Marion Filâtre _ Projet de fin d'études en architecture

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48°02’25’’NORD 4°44’28’’OUEST

Marion FILÂTRE Diplôme de Fin d’Étude en Architecture Sous la direction de Fabienne DARRICAU ENSAP Bordeaux 2017



Préambule

Pour mon travail de fin d’études, j’ai choisi de partir d’un site à la fois magnifique et terrifiant qui me donne envie de hurler ma joie de vivre.



Sommaire

Introduction

p. 7

Chapitre 1 . 48°02’25’’Nord 4°44’28’’Ouest

p. 9

p. 11

1 Situation

2 Seuils p. 21

3 Accumulation

p. 37

Chapitre 2 . Le fruit du bout du monde

p. 53

1 Goémon

p. 55

2 Intentions

p. 71

3 La Manufacture

p. 75

Épilogue

p. 99

Commentaires du Jury

p.101

Annexes p.103 Remerciements p.113



Introduction

Je vais dans un premier temps vous décrire le site. Notamment à travers un parcours et une analyse historique des usages. Dans un second temps je vais expliciter ma posture sur ce territoire et vous présenter la thématique qui m'a servi de moteur de projet. Pour finir, je vous présenterai la proposition architecturale sur laquelle j'ai travaillé en vous montrant en quoi elle me semble cohérente vis-à-vis des spécificités du lieu.

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Chapitre 1

48°02’25’’Nord 4°44’28’’Ouest

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1 Situation

France

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Finistère

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Cap Sizun

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Pointe du raz

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La pointe du Raz est une péninsule de granit recouverte d’un maigre substrat acide sur lequel s’accroche une lande aride. Elle occupe sur terre une surface de 150 hectares. La photographie aérienne que vous voyez représente 4 kilomètres sur 2, 250 hectares de terre et 250 hectares de mer.

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2 Seuils

D’Est en Ouest, le visiteur parcourt la péninsule à la rencontre de l’océan.

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Depuis le cœur du village de Plogoff, un agrégat de maisons de pierre basses et exiguës concentrées autour de l’église, nous empruntons la D784. Quittant l’enceinte du village, on passe de hameaux en hameaux, traversant St Yves, Kerguidy, Kergadalen, Kerveur, Kerherneau et enfin Lescoff.

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En bas de la côte, juste derrière le rond point, un immense parking, couvert de camping cars allemands. Nous passons le péage, les boutiques, le musée...

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Pas à pas la route nous transporte dans une lande de genets, d’ajoncs, de prunelliers, de bruyères et d’œillets de côte. Après trois kilomètres de marche dans les creux de cette peau rêche, dans les odeurs de terre sèche et sous la caresse de vents délicats, la roche affleure, comme si l’on avait retiré la peau d’un membre, et que les os apparaissaient de temps à autre. Un dernier bourrelet de lande nous crache et le vent débarque en bourrasques. Le ressac encore lointain des vagues nous parvient.

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Le sémaphore. Guetteur des mers, ce gratte-ciel, dressé à l’océan, tend un œil et une oreille vers les hommes qui pratiquent les courants furieux alentour.

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Notre-Dame des naufragés. D’ici, nous pouvons observer l’océan se fracasser contre les roches affleurantes, mais on ne l’entend pas. Nous sommes 70 mêtres au-dessus de lui, seule une rumeur nous parvient.

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Le chemin disparaît pour laisser place à un chaos de granit que les plus téméraires escaladeront. Le vacarme de l’eau envahit l’espace. La roche s’effrite contre l’océan.

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Enfin, nous nous approchons des courants et pouvons mesurer la varennes, cette montagne de mousse qui projette les navires contre les roches.

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3 Accumulation

Aujourd’hui, nous pratiquons essentiellement la pointe comme un espace touristique alors qu’elle est jalonnée de ruines militaires et agricoles. Je me suis donc intéressée à l’accumulation des pratiques de l’homme sur la Pointe du Raz.

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Il y a 540 millions d’années, alors que les algues et les poissons se développent dans les océans, le cœur de la terre en fusion déchire la croûte terrestre. Refroidissant lentement, sur plusieurs dizaines de milliers d’années, ce magma se fige en gros cristaux, formant une roche plutonique : le granit.

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140 millions d’années plus tard, il y a 500 000 ans, Homo heidelbergensis habite cette étendue de pierre grise couverte de conifères. L’être humain chasse le mammouth et utilise le feu.

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500 000 ans plus tard, il y a 6 500 ans, homo sapiens, se sédentarise sur ces terres qui surplombent désormais l’Océan Atlantique.

