville » du Blosne réunit les équipements de quartiers et associations autour des questions d’apprentissage du français. • Un groupe de travail interne aux centres sociaux rennais sur la même thématique est également créé.

2007 • L’ARCS ( Association Rennaise des Centres Sociaux ) met en place une recherche-action intitulée « POESI : Population d’Origine Etrangère et Stratégie d’Intégration ». Cette rechercheaction dure environ 3 ans et permet entre autres de pointer les problématiques d’intégration sur le territoire rennais. Elle permet aussi aux partenaires concernés par cette thématique de se connaître, de mutualiser leurs compétences et de réfléchir à des projets communs. • A partir de 2007, un certain nombre d’associations s’engagent dans des actions d’apprentissage du français: Amitiés Kurdes de Bretagne, Dosti, le Secours Populaire, le Secours Catholique, les Restos du Coeur, Déclic Femmes, l’UAIR, etc.


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2008 • Rennes Métropole missionne Langue et Communication pour consulter les structures publiques, para-publiques, privées et associatives pour élaborer un Répertoire des offres d’apprentissage du français langue étrangère, ainsi qu’un état des lieux qui recense les publics accueillis dans les associations. Langue et Communication fait alors un inventaire des besoins et synthétise des préconisations pour améliorer l’intégration par la langue. • Mise en place d’un premier ASL ( atelier sociolinguistique) porté par le Centre de la Lande en partenariat avec la médiathèque Lucien Herr et Langue et Communication.

2009 • Mise en place des ASL « découverte du monde professionnel » sur le Blosne, et « vie quotidienne » sur Maurepas, Cleunay et Villejean. • L’ACSé (Agence Nationale pour la Cohésion Sociale et l’Egalité des chances) missionne Langue et Communication pour la mise en place d’une plateforme d’évaluation des besoins d’apprentissage en français, qui a aussi pour objectif d’orienter la personne vers l’atelier ou la formation la plus appropriée. • Langue et Communication organise un séminaire autour de l’apprentissage linguistique qui réunit plus de 240 participants.

2010 • Premier comité de pilotage de la plateforme d’évaluation et d’orientation, réunissant l’Etat, la Ville et les acteurs de l’apprentissage du français.


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2011 • Automne 2011, Rennes Métropole organise un séminaire autour de ces questions d’intégration. Ce temps de travail permet de pointer un manque de cohérence et de coordination des réponses concernant l’apprentissage du français sur le territoire rennais. Des petits groupes de travail ce jour là ont évoqué et proposé des solutions qui sont restées lettre morte . • Depuis 2011, l’ACSé finance des formations gratuites pour les bénévoles.

2012 • Un groupe de travail rassemblant professionnels et intervenants bénévoles de l’apprentissage du français à destinations des étrangers, intervenant essentiellement en milieu associatif, se met en place. Son objectif est d’interpeller les élus politiques et les financiers sur les suites à donner à ce séminaire et de réfléchir ensemble sur un certain nombre de propositions autour des notions de parcours d’apprentissage.


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Les bénéficiaires des ateliers de français en milieu associatif Combien sont-ils ? Il est très difficile de comptabiliser le nombre exact de bénéficiaires des ateliers de français langue étrangère et d’alphabétisation en milieu associatif sur le territoire de Rennes Métropole. En effet, le manque de moyens humains et informatiques empêche une gestion raisonnable des entrées et sorties, rendant même l’inscription aux ateliers difficile. Les chiffres de la Plateforme d’évaluation et d’orientation - 2012 : 377 personnes évaluées 455 rendez-vous fixés

Nombre de personnes inscrites dans les ateliers de français en 2012 : (Lors du recensement des bénéficiaires, nous n’avons pas croisé les listes nominatives. Une même personne peut être comptée plusieurs fois) ATELIERS Agir ABCD Amitiés Kurdes de Bretagne Centre de la Lande Centre Social Carrefour 18 - Ordilangue Centre Social Carrefour 18 - Parlons Français Centre Social Champs Manceaux Centre Social Ty-Blosne Centre Social Villejean Coallia La Croix Rouge Langue et Communication Les Trois Maisons Maison des Squares MJC Bréquigny Réseau Louis Guilloux - Atelier sociolinguistique Restos du Coeur Secours Catholique

