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L’AGENCE

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INTRODUCTION

INTRODUCTION

Junya Ishigami est un architecte reconnu à un niveau international. Il a été formé à l’école des Beaux-arts de Tokyo. Il vit ses premières années en tant qu’architecte. dans l’agence de SANAA puis il fonde sa propre agence en 2004 : Junya.Ishigami + associates. L’équipe internationale de l’agence de Junya Ishigami connaît un succès phénoménal depuis plusieurs années. D’abord rémunéré par les publications vendues au sein du pays et à l’étranger, l’agence voit aujourd’hui se construire de nombreux projets comme Noel, Zama, et bientôt la Serpentine Gallery pour n’en citer que quelques uns. Il reçoit en 2010 le Lion d’or à la Biennale de Venise pour son travail sensible tant dans ses illustrations, son design et son architecture «onirique et légère».

Ce qui est paradoxal, c’est que l’agence d’Ishigami n’est pas à l’image de son architecture. Travaillant au coeur de Roppongi, quartier animé et très hétéroclite de la ville les locaux sont en sous sol, ce qui signifie ni lumière, ni air. Il y avait seulement une écriteau minimaliste avec le nom de l’agence pour nous indiquer son emplacement le premier jour.

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La majorité de ces projets ont été présentés en France lors d’une exposition à la fondation Cartier, dans le XIVe arrondissement de Paris. Ils sont encore en phase de conception à l’agence ou en cours de réalisation.

Tout cela étant dû au génie incontesté et incontestable du presque vénéré par ses employés, Junya Ishigami, régissant d’une main de fer une équipe travaillant jusqu’à l’épuisement pour produire une architecture parfaite, pensée et repensée pour s’accorder à la vision de l’architecte. Faisant fi du délai, du budget, les maîtres mots du projet sont toujours : « simplicité conceptuelle, vérité constructive, ambiance

J. Ishigami

du lieu et originalité ». Tout cela guide les chefs de projets de l’agence tokyoïte dans leur réflexion de l’architecture.

J. Ishigami est le coordinateur de ses différentes équipes chargées des différents projets, concours et commandes. Chaque équipe a régulièrement des entretiens, à l’image de nos rendus, avec lui afin de faire des points sur les avancements. C’est une agence qui voit le staff changé régulièrement, les architectes collaborateurs ne restent en général que pour un an c’est pourquoi l’organigramme de l’agence reste «type». Stagiaire Chargé du projet

Concepteur

Stagiaire

Concepteur Stagiaire

PROJETS, L’ENVERS DU DÉCORS

Nous avons pu participer à l’avancement de différents projets dont chacun demandant une approche de travail particulière. Nous avons eu l’occasion de voir les projets d’Ishigami sous un nouvel angle.

POWER STATION OF ART EXPOSITION SHANGAÏ

La fondation Cartier ayant rachetée les œuvres de l’exposition d’Ishigami, elle a proposé à son équipe de faire la scénographie de la prochaine se déroulant avec ces mêmes œuvres à Shanghai. C’est la raison pour laquelle Héloise Darves, responsable du projet, nous a proposé de la rejoindre.

Le lieu étant assez immense, un concept de division de l’espace a très vite été décidé, l’idée étant de créer une diversité d’échelle pendant le parcours du spectateur, de mettre en valeur les projets tout en respectant un budget très restreint. Notre tâche principale était de faire des propositions de scénographies respectant certaines contraintes dues aux projets. HOLLAND

Concept de mise en valeur d‘un chemin préexistant, une œuvre qui disparait dans la nature, et c’est ce concept que l’on doit deviner pendant le cheminement autour de la maquette de site en découvrant petit à petit le projet caché entre les arbres.

HOUSE OF PLANTS

House of Plants est une maison qui rassemble l’intérieur de l’extérieur, il est très particulier car il est seulement représenté avec des plantes vivantes. La maquette doit donc être illuminée de lumière naturelle, de plus les dessins doivent être largement mis en valeur dans la salle associée au projet.

NIKI

C’est une forêt qui est totalement déplacée et qui est recréée en un concept idéal et magique entre forêt, marécage et plaine. Niki étant un projet paysagé avec une réflexion et une analyse du site original et très réfléchies. Ce sont ces dernières qui doivent être mis en valeur, par les dessins de concept.

HOPE

c’est un nuage immense flottant au dessus d’une mer calme, accessible seulement par bateau, une parenthèse de calme et de poésie, étant représentée par une maquette de plusieurs tonnes. Elle doit être posée sur une poutre structurelle du plancher et la scénographie doit laisser un large espace autour pour la voir de pès comme de loin. CHAPEL

Chapel est un projet immense une vallée dans une vallée, une maquette de béton coulée de 7 mètres de haut. Elle doit être abordée par la faille qui la traverse pour donner un apreçu de l’expérience architecturale perçue par le visiteur, une distorsion de l’échelle. De plus elle doit être reconstruite sur place, ce qui posera des problèmes techniques, à prévoir dans l’organisation de la scénographie.

MOSCOU

C’est un projet qui change le niveau du sol, le sous-sol d’un bâtiment public réhabilité. Il y a plusieurs maquettes à découvrir dans un ordre qui suit la temporalité du projet, de

sous-sols délabrés à voûtes lumineuses, l’existant étant superbement mis en valeur,

SYDNEY

Sydney est un projet immense qui doit prendre un large espace dans l’exposition. En effet les différentes courbes flottantes, ces arches de béton au dessus de la ville doivent être suspendues depuis le toit pour pouvoir tenir.

KINDER GARDEN - ANIMALS - GOST

Les projets liés à l’enfance, Kinder garden, animals, ghost doivent être mis ensemble, reliés par le parcours.

DALI

La maison entre les rochers, est en pente, on doit donc découvrir la maquette par son point le plus bas. COMMERCIALS

c’est un chemin d’un kilomètre au milieu d’un lac, la maquette très horizontale se doit d’être suivie comme si l’on se déplaçait dans le projet, en suivant le chemin.

NOEL

C’est un projet enterré avec une structure de béton plein, moulée avec la terre. Le béton séché est excavé et les voûtes créées font l’architecture. Noel est aussi basée sur la question de la mise en valeur de l’existant pour créer l’architecture. Ici c’est créer par le vide, depuis le plein. Tout est question de détail dans ce projet, l’échelle réduite rend les déplacements dans le projet cruciaux, et c’est ce qui doit être ressenti en se déplaçant autour de la maquette. Noel marque grandement l’œuvre de l’architecte par son originalité.

AKITA

Maison pour Alzheimers, se base sur le déplacement d’anciennes structures de maisons pour créer une imense structure liée par ses toits. Il y a 3 maquettes à voir dans un ordre précis, concept, site puis détails.

KAIT

Le projet est seulement un toit extrèmement fin à la portée immense. Kait est extêment complexe à mettre en place dans l’exposition car produit de très grandes forces dûes aux efforts produits par le porte-à-faux du toit

ZAMA

Maison créée pour ses parents et sa grand mère, se doit d’être présentée en dernier car intimiste et très personnelle. Il estpensé jusque dans ses moindres détails pour être le plus représentatif de son architecture, aujourd’hui dans sa phase de détails constructifs, la construction commençant en avril.

Tous ces projets doivent être mis en valeur avec un certain nombre de codes. Le travail sur l’exposition permet de découvrir ces projets sous un angle nouveau.

PAVILLON DE CARTIER

Les chargés de ce projet, en début de conception, sont designers. Ishigami ne se limite pas aux connaissances des architectes et va chercher plus loin avec des regards différents.

SERPENTINE GALLERY

Le 25 février 2019, le monde entier apprend que le pavillon de la serpentine gallery sera fait cette année par Ishigami. Un bâtiment qui se veut très poétique avec un toi, en

tuiles sombres organiques, suspendu par des poteaux d’une grande finesse.

HOTEL

C’est un projet qui fait partie d’une commande faite par un milliardaire chinois. Cet hôtel doit être conçu en même temps que deux autres commandes : un spa et un village.

L’échelle est démesurée pour ce projet qui a un programme de 55 000 m2 pour 300 chambres. Ce projet est en phase de conception, et des premières esquisses sont attendues par le client à la fin du mois d’Avril 2019. La conception de ce projet est compliquée par cette échelle mais également par le fait que le programme a changé de nombreuses fois. Le complexe devait accueillir des chevaux puis ils les ont enlevé et ainsi de suite. La délimitation de la parcelle a été réduite/ augmentée en conséquence de ce programme changeant. Aucun concept n’est encore retenu pour le moment malgré de nombreuses recherches.

SPA

Ce projet fait parti du trio Hotel-Spa-Village. Le concept est dans un état d’avancement plus élevé que celui de l’hôtel car les grandes lignes sont dessinées.

En effet, c’est un projet sous-terrain ou la question de la conception du toit et le traitement de la lumière seront essentiels.

MURA

C’est le dernier projet de la commande du client chinois. Mura est un village où différents bâtiments sont placés tels des murs.

TÂCHES AU SEIN DE L’AGENCE

Nos tâches au sein de l’agence furent très différentes, allant du début de la conception à la résolution de problèmes techniques sur des projets en chantier. Nous étions venus à la base pour participer à la réalisation du projet d’une exposition des projets de l’agence à Shanghai, «power station of art». Seulement, le calendrier a été retardé, nous avons donc été redirigés vers différents projets. Ce qui fut intéressant, c’est que nous n’avions pas les mêmes rôles au sein de l’agence : l’un à suivi un projet en conception tout le long de son stage et l’autre a exécuté différentes missions au sein de plusieurs projets.

CONCEPTION D’UN HÔTEL EN CHINE Marianne Baroin

Ce projet a une échelle très difficile à appréhender ( 55 000 m2), le programme à changer à de nombreuses reprises. Mes tâches au sein de cette équipe était de proposer des idées de concepts, et les mettre en application soit en plan, soit en maquette. La production était conséquente, ce qui est une des caractéristiques principales des agences d’architecture au Japon. Une cinquantaine de maquette furent réalisées pendant le mois.

Les meetings avec Ishigami rythmaient notre travail. Nous avions rendez-vous tous les deux jours, nous produisions une douzaine de projets entre chaque. Ce fut très intéressant mais aussi impressionnant de voir un aussi grand nombre de propositions (rejetées) pour un projet donné.

L’idée était de montrer un maximum d’options et de pousser la créativité au maximum, au point même peut être de l’épuiser. Les chargés du projet nous ont d’abord demandé d’exécuter en maquette les idées de l’équipe présente avant notre arrivée. Puis très rapidement, la demande était d’apporter de nouveaux concepts à pouvoir présenter à Ishigami.

La maquette est le premier outil de conception au sein de l’agence. Nous sommes restés plus de la moitié de ma période de stage à l’échelle 1/2000e car elle était facile à manipuler et exprimait bien le concept global de chaque proposition. La seule demande faite par Ishigami, c’est d’avoir un maximum de concepts radicaux avec des typologies différentes, une matière à faire projet. Ce qui fut le cas. Les différents projets jouaient en densité, avec la nature, la topographie, ils étaient soit géométriques ou en courbe...

Ce qui m’a le plus interpelé c’est la faible participation d’Ishigami au concept de l’hôtel.

En effet, au meeting, aucune directive n’est réellement donnée, laissant dans le flou l’ensemble de l’équipe pour la suite de la conception. La créativité de l’équipe est ainsi conservée à son maximum, ce qui peut être une certaine explication. Seulement comme je le disais précédemment aussi, son épuisement se sentait au fil des semaines.

Sentant la dynamique de la production décroître, Ishigami décida de dessiner deux projets à partir de toutes les propositions faites. Au milieu de la période de stage, nous avons entamé une nouvelle étape de production avec des maquettes à l’échelle supérieure (1/1000 et 1/1500). Le projet se développe alors autour des deux concepts suivants. Le premier était de faire une succession de terrasses, jouant avec la topographie. Le second était de créer un ensemble de montagnes et de vallées ou situeraient les chambres. La volonté finale et étonnante d’Ishigami était de créer une voire deux vallées par chambre (entre 300 à 600 au total) sans qu’il y ait de montagnes. Les options sont alors testées sous différentes formes. J’ai dû faire une dizaine de version du même concept. Nous avons eu l’occasion aussi de faire des maquettes zooms au 100e pour tester la lumière.

Après, avoir commencé le développement de ces deux idées principales, le projet n’est toujours pas satisfaisant. Juste avant mon départ, mon équipe cherchait alors une nouvelle fois de nouveaux concepts en parallèle des recherches des projets «Terrasses» et «Vallées». La conception d’un projet pour un architecte est complètement différente par rapport au fait de faire un projet pour soi. En effet, il m’a fallu un temps d’adaptation face à la pensée portée par l’agence d’Ishigami. Il était impensable pour moi de conceptualiser des projets en courbe car c’est une forme avec laquelle je ne suis pas à l’aise. Seulement,

chez Ishigami, les projets en courbe sont nombreux. J’ai donc dû composer avec ce constat là.

Ainsi, le projet prend une autre dimension, il se détache un peu de vous en quelque sorte car en finalité cela ne sera jamais votre projet.

La phase de conception est donc sans cesse un aller retour entre différentes idées. La production est intense et ne doit jamais être réellement arrêtée. La recherche de concept, l’expérimentation en maquette sont les clés de sa conception architecturale.

Une semaine après notre départ, nous avons appris que l’équipe Hôtel a abandonné les concepts en cours, pas assez forts. Ils ont dû de nouveau recommencer des recherches de concepts plus «radicaux», telle est la demande d’Ishigami.

NOEL - ZAMA - MAGASINE - EXPOSITION Jean Montagne

Pendant ce mois de stage j’ai eu l’occasion de participer à plusieurs projets, Pour ZAMA, maison pour les parents d’Ishigami, j’ai pu participer aux maquettes d’études aux échelles 1/50 et 1/20, de design global et de détails techniques. Grâce à la participation de l’ingénieur Sato j’ai pu en apprendre plus sur la structure bois typique des maisons japonaises, de comment travailler le terrain en relation intime avec l’intérieur, par l’agencement de la structure. Le fait de faire de nombreuses propositions de design en maquette pour affiner une position architecturale est quelque chose que l’on n’enseigne pas à l’école, et pourtant c’est extrêmement utile, et ça permet d’être absolument sûr de ses choix. Une organisation intérieure épurée, entre codes traditionnels japonais et l’intégration de la culture contemporaine et occidentale par le mobilier, tout cela mis en valeur par une structure élégante dans un concept simple et fort de liaison entre intérieur et extérieur, c’était assez incroyable de pouvoir participer à l’élaboration d’un projet de ce type. Le projet étant à sa phase finale, Ishigami était extrèmement concerné par l’avancée du projet, nous avions donc des meetings tous les jours, sur des questions soit de structure, soit de design. Le projet est passé d’une structure bois, à béton, en passant par la terre et le croisement terre-bois. Ces experiences de design m’ont amené à refaire 5 fois certaines maquettes pour comprendre les changements de lumières et de textures associés à chaque idée.

Pour Noel, la construction ayant déjà commencé, ma participation se faisait sur le choix de détails structurels, entre position des cloisons de verre et profondeur de la cuisine, en cohérence avec la structure dans une maquette au 1/8. La subtilité du projet réside dans la relation entre le restaurant et la maison, cette question de flux est remise en cause à chaque meeting, de plus la lumière est extrèmement importante dans ce projet et elle a très bien été mise en valeur.

Pour le magazine j’ai dû retoucher des photos et plans sur photoshop et travailler la mise en page finale du projet. Cela m’a vraiment appris l’importance de la communication d’un projet, pour vendre et surtout se vendre. J’ai aussi appris que si je monte ma structure un jour, il faut dès le début organiser ses fichiers dans un serveur commun de façon claire et précise, car dans celle-ci le serveur était très mal géré. L’exposition de Shanghai m’a vraiment plu car elle m’a permis de rentrer dans le détail de chaque projet pour chercher la meilleure mise en valeur possible de chacun en fonction de chacune de leurs spécificités, c’était aussi le premier travail de scénographie que j’ai pu faire.

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