C ommunity L iving T ogether
MAXIME ROUSSEL PROJET DE FIN D’ÉTUDES // RAPPORT DE PRÉSENTATION // ENSAPL // DOMAINE D’ÉTUDES : MATÉRIALITÉ, CULTURE ET PENSÉE CONSTRUCTIVES // ATELIER BORDER CROSSING // SOUS LA DIRECTION DE CÉDRIC MICHEL 1 (DIRECTEUR D’ÉTUDES DU PFE), VINCENT DUCATEZ // PRINTEMPS 2020
REMERCIEMENTS
À travers ce rapport de présentation du projet de fin d’études, je tiens à remercier L’École Nationale Supérieure d’Architecture et de Paysage de Lille et l’ensemble de son équipe pédagogique et administrative pour leur suivi durant la totalité de mon cursus.
Je remercie particulièrement Cédric Michel et Vincent Ducatez qui ont su m’accompagner dans la conception de ce projet et la rédaction de ce rapport. J’ai également une pensée pour Madame Katy Berro, enseignante de français à l’ISV Loos qui m’a permis de croire en mes capacités durant tout mon parcours. Leur enseignement et leur soutien auront participé à forger l’architecte que je souhaite devenir.
J’embrasse ma famille et mes amis qui m’ont apporté soutien, joie et motivation à chaque instant durant ces années d’études. J’ai une pensée et une reconnaissance particulière pour Benoit, Clément et Anne-Sophie, amis des premiers instants ici à l’ENSAPL.
Merci à vous !
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01
SOMMAIRE
AVANT-PROPOS 1. 2. 3. 4. 5.
REMERCIEMNETS
ÊTRE ARCHITECTE ?
Comme Un Fil Rouge Dans Mon Parcours En Architecture
MANIFESTE - JE PENSE, JE RAISONNE, DONC JE SUIS ARCHITECTE . . .
CITATIONS
02
INTRODUCTION
03
J’AI DEUX AMOURS 1. VIVRE ENSEMBLE
2. LES BOIS TECHNIQUES
a. IL NOUS FAUT SORTIR DU BOIS
b. QUANT LE BOIS DEVIENT TECHNOLOGIE
04
BAS-CARBONE ? 1. 2. 3. 4.
06
CONCLUSION - UN PAS DE PLUS …
07
ANNEXES - BIBLIOGRAPHIE
3
LE MONDE EST DEVANT NOUS, IL NOUS FAUT L’ÉCRIRE
TIC, TAC, TIC, TAC
Comme Un Fil Rouge Dans Mon Parcours En Architecture
UN COUP D’AVANCE
05
L E PAV I L L O N C O M M E D’EXPÉRIMENTATION 1. 2. 3. 4. 5. 6.
LE PLAN DE ROUTE
ONCE UPON A TIME
UNE SECONDE VIE
EN TROIS DIMENSIONS
L’EMPOWERMENT
LE CLT ET LA DIMENSION CORPORELLE
TERRAIN
AVANT-PROPOS
POURQUOI ARCHITECTE ?
ÊTRE
Cette question est pour moi, l’occasion de faire le point sur mon passé, mon présent et mon futur. D’aller au-delà de la fierté ou de la satisfaction d’en être capable, d’avoir réussi, mais plutôt de me poser la question de ce que je veux faire de ce diplôme. Faire ces études d’architecture n’avait pour moi, pas de sens, pas de raisons plus profondes, avant que j’envisage l’utilité que je pouvais faire de ces dernières.
C’est par le biais de la recherche sur les conditions de l’habiter, thème auquel je suis particulièrement sensible, dans le modèle de l’habitat collectif d’après-guerre, que j’ai pris conscience via la Maison Radieuse de Le Corbusier à Rezé qu’un architecte pouvait être plus qu’un simple maître d’oeuvre qui conçoit et construit selon une commande, une réglementation, un programme et une situation urbaine. Qu’à travers son statut, son engagement théorique, idéologique, il pouvait donner un sens à son action, que son oeuvre avait une raison d’être au monde au-delà de son programme, des normes et réglementations auxquelles ils répondent, audelà de la commande initiale de la maîtrise d’ouvrage ou de son insertion architecturale et paysagère dans le contexte territorial.
Qu’à travers un simple trait sur une page blanche, l’architecte répond aux maux de la société, de l’humanité, d’un pays, aux souhaits des ambitions politiques, aux souhaits des acteurs du tourisme et de l’économie, aux attentes des populations habitantes et aux craintes du voisinage.
Que pour faire son travail, l’architecte doit être au coeur de la société pour y observer, y détecter, y identifier, y débattre, y convaincre, y prendre parti, y évoluer, y grandir, y expérimenter, y améliorer, en y apporter sa pierre à l’édification de celle-ci.
Qu’à travers l’architecture, il fallait y voir un passé (les expériences vécues, les apprentissages, les repères idéologiques, les conceptuels et les théoriques, une tradition, une histoire, une coutume, etc.), un présent (ici
et maintenant avec des outils et moyens acquis, les faits, les actes, les vérités, nos préoccupations, etc.) et un futur empli d’incertitudes, d’interrogations, de doutes et de risques, mais aussi de bonheurs, de réussites, de victoires, ou tout simplement d’avenir.
Que le discours, la vision, l’ambition pour l’architecture de demain, qu’il porte face au monde peut être plus constructif pour l’humanité que tous les bâtiments qu’il édifiera. L’architecte par ses mots pouvait bâtir bien audelà de son oeuvre, une époque.
Que l’architecte et son architecture partagent un lien, une trace l’un sur l’autre. Une influence qui marque le travail de l’architecte et qui se remarque d’un projet à l’autre comme une marque de fabrique, une récurrence, une obsession.
« Le projet se construit de même que l’on se construit soi-même. »1 Choisir de devenir architecte est pour moi, une manière d’être face au monde, de défendre ceux en quoi je crois, ce en quoi je pense, ce en quoi je rêve. En inscrivant mon travail dans une filiation, une posture, un engagement, voire une utopie, je prends part aux débats de la profession, du secteur d’activité, de la société et de l’humanité.
Qu’elle soit modeste ou élogieuse, grande ou petite, rurale ou urbaine, neuve ou rénovée, construit ou non réalisée, écrite ou imagée, l’architecture que je défends est ma manière d’être au monde. La trace d’Homme/Citoyen / Architecte que je souhaite laisser sur la terre, sur un territoire, un milieu, un environnement. Une forme de trace, d’impact qui demande de l’énergie et des ressources aussi bien en pensée, en force de travail qu’en matière première.
Roussel (Maxime), Fondements de l’architecture, Photographie personnelle, à Paris le 10/09/2019
Je suis un architecte parmi d’autres, mais j’espère qu’en aménageant, en rénovant, en bâtissant et en démolissant le cas échéant, en prenant une posture, en âme et conscience.
Je deviens un architecte face au monde.
! Maniaque, Caroline. La fabrique d'un architecte ou la discipline comme technique de soi selon Louis Kahn. In Cahiers thématiques : architecture histoire / conception. Lille : Éditions de l’École d'architecture de Lille, n° 1 février 2001, p. 150-191. 1
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COMME UN FIL ROUGE DANS M O N PA R C O U R S E N ARCHITECTURE
FIL ROUGE
Archive personnelle : Carte Postale de la Maison Radieuse de Le Corbusier à Rezé, format: 10x15 cm, éditée pour le trentenaire de la construction de l’Unité d’Habitation
P.M, BOLO URBAIN SUISSE, Illustration, format d’origine inconnu, reproduite dans P.M, bolo’bolo, Paris, Édition de l’éclat, 2020, p. 101.
Le temps du rapport est, pour moi, l’occasion de voir de quoi je me suis nourri, avec quoi j’ai grandi. Par cette introspection, je me rends compte que les lectures et les écritures que j’ai pu faire se retrouvent dans mon travail, qu’ils m’ont marqué, questionné et poussé dans mes réflexions, choses inimaginables, lors de mon entrée à l’école d’architecture, pour moi, dyslexique. Qu’à travers eux, je me suis forgé, qu’à travers eux, je suis devant vous aujourd’hui.
La thématique de l’habiter a été le fil rouge de mon cursus à l’ENSAP-Lille. Véritable sujet dominant, il me questionne aussi bien dans son rapport à l’habitant, qu’à travers ces interactions avec le bâti, le milieu sociétal et sociologique, la formalisation de ce dernier par des dispositifs, qu’ils restent à inventer ou encore qu’il nous faut réintroduire, est pour moi constitutif de mon parcours. L’organisation de l’habiter est une question intrinsèquement architecturale. Ici, il y a matière à agir pour le bien de tous.
Ce fil rouge s’inscrit au sein de mon champ référentiel par le biais d’architectes, de réalisations, d’icônes et par des références écrites.
Delhay (Sophie), Unité(s)+ à Dijon, Photographie, format inconnu, 2019, issue de http://sophie-delhay-architecte.fr/ portfolio/lov-2/, crédit photographique Verney (Bertrand), DR
Erskine (Ralph), The Box, Plan, format d’origine inconnue, issue de https://proyectosisasi.wordpress.com/2010/10/21/ referencias-the-box-·-ralph-erskine-1942/.
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Le Corbusier fait partie de cette liste. Sujet de mon mémoire d’initiation à la recherche, je retrouve dans son travail, une attention particulière à l’habiter. Traitant le logis comme l’élément de base d’une organisation nucléaire de la ville, où l’habiter côtoie le circuler, le travailler et le se divertir. Par la théorie, l’architecte énonce le message qu’une bonne architecture de l’habiter doit être accessible pour tous. Par la conception, l’architecte démontre qu’au-delà de l’innovation typologique et architectonique, il y a une société à faire cohabiter au sein des unités d’habitations et que les espaces de socialisation sont la clé. Cette double attention à la typologie et aux espaces de socialisation est aussi traitée par l’architecte contemporain Sophie Delhay que j’apprécie beaucoup. Je trouve notamment intéressante la manière particulière de sa conception, qu’elle décrit comme étant depuis l’intérieur vers l’extérieur.
Chose que j’ai découverte avec le travail de Ralph Erskine et notamment avec son projet The Box.
D’autres architectes sont également des sources référentielles : Jean Nouvet, Ernst May, Charlotte Perriand, Encore Heureux, KOZ, TANK et notamment Charles Tachon. J’adhère idéologiquement à sa citation dans son portrait au sein d’Architecture d’Aujourd’hui : « Un bon logement n’est pas seulement un grand logement, c’est un logement qui offre plus. Plus d’espace que de surface, plus d’usage et d’habitabilité ».
FANTÔME parmi les fantômes, Kraftwerk et les coopératives d’habitantes sont pour moi, un mythe. Elles symbolisent pour moi, la troisième voie possible pour des milliers de personnes qui souhaitent assouvir leur droit au logement. Moteur d’un développement plus re s p e c t u e u x d e l ’ e n v i ro n n e m e n t e t socialement inclusif dans des territoires en tension urbaine. Elles marquent la différence en jouant de la mutualisation des équipements, de l’apport de services et de l’animation de moment de rencontre. Elles forment ensemble une réponse architecturale à une idéologie développée par P.M à travers son ouvrage manifeste : BOLO’BOLO. Ce texte est pour ma part, un prisme de lecture de la société. Évoquant la nécessité de changer nos habitudes occidentales pour plus de durabilité, ce texte concilie architecture, changement climatique, engagement sociétaire et politique pour les habitants, mais aussi pour les concepteurs.
La matière est aussi pour moi, une source de questionnement. Le bois et particulièrement le CLT sont pour moi les matières et matériaux de notre époque. Alliés aux matériaux biosourcés, ensemble ils forment un porteétendard de l’architecture bas-carbone qui ne cesse de se démocratiser dans ce secteur d’activité. L’architecture en bois est à questionner, comme l’architecture de béton du mouvement moderne l’a été à l’époque. Travailler sa matérialité, en comprendre la matière, les traitements, les innovations, les contraintes, la production, sa mise en oeuvre, est pour moi, une manière d'appréhender l’architectonique et l’esthétique.
MANIFESTE
JE PENSE, JE RAISONNE, DONC JE SUIS ARCHITECTE . . . Moi, architecte, je reconnais le changement climatique comme la conséquence néfaste de l’activité capitaliste de l’humanité, et notamment celle de la construction et du bâtiment.
Moi, architecte, je reconnais l’urgence et la responsabilité d’agir contre le changement climatique par l’action politique, décisionnelle de la maîtrise d’ouvrage et les solutions architecturales de la maîtrise d’oeuvre, tout en incluant les dynamiques locales.
Moi, architecte, je reconnais l’utilité publique, culturelle et sociale pour l’humanité d’une architecture, porteuse de sens, de raisons, de solidarité, ordonnée selon l’éthique, l’esthétique et la responsabilité d’un architecte.
Moi, architecte, je reconnais les changements actuels de notre société, comme l’éveil à la cause écologique, les mutations sociologiques et l’impact de ceux-ci sur les modes de vie, l’attractivité urbaine, et la maîtrise énergétique comme des enjeux civilisationnels.
Moi, architecte, je reconnais l’importance de la compréhension de la matière pour le choix opérationnel des matériaux dans une démarche de responsabilité et d’éthique architecturale de l’ensemble de la filière.