TOTAL 160 109 90 46 194 80 80 139 50 20 115 19 77 8 43 307 100

Secours Populaire Solidarité Bretagne Cambodge UAIR TOTAL

100 5 30 1772

Les chiffres en italique sont estimés

H

F

30 37 17

79 53 29

28

52

29

110

36 7 14 0

79 12 64 8

162

145


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Qui sont-ils ? Les personnes immigrées de longue date : Ce sont des femmes issues du regroupement familial installées en grande majorité dans les quartiers prioritaires de Rennes, détentrices de cartes de séjour 10 ans, renouvelées à terme. Certaines sont installées depuis une quarantaine d’années. Elles fréquentent principalement les ateliers « Parlons Français » des centres sociaux et les équipements de quartiers, comme la Maison des Squares au Blosne, la MJC Bréquigny, ou l’atelier sociolinguistique de Maurepas dans lesquels elles suivent des ateliers d’alphabétisation.

Les personnes immigrées nouvellement arrivées : Elles peuvent être elles-aussi issues du regroupement familial. Comme elles sont arrivées en France après la mise en place du CAI, en 2003, elles ont suivi la formation linguistique dispensée par le CLPS, dans le cadre du contrat d’accueil et d’intégration ( CAI)*. Elles ont passé le DILF (Diplôme Initial de Langue Français), mais le niveau obtenu à la fin de la formation ne leur permet pas d’être autonome dans le quotidien. L’OFII propose également des formations linguistiques en dehors du CAI, mais les places sont limitées. Pour obtenir un niveau permettant leur intégration, ces personnes se tournent vers les ateliers de français en milieu associatif. Les réfugiés : Une fois le statut de réfugié obtenu, la personne est prise en charge par l’OFII, et signe un CAI. Elle peut donc suivre une formation linguistique dispensée par le CLPS. Elle se retrouve alors dans la même situation que les personnes immigrées issues du regroupement familial, avec un DILF en mains mais dans l’incapacité de communiquer en français. Nous les retrouvons donc dans les structures associatives en attente d’intégrer une formation : attente qui peut être longue de plusieurs mois.

Les membres de l’Union Européenne : Les étrangers membres de l’Union Européenne bénéficient de la libre circulation sur le territoire français. Ils ne signent pas de CAI, et ne bénéficient donc pas du dispositif de formation linguistique obligatoire. Leurs seules options sont l’accès aux cours payants dispensés par des centres de formation, à la formation « hors CAI » très limitée en places, ou aux ateliers en milieu associatif. Les mineurs isolés étrangers (MIE) : L’ Ille-et-Vilaine est le 3ème département d’accueil des mineurs isolés étrangers, après l’Île de France et la Seine-SaintDenis. Le Conseil Général a mis en place une cellule spécifique d’accueil des MIE en 2011. On compte 6000 à 8000 mineurs en France, dont 450 en Illeet-Vilaine (5 MIE en 2000). Ce nombre représente une dépense considérable qui affecte la qualité de prise en charge. Les classes MIE des lycées rennais étant vite remplies, les éducateurs sollicitent le monde associatif pour permettre aux jeunes d’apprendre le français.

* Cf Annexe : La formation linguistique dans les politiques publiques d’intégration, page 16


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Les demandeurs d’asile : Le nombre de demandeurs d’asile augmente considérablement à Rennes, et ce depuis la réforme de 2006, qui concentre les démarches administratives à Rennes1. Les demandeurs d’asile sont pris en charge par la Plateforme des Demandeurs d’Asile ( PDA), gérée par l’association Coallia. Ils peuvent être hébergés au centre d’accueil des demandeurs d’asile ( CADA) où sont dispensés des ateliers de français. Mais le nombre de places étant limité, la majorité des demandeurs n’ont pas accès au centre. Ils sont alors tributaires du système d’hébergement d’urgence, notamment le 115, ou s’installent dans des logements précaires, souvent illégaux, aidés par les associations d’aide aux migrants. Ces situations difficiles rendent l’apprentissage linguistique laborieux, bien qu’il soit nécessaire aux démarches administratives. Les personnes de nationalité française : Les personnes nées françaises qui nécessitent un apprentissage linguistique sont principalement des natifs des DOM-TOM, en particulier de Mayotte. Les personnes naturalisées qui bénéficient des ateliers ont donc obtenu la nationalité avant le durcissement des lois, et/ou présentent des difficultés très importantes à l’écrit. Beaucoup d’entre elles sont en demande d’alphabétisation.

La borne Eurodac, qui enregistre les empreintes des demandeurs d’asile, auparavant départementale, est aujourd’hui régionale. Elle se trouve à la préfecture de Rennes, faisant de la ville la porte d’entrée de la Bretagne. 1


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De quoi ont-ils besoin ? Les structures associatives constituent souvent des groupes de niveaux. Mais les objectifs de chaque apprenant peuvent radicalement varier. Nous pouvons les regrouper en 4 grands objectifs :

Entreprendre administratives

des

démarches

Le système institutionnel français étant complexe, les apprenants demandent souvent de l’aide pour comprendre, appréhender, et développer une autonomie dans leurs démarches administratives. Trouver du travail

Créer du lien social Certains apprenants, majoritairement des femmes immigrées ou réfugiées de longue date, participent aux ateliers de français pour créer et entretenir un lien social. Les ateliers sont inscrits dans leurs habitudes hebdomadaires, leur permettant de se retrouver et d’entretenir une relation avec les bénévoles. Apprendre le français du quotidien Les étrangers installés sur le territoire ainsi que les primo-arrivants sont des acteurs sociaux. Ils ont donc besoin de connaître le b.a ba de la langue leur permettant de communiquer au jour le jour, mais aussi d’acquérir des connaissances culturelles et institutionnelles. Les demandes sont récurrentes : s’entretenir avec un agent dans un bureau de poste, chez le médecin, à la banque, à la CAF, répondre au téléphone, faire son marché, etc. L’école est un sujet très demandé, que ce soit en vue de comprendre le système éducatif français et le parcours scolaire, où pour interagir avec le personnel éducatif.

C’est un objectif récurrent pour les apprenants, qu’ils soient membres de l’Union Européenne, réfugiés, ou en attente de cartes de séjour. Leurs situations d’urgence, sources de motivation, les incite à multiplier les ateliers, de façon à acquérir un maximum de compétences en un minimum de temps. C’est pour répondre à leurs besoins qu’il faut développer une offre spécifique et envisager l’élaboration d’ateliers thématiques. Ces objectifs ne sont pas incompatibles entre eux, et évoluent avec le temps. Une personne en attente de statut n’aura pas les mêmes objectifs une fois sa situation stabilisée. C’est pourquoi les professionnels et les bénévoles en charge des ateliers de français prennent en compte la personne dans sa globalité, et porte une attention particulière à l’évolution de leurs besoins.


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En Bref, l’offre associative en 2012 • 20 structures associatives sont engagées dans l’apprentissage du français à destination des étrangers. • 15 offrent des ateliers d’alphabétisation. • 20 offrent des ateliers de français de niveau A1.1 à A2 • 2 offrent des ateliers de français de niveau B1 et plus. • 6 offrent des ateliers sociolinguistiques. • Plus de 1700 personnes étrangères et/ou d’origine étrangère bénéficient de ces ateliers. • La Plateforme d’évaluation et d’orientation a reçu 377 personnes en 2012. • 190 bénévoles animent et participent aux ateliers. • L’apprentissage du français sur Rennes métropole représente 200 heures d’ateliers par semaine. • 21 salariés sont détachés sur ces ateliers,


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Les besoins partagés par les structures associatives Lors de l’élaboration du diagnostic, les structures associatives ont partagé un certain nombre de besoins : La nécessité d’une coordination entre associations La rencontre des représentants associatifs a révélé une méconnaissance des ateliers de français, très nombreux sur le territoire de Rennes Métropole. Chaque structure fait comme elle peut avec ce qu’elle a. L’organisation et la coordination internes des ateliers et des bénévoles animateurs conditionnent les structures dans l’opérationnel, les empêchant de prendre le temps et la hauteur nécessaires pour s’organiser et se coordonner à l’externe. Cette coordination est pourtant nécessaire, afin de structurer l’offre, de permettre le développement d’actions partenariales, de soutenir et d’accompagner les bénévoles et de mutualiser les compétences. La nécessité d’apprentissage

d’un

parcours

La mise en place d’une coordination de l’ensemble des ateliers permettrait d’établir des parcours ou circuits d’apprentissage et donc un meilleur suivi des bénéficiaires. Les structures pourraient travailler en complémentarité et s’organiser afin d’optimiser la progression linguistique des apprenants, en apportant des réponses évolutives en accord avec leurs besoins. La notion de « circuit » est intéressante, car elle intègre d’autres services d’accueil de l’étranger et illustre la complexité de l’inter-dépendance entre les différents champs de compétences, contrairement au terme « parcours » à connotation linéaire.

La difficulté à constituer des groupes de niveaux La majorité des associations, afin de structurer au mieux l’offre, organise les ateliers par groupe de niveaux de langue. Cette méthode s’avère efficace si les bénéficiaires des ateliers présentent des besoins similaires, comme par exemple dans le cas d’un atelier d’alphabétisation au sein d’un quartier prioritaire rassemblant des femmes immigrées de longue date. Mais la majorité des ateliers sont composés de personnes aux besoins et aux motivations très différents1. Prioriser les raisons d’apprentissage et les motivations de la personne sur son niveau de langue permettrait une meilleure homogénéité des groupes, et par conséquent créerait une dynamique d’apprentissage facilitatrice. Le besoin d’une prise en charge des mineurs isolés étrangers Bien que les mineurs isolés étrangers soient une minorité au sein des ateliers de français en milieu associatif, ils présentent un réel problème de prise en charge. Les associations qui acceptent des mineurs dans leurs ateliers se retrouvent confrontées aux disparités pédagogiques entre adultes et adolescents dont les centres d’intérêt et les modes d’apprentissages divergent. La création de la mission Mineurs isolés étrangers du Conseil Général, mise en place pour faciliter leur prise en charge, a pour conséquence une augmentation exponentielle du nombre de MIE sur le département. Les dispositifs d’État, notamment les classes spécifiques de l’Éducation Nationale, ne permettent pas de répondre aux besoins. 1

Cf. Les bénéficiaires, page 7.


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L’impossibilité de faire face à la trop forte demande La gestion du nombre de bénéficiaires est problématique. Les équipements de proximité ont pour mission de prioriser les habitants de leurs quartiers respectifs, or la demande vient de tout Rennes Métropole. De plus la borne Eurodac, auparavant départementale, est depuis 2008 régionale. Rennes est à présent la porte d’entrée des demandeurs d’asile sur le territoire breton. Par conséquent, les ateliers sont très vite saturés. Comme c’est le cas sur l’ensemble du territoire, les structures sont en peine de réorienter les personnes, ce qui génère de la frustration voire de la souffrance. Outre le nombre croissant d’étrangers à Rennes, un quantité non négligeable de personnes en demande ont suivi précédemment une formation au CLPS, dans le cadre d’une formation CAI ou hors CAI. N’ayant néanmoins pas atteint un niveau satisfaisant pour s’intégrer, ces personnes se tournent vers les associations. Ce constat interroge une majorité d’associations quant à l’efficacité du dispositif d’État. Les seules structures pouvant toujours accepter du monde sont les associations caritatives, qui appliquent une politique d’accueil inconditionnel. Face au flux aléatoire du public et au manque d’outils techniques, ces associations connaissent des difficultés conséquentes pour organiser les ateliers et mettre au point des suivis pédagogiques efficients. Le manque de financements pérennes Les ateliers sociolinguistiques, la Plateforme d’orientation et d’évaluation, et les formations pour les bénévoles existent grâce aux subventions attribuées dans le cadre du CUCS1 et du PRIPI2. Ces actions ont été créées en réponse à un besoin détecté sur le terrain, et ont démontré, lors des évaluations annuelles auxquelles elles ont été soumises, leur indéniable utilité. Pourtant elles sont toujours financées dans le cadre d’actions dites «expérimentales » et sont donc remises en cause chaque année, empêchant les professionnels de voir sur le long-terme et d’anticiper leurs évolutions. Le manque de formations pour les bénévoles Langue et Communication a pu mettre en place des formations gratuites, et ce depuis 2010. Cette année encore, 11 ateliers d’une demi-journée minimum ont pu être proposés. Ces formations permettent aux bénévoles à la fois d’acquérir des outils pédagogiques et d’échanger sur leurs pratiques. Mais elles dépendent des financements CUCS et sont donc remises en question chaque année. De plus, il est impossible de mettre en place une véritable offre de formation. Elles sont considérées comme absolument nécessaires par les bénévoles qui demandent leur développement et souhaitent leur pérennisation. 1 Le Contrat Urbain de Cohésion Sociale est un dispositif de la Politique de la ville permettant de financer des actions ciblées sur des territoires prioritaires, notamment les zones à urbaniser en priorité ( ZUP). 2 Le Programme Régional d’Intégration des Populations Immigrées est un dispositif déconcentré de l’État permettant la mise en place d’actions à destination des personnes immigrées en tenant compte des spécificités d’un territoire donné.


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C’est pourquoi la mise en place d’un dispositif s’impose. Voici notre proposition :


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Conclusion

L’apprentissage du français langue étrangère exige la coopération indispensable d’un ensemble d’acteurs aux compétences diverses et complémentaires. Il est nécessaire de prendre en compte tous les aspects de la personne en demande, de ne pas sectoriser les réponses, mais bien de lui apporter un accompagnement global qui tient compte de l’évolution de ses besoins et de ses objectifs.

Les demandes sont différentes, mais elles convergent toutes vers un besoin d’intégration qui ne trouve pas de réponses dans les dispositif d’État. Le constat est simple : il est demandé aux personnes étrangères qui s’installent en France d’assimiler la culture française, ses valeurs républicaines, son fonctionnement démocratique, son histoire. L’idée est noble, mais peu réaliste. Un étranger qui s’installe en France fait d’abord face à son lot d’institutions, son administration où l’écrit tient une grande place. La société civile, les bénévoles animateurs, les associations et les professionnels jouent un rôle de relais entre la société française et l’apprenant. La complémentarité entre professionnels et bénévoles est évidente et essentielle. Ils peuvent répondre aux sollicitations sans pour autant représenter une institution. Ils sont de véritables alliés, ayant souvent construit une relation de confiance avec les apprenants. Tout comme le travail entre professionnels est complémentaire. L’apprentissage du français langue étrangère en milieu associatif concerne aussi bien des formateurs linguistiques, des animateurs socioculturels que des travailleurs sociaux. Face à ces disparités, il est primordial d’organiser et de mutualiser les compétences de chaque domaine d’intervention afin d’unifier les réponses. La création d’un dispositif de coordination permettra d’organiser, amplifier et harmoniser l’offre, d’initier des partenariats, d’accompagner les acteurs, et de permettre le suivi personnalisé des apprenants. Cette mise en place s’inscrit dans le projet territorial en faveur d’un meilleur accueil et d’une bonne intégration des personnes étrangères.


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Signatures

28 structures signataires :

• MJC Bréquigny

• Agir ABCD

• Réseau Louis Guilloux

• Amitiés Kurdes de Bretagne

• Restos du Cœur

• Association l’Essor

• Sauvegarde de l’Enfant et de l’Adulte 35

• Bibliothèque Champs-Libres • Secours Catholique • Bibliothèque ClôteauxBréquigny

• Secours Populaire

• Bibliothèque Triangle

• Solidarité Bretagne Cambodge

• Centre de l’Enfance de Chantepie • Centre de la Lande • Centre social Carrefour 18 • Centre social Champs Manceaux • Centre social Ty-Blosne • Centre social Villejean • Coallia • Conseil Général 35 • La Croix Rouge • Langue et Communication • Les Trois Maisons • Lycée Jean Jaurès • Lycée Victor et Hélène Basch • Maison des Squares • Médiathèque Lucien Herr


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Annexe : La formation linguistique au sein des politiques publiques d'intégration Une compétence de droit commun : le Contrat d’accueil et d’intégration

français. Trois parcours possibles :

L’ État français a mis en place en 2003 le premier dispositif destiné à faciliter l’intégration sociale des primo-arrivants : le contrat d’accueil et d’intégration (CAI), contrat signé entre l’État et l’étranger en situation régulière. Il est entièrement géré par l’Office français de l’immigration et de l’intégration ( OFII ). En 2007, le CAI est rendu obligatoire et systématique. Il s’adresse aux :

- Un parcours conduisant à l’obtention du DILF (Diplôme initial de langue française), dont le niveau est très rudimentaire. Ce parcours s’adresse aux personnes n’ayant jamais été scolarisées qui, pour cette raison, ne maîtrisent ni la lecture ni l’écriture dans leur langue maternelle.

• primo-arrivants • de pays tiers ( = hors Union Européenne ) • dont c’est le premier séjour en France • de plus de 16 ans • détenteurs d’un titre de séjour ( = situation régulière ) • sur le territoire depuis 1 an environ ( 5 ans maximum ) • qui souhaitent s’établir durablement en France. Le contrat formalise en un seul document les étapes du parcours d’intégration de l’étranger qui comprend: une journée d’instruction civique pour l’ensemble des signataires, la journée « vivre en France », qui permet de faire un point sur l’ouverture des droits et le fonctionnement des administrations, le bilan de compétences professionnelle, et la formation linguistique. Celle-ci concerne 25% des signataires. 60% des signataires sont orientés vers le DELF, 40%1 vers le DILF.

linguistiques

sont

- Un parcours conduisant à l’obtention du DELF A1 (diplôme d’études en langue française). Le niveau A1 est le premier niveau de connaissance d’une langue étrangère, il s’apparente au niveau 6ème. Il s’adresse aux personnes qui ont été scolarisées dans leur pays jusqu’au niveau secondaire minimum. - Un parcours spécifique et facultatif conduisant à l’obtention du DELF A1. Il s’adresse aux signataires francophones en situation d’analphabétisme. Les bénéficiaires sont principalement des jeunes femmes ( entre 16 et 35 ans pour plus de 70%2 ) issues du regroupement familial, de plus en plus diplômées ( environ 60% ont au minimum un niveau BAC3 ), membres de famille de français (conjoints de français, parents d’enfants français, éventuellement ascendants de français ou jeunes majeurs à charge ).

La formation linguistique La principale prestation fournie dans le cadre du CAI est la formation linguistique, de 400 heures maximum, délivrée gratuitement aux étrangers ne parlant pas

1 Chiffres concernant la région Bretagne pour l’année 2011, OFII. 2 Chiffres concernant la région Bretagne pour l’année 2011. 3 Idem


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Le public du CAI étant très spécifique, l’OFII propose également une formation linguistique « hors CAI ». Elle s’adresse aux : • • • •

étrangers en situation régulière de plus de 26 ans installés légalement et durablement en France originaires de tous pays ( Union Européenne y compris)

Les candidats à la nationalité française sont prioritaires. Le parcours hors CAI est plus court, l’enveloppe est contrainte ( 40 928 heures réparties sur l’ensemble du territoire ). Certains signataires du CAI basculent une fois leur formation terminée vers le « hors CAI » afin de continuer leur apprentissage. Les limites des formations de l’OFII La majorité des signataires, environ 70%, est orientée vers le DILF, niveau minimum requis. Ce niveau est insuffisant. Il ne permet pas aux étrangers d’interagir avec des français. « Le besoin de formation linguistique ne peut que perdurer au-delà du seul processus d’accueil formalisé1 ». Le dispositif CAI ne prend pas en compte les immigrés arrivés avant sa mise en place. Il n’a pas vocation à répondre à l’ensemble des enjeux de l’intégration (relatifs à l’emploi, au logement, à l’éducation, à la santé). L’enveloppe « hors CAI » est très restreinte et ne permet pas de répondre au grand nombre de demandes.


Les illustrations de ce dossier sont des tableaux peints à l’acrylique réalisés par Laura Zimmermann. http://laura-zimmermann.com


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