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REVUE Elitis Nuances sablées Ville d’Hiver L’espace Darwin The Collectionist Bast Cité Frugès La Méca
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REVUE
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SELON
Canapé modulable Cosima à découvrir chez Good Design Store 19 rue Venture, 13001 Marseille - 12 rue Catherine Segurane, 06300 Nice www.good-designstore.com
Ecole de design ESDAC Design Graphique, Design d’Espace, Design de Produits, Design de Mode & Communication (Bac à Bac +5, Initial & Alternance) Aix-en-Provence, Marseille, Montpellier, Clermont-Ferrand, Istres, Lyon, Lille www.ecole-esdac.com
Avant-propos
Plus que jamais, avec la période inédite que nous traversons, « l’art d’habiter » prend tout son sens. Chacun de nous s’est réapproprié son lieu de vie, lieu de bien-être mais aussi, comme cela était sa première destinée, lieu protecteur. Plus que jamais, nous avons envie de partager avec vous des lieux, des moments de vie, des objets qui nous permettent de nous évader et de parfaire notre idéal d’habitat. Alors pour ce nouveau numéro de la REVUE, Cap à l’Ouest, direction la vitalité pure et l’énergie vivifiante. La ville rose nous ensorcèle, la côte nous dynamise et Bordeaux nous étonne. C’est un territoire de traditions, mais aussi d’innovations. Et c’est ce mélange qui nous séduit, tant sur le plan artistique qu’esthétique. Découvrez un concentré des artistes, des architectes et des créateurs qui nous inspirent, et ressourcez-vous dans notre univers. Nous vous souhaitons une bonne lecture. Amandine & Sébastien Coquerel Fondateurs d'Archik
Agence hybride au concept global, qui prône l'art d'habiter.
M A R S EI L LE | PA R IS | TOU LOU S E
L’équipe Sébastien Coquerel Editeur Amandine Coquerel Directrice de Publication
Ont collaboré à ce numéro Marie et Vincent de Elitis, Caroline et Christophe Boutel, Nastia Sleptova, Mylène de Aesop, BAST, Catherine Heitz de Hedonic, Marc-Alexandre Ducoté, et toute l'équipe Archik.
Emmanuelle Oddo Rédactrice en chef Laure Amoros Coordinatrice rédaction Flirt Studio Direction Artistique
Contributeurs Emmanuelle Oddo Rédactrice en chef
Olivia Thébaut Photographe
Fondatrice du studio curatorial Piece A Part, Emmanuelle Oddo
Basée en région bordelaise, Olivia est photographe autodidacte.
dresse des ponts entre l’art, le design et la décoration à travers des
Sensible à l'univers de la mode et de la décoration, elle se plaît à évoluer
projets holistiques. Egalement critique d’art, elle a collaboré avec
dans des univers différents pour ses clients tels que Sézane, Caudalie,
des revues spécialisées telles que Point Contemporain, le Chassis
Jamini ou encore Home Magazine. A travers ses photographies et sa
ou The Arts Factory Magazine. Après avoir oeuvré chez Archik en
direction artistique, elle propose sa vision du quotidien : douce et
tant que responsable de la communication, elle continue à assurer la
féminine.
rédaction en chef de La Revue.
Fabienne Berthet Journaliste
Olivier Amsellem Photographe
Journaliste polyvalente, Fabienne Berthet intervient depuis de
Photographe marseillais d'architecture et de mode, Olivier questionne
nombreuses années sur des sujets centrés sur l’urbanisme, l’immobilier
perpétuellement son territoire, à la quête d'une beauté sauvage.
mais aussi le lifestyle. Elle collabore régulièrement avec des magazines
Photographe depuis son plus jeune âge, il collabore aujourd'hui avec
nationaux tels que Capital ou le Moniteur ainsi qu’avec des organes de
des titres de renoms tels que Architectural Digest ou M le Monde,
presse marseillais comme Businews ou Azur TV.
et prête son oeil à des architectes tels que Rudy Ricciotti ou ARM Architectures.
Fanny Liaux-Gasquerel Journaliste Après avoir fait ses armes au sein de l'équipe communication de Maison Sarah Lavoine, Fanny revient à ses premières amours au sein de l'équipe éditoriale d'IDEAT.fr. Spécialisée dans les sujets lifestyle, elle aiguise sa plume pour les publications digitales du groupe IDEAT Editions (IDEAT, The Good Life, Dim Dam Dom) et pour d'autres publications indépendantes.
La Revue est une publication semestrielle tirée à 10 000 exemplaires et diffuseé à Paris, Marseille et Toulouse. Elle est éditée par la SARL ASLA - 50 rue Edmond Rostand 13006 Marseille – 849 154 653 RCS MARSEILLE Tel : 04 91 26 64 56 / www.archik.fr / larevue@archik.fr N° ISSN : 2678-5803 Elle est imprimée sur du Papier Munken Polar Rough de 300 gr pour la couverture et du papier Magno Naturel de 120 gr pour l’intérieur. Imprimeur : Imprimerie CCI Marseille 9 avenue Paul Héroult 13015 Marseille Les textes et l’ensemble des publications n’engagent que la responsabilité de leurs auteurs. Tous droits strictement réservés.
© Alfons Alt.
&
mobilier luminaires contemporains anciens 3 rue Edmond Rostand, 13006 Marseille www.studio19.fr
Table des Matières
Chapitre I
De l'art et du design
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Visite d’atelier — Elitis
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Intérieur particulier — Color Block
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Icône — Le Transat
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Objets de convoitise — Nuances sablées
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Archik — Les Éditions
Chapitre II
De la ville
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Rendez-vous — Aēsop - Galerie du coté - Hedonic
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Mutations — L'espace Darwin
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Clichés de ville — Toulouse par Olivia Thébaut
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Villégiature — Ville d'Hiver
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Archik — Une Collection
Chapitre III
De l'architecture
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Conversation — BAST
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Re-naissance — The Collectionist
128
Symbiose — A hauteur d'arbres
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Pensée constructive — Cité Frugès
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Anatomie d’un building — La MÉCA
23 rue Stanislas Torrents Hôtel Grawitz | 13006 Marseille www.mclavocats.fr
Mise en Scène Éclairage Professionnels de l’éclairage depuis 20 ans 162 rue Breteuil, 13006 Marseille www.mise-en-scene-eclairage.fr - 09 54 97 12 97
De l'art et du design
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Visite d’atelier Texte — Emmanuelle Oddo
Photos — Elitis
Elitis
Maison d’exception, Elitis édite depuis 1988 des tissus et revêtements muraux inédits, entre innovation technique et chef d’œuvre artisanal. Rencontre.
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Lins ajourés, tressages de jacinthe d’eau, impressions sur fil à fil ou bambous tressés… Les créations qui jalonnent l’histoire de la maison surprennent par leur précision, leur pertinence et leur éclectisme. C'est en bordure de Toulouse, dans un site baigné de lumière, que l'éditeur a choisi de s'implanter. Ici, le bureau de style formé à l’origine par Marie Papillaud et Vincent Gevin, officie chaque jour pour cultiver cette vision expérimentale.
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Marie, Vincent, pourriez-vous nous parler du site où nous nous trouvons ? Comment a été pensé l’agencement d’un tel espace ?
M&V Patrice Marraud des Grottes a voulu faire construire en 1995 un lieu de travail qui soit convivial, où l’on puisse se retrouver. Pour des raisons familiales, il a choisi un site à Toulouse, dans le quartier de Montaudran. Vincent et moi étions déjà là. Nous étions à l’époque très peu nombreux, presque perdus dans ces immenses pièces. Mais l’espace était déjà chaleureux, avec cette grande cuisine centrale et sa table généreuse, sa cheminée allumée l’hiver ou encore son jardin dont nous profitons l’été. Aujourd’hui, nous sommes une cinquantaine de personnes, contre une dizaine à la création d’Elitis en 1988. Le rez-dechaussée accueille les fonctions administratives, la comptabilité et les commerciaux qui prennent des commandes toute la journée auprès de nos clients ou nos agents à l’étranger. À l’étage, nous retrouvons le style et le marketing. Mais bien qu’une division soit opérée par les deux niveaux, l’espace ne comporte pas de cloison, tout est pensé en open-space, et dans ce sens-là, nous partageons beaucoup de choses, notamment visuelles.
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Comment s’organise la création autour du bureau de style ? Dix personnes composent le bureau de style, dont six qui dessinent, et les autres qui développent les collections. Historiquement Marie et moi avons créé le bureau de style, mais il n’y a pour autant aucune hiérarchie aujourd’hui. Au début de l’année nous faisons des panneaux de tendances, pour avoir une idée globale de la direction graphique. On est très axé matière chez Elitis, donc nous réfléchissons énormément en fonction du cahier des charges que nous devons respecter pour développer nos collections de papiers peints, revêtements muraux et textiles, à sortir pour septembre et janvier. Nous sommes éditeur, nous ne fabriquons pas : nous avons des fabricants partout dans le monde en fonction des produits que nous développons. Nous essayons donc de voyager beaucoup pour découvrir de nouveaux partenaires, voir si leur manière de travailler nous donne des idées pour développer des dessins et de nouvelles matières. Pour le textile, même chose : chaque nouveau besoin en velours, lin, jacquard ou broderie est l’occasion de sourcer de nouveaux fournisseurs. Chaque nouveauté chez Elitis découle d’une opportunité de développement identifiée chez un fabricant, et qui n’avait jamais été exploitée dans le monde du tissu d’ameublement, du revêtement mural ou du papier peint. C’est toujours le résultat d’une rencontre et d’un partenariat.
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Les créations Elitis se situent à mi-chemin entre savoir-faire artisanal et recherche innovante. Comment assurez-vous cet équilibre ? Nous ne sommes pas toujours dans l’innovation, parfois il peut s’agir de choses très traditionnelles que l’on sort de leur contexte et que l’on adapte à nos supports : un panier de superbe confection glané en Asie par exemple, que nous allons tenter de reproduire en mural. La recherche et le développement de nouveautés peuvent être très longs, voire parfois ne jamais aboutir. L’intuition et l’entente sont très importantes aussi : si nous n’arrivons pas à nous entendre avec le fabriquant, c’est que nous ne sommes pas au bon endroit. Si le contact est bon, nous imaginons des projets en fonction de ce qu’ils savent faire, nous n’essayons pas de leur demander l’impossible. Tout au plus, nous souhaitons qu'ils cherchent des solutions, grâce à leur savoir-faire, pour développer des innovations. Chose qui généralement les intéresse puisque le développement de cette nouvelle technique peut leur ouvrir également de nouveaux débouchés par la suite. Nous sommes allés chercher par exemple il y a une dizaine d’années une partenaire qui était dans la bagagerie, et qui suite à notre collaboration, ne fait plus que de la décoration d’intérieur. Avec cet avantage propre à la décoration : les collections sont plus pérennes – et les collaborations aussi - bien plus que dans le monde de la mode, beaucoup plus fugace. Coques de noix de coco, raphia, sequins, cerisier du Tibet, papier dévoré washi… Où puisez-vous toutes ces ressources de matières inédites ? Comment parvenez-vous à les développer, et les combiner ? Ce sont beaucoup de choses que l’on voit pendant nos voyages, que l’on ramène, avec lesquelles nous tentons de dessiner. Notre métier est un métier de curiosité constante. Le monde de l’édition de tissu d’ameublement est un très vieux métier. Quand on a commencé, il y a un peu plus de trente ans, nous n’avions pas d’archives, nous partions de zéro. Nous nous sommes bâtis petit à petit, en explorant des pistes très variées, plus ou moins heureuses, plus ou moins « fun », et c’est finalement le revêtement mural qui nous a vraiment lancé : faire de belles matières pour les murs, surprenantes et de grande qualité. Où sont principalement confectionnées les créations Elitis ?
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Nous affectionnons particulièrement l’Asie, pour le savoir-faire et la dextérité incroyable des artisans. L’artisanat traditionnel y est très préservé, et nous nous comprenons rapidement avec les fabricants. Et puis en termes de matières, l’Asie est véritablement le magasin du monde, ce qui donne lieu à une multitude d’idées.
Nous travaillons également beaucoup avec des façonniers en Europe, où il y a encore beaucoup de fabricants qui savent très bien travailler. La surprise et l’éclectisme sont les maîtres mots de vos collections. Comment cultivezvous ces valeurs d’une saison à l’autre ? Nous n’avons pas de style chez Elitis. Nous avons décidé depuis le départ de nous intéresser à tous les sujets, de ne pas nous enfermer dans une esthétique ou une facture, de ne nous imposer aucun interdit. Par conséquence, les collections sont très différentes d’une année sur l’autre. La couleur est toujours présente, mais nous changeons régulièrement nos gammes, en suivant un fil conducteur tout de même, que l’on prend soin de dérouler petit à petit, d’une année sur l’autre, comme une petite musique que l’on suit et qui nous entraine. Chaque début de collection est excitant : c’est cette excitation que nous transmettons qui se transforme finalement en surprise. Hôtels de luxe à Dubaï, en Grèce ou en Italie, appartements privés à New-York, Paris ou aux Pays-Bas… A qui s’adresse Elitis ? Quel sont les projets dans lesquels vos réalisations s’expriment le mieux ? Nous faisons du très haut-de-gamme, pour des hôtels de luxe ou des maisons de couture, comme du particulier, ce qu’on appelle le retail. Notre gamme de prix est assez élevée mais couvre tout de même différents segments commerciaux. Hormis nos points de distribution – volontairement très sélectifs – qui se trouvent dans le monde entier, nous avons également des showrooms dans des villes comme Paris ou New York dans lesquels nous présentons nos collections, et dans lesquels tout le monde peut se rendre. Les Etats-Unis sont un marché particulièrement porteur, suivi de l’Europe, dont historiquement la France, devant les Emirats ou la Russie qui sont davantage en veille en ce moment dû aux conflits et embargos. Les collections restent les mêmes pour toutes les zones, bien qu’il nous arrive aussi de travailler sur des commandes spéciales. Nous avons d’ailleurs une division chez Elitis entièrement dédiée au sur-mesure pour travailler sur des dimensions spéciales, comme les panoramiques par exemple, ou bien sur le développement de commandes particulières et exclusives. Nous avons encore un autre service spécialisé dans l’hôtellerie, qui s’occupe de développer des produits très techniques, assurant notamment des résistances supérieures.
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En 2017, pour les 30 ans de la maison, Elitis organisait l’exposition « Un autre regard » à La Cour du Marais, à Paris. Quelle est la place accordée à la transmission dans votre métier ? L’exposition était destinée à montrer les produits phares qui avaient été imaginés pendant trente ans. Au-delà de la technique, ce qui nous plait c’est de transmettre l’envie. Nous ne sommes pas une manufacture à proprement parler, l’idée n’est pas de transmettre un savoir-faire, comme le ferait un ébéniste ou un autre artisan. Nous voulons davantage transmettre notre façon de travailler : une méthode empirique, mais appliquée, étudiée. Nous avons gardé un côté très manuel, avec le dessin, mais aussi les recherches, les maquettes. L’exposition était également l’occasion de partager toutes ces choses mais également des ouvrages, des références. Une nouvelle génération reprend peu à peu le flambeau chez Elitis, et les choses se passent très bien grâce à cette transmission.
Le défi est de continuer à donner envie aux gens de s'entourer de belles choses.
La notion de rareté est-elle importante pour vous ? Non. Pas nécessairement. Au contraire, notre objectif serait plutôt de vendre des choses belles au plus grand nombre. Quels challenges pour demain ?
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Tenir. Il y a des challenges commerciaux, certes. Mais le défi est aussi de continuer à donner envie aux gens de s’entourer de belles choses. Très souvent, ce qui se passe, c’est que l’on voit des choses belles autour de nous, à travers nos voyages ou des ouvrages, et nous avons envie de les partager. Il nous arrive parfois de rentrer dans un lieu, voir une porte et d’un seul coup se dire « cette porte est magnifique, il faudrait que l’on essaie de montrer ça aux gens ». Sans cela, cette porte ne restera visible qu’à un seul endroit dans le monde. Souvent, ça peut être aussi simple que ça : un désir de communiquer les belles choses. Et ce désir sera toujours vivant. C’est sans fin.
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Intérieur particulier Texte — Amandine Coquerel
Photos — Sophie Tom & Fabien Sans
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Caroline aime les intérieurs confortables et réfléchis, Christophe le mélange des styles et des époques. En résulte un appartement éclectique au caractère évident, où les couleurs et les habitants s’entrechoquent joyeusement.
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Christophe est artiste avant tout, et décorateur globe-trotteur. Caroline est architecte d’intérieur, passionnée par son métier. Ils partagent donc naturellement de nombreux centres d’intérêts… et trois enfants. Après une première tranche de vie à Barcelone où ils se sont rencontrés, et deux enfants plus tard, Caroline et Christophe ont jeté leur dévolu sur cet appartement en entresol entièrement à rénover, et parfait à plusieurs égards. En premier lieu, sa situation privilégiée en plein cœur de Toulouse, dans un quartier à la fois vivant et familial, proche des poumons verts de la ville. Ensuite, son caractère : ses volumes, ses possibilités, la beauté et l’état de l’immeuble… ainsi que son accès privatif à une grande cave en sous-sol, donnant une dimension de petite maison à l’appartement. Caroline s’y est tout de suite projetée, et hésitation faite entre deux plans, l’a finalement amputé d’un studio, ce qui a naturellement déroulé le reste. Toute l’organisation de l’appartement a dû être modifiée pour moderniser la circulation, et tous les réseaux repensés. En duo, ils se sont occupés du chantier : elle dans la réflexion fonctionnelle et esthétique, et lui dans la maîtrise d’œuvre. Le plan en U permettant des expositions des pièces toutes différentes, le parti pris a été de travailler une couleur par pièce, les couleurs variant toutes en fonction de l’heure de la journée. L’entrée, à l’origine aveugle, fait aujourd’hui office de petit bureau et coin bibliothèque, éclairée par une ouverture en verrière donnant sur le salon.
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En enfilade, la cuisine a pris place dans l'ancienne pièce de réception. Passante et accueillant un espace salle à manger, elle est devenue une pièce conviviale, où ils reçoivent leurs amis et passent le plus clair de leur vie quotidienne. La salle de bains familiale remplace quant à elle l'ancienne cuisine. Restée volontairement blanche, c’est dans les carreaux de ciments que la couleur a trouvé sa place, amenant la fantaisie nécessaire. Côté déco, Caroline et Christophe collectionnent depuis presque 20 ans des meubles et des objets choisis qu'ils ont chinés ou dont ils ont hérité. Ils répondent souvent à des coups de cœur, rarement réfléchis, qu'ils essaient de marier au mieux avec des pièces plus modernes comme une table signée Jean Prouvé. L’ensemble, éclectique, ne manque pas de personnalité.
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Aujourd'hui, ils vivent merveilleusement bien dans cet appartement familial qui leur ressemble. C’est la « maison » du bonheur, toujours pleine d’amis et d’enfants. Si bien que Caroline a installé son agence en sous-sol, dans un cocon qu’elle s’est aménagé sur mesure. Et nous faisons partie de ces privilégiés qui ont eu la chance d’y être conviés, pour un moment assurément intime et joyeux.
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Les Fétiches de Caroline et Christophe
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Lampe en cuivre du salon
Gazinière La Cornue
C’est une œuvre originale de Christophe. Après avoir réalisé sa première exposition à Barcelone, il a ouvert avec ce qu’il avait gagné - son premier bar saisonnier sur la Costa Brava, nommé « La Hola ». Cette lampe a été conçue pour le bar, telle une vague qui s’ondule grâce à du cuivre de climatiseur déroulé et repositionné. Elle a trouvé une seconde vie dans leur salon, pièce parfaite pour habiller la grande hauteur sous plafond.
Issue de la maison de famille de Caroline à Castelnaudary, elle appartenait à sa mère. Quand celle-ci a emménagé à Toulouse, Caroline et Christophe venaient d’acquérir leur nouvel appartement. Véritable souvenir de famille, ils l’ont récupérée, restaurée, et lui ont trouvé une place de choix. Du fait de ses 300kg, elle n’aurait pas pu être installée en étage !
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Table basse en bois exotique
TV Space Age
Cette petite table basse en bois exotique est un souvenir offert par la tante de Caroline, venu tout droit d'un de ses voyages en Tunisie dans les années 70. Etant l'un des éléments centraux du salon, cette table basse participe à leur quotidien et fait merveilleusement écho à leur tapis en peau.
Cette petite télévision, très connue de l’ère Space Age, a été offerte à Christophe par son père, véritable fan de ce courant, mais aussi du bolidisme. Il l’a trouvée à Sète, chez un brocanteur spécialisé dans ce type de pièces. Elle fonctionne toujours, en noir et blanc. Ils s’en servent parfois pour regarder des vidéos, ou en lampe, en saturant le grain de la "neige". 3 3
Icône Texte — Emmanuelle Oddo
Illustration — Nastia Sleptsova
Le Transat
Du fauteuil Transat (1923) de Robert MalletStevens à la Chaise Pi (1983) de Martin Székely, la chaise longue séduit au XXème siècle aussi bien par sa fonctionnalité que par son élégance. Retour sur l’essor de cette assise longiligne.
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La promenade vitrée de première classe sur le pont véranda à bord du paquebot France (CGT 1962). © Collection French Lines & Compagnies
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Chaise de pont à bord du paquebot France (CGT 1962). © Collection French Lines & Compagnies
Si le transat fut longtemps considéré comme accessoire de plage, il faut en réalité chercher ses origines du côté de la plaisance, et des premières liaisons transatlantiques d’où il tire son nom. Au début du XXème siècle, l’usage des paquebots assurant les traversées entre l’Europe et l’Amérique évolue progressivement vers une navigation de plaisir et de distraction. Les compagnies d’alors telles que la Compagnie Générale Transatlantique (française), ou la ligne britannique Cunard Line rivalisent jusque dans les années 60, offrant des croisières toujours plus luxueuses à l’élite de l’époque. Se développe ainsi sur les célèbres navires Queen Mary, le Normandie ou plus tard le France, un mobilier de pont - que l’on retrouvera encore aux enchères presque un siècle plus tard - pensé non seulement pour sa fonctionnalité mais aussi pour son confort. Afin d’être déplacées et stockées facilement, ces assises se devaient d’être légères, pliables et résistantes à l’air marin. Pour assurer d’autre part le plaisir de longs bains de soleil, les lignes de ce mobilier se sont naturellement allongées, la hauteur se rapprochant du sol, les jambes et le dos s’étirant toujours plus… La chaise longue était née, et son essor ne faisait que commencer.
De retour à terre, l’engouement pour cette mutation de "l’asseoir" séduit les plus célèbres designers et architectes tels que Charlotte Perriand, Le Corbusier, Robert Mallet-Stevens, ou Eileen Gray, sans nul doute également poussés par le développement de la villégiature des années 20. Car le transat, même sorti de son contexte initial, continue à véhiculer une certaine idée d’une élégance décontractée. Irrésistible accessoire de détente, il passe rapidement de l’extérieur à l’intérieur, apportant aux univers les plus cossus le luxe d’une posture empreinte au farniente… Une tendance qui, loin de sombrer avec l’échec de ces liaisons transatlantiques – notamment dû à l’arrivée des lignes aériennes - s’est poursuivie, se conjuguant parfaitement aux valeurs ludiques et oisives véhiculées par la vague pop des années 60, et toutes les fantaisies que permettait l’apparition de nouveaux matériaux toujours plus souples et ondoyants… Et Olivier Mourgue, Verner Panton ou Gaetano Pesce de prendre le relais… L’évolution du mobilier de pont n’avait pas fini de surprendre.
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Objets de convoitise Sélection art & design
Nuances sablées
Livre Studio KO Ouvrage 240 pages Editions Rizzoli 69 € rizzoliusa.com
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Banc 01 Placage de merisier Siège en bois laqué blanc cassé Haos 1 570 € haos.fr
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O B J E T S D E C O N V O I T I S E
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Poncho Nestor Pre-collection 2020 Mare di Latte 325 € maredilatte.com
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Tables basses Bigun Structure mousse et plateau en marbre massif Designer Jean Louis Iratzoki édité par Retegui De 1 310 à 1 580 € retegui-marble.fr
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O B J E T S D E C O N V O I T I S E
Carafe Asuchubu Terre brute Designer Samy Rio édité par Pièce A Part 120 € piece-a-part.fr
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N°8 Le sac à dos Cuir pleine fleur à tannage végétal Archipel Paris 675 € archipel-paris.com
N U A N C E S S A B L E E S
Canapé Extra Low Rolled Back Lounge Editions Paolo Ferrari 4 250 € goodcolony.com
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I M M O B I L I ER | ARC HIT EC T U R E | EDIT ION
Archik, les Éditions
Depuis 2016, artistes et designers talentueux sont exposés au sein des Maisons Archik. De ces rencontres naissent des pièces exclusives imaginées pour la marque et éditées en série limitées, avec un objectif commun : valoriser le design contemporain et affirmer une esthétique aussi brute qu’élégante.
A R C H I K
Miroir Kihcra Suite à l’exposition "Graphic Landscapes" la confrontant à l’artiste hollandais Louis Reith, Charlotte Juillard et Archik imaginent une pièce exclusive : un plateau-miroir d’une sobriété impeccable, à la charge décorative puissante et d’une sensibilité pour autant très féminine. Pour la rentrée 2020, Deux nouvelles couleurs seront à découvrir : bronze et vert. Disponible en pré-commande sur notre boutique en ligne www.archik.fr
Designer Charlotte Juillard Matériaux Métal thermolaqué & miroir teinté bronze et vert Édition 20 exemplaires numérotés, fabriqués en Italie Dimensions [D] 33,5 cm - [P] 10 cm Prix 280 € TTC
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Suspension Onde(s) La suspension Onde(s) s'incrit dans une recherche globale de StudioFoam autour du réemploi de cuir. Éteinte, c’est une silhouette organique, évolutive. Allumée, la lampe prend une toute autre dimension tandis que le cuir recyclé et perforé filtre l’éclat lumineux, et façonne des trames graphiques contemplatives. « La matière est suspendue simplement, sans ajout, l’objet valorise ainsi les potentiels du cuir, en tant que structurant formel et filtre souple visuel » explique Caroline, fondatrice de StudioFoam. Disponible sur notre boutique en ligne www.archik.fr
Designer StudioFoam Matériaux Cuir recyclé nude, LED Édition 40 exemplaires numérotés, fabriqués en France
L E S É D I T I O N S
Dimensions [L] 100 cm – [D] 8 cm Prix 980 € TTC
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Rodolphe Roletto - Virginie Monroe Architecture & décoration - Marseille @nouvelle_maison_studio - contact@nouvellemaisonstudio.com
De la ville
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Rendez-vous Texte — Laure Amoros & Sébastien Coquerel
Aēsop
Hedonic
Galerie du coté
52 rue Boulbonne 31000 Toulouse
11-13 av du Général de Gaulle 33950 Lège-Cap-Ferret
15 allée des Trois Fontaines 64200 Biarritz
Du design, en passant par l'automobile de collection, mais aussi l'industrie cosmétique, la Côte Ouest n'est pas en manque de bonnes adresses. Toulouse, Biarritz et le Cap Ferret sont à l'honneur de nos rendez-vous.
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Photo © Nicolas Seurot
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Photos © Aēsop
R E N D E Z V O U S
Aēsop 52 rue Boulbonne Toulouse Du lundi au samedi 11h — 19h T - 05 82 95 70 90 @aesopskincare
Marque australienne pointue de cosmétiques, Aēsop valorise le design à travers ses boutiques, écrins conçus sur-mesure. Découverte de leur adresse toulousaine. 5 5
A Ē S O P
Aēsop
Marion Mouny
Aēsop, à prononcer « Ésope » comme l’écrivain grec, a été fondée en 1987 à Melbourne. La marque australienne « propose des produits de soins du visage, des cheveux et du corps soigneusement conçus dans les moindres détails, dans un objectif d’efficacité et de plaisir sensoriel » explique Mylène, responsable de la boutique toulousaine. Chaque produit est créé à partir d’ingrédients naturels à base de plantes, mis au point dans un laboratoire, révélant des formules d’une qualité et d’une efficacité optimales et ne présentant aucun risque pour la santé. Cette authenticité et cette passion du détail se retrouvent dans chaque boutique Aēsop, toutes uniques. Depuis longtemps partie intégrante de son ADN, Aēsop porte un intérêt sincère à un design intelligent et durable, qui s’étend des produits à l’architecture intérieure des boutiques. Et cela se ressent immédiatement : dès la porte franchie, le plaisir est omniprésent, les sens s’éveillent et l’expérience est totale.
Chaque boutique Aēsop est unique, conçue par un designer ou architecte d’intérieur. Au cœur du centre historique, rue Boulbonne, c’est l’architecte Marion Mouny qui a révélé celle de Toulouse. La marque mettant un point d’honneur à utiliser un vocabulaire architectural en phase avec le milieu local où elle s’implante, Marion s’est inspirée de la Place Saint Georges toute proche et de l’histoire architecturale locale. « Notre ambition était de nous imbriquer dans le tissu de la rue, en y ajoutant une certaine valeur, plutôt que d’imposer une présence discordante. Et logiquement, nous avons travaillé avec des entreprises locales », explique Marion. La mosaïque de marbre blanc au sol a été découpée à la main, les larges interstices et variations de teintes soulignant l’irrégularité des pierres et le savoir-faire dont elles ont bénéficié. Les murs incorporent des argiles et des silicates de la région, clins d’œil à la tradition artisanale de la ville et aux techniques architecturales traditionnelles. Le point d’orgue de la boutique est un superbe évier en résine aux formes sculpturales et aux dimensions exagérées, façonné par l’artiste néerlandaise Sabine Marcelis. Son fini couleur miel et sa texture irrégulière invitent à une exploration tactile. Une réelle expérience…
La marque
L'architecte
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Hedonic 11-13 avenue du Général de Gaulle 33950 Lège-Cap-Ferret Du mardi au samedi 09h — 12h / 14h — 18h T - 09 81 13 03 93 @hedonic_store_cap_ferret
C’est un coffre-fort où se mêlent effluves de bois, de cuir, et senteurs mécaniques. Un lieu où se rencontrent tradition et modernité, automobiles et architecture. 5 5
H E D O N I C
Catherine & Serge Heitz
Julien Castilla
Le point de départ ? « Créer un lieu unique qui rassemble nos deux activités phares. Automobile Consulting, reconnu comme le spécialiste de la restauration des Porsche de collection. Et Hedonic, une marque forte, véritable mode de vie, qui a pour vocation la personnalisation de motos (Harley Davidson, Triumph) et de Porsche, et la création d’objets dérivés customisés, numérotés et façonnés à la main par des artisans. Ce laboratoire d’idées nouvelles avait besoin d’un lieu unique façonné par des artisans aussi ! » explique Catherine Heitz. Deux bâtiments se font face. L’un tout en bois, typique des codes du bassin et de la presqu'ile du Cap Ferret, est destiné aux « bolides » de collection - restaurés dans les règles de l’art mis en scène façon parking New Yorkais, avant leur départ dans le monde entier. Le second, façon ‘white box’ recueille les produits personnalisés. « Le blanc immaculé s’est imposé naturellement, pour mettre en scène nos produits. Seule entorse chromique, une hélice mobile derrière une grille noire sur mesure, cachant la ventilation ». Ou le culte du détail ! Dans le même esprit, une salle de réception et de séminaire accueille les plus passionnés.
Julien Castilla et son équipe ont eu de nombreux défis à relever dans cette réalisation. « Il a fallu créer une porte de coffre-fort, afin de laisser les gens découvrir le cadeau qu’ils venaient de s’offrir. Malgré sa taille imposante (700kg), cette porte devait être incroyablement légère pour pouvoir être maniée. Mr Heitz avait la vision d’un coffre à jouet, et nous l’idée de quelque chose de monumental, à la hauteur des œuvres mécaniques révélées. Le coffre-fort y répondait parfaitement, car il évoque l’aspect brutal des mécaniques, et le raffiné de l’objet de luxe ». Le reste du projet a eu lui aussi son lot de challenges. « Le bâtiment possédait déjà des poutres Eiffel. Mais on a dû faire face à de nombreuses contraintes techniques pour garder cet esprit atelier des années 20, tout en proposant un champ visuel le plus large. Il a fallu éviter les poteaux et tout autre élément occultant, et donc mélanger les poutres acier à des poutres en aluminium sans provoquer les phénomènes de « caisson ». Un travail minutieux, contraint par la date d’inauguration du lieu. Un vrai travail d’orfèvre !
Fondateurs
Ferronnier d'Art
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Photos © Claudia Lederer
R E N D E Z V O U S
Galerie du coté 15 allée des Trois Fontaines 64200 Biarritz Le jeudi et vendredi 10h — 12h / 15h — 18h Sur rdv du lundi au mercredi @editionsducote @galerieducote
A cinq minutes du centre ville de Biarritz se dévoile une adresse confidentielle comme on aime, à la fois galerie et maison d'édition avec pour mots d'ordre : créativité et artisanat. 5 5
E D I T I O N D U
Photo © Claudia Lederer
C O T E
Marc-Alexandre Ducoté
Elodie Maentler
Éditions du Coté est une maison d’édition de mobilier et d’objets d’art fondée en 2016. Sa singularité ? Son ancrage sur le territoire du Pays Basque, sa démarche, plus proche de celle d’une galerie, et son univers assez personnel, éloigné des tendances du monde du design. Permettre à des artisans locaux, détenteurs de savoirfaire remarquables, de tisser des collaborations avec des artistes à l’univers onirique, c’est ce que recherche Marc-Alexandre. Lui qui vient du milieu de la mode, lassé par ce monde éphémère et effréné, il a souhaité créer un projet valorisant le temps, le territoire et les gens. Ainsi, une collection peut mettre plus d'un an à être élaborée, peu importe, l’intention étant plus le plaisir de la création que la contrainte de la commercialisation. Chacune des collections est conçue en édition limitée, distinguant la singularité de chaque création, développant une économie locale et réduisant l’impact écologique de chaque projet. L’importance est donnée à des thématiques sur le long terme, évoquant les Landes. Ainsi « Artzain » « Berger » en basque -fait référence à la terre, alors que « Ondulation » rappelle davantage l’océan. L’artiste Ucka Ludovic Ilolo a par exemple collaboré avec Daniel Lizarralde, restaurateur de mobilier, et Florent Canini, métallier, afin de concevoir Ekano (image de gauche), cet objet dansant entre sculpture et mobilier. Beau et utile.
Elodie et Marc-Alexandre forment un duo, à la ville comme au bureau. Architecte d’intérieur, Elodie dirige sa propre agence Maentler Architectes d'Intérieur. Et tout naturellement, une synergie se crée avec la maison d’édition de Marc-Alexandre, Elodie proposant à ses clients d’intégrer des pièces sur ses projets. L’idée d’un espace partagé émerge, un espace dédié à la création : la Galerie du coté née, un lieu confidentiel que l’on visite sur rendez-vous ou lors des expositions estivales. A la croisée du design, de l’art et de l’artisanat, la galerie présente tant des pièces de la maison d’édition que des artistes locaux émergents, portant les mêmes valeurs de singularité, durabilité, et fabrication locale. « Nous sélectionnons ensemble chacune des pièces » explique Elodie. Cet espace est le résultat de la rénovation d’une maison d’architecte de 1952, dans laquelle un gros travail d’épure a été nécessaire pour pouvoir faire vivre l’activité d’une galerie au travers du passé du lieu. Pluriel par essence, ce lieu de vie fait se mêler groupes de lectures, expositions, dîners, curieux et personnalités créatives… une intention partagée dans nos Maisons Archik !
Fondateur
Architecte d’intérieur
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Mutations Texte — Fabienne Berthet
Le monde de demain Terrain de jeu grandeur nature, cité idéale, utopie d’un nouveau monde : l'espace Darwin à Bordeaux est un hymne à l’innovation. Entre stratégie low tech et initiatives pédagogiques, ce lieu incarne un écosystème à lui seul. Un exemple visionnaire à suivre !
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Ici le culot prévaut. La localisation de Darwin crée déjà la surprise avec le choix de cette ancienne caserne militaire de 20 000 m², située Rive Droite des Queyries, de l’autre côté de la Garonne. Le site s’impose dans un quartier en réhabilitation basé à quelques minutes de l’hyper centre. L’entrepreneur Philippe Barre et son équipe ont fait le pari de ces berges portuaires et ouvrières, de l’autre côté de l’eau, longtemps réputées « malfamées » auprès des Bordelais. Le concept aussi est précurseur. Depuis 10 ans, cet univers, dont l’appellation Darwin doit tout au chantre de l’adaptation, milite pour l’évolution, le mouvement, la prise de conscience et l’action. Une ambition qui fait écho à l’ère de l’urgence écologique.
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Hybride avant tout Comment ça marche ? Une ferme urbaine voisine avec une épicerie bio, dotée de denrées en vrac et un restaurant attenant, « le Magasin Général », baptisé ainsi en référence aux fonctions premières du lieu, ainsi qu’à sa capacité, puisqu’il affiche au compteur 15 000 couverts par mois, presque un record en France. Voilà pour l’alimentaire ! Quant aux activités physiques, le site valorise l’effort et la diversité des pratiques, entre un skate park grand format, un terrain de bike polo, ou encore le club nautique des Marins de la Lune, qui permet de faire de la voile, de ramer en pirogues ou kayak ou de surfer en stand up paddle. Après le défoulement du corps, place à la création artistique dans tous ses états. Nombreux sont ceux qui se sont exprimés ici, comme en témoignent les murs magnifiés de photographies, dessins ou graffitis de divers street artistes, tels que Zarb du collectif Fullcolor, Jeff Soto, Laurence Vallières ou encore Goin. Autre curiosité, les fameux tetrodons. On rappelle le concept : ce petit module conçu à partir de containers, créé à la fin des années 1960 représente un nouvel habitat industrialisé et bon marché aux usages variés. Il s’essaime en 42 exemplaires sur l’espace darwinien. Pour peaufiner le tout, le mobilier se pique de récup, assume sa provenance vintage et en fait même un parti pris. Canapés cossus voisinent avec des tables de ferme dans une ambiance guinguette matinée de hip hop. Ici on danse !
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20 000 mètres carrés 10 millions de visiteurs par an
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20 millions d'euros investis par des fonds privés
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15 000 couverts par mois servis au restaurant
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230 entreprises hébergées source : Office du tourisme de Bordeaux
La vision d’un enfant du pays A l’origine de Darwin, Philippe Barre, enfant du pays, amoureux des grands espaces et inquiet pour la planète. Fort de son background de communicant et de son intérêt pour le recyclage, il milite pour l’environnement et la responsabilité sociale. En 2005 il fonde Evolution, un premier incubateur, prémice de Darwin, pour lequel il se met à chercher un espace de 1 500 m². Quête infructueuse, il s’éprend finalement pour les quelques 20 000 m² de la caserne Niel, haut lieu militaire, terre d’accueil de nombreuses friches, en voie d’être rasée. En 2009, le rachat est négocié sur 10 000 m² des bâtiments Nord avec un but : préserver au maximum l’existant. Cinq ans plus tard, rebelote, Darwin née et obtient le marché des magasins Sud sur un hectare supplémentaire. Économiquement innovant et écologiquement responsable, Darwin attire l’attention de fonds privés tout en militant en faveur d’une action positive, d’un mode de vie collaboratif, et d’un impact environnemental limité. Et ça marche, puisqu’un Darwinien émet cinq fois moins de gaz à effet de serre qu’un salarié tertiaire classique. 80% des déchets y sont recyclés et l’électricité ne provient plus du nucléaire, mais d’Enercoop, une coopérative citoyenne, qui produit une alimentation électrique 100% verte. « Péril climatique, effondrement de la biodiversité, raréfaction des ressources, prolifération des risques… On peut laisser le temps décider à notre place de l’issue de notre civilisation. Ou privilégier l’action sur les déclarations, l’ambition sur la résignation. La question n’est plus d’être optimiste ou pessimiste, mais déterminé » assume le fondateur.
En transition « Au-delà de l’approche technique globale, ce qui distingue surtout Darwin d’autres lieux, c’est son souci constant d’impliquer ses usagers dans une gouvernance écologique collective » évoque JeanMarc Gancille, co-fondateur de Darwin. L’engagement dans la transition écologique est un préambule incontournable. La stratégie « négaWatt », à l’échelle du site, conjugue performance énergétique et recours aux énergies renouvelables. L’obsession pour cette sobriété énergétique est tangible dès les travaux : agencement bioclimatique des espaces, refus de la climatisation, optimisation de l’éclairage naturel et attention permanente portée aux économies d’énergie grise pendant le chantier. Dans la conception et l’isolation, priorité est donnée aux matériaux d’isolation bio-sourcés et à l’optimisation de l’inertie thermique du bâtiment. Résultat des courses, après deux ans d’exploitation, l’opération de réhabilitation BBC s’avère plus que performante. En 2015 Darwin déploie une toiture photovoltaïque de 480 m² qui vise l’autoconsommation avec 100 000 kWh annuels produits. Beau score, permettant de rendre les commerces - le restaurant et l’épicerie bio - autonomes en énergie électrique. Ce n’est pas tout, outre son engagement auprès d’Enercoop, Darwin opte pour une production de chaleur transitoire au gaz, et vise un raccordement au réseau de chaleur collectif en géothermie. Le recours de la techno Pour s’impliquer, il faut comprendre : c’est pourquoi Darwin a développé une interface numérique. Sous le
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nom de code MIUSEEC pour (Métrologie Intelligente des Usages pour la Sobriété Energétique et les EcoComportements), elle permet à tous les occupants du lieu de mesurer leur contribution à l’effort. En couplant l’interface à l’ordinateur central de chaque bâtiment, des capteurs moulinent l’ensemble et font remonter toutes les informations sensibles. On y recense les impacts écologiques de la vie sur site : consommations de fluides, productions de déchets et taux de recyclage, économies d’eau réalisée grâce aux eaux pluviales récupérées, consommation alimentaire incluant la part du bio et du local, l’évolution des parts modales des transports domicile/travail etc… Autant d’éléments retracés en transparence et en temps réel. Pour encourager chacun à faire mieux dans sa démarche de transition. Ces bonnes pratiques sont contagieuses car, selon une enquête sur l’évolution des usages responsables, près de 70% des darwiniens affirment exporter les éco-gestes appris au bureau. Il faut dire que le plan d’actions est costaud et les possibilités multiples. Exemples ? Tout le mobilier et les aménagements du lieu sont issus de matériaux récupérés - parfois issus du chantier lui-même -, les logiques d’économie circulaire sont encouragées par des plans de déplacement inter-entreprises et une stratégie zéro déchet initiée via une filière de recyclage. La dynamique du changement passe aussi par l’apprentissage, entre ateliers de réparation
collaborative et initiatives d’agriculture urbaine qui mêlent permaculture, aquaponie, compostage des déchets organiques des commerces et jardinage hors sol ! Un « upcylcing » à tout crin, pour préserver le lien social dans la frugalité. Le nerf de la guerre Aujourd’hui, Darwin est devenu un lieu emblématique de l’entrepreneuriat à Bordeaux. Il réunit sur 5 500 m² quelques 230 sociétés, assurant plus de 500 emplois, dont beaucoup créés sur site. Le chiffre d’affaires ? Environ 100 millions d’euros sur un lieu qui revendique la fonction de premier co-working de France et accueille aussi des pépinières. Centrées sur les métiers du développement durable, elles s’articulent autour d’incubateurs et de fonds d’investissement. Au total, 20 millions d’euros ont été investis dans Darwin avec un soutien de partenaires privés réduit à la portion congrue, environ 5 %. Une visée économique qui reste sociale et solidaire, puisque Darwin accueille également vingt associations - représentant ensemble 5 000 adhérents - propose une quinzaine de logements d’urgence et bungalows, compte une antenne Emmaüs et héberge le CCAS (Centre communal d’action sociale) de Bordeaux. Les visiteurs suivent, se comptabilisant à 10 millions en 10 ans, un record de fréquentation qui en fait désormais un lieu phare des circuits touristiques et une « place to be » bordelaise.
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Darwin 87 Quai des Queyries 33100 Bordeaux www.darwin.camp @darwin.camp
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Clichés de ville
Toulouse par
Olivia Thébaut 68
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Palabres
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L'attente
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Respiration
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Le baiser
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En rappel
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Pétrichor
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Dimanche
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Villégiature Texte - Fanny Liaux
Photos - Alexis Atteret
Ville d'Hiver
Redonner vie à un lieu laissé pour compte est un magnifique pari. Ancienne usine de la Compagnie Générale des Eaux d’Arcachon reconvertie en hôtel, la Ville d’Hiver promet un véritable bond hors du temps.
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L’âme de la Ville d’Hiver est palpable - celle de l’hôtel tout autant que celle du quartier qui lui donne son nom. A l’heure où la maison souffle ses dix premières bougies, elle offre un séjour à travers les siècles. Une fois sa voiture garée, son train débarqué et ses valises posées, il suffit au visiteur de se laisser porter. Ici, tout se découvre à pied. On rejoint la mer en dix minutes, tandis que la forêt de pins jouxte directement la propriété. Le quartier, résidentiel, est un havre de paix du plus bel effet qui porte dans sa mémoire plus de cent ans d’histoire. Retour dans le passé. En 1865, Emile et Isaac Pereire, entrepreneurs des chemins de fer, fleurent l’explosion du tourisme sur le Bassin d’Arcachon. Alors que la ville triple sa population en été, les deux frères cherchent à rentabiliser leur investissement 365 jours par an. Une idée ne tarde pas à germer : à une époque où la pénicilline n’a pas encore été découverte, les sanatoriums sont encore ce qu’il se fait de mieux pour soulager les tuberculeux. La côte Atlantique n’en compte alors aucun. Eurêka ! Plus de 300 villas cossues destinées aux malades et à leurs - riches - familles sortiront de terre en un temps record sur les hauteurs d’Arcachon. Bienvenue à la Ville d’Hiver. En 2020, le quartier n’a rien perdu de sa superbe - seulement ses malades. Au gré d’une balade le long de ses petites rues sinueuses on dit qu’elles ont été dessinées afin d’empêcher tout courant d’air de se créer, nocifs pour les tuberculeux - une architecture singulière se dévoile. Pas une maison ne se ressemble trait pour trait ! Ce joyeux pêle-mêle hybride emprunte aux styles néo-gothique, mauresque, à la maison coloniale et même au chalet suisse leurs attributs distinctifs qui donnent son caractère unique à chaque villa. Ces maisons, que l’on dit “arcachonnaises”, et leur quartier, sont aujourd’hui inscrits à l’inventaire des Monuments Historiques de France. C’est donc au cœur de cette ville dans la ville que se sont installés Nathalène et Olivier Arnoux. Leur hôtel, ils l’ont découvert sous les ronces. S’ils pensaient s’établir du côté du Cap Ferret, ils tombent sous le charme de l’ancienne usine élévatrice de la Compagnie Générale des Eaux, édifiée en 1884 et propriété de la mairie depuis sa mise hors-service. Le bâtiment est nu, en friche, dépourvu de vie. Le pari est de taille : faire revivre tout un pan de l’histoire d’Arcachon. En 2009, après dix mois de travaux, le couple inaugure un hôtel flambant neuf, qui semble avoir pourtant toujours existé. Si l’usine abrite désormais les lieux de vie communs, ce sont bien dans deux nouveaux bâtiments créés ex-nihilo que s’imbriquent les chambres. Un tour de force pour l’architecte Emmanuel Graffeuil qui, un siècle plus tard, a su redessiner les contours de l’architecture sans pareille du quartier. Une villa d’époque adjacente à la propriété complète l’offre d’hébergement qui comprend dix chambres, en tout.
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Conjuguant les styles et les époques, l’hôtel la Ville d’Hiver semblerait dater lui aussi de 1884, sans paraitre démodé. Prônant une esthétique intemporelle, les lieux se parent d’un savant mélange de rééditions de design du début du siècle, avec notamment une belle sélection de mobilier de l’éditeur danois Gubi, qui apporte la juste touche de modernité, et de meubles chinés sur les brocantes ou dans les greniers familiaux. Les murs s’habillent de toiles d’artistes locaux ou de reproductions authentiques de grands maîtres. Le bois vient se frotter au cuir, les tissus irlandais jonchent les banquettes, la couleur s’étale sur de grands tapis et de larges bouquets de fleurs. Avec un peu de flair, on se surprend à déceler un côté british à l’ensemble, le mariage des couleurs - sols bleu roi par-ci, touches audacieuse de vert, de violet et de magenta par là - faisant foi d’un certain anticonformisme. Touché : Nathalène Arnoux est une fervente amatrice du style éclectique des intérieurs d’Outre-Manche.
Photo © L'Arlatan
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Autre fait marquant à la Ville d’Hiver : la douceur de son atmosphère. Réminiscence du passé curatif du quartier ou véritable état d’esprit, tout n’est que quiétude. L’écrin, certes, y est pour quelque chose : les moquettes au sol adoucissent les pas, le bois omniprésent rappelle les maisons de famille, la lumière - du jour ou artificielle - saupoudre le tout d’une chaleur irrésistible. Les services n’en déçoivent pas moins. L’accueil se fait avec le sourire aux lèvres, grâce à un personnel fidèle à la maison depuis son ouverture. Le restaurant, un bistronomique, sert une cuisine authentique et généreuse où les locaux se rendent souvent en pèlerinage - l’adresse est une des meilleures d’Arcachon. Le spa, co-créé avec la marque de cosmétiques éco-responsables et naturels Dr. Hauschka, prolonge la détente avec des soins du visage et des massages de haut vol, couronnés d’un hammam. L’option piscine est aussi des plus délectables : creusée dans l’ancienne cuve de l’usine des eaux, elle se trouve à l’abri des courants d’air, comme cachée sous une marée d’herbes folles. Après quelques brasses toniques, on se love dans les fauteuils style Strandkorb, ou “corbeille de plage”, très appréciées des plages fraîches d’Europe du Nord, idéals pour se perdre dans l’intrigue d’un bon livre.
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Profondément culturel, l’hôtel aime convier ceux qui placent l’art au coeur de leurs vies. Les expositions de photos et de peintures s’enchaînent mais ne se ressemblent pas. On croise dans les couloirs des écrivains assignés à résidence - l’hôtel édite des recueils de nouvelles régulièrement. Les pièces de décoration ont souvent une histoire, à l’instar de ces vases exposés dans le salon, façonnés par un surfeur rencontré sur une plage de Californie. L’été, c’est au bord de la piscine que l’on s’attarde pour écouter un concert a capella. A l’image de sa première vie, la Ville d’Hiver revigore et apaise corps et esprits.
V I L L E D ' H I V E R
Ville d'Hiver 20 avenue Victor Hugo 33120 Arcachon T - 05 56 66 10 36 @hotelvilledhiver
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Après Marseille et Toulouse, l’horizon ARCHIK s’élargit. L'agence installe son art de vivre dans le haut Marais pour sa nouvelle adresse parisienne.
M A R S EI L L E | PA R IS | TOU LOU S E
Archik, une Collection
Avec cette vision singulière qui consiste à remettre l’architecture et l’art de vivre au centre de l’immobilier, Archik collectionne des biens de caractère "à vivre" ou "à rénover".
AC RH CA HP II KT R ME A RT SI T E IR LE L E
Allure balnéaire Architecture de 1959 cette résidence culte à l’architecture balnéaire du célèbre architecte moderniste René Egger, dont la façade biseautée est inspirée du travail d’Oscar Niemeyer, accueille en son dernier étage un appartement de 98 m2 et sa terrasse incurvée de 15 m2, à deux pas des plages du Prado. Entièrement revisité en 2019 par les propriétaires actuels, l’appartement a été sublimé par une rénovation puriste qui a préservé les matériaux d’origine tels que le parquet marqueté, les huisseries alu champagne, les carreaux noirs émaillés de la salle de bains et le terrazzo de la terrasse. Savant mélange de pièces de design français et italien et d’objets chinés, la décoration vient parfaire le style de l’appartement. Passé le couloir, la large pièce de vie traversante se dévoile. Côté salon, elle est bordée d’une agréable terrasse Sud, offrant un point de vue sur la baie des Singes et les plages. La cuisine, depuis laquelle 8 8
on aperçoit également la mer, a été entièrement redessinée. Son plan de travail en marbre veiné joue la dualité avec les grands placards toute hauteur en bois Okoumé aux poignées en laiton. L’espace nuit se compose de trois chambres : une parentale donnant sur la terrasse, et deux autres chambres dont une donnant sur le petit balcon. Elles se partagent une salle d’eau avec son lavabo d’origine et ses mosaïques caractéristiques des années 50. Un garage fermé complète ce bien. Un site et une architecture marquée pour cet écrin moderniste aux allures de vacances.
Type De Bien Appartement Architecture Moderne État À Vivre Quartier La Plage, 8ème, Marseille Surface 98 m²
U C N H E A P CI T O R L E L E T C I T T I R O E N
Prix 625 000 € Crédit photos Olivier Amsellem
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Collection privée Architecture contemporaine, cette ancienne menuiserie située au calme du quartier du Camas a fait l'objet d'une réhabilitation complète et dévoile une habitation de 408 m² et son patio de 70 m², véritable havre de tranquillité hors du temps, bordé par un magnifique olivier. Entièrement restructurée en 2012 par un cabinet d'architecture marseillais de renom, cette maison conçue comme un loft secret offre une vie où l'espace se conçoit de plain-pied. Le plan en U s'organise autour du patio qui baigne les différents espaces de lumière naturelle grâce à de belles baies vitrées noires toute hauteur en aluminium. Les lignes graphiques sont interrompues à l'entrée par un module aux courbes
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organiques, créant la séparation. Le salon se prolonge par une cuisine immaculée, avec son immense îlot au plan de travail en Corian. Un second salon en double hauteur se dévoile dans la continuité, tandis que son escalier structuré mène à une grande chambre d'amis indépendante avec salle d'eau et dressing.
Type De Bien Loft Architecture Contemporain État A Vivre Quartier Le Camas, 5ème, Marseille Surface 408 m²
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Prix 1 290 000 €
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Loft à quai
Type De Bien Appartement
Architecture du début du XXème siècle, cette bâtisse chargée d'histoire située en première ligne sur le Vieux-Port, abrite un loft de 93 m² et son petit balcon.
Architecture Vernaculaire
Entièrement restructuré en 2010 par l'architecte David Vial en collaboration avec Éric Tarczewski dans un style contemporain et épuré, l'appartement inspire l'art de vivre citadin. Un grand espace ouvert a été créé côté port avec deux grandes portes-fenêtres donnant sur le balcon duquel l'on profite d'un panorama spectaculaire. Le mur vert olive et le parquet couleur caramel cultivent une ambiance chaleureuse et feutrée. Passé l'entrée et son couloir élégant rythmé par une série d'appliques Tolomeo, on découvre le grand espace principal qui abrite la cuisine minimaliste blanche et anthracite, la salle à manger et le salon. Surélevée, la chambre trône et donne sur l'espace de vie. Sa tête de lit sur-mesure marque la séparation et dissimule une salle de bains contemporaine avec sa vasque en résine suspendue. Côté cour, une deuxième chambre indépendante de 17 m² avec salle d'eau en mosaïque et douche à l'italienne offre un espace nuit plus intime. Des placards et rangements toute hauteur sont intégrés ici et là pour un confort optimal.
État À Vivre Quartier Vieux-Port, 7ème, Marseille Surface 93 m² Prix 560 000 €
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Gatsby le Magnifique Architecture des années 30, cette villa de 250 m² dans le plus pur style Art Déco est nichée en position dominante sur un terrain arboré de pins majestueux de 624 m², au coeur d'une prestigieuse résidence marquée du quartier du Roucas, à deux pas des plages. Imaginée par l'architecte Edouard Armand Louncke en 1929, la maison à l'abri des regards présente une forte identité grâce à ses éléments scrupuleusement préservés. Porte en ferronnerie, fenêtre hublot, grilles aux motifs fascinants, ordre et lignes géométriques : l'essentiel du vocabulaire Art Déco est posé. La maison se découvre par un bel escalier en terrazzo qui dessert le premier étage. Ce premier niveau accueille un espace de vie central avec le salon, une bibliothèque, et un bureau d'où l'on aperçoit la mer au travers des pins. En suivant, une cuisine ainsi que son vestibule desservent la salle à manger. A l'étage, se distribuent quatre chambres et deux salles de bains gardées dans leur volume d'origine. Une terrasse avec vue mer prolonge une des chambres. Un escalier extérieur graphique d'un blanc pur mène ensuite au toit terrasse plein ciel, invitant à la contemplation du panorama dégagé.
Type De Bien Maison Architecture Art Déco État À Vivre Quartier La Plage, 8ème, Marseille Surface 250 m² Prix 1 995 000 €
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Plaisirs cachés Architecture du milieu du XXème siècle, cette maison de 193 m² est camouflée par la nature silencieuse et luxuriante de son terrain en restanques de 424 m², face à la pinède du vallon du Roucas Blanc, à quelques pas de la mer. Soigneusement restaurée entre 2008 et 2018, la propriété a bénéficié d'importants travaux structurels avec des matériaux qualitatifs mélangeant des techniques traditionnelles, comme de la chaux d'art réalisée par un artisan italien ou des carreaux de ciment créés sur mesure, et des matériaux plus contemporains comme les huisseries Technal en aluminium. L'habitation principale de 147 m² se déploie sur trois niveaux. En rez-de-jardin se découvrent les pièces de vie, toutes ouvertes sur la nature environnante. D'un côté, la grande cuisine avec son îlot central sur mesure ouvre par une large baie vitrée à galandage sur une véranda contemporaine et une terrasse en bois. De l'autre côté, un second salon avec sa cheminé traditionnelle en pierre, ses poutres apparentes en et sa bibliothèque faite sur mesure, est également prolongé par une véranda, puis par une terrasse en bois couronnée d'une tonnelle en fer forgé.
Type De Bien Maison Architecture Vernaculaire État À Vivre Quartier Le Roucas Blanc, 7ème, Marseille Surface 193 m² Prix 1 650 000 €
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L'Art brut Architecture contemporaine, navire de verre et de béton de 200 m², s'érige sur un terrain en restanques de 1 280 m², au-dessus de la calanque de Figuerolles, et offre un spectaculaire panorama. Imaginée en 2011 par l'architecte Raphaelle Segond, ancienne chef de projet chez Rudy Riciotti, la maison a été pensée comme une longue vue orientée sur les trois massifs marins. Édifiée sur deux étages, l'architecture de la maison s'appuie sur la topographie du terrain, et se découvre à travers un cheminement agrémenté de murets en pierre sèche et plantes exotiques. L'espace de vie est traité dans la partie haute, bénéficiant ainsi d'un panorama incroyable sur la mer et les îles. Traversant, il est prolongé à chaque extrémité par deux terrasses aux casquettes de béton, et dans l'une d'entre elles se glisse une piscine. La pièce joue la transparence grâce aux baies vitrées à galandage. Un large îlot central détermine la cuisine, tandis que le séjour, ouvert, laisse la part belle aux vues sur la nature environnante. Le niveau inférieur développe la partie nuit, où se succèdent en épis un bureau et deux chambres, profitant de salles de bains. Des percées offrent de jolies vues sur le jardin, créant des tableaux aux essences méditerranéennes. Un studio indépendant de 30 m2 vient clôturer ce niveau.
Type De Bien Maison Architecture Contemporain État À Vivre Ville La Ciotat Surface 200 m² Prix 1 500 000 €
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AC RH CA HP II KT R ME A RT SI T E IR LE L E
Au fil du temps Architecture du XVIIème siècle, cet immeuble typique du quartier de Saint-Victor abrite un ancien atelier de fabrication devenu un appartement aux beaux volumes de 150 m², idéalement situé à proximité des commerces.
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Entièrement rénové par deux architectes dont Chrystel Laporte d'Un Jour d'Avril, ce loft a su garder ses éléments d'origine qui lui donnent tout son charme. La porte d'entrée en bois et ferronnerie travaillée ouvre sur un hall intime au papier peint exotique. De là se découvre la large pièce de vie de 70 m² en open space et sa cuisine au parquet en chêne traité en noir, rappelant le plan de travail en granit du Zimbabwe. Les poutres au plafond peintes en blanc et le mobilier contemporain de la salle à manger viennent adoucir le tout. Profitant de trois fenêtres habillées de Schüco face à l'Abbaye Saint-Victor et d'une percée sur le Vieux-Port, le salon se meuble de menuiseries surmesure accueillant un magnifique trumeau d'époque, ainsi que d'une cheminée maçonnée. Passé le bel escalier descendant sur-mesure, se dévoilent un petit salon et deux chambres se partageant une salle de bain. Une troisième chambre en second jour profite d'une belle salle d'eau.
Type De Bien Appartement Architecture Empire État À Vivre Quartier Saint-Victor, 7ème, Marseille Surface 150 m² Prix 630 000 €
Suite amarrée Architecture du début du XIXème siècle, cet immeuble typique situé en première ligne sur le Vieux-Port accueille en son deuxième étage un appartement de 104 m² à la rénovation léchée. Imaginé en 2018 par l'architecte de renom Hervé Pouzet Des Isles, l'appartement a été conçu comme un véritable écrin sur mesure, aux matériaux nobles et finitions haut de gamme. L'entrée se fait par un grand dressing en chêne clair, ouvert par un jeu de portes à galandage sur le superbe espace de vie de 58 m2 aux poutres apparentes, laissant ainsi traverser la lumière et plongeant directement le regard dans la mer. En angle, la cuisine est marquée par son noir profond et se pare d'un plan de travail en granit du Zimbabwe et d'électroménager Gaggenau. Le parquet massif à large lame souligne la fluidité des espaces. Une magnifique double porte d'origine avec ses ornements restaurés fait le trait d'union entre l'espace jour et l'espace nuit, ouvrant sur l'unique chambre du lieu, avec son dressing et sa salle d'eau d'où l'on peut admirer le jeu incessant de la rade. La possibilité d'acheter un emplacement de bateau au pied de l'appartement complète ce bijou.
Type De Bien Appartement Architecture Empire État À Vivre Quartier Vieux-Port, 1er, Marseille
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Surface 104 m² Prix 895 000 €
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Type De Bien Maison
Architecture contemporaine, cette maison de 158 m2 à l’ossature bois se pose discrètement sur son terrain arboré de 4 040 m2 face à la vallée verdoyante de la Durance et du Lubéron.
Architecture Contemporain
Dessinée par l’agence d’architecture Atelier Ordinaire, la maison est pensée tel un cocon apaisant. Sa ligne, le volume des pièces, le bois brut à l'intérieur et les grandes ouvertures imposent sérénité et bienêtre. Son bardage extérieur en bois brulé émane de la méthode japonaise Shou Sugi Ban, permettant à la fois de préserver le bois mais aussi de fondre l’habitation dans la nature environnante. Agencée sur deux niveaux, l’architecture intérieure et les meubles sur mesure ont été dessinés dans un esprit minimal et fonctionnel, afin de créer des espaces reposants, naturels, intelligents, et ludiques. En rez-de-jardin, les espaces de vie et la cuisine ouverte forment une unité harmonieuse. Les grandes ouvertures encadrent la vallée devant la maison et sa piscine à débordement en béton, et donnent accès aux deux terrasses. À l’étage se découvre un espace multifonctionnel comprenant un paisible coin lecture, une mezzanine, et une cabane pour enfant. Cet espace dessert la suite parentale ainsi que deux chambres, le tout sous une belle hauteur sous plafond.
État À Vivre Ville Venelles Surface 158 m² Prix 1 100 000 €
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Cahier de tendances Ancienne biscuiterie transformée en habitations, ce petit immeuble accueille en son rez-de-chaussée un appartement aux beaux volumes de 140 m2 niché dans le quartier de Saint-Lambert, à proximité des Catalans. Récemment rénové par architecte, l'appartement aux airs de maison entremêle élégamment les époques en alliant ancien et contemporain. Parquet en point de Hongrie, murs en pierres apparentes, moulures conservées, il n'en fallait pas moins pour planter le décor. Mixé avec des verrières aux lignes graphiques pour la touche industrielle, et des canapés Togo pour la touche seventies, voilà le parfait exemple d'un mix & match réussi. Quant à son articulation, une fois la porte passée, une entrée avec rangements sur-mesure dessert la chambre parentale et, de l'autre côté les pièces de vie. Le salon, avec ses quatre mètres de hauteur sous plafond, s'organise en plusieurs espaces de repos, autour d'une cheminée maçonnée. Une ouverture voutée entraîne à la cuisine donnant sur cour dont le vert Ressource du mur et le plan de travail Silestone en quartz se marient à la crédence en zellige et au béton ciré clair du sol. Plus loin, la seconde partie nuit offre deux autres chambres qui se partagent un salon télé ainsi qu'une salle d'eau et une salle de bains.
Type De Bien Appartement Architecture Art-Nouveau État À Vivre Quartier Saint-Lambert, 7ème, Marseille Surface 140 m² Prix 630 000 €
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Piece by piece Architecture originelle du XIXème siècle, cet appartement de 142 m2 idéalement situé au cœur de Versailles Rive Droite, nous embarque dans une élégance époustouflante dès l’ouverture de ses portes. Entièrement repensé en 2017, son architecte Margot Juez y a posé un œil résolument contemporain caractérisé par un design pointu, au sein d’une architecture d’époque. Le résultat est un espace intelligent, évident, beau. De fresques en mosaïques majestueuses, en passant par des menuiseries sur mesure, rien n’est laissé au hasard. Dans cet intérieur raffiné, la circulation est fluide autour de la vaste galerie d’entrée, sous une hauteur sous plafond de 3,50 m. Côté rue se dévoile un double séjour chaleureux, idéal pour les réceptions, où les éléments anciens ont été sublimés : parquet point de Hongrie, cheminée, moulures et vitraux répondent 1 1 1
à une verrière contemporaine centrale. Séparée par une autre verrière, la cuisine noire offre des prestations de grande qualité, avec son plan de travail Dekton et son bar intégré. L’espace nuit se caractérise par des espaces vastes et fonctionnels. Une suite parentale majestueuse de 30 m2 avec dressing sur-mesure, buanderie, salle de bain, douche et WC, offre en toile de fond une fresque de mosaïques Bisazza. Côté cour, se découvre une belle chambre aux rangements sur-mesure, avec ses niches, ses lignes fines, tout en hauteur. Enfin, une troisième chambre a été aménagée de façon parfaitement modulable, avec son meuble au lit escamotable et sa salle de douche aux fresques de mosaïque. Une place de parking extérieure, et une cave sécurisée complètent ce bien rare.
Type De Bien Appartement Architecture Art Déco État À Vivre Quartier Versailles Surface 142 m²
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Prix 1 480 000 € Crédit photos Caroline Richard
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Villa Hyperion Architecture des années 60, cette villa de 282 m² issue d'une division se déploie sur un terrain boisé de 1 200 m², dissimulé des vues par un ancien portail en fer forgé, sur l'une des rues les plus chics de SaintGermain-en-Laye. Conçue par architecte, elle offre une architecture caractérisée par de grandes ouvertures sur le paysage et de vastes volumes. La structure d'origine a été divisée, créant deux parties symétriques. L'entrée de l'aile Sud donne le ton et révèle les tommettes en terre cuite qui recouvrent le sol du rez-de-jardin, réchauffant le volume en double hauteur à la charpente apparente. La vaste pièce à vivre est rythmée d'ouvertures vitrées, laissant largement entrer la lumière de part et d'autre
et ouvrant sur les terrasses environnantes. Lui faisant face, la cuisine se pare d'une cheminée en briquettes et invite aux dîners familiaux. Elle révèle par un insert fixe, l'escalier en acier et bois qui mène à l'étage, derrière lequel se devine un atelier d'artiste, avec vue sur un magnifique sequoia, qui inspirera l'artiste ou réjouira au réveil. À l'étage, la grande suite parentale déploie sa terrasse côté Sud en surplomb du jardin, tandis que sa salle de bains et son dressing se côtoient au Nord, et bénéficient également d'une percée verte. Trois autres chambres, avec vue panoramique sur la verdure, partagent l'étage de la suite parentale. L'une se pare d'un dressing, de placards et d'une salle d'eau tandis que les deux autres partagent une salle de bains.
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Type De Bien Maison Architecture Moderne État À Vivre Quartier Saint-Germain-en-Laye, Paris Surface 282 m² Prix 2 890 000 €
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Au fil de l'Art
Type De Bien Appartement
Architecture de 1930, cette copropriété de deux étages en plein cœur des Chalets et au calme absolu, accueille en son premier étage un spacieux appartement de 110 m2 inondé de lumière aux allures arty.
Architecture Art Déco
Intégralement réaménagé par sa collectionneuse d’art de propriétaire en 2016, la volonté a été de mettre en valeur les volumes et la lumière de ce bourgeois ainsi que les œuvres d’art, en lui offrant une enveloppe de galerie. Ainsi, le parquet d’origine et les murs ont été peints de blanc pur mat, révélant les corniches et la belle hauteur sous plafond tout en valorisant les cheminées décoratives. Les fenêtres toute hauteur et les portes ont quant à elles été habillées de noir profond, dessinant ainsi les accès de façon radicale. Hormis les œuvres présentes partout, seules la salle de bains aux notes roses qui joue les boudoirs et l’arrièrecuisine turquoise ont été colorées. Deux volumes sont desservis par l’entrée : côté jour, la double réception s’ouvre sur la cuisine et son espace dédié aux repas. Côté nuit, deux chambres généreuses se partagent une salle de bains à la lueur intime de stores bayadère évoquant les colonnes de Buren, et à la baignoire ancienne cernée de marbre clair et coffrée de bois peint.
État À Vivre Quartier Les Chalets, Toulouse Surface 110 m² Prix 599 000 €
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Écrin Blanc Architecture du début du XXème siècle, cette jolie copropriété abrite en son deuxième étage un petit cocon de 34 m2 avec sa terrasse privative de 7 m2, au cœur du quartier Saint Aubin. Tout juste rénové, ce joli appartement a conservé son charme d’origine grâce à ses poutres laissées volontairement apparentes répondant au parquet de pin naturel et au mur de briques du salon. L’entrée s’effectue par la porte vitrée en bois, apportant une douce lumière au couloir qui dessert la chambre et sa salle d’eau attenante. Plus loin, la pièce de vie accueille la cuisine ouverte pourvue d’un îlot dédié aux repas, qui cache discrètement des rangements. Plein Sud, la terrasse indépendante invite au repos et à la douceur de vivre, grâce à sa belle vue dégagée et verdoyante.
Type De Bien Appartement Architecture Art Nouveau État À Vivre Quartier Saint-Aubin, Toulouse Surface 31 m² Prix 230 000 €
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De l'architecture
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Conversation Texte — Emmanuelle Oddo
Photos — BAST
BAST BAST, pour Bureau Architectures Sans Titre. Fondé à Toulouse en 2013, ce bureau inédit a choisi pour nom l’anonymat, cadre d’une pratique dans laquelle l’individualité s’efface au profit de l’expression collective.
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Il y a un an, BAST figurait parmi les vingt lauréats des AJAP 2018, concours biennal d’architecture et de paysagisme organisé par le ministère de la Culture. Si le bureau a été fondé par Laurent Didier et Mathieu Le Ny, l’expérience dépasse à présent ces deux noms. Dans cette aventure, la hiérarchie est inexistante, les projets collectifs, et l’association constitue une fin en soi. Une posture hautement revendiquée par le bureau, tout comme son esthétique radicale. Découverte d’une agence peu banale, en perpétuelle remise en question.
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Combien de personnes constituent aujourd’hui le bureau BAST ?
Nous sommes trois L&M associés, épaulés de deux collaborateurs stagiaires. BAST a été fondé en 2013, nous avons d’abord été deux, puis trois, puis quatre, puis cinq, puis à nouveau trois. Il y a inévitablement une évolution du nombre d’associés dans le temps, puisque nous sommes assez ouverts à toute forme de rencontre qui permettrait de faire évoluer le bureau, et nous restons volontairement flexibles. Nous privilégions l’association plutôt que d’embaucher des architectes, tout simplement pour éviter les hiérarchies. D’où vient cette volonté du collectif ? Dès la création du bureau, il y a eu l’envie de garder la possibilité d’une structure mouvante dans le temps. Le fait que le bureau ne portait pas notre nom permettait que chacun puisse venir travailler un temps, puis repartir pour d’autres opportunités. Nous ne voulions pas figer les choses, d’où un nom plus générique. Mais nous pensons que cela est aussi simplement lié à une tendance actuelle et récente, dans les agences d’architecture surtout, de faire disparaitre la personnalité au profit d’une méthode de travail. Les hiérarchies marquées sont presque désuètes finalement. Nous voulions incarner cette évolution de notre temps. Comment s’organise l’association autour d’un projet ? Comment prendre des décisions et les réaliser en collectif ? 1 1 1
Quelques soient les projets, nous travaillons de la même manière : nous définissons un binôme
en charge du projet – il s’agit chaque fois d’un nouveau binôme, permettant de croiser les regards – mais nous sommes tous impliqués dans la phase de conception. Dès le démarrage, nous produisons tous des documents qui permettent de s’approprier le projet, partager nos connaissances et nos envies, pour finalement identifier plusieurs postures Photo © Anna Mas et hypothèses, et choisir ensemble les plus intéressantes. Quand arrive la phase de réalisation, le binôme en charge reprend la main sur le chantier, mais nous poursuivons ces réunions collectives tant qu’il reste des choix à faire. Le fait d’être à plusieurs permet de faire émerger des logiques plus rationnelles que subjectives. Vous aimez parler de votre volonté de toujours « interroger les possibles ». Comment questionne-t-on un lieu, des idées ou un projet ? Étant plusieurs, on ne perçoit pas toujours les mêmes choses, ce qui nous oblige à croiser les points de vue, à avoir une réflexion qui aille au-delà du sentiment individuel. On filtre les idées et hypothèses de chacun jusqu’à atteindre un essentiel qui rende le projet efficace, pragmatique. Tous les choix sont faits à l’unanimité, et à partir du moment où une décision convient à trois personnes, il y a plus de chance qu’elle soit rationnelle que si elle ne convient qu’à une seule. C’est là la force du collectif : parvenir à trouver une seule action qui réponde à l’ensemble des contraintes liées au site, au programme et à l’économie du projet. Et cette méthode de travail est pour nous déjà une finalité. Cette manière de travailler collégialement définit tous nos projets : ce n’est pas tant le résultat formel qui nous intéresse, mais la manière dont nous y parvenons.
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Nous aimons utiliser des matériaux standards, mais c'est dans leur mise en oeuvre que nous nous distinguons.
Dans ces projets où l’on court souvent après le temps, les décisions collectives ne sontelles pas trop fastidieuses ? Serait-ce leur limite ? Le fait que les décisions soient prises à l’unanimité prend beaucoup de temps, c’est sûr. Mais ce qui est perdu dans cette phase de conception initiale est gagné par la suite, dans le déroulement et la réalisation du chantier. Avec l’expérience du collectif, et la culture commune que nous partageons, nous arrivons aussi à nous mettre d’accord de plus en plus vite. Et surtout, nous gagnons du temps par le seul fait d’être à la fois les concepteurs et les réalisateurs du projet. Ce qui n’est pas le cas dans une organisation hiérarchisée : lorsque l’on délègue à d’autres personnes, la transmission d’information n’est pas totale, tandis que chez BAST, le collectif conçoit, dessine et réalise lui-même. Il maîtrise toutes les phases. Votre architecture est souvent qualifiée de « radicale », d’ « éthérée ». On vous associe volontiers à la Nouvelle École Brutaliste. Est-ce une esthétique que vous défendez et pourquoi ?
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Nous partageons cette esthétique tout simplement parce qu’elle découle de notre contexte de travail et des projets sur lesquels nous aimons travailler : des projets peu bavards, qui s’en tiennent au minimum, qui sont principalement structurels. Mais cette esthétique à laquelle on nous associe n’a jamais été notre objectif premier, elle tient sûrement des premières commandes que l’on nous a confiées, toutes liées à une économie de projet fragile, qui nous poussaient à toujours proposer le maximum avec le minimum d’argent. En travaillant ainsi, on se retrouve souvent à dépouiller tout ce qui n’a pas d’utilité structurelle, tout ce qui est
second œuvre – doublage, peintures, faïences… On se retrouve alors avec une esthétique marquée par des éléments bruts. Une esthétique qui nous convient parce qu’elle parle d’elle-même. Elle parle de ce qui est nécessaire, et se passe de commentaires. Ce qui est intéressant également, c’est qu’elle convient aux gens à qui l’on s’adresse. Les clients comprennent le mécanisme : l’économie de projet implique de faire des choix qui privilégient la qualité de la construction. Dans la répartition du budget, nous allons toujours privilégier les volumes – être généreux dans les ouvertures, les vitrages par exemple - plutôt que la finition de surface. Nous travaillons vraiment sur la base, car tout le reste peut évoluer dans le temps et être facilement modifiable en fonction des modes et des goûts. En quoi cette recherche de l’essentiel estelle pour vous plus intéressante qu’un projet ultra dessiné ? Les choses dessinées ne nous gênent pas, mais ce ne sont pas des choses que nous pouvons partager à plusieurs car elles relèvent du subjectif. Chez les architectes d’intérieur ou les décorateurs, le nom est d’ailleurs plus important, car il va incarner un style. Le subjectif est peut-être ainsi la limite du collectif, mais une limite dont on est conscient et qui nous va. En ce qui nous concerne, même l’aménagement intérieur – cuisines, salles de bains, placard - est géré d’une manière très retenue, parce que la pédagogie reste la même. Nous nous souvenons avoir travaillé sur une boutique de la marque Sessùn (en association avec l’agence NP2F), à Toulouse, pour laquelle nous n’avions pas dépensé la totalité du budget initial, et nous ne voyions pas l’intérêt de dépenser plus pour des choses qui seraient devenues hors projet.
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Il y a-t-il des matériaux qui vous permettent mieux que d’autres de parvenir à cette quête de l’épure ?
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Nous aimons utiliser des matériaux assez standards, et des procédés industriels classiques – comme l’acier galvanisé plutôt que thermolaqué par exemple – mais c’est dans leur mise en œuvre que nous nous distinguons, car s’ils sont le plus souvent destinés à être cachés, nous faisons au contraire le choix de les laisser apparaître. Un mur en parpaing ou un sol en béton brut ne sont à la base pas faits pour être montrés, mais si on les travaille avec l’intention contraire, on se rend compte qu’il y a une attention particulière qui est mise dans la réalisation, et cette qualité n’a plus besoin d’être masquée. Elle se suffit à elle-même. C’est aussi l’occasion de mettre en avant le travail des artisans : on a tendance à faire appel pour ces postes à une main d’œuvre peu qualifiée, et très peu valorisée ni considérée car son travail est destiné à l’invisible. Mais à partir du moment où l’on met à nu ces éléments, on se rend compte que ces artisans savent faire mieux.
Nous ne portons pas pour autant un jugement de valeur sur l’esthétique d’une brique ou d’un parpaing. Ce qui nous plait, c’est de prendre le matériau tel quel et de le mettre en œuvre de façon soignée. Même chose pour les réseaux, qui sont souvent mis dans des doublages : ils peuvent tout à fait rester apparents s’ils sont ordonnés, tirés droits… mais cela implique une grande rigueur dans le travail.
BAST www.bast0.com @bast_architectes
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Re-naissance Texte — Amandine Coquerel
Photos — Olivier Amsellem
The Collectionist Au cœur du quartier marseillais de Vauban s’est présenté un beau terrain de jeu : un plateau de 70 m² à transformer en habitation, en récupérant la hauteur sous charpente, dans l’idée de créer un duplex contemporain. Un exercice singulier.
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Projet Optimiser le plan, moduler les volumes, travailler la circulation et créer une mezzanine en jouant sur les entrées de lumière, tel a été l'enjeu du projet pour proposer un cadre de vie idéal pour une famille.
Réalisation Un travail a tout d'abord été entrepris autour du blanc et du bois, puis des couleurs douces sont venues révéler les matériaux bruts. Les traces du passé ont volontairement été conservées et valorisées : pierres en encadrement des fenêtres, poutres de la charpente et pierres de Cassis de soutènement. Le tout en donnant un aspect contemporain et confortable au duplex.
Aménagement Les menuiseries sur-mesure en chêne répondent au parquet blond et réveillent les murs blancs immaculés. Rose et bleu nuit sont révélés par la lumière omniprésente et les jeux de transparence des verrières. En double hauteur, la pièce de vie et son enfilade de fenêtres est conviviale, avec sa cuisine, travaillée tel un élément de décoration avec sa niche centrale en bois, et son escalier bibliothèque, conduisant à la suite parentale.
Décoration Six marques singulières ont été conviées pour meubler les lieux. Pièce A Part et Double V Gallery pour la sélection d’art, The Socialite Family pour la décoration, Lila Noir pour l’ornement floral, Good Design Store et Ferm Living pour le mobilier, et Bonsoirs pour le linge de lit. L'occasion de mêler plusieurs univers esthétiques au sein de cet écrin urbain.
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Architecte Audrey Faugloire Localisation Vauban, Marseille
Matériaux Chêne massif Parquet Pierre apparente Moquette Zelliges blancs
Couleurs Bleu nuit Rose poudré Blanc
Budget des travaux 150 000 € Durée des travaux 6 mois Superficie 100 m2
Marques partenaires Pièce A Part, curation & oeuvres Double V Gallery, oeuvres d'art Good Design Store, mobilier (FermLiving & Ethnicraft) Bonsoirs, linge de lit The Socialite Family, mobilier
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Symbiose Texte — Emmanuelle Oddo
Photos — Philippe Ruault
A hauteur d’arbres Alors qu’il devient urgent de reconsidérer le rapport de l’Homme à son environnement, quelques initiatives architecturales avantgardistes nous prouvent qu’il est bel et bien possible d’aborder cet enjeu avec intelligence, créativité et subtilité. Parmi elles, la villa imaginée par Lacaton & Vassal, au Cap Ferret il y a déjà trente ans.
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Plaisir régressif ou rêve d’aventurier, la vie sous la canopée ne se résume plus à quelques cabanes imaginées par les enfants dans les branches. Elle est devenue réalité pour de nombreux adultes soucieux de se reconnecter à la terre. Encore faut-il que ces habitations hors-normes soient conçues intelligemment. Au bord de l'eau, du côté du bassin d'Arcachon, les architectes Anne Lacaton & Jean Philippe Vassal font le pari, dans les années 90, de concevoir une maison en inversant le rapport de force entre l’Homme et la nature. Cette fois, c’est à l'humain de s’adapter à son environnement et non l’inverse. Lorsque le projet leur est confié, le terrain, inoccupé depuis longtemps, est l’une des dernières parcelles non bâties en première ligne sur le bord du Bassin. Sa topographie naturelle n’est pas des plus évidentes : une dune de sable dressée, surplombant l'océan, recouverte de 46 pins, d’arbousiers et de mimosas. Le défit est lancé : comment construire sans aplanir ni déboiser, en préservant l’intégralité de la dune et de sa végétation ? Pour éviter les terrassements dégradants et la coupe des pins, douze micro-pieux sont enfoncés dans le sable jusqu’à dix mètres de profondeur. Prenant appui sur ces fondations, une charpente métallique est érigée entre les arbres, qui vont alors structurer l’intérieur de la maison et définir les espaces. « Les pins sont conservés, y compris ceux situés dans l’emprise de la construction. Ceux-ci traversent la maison dans des réservations adaptées à leur balancement, à leur développement et à leur maintien en bon état sanitaire. » précisent les Lacaton-Vassal, comme on se plait à les appeler dans le milieu.
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Une élévation qui permet, non seulement de jouir d’une vue imprenable, mais surtout de préserver l’état des sols et de prendre possession du paysage. Une communion menée d’une main de maître, dans laquelle tout le monde se retrouve. Pour parfaire cette intégration au site, la sous-face et les façades de la villa sont constituées de larges baies et de plaques d’alumium, répercutant la lumière environnante et créant des jeux de transparence. Le toit, quant à lui, fait office de terrasse.
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Au-delà d’une performance esthétique et éco-responsable, la prouesse de ce projet réside également dans sa démarche minimaliste et économe. A travers ce chef d’œuvre architectural, Lacaton et Vassal prouvent qu’il est possible de concilier optimisation budgétaire, respect de l’environnement et bien-être des occupants. “ Moins de matière, c’est aussi moins de coût, et c’est une façon totalement directe de mettre en œuvre les choses, d’assumer les matériaux, d’assumer les assemblages : "cette performance devient aussi une qualité esthétique.”
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expliquent-ils. Une modestie des moyens couplée à une discrétion dans l'intervention, qui feront la renommée du cabinet. Car la structure sur pilotis et le bardage métallique du bâtiment, de facture simple et peu coûteuse, permettent d’alléger le poids de la maison et d’éviter le recours à des fondations aussi onéreuses que complexes sur ce type de terrain meuble. Même approche économe pour l’ensemble des matériaux et assemblages, volontairement laissés bruts et apparents. En 1998, c’est un véritable coup de maître que les Lacaton-Vassal réussissaient, puisque pour une superficie de 180 m² et 30 m² de terrasse, le budget total alloué était de… 123 000 €. Un chef d’œuvre bâti sur une réelle vision et des convictions propres, aujourd’hui inscrit dans la liste des classiques de l’architecture.
MAISON, CAP FERRET Architectes Anne Lacaton & Jean-Philippe Vassal Site Lège, Cap-Ferret Maître d’ouvrage Privé Date Livraison 1998 Superficie 180 m2, terrasse 30 m2 Coût 123 000 € HT 1 1 1
Pensée Constructive Texte — Fabienne Berthet
Photos — Nikolas-Ernult
Cité Frugès
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Aujourd'hui considérées comme un modèle d'architecture, et classées depuis 2016 au Patrimoine Mondial de l'Unesco, les 50 maisons cubiques et colorées de la cité Frugès, à Pessac, près de Bordeaux, n’ont pas toujours connu cette gloire, encore moins de leur temps. Ce lotissement visionnaire, encore largement méconnu, s’avère pourtant être le premier projet urbain à grande échelle de Le Corbusier. Vingt ans avant la cité Radieuse de Marseille.
Loger les travailleurs, innover dans l’habitat social… Depuis la fin du XIXème siècle, cet enjeu sociétal gagne toute l’Europe dans le contexte d’une industrialisation croissante et parfois anarchique. Ici et là, penseurs, philosophes, historiens, artistes et hommes politiques s’interrogent, font table rase du passé pour croiser leurs idées et chercher des modèles adaptés à une société en mutation. L’exemple anglais des Garden Cities d’Ebenezer Howard fait des émules. Sans s’arrêter à un simple mode de construction de la ville, il développe un principe d’urbanisation à grande échelle. La Cité Frugès, autrement appellée Cité Jardin, dans son modèle, encourage l’harmonisation des différentes fonctions sociales au sein d’ensembles prédéfinis et lutte contre la spéculation foncière.
D’un pays, à l’autre, de la réflexion à l’action, le courant passe. Pessac, au Sud-Ouest de Bordeaux, en bordure de la forêt des Landes s’illustre en la matière… C’est dans cette petite ville que s’érige, dans les années 30, la Cité Frugès. Projet architectural à l’échelle d’un quartier, avant-gardiste, il incarne la volonté de repenser l’habitat notamment collectif, la résistance des pouvoirs publics et des élites au modernisme, et les aléas de la co-conception entre un industriel mécène et un architecte visionnaire sans concession. En soi, le site ne prépose pas aux changements de prisme. En banlieue de Bordeaux, Pessac s’inscrit dans une tradition bourgeoise. L’architecture du siècle des Lumières y prévaut largement
sur les théories avant-gardistes de jeunes intellectuels engagés. Conceptuelle, la Cité Frugès du duo associant l’industriel sucrier Henry Frugès et Le Corbusier, fait figure de pavé dans la marre et résonne comme une proposition incongrue dérangeant tout son monde, les élites comme les populations les plus modestes à laquelle elle est destinée. C’est entre 1924 et 1926 que les fondations des Quartiers Modernes Frugès sont posées par les architectes Le Corbusier et Pierre Jeanneret. Leurs objectifs s’inspirent de l’exemple anglosaxon : faciliter l’accession à la propriété foncière et immobilière à toutes les familles dans un contexte de crise du logement ; encourager un habitat moderne au sein de quartiers aérés, sains, propres et agréables, dans le cadre d’un
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urbanisme novateur ; empêcher pendant 10 ans toute spéculation sur les prix des immeubles de ces quartiers. Le duo de créateurs Le projet prend donc forme grâce à la rencontre de deux personnalités. D’un côté, l’industriel sucrier Henry Frugés, curieux de son temps, soucieux de l’accès démocratique à un habitat social de qualité notamment pour loger les ouvriers de l’aciérie locale. De l’autre, Charles-Édouard Jeanneret, dit Le Corbusier, architecte et artiste polyvalent alors peu connu. Auteur de l’ouvrage « Vers l’architecture », il s’engage dans un urbanisme novateur redistribuant les cartes de l’habitat collectif. Ambitieuse, la Cité Jardin se pose comme un
laboratoire urbain, architectural et constructif. Dotée d’une liberté totale ! Henry Frugès s’en remet totalement à Le Corbusier. « Je vous autorise à réaliser dans la pratique vos théories, jusque dans leurs conséquences les plus extrêmes » assure-t-il à son concepteur, selon les propos rapportés par Christiane Massel dans son ouvrage de 2014, « La camaraderie entre couleur et architecture. De Pessac à Hagondange, un parcours imagé ». Mieux, la transgression est conseillée ainsi que la rupture avec toutes les conventions et le recours à une esthétique nouvelle, « loin de celles de maisons traditionnelles, coûteuses à construire et à entretenir ». Un but louable, puisqu’il s’agit de loger et d’encourager l’accès à la propriété
des travailleurs. Le tout à un prix plancher, estimé pour l’époque à un an de salaire pour une maison. Révolutionnaire ! Un modèle disruptif Bien plus qu’un simple exemple d’architecture moderniste, la Cité Frugès illustre une approche radicale, une sorte de R&D des architectes contemporains. Le Corbusier pousse loin l’analyse et change de prisme, liant progrès social et ambition artistique. L’habitat ouvrier y devient une œuvre à part entière. Dans le fonds mais aussi dans les formes magnifiées par l’usage de la polychromie. Dans sa taille, il est aussi inédit. Colossal, le projet prévoit jusqu’à 200 villas même s’il se limite en 1924 à la construction
—La Cité Frugès illustre une approche radicale, une sorte de R&D des architectes contemporains.
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—L'inscription dans ce concept de "machine à habiter"passe avec des pièces à assembler, selon une technique bien définie, et empruntée au modèle de l'automobile.
de 124 maisons sur une plaine de 4 hectares repartie en autant de secteurs. Une organisation inédite qui associe à l’origine des commerces et un fronton de pelote basque. L’intention évolue au fil du chantier. Si Henry Frugés souhaitait une différenciation de chaque habitat, Le Corbusier, dans sa ferveur modulaire, voit les choses autrement et envisage les prémisses de la production en série avec des compositions, de 5 x 5 mètres, 2,5 x 5 mètres et 2,5 x 2,5 mètres, à superposer. L’inscription dans ce concept de « machine à habiter » passe par des pièces à assembler, selon une technique bien définie, et empruntée au modèle de l’automobile. Une approche de la cellule type et du module pré- fabriqué qui s’impose comme les premières balises de la standardisation du logement. Géométrique, multicolore et paysager En rupture complète avec les codes
d’une architecture classique, la Cité Jardin invente un nouveau modèle. Ses éléments aujourd’hui familiers ont pourtant tout d’une provocation dans les années 30. Les formes sont pures, le matériau principal est le béton, les maisons sont réparties par modules de cinq. L’idéologie n’est pas exclue. « Une maison est une machine à habiter. La maison doit être l’écrin de la vie, la machine à bonheur. J’ai travaillé pour ce dont l’homme d’aujourd’hui a le plus besoin : le silence et la paix ». Le résultat est là, avec six styles différents, entre les immeubles Zig Zag car articulés en forme de Z, les maisons dites Domino ou Quinconces, les Jumelles, les Isolées et autres Arcades qui jouxtent les grattes ciels (habitations sur trois niveaux) autour d’une rue centrale. Dans le détail, chacune compte 75 m² de superficie en moyenne, 2 chambres, un toit terrasse, des vitres d’un bloc, des fenêtres
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meurtrières, un plafond d’un seul tenant, des façades colorées mais aussi - et surtout - l’eau et l’électricité ainsi que le chauffage central. Un vrai plus à l’époque ! Le choix des couleurs de la Cité Fruges ajoute à son mystère. On attribue à l’industriel cette volonté d’imposer les couleurs. Le Corbusier, plutôt partisan de la matière brute, s’en empare d’une façon originale. En phase avec le peintre Amédée Ozenfant et adepte du purisme - une théorie qu’il oppose volontiers au cubisme de Pablo Picasso - il utilise une palette de couleur réduite mais calibrée : bleu outremer, terre de sienne - brulée ou claire – et vert pâle. L’idée est d’intervenir sur l’espace et d’ouvrir les perspectives. Un concept caméléon qui fait alterner les façades terre de sienne, les lignes d’horizons bleu outremer et les tonalités végétales. Le blanc éclatant assurant la lumière d’un ensemble géométrique, multicolore
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et paysager. « Un choc chromatique qui crée une forte tension visuelle » évoque Christiane Massé. Pour la première fois, les effets visuels de la perception des couleurs sont utilisés dans un site urbain et en relation avec le paysage. Une machine à habiter, certes, mais aussi une machine à émotion ! Des résultats contrastés et un accueil mitigé Audacieux, le concept de la Cité Frugès va se heurter à divers obstacles : les aléas des chantiers, mais aussi la méfiance des pouvoirs publics. Si à l’échelle nationale, le gouvernement valide, les autorités locales regimbent à accorder les autorisations, pour la voirie, le raccordement au gaz et à l’électricité, l’adduction d’eau. La première tranche est malgré tout finalisée en 1926. Sur l’intégralité du projet, seules deux sections et 51 maisons sont sorties de terre, sur les 53 projetées et les 124 planifiées. Les commerces ne verront jamais le jour. La réussite n'est pas totale. La critique est virulente, le projet est moqué, qualifié par les élites du cru de "Rigolarium" … Le public a du mal à suivre. Les familles populaires, pourtant principales concernées, y vont à reculons, ne souhaitant pas s’endetter dans ce qui leur apparait être une hérésie. Trop moderne, trop conceptuelle ! « Le Corbusier a voulu anticiper, inventer une formule qui ne collait pas avec la mentalité de sa future clientèle », estime l’historien Jacques Clémens, pessaçais d’origine. « Les ouvriers n’ont pas acheté. Ils sont restés chez eux et dans les autres quartiers périphériques. Il faut imaginer les mentalités des poilus et des jeunes qui reviennent de la guerre. Les gars ont entre 20 et 30 ans et veulent acheter un pavillon avec un petit jardin. Avec la crise, le stéréotype est trop novateur pour les habitants ».
Une valorisation tardive Inachevée et peu entretenue, la Cité Frugès n’a pas eu le succès escompté. Son rayonnement viendra sur le tard. Il faudra attendre les années 70 pour qu’elle soit inscrite à l’inventaire des sites pittoresques du département de la Gironde. L’une des maisons Arcades, restaurée à l’identique, est ensuite classée Monument Historique en décembre 1980. Quelques années plus tard, une habitation de type gratte-ciel s’ouvre au public, l’occasion de faire découvrir l’ambition du projet. Classée en Zone de Protection du Patrimoine Architectural, Urbain et Paysager (ZPPAUP), en 1998, la cité est peu à peu reconnue. Candidate à l’intégration au Patrimoine Mondial de l’Unesco, elle sera retoquée à deux reprises, avant d’être finalement classée en 2016 en même temps que 17 des œuvres de Le Corbusier. L’apport de la Cité Frugès au purisme, sa contribution à la réflexion sur les nouveaux besoins de l’homme moderne et sur l’unité d’habitation, chers à l’architecte suisse, est désormais reconnue. On y croise aujourd’hui, signe du regain d’intérêt, un public sensible à la promesse de l’époque. La Cité a gardé ses structures originelles ainsi que ses couleurs, certes un peu déteintes. Le laboratoire est rentré dans le rang.
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Le concept porté par l’architecte voit alterner les façades terre de sienne, les lignes d’horizons bleu outremer et les tonalités végétales afin d’ouvrir les perspectives.
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Anatomie d’un building La MÉCA par
BIG 142
"L'architecture de la MÉCA est une architecture vivante, une mécanique à réfléchir, créer, produire, montrer". (Bjarke Ingels)
L A
Panneaux de béton préfabriqués
M E C A
La façade est composée presque entièrement de 4 800 panneaux de béton préfabriqués entrecoupés de fenêtres de différentes tailles, afin de contrôler la quantité de lumière qui pénètre à l’intérieur et créer ainsi un sentiment de transparence.
Rayonnement de la culture
Les dalles de béton, pesant jusqu'à 1,6 tonnes, ont été sablées pour mettre en exergue ses qualités brutes et texturer la surface avec le grès local de Bordeaux. Le soleil se reflétant sur le bâtiment fait rayonner la MÉCA en tant que nouvel élément emblématique de la ville.
Approriation de l'espace urbain
Les espaces extérieurs peuvent être transformés en scènes de concerts et spectacles, ou en galerie élargie pour des installations artistiques. A titre d'exemple, une sculpture permanente en bronze de l'artiste français Benoît Maire est installée à l'entrée du bâtiment, invitant les passants à se questionner sur la création contemporaine.
Dialogue entre les espaces
Depuis le parvis extérieur, on scrute l'intérieur de la MÉCA grâce à un miroir incliné qui offre, à la manière d’un périscope géant, une vue permanente sur l’Agora. Au centre du bâtiment, cette "pièce ouverte" de 700 m² permet aux visiteurs de découvrir les salles d'expositions, une salle de cinéma, un auditorium, deux studios de création, un espace de production et autres équipements techniques.
Dynamique du bâtiment
De n'importe quel point de vue, la MÉCA nous donne l'étonnante illusion d'un site en mouvement : les perspectives semblent se distordent au fur et à mesure que l'on s'en approche. Telle une boucle verticale, elle intègre l'ensemble de ses usages culturels, dans un même élan.
En chiffres
18 000 m² 120 m de longueur 37 m de hauteur 850 m² de toit terrasse 4 800 panneaux de béton préfabriqués 1% artistique 3 agences régionales des arts 60 000 000 € HT de coût
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