Moi, architecte je reconnais l’action locale comme outil d’intégration et d’émancipation de la société et comme potentielle solution pour une politique de l'équitabilité de nos sociétés modernes.
Moi, architecte je souhaite retrouver des dynamiques et dispositifs locaux de solidarité et de sociabilité autrefois présents comme dans les équipements des Dom-kommuna ou des cités radieuses pour réactiver les dynamiques de voisinages et de pratiques des espaces communs.
Moi, architecte, je reconnais que c’est à l’efficacité de sa conception, de sa réalisation, de son bilan environnemental en analyse du cycle de vie et ses services apportés à l’habitant qu’un bâtiment doit mériter le droit d’être construit, et non plus à l’intérêt économique de celui-ci.
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« Lorsqu’un seul homme rêve, ce n’est qu’un rêve. Mais si beaucoup d’hommes rêvent, c’est le début d’une nouvelle réalité. » Friedensreich Hundertwasser in Poullain (Adrien), Choisir l’habitat partagé, L’aventure de Kraftwerk,Marseille, Parenthèses, 2018, p.9.
« Peu importe la forme que ça prend. Laisser le monde un peu meilleur qu’on ne l’a trouvé. C’est ce qu’un homme peut faire de mieux. » Auster (Paul), Tombouctou, Paris, Actes Sud, 1999
« Nous devons apprendre à vivre ensemble comme des frères, sinon nous allons mourir tous ensemble comme des idiots. » Luther-King (Martin), Discours du 31 mars 1968, National Cathedral (Episcopal), Washington.
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Branzi, (Andrea), Genetic Tales, Dessin, format d’origine inconnu, in Branzi, (Andrea), Genetic Tales, Milan, Éditions Corraini, « Design & designers », 1998.
INTRODUCTION
Pour introduire ce rapport, il me paraît essentiel de commencer par présenter le domaine d’études et d’en expliquer par la suite, le pourquoi de ce choix pour mon projet de fin d’études.
Ce rapport s’inscrit dans le cadre pédagogique spécifique du domaine d’étude : Matérialité, culture et pensée constructives. Selon la description de ce dernier, « il s’agit ici de travailler la problématique des relations entre architecture et matière ou, pour le dire autrement, des liens qui articulent l’architectural, qui seraient de l’ordre du penser, à l’architectonique, qui seraient de l’ordre de la réalité matérielle. L’hypothèse sous-jacente est que le réel est une condition de la poésie, mais aussi que le fait architectural fait coïncider le manuel et l’intellectuel.»
À travers le projet architectural contemporain bas-carbone, l’atelier s’inscrit dans la réalité, par la prise en compte du changement climatique et de son impact sur les activités du bâtiment et des travaux publics, comme étant un enjeu principal. Faisant suite de l’expérience victorieuse du concours Solar Decathlon 2019 de l’ENSAPL et de ses partenaires, il s’agit désormais d’explorer de nouveaux horizons. Cette ambition s’inscrit dans les fondements pédagogiques et conceptuels du domaine d’études, dont, en premier lieu, l'articulation des problématiques du projet et des problématiques de recherche déclinée autour de la confrontation à la matière, de la tectonique et de la transdisciplinarité.
L’objet d’études proposé est celui d’un pavillon d’accueil d’une centaine de m2, pour le Solar Decathlon Europe 21 à Wuppertal. Sa matérialisation architecturale sera démonstratrice d’une éthique responsable et d’une méthode de conception formalisée en phase avec les problématiques contemporaines.
Le choix de l’atelier Border Crossing représente pour moi, mon premier pas en tant qu’étudiant et bientôt architecte, quant à la posture professionnelle et à la pratique architecturale que je souhaite porter et apporter à la société. En nous proposant de définir notre démarche à travers notre appréhension de l’articulation entre pensée architecturale et réalité architectonique, ce domaine d’études nous accompagne dans la construction de notre propre éthique professionnelle. En reprenant ici, le descriptif du domaine d’études et l'intitulé de l’atelier, mon objectif est d’en exposer les sousentendus ou en tous cas les interprétations que j’en tire, et qui sont les points d’ancrages de toute la démarche qui m’a animé.
Pour être encrer dans la réalité architectonique de notre époque afin de mettre en place un projet contemporain d’architecture, Il me faut prendre conscience des codes qui la régissent actuellement. En commençant par articuler le projet par une matière bas-carbone par excellence, le bois.
« Naturellement écologique, le bois nécessite moins d’énergie lors de sa fabrication et capture de grandes quantités de CO2 pendant toute la croissance de l’arbre »2 Mais de quel bois parle-t-on ? En structure ? En façade ? En ossature ? En parement ? Ou encore le matériau qui anime actuellement le marché de la construction : le CLT (Cross Laminated Timber).
Roussel (Maxime), Représentation programmatique du pavillon d’accueil de la compétition Solar Decathlon, Coupe, format d’origine : 21x29,7cm, le 12/02/20
Extrait d’un communiqué de presse de Bouygues Immobilier, que l’on peut retrouver dans https://www.cmpbois.com/articles/bouygues-immobilier-promotion-ossature-bois.html. traduction de « greenwashing » 4 Lacaze (Stéphanie ), « Matériau Bois : le béton de demain ? », sur https://www.batirama.com/article/16557-materiau-bois-le-beton-de-demain.html, publié le 24/04/2018 2 3
8
Le CLT fait « les choux gras » de la presse spécialisée et arrive même à l’oreille de la presse généraliste. À travers les signatures prestigieuses ou alors des réalisations d'ampleurs, le CLT est un support de différenciation et de verdissement3 du discours dans certaines maîtrises d’ouvrage. Ce matériau mis au point en 1947 par l’ingénieur français Pierre Gauthier et mis en oeuvre pour la première fois en France par Jean Prouvé dans sa maison à Nancy, est définit comme étant le « béton de demain »4 par les acteurs du marché et est devenu le symbole d’une époque. Désigné comme matériau de prédilection pour la construction du village olympique des JO 2024 ou encore pour de
nouveaux immeubles de grandes et moyennes hauteurs partout en France, le CLT a une place dans le discours architectural et architectonique contemporain.
Il est évidant que la question de l’architecture bas-carbone anime les débats et les postures des architectes de notre époque pour en définir les contours. Pour être encrer dans la pensée architecturale qui m’anime, il faut que je mets en perspective mes recherches et l’ambition sous-jasante de mon manifeste, pour définir une architecture du vivreensemble. Cette dernière doit se lire au-delà de son caractère environnemental, par l’apport qu’elle a, à la société, à l’Homme, au sens de l’intérêt public, culturel, social et solidaire.
Mettre en relation le matériau, sa mise en oeuvre avec le destin programmatique qui viendra l’animer, est pour moi une manière de m e t t r e e n p r a t i q u e u n « H a b i t e r confortablement une architecture bascarbone ». Cette nécessaire relation est issue aussi bien de mon parcours que de mes rencontres qui ont fondé ma conscience architecturale.
C’est notamment à travers la définition d’un bâtiment frugal, écrit par les auteurs du Manifeste pour une frugalité heureuse que je retrouve une conscience équivalente entre matière et programme et qui révèle selon moi : l’éthique, l’esthétique et la responsabilité q’un architecte doit exprimer.
« Qu’il soit implanté en milieu urbain ou rural, le bâtiment frugal se soucie de son contexte. Il reconnaît les cultures, les lieux et y puise son inspiration. Il emploie avec soin le foncier et les ressources locales ; il respecte l’air, les sols, les eaux, la biodiversité, etc. Il est généreux envers son territoire et attentif à ses habitants. Par son programme et ses choix constructifs, il favorise tout ce qui allège son empreinte écologique, et tout ce qui le rend équitable et agréable à vivre »5 .
5
L’écriture de ce rapport a pour but de rendrecompte des recherches, des réflexions et de l’articulation des thèmes qui ont jalonnés mon parcours d’étudiant, afin de me positionner vers celui d’architecte.
Retraçant par la même ma méthode conceptrice, le rapport et la présentation du projet de fin d’études lors de la soutenance, exposera mes questionnements quant à la réalité sociale, sociétale, économique et environnementale qu'offre la production d’une architecture bas-carbone comme réponse aux enjeux contemporains.
Premièrement le rapport mettra en perspective les deux obsessions qui animent mes questionnements chroniques, à savoir : le vivre-ensemble et le CLT. Revenant historiquement, idéologiquement et techniquement sur ces derniers, cette partie apportera un éclaircissement sur ces deux éléments opérants du projet.
Dans un second temps, Il sera question de définir ce que représente la locution « bascarbone » pour un futur jeune architecte, mais également la manière par laquelle je tente d’aborder et de résoudre cette préoccupation qui fonde et fondera la profession d’architecte pour ce siècle.
En fin, le rapport s’attardera sur le développement du projet afin d’expliquer quelles sont les dimensions qui sous-tendent son organisation, sa programmation, sa formalisation, son rapport à l’usager et à la matière. Ensemble, ils constitueront le témoignage des cheminements de pensées empruntés pour faire naître le projet.
Extrait du manifeste pour une frugalité heureuse et créative, https://www.frugalite.org/fr/le-manifeste.html.
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J’AI DEUX AMOURS
Inscrit dans mon champs référentiel, ainsi que dans mon parcours, la question du VivreEnsemble & le CLT m’intrigue quant aux interactions que peuvent entretenir les notions opérationnelles et la mise en oeuvre, dans la proposition d’une architecture bas-carbone. Cette partie est pour moi, l’occasion de mettre en perspective c’est deux entités et de me permettre de prendre une distance critique sur eux.
Vivre-ensemble (Locution) :
"Forme de cohésion et de solidarité sociales, de tolérance et de civilité reposante sur des liens qui se déploient sur le plan du vécu et du quotidien entre les individus des différents groupes ou catégories de personnes (âge, sexe, ethnie, etc.) d'une société."6
« Capacité et assentiment des habitants, dans un environnement de diversité sociale et culturelle, à partager harmonieusement leur lieu de vie. »7
Dynamique (Subst. fém.) :
En Sociologie, c’est « l’étude des forces créatrices auxquelles on attribue une valeur causale dans l'évolution et le progrès des sociétés »8
Roussel (Maxime), Vivre-Ensemble & CLT, Photomontage personnel, format d’origine 21x29,7cm, le à3/06/20
Office québécois de la langue française, rubrique Grand dictionnaire terminologique, Vivre-ensemble, publié sur http://gdt.oqlf.gouv.qc.ca/ficheOqlf.aspx?Id_Fiche=21798794. Graines de paix, rubrique dictionnaire, Vivre-ensemble, publié sur https://www.grainesdepaix.org/fr/ressources-de-paix/dictionnaire-education-paix/vivre_ensemble_bien_vivre_ensemble. 8 Centre National des Ressources Textuelles et Lexicales, Dynamique, publié sur https://www.cnrtl.fr/definition/dynamique. 6 7
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« Mouvement interne qui anime et fait évoluer (quelque chose) »10
Atelier Border Crossing, Réflexion collective de l’atelier sur les notions d'Habiter- Confort, Mind-mapping, format d’origine inconnue, réalisé le 03/03/2020
11
C’EST QUOI LE VIVRE ENSEMBLE En proposant de travailler la question de la construction collective de l’Habiter, par la locution : dynamique du vivre-ensemble, je sais que je me heurte à une vision sociétale qui peut paraître floue, ou tout du moins utopiste. Désigner comme « incantation vertueuse » 9 par Philippe Trétiack, cette formule est brandie par les détracteurs, comme étant un encensoir, un slogan pour le corps décisionnel (politique, maîtrise d’ouvrage, gestionnaire, etc.) agissant à la manière des antibiotiques sur les tissus urbains en difficulté.
Mais il me parait important de définir et de repositionner historiquement et idéologiquement, le terme que j’utilise du Vivre-ensemble et que j’associe à celui de dynamique. En effet, il est pour moi, encré dans une filiation de penseurs/architectes qui avaient et ont pour certains, qui sont encore en vie, une ambition pour le monde de demain. Fonder ma stratégie de projet pour développer une architecture bas-carbone, en intégrant au-delà de la question environnementale et économique, la question de la construction collective de la société comme vecteur de renouvellement urbain, c’est pour moi une manière d’être un architecte face au monde.
La locution, « dynamique du mieux vivreensemble », s’inscrit dans les initiatives actuelles de mutualisations, de partages, d’usages périodiques de tels espaces ou de tels services. À travers elle, j’entends parler d’une forme de cohésion sociale qui se crée par la construction collective en servant un processus dynamique qui intervient avec autrui et qui interagit sur des relations entre les personnes, entre les individus, entre les groupes. Pour ma part, je l’identifie actuellement par des associations avec pour exemple l’AHMR10, dans des maisons de quartiers ou des tiers-lieux, mais également dans des organisations résidentielles comme les coopératives d’habitat, etc.
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Roussel (Maxime), Community HUB, Photomontage personnel, format d’origine 21x29,7cm, le 13/02/20
9
Trétiack (Philippe), « Quid? Le Vivre-Ensemble », Architecture d’Aujourd’hui, n°425, Juin 2020. Association des Habitants de la Maison Radieuse, a été créée en mai 1955 dès l'ouverture de la cité aux premiers résidents. Elle organise l’action socio-culturelle au sein de son quartier.
