L’oasis ou l’enjeu de la limite territoriale appliqué
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Mathilde Rieu _Notice de PFE_2015-2016_Dem SPAA_ B. Roueff
Mathilde Rieu # +33631688015 # mathilde.rieu@lyon.archi.fr # 13, Rue Molière 69006 LYON # 2
# DEM SPAA Stratégies et Pratiques Architecturales Avancées # Projet de fin d’étude 2015-2016 # ENSAL # Directeur d’étude: Boris Roueff # Autres enseignants : M. Bigarnet B. Bregman N. Tchilingaryan # Soutenance : Jeudi 17 Juin 2016 01
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Remerciements J’aimerais remercier mon directeur d’étude Boris Roueff pour sa patience, ses encouragements, ses mises en garde pertinentes et ses sages conseils; ainsi que les autres enseignants du DEM SPAA (s9 et s10) qui par leurs critiques ont su me faire avancer et faire évoluer le projet, j’espère dans le bon sens.
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Préambule Dans le cadre du DEM SPAA : Stratégies et Pratiques Architecturales Avancées, le sujet de projet proposé pour l’année 2015-2016 consistait en l’élaboration d’un projet architectural et urbain permettant d’amorcer et d’accompagner les futures mutations et développements des périphéries de la métropole lyonnaise situées dans la Vallée de la chimie. Le premier travail d’analyse du site, mené au premier semestre, nous a permis de construire et d’aiguiser notre positionnement face à ce territoire - composé de villes mais aussi d’espaces délaissés et conflictuels - et de formuler les prémices de l’intervention urbaine à l’origine de ma proposition. La problématique principale qui caractérise la démarche du DEM SPAA suggère que l’on s’interroge sur la manière d’investir ce territoire souvent peu propice voire hostile : comment l’habiter ? Y implanter un cadre de vie acceptable ou mieux agréable ? Les réponses apportées, variables selon l’axe d’approche du site doivent satisfaire les enjeux établis à différentes échelles. C’est donc cette relation complexe entre le contexte et le projet architectural qui est au cœur de notre étude et que je vais interroger d’une part, à travers la notion d’habiter et d’autre part, à travers la projection imaginaire que reflète la proposition architecturale finale. Qu’est-ce qu’habiter la vallée de la chimie ? Comment inverser la vision (négative générale) qu’on a de ce territoire ? Entre désir de revalorisation, réalité du risque et contraintes diverses, quelles actions mettre en place ? Enfin, quelle est la pertinence de ces lieux générés ?
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Sommaire
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– Situation et méthodologie
Une analyse de territoire orientée, des outils de 01 –lecture particuliers – L’enjeu d’une zone de frottement identifiée : le 02 bourg de Saint Fons
# Les enjeux à Saint Fons # Transformer ces situations géographiques de proximité en situations urbaines
– Amorcer le dépassement de la limite de la voie 03 ferrée
# Des critères d’urbanité particuliers # Questionner le déterminisme du contexte # Quelle interprétation dans les logements?
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Situation et mĂŠthodologie
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VALLEE DE LA CHIMIE 10
Le site étudié pour notre projet de fin d’étude s’étend à toute la Vallée de la chimie. Autrefois appelée ‘ Couloir de la Chimie ’, cette zone majoritairement industrielle, réputée dans le domaine de la chimie et de la pétrochimie (raffinerie de Feyzin), s’inscrit dans le paysage du grand territoire lyonnais et prend place entre les villes de Lyon, Vienne, Saint Etienne (et s’étend jusqu’à Givors). Une relation d’interdépendance s’est établie entre ces quatre entités. En faisant office de rotule au milieu des trois villes, la vallée de la chimie jouit des bénéfices que génèrent l’attractivité et le pouvoir de ces métropoles mais en contrepartie, elle les enrichit et véhicule leur image de marque à l’échelle nationale et européenne, notamment grâce à son vaste réseau d’infrastructures (autoroute A7, Rhône, via Rhôna, voie ferrée …). On peut se questionner alors sur l’identité même de ce territoire traversé, qui n’est pas qu’une simple prolongation industrielle de la métropole lyonnaise.
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SITUEE ENTRE TROIS VALLEES 12
Dans l’imaginaire collectif, et celui des lyonnais particulièrement, la Vallée de la chimie symbolise un paysage dégradé et inhospitalier, or elle représente un véritable enjeu pour la métropole de Lyon - qui peut se vanter d’avoir à proximité une zone industrielle toujours active - si toutefois le territoire était repensé afin de s’inscrire dans la logique (économique, nouvelles industries) métropolitaine. Le travail effectué par OMA, sur demande de la métropole de Lyon, amorce cette volonté de requalification du territoire sans dissoudre pour autant sa zone industrielle. Cette étude a été pour nous une base de données et de connaissances qui ont été le point de départ de notre propre réflexion, interprétation du site et positionnement critique par rapport aux propositions d’OMA. Ainsi, nous avons abordé le territoire selon un certain angle et en prenant le parti de proposer un projet urbain cherchant davantage à valoriser l’existant plutôt qu’à formuler une solution générique, qui ne serait pas efficace sur le long terme. Cette posture et le constant aller-retour entre les différentes échelles du territoire, du projet urbain et de la forme architecturale finale nous ont permis de redessiner un paysage métropolitain (cohérent entre les multiples échelles) en s’appuyant sur des éléments ancrés et conservés. Pour pouvoir interroger la requalification de la Vallée de la chimie et par conséquent, les périphéries de la métropole lyonnaise, il faut concevoir que ces territoires présentent un réel enjeu pour l’urbanisation contemporaine. Une première analyse nous a permis de collecter les composants, les éléments du territoire à revaloriser, en vue de faire émer-
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ger d’autres intérêts et d’activer un certain imaginaire plus attrayant. Dans un second temps, nous avons tâché d’identifier des sites capables d’accueillir des projets où développer autre chose qu’un tissu résidentiel banal, des lieux propices à l’élaboration de la ville contemporaine. En effet, le caractère particulier de ces territoires périphériques engendre une inefficacité des outils d’urbanisme traditionnels que l’on pourrait appliquer à la ville centre (densité, continuité urbaine notamment). Ces territoires poussent au contraire davantage à une innovation tant dans la lecture que l’on se fait du site que dans la projection et l’élaboration du projet urbain.
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Une analyse de territoire orientĂŠe, des outils de lecture particuliers
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LES INFRASTRUCTURES 18
PPRT 19
TOPOGRAPHIE 20
A la suite de notre analyse, nous avons choisi d’axer notre lecture du territoire par rapport à la thématique des limites. La Vallée de la chimie présente trois limites territoriales identifiables auxquelles nous avons pu nous confronter dès notre première visite du site : les limites infrastructurelles (autoroutes, nationales, fleuve, voie ferrée), les limites engendrées par la topographie (balmes, lit du Rhône) et les limites fictives instaurées par les Plans de Prévention des Risques Technologiques (PPRT) qui s’étendent autour des industries dites dangereuses et fixent des périmètres dans lesquels les conditions pour construire sont très strictes et restrictives, quand toutefois, l’implantation dans la zone est autorisée. Ces limites territoriales qui parcourent la totalité du périmètre d’étude, montrent aujourd’hui l’image d’un site traversé, fragmenté et créent un sentiment de rupture ; mais c’est pour ces raisons là, justement, que nous avons voulu faire de ces contraintes, des leviers générateurs d’innovation dans l’élaboration du projet territorial. 21
TERRITOIRE ARCHIPEL 22
Vous l’aurez compris, le territoire de la Vallée de la chimie est une superposition de limites franches, physiques ou abstraites : l’infrastructure, la topographie, le PPRT, qui définissent sa morphologie urbaine et son développement futur, mais lui donnent surtout l’apparence d’un territoire morcelé en une multitude d’archipels. Selon cette approche, en découpant le site selon ces limites et en croisant ces données avec les trois dynamiques qui constituent le paysage de la Vallée de la chimie (les thématiques majeures du site) : Industrie, Habitat et Nature, nous avons obtenu toute une collection d’îlots et nous avons pu ainsi qualifier les différentes ruptures provoquées. En se penchant plus particulièrement sur la limite infrastructurelle, on se rend compte que la problématique qu’elle soulève, coïncide avec les deux enjeux majeurs de la Vallée de la chimie. 23
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Le site sur lequel nous sommes amenés à agir affiche une relation complexe entre une vallée productive certes (industries), mais aussi une vallée habitée. En effet, ces deux concepts distincts qui caractérisent le site de la Vallée de la chimie n’entrent pas en interaction et renforcent cette image de territoire fragmenté, scindé. L’objectif principal nécessaire est alors de retisser des liens entre ces deux dynamiques et d’articuler ainsi échelle territoriale/globale et échelle locale. La densité de la géographie artificielle que constituent les infrastructures est telle que, dans le paysage de la Vallée de la chimie, l’impact physique et imaginaire de ces faisceaux est aussi fort que celui du Rhône, géographie naturelle et élément majeur du site. Cependant, elle induit une certaine logique dans le territoire et structure, hiérarchise le grand paysage, c’est pourquoi l’omniprésence de l’infrastructure et les limites qu’elle génère me semble intéressant. La complexité consiste à ne pas considérer l’infrastructure comme un simple paysage artificiel traversé dont l’enjeu serait purement technique (desservir) au prix d’un impact mal maîtrisé ou nuisible sur l’urbain, mais de la traiter comme une autre forme de naturalité, avec laquelle composer. Il est question ici d’amener à un renversement du regard et du jugement visà-vis de l’infrastructure comme cela s’est déjà produit depuis une vingtaine d’années maintenant à l’égard du patrimoine industriel, par exemple. 27
COMBINAISON DES LIMITES 28
ARTICULER echelle locale et métropolitaine
RETISSER des liens entre vallée productive et vallée habitée
RE-ENGAGER un dialogue entre les grands paysages
La limite créée est, dans ce territoire, un véritable enjeu pour recréer du lien entre la vallée habitée (bourgs, logements, diverses activités,…) et ces infrastructures. Pour comprendre cette relation complexe à l’échelle locale, il suffit d’analyser les rapports des bourgs à la limite infrastructurelle : comment ceux-ci les gèrent et s’ils les intègrent ou non. Dans la perspective d’un projet urbain sur ce territoire, nous nous sommes également demandée quels seraient la nature, la qualité, le caractère d’un projet architectural qui voudrait se connecter à cette infrastructure. Quelle pertinence du projet ? Quels apports ? Ainsi, nous avons abordé le site, en utilisant les différentes limites qui conditionnent le mode de vie et l’urbanisation du lieu, comme grille de lecture de ce territoire archipel complexe, puis nous avons établi des rapprochements entre les problématiques posées par les grandes limites territoriales et les enjeux majeurs de la Vallée de la chimie que nous avons déjà formulés . La nécessité de retisser un lien entre les deux entités constitutives du territoire (zone industrielle, zone habitée) afin de renouer les échelles métropolitaines et locales laisse entrevoir la perspective d’associer ces deux points forts de la vallée qui aujourd’hui n’interagissent pas. De fait, il nous a naturellement paru logique de se concentrer sur l’intégration de ces limites et d’étudier en profondeur cette proximité géographique entre les deux dynamiques constitutives de la vallée.
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NOUVELLE GARE DE SAINT FONS
L’ANCIEN BOURG DE FEYZIN
Nous avons utilisé ces limites comme leviers pour élaborer des stratégies thématiques d’intervention sur le territoire. L’idée étant de faire émerger de ces contraintes, de vrais outils pour la conception du projet urbain et de transformer des situations géographiques de proximité en situations urbaines performantes. Cette proximité géographique est très évidente notamment dans les bourgs de Feyzin et Saint Fons, ce qui explique notre attention particulière sur ces deux villes périphériques et laisse entrevoir la possibilité de proposer quelque chose d’intéressant, questionnant un nouveau rapport aux limites territoriales. Deux sites d’intervention sont retenus : la nouvelle gare de Saint Fons et l’ancien bourg de Feyzin. Cependant, la méthode d’action pour générer le projet urbain n’est pas la même, selon le site. Les membres du groupe initial d’analyse qui ont décidé de travailler sur Feyzin, ont choisi de questionner l’intégration de la limite, en intervenant plutôt sur les espaces justement contraints par ces limites (action sur une surface). Pour le cas de Saint Fons, nous avons jugé plus intéressant d’agir directement sur la limite même qui sépare radicalement les deux visages de la Vallée de la chimie et scinde le bourg en deux (action ciblée, plus ponctuelle). 31
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L’enjeu d’une zone 02 frottement identifiée :
de le bourg de Saint Fons
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COMMUNE DE SAINT FONS 34
# Les enjeux à Saint Fons
Située en dessous de la confluence entre la Saône et le Rhône, la ville de Saint Fons occupe une place charnière dans le territoire et constitue l’entrée sud de la métropole lyonnaise. Deux zones géographiques distinctes composent le paysage Sainfoniard : la plaine du Rhône, à l’ouest et le plateau au-dessus des balmes qui s’étend à l’est et au sud. La ville de Saint Fons est un territoire traversé par des infrastructures dites à ‘haut débit’ (circulation forte et rapide) nombreuses et variées : l’autoroute A7, la route nationale 7, des voies ferrées (trafics voyageurs et marchandises), le boulevard Laurent Bonnevay ou encore le boulevard urbain sud (BUS). Cette présence imposante de l’infrastructure et la topographie particulière du site décomposent le territoire en trois grandes entités : - La zone habitée de la plaine, rattachée à la logique urbaine des périphéries de la première couronne autour de la métropole lyonnaise. On retrouve, dans cette zone, le centre-ville de Saint Fons, chargé de l’histoire industrielle du site, offrant une qualité et un art de vivre qui lui sont propres et construit dans la continuité du tissu lyonnais, au plus près de la zone d’activité (premières constructions au croisement de la RN7 et de la rue Carnot, infrastructure transversale reliant Vénissieux au Rhône). A l’exception des nouvelles constructions, le parcellaire rectangulaire est aligné sur l’espace public et ses hauteurs restent assez basses. Le centre-ville offre aussi une mixité programmatique : logement, artisanat, commerces, petites industries toujours en activité, etc. On y retrouve également les quartiers de l’Arsenal au nord (habitat collectif en rupture avec le maillage du centre-ville) et de Chassagnon, au sud. 35
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- La zone d’activité, également située dans la plaine, est délimitée à l’ouest par le Rhône et à l’est par la voie ferrée. Rattachée à la logique de l’activité de la Vallée de la chimie, elle confère à Saint Fons le caractère de bourg industriel et constitue un bassin d’emploi composé d’entreprises internationales de pointe. Marqueur de l’entrée sud de l’agglomération lyonnaise, elle occupe toute la partie au bord du fleuve et s’étend au-delà de la commune de Saint Fons (jusqu’à Givors). Le PPRT mis en place autour de ces industries, sur le site de Saint Fons notamment, empiète sur les zones urbaines. - Le plateau des ‘ Clochettes ‘, rattaché à la logique urbaine des plateaux du sudest et en rupture avec l’urbanisation traditionnelle. cette zone habitée se situe en pleine zone de PPRT. Ainsi, la ville de Saint Fons nous a paru être le lieu le plus représentatif de notre approche du site car elle regroupe l’ensemble des enjeux répertoriés à l’échelle du territoire et propose un condensé de toutes les problématiques de la Vallée de la chimie. Les enjeux territoriaux majeurs que sont la relation entre vallée habitée et la vallée productive, le rapport au grand paysage, ainsi que l’articulation des échelles locales et métropolitaines, se retrouvent à l’échelle locale du bourg de Saint Fons. En effet, Saint Fons est la périphérie lyonnaise située dans la Vallée de la chimie qui présente la proximité la plus forte entre la zone d’activité industrielle et les usages liés à l’habitat. La question de son rapport aux grandes limites territoriales est alors pertinente et primordiale surtout qu’à ce jour, Saint Fons est une commune entièrement urbanisée ; les limites questionnent donc l’isolement et le développement à venir de ce territoire.
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INFRASTRUCTURE / Saint Fons est enclavé entre l’autoroute A7, à l’ouest et le boulevard Laurent Bonnevay, à l’est. L’autoroute fait également office de limite au nord entre la périphérie et la métropole de Lyon. La voie ferrée qui dessert toute la vallée de la chimie jusqu’à Jean Macé et Perrache, scinde la commune de Saint Fons en deux et marque une rupture nette entre le bourg habité et la zone industrielle.
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PPRT / La présence de l’’usine Solvay, située à proximité, a engendré la mise en place du PPRT qui limite et complique le développement du bourg de Saint Fons vers l’ouest et vers le Rhône.
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TOPOGRAPHIE / La commune de Saint Fons n’est pas la plus touchée par les contraintes liées à la topographie des balmes, particulière au territoire de la Vallée de la chimie. C’est plutôt le décaissement créé au niveau de la voie ferrée qui provoque une différence topographique importante entre le bourg et la zone industrielle et qui rend les interactions contraignantes entre les deux tissus.
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# Transformer ces situations géographiques de proximité en situations urbaines
La contrainte devient levier pour l’élaboration du projet urbain A partir des limites que nous avons perçues comme de vrais moteurs - car elles sont très contraignantes et fragmentent le site de Saint Fons en plusieurs zones distinctes qui n’interagissent pas ou peu - nous avons établi des moyens d’action, des outils d’intervention pour créer des écosystèmes urbains capables d’articuler deux tissus, deux activités qui fonctionnent aujourd’hui en parallèle. La limite de l’infrastructure interroge les mobilités plus locales, le PPRT questionne le programme et la topographie suggère l’idée d’un paysage unique particulier à la Vallée de la chimie. La contrainte devient alors l’essence même du projet et permet de justifier notre discours de l’échelle territoriale de la Vallée de la chimie à l’échelle locale du bourg de Saint Fons. 45
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# PAYSAGE CONSTAT & POTENTIEL/ La commune de Saint Fons jouit de deux paysages particuliers : les Balmes d’un côté et le Rhône de l’autre. L’enjeu paysager à travers notre projet est de revaloriser ce grand paysage et de créer le lien entre les deux, grâce notamment à la création d’un parc urbain, à l’échelle de Saint Fons, s’inscrivant dans la continuité des berges du Rhône jusqu’à l’île de la Chèvre.
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REMARQUES / Le parc intervient dans le projet urbain comme une structure paysagère, un milieu vivant à l’échelle de la commune de Saint Fons qui vient renouer avec la géographie naturelle du site. Il apparaît comme une vaste continuité géographique, longeant le fleuve et, se substituant aux grandes infrastructures, il s’immisce dans les zones habitées, maintenant toujours ce lien avec le fleuve. Même si dans notre projet urbain, le parc est un élément défini et fixe de l’intervention, c’est aussi un paysage préalable avec lequel il faudra composer plus tard dans l’éventualité d’une extension du bourg de Saint Fons. Il n’a pas été pensé comme une limite à l’étalement urbain contemporain, au contraire, il suscite cette envie d’habiter dans le paysage et de dépasser la voie ferrée.
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# PROGRAMMES CONSTAT & POTENTIEL/ Aujourd’hui, l’axe commerçant du bourg n’est pas valorisé malgré sa position stratégique dans le centre-ville (proximité de la mairie, de l’Eglise, de la bibliothèque et du centre commercial, croisement avec RN7 venant de Lyon directement) et son lien direct avec les industries et le Rhône (rue Carnot). L’objectif serait alors de combiner les programmes existant à de nouvelles activités pour intensifier l’occupation de cette zone en y intégrant par exemple des services liés aux industries (sièges sociaux) de ‘’l’Appel des 30’’, implantées au Sud de la commune. La zone de PPRT mise en place autour de l’usine de Solvay, à proximité, a conditionné le développement de Saint Fons, notamment dans les îlots donnant sur la voie ferrée qui sont de ce fait, beaucoup plus dispersés et offrent une opportunité spatiale de développement (densification) du bourg. 49
PROFIL PERIURBAIN 50
PROFIL METROPOLITAIN
REMARQUE / Sur le site de Saint Fons, les enjeux programmatiques consistent à associer les usages relatifs à l’activité de la zone industrielle, aux modes de vie résidentiels du bourg et à promouvoir l’image d’une Vallée industrielle qui embauche et offre des lieux de mixité programmatiques (autour des espaces publics) répondant aux différents profils présents à Saint Fons.
PROFIL LOCAL à promouvoir
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# MOBILITE CONSTAT & POTENTIEL/ Comme indiqué précédemment, un des enjeux du projet urbain sur Saint Fons est de combiner les différents usages qui qualifient le site. Ainsi, la mobilité est une composante majeure dans l’élaboration d’espaces favorisant la mixité des personnes et des programmes et elle affirme la prise de position du site dans la logique métropolitaine, appliquée à l’échelle locale. Sur le site, le réseau de transport en commun est assez limité et se concentre sur le centreville (plus précisément les deux axes majeurs) bien qu’il desserve également la zone industrielle. C’est pourquoi dans le projet urbain nous avons, d’une part proposé de développer le système de transport en commun en multipliant les arrêts de bus de l’autre côté de la voie ferrée (+ implantation de modes doux) et d’autre part, nous avons fait le choix de déplacer la gare de Saint Fons à l’intersection entre l’axe Est/Ouest (axe reliant le Rhône à Saint Fons en passant par la zone industrielle) et la RN7 (qui concentre les transports en commun).
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GARE METROPOLITAINE
RELIER DEUX TISSUS
METTRE EN RESEAU LES ESPACES PUBLICS
GENERER UNE MIXITE DES PROGRAMMES
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Cette nouvelle gare, qui relie les gares de Jean Macé et de Perrache, propulse Saint fons sur la scène métropolitaine tout en créant par ailleurs des liens à l’échelle locale en proposant de nouvelles traversées. Sa position longitudinale au bord de la voie ferrée, côté bourg, lui confère la fonction d’articulation entre le cadre industriel et le cadre résidentiel, notamment en faisant le lien entre le réseau d’espaces publics du bourg et les espaces publics de la zone industrielle (parc, parkings, quais). La création de cette nouvelle gare génère également une mixité programmatique, en ouvrant sur de nouveaux programmes autour du nouveau quartier qu’elle va générer et offre l’opportunité de relier le niveau du bourg au niveau de l’infrastructure (quais) et de l’industrie. ARTICULER DEUX NIVEAUX DE SOL
CREER UNE EPAISSEUR QUI FAIT LIEN
REMARQUES/ La nouvelle gare, placée à la limite du bourg, assume la position de rupture générée par la voie ferrée, qui sépare de façon franche et un peu rude, les deux tissus composant le territoire de la Vallée de la chimie et de Saint Fons. Située à cet endroit stratégique, elle questionne sur les limites de la ville, la façon de reconsidérer la lisière de la commune de Saint Fons et laisse entrevoir de possibles interactions prometteuses entre les deux milieux. Quel que soit le type ou la forme de l’infrastructure, nous avons pris le parti de ne jamais tenter de la camoufler mais plutôt de la re-calibrer selon les échelles mises en jeu et d’en faire un vrai potentiel pour le site. L’enjeu de Saint Fons, au niveau de la nouvelle gare notamment, était aussi d’assurer une adéquation entre les continuités de la géographie naturelle et les différentes mobilités proposées (traversées qui reprennent la topographie naturelle du centre-ville).
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# ESPACES PUBLICS Pour amorcer le processus de transformation du territoire, il est nécessaire, selon nous, de retravailler les espaces publics et d’en générer d’autres à l’échelle du site (à partir des espaces libres présents sur le territoire, les délaissés industriels, les parkings, etc.) qui, reliés entre eux, finissent par créer une continuité paysagère représentative des deux tissus et structurant le développement physique de la commune de Saint Fons. L’espace public impacte sur le mode d’habiter et les usages du site, si bien qu’à terme, nous espérons que celui que nous proposons dans notre projet urbain pourra inverser le regard porté sur ce site complexe et transformer la zone de rupture entre le bourg et la zone industrielle, en zone dynamique, de renouveau. « L’espace public fait la ville. Engager une synergie urbaine à partir de l’amélioration des espaces publics est une option efficace et gratifiante lorsqu’il est impossible d’intervenir sur les espaces bâtis. Nombre de villes européennes ont trouvé un nouvel élan grâce à ce système de reconfiguration des surfaces et de restructuration des espaces ouverts à petite échelle (…) » Joan Busquets, Prix spécial de l’urbanisme 2011. 57
TROIS NIVEAUX D’ESPACES PUBLICS 58
Tout le défi du projet a donc été de trouver une façon pertinente d’intégrer l’infrastructure de la voie ferrée au nouveau réseau d’espaces publics et de créer un lien entre la topographie du bourg et celle de la zone industrielle, afin de « ré-enchanter » l’expérience de la traversée. Dans notre projet urbain, nous avons mis en place trois sols d’espaces publics reliant les différents lieux stratégiques pour le développement de Saint Fons. Le réseau piéton qui est ainsi mis en place, répond non seulement à la topographie du centre de Saint Fons, mais aussi au décalage créé par le décaissement de la voie ferrée entre le bourg habité et la zone industrielle. Ces trois sols, en lien chacun avec une des trois traversées créées autour de la gare, mettent en relation les différentes interventions menées dans le nouveau centre sainfoniard et offrent la possibilité de revaloriser l’ensemble des potentiels : ceux du bourg et ceux de la zone d’activité.
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COUPES SUR GARE ET TRAVERSEES 60
Résultat : une nouvelle centralité autour de la nouvelle gare Dans l’élaboration de notre projet urbain, nous avons pris le parti d’agir sur un point d’influence repéré, dans le but de valoriser le périmètre proche et lointain : c’est ce qui a permis l’émergence d’une nouvelle centralité pour le bourg de Saint Fons, à savoir autour de la gare métropolitaine. S’il s’agit parfois de simples points de liaison ou connexions viaires, ce concept de nouvelle centralité permet d’établir les relations entre les pièces urbaines et d’intervenir dans le tissu du bourg de façon plus astucieuse (moins maladroite et imposante). La nouvelle gare proposée est un espace intermodal mais néanmoins urbain, qui vient transformer le tissu résidentiel banal de Saint Fons - en pénurie de services et d’espaces publics performants - en un lieu privilégié.
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PLAN MASSE PROJET URBAIN
PLAN MASSE PROJET URBAIN 62
Quels lieux d’intervention dans le projet urbain ? Quelle stratégie ? Le projet urbain regroupe alors tous les différents potentiels que nous avons repérés à différentes échelles et il fait la synthèse entre les enjeux métropolitains et les enjeux locaux. La stratégie globale d’intervention s’avère unique mais son application est spécifique à chaque espace (programme, relation à l’espace public particulière) afin d’offrir un large panel d’activités comme il est d’usage dans les centres villes des métropoles. L’idée directrice de notre projet urbain est la même que celle, évoquée dans la méthodologie d’intervention sur le territoire : plutôt que de recréer un plan masse pour Saint Fons, notre démarche s’inscrit davantage dans un processus d’identification des espaces (déjà occupés ou non) à requalifier, se propose de modéliser des interventions propres à chacun d’eux et surtout de définir une langage fondateur commun capable d’exprimer les caractéristiques de ce territoire complexe pour pouvoir rééquilibrer l’ensemble et le rendre pertinent.
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MAQUETTE 1/500 PROJET URBAIN 64
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Amorcer le dĂŠpassement de la limite de la voie ferrĂŠe
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La proposition d’un projet urbain dans lequel seules, les grandes modalités d’intervention étaient définies, nous a semblé représentative de l’approche et de la posture relativement ‘’ modeste’’ que nous avons décidé d’adopter par rapport à la ville de Saint Fons. Mais surtout, elle nous a laissé une grande liberté dans la transformation et l’interprétation des différents sites (pour le projet de PFE). Sur les nombreux espaces d’intervention potentiels que nous avions présentés dans le projet urbain, j’ai choisi de développer (pour mon PFE) le site à l’ouest de la voie ferrée, celui situé le plus au nord, au-dessus du viaduc traversant, que nous avions appelé ‘’la halle‘’. Cette situation en dehors du bourg et de l’autre côté de la limite infrastructurelle en pleine zone de PPRT, m’a paru intéressante car elle questionne à nouveau la pertinence d’une urbanisation traditionnelle dans ces lieux et interroge sur la figure urbaine, propre au site, qui serait la plus pertinente. Projeter un programme d’habitat dans la zone industrielle me parait aussi une manière d’anticiper l’avenir et d’ouvrir la voie au dépassement des limites, dans la perspective d’une disparition du risque et de la redynamisation de la traversée.
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PERIMETRE D’INTERVENTION PFE 70
# Des critères d’urbanité particuliers Quels outils pour concevoir une architecture pour laquelle il n’existe pas de modèle conventionnel ? Les enjeux par rapport au territoire Les enjeux de paysage, de programme, de mobilité et d’espaces publics permettent de définir la nature du contexte dans lequel le projet se développe. Sa position hors du bourg suppose une figure urbaine qui marque la rupture avec son environnement proche et invente la ville au-delà de la voie ferrée.
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plan masse
bourg
industrie
# DEPASSER LA LIMITE DU BOURG Amorcer un changement de regard et d’usage par rapport à la zone industrielle en y intégrant un programme de logement dans la perspective d’une disparition future du risque.
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enjeu paysagé: rhône, industrie, voie ferrée
# PAYSAGES Le site s’inscrit dans une continuité paysagère. En effet, situé entre la zone industrielle et la voie ferrée, la forme urbaine se doit de valoriser cette position entre deux grands paysages : le paysage de l’infrastructure que l’on vient ré-enchanter et mettre en valeur d’un côté, et le panorama industriel avec le Rhône en arrière-plan de l’autre. Le défi majeur de la forme urbaine est de valoriser ce paysage conflictuel.
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enjeu programmatique
# PROGRAMMES Comme établi dans le projet urbain, en plus des logements, le site doit répondre à certains programmes spécifiques en rapport avec les usages et les dynamiques générés par le nouveau quartier de gare. Mais il doit aussi proposer d’autres activités répondant aux besoins de la zone industrielle : de l’habitat, des services en lien avec la gare et les quais (restauration, cafétérias), des espaces de co-workings, et des locaux pouvant accueillir des sièges sociaux ou de petites entreprises.
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enjeu mobilitĂŠ: articuler: bus (tcl), voitures, train et modes doux
# MOBILITES En comparaison des autres sites sur lesquels nous avons fait des propositions dans le projet urbain, celui-ci apparaît comme le plus isolé, détaché car il semble moins bien desservi et son rapport au réseau d’espaces publics plus limité, plus exigu. Cependant, le site entretient une vraie relation de proximité avec la voie ferrée car il se positionne dans la continuité des quais. L’intérêt du projet, ici, est donc de mettre en scène ces deux dynamiques : une mobilité piétonne, lente, et le trafic ferroviaire, rapide, qui mettent en exergue encore une fois le caractère conflictuel du lieu. 79
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enjeu de l’espace public
# ESPACES PUBLICS En se positionnant sur les quais de la nouvelle gare métropolitaine, le site s’inscrit dans un espace public continu, développé depuis le parc urbain et qui représente un des seuls liens physiques que le territoire étudié entretient avec le reste du projet urbain. Cette situation induit implicitement qu’on libère le sol des limites physiques susceptibles d’altérer cette continuité de l’espace public.
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bourg
industrie
se proteger
rĂŠenchanter
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Les paramètres à prendre en compte sur le site en question
1 – Située entre la zone industrielle et le bourg de Saint Fons, la forme urbaine, générée sur ce site, a une position charnière entre les deux dynamiques et doit tenter, de quelque manière que ce soit, de relier les deux tissus.
2 - En relation directe avec la voie ferrée, la figure urbaine doit composer avec l’infrastructure ; elle doit s’en accommoder, tout en s’en protégeant (nuisances sonores). D’autre part, en vue de ré-enchanter l’infrastructure, le projet doit également faire office de vitrine sur la voie ferrée et promouvoir une nouvelle image de marque de la vallée industrielle.
3 – Dans l’optique de susciter la traversée du territoire d’est en ouest, selon la stratégie urbaine que nous avons choisi d’adopter, il faut imaginer, pour ce site, une forme urbaine dont le rapport au sol permettrait une circulation des usagers libre, facile, entre les quais et la zone industrielle.
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MONO BLOC
ILOT TRAVERSE / FRACTURE
Février 2016
Mars 2016 84
Expérimentations de la forme urbaine
DOUBLE BARRE RELIEE
L’OASIS
Avril 2016
Mai - Juin 2016 85
Quels caractères invariants pour cette forme urbaine propre au site étudié ? : - UN REZ-DE-CHAUSSÉE LIBRE : L’objectif est de créer une certaine distanciation par rapport au sol pour inscrire le bâtiment architectural dans la continuité de l’espace public des quais et permettre une circulation libre des usagers qui pourront ainsi profiter des services à disposition, installés dans cette épaisseur verticale, en lien direct avec les quais. L’habitat est, par conséquent, hors du sol, surélevé, ce qui favorise sa relation aux paysages lointains et concourt à une mise à distance de l’espace public. - LA POSITION DE MUR FACE À LA VOIE FERRÉE : En adoptant cette posture face à la voie ferrée, la forme urbaine cherche d’une part à faire tampon vis-à-vis des nuisances générées par le trafic ferroviaire, mais aussi à s’approprier (dans l’imaginaire) clairement et presque égoïstement la voie ferrée avec laquelle elle entretient, force est de le constater, une relation d’ultra-proximité. Par ailleurs, la création de cette densité supérieure qui viendrait presque surplomber la voie ferrée, par rapport au rez-de-chaussée libre, accentue la perspective est-ouest du site et facilite la lisibilité des circulations transversales des quais jusqu’aux industries. - UNE FIGURE URBAINE ÉPAISSE : Générer une épaisseur qui concentre les usages et les dynamiques (générées par le projet urbain) pour créer une source d’attractivité ponctuelle dans le site. Cela s’inscrit dans la continuité logique pour améliorer la lisibilité du territoire. 87
PLAN DE REZ DE CHAUSSEE 88
- UN REZ DE CHAUSSEE LIBRE
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COUPE TRANSVERSALE TERRITOIRE
COUPE LONGITUDINALE
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- UN REZ DE CHAUSSEE LIBRE
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- POSITION DE MUR FACE A LA VOIE FERREE
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COUPE TRANSVERSALE
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- UNE FIGURE URBAINE EPAISSE
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Le travail de dialogue et de mise en scène de l’architecture – définie selon sa relation au paysage, à l’infrastructure et au sol - par rapport à la voie ferrée, est particulièrement équivoque sur ce site. Le projet devient une figure marquante dans le paysage industriel et ferroviaire et valorise chacun de ces deux paysages (ambiance métropolitaine). Associée aux caractéristiques du site, la figure urbaine assume alors sa rupture avec l’existant (rupture d’échelle, rupture morphologique).
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PERIMETRE DU PROJET
ZONE D’ACTION
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# Questionner le déterminisme du contexte
Découverte progressive du rapport entre le bâtiment et son contexte Dans l’élaboration de la forme architecturale de mon projet, le contexte du site d’intervention a eu un rôle principal et un impact déterminant. Le paysage environnant se compose essentiellement d’une nappe épaisse de bâtiments industriels de moyenne densité qui, par contraste, font ressortir le potentiel spatial de ma zone d’intervention : un espace ouvert, vide, inoccupé dans la zone industrielle et en relation directe avec les quais. Le bâtiment architectural implanté dans son site assume cette apparente situation d’isolement, en redéfinissant encore davantage les limites de ce périmètre neutre, véritable atout pour l’habitat et il propose un cadre de vie qualitatif au milieu d’une zone industrielle.
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Référence: Akademie Mont-Cenis Herne Sodingen, Allemagne, JOURDA & PERRAUDIN
Des concepts propres au cas particulier du site développé COMPLEXITE / L’architecture se doit d’exprimer et de révéler la complexité du réel au lieu de le simplifier. Son rôle est de sublimer la réalité présente plutôt que de s’y conformer. Si l’objet architectural construit sur le site est contraint d’ignorer un contexte trop complexe, cette exclusion de la réalité ne peut que se retourner contre lui-même, le condamnant alors dans ce cas à un réel isolement. Heureusement, dans le cas présent, l’objectif du projet est, au contraire, au travers de son implantation distincte, de valoriser les potentiels du site en les intégrant dans la conception de l’espace public. Comment inscrire le projet dans un site industriel en activité et proposer en parallèle une requalification de cet environnement urbain pour le rendre propice à l’habiter ? Plus qu’une simple création de logements, l’enjeu de ce projet est de mettre en place un véritable cadre de vie. 100
Référence: Louvre Lens, France, SANAA
ESPACEMENT / Avant d’être remplissage, l’architecture est une question d’espace. Elle doit laisser le vide agir et s’installer avant de s’imposer. Dans le tissu industriel majeur existant, le site étudié apparaît comme une discontinuité, un espace vide que l’on aurait tendance à vouloir densifier, remplir, si l’on était dans une logique de ZAC. Or, ce n’est pas l’approche adéquate, selon moi, dans le cas présent. Cette surface libre à proximité de la voie ferrée pourrait se révéler être un vecteur d’urbanité dans la zone industrielle en proposant une architecture et des usages adaptés aux nouveaux modes vies. Ainsi, le projet postule de préserver ce grand périmètre libre et assume la rupture avec l’environnement proche plus dense. L’objectif de cette démarche qui compose avec le plein et le vide, est de créer une nouvelle situation, de modifier le récit des lieux tels qu’ils existent, en opérant un renversement du regard, et de susciter un imaginaire métropolitain de qualité. 101
INTERIORITE/ Même dans le cas d’une architecture qui s’élabore du dedans vers le dehors, l’intériorité du bâtiment n’est jamais absolue. Ici le contexte urbain a plutôt poussé à une démarche inverse : l’élaboration de l’architecture s’est faite de l’extérieur vers l’intérieur. L’ouverture du site, sa configuration et sa nature génèrent un besoin presque naturel, intuitif de recréer une nouvelle intériorité dans cette zone (selon le principe de la boîte dans la boîte), que notre proposition architecturale se fait fort de combler. Questionner l’intériorité, c’était questionner la limite, point de départ de notre analyse territoriale et de notre réflexion. Aussi ai-je élaboré mon projet architectural autour de ce concept d’intériorité. Physiquement, dans le projet cette nouvelle intériorité se matérialise par des jeux de densité entre les volumes habités et le vide généré que j’ai qualifié d’Oasis. En effet, cet espace central arboré qui articule le rez-dechaussée public et les volumes supérieurs contenant les logements, apparait comme un jardin d’Eden, un îlot de nature exceptionnel
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Référence: Rolex center,Suisse, SANAA
dans ce milieu hostile et artificiel que constitue la zone industrielle. Lieu de passage et de circulation, il génère des dynamiques innovantes, de nouveaux usages et propose un art de vivre qui lui est propre, faisant écho à l’imaginaire des nouvelles formes d’habitat collectif des pays d’Europe du nord. Du point de vue architectural, il présente aussi l’avantage de créer un contre point au parc urbain de l’autre côté du viaduc. Enfin, cette intériorité, mentionnée plus haut, demeure relative et paradoxale car ses limites sont floues et elle tend à s’exporter vers l’extérieur du bâtiment construit, dans le but d’élargir cet imaginaire, cette ambiance créée, à l’ensemble du site d’action et de fabriquer un espace autour duquel s’inventent des usages et de nouvelles pratiques urbaines.
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Référence: Parc de Paris la Vilette, France, TSCHUMI
PARCOURS / L’architecture, c’est l’art de marquer les espaces par des parois et des seuils afin de matérialiser le passage du dehors au-dedans, du public au privé. Au-delà des usages spécifiés par le programme, un bâtiment a vocation à être traversé, pratiqué par les usagers, dès lors que son site est un lieu de circulation stratégique à l’échelle urbaine comme c’est le cas ici, puisqu’il s’inscrit dans la continuité de l’espace public des quais. L’enjeu du projet porte alors autant sur le travail de parcours urbain que sur les espaces intérieurs qualitatifs. Comment intégrer cette circulation urbaine au projet architectural ? Il s’avère nécessaire de mettre en place des filtres, de produire des séquences, dans la transition de l’espace public extérieur à l’espace public intérieur couvert que constitue l’Oasis. Comment, dès lors le bâtiment anime-t-il l’espace public ? 104
ETHIQUE / L’esthétique sans l’éthique, un échec. Par sa position particulière - dans le paysage complexe de la Vallée de la chimie et du projet urbain - entre tissu industriel et bourg habité, le site du projet doit, dans cette logique de continuité paysagère et programmatique, faire écho à ces deux mondes. Le danger de la démarche serait de se limiter à exploiter l’esthétique de la zone industrielle, comme on le fait souvent. Il nous a semblé plus judicieux voire nécessaire de ré-exploiter des éléments propres à chacun des tissus et de les mixer ensemble pour construire un cadre de vie convaincant. Ainsi, dans le projet proposé, je réemploie le quai de déchargement présent sur le site, qui devient un point d’eau auquel tous les usagers peuvent accéder. J’ai également décidé de positionner mon projet au-dessus d’une dalle, elle aussi déjà présente à l’origine, ce qui me permet de disposer par avance d’un sol de rez-de-chaus105
Référence: FRAC Nord Pas de Calais, France LACATON ET VASSAL
sée solide. C’est dans ce sol - qui provoque immédiatement l’image d’un passé industriel aujourd’hui transformé – creusé par endroit, que viennent s’enraciner les arbres de l’Oasis. En outre, le fait de devoir parvenir à un sol sain, propice à la végétation en dessous des surfaces polluées amorce le premier pas vers une démarche de requalification du paysage. Enfin, dans son fonctionnement et son rapport à l’espace public aussi, le projet évoque une culture industrielle, en rappelant l’organisation d’une halle de dépôt : un contenant intérieur central qui attire l’usager depuis l’extérieur et redistribue les espaces intérieurs. La forme urbaine, qui rappelle celle d’un îlot au cœur arboré, et les typologies de logements s’inspirent, quant à elles, directement des caractéristiques du bourg : mixité programmatique des îlots, habitat orienté, etc.
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MATERIALITE / Faire sens. La matérialité, au-delà de sa fonction esthétique se doit d’être cohérente pour créer une ambiance représentative d’un lieu et générer une atmosphère valorisant un certain art de vivre. Sur le site, cette matérialité s’exprimera à travers deux enjeux principaux : d’abord, jouer sur des principes de répétition et de géométrie rappelant les anciens bâtiments industriels, grâce notamment à la trame régulière de la structure primaire du bâtiment. Cette structure qui se perçoit depuis l’extérieur vient rythmer les façades et génère également les ambiances lumineuses intérieures qui cadencent l’espace public de l’Oasis. Ensuite, même si produire une matérialité qui fasse écho au contexte industriel nous semble aller de soi, l’objectif doit rester avant tout de donner l’impression visuelle d’une architecture relativement légère et ce, de manière à produire un impact plus subtil sur le paysage (utilisation de matériaux transparents, translucides, réflexifs en plus des matériaux bruts). Enfin, pour inscrire le bâtiment dans ce paysage ‘’ bipolaire ‘’ entre zone résidentielle et zone industrielle, et favoriser un cadre de vie de qualité, la matière froide, minérale et brute doit s’associer à des matériaux plus chaleureux qui renvoient plus facilement à l’image d’un intérieur confortable.
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Le contexte particulier de ce site invite à un certain type d’interventions qui déroge aux solutions d’urbanisation courantes comme la ZAC par exemple (cf. Confluence) et qui n’auraient pas été ici pertinente, malgré la nature industrielle des espaces à disposition. Comme nous l’avons constaté lors de notre approche territoriale, les outils traditionnels d’urbanisation sont inadaptés pour ces types de territoires. Il a donc fallu envisager d’autres solutions d’intervention répondant aux nouvelles perspectives territoriales. Tout l’enjeu de ce projet était de comprendre le lieu au travers d’un regard personnel, d’en donner une sorte de traduction, d’en cerner les attentes puis d’envisager enfin les solutions adéquates.
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# Quelle interprétation dans les logements ? Mise en abîme de la notion d’intériorité
La nouvelle intériorité dans la forme architecturale proposée permet d’assumer la rupture d’échelle entre les dimensions du bâtiment construit et les dimensions des logements déterminées par la structure. Elle permet également de proposer un cadre de vie communautaire qui s’inscrit dans la logique, mise en avant dans le projet urbain de générer des lieux d’influences et de rencontres entre les différents usagers, ici, les habitants.
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Typologies déduites Tout comme la vallée de la chimie, le bâtiment architectural créé, possède deux visages : sa façade à l’Est, donnant sur la voie ferrée qui fait à la fois office de mur tampon et de vitrine par rapport à l’infrastructure, et sa façade Ouest en relation avec le grand paysage du Rhône. Ainsi, les logements, définis par la trame de la structure comme dit précédemment, présentent des typologies différentes et adoptent des postures opposées selon leur orientation sur le grand paysage.
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Les logements situés à l’Est et donnant sur la voie ferrée affichent une relation non seulement frontale mais aussi verticale par rapport à l’infrastructure dont ils doivent se protéger. Cette morphologie verticale induit deux typologies de logements : des duplex en hauteur, presque hermétiques par rapport à la voie ferrée mais beaucoup plus ouverts sur l’intérieur de bâtiment et le ciel, et des simplex situés en dessous, davantage ouverts sur le paysage proche, orientés sur la perspective ferroviaire ré-enchantée et qui bénéficient également du paysage intérieur de l’oasis.
Les logements positionnés à l’Ouest, quant à eux, entretiennent une relation avec le grand paysage du Rhône en arrière-plan ce qui suppose de manière assez intuitive une posture horizontale dans son rapport au paysage. Cette façade Ouest est beaucoup plus ouverte et beaucoup plus déconstruite que la façade Est, très régulière. C’est une manière d’amorcer un premier paysage aux caractéristiques plus résidentielles dans la zone industrielle. Les différents simplex (t5, t3, t2) qui découlent de cette morphologie horizontale jouissent, eux aussi, d’une exposition « traversante » : Ils ont vu à la fois sur le paysage industriel et l’oasis si bien qu’ils donnent l’impression d’être traversés par le paysage.
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EXTRAIT PLAN DE R+3
A-DUPLEX
C-SIMPLEX EST
B-SIMPLEX OUEST
Retrouver une intériorité dans le logement Ces deux postures face au paysage donnent donc lieu à trois typologies de logement différentes dans lesquelles on essaye également de reformuler une centralité et une intériorité, étant donné une surface habitée relativement grande. Selon les typologies j’ai établi trois possibilités d’action pour répondre à cette volonté :
(A)
- l’intervention par le vide, dans les duplex à l’Est avec la création d’un patio autour duquel on déambule de bas en haut et par où se confrontent directement intériorité et extériorité. - l’intervention dans l’épaisseur du plein qui contient l’espace vide. L’idée pour les logements situés à l’Ouest est de créer une épaisseur qui définit les limites de l’espace vide/ libre (cuisine, salon) central complétement ouvert sur le paysage.
(B)
(C)
- l’intervention par l’ajout d’un module autonome. Dans le cas des simplex qui font face à la voie ferrée, la mise en place d’un module fermé, venant se greffer sur la dalle lisse du logement, permet non seulement de créer une intériorité dans le module lui-même, mais aussi de qualifier l’espace autour de lui et généré par lui. 117
COUPE RELATION LOGEMENTS ET OASIS
L’Oasis partagée et habitée Cependant, comme à l’échelle du bâtiment architectural, cette intériorité du logement tend à s’exporter. En effet, chaque logement bénéficie d’un espace ‘’ extérieur ‘’ (non couvert ou partiellement) suspendu au-dessus ou au milieu de l’Oasis. Ce volume central est alors une extension à tous les logements tournés vers cet Eden intérieur. Il est habité, partagé et traversé grâce aux passerelles qui relient les deux grands volumes habités. C’est une situation de mise en abîme de l’intériorité. Ainsi, cet espace qu’on qualifie d’extérieur par rapport au logement mais qui correspond au volume central du bâtiment, n’est, en fait, rien d’autre que l’intériorité formulée à l’échelle du site d’intervention. On peut y voir aussi une analogie du territoire et des enjeux formulés pour Saint fons : les deux volumes hors sols représentent les deux tissus résidentiel et industriel, la dalle figure l’infrastructure, l’oasis arborée symbolise cette volonté de ré-enchanter l’infrastructure et les traversées supérieures rappellent le réseau d’espaces publics desservant et reliant les deux tissus. 119
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CONSLUSION
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jour de la soutenance
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‘‘ L’architecture est art de suggestion ‘‘ Daniel Pennac
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