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Il élève des mammifères, pêche, maçonne le granit pour composer des nécropoles, cultive la terre, construit des murs de pierre pour séparer les parcelles, pave des routes, fabrique des maisons de granit et cueille du jonc pour les couvrir, récolte le goémon pour amender ses champs, file le chanvre pour tisser des voiles. Il érige des phares et crée des images en mémoire des naufrages. Des peintres et des écrivains affluent pour habiter ce paysage et s’en nourrir. Ils investissent la pointe quelque temps et repartent les valises pleines d’images et de mots.

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La péninsule a accueilli une grande guerre. Les paysans abandonnent leurs champs. 350 hommes occupent le rocher et protègent leur conquête. Ils fabriquent de nombreuses casemates dans la lande: des lieux de vie, une armurerie, des antennes radiophoniques. La guerre a fini, Marie Le Coz construit un hôtel pour les curieux qui viennent prendre un bain d’air. Et pour les curieux, on dessine un parking, on construit un centre commercial. La peau de lande finit de se déchiqueter sous les pas du million de visiteurs annuel. Les oiseaux désertent, le vent soulève le granit en poussière. On veut construire une centrale nucléaire. Ici, c’est pratique, il n’y a pas grand monde, les cheminées peuvent arriver par bateau, on a suffisamment d’eau pour refroidir les réacteurs. Au bout du monde on ne dérangera personne. Mais les capistes n’ont pas voulu. Ils reprennent leur terre en main.

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Le centre commercial et l’hôtel sont démolis. Les casemates sont avalées par la lande. La loi de protection du littoral est votée. On ne construira plus sur la pointe que pour la mettre en valeur dans ses composantes environnementales, paysagères, sociales et économiques, après enquête publique. On conçoit un lieu de réception pour les touristes bien protégé des vents et des regards. La péninsule est classée Grand Site de France. Elle devient un paysage emblématique de la culture bretonne. Le troisième site naturel le plus visité en France après le Cirque de Gavarnis et le Mont St Michel. 20 ans plus tard, aujourd’hui, la lande repousse, elle absorbe les murs, les fossés, les chemins que l’on n’emprunte plus. Les oiseaux sont revenus. Le granit est toujours là, en chaos et l’océan s’y fracasse encore.

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Conclusion

Cette accumulation chronologique nous permet de nous rendre compte d’une chose importante dans l’histoire de ce territoire. La Pointe du Raz, jusqu’au 20e siècle, était une terre nourricière. Mais depuis le 19e siècle, l’émergence du mouvement culturel romantique, et l’essor du tourisme, le rôle esthétique du paysage a totalement pris le dessus sur son rôle nourricier. La péninsule était une terre habitée, elle est aujourd’hui une terre regardée. Classée, protégée, sanctuarisée. L’extraordinaire chaos de roche et les 150 hectares de landes qui le séparent du continent ont été sanctuarisés. Le regard esthétisant a offert une fierté considérable aux capistes et c’est lui qui m’a amenée à travailler ici. Mais il s’agit aujourd’hui de se demander si la conservation est une fin en soi. Si les pratiques spécifiques au territoire n’ont plus aucun sens aujourd’hui.

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Chapitre 2

Le fruit du bout du monde

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1 Goémon

Sur les points hauts du Cap Sizun, au plus près de la falaise, on observe des fours à goémon. Ce que l’on appelle goémon, ce sont les diverses algues que l’homme cueille de la mer. Ces vestiges commémorent une pratique paysanne qui a eu cours du 17e au 19e siècle. Les agriculteurs vivant près de la côte, recueillaient au printemps les diverses algues échouées sur le rivage pour amender leurs terres, nourrir leurs bêtes, ou les transformer en « pain de soude ». La récolte se faisait à la main sur le rivage ou en bateau.

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Les algues étaient acheminées sur les points haut exposés aux vents au moyen de treuils ou en charrettes.

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On ĂŠtalait les algues sur les landes, les dunes, les rochers pour les faire sĂŠcher.

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Les cueilleurs plaçaient ensuite le goémon sec dans des fosses creusées dans le sol pour le faire brûler.

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Au lendemain des journées de cuisson, les agriculteurs récupéraient les blocs de pâte durcie en pains de soudes.

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Ils les vendaient ensuite aux manufactures locales qui s’en servaient pour fabriquer du savon, du verre, ou encore des produits pharmaceutiques à base d’iode. La récolte du goémon est aujourd’hui inscrite à l’inventaire du patrimoine culturel immatériel en France.

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Depuis les années 60, les végétaux marins sont essentiellement récoltés avec des bateaux à fond plat qui naviguent en moyenne à 1 kilomètre des côtes. Ces bateaux très spécifiques permettent aux goémoniers d’approcher les zones rocheuses sur lesquelles se fixent les algues. Ils sont embarqués d’un scoubidou, sorte de bras articulé emmanché d’un crochet qui plonge dans l’eau et arrache les algues en tournant sur lui-même. La récolte se fait sur 5 mois, de la mi-mai à la mi-octobre, de la fin de croissance à la repousse des laminaires. L’activité est donc saisonnière.

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Ces légumes de mer s’appellent

Dulse

Nori

Tali

Laitue

Haricot

Elles ont un goût de noisette iodé, de thé fumé, de champignon séché. 68


La France est aujourd’hui la première productrice d’algues en Europe. 90% de cette production est extraite sur le littoral breton, particulièrement en mer d’Iroise, le plus grand champ d’algues européen. Il s’agit donc d’une activité spécifique au territoire. La majeure partie des algues récoltées est destinée à la fabrication d’engrais, d’aliments animaliers, de combustibles et d’emballages. Elles sont aussi utilisées en pharmacie, cosmétique et agroalimentaire. Depuis la fin du 20e siècle, on récolte aussi des algues pour la consommation directe. Leur principal atout réside dans leur teneur en protéines, parfois supérieur à la viande. Ainsi, dans un contexte de surpopulation mondiale, de chasse à l’espace, et de lutte contre la pollution, les algues comestibles se placent au cœur des enjeux alimentaires, économiques et écologiques mondiaux. Et ce qui représente à l’heure actuelle un marché de niche peut devenir rapidement un enjeu du 21e siècle.

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2 Intentions

Puisque le classement de la Pointe du Raz reconnaît le site comme levier de développement local, impulsant à travers le patrimoine une dynamique économique du territoire. Puisque selon le Code de l’urbanisme L121, des aménagements légers peuvent être implantés lorsqu’ils sont nécessaires à la mise en valeur économique du site. Puisque la loi du littoral permet la construction et l’installation d’activités économiques exigeant la proximité immédiate de l’eau. Je propose d’implanter sur la Pointe du Raz une manufacture dédiée à la transformation des algues comestibles. Elles seront récoltés, séchées, cuisinées et commercialisées sur place.

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Avec ce programme, mon intention n’est pas de désanctuariser le site. Mon intention est de restituer à ce territoire un rôle nourricier. Par ailleurs, cette entreprise de transformation d’algues me permet de tresser un lien entre le passé et l’avenir, de faire d’une terre que l’on a habitée, une terre que l’on habite encore. Et par ce qu’il s’agit de transformer sur terre un produit de la mer, cette entreprise me permet de concevoir un lieu de rencontre entre les deux géants du paysage qui s’affrontent, le monde émergé et le monde immergé. Entre terre et mer, le projet que je vous présente aujourd’hui valorise la dualité du paysage de la pointe du raz, et enrichit sa puissance esthétique.

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3 La Manufacture

Pour cette manufacture, on a besoin d’un port et de vent. Elle s’implante donc dans un creux de topographie, 35 mêtres audessus de l’océan.

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Entre le petit Port de Bestrées, au sud, et la maison touristique, au nord. Le port permet de recevoir un petit goémonier de 10 mètres par 4. Du printemps à l’automne, il approvisionne la manufacture de 200 kilogrammes d’algues humides par jour.

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La récolte est déchargée en filet et transportée à la manufacture grâce à un treuil dessiné selon le principe du téléphérique. En parallèle, un système de pompe achemine de l’eau de mer vers le bâtiment.

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Dans ce repli façonné par le temps, la peau aride se soulève et laisse apparaître de longs murs de pierres sèches similaires à ceux que les paysans façonnent pour préserver leurs champs. Mur de granit, toiture végétale.

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Ancré dans la falaise, semi-enterré, il offre aux travailleurs la sensation d’habiter la roche, un écrin sans pareil pour cohabiter avec l’océan.

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Ce corps de pierre couvert de fougères est fendu par le vent et traversé par le paysage. Cette modeste usine forme un tout, à plan carré, fonctionnel et cohérent, de 36 mètres de côté. Son homogénéité est interrompue par une faille de métal, conçue pour que les vents s’y engouffrent et par un glissement de roche à l’intérieur du damier.

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5 12 11 6 4 3 2 7

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N


La manufacture est composée d’Ouest en Est de l’humide au sec, du brut au raffiné et du Nord au Sud, du sombre au lumineux. Elle est agencée à partir d’une trame de 2 mètres par 2 correspondant au passage de 2 chariots de manutention. Cette trame est structurante pour le projet parce qu’elle garantit un confort de travail, notamment dans les espaces de circulation.

1 - Atelier de tri 2 - Stockage humide 3 - Nef de déshydratation 4 - Stockage sec 5 - Atelier de broyage 6 - Atelier de conditionnement 7 - Laboratoire de transformation 8 - Espace de détente 9 - Vestiaires 10 - Bureaux 11- Quai de livraison 12 - Stockage produit fini 13 - Espace de vente et de dégustation 87


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Accueillies sur la falaise, les algues sont déchargées sur le quai, devant l’atelier de tri où elles sont lavées à l’eau de mer et réparties selon leurs variétés et leurs qualités. Puis elles sont stockées humides dans des cuves. À l’abri de la lumière, elles peuvent se conserver plusieurs mois. La plupart d’entre elles sont séchées. Les autres sont commercialisées crues.

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2

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Le séchage choisi pour cette manufacture se fait de manière douce et naturelle, par le vent, à l’abri du soleil et des embruns. Dans cette nef de métal qui ceint le bâtiment en deux, les plantes sont accrochées à des claies, les unes au dessus des autres. Ici, les vents locaux, soufflent jusqu’à 50 kilomètres par heure par beau temps. Pendant 3 jours, les algues ondulent au vent, l’eau s’évapore.

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5 12 11 6 4 3 2 7

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2

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N


Une fois sèche, elles sont entreposées dans la réserve, espace sombre aux murs imprégnés d’iode. Certaines sont directement broyées, emballées et commercialisées. Les autres sont cuisinées. Le laboratoire de transformation se situe au centre du bâtiment. Il s’ouvre à la lumière du matin, sur la cour intérieure. Huit personnes peuvent y travailler en même temps. Chaque poste est autonome et permet d’accéder à la chambre froide et à l’épicerie. Les ouvriers bénéficient d’un lieu de repos, attenant au bureau et au vestiaire, entièrement tourné vers le Sud, vers la côte, vers le paysage grandiose de l’océan qui lèche la roche.

1 - Atelier de tri 2 - Stockage humide 3 - Nef de déshydratation 4 - Stockage sec 5 - Atelier de broyage 6 - Atelier de conditionnement 7 - Laboratoire de transformation 8 - Espace de détente 9 - Vestiaires 10 - Bureaux 11- Quai de livraison 12 - Stockage produit fini 13 - Espace de vente et de dégustation 93


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Seconde brèche, la roche pénètre le damier avec sa peau de lande goulue et désorganisée. Ici la pluie rebondit, le vent s’intensifie. Affranchi du volume compact par la cour, le volume qui s’étire vers l’océan et la lumière accueille l’espace de vente et de dégustation.

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2

6

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L’espace de vente et de dégustation est le lieu où l’équipe met en valeur son ouvrage. Une partie du million de visiteurs annuel, mais aussi les locaux, viennent acheter ici le produit d’un territoire, le fruit du bout du monde.

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2

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Épilogue

Ce travail m’a permis de me concentrer sur un paysage qui me touche, et de poser dessus un regard agrandi. Pendant mes études dans cette école, j’ai appris que notre manière d’occuper l’espace correspond à notre perception du monde. Chaque mur porte un sens. Le projet que je vous ai présenté, a été l’occasion pour moi de souligner et de questionner cette relation à notre environnement. C’est là-dessus que je me suis appuyée pour définir une posture. Ma posture aujourd’hui est sociale parce que j’ai observé notre manière d’investir ce paysage. J’ai questionné notre attitude et propose à travers ce projet d’aller au-delà : à tourisme et écologie, j’ajoute histoire et habitants. Ma posture aujourd’hui est spatiale, parce qu’en ajoutant une étape à la succession de seuils déjà en place sur la pointe, je propose ergonomie, simplicité et dissimulation. Des choix qui me semblent cohérents, vis-à-vis du programme et des spécificités du lieu. Le regard posé par l’architecte montre ici qu’il peut créer des liens dans l’histoire des représentations et des usages. En matérialisant la pensée, l’architecture permet de faire, d’une terre que l’on regarde, une terre que l’on habite.

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Commentaires du Jury

Xavier Leibar : «Un travail abouti, une démonstration équilibrée et probante, un style percutant et incisif» Françoise Blanc : «Un très bel exposé, des choix justes, une compréhension profonde du territoire.» Olivier Chadoin : «J’aurais aimé apercevoir l’imaginaire qui nourrit les visions esthétiques du lieu.» Aline Rodrigues Lefort : «Rigueur, précision et bienveillance.» «Un niveau d’abstraction très fort.» «De très belles maquettes.» Agnès Berland Berthon : «Une véritable posture d’architecte. Le projet va bien au-delà du bâtiment en lui-même. Peu de gens osent» Christophe Gautier : «Remarquable! J’aime que l’on soit sorti des références habituelles.» «Votre discours est efficace, c’est assez rare. Si j’étais maire, je serais convaincu.» 101


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Annexes

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Maquette de la Pointe du Raz 1:5000, MDF fraisĂŠ. 105


Maquette du Port de BestrĂŠe 1:1000, Carton bois et contreplaquĂŠ de peuplier. 106


Maquette de la Manufacture 1:200, MDF fraisÊ et feuille d’aluminium. 107


En Bretagne

A la rencontre de l’océan

La Pointe du Raz 1:5000

N

Une pratique séculaire

Une terre nourricière

Palmaria Palmata

Ulva Lactuca

Porphyra Umbilicalis

Aujourd’hui sanctuarisée

La récolte des algues

Acheminées sur les points exposés aux vents

Elles étaient mises à sécher au soleil

Panneau de MDF imprimé 85/85cm 108


Nef métallique

Toiture végétalisée

Parois de granit

D’

C’

B’

A’

Un volume de pierre fendu par un volume de métal

1 - Atelier de tri 2 - Stockage humide 3 - Nef de déshydratation 4 - Stockage sec 5 - Atelier de broyage 6 - Atelier de conditionnement 7 - Laboratoire de transformation 8 - Espace de détente 9 - Vestiaires 10 - Bureaux 11- Quai de livraison 12 - Stockage produit fini 13 - Espace de vente et de dégustation

E’

5

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6

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4

3

2

Ancré dans ce repli façonné par le temps 1:1000

N

7

E

13

9

8

10

Dans une composition fonctionnelle 1:200 D

C

B

Une manufacture de transformation d’algues comestibles 1:1000

A

1

N

Panneau de MDF imprimé 85/85cm 109


L’atelier de tri - Coupe AA’ - 1:200

Émergeant du sol la manufacture s’ouvre au vent et au paysage 1:200

La nef de déshydratation - Coupe BB’ - 1:200

1 - Végétalisation 2 - Substrat 3 - Drainage et filtration 4 - Membrane EPDM 5 - Support OSB 6 - Couvertine

6

1

N

7 8

2 3 54

9 12 13

7 - Enveloppe acier galvanisé 8 - Structure acier galvanisé 9 - Paroi acier galvanisé

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16 - Revêtement 17 - Dallage béton 18 - Chape béton 19 - Étanchéité 20 - Drain 21 - Semelle filante superficielle

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10 - Maçonnerie granit 11 - Revêtement intérieur perspirant 12 - Par-vapeur 13 - Isolation laine de bois 14 - Plafond technique 15 - Maçonnerie béton

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Le quai de livraison - Coupe CC’ - 1:200

Grâce à une structure mixte- Coupe EE’ 1:50

48°02’25’’Nord 4°44’28’’Ouest Pour mon travail de fin d’études, je suis partie d’un site, la Pointe du Raz. C’est une péninsule de granit recouverte d’une lande aride située à l’extrême-Ouest de la Bretagne. La première caractéristique qui m’a intéressée sur ce territoire, est qu’il représente la rencontre brutale entre deux énormes masses : le continent et l’océan. La seconde caractéristique qui m’a intéressée, est que l’homme pratique aujourd’hui essentiellement ce lieu comme un espace touristique alors qu’il est jalonné de ruines militaires et agricoles. Je me suis donc penchée sur l’accumulation des pratiques de l’homme sur la Pointe du Raz. J’ai alors constaté que la Pointe du Raz était, jusqu’au 20e siècle, une terre agricole. Mais depuis le XXe siècle, la lande a été gravement endommagée par le tourisme. Le site a donc bénéficié d’un programme de sauvegarde et a même été classé grand site de France. Classé, protégé, sanctuarisé. L’extraordinaire chaos de roche et les 150 hectares de landes qui le séparent du continent ont été sanctuarisés.

L’espace de vente et de dégustation - Coupe DD’ - 1:200

À partir de là, je me suis demandé si la conservation est une fin en soi. Quelles pratiques peuvent encore relier passé et futur ? Quels usages peuvent valoriser la dualité de ce paysage, créer un lien entre le continent et l’océan ? Je me suis donc intéressée à une pratique spécifique au territoire : la récolte des algues. Elle se faisait à la main sur le rivage ou en bateau. Les algues étaient acheminées sur les points exposés aux vents alentour au moyen de treuils ou en charrettes. On les étalait sur la lande, les dunes, les rochers pour les faire sécher. Les paysans s’en servaient pour nourrir leurs bêtes et amender leurs champs. La récolte du goémon est aujourd’hui inscrite à l’inventaire du patrimoine culturel immatériel en France. Depuis les années 60, on récolte l’essentiel du goémon avec des bateaux à fond plat qui naviguent en moyenne à 1km des côtes. La Bretagne est aujourd’hui la première productrice d’algues en Europe. La majeure partie des algues récoltées est destinée à la fabrication d’engrais, d’aliments animaliers,

de combustibles et d’emballages. Elles sont aussi utilisées en pharmacie, cosmétique et agroalimentaire. Depuis la fin du XXe siècle, on récolte aussi des algues pour la consommation directe. Leur principal atout réside dans leur teneur en protéine, parfois supérieur à la viande. Ainsi, dans un contexte de surpopulation mondiale, de chasse à l’espace, et de lutte contre la pollution, les algues comestibles se placent au cœur des enjeux alimentaires, économiques et écologiques mondiaux. Et ce qui représente à l’heure actuelle un marché de niche peut devenir rapidement un enjeu du XXI e siècle. Pour ce projet, je propose d’implanter sur la Pointe du Raz une manufacture dédiée à la transformation de ces algues comestibles. Cela me permet de restituer à ce territoire un rôle nourricier et de tresser un lien entre les deux géants du paysage, le continent et l’océan. Les algues sont récoltées, séchées, cuisinées et commercialisées sur place. On a donc besoin d’un port et de vent.

La manufacture s’implante dans un creux de topographie, 35m au-dessus de l’océan, entre le petit port de Bestrée, au Sud, et la maison touristique, au Nord. Cette modeste usine forme un tout, à plan carré de 36m de côté, fonctionnel et cohérent. Son homogénéité est simplement interrompue par une faille de métal, conçue pour que les vents s’y engouffrent afin de sécher les algues de manière douce et naturelle. La manufacture est composée d’Ouest en Est, de l’humide au sec, du brut au raffiné et du Nord au Sud, du sombre au lumineux. Elle est agencée à partir d’une trame de 2m par 2m correspondant au passage de 2 chariots de manutention. Cette trame est structurante pour le projet, car elle garantit un confort de travail. Dans ce repli façonné par le temps, sous la discrétion d’une toiture végétalisée, apparaissent de longs murs de pierres sèches similaires à ceux que les paysans façonnent pour préserver leurs champs. L’architecture matérialise un point de rencontre entre le vent et le paysage, entre les travailleurs et l’océan.

Marion FILÂTRE - Projet de Fin d’Études - École Nationale Supérieure d’Architecture et de Paysage de Bordeaux - Encadrée par Fabienne Darricau - Février 2017

Panneau de MDF imprimé 85/85cm 110


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Remerciements

Dans un premier temps je remercie les enseignants de l’école d’architecture de Bordeaux. En effet, leur posture pédagogique vis à vis du projet de fin d’études m’a permis de développer une démarche créative avec beaucoup de liberté, sur un territoire qui me tient à cœur. Dans un second temps, je remercie Fabienne Darricau pour le regard incisif et bienveillant qu’elle a porté à l’égard de mon travail. Elle m’a donné confiance et m’a permis de m’assurer de mon autonomie dans le processus de projet. Dans un troisième temps, je remercie les membres du jury: Xavier Leibar, Françoise Blanc, Olivier Chadoin, Aline Rodrigues Lefort, Agnès Berland Berthon et Christophe Gautier, pour la pertinence de leurs regards et pour la richesse de leurs retours. Ils m’ont permis de clore un cycle avec la sensation d’avoir été reconnue et de débuter un nouveau chapitre sur une note particulièrement positive. Enfin, je remercie Serge Agoston pour la qualité de son accueil dans l’atelier maquette. Merci aussi à Nicolas, Esther, Kenza et Erwan pour leur présence et leurs conseils. Merci Dounia, Merci Moun, Merci Tad. 113



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