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VIVRE ENSEMBLE
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Ces formes d’organisations collectives et leurs formes spatiales ne sont pas à confondre avec les espaces où le partage est imposé et qui s ’ a p p a re n t e à c e q u e l ’ o n q u a l i f i e habituellement de « parties communes » regroupant les espaces de circulation et aussi aux locaux communs (local poubelles, vélos, techniques, etc.), mais plutôt des espaces où le partage choisi y fait appel à l’implication personnelle des habitants, qui par l’intermédiaire d’espaces partagés font la démarche d’entretenir un rapport de voisinage.
Historiquement, ces espaces ont une dénomination : ceux de « Locaux Spéciaux » instaurés dans les années 50 parallèlement au développement rapide des grands-ensembles. Ils résultent de la création des mètres carrés sociaux, espaces partagés par les habitants d’un immeuble de logements sociaux. Souvent en rez-de-chaussée des immeubles, ils ont pour objectif de compenser le manque d’espace au sein des logements, de proposer des services collectifs, et au final, d’instaurer une vie de proximité et un échange social entre les habitants d’un même bâtiment ou d’un même quartier.
« Ces locaux ont vocation à accueillir les réunions familiales ainsi que diverses activités, mais ils peuvent également se prêter à l’installation d’équipements collectifs comme le congélateur ou les tables de ping-pong... » 11 Idéologiquement, ces espaces entrent dans la lignée d’architectes et/ou théoriciens qui voient dans la mise en place d’espace de socialisation, d’échanges, de partages, de mutualisation, une manière de rendre positive la densification urbaine. Comme Gropius, Ernst May, Moseï Guinzburg ou encore Andreas Hofer, Martin Blum et Hans Widmer à travers Kraftwerk et le manifeste des bolo’bolo, le Vivre-Ensemble relève dans l’avant-guerre de l’utopie et dans l’aprèsguerre d’une stratégie de renouveau de C’est l’architecture et de l’urbanisme. notamment l’axe de conception de Le Corbusier, pour le développement des Unités d’Habitations. Par exemple à la Maison Radieuse de Rezé, l’architecte avait prévu, en accord avec l’association des habitants, la
mise en place de ce qu’il nomme des « prolongements du logis »12 regroupant divers équipements, notamment un parc pour la pratique du sport, une salle pour le club télévision et pour le club de sport, une petite bibliothèque et un grand hall commun avec un bureau de poste, un kiosque à journaux, et un poste téléphonique pour l’antenne taxi, ainsi que d’autres salles pour le développement de l’action socioculturelle auprès des enfants de l’immeuble13.
Mais, ce type d’espace a subi des transformations progressives, aussi bien juridique, financière et gestionnaire, qui ont mené à sa remise en cause par les institutions politiques et/ou les organismes HLM jusque dans les années 1990. Dévoyant la vocation même de ces espaces vers l’associatif, vers le commerce, ou tout simplement supprimer par peur des nuisances que l’usage peut engendrer. Le temps est passé et ceux-ci s’inscrivent désormais dans les nouvelles ambitions politiques d’amélioration du cadre de vie en ville. Comme pour Kalkbreite, produit par Müller Sigrist, architecte en 2014, qui en s'installant au-dessus d’une gare de stationnement du tramway zurichois développe au coeur de la vile un bâtiment-îlot regroupant une multitude de typologies de logements coopératifs et une richesse d’espaces collectifs et partagés gratuits et/ou louables. On y retrouve par exemple un sauna, des jardins partagés, une cuisine extérieure, des boxes qui accueillent divers ateliers, une cafétéria, un atelier de bricolage ou encore le Bronx (espace polyvalent de 60m2 libre d’usage).
Des architectes contemporains ont également pris part à ce débat de fond qu’est Comment l’architecture peut permettre de faire vivreensemble. Sophie Delhay en est l’actuelle porte parole en France, car elle a remporté le grand prix AMO 2019 avec son Unité(s)+ à Dijon, mais l’on peut, également y associer le projet Machu Picchu à Lille-Fives.
Oeschger (Reto), Kalkbreite, Photographie, format d’origine inconnu, publiée le 02/03/2020 sur https://www.landbote.ch/schweiz/ standard/auch-millionaere-duerfen-in-genossenschaften-wohnen/story/23808943
Gaultier (Gilbert), Dartiguenave (Jean-Yves), Le Bouar (Rozenn), Bara (Elodie), Les « Locaux Collectifs Résidentiels » gérés par l’APRAS : des lieux d’expression d’une multiplicité de pratiques et d’univers sociaux, Rapport final, Rennes, APRAS, février 2006, p.8 Le Corbusier, La Charte d’Athènes,«Essai», Paris, Édition de Minuit, 2016, p. 42 13 Informations issu de mon mémoire d'initiation à la recherche, Roussel (Maxime), LA MAISON RADIEUSE DE REZÉ, Une vision corbuséenne du logement issue des CIAM et de l’Avant-garde,Sous la direction de : Franck Vermandel et Jean-Christophe Gérard, ENSAPL, 2018 11 12
13
L’utilisation du bois dans l’architecture est une réalité qu’il est impératif de prendre en compte. Présent dans le mythe fondateur de l’architecture de Vitruve à travers son traité De architectura, le bois est utilisé depuis des siècles dans la construction. Mais le bois « souffre encore de préjugés tenaces et de barrières psychologiques auprès du grand public comme le bois ça brûle, le bois ça pourrit, le bois ça n'isole pas, le bois c'est bien pour une cabane et encore, dans les Trois Petits Cochons, la maison en bois de Nif-Nif ne résiste pas longtemps aux assauts du Grand Méchant Loup. »14
Roussel (Maxime), Promenade dans les bois, Photographie personnelle, à Paris le 10/04/2020
Charles-Dominique (Joseph), Mythe de la cabane de Vitruve, Frontispice , format d’origine inconnu, in Laugier (Marc-Antoine), Essai sur l’architecture, Paris, BNF, 1752.
Pouthier (Adrien ), Construction : le bois, pourquoi pas ?, publié sur https://www.lemoniteur.fr/article/construction-le-bois-pourquoi-pas.1179869, le 16/10/2008 Données de https://cecobois.com/pourquoi-construire-en-bois/. 16 Op. cit., Pouthier (Adrien ), Construction : le bois, pourquoi pas ? 14 15
14
Le bois est un matériau à la fois fascinant, polyvalent et intelligent qui joue pour nous les Hommes, un rôle important à bien des égards. Partie prenante de notre paysage, le bois est encré dans notre environnement. Il capture le CO2 nuisible de l’air et rejette de l’oxygène dans l’atmosphère. Le bois est une ressource que l’Homme exploite depuis toujours pour répondre à ses besoins. Que ce soit comme simple cuillère en bois, instrument de musique, objet d’art, meuble, fournisseur de chaleur et d’énergie ou produit high-tech pour la construction en bois massif, nous utilisons chaque jour cette matière première unique. Les propriétés de ce matériau intelligent se reflètent par exemple dans sa solidité, sa durabilité, sa stabilité et sa résistance au feu. Le bois a également une influence positive sur le bien-être des gens et leur santé.
La forêt représente aujourd’hui quatre milliards d’hectares, soit 30% des terres émergées, selon l’Organisation des Nations Unies pour l’alimentation et l’agriculture (FAO). Le bois est une ressource importante à l’échelle mondiale. La gestion de la ressource fait aujourd’hui débat, à l’heure où l’architecture augmente la part du bois dans ses modes constructifs15, les forêts sont sujet à la pression agricole par la déforestation et à des catastrophes d’ampleur mondiale. À une échelle plus proche, la France a un atout. 36% de sa surface est boisée, taux qui s’est vu doubler depuis 1830, majoritairement des feuillus. Actuellement la filière bois tente de se mettre en ordre de marche, de l’exploitation forestière jusqu’aux entreprises de construction bois, afin de monter en puissance pour faire reconnaître l'utilité et les avantages du bois pour construire. « Bien loin des chiffres de nos voisins européens ou du continent Nordaméricain : 30% en Allemagne, 60% en Scandinavie et 90% aux Etats-Unis et au Canada. Une différence qui s'explique, on l'a vu par, une méconnaissance de la construction bois et par "la puissance du béton" matériau roi depuis l'après-guerre (quand il fallut reconstruire la France). »16
LES BOIS TECHNIQUES
IL NOUS FAUT SORTIR DU BOIS
CLT BOIS TECHNIQUES
GESTION FORESTIÈRE
CAISSE, PALETTE, CAGEOT
Valorisa on des déchets de la grume
Déchèteries Encombrants
CLT
Valorisa on des déchets de la grume
CLT
Réu lisa on Seconde vie
Réu lisa on Seconde vie
Roussel (Maxime), Le fonctionnement de la filière bois en intégrant le CLT, Diagramme, 42 x 29,7 cm, (Mise à jour du document de Venague (Esther), Frias (Anacris) et Berteloot (Jeanne), Le fonctionnement actuel de la filière bois , Diagramme de fonctionnement , format d’origine 42 x 29,7 cm, in Venague (Esther), Frias (Anacris), DÉMOCRATISER L’ALTERNATIF, rapport de PFE, Villeneuve d’Ascq, ENSAPL, 2020.)
15
(Rebuts de bois, chantiers, chemin de fer, meubles, poteaux de téléphone et EDF, palissade traitée, bois injecté à coeur au sels métalliques CCA (Cuivre, Chrome, Arsenic)
QUANT LE BOIS DEVIENT TECHNOLOGIE En proposant de questionner le CLT, je sais que je me heurte à la vision d’un matériau sans forme, étant plus de la colle que du bois, ou encore bois artificiel comme peut le revendiquer Christophe Leray17. Même si il ne représentant que 3% des parts de marché c o m p a r é e a u x d i ff é re n t s s y s t è m e s constructifs18 , le CLT fait figure de petit nouveau dans un secteur en plein développement et cristallise un grand nombre de partisans et de détracteurs.
Ce produit issu de la valorisation des déchets de la grume lors de la découpe du bois d’oeuvre, fut développé en 1947, mais c’est réellement à partir des années 1990 qu’il fait son retour en Allemagne et en Autriche. Fort de cette avance sur le marché actuellement, des entreprises comme KLH, MHB ou Binderholz domine la production, la vente et le transport de ce matériau sur toute l’Europe de l’Ouest.
La filière française n’est pas en reste, plusieurs acteurs montent leurs entreprises de production/distribution de CLT en intégrant nombres d’innovations. Grâce aux recherches en cours, le CLT fait sa révolution en marche, travaillant à la fois sur les essences et les colles qui le composent, voire en supprimant la colle au profit de chevilles en Hêtres ou encore, en mettant en place de nouvelles manières de le découper. Le CLT est pour ces entreprises une source de développement qui peut être risqué, au vu de la faillite récente de Lineazen.
Il me parait donc important de définir ce qu’est le CLT au regard de la production d’une architecture contemporaine bas-carbone.
Le bois lamellé croisé (cross laminated timber, CLT en anglais) est un matériau de construction à base de bois, qui se présente sous la forme d’un panneau multicouche (minimum 3),(en général des planches d'une trentaine de millimètres d'épaisseur). Chaque couche contient des lamelles disposées dans un seul sens. Les couches sont en suite croisées à 90 degrés et collées entre elles, afin d'augmenter la rigidité et la stabilité des panneaux dans toutes les directions. Les panneaux de CLT font au maximum 20 mètres de long sur 4 mètres de large (selon les fabricants), à la fois pour des raisons de poids du panneau et de transport.
Les essences sont généralement l'Épicéa, le Sapin, Pin Sylvestre, Pin Maritime, mais également le Mélèze ou le Douglas. Les producteurs de CLT sont généralement installés à proximité d’un écosystème d’entreprises de la filière bois et donc d’exploitation forestière locale. Les CLT en feuillus sont encore à un stade expérimental mais on peut entendre parler du Bambou, de l’Hêtre et du Chêne. Les CLT sont des produits industrialisés qui peuvent-être employés comme éléments structuraux tels que les dalles et les voiles, ou encore en toiture.
Le CLT est maintenant disponible pour tous types de construction. Il peut également être associé à d’autres système constructif comme l’ossature bois, le poteau/poutre, mais aussi le béton.
La construction bois et particulièrement le CLT fait l’objet d’une compétition féroce entre les majors du secteur de la construction, chacun cherchant à développer son bâtiment emblème pour valoriser son image de marque et rendre visible leurs stratégies face au développement durable. Devenant une image de marque, ou avec une vision moins pessimiste, un réel engagement dans le changement de manière de faire, certaines maîtrises d’ouvrages font du CLT leurs coeurs de métier, laissant ainsi l’opportunité de développer une architecture du CLT. 17 18
Leray (Christophe), « Construction bois, miroir aux alouettes ? », publié sur https://chroniques-architecture.com/le-bois-clt-miroir-aux-alouettes/, le 30/01/2018 Données issues de SCOR, « FILIÈRE BOIS CONSTRUCTION Une branche en pleine croissance », Focus, n°24, Novembre 2018
16
Nord Architects, The C02 neutral corporation No. 101, Tableur, dimension d’origine inconnue, publié sur https:// www.instagram.com/p/B_e5hDuJhOv/, le 27/04/2020
Franco (José Tomás). "Is Cross-Laminated Timber (CLT) the Concrete of the Future? 19 Aug 2019. ArchDaily, publié sur <https://www.archdaily.com/922980/is-cross-laminatedtimber-clt-the-concrete-of-the-future/> ISSN 0719-8884
Au sujet de l’acoustique, la masse des panneaux CLT est un atout intéressant pour la performance des ouvrages aussi bien vis-à-vis des bruits aériens que des bruits de chocs par rapport aux planchers bois traditionnels. Ils permettent de réduire significativement l’épaisseur des complexes de plancher. En ce qui concerne la thermique, et la thermique d’été notamment, le CLT est également intéressant du fait de sa masse intrinsèque qui confère d’avantage d’inertie à la construction que l’ossature bois traditionnelle (type NF DTU 31.2). Les solutions d’isolation standards thermiques ITI ou ITE (ainsi qu’acoustiques), peuvent être associées à ce produit. De manière générale, les colles utilisées sont à base de phénol-résorcine-formaldéhyde (PRF), de polyuréthane (PUR) ou d'émulsion de polymère isocyanate (EPI). Découpés sur mesure en atelier par des machines à commande numérique, les panneaux arrivent sur le chantier, prêts à être assemblés à l’aide d’un engin de levage. Ils permettent donc des chantiers secs, rapides et précis, sans déchets, ce qui se traduit en économie de temps et de budget. Leur légèreté (4 fois moins lourd que le béton) permet de réduire le dimensionnement des fondations, de construire en zone sismique ou encore d’envisager avec facilité des surélévations. C’est un matériau à faible énergie grise et excellent bilan carbone : 1 m³ de CLT permet le prélèvement d’environ 930 kg de CO2)19.
Sur le chantier, il apporte à lui seul une réponse à la problématique de l’étanchéité à l’air du fait de la continuité de la paroi : la pose d’un frein-vapeur est superflue. Sa préfabrication permet d’anticiper les ouvertures mais également le passage des gaines techniques, sans compromettre ses qualités structurelles ou thermiques. Les différents panneaux de CLT peuvent être fixés via des emboîtements, des connecteurs métalliques, de la visserie, du cheville de Hêtre ou des connecteurs Knaap.
11 10 1 9 2
6
8
3
7
5
4 1. Stockage des bois
2. Alimentation en matière et Planification des panneaux, Contrôle des défauts
3. Optimisation de la coupe, Assemblage et Aboutement des longueurs
4. Séchage des longueurs
5. Répartition des longueurs en fonction des lignes de productions
6. Production de couches transversales
7. Production de couches longitudinales
Le panneau massif est généralement laissé visible côté intérieur, (face brossée, poncée, sans nœuds...). Ouvert à la diffusion de vapeur, il participe à la bonne régulation hygroscopique du bâtiment. Comme le bois lamellé, il est très faiblement émissif en formaldéhyde (le bois l’est toujours un peu), et fait partie des matériaux sains, classés E1, même dans sa version collée.
19
Reinteau (Bernard), Du bois pour réduire l'empreinte carbone, publié sur https://www.lemoniteur.fr/article/du-bois-pour-reduire-l-empreinte-carbone.1965599, le 13/04/2018
17
8. Rectification des découpes à la fraiseuse numérique et collage des surfaces
9. Production de couches croisées
10. Application du traitement de surface
11. Installation sur le moyen de transport Roussel (Maxime), Le fonctionnement d’ une unité de production de CLT, Diagramme, 42 x 29,7 cm, (Annotation du document de Kallesoe Machinery, CLT system solutions , Brochure commerciale , format d’origine 21 x 29,7 cm, publié sur http://kallesoemachinery.com/products/wood/ system-solutions/clt-solutions.aspx.)
La production du CLT est un processus industrialisé où l’homme joue un rôle différent dans le façonnement du matériau et donc de la construction au final. Dédié au contrôle qualité, à l’optimisation de la matière en détectant les défauts du bois par exemple ou encore au management de l’outil industriel, une unité de production de CLT ne demande généralement qu’une vingtaine d’hommes qualifiés pour son fonctionnement. Mais le CLT s’intègre le plus souvent dans un écosystème autour du bois, avec notamment des unités de préfabrication. Ces dernières ont vocation à augmenter la valeur ajoutée du panneau de CLT en amont de la phase chantier dans un but d’une meilleure gestion des matériaux et des ressources humaines. Le gaspillage de la matière est limité par l’automatisation et la production à la commande. L’unité de préfabrication est également une manière de permettre de repenser les conditions de travail des ouvriers du bâtiment, en améliorant la sécurité, la coordination des tâches et en offrant de meilleurs cadres d’exercices de leurs spécialités. S’inscrire dans un processus de préfabrication avec du CLT, c’est aussi limiter une multitude de transports et donc de nuisances pour le voisinage lors de l'édification de l’édifice. Bien que la production soit externalisée au chantier et donc nécessite des moyens de transports importants, il est moindre que la valse des camionnettes nécessaires à la livraison des innombrables matériaux et des hommes sur un chantier ordinaire. Le magazine Hors-Site revendique même à ce sujet une réduction de 50%20.
Intégrer le CLT dans l’acte de construire un « Habiter confortablement une architecture bas-carbone », est selon moi une manière de produire une architecture contemporaine en adéquation avec son époque et ses préoccupations. L’enjeu ici n’est pas de régresser, de retourner à une architecture nostalgique en fuste comme l’architecture de montagne peut le faire actuellement et qui par cela recherche une forme d’univers intemporel pour les touristes hivernaux, ou de se limiter, mais plutôt de valoriser au maximum une matière première, d’éviter son gaspillage en optimisant son façonnement. C’est s’inscrire dans un nouveau rapport au chantier pour les ouvriers, comme pour le voisinage. C’est stocker du CO2 dans le temps long du bâtiment. C’est en dernier point, travailler avec l’esthétique des essences de bois, les traitements et techniques protectrices, artistiques et/ou décoratifs que l’on peut lui appliquer.
20
BOIS ÉNERGIE TRANSFORMATION EN AUTRE PRODUIT BOIS
RÉUTILISATION
EXPLOITATION FORESTIÈRE
AUCUN DÉCHETS DIFFÉRENTES ESSENCES / VALORISATION DU BOIS
ASSEMBLAGE VIA CONNECTEURS
UNITÉ DE PRODUCTION
AVEC DES OUVRIERS QUALIFIÉS
ÉLÉMENTS MODULAIRE
TRANSPORT DE PANNEAU DE CLT PHASE CHANTIER TRAITEMENTS DE SURFACE
AVEC DES MONTEURS
Roussel (Maxime),Cycle du CLT, Diagramme, 42 x 29,7 cm, faite le 28/05/2020
Donnée issue de CHAZAL (Pascal), Les avantages de la construction Hors-Site pour l’environnement. publié sur https://hors-site.com/les-avantages-de-la-construction-hors-site-pour-lenvironnement/, le 31/01/2019.
18
UNITÉ DE PRÉFABRICATION
BAS-CARBONE ?
Atelier Border Crossing, Réflexion collective de l’atelier sur les notions de Construire - Bas Carbone, Mind-mapping, format d’origine inconnue, réalisé le 03/03/2020
19
LE MONDE EST DEVANT N O U S , I L N O U S FA U T L’ÉCRIRE Sur une page blanche, l'architecte développe une pensée, une vision pour laisser le monde un peu meilleur qu’il ne l’a trouvé. Ici en reprenant les mots de Paul Auster, je souhaite me placer dans une vision peut-être utopiste, mais surtout attacher à faire le maximum pour être à la hauteur de la tâche que j’espère pouvoir exercer.
Même s’il est encore timide, voir balbutiant, c’est à nous, bientôt diplômé, de définir nos envies, notre ambition, nos exigences pour l’architecture de ce siècle, l’architecture bascarbone.
Nous avons grandi avec les discours des scientifiques sur les changements climatiques. Nous sommes de la génération des marches pour le climat et de la généralisation du BIO. Nous sommes la génération qui se dit prête à réduire ses comportements pour un destin commun, afin d’éviter l’impasse vers laquelle nous propulse notre mode de vie. Nous avons tous vu les récents grands accidents écologiques et environnementaux comme les mégas feux de Sibérie, d’Amazonie ou encore d’Australie, qui sont pour moi des porteétendards qui me poussent à m’engager vers une société plus responsable et qui agit dans un intérêt commun.
Par l’ajout de la locution bas-carbone à l’architecture, on comprend que le souci ne réside pas dans l’architecture même, mais dans la manière de la définir.
Alvarez (Concepcion), L’Amazonie est en feu, Inforgraphie, format d’origine inconnue, issue de https://www.novethic.fr/ actualite/environnement/climat/isr-rse/infographieinterdiction-d-acheter-une-voiture-neuve-ou-de-prendre-unlong-courrier-couvre-feu-thermique-quotas-sur-les-produitsimportes-les-mesures-chocs-pour-rester-sous-1-5c-146877.html, publié le 15/03/2019.
Schvartz, L’amazonie est en feu, Dessin de caricature, format d’origine inconnue, issue de http://schvartzenblog.blogspot.com/ 2019_08_25_archive.html.
20
Ici en donnant celle de l’Institut Royal d’Architecture au Canada, je me rends compte que chacun peut y mettre une nuance, une vision et donc définir son approche de l’architecture.
« L’architecture est une passion, une vocation, un appel – en même temps qu’une science et une activité commerciale. On l’a décrite comme un art social, mais aussi comme une science artistique. Elle doit être l’expression du design à son meilleur. L’architecture apporte, selon les mots de Marcus Vitruvius, solidité, utilité et beauté. L’architecture procure un sentiment d’appartenance et soutient toutes les sphères de l’activité humaine. Elle favorise l’intégration harmonieuse des créations de l’homme à l’environnement, tout en valorisant la santé et le bien-être, en enrichissant les vies sur le plan de l’esthétique et de la spiritualité, en offrant des occasions de développement économique et en créant un héritage qui reflète et symbolise la culture et les traditions. »21
Roussel (Maxime), Héritage, Photographie personnelle, à Paris le 15/08/2019
L’architecte est selon moi le garant de ces choix. Il en va de son éthique, de sa responsabilité.
Loin de moi, l’idée que l’on a trop construit et que le rôle des architectes n’est plus que de faire des projets de rénovation.
La réalité matérielle de la terre n’est plus en capacité de soutenir l’idéal de progrès, d’émancipation, de développement du secteur de la construction sans se remettre en cause par rapport à sa matérialisation, car « la matière même du monde est devenue l’enjeu de l’affrontement. La poursuite du progrès, entendu comme développement technoscientifique des modes de vie, se heurte désormais aux limites climatiques, géologiques et biologiques des ressources de la terre. »22
Mais également loin de moi, l’idée que l’architecture bas-carbone est une architecture qui ne prend en compte que les deux premiers piliers du développement durable que sont l’économique et l’environnement. Le volet social et solidaire est à mettre en avant, afin que les préceptes du développement durable ne soient pas le support de communication et de marketing du secteur de la construction.
Il nous faut dépasser le mythe introduit lors de la première révolution industrielle, qui considérait la nature comme un monde infini, un réservoir inépuisable, que l’on peut exploiter, gaspiller et dont la valeur se juge à la valeur monétaire à laquelle on veut bien l’acheter. Il nous faut sortir de ce modèle productiviste, linéaire, fondé sur quatre logiques: extraire, produire, consommer, jeter. Et penser un mode de production de l’architecture qui par la limite en ressources et en énergie, développe une valorisation optimale de la matière.
Le souci d’une approche qui peut être multiple, réside plutôt dans les manières de les mettre en application. Nous avons davantage transformé la planète au cours des cinquante dernières années que durant toute l’histoire de l’humanité. En effet selon l’ONU, « le secteur des bâtiments est un énorme moteur de l’économie mondiale, il représente encore 38% des émissions totales de CO2 liées à l’énergie et 35% de la consommation d’énergie finale. » Le bâtiment est aussi un grand consommateur de ressources qui ne sont pas toutes renouvelables.
« Nous savons que tout mètre carré construit, aussi vertueux soit-il en matière de consommation d’énergie et de matériaux biosourcés, ne compensera pas les dépenses d’énergie (exploitation, production de Co2, d’extraction, de transport et de systèmes techniques mis en œuvre) nécessaires à sa mise en œuvre, s’il a été édifié inutilement. »23
La concrétisation par la matière de l’architecture, pose la question des matières premières, des conditions de leurs exploitations (extraction, fabrication, transport,etc.), de leurs mises en oeuvre sur le chantier, et par qui? C'est-à-dire de l’impact de l’acte de construire sur notre Anthropocène.
À travers cette citation, l’auteur introduit le rapport à l’utilité de produire une architecture, même bas-carbone, d’utiliser les ressources finies que porte et génère notre planète. C’est pourquoi il nous faut être attentifs. L’urgence du monde ne doit pas nous faire renoncer à penser et construire l’architecture de demain.
Il nous faut donc édifier des critères d’approbation de l’acte de construire, comme le revendique Paul Devaux, dans son article : « l’Habiter le monde : quelques critères d’habitabilité »24. Vision à laquelle j’adhère idéologiquement et qui peut se matérialiser, à travers trois angles de vues précis:
La dimension Temporaire
La dimension Corporelle
La dimension Sociale
Définition de l’architecture selon l’Institution Royal d’Architecture au Canada, https://raic.org/fr/raic/quest-ce-que-larchitecture. Blanc (Yannick ), quelles alliances pour demain ?, in Tribune Fonda N°238 - ODD, sur le site : https://fonda.asso.fr/ressources/lectures-ou-atterrir-de-bruno-latour-et-leconomie-symbiotique-disabelle-delannoy, Juin 2018 23 Dahbi (Malek), Construire moins mais construire malin : le rôle de l’architecte et de son client, in The Conversation, écrit le 28/04/2020, issu de https://theconversation.com/construire-moins-mais-construire-malin-le-role-de-larchitecte-et-de-son-client-136792? utm_source=whatsapp&utm_medium=bylinewhatsappbutton&fbclid=IwAR0t73aru6TQ4iqibhrF_hDzr1iCHaXAQIGLTxtvznfflXXdFJde5lkuLCM 24 Devaux (Paul), « l’Habiter le monde : quelques critères d’habitabilité », sous la direction de Rollot (Mathias) et Gérant (Florian), Repenser l’habitat, Alternatives et propositions!, Paris, Éditions Libre & Solidaire, 2018, p.101. 21 22
21
Roussel (Maxime), La dimension Sociale - La dimension Corporelle - La dimension Temporelle, Photomontage, format dâ&#x20AC;&#x2122;origine 42 x 29,7 cm.
22
TIC, TAC, TIC, TAC… La construction qu’elle soit vertueuse ou non est un acte qui s’inscrit dans le temps et l’espace. Le temps est une dimension du réel, qui selon Paul Ricoeur dans son texte Temps et récit25, se lit sous l’angle d’un triple présent, à savoir, le présent du passé, le présent du présent et celui du futur26.
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En d’autres termes et appliqué à l’architecture, on peut comprendre le temps selon la mémoire, l’attention et l’attente. L’architecture se pare du voile du temps, au fil des années pour grandir et devenir un symbole, une représentation de ce dernier. Le temps se lit dans les architectures, comme un livre ouvert, une mémoire. Elles racontent des histoires sur les paysages, les ressources, les traditions, les modes de vie, les organisations sociales et les sociétés. Les constructions sont les traces, la mémoire, des Hommes sur leurs temps, c’est pourquoi il ne nous faut pas renoncer à l’acte de construire.
Je m’inscris ici dans l’hypothèse que ces diverses temporalités n’ont pas la même valeur entre elles. En effet, en distinguant la durée de vie et la durée d’usage, je viens mettre en place un premier rapport hiérarchique entre eux.
Dans un premier temps, la durée de vie d’une architecture s’inscrit pour moi, dans son rapport à l’architectonique, la matière la mise en oeuvre et à l’attention. Un architecte doit penser au temps de constitution de la ressource, au temps d’extraction, au temps de transformation de celle-ci en matière première pour la voir devenir par la suite matériau, au temps de transport, au temps de mis en oeuvre, afin de devenir au bout de cette longue période, un élément, d’une architecture qui elle-même sera sujet aux temps et aux affres de ce dernier. Penser à ce cycle est une manière de prêter attention à l’acte de construire que je tente de mettre en place pour mettre en corrélation la durée de vie de la matière avec la temporalité de l’architecture. Le choix de la matière dominante, le CLT comme postulat de base est un acte qui fonde l’ensemble du processus créatif et intellectuel de l’architecture de mon projet.
Une fois la réflexion sur la matière engagée, il est également important de penser à la mise en œuvre de cette dernière au regard de la temporalité de la construction. La mise en oeuvre de la matière selon des préceptes nostalgiques de la mémoire est pour moi, une forme de pastiche intellectuel et une négation de l’époque actuelle. La mise en oeuvre d’une construction est la mémoire, la trace d’un savoir-faire, de la technique et de ces avancées à l’heure de la construction. Il est important de questionner la mise en œuvre pour qu’elle reflète notre époque, a fin qu’elle traduise, qu’elle fasse mémoire pour les générations futures ce qui nous, architecte/ Citoyen/Homme, nous préoccupaient.
Et c’est pourquoi, je milite pour une reconstruction de Notre-Dame de Paris qui ferait fi de la restauration à l’identique pour développer un discours qui serait le reflet de notre époque.
Mais à l’heure du changement climatique, il en va de la responsabilité de l’architecte de questionner l’utilité de l’acte de construire au regard des deux autres aspects du temps : l’attention et l’attente. Qu’elle soit événementielle, éphémère d’urgence, permanente ou éternelle, l’architecture est la somme de différentes attentions et attentes qu’il ne faut pas négliger et dont l’architecte peut s’emparer pour développer un engagement.
Guillot (Francois), L'émotion est grande dans les rues parisiennes, Photographie de presse, format d’origine inconnue, issue de https://parismatch.be/actualites/societe/ 259752/les-images-impressionnantes-de-la-cathedralenotre-dame-de-paris-en-feu, publié le 15/04/2019, DR: AFP.
Mettre en perspective l’acte de construire avec la durée de vie et/ou d’usage d’une construction, me semble être une première piste pour développer une réponse aux attentions et attentes de l’architecture bascarbone.
25 26
Ricoeur (Paul), TEMPS ET RECIT. - Tome 1, Paris, édition du Seuil, 1983. Vargas, Saint Augustin : Les 3 présents (lecture de Ricoeur), 29/10/2007, https://digression.forum-actif.net/t134-saint-augustin-les-3-presents-lecture-de-ricoeur
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UN COUP D’AVANCE Dans un second temps, la durée d’usage d’une construction s’inscrit pour moi dans son rapport à l’attente que l’on souhaite lui donner. La durée d’usage d’une architecture est en principe indéfinie par la société. Elle est fluctuante au gré des visions, des ambitions du corps décisionnel (politique, maîtrise d’ouvrage, gestionnaire, etc.). On peut citer ici en exemple le cas de la tour Eiffel, symbole de l’exposition universelle de 1889, devenu antenne radio et de télévision, paratonnerre et qui encore aujourd'hui est un site touristique d’envergure internationale. L’architecte par sa conception et la durée de vie qu’il souhaite mettre dans son architecture peut influencer cette donnée, en imaginant par la structure, par des dispositifs, par le choix de matériaux et de leurs mises en œuvre, d’instaurer dans la construction de la résilience. La résilience est une manière d’envisager les attentes de l’usager sans les lui dicter.
2019. La structure du pavillon d'accueil de la compétition Solar Decathlon était une simple tonnelle événementielle, issue du design d'objet. Répondant à la nécessité d’offrir un simple couvert éphémère, réutilisable dans l’état. Celle-ci n’avait aucune attention particulière, aucune attente et aucune fonction symbolique, ou expressivité architecturale pour faire mémoire. La structure d'accueil ne se positionnant donc pas dans le temps.
Il me semble donc qu’un pavillon d’accueil construit exclusivement pour une exposition temporaire soit une dépense de ressources et d’énergie assez contestable de ce point de vue. Ici, je prends position contre cette citation de Hans-walter Müller qui disait en 1970 : « l’homme est éphémère. Sa vie est éphémère. Ce qu’il fait doit-il durer ? L’architecture est le lien de sa vie, l’architecture doit mourir avec son utilisateur... » (extrait de Neuf, revue d’architecture)
C’est pourquoi il me faut remettre en cause l’objet d’étude proposé. En effet, pour la même durée d’usage et les mêmes conditions constructives lors de l’édition du concours en
Inconnu, Pavillon d’accueil du sde19, Photographie, format d’origine inconnue, issue d’échange avec les élèves de l’atelier Matérialité Printemps 2019.
24
Mais, afin de conjuguer l’objet d’étude proposé avec la p r o d u c t i o n d ’ u n « H a b i t e r confortablement une architecture bas-carbone», comme je le définis, je me dois d’intervenir sur la vocation de l’objet d’étude en augmentant la durée d’usage de ce dernier par l’ajout de nouvelles attentes, une seconde vie. Ce qui provoque in extenso de nouvelles attentions quant à sa matérialisation. La structure événementiel peut dès lors devenir une architecture bas-carbone inscrit dans sa dimension temporelle, en corrélation avec le questionnement chronique qui m’anime sur la dimension sociale d’un Habiter collectivement une architecture contemporaine, porteur de sens, de raisons, de solidarité.
LE PAVILLON COMME TERRAIN D’EXPÉRIMENTATION
LE PLAN DE ROUTE Ainsi, je souhaite que le pavillon soit, après son utilisation comme structure d’accueil de la compétition Solar Decathlon à Wuppertal, un vecteur de convivialité résidentielle, support de la sociabilité, de la vie collective et associative voire comme structure organisationnelle de coopérative locale, à l’échelle d’un quartier, afin de revenir du « Chacun chez soi », syndrome de l’individualisme urbain et retrouve une dimension sociale, solidaire et environnementale qui transmettra dans un territoire des Hauts-de-France les dynamiques du vivre-ensemble.
En effet en proposant d’amender l’objet d’étude pour en faire ce que je nomme un Community Center, j’utilise le pavillon d’accueil du Solar Decathlon comme un prétexte pour démontrer mon engagement et ma méthode de concepteur qui est retracé dans ce rapport et par le biais d’expérimentation. Il me parait donc important de faire le point sur la méthodologie employée à cette égard durant cette période de confinement
Comme une forme de tradition, la visite d’une exposition d’art et/ou d’architecture est un passage obligé, car elle me permet de clore la phase précédente. Le Centre Pompidou, la cité de l’architecture et du patrimoine, le pavillon de l’arsenal, … ensemble ils forment un parcours de ce rituel. À travers celui-ci je m’ouvre aux diverses thématiques actuelles comme l’habitat coopératif zurichois, l'agriculture urbaine, la figure de l’arbre dans le monde, ou encore des rétrospectives d’artistes et d’architectes que l’on questionnent avec un nouveau regard.
Roussel (Maxime), Concrétion de Utopiastadt pour le SDE21, Photographie, format d’origine 42 x 29,7 cm.
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Les conférences s’inscrivent dans ce même processus. Le plus souvent vulgarisatrice qu’informative, elles permettent de former une bases de connaissances communes dans un groupe de travail. Ma présence à ces conférence est pour moi, une manière d’entrevoir le sujet par le biais du regard de l’autre. Ce n’est pas tant la conférence qui m'intéresse ( même si le sujet peut me captiver ), mais la réaction qu’elle peut provoquer dans un débat ou un débrief’ que l’on organise à la fin de celle-ci. À travers ce débat, je ressens les point d’accroche du sujet dont je pourrais m’emparer (cf. les mins-mapping des réflexions de l’atelier).
L’acculturation représente une part importante des premiers temps du projet. La rencontre l’échange (Par exemple, pour ce projet de fin d’étude, j’ai rencontré Anthony Ponthieux, responsable de programme dans une maîtrise d’ouvrage pour entendre au delà du discours commercial, qu’elle serait son avis sur les diverses items d’un pavillon d’accueil pour une compétition architecturale. Parce qu’il est engagé dans une démarche similaire à travers la présentation d’un démonstrateur lors de la futur exposition Lille Capital Mondiale du Design), la visite, la compilation des savoirs, via la recherche libraire et numérique, me permet d’établir ce que je nomme mon « tableau de connaissance ». Outil de travail, il sectorise mon état de l’art de manière nonhiérarchisé. Support d’échange, pense-bête et outil pour la prise de recule, il représente pour moi, une manière de circonscrire le sujet et de me constituer une carte mentale de la thématique. C’est après cette phase d’acculturation que je prend généralement des choix conceptuelles qui vont déterminer le projet.
Elle est a mettre en parallèle avec une phase d’analyse sur la situation du site, sur la matière, et les programmes, afin d’entrevoir les contraintes et les opportunités qui peuvent influer le projet.
La définition des termes, des programmes, de la matière entrent dans le même cade.
La représentation abstraite est aussi un outil que je manie, aussi bien graphiquement qu’en maquette. L’avantage de ce dernier pour moi, est de trouver dans l’abstraction, une forme de mise à l’épreuve de l’inconscient, générant des paramètres pour la conception architecturale.
L’expérimentation fait partie de ma pratique architecturale, celle-ci se veut plus orienté sur la mise en oeuvre de la matière ou dans le rapport avec la dimension corporelle qu’elle peut entretenir avec l’usager.
RAPPORT DE PFE
ANALYSE & EXPÉRIMENTATIO N DU POTENTIEL DE LA MATIÈRE
ÉCHANGES RENCONTRES CONFÉRENCES
MÉMOIRE & CHAMPS RÉFÉRENTIEL
VISITES D’ENTREPRISES
CONTEXTE DE PRODUCTION
LECTURES TECHNIQUES & RÉFÉRENTIELLES
CHOIX DU PAVILLON
ACCULTURATION
CHOIX TECHNOLOGIQUE & ARCHITECTURAL
ANALYSE DE HAUBOURDIN
DÉFINITIONS DES TERMES
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Roussel (Maxime), Méthodologie du projet, Diagramme, format d’origine 42 x 29,7 cm.
SYNTHÈSE DE L’EXERCICE
MATÉRIALITÉS MATÉRIELLES & IMMATÉRIELLES VS PROJET
ANALYSE DE WUPPERTAL
ÉCHELLE 1/1
FORMALISATION DU PAVILLON
DÉFINITION DES BESOINS POUR LES PARTICIPANTS
REPRÉSENTATION ABSTRAITE GRAPHIQUE
Roussel (Maxime), Brainstorming, Photographie, issue de l’acculturation du semestre.
DÉFINITION DU MODE CONSTRUCTIF
PROGRAMMATION DU PAVILLON
REPRÉSENTATION ABSTRAITE PAR LA MANIPULATION DE LA MATIÈRE
DÉFINITION GRAPHIQUE DU PROJET
PRÉSENTATION DE L’ÉTAT FINAL D’INACHÈVEMENT DU PROJET
Afin de démontrer en quoi la démission sociale , temporelle et corporelle que je souhaite pour le pavillon, sont constitutif de mon approche du concept de l’ « Habiter confortablement une architecture bas-carbone ». Il est désormais nécessaire de le confronter à exercice du projet.
NE RTIE O Z SO / ÉE R T
EN
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N O I T ISA
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Roussel (Maxime), Analyse de la zone d’implantation du Pavillon d’accueil du SDE21 - Contraintes de giration des camions de livraisons, flux entrants et sortants, de sécurisation du site, Photographie sur maquette, format d’origine 42 x 29,7 cm.
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Dans un premier temps, le concours Solar Decathlon s’appuie sur des institutions scientifiques, économiques et associatifs locaux pour accueillir la compétition. Dans le cas présent, pour l’édition 2021 de Wuppertal, c’est le regroupement de l'Institut Wuppertal, le Neue Effizienz, des universités et l'initiative urbaine Utopiastadt. Cette dernière est un tiers-lieu créatif et culturel autour des questions de la ville, des mobilités, etc. Cette structure représente un nouveau pôle de dynamisme à l’échelle de la ville, développant depuis son implantation dans l’ancienne gare de Mirker. Organisatrice de tout un ensemble de festivité musicale, culturelle ou tout simplement de convivialité urbaine. L’utopiastadt accueillera, dans et autour de l’ancienne gare, l’organisation et sera le support de la compétition en mettant à dispositions sur son terrain se situant à l’extrémité nord du quartier Mirker.
La réhabilitation récente de la Nordbahntrasse, ancienne voie de chemin de fer, en piste cyclable et pédestre reliant d’Est en Ouest les différents quartiers de la rive Nord de Wuppertal, coupe le bâtiment de la gare avec le site même de la compétition qui se situe juste en face. À proximité immédiate de l’autoroute urbaine qui longe la partie nord, le site est également connecté avec le centre ville en contre-bas de la vallée.
L’objet d’étude du pavillon d’accueil de la compétition s’intègre dans la séquence d’entrée du site, il doit donc trouver sa place entre la gestion des flux entrants et sortants, l’accès des secours et les fonctions de repos, de convivialité et d’espace de travail pour la préparation des épreuves. Mais aussi faire symbole pour attirer les visiteurs et passants dans l’exposition de la compétition.
ONE STEP, TWO STEPS, THREE STEPS
ONCE UPON A TIME
Étant donné la particularité du programme que je souhaite développer, au regard de la filiation l’idéologie et l’historique, il me semble important de mettre le bon mot sur ce dernier. L’anglicisme employé est pour moi, une manière de ne pas confondre le programme que je souhaite mettre en place avec les revendications spatiales et territoriales que certaines communautés religieuses, ethniques, et sociales peuvent vouloir.
Community Center : Espace physique prévu pour accueillir une communauté d’habitants environnants, afin de permettre à ceux-ci de partager librement ressources, compétences et savoirs par le biais d’activités, de rencontres et d’événements. Lieux de sociabilité, implantés à proximité immédiate d’ensemble urbains, ce sont des espaces intermédiaires, ni à la maison, ni au travail et pas encore dans la ville qui ont vocation à y apporter une réelle valeur ajoutée, au service des usagers. À l’inverse des MJC et des maisons de quartier, les Community Centers sont des espaces organisés pour et par les personnes qui les fréquentent, leur gouvernance et fonctionnement tendent à être ouverts et participatifs. Ils ont vocation à intervenir sur l’amélioration du cadre de vie, en donnant un lien d’exercice de la cohésion sociale.
Roussel (Maxime), Square des Heurtebises avec le pavillon implanté par rapport aux connections piétonne du quartier, Photographie sur maquette, format d’origine 42 x 29,7 cm.
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UNE SECONDE VIE Dans l’objectif de sortir le pavillon du cadre éphémère de la compétition Solar Decathlon, le choix d’un second site d’implantation a été mené sur le secteur de la métropole lilloise, afin d’inscrire dans une dimension temporelle plus longue la durée d’usage de celui-ci.
Auteur inconnu, Quartier des Heurtebises, Photographie, format d’origine inconnu, date inconnue, issu de http://www.mametdom.net/Hdin/Div/AtelierHistoire.htm
La recherche de ce site s’est opérée selon différents critères. Le premier était d’intervenir dans un secteur à majorité résidentiel dans les communes formant la première couronne autour de Lille. En second, celui-ci ne devait pas être uniquement composé de maisons dites « 1930 », ce qui correspond à d’autres enjeux régionaux déjà expérimentés par les étudiants de l’ENSAPL lors du Solar Decathlon 2019. Le troisième critère portait sur un quartier n’étant pas en difficulté par rapport à la mobilité, à l’accès aux commerces de premières nécessités, ou éloigné des institutions scolaires et communales. Et quatrièmement que le site dispose d’un accès à des espaces de végétations dans sa proximité.
Cette recherche d’un site par rapport aux critères énoncés, vise à ne pas confondre des situations urbaines différentes et dont l’intervention aurait dû formuler une réponse par exemple à des situations de grandes précarités, d’éloignements géographiques des commodités, d’habitats indignes ou de concentration sociale. La recherche exclut donc les sites répondant au Programme National pour la Rénovation Urbaine.
Roussel (Maxime), Analyse de la situation urbaine - Quartier des Heurtebises, Cartographie d’analyse, zoom dans le document.
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Le choix d’un site s’organise plus autour des ambitions de la politique de la Métropole Européenne de Lille dans son Programme Local de l’Habitat 2012/201827 , qui oriente son action à travers les enjeux d’amélioration de l’habitat social. Celui-ci décrit son action par l’amélioration du cadre de vie pour les habitants dans l’ensemble des quartiers de la métropole (confort des logements, services rendus aux locataires), par le maintien de l’accessibilité financière du parc (loyers et charges) et par la réduction des émissions de gaz à effet de serre du parc immobilier social existant.
MEL, Programme Local de l’Habitat, édition 2012/2018, consultable sur https://www.lillemetropole.fr/sites/default/files/2018-11/synthese%20PLH-Lille-Metropole_dec2012.pdf.
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C’est le quartier des Heurtebises à Haubourdin qui a été retenu pour accueillir le projet de pavillon à la suite de l’exposition de la compétition Solar Decathlon. Les Heurtebises sont un ensemble urbain qui marque la limite administrative entre Haubourdin et Loos. Situé à l’extrémité du territoire communale, l’ensemble d’HBM (Habitation Bon Marché) construit en 1951, marque la réponse de la commune quant à la crise du logement de l’après-guerre. Regroupant dans un premier temps 182 logements répartis en 11 bâtiments semblables, le quartier s’est étoffé en 1952 de logements intermédiaires et à la suite de la destruction de la ferme Bulteel, d’un nouveau lotissement en 1957, au coeur de l’ensemble urbain.
Sa position périphérique par rapport au centre-ville d’Haubourdin, la place à proximité d’un ensemble scolaire allant de la maternelle au collège, d’un gymnase, d’un complexe aquatique et d’une école de musique. Elle est également proche des jardins ouvriers et du parc des Heurtebises dont l’accès est réglementé par l’ouverture de la piscine et du centre de loisirs de la ville de Loos, le Château de la Pierrette. Le quartier dispose des commerces de la rue Sadi Carnot et la zone commerciale à l’entrée de Loos.
Propriété du bailleur social, Partenord Habitat (en tout cas pour les logements collectifs), l’organisme HLM a fait réalisé dans le cadre de la rénovation énergétique de son patrimoine immobilier, une remise à niveau de l’isolation thermique et des équipements techniques, un désamiantage complet, et une adaptation des logements aux normes d’accessibilité pour les personnes à mobilité réduite. Cette mise en conformité de son patrimoine en 2012 a également permis au bailleur de faire passer de 182 à 204 son offre de logement. Cette opération a été possible en supprimant l’accès aux caves, en externalisant les locaux poubelles et vélos et en supprimant des Locaux Communs résidentiels en rez-dechaussée. La crise économique, la longue période de travaux et la disparition de certains commerces au rez-de-chaussée des logements intermédiaires à isoler le quartier du reste de la ville. Le quartier des Heurtebises est donc devenu une zone-dortoir sans réelle dynamique associative ou de voisinage.
Roussel (Maxime), Analyse de site - Relation avec le territoire d’Haubourdin, Cartographie, format d’origine 42 x 29,7 cm - échelle de représentation 1/10 000.
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Après une lecture analytique du territoire et des possibilités urbanistiques, le choix de s’implanter au centre du square des Heurtebises me semble être la meilleure solution. Le Plan Local d’Urbanisme qualifie la zone (UCO5.1) comme étant réservé à l’habitat collectif, mais laisse libre d’intervention toutes actions pour l’amélioration du cadre de vie. La position d’articulation de cette parcelle entre les différents types d’habitats laissera la possibilité au Community Center de générer des dynamiques de socialisation, d’échanges, de partage et de rencontres entre voisins.
En désignant à la fois, ce qui rassemble et ce qui sépare, le mot partage inscrit donc le pavillon dans son rapport de proximité et de distance que je recherche. Mettre en place, en dehors des bâtiments d’habitats collectifs, des espaces partagés avec toute l’unité de voisinage. C’est permettre de conjurer l’intimité des habitants et imaginer le vivre ensemble.
Considérant l’impact des transformations du bailleur social sur le cadre bâti (rénovation thermique), sur la programmation du lieu (suppression des LCR) et sur la population habitante (densification, ségrégation sociale), une intervention au sein de ce quartier visant à l’amélioration du cadre de vie participera au « Bien vivre la ville »28 que je souhaite apporter. Cette action sur le cadre de vie s’appuie sur l’ouvrage Bien vivre la ville, vers un urbanisme favorable à la santé, ce dernier, me pousse à intervenir contre la destruction des liens sociaux au sein de la société et plus particulièrement dans une unité de voisinage, car elle aboutit à rentrer dans une spirale d’exclusion, d’isolement social, de stigmatisation, ou de perte des rôles sociaux à l’intérieur de celui-ci. En effet, la socialisation (familiale, culturelle, professionnelle ou de voisinage) contribue à la construction de l’identité propre de l’individu, selon le psychologue Gustave-Nicolas Fischer29 .
Ainsi, inclure dès la conception, la seconde vie du pavillon d’accueil de la compétition Solar Decathlon, comme support de la vie sociale via des dispositifs d’échange, de partage, de mutualisation, à l’échelle d’un quartier de la métropole lilloise, me questionnes en trois points.
Roussel (Maxime), Diagramme d’intention quant à la dimension sociale - Faire du Square des Heurtebises l’emplacement d’un Community Center, diagramme, Zoom dans document.
28 29
Capeille (Jean-François), Bien vivre la ville, vers un urbanisme favorable à la santé,Archibooks+Sautereau Editeur, 2018 Fischer (Gustave-Nicolas), La psychologie sociale, Edition du Points, Coll. Points Essais, Paris, 2017
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Comment la dimension corporelle organise ces espaces ? Quelle est la logique qui soutint le dimensionnement, les transitions, le parcours entre eux depuis l’oeil de l’habitant/ usager?
EN TROIS DIMENSIONS
Comment l’usager du Community center peuvent être partie prenante de la logique programmatique de ces espaces au regard de la double temporalité de ce pavillon?
Quelle est l’interaction qu’entretien le CLT avec le Community Center à travers son rapport à la mise en oeuvre et la définition de l’ambiance intérieure?
ES U N IQ T O I A T ST LA S U E IRC AC P C ES
CE A P ES
UE Q I AM N DY
Nord Architects, Community Center, Plan, format d’origine inconnu, sur https://divisare.com/projects/420469-nord-architects-adam-mork-a-small-community-center-built-in-clt-wood-renews-the-localcityscape
Pour répondre à ces questions, j’émets dans un premier temps, l’hypothèse qu’un espace peut être défini par « la corporéité de la nature humaine »30, à savoir l’usage et les échelles d’usages dans la lignée de Paul Devaux. J’interprète les échelles d’usages comme Jean Cousin dans son ouvrage « Espace vivant, introduction à l'espace architectural premier »31, selon le caractère statique ou dynamique qu’arbore un espace.
Ainsi, les espaces qualifiés de dynamiques ont vocation à accueillir les possibles, à être le réceptacle de l’imprévu. Ils sont sujets aux changements et aux modifications de leur configuration au regard de l’usage que l’on y projette. Et à l’inverse, les espaces qualifiés de statique, ont vocation à permettre le repos, la concentration ou la contemplation, car elle engage l’usager dans un temps plus long, ce qui influe l’aménagement de ces dernières. J’identifie cette même logique organisationnelle dans le Community Center, produis par Nord Architects à Copenhagen. La succession, l’enchaînement et l’emplacement des espaces dynamiques et statiques sont moteurs d’une « architecture vivant »32, en fonction de la perception de l’usager.
Devaux (Paul), « l’Habiter le monde : quelques critères d’habitabilité », sous la direction de Rollot (Mathias) et Gérant (Florian), Repenser l’habitat, Alternatives et propositions!, Paris, Éditions Libre & Solidaire, 2018, p.101. Cousin, (Jean), Espace vivant, introduction à l'espace architectural premier. Paris, Éditions du moniteur 1980. 32 Ibid. 30 31
32
Roussel (Maxime), Espace dynamique, Persceptive et photomontage, format d’origine 42 x 29,7 cm, le 05/06/20
Roussel (Maxime), Espace statique, Persceptive et photomontage, format d’origine 42 x 29,7 cm, le 05/06/20
Considéré comme étant dynamique, c’est la perception de la profondeur accentuée par la perspective linéaire, les proportions et la texture qui fonde la compréhension de l’espace.
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Considéré comme étant statique, c’est la perception d’un espace définie, où l’usager est confronté aux limites spatiales et dont on identifie clairement l’usage, qui permet la compréhension de l’endroit.
34 Roussel (Maxime), Community HUB, Espace dynamique et Espace statique, Photomontage personnel, format dâ&#x20AC;&#x2122;origine 42x29,7cm, le 13/02/20
Vision balbutiante du projet à ces débuts, le photomontage ci-dessus est une représentation des interactions que peuvent entretenir les espaces dynamiques et statiques entre eux via des transitions qui relèvent de l’ordre de la mesure et de la matérialité, mais également par l’usage de l’espace.
ORGANISATION COLLECTIVE
PRÉSENTATION
Questionner l’usage d’un lieu qui a vocation à servir à deux durées d’usages différents est pour moi problématique. L’architecture de ce pavillon doit être en capacité de répondre à un double enjeu, à une double implantation et à deux publics. L’appropriation de ces espaces par l’usages étant une question relativement inscrite dans un contexte et n’ayant pas pu, en raison de la crise du coronavirus, appréhender les deux sites et questionner les attentes des deux publics, je me suis donc, concentré sur la flexibilité qu’offrait une organisation entre espace dynamique et statique hiérarchisée.
EXPOSITION
Tel à la manière des architectes pour l’organisation des espaces partagées au sein de Kalkbreite33, je suis venu structurer l’organisation du pavillon par un jeu de proportion spatiale.
Les espaces qualifiés de statique sont en trois ordres, petit, moyen et grand. Cette graduation de surface permet d’envisager une occupation relative de l’espace en fonction du nombre d’usagers et de l’activité. Ainsi, on peut imaginer qu’un espace de travail de groupe, de taille intermédiaire, lors du Solar Decathlon devienne un atelier de peinture pour une association. Ou alors que le grand salon devient une salle contenant divers équipements de sport. L’attribution de l’usage de ces espaces est à constituer par une forme d’organisation qu’il sera à établir dans le lieu d’implantation de la seconde vie. C’est en effet, ce qui se passe encore actuellement dans la Maison Radieuse, l’AHMR a pour fonctionne gérer l’organisation des locaux spéciaux, en fonction de l'affluence à telles ou telles activités.
Les espaces qualifiés de dynamique, quant à eux permettent de recevoir des événements plus atypiques ou nécessitant plus de place pour l’exercice de l’activité. Le Bronx, par exemple remplit cet usage dans le cas de Kalkbreite.
VENTES PRODUITS LOCAUX
…
SOUTIEN SCOLAIRE
SOIRÉE DÉBATS
ATELIER DE BRICOLAGE
LE GRAND SALON
CLUB SPORT
COIN CAFÉ
PAYSAGE EXTÉRIEUR
PAYSAGE INTÉRIORISÉ
CLUB TV
WC
SALLE D’ACTIVITÉS
CIRCULATION
Roussel (Maxime), Schéma Programmatique, Usages et Espace dynamique/statique, Diagramme personnel, le 13/02/20
33
Voir site internet qui détaille les boxs,
35
SALLE DE JEUX
BUREAUX
…
CLUB INFORMATIQUE
Azam (Jacques), Dictature, format d’origine inconnue, issue de https://medium.com/essai-pour-un-réseau-politique-des-transitions/ introduction-1-5-85b1e6c1c698, publié le 22/10/2017. DR
L’EMPOWERMENT Ainsi, en instaurant la mise en place d’une dichotomie spatiale entre statique et dynamique qui régit l’organisation même du pavillon, je viens proposer un trait d’union entre les deux phases temporaires qui composent la durée d’usage de ce dernier.
L’attention que je porte pour cet espace en laissant l’appropriation spatiale à l’usager grâce à l’indétermination programmatique permet d’en faire une boîte à outils pour les usagers. Ce libre choix laissé sans une forme de contrôle préétabli des usages dans le pavillon, relève d’une volonté personnelle de non-influence sur la gestion de cet espace, afin de mettre en œuvre pour les habitants d’une « unité de voisinage »34 , les préceptes de « l’empowerment »35 comme forme d’émancipation. L’objectif étant, selon MarieHélène Bacqué, sociologue et urbaniste, d’ « Articuler deux dimensions : celle du pouvoir, {…} et celle du processus d’apprentissage pour y accéder. »36.
Ici, je m’oppose à la stratégie adopter dans la structuration organisationnelle de la coopérative d’habitat de Kraftwerk. Andreas Hofer, Martin Blum et Hans Widmer étant à la fois penseur (à travers le manifeste des bolo’bolo), les architectes du projet et membre du corps décisionnel de la coopérative à générer pour eux, une forme de frustration quant à l’usage qui était fait de tels ou tels espace. C’est notamment ce qui les a fait quitter progressivement la coopérative pour en fonder d’autres, où leurs rôles étaient moins amples.
Fort de mon expérience dans l’action socioculturelle auprès des publics adolescents et jeunes adultes, la stratégie du laisser-faire est pour eux, le moyen de se coordonner, de s’organiser et donc de forger une forme de cohésion sociale plus pérenne dans le temps. Cette expérience est également vérifiable auprès de l’AHMR qui étant préexistante à l’ouverture de la Maison Radieuse de Rezé , a en charge encore actuellement, après 65 ans, la gestion des espaces partagés auquel Le Corbusier et son équipe n’ont jamais pris part. Mais j’entends que c’est aussi un vecteur de risque, car potentiellement instable.
Notion développée par Park (Robert E. ) (sociologue), « The City : Suggestions for the Investigation of Human Behavior in the City Environment », Journal of Sociology, numéro de mars 1915. Que l’on pourrait traduire sous « Pouvoir d’agir », « Capacitation citoyenne », « Développement du pouvoir d’agir », voire « Empouvoirisation » 36 Rouff (Katia), "L’émancipation par l’empowerment », Lien Social, n°1123, 24/10/2013, in https://www.lien-social.com/L-emancipation-par-l-empowerment. 34 35
36
Maintenant que l’on a identifié les tenants et aboutissants de la dimension temporelle et sociale pour construire une architecture bascarbone où l’on peut Habiter confortablement par le biais de l’amélioration du cadre de vie du quartier des Heurtebises. Il est important d’axer la réflexion sur la dimension corporelle que peut entretenir cette architecture de CLT avec l’usager par sa matérialisation.
« La construction agrège des matériaux selon des techniques. Les matériaux sont choisis selon leur nature, leurs performances, leur aspect... et aussi maintenant selon leur empreinte écologique, c’est à dire l’énergie grise nécessaire à leur production et leur transport. Selon la même évolution, le corpus des techniques ne décompte plus seulement la mise en oeuvre sur le chantier mais aussi les techniques de production des composants et des matériaux industrialisés utilisés. »37
Roussel (Maxime), La matière est sociale, Photomontage personnel, format d’origine 42x29,7cm, le 13/02/20
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Gauzin-Müller (Dominique ) et Cité de l’architecture et du patrimoine”Habiter écologique - Quelles architectures pour une ville durable?”, Cité de l’architecture & du patrimoine, Actes Sud, Arles, 2009.
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LE CLT ET LA DIMENSION CORPORELLE
Villa Korup / Jan Henrik Jansen Arkitekter + Marshall Blecher avec une structure en panneaux/dalles élémentaires,
Ainsi en prenant le postulat de travailler le CLT comme matériau dominant pour développer ce projet d'une architecture bascarbone, je sais que j’exclus un grand nombre d’autres matières et matériaux. Je suis conscient que certains d’entre eux auraient été en capacité de répondre à l’enjeu social et temporel que je souhaite pour le développement d’une architecture contemporaine encrée dans la mémoire du passé, l’attention du présent et l’attente pour le futur.
Mais choisir de prendre le CLT comme matériau pour ce projet, est pour moi, une manière de le comprendre, de l’interroger en l’expérimentant. Ce dernier me questionne quant à la manière de le mettre en oeuvre, quant à son apport en termes de préfabrication, de construction hors site, quant à l'esthétique et à la mise en avant de sa matérialité à travers le rapport qu’il peut entretenir avec l’espace architectural. Quelle est l’éthique qui soutient l’usage de ce matériau? D’où vient le bois employé? Quelle est son essence?
Le CLT est un matériau qui a pour principale caractéristique d’être un matériau composite à base de bois. Ce dernier est façonné à la demande lors de sa production, il n’a donc pas une forme définie en tant que telle, mais est limité par l’outil de production qui fournit le matériau en panneau. La mise en oeuvre de ce matériau est donc sujet à interprétation via l’expérimentation. Pour ce faire, j’ai réalisé un état-de-l’art sur la question à travers trois réalisations représentantes de trois mises en oeuvre différentes.
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R é s i d e n c e s o c i a l e To u l o u s e / P PA architectures avec une structure en modules tridimensionnels,
Royal Belgian Sailing Club Alberta / Wim Goes Architectuur, avec une structure en refends porteurs.
La structure en panneau-dalle élémentaire entre dans une logique de structuration du projet à partir d’un système métrique. Les panneaux et les dalles sont alors découpés en fonction de cette grille de proportion. L’assemblage entre eux se fait par des encastrements. L’écartement entre les panneaux vient ainsi définir la place de la menuiserie. Les principaux inconvénients sont la nécessité de venir contreventer la structure par l’ajout d’éléments porteurs intermédiaires, comme un noyau ou un refend. Pour jouer de la matérialité du CLT, les panneaux doivent être isolés uniquement par l’extérieur.
La structure en modules tridimensionnels regroupe en un seul élément transporté : murs, dalle, toiture, ce qui favorise une construction rapide. Soit les modules sont collés les uns aux autres, soit l’écartement entre eux fait l’objet d’une intervention complémentaire via d’autres systèmes constructifs. L’organisation en module doit également recevoir tous les équipements et aménagements dont les percements pour les menuiseries intérieures durant la phase de préfabrication, car ils ne seront plus accessibles une fois le montage fini. Ce dispositif constructif apporte l’avantage que l’insonorisation des espaces est meilleure car il n’y a pas de continuité entre les panneaux de CLT. Ce système ne permet pas de disposer de grandes surfaces car il est contraint par la logique de transport qui le régit. Un autre inconvénient présent dans ce système constructif est que pour un mur, il y a en réalité deux panneaux de CLT, car le mur est formé par la jonction de deux modules.
La structure en refends porteurs organise l’espace habitable par rapport aux positionnements de ces derniers. En travaillant le croisement des murs de refends, la structure devient auto-stable. L’enveloppe (mur-rideau, façade) peut être indépendante de la structure. Les fondations se situent sous les refends. Les planchers peuvent s’accrocher sur le refend et la toiture peut venir en superposition de ceux-ci. Les murs de refends n’étant pas en contact avec l’extérieur, il est possible de voir la matérialité du CLT sur les deux faces et donc d’avoir un jeux de finitions différenciées. Ce dispositif constructif nécessite que les percements soient prévus dès la phase de production du panneau.
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Au vu de l’état d’avancement du projet, le choix d’utiliser une structure en refends porteurs semble être la solution optimale quant à la définition spatiale et matérielle que je souhaite.
Étant produit industriellement, le CLT a une tolérance dans sa production inférieure à 2 mm. Une irrégularité sur le terrain ou sur la rectitude des fondations peut engendrer de gros ennuis sur le montage des éléments en CLT, L’assemblage de celui-ci joue donc un rôle important.
Une réflexion sur l’assemblage du CLT a été mené dans le but d’identifier des solutions facilitant le caractère montable/démontable du pavillon. En effet en servant de pavillon d’accueil à Wuppertal et de Community Center à Haubourdin, l’assemblage d’éléments de la structure en CLT représente un intérêt important. Ce dernier a été réalisé à travers une recherche de documentations auprès de distributeurs de visserie, comme par exemple Knnap, Simpson Strong-Tie ou encore Rothoblaas.
En ce qui concerne l’isolation du pavillon, le choix de la matière isolante n’est pas fixée. Je suis encore en train de comparer les bénéfices que je pourrai tirer des différents isolants biosourcés sur le marché. Même si j’ai une préférence pour l’isolation en fibre de bois, au regard qu’elle est également issue de la même ressource, voire co-produit issu du recyclage des chutes de CLT dans une économie circulaire. L’isolation en fibre de bois est encore en réflexion quant à l’apport d’isolation thermique pour le pavillon.
Walco-V, publié sur https://www.knapp-verbinder.com/fr/ produit/walco-v.
Ensemble, ils proposent des assemblages sur rive ou sur champs, via des plaques m é t a l l i q u e s , d e s v i s s a g e s c ro i s é s , perpendiculaires ou via des languettes, mais également des connecteurs métalliques.
Ces derniers présents chez différents fabricants ont attiré mon attention. Implanter aussi bien sur la rive que le champ, cette solution permet de joindre des éléments structurels sans être visible. Dissimuler grâce à la déforce du bois, les connecteurs métalliques sont généralement de l’ordre de trois pour chaque jonction. La ferrure en forme d'entonnoir permet d’accompagner l’emboitement de la vis d’accroche dans le panneau depuis l’engin de levage. Ce système offre la possibilité de réglage de la pression d’assemblage, par exemple : pour les joints ou pour rattraper les tolérances.
Les fondations ont fait l’objet de la même intention, trouver un système permettant d’être utiliser une première fois à Wuppertal et une seconde à Haubourdin. Pour éviter toute utilisation du béton, même en fondation, et pour éviter tout contact entre le CLT et l’humidité du sol, je me suis orienté vers des systèmes de vis de fondation. Simple à mettre en oeuvre, elles peuvent faire appel à la force d’un ouvrier via un bras de levier, ce système de vis évite d’avoir de la terre à évacuer tout en permettant une mise à niveau directe de la structure
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Vis de fondation 1500 mm WEASYFIX, publié sur https:// www.kulturbois.com/vis-de-fondation-pour-terrasse/3594vis-de-fondation-1500-mm-weasyfix-pour-terrassebois.html
« Nos constructions sont faites de matière, pour autant ils ne sont pas des objets de consommation. L’usure n’est pas à éviter, elle est à chercher. En réalité, il n’y a pas d’usure, seulement la marque du temps qui, lorsqu’elle est intégrée au projet, est plutôt l’acceptation de la temporalité dans la matière. Cette temporalité incarnée donne à habiter. Car alors la temporalité humaine inscrite dans le monde intérieur - celle de notre vie qui passe - peut rentrer en homologie avec le monde extérieur. Nos lieux sont donc à concevoir de sorte qu'ils promeuvent et inscrivent dans la matière cette temporalité humaine qui ne demande qu’à s’exprimer. »38
Devaux (Paul), « l’Habiter le monde : quelques critères d’habitabilité », sous la direction de Rollot (Mathias) et Gérant (Florian), Repenser l’habitat, Alternatives et propositions!, Paris, Éditions Libre & Solidaire, 2018, p.101.
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Au-delà de l’aspect technique de la construction, qui vous sera plus amplement présenté lors de la soutenance du projet, la définition spatiale et matérielle est une question éminemment en lien avec la dimension corporelle qu’entretien la matière avec l’homme.
Comme nous l’avons vu précédemment, La mise en valeur de la matérialité du bois est un enjeu important dans le projet. Démonstratrice du mode constructif, bénéfice qu’offre le bois en terme de climat intérieur grâce à son excellente capacité de régulation de l’humidité ambiante dans l’espace architectural, il serait dommage de dissimuler intégralement le CLT sous des couches de plaques de plâtres en n’en faisant qu’un univers aseptisé. Mais loin de moi, l’idée de faire de ce pavillon ce que je formule sous l’expression : « un chalet suisse ».
Je souhaite que les espaces aux caractères dynamiques comme statiques, ne soient pas étouffés par une texture de bois omniprésente. Il me faut donc trouver un juste milieu qui magnifie le bois en tant que matière noble dans l’espace architectural, mais également une certaine neutralité de l’atmosphère pour créer un jeu de registre entre ce bois et la non expression comme faire-valoir.
Afin de mener ce travail, une recherche sur les traitements appliqués sur le CLT aussi bien décoratifs que protecteurs a été menée. Comme tout les produits à base de bois, le CLT peut recevoir une couche de peinture, de vernis, mais ces traitements génèrent un film qui bloque toutes les porosités du bois et donc sa capacité de régulation hygrométrique. Pour protéger le CLT en intérieur, il existe d’autres traitements, comme la lasure. Celle-ci permet de pénétrer en profondeur dans le bois pour le protéger des UV et/ou le teindre. Après pour la face extérieure, il est impératif de la protéger contre le soleil et la pluie. Sans protection, le CLT, malgré ses caractéristiques physiques, est soumis à des dilatations et rétractations avec pour conséquence des déformations et des fendillements. Avec les effets du soleil, Il grisonne et ternit. Pour palier à ce phénomène, un saturateur de grisaillement peut être employé. Il forme alors une couche de protection contre l’humidité, responsable des agressions des insectes xylophages (mangeurs de bois) et autres champignons et préfigure l’esthétique du bâtiment. Roussel (Maxime), La matière est corporelle, Photomontage personnel, format d’origine 42x29,7cm, le 13/05/20
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Le CLT, comme tout autre matériau de structure peut recevoir un revêtement extérieur dans l’objectif de protéger ce dernier des intempéries. Le bardage bois ou directement le CLT peuvent faire l’objet d’une technique de protection par le feu. Lorsque le bois est exposé au feu, la surface exposée brûle, créant une couche de protection naturelle carbonisée. Le charbon de bois agit comme un isolant, retardant le début du chauffage du noyau de bois en dessous. En raison de la composition en blocs solides du bois massif, l'air et le feu sont inhibés dans leur déplacement. Cette technique a été expérimentée sur des échantillons de bardages que j’ai réalisé.
Proposer par certains fabricants, le CLT peut être produit avec une face visible. Ce choix rajoute une étape dans la production, afin d‘avoir la finition poncée ou brut de sciage. Même si la finition poncée est très belle en soit, et comme j’ai eu l’occasion de constater, le CLT est un matériau qui marque fort le moindre coup, griffure, etc. Travailler une texturation du CLT à part entière, pourrait permettre de limiter cet inconvénient
Poinçonné, bouchardé, martelé, etc…, en appliquant diverses altérations sur la finition du CLT, le matériau développe à lui-même une dimension temporelle. Je veux dire qu’à travers ce processus d’altération, le CLT, « matériau sans forme »39 retrouve une présence, une trace, une mémoire. Comme tout élément en bois, il nous est encore permis d’intervenir pour remettre en état. Mais les coups, l’usure, les dégradations seront inscrits pour moi, dans son corps. Je ne pense pas que ces traces sont à éliminer au fil du temps, au fil de l’entretien du pavillon, l’altération est un processus qui marque le passage du temps sur la corporéité de la matière.
L’emploi du CLT dans la construction d’une architecture bas-carbone trouve sa place dans notre cas au-delà de l’emprunte carbone qu’il arbore, grâce à sa simplicité d’assemblage, grâce au caractère auto stable que permet la structure en refends croisés, grâce à la présence qu’il a dans l’espace et grâce à l’altération qui peut lui être appliquée.
Roussel (Maxime), Expérimentation autour de la technique du SHOU SUGI BAN & Expérimentation sur la texturation du CLT en intérieur, Compilation photographique, format d’origine des différents expérimentations 21x29,7cm, le 12/06/19
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Leray (Christophe), « Construction bois, miroir aux alouettes ? », publié sur https://chroniques-architecture.com/le-bois-clt-miroir-aux-alouettes/, le 30/01/2018
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CONCLUSION
UN PAS DE PLUS …
qui reste à inventer tant il est encore balbutiant dans la construction.
La compilation du travail, des idées, des pensées et des expérimentations, dans le corps de ce présent rapport a dans un premier temps, permis de fair le point sur l’ensemble du chemin parcouru depuis le début du semestre, mais également au sein de cette école.
Par l’interprétation du prétexte proposé d’un pavillon d’accueil, le sujet a translaté pour devenir un Community Center répondant à une situation concrète que je côtoie. Engagé auprès de jeunes, la mise à disposition de ce type de structure leur permettant rencontres, échanges, convivialités et surtout solidarité, pourrait leur permettre de développer plus que ce qu’ils imaginent : à savoir eux-même.
L’accompagnement en atelier et en visioconférence, croisé à une méthode personnelle basée sur mon champ référentiel, sur une pratique engagée de l’architecture et l’analyse d’expérimentation, a permis d’exposer les interactions que je souhaite pour ce projet entre le CLT et les dynamiques du vivre-ensemble.
Inscrire ainsi dans une dimension temporelle plus longue l’utilité de cette structure après le Solar Decathlon est pour moi, une manière de justifier l’acte de construire, la dépense en ressources, en énergie grise. C’est aussi faire preuve de mémoire pour le passé, d’attentions pour le présent et attentes pour le futur.
Constitutif de ce qui me définit en tant qu’architecte et Homme, l’inclusion dans ce projet d’une dimension sociale, pleine et entière, d’une vision idéalisée peut être, mais souhaitée d’un monde où les Hommes sont plus proche les uns des autres par le biais de l’architecture, était pour moi importante à mettre en avant.
L’interaction entre la matière, la dimension corporelle de celle-ci, par la prise de recul quant à la manière dont on l’a exploitée et produite pour devenir matériau et ensuite mise en oeuvre pour devenir architecture, se révèle être un voyage initiatique qui tend à questionner nos pratiques, nos actions. « L’environnement humain et l’environnement naturel se dégradant ensemble, {…} nous ne pouvons pas affronter adéquatement la dégradation de l’environnement si nous ne prêtons pas attention aux causes qui sont en rapport avec la dégradation humaine et sociale »40 . Ici, en reprenant les mots du Pape François, et comme j’ai déjà pu l’exprimer dans le manifeste, selon moi, il nous faut prêter une attention équivalente aux progrès socials et aux progrès écologiques dans la construction. Choisir d’utiliser du CLT pour une architecture c’est se confronter à un produit vendu comme miraculeux pour le secteur d’activité. C’est oser aller plus loin que cette vision en se confrontant à sa présence, sa massivité, à sa rugosité et à son altération au fil du temps. C’est se conforter à un matériau
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Afin que construire permet toujours de laisser le monde un peu plus meilleur qu’on ne l’a trouvé. Il est important que l’engagement, les convictions et les ambitions soient toujours mises en avant. L’architecture n’ayant à mes yeux d’utilité qu’en étant porteuse de sens, de raisons et de solidarité. La profession d’architecte a encore pour moi, une place à prendre dans les choix sociétaux, les choix éthiques et esthétiques de l’époque. Car pour moi, être architecte, c’est être face au monde.
À ce stade, le projet est encore balbutiant. Les dernières semaines seront donc consacrées au développement des intentions exposées ici. Leur mise en forme en dessins et en maquettes est essentiel pour permettre au projet d’être convaincant.
Mais que ma future pratique de l’architecture soit modeste ou élogieuse, grande ou petite, rurale ou urbaine, neuve ou rénovée, construit ou non réalisée, écrite ou imagée, l’architecture que je défends est ma manière d’être au monde. La trace d’Homme/Citoyen/ Architecte que je souhaite laisser sur la terre, sur un territoire, un milieu, un environnement, une forme de trace, d’impact qui demande de l’énergie et des ressources aussi bien en pensée, en force de travail qu’en matière première.
Roussel (Maxime), Première formalisation, Maquette, format d’origine 100 x 100 cm, le 12/03/20
Pape François, Encyclique ‘Laudato si’, 18 juin 2015, http://w2.vatican.va/content/francesco/fr/encyclicals/documents/papa-francesco_20150524_enciclica-laudato-si.html.
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Ensemble et séparément - Des lieux pour cohabiter, Bruxelles, Éditions Mardaga, 2018
- Rollot (Mathias), Guétant (Florian) (coordination), Repenser l’habitat Alternatives et propositions !, Paris, Éditions Libre & Solidaire, 2018
- Kaufmann (Hermann), Krötsch (Stefan), - Boudet (Dominique), Nouveaux logements à
Entre voisins - Dispositif architectural et mixité sociale, Paris, Les Éditions de l’Épure, 2000
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- Capeille (Jean-François), Bien vivre la ville, vers un urbanisme favorable à la santé, Paris, Archibooks+Sautereau Editeur, 2018
- Conrads (Ulrich), Programmes et manifestes de l’architecture du Axe siècle, Paris, Éditions de la Villette, 2017
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Zurich - La renaissance des coopératives d’habitat, Zurich, Park Books, 2017
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BORDER CROSSING ARCHITECTURE ET PAYSAGE DU CHANGEMENT CLIMATIQUE
DE MATERIALITE
PRINTEMPS 2020
ATELIER DE PROJET
V. DUCATEZ + G. HIS + C. MICHEL
TD ASSOCIES
B. GODBILLE + F. LACOSTE + H. MARCOZ
APPORTS
M. HOWARD + V. LIEGEY + A. ORVANE + L. HAMOT
POSITIONNEMENT
Cet enseignement s’inscrit franchement dans la réalité du changement climatique. Son enjeu principal est celui du projet architectural contemporain bas-carbone. Faisant suite à l’implication longue de 5 ans de l’ENSAPL et de ses partenaires dans l’expérience victorieuse du concours Solar Decathlon Europe 2019, il s’agit désormais d’explorer de nouveaux horizons. Cette ambition s’inscrit dans les fondements pédagogiques et conceptuels du Domaine d’Etudes « Matérialité, pensée et culture constructive », dont, en premier lieu, l'articulation des problématiques du projet et des problématiques de recherche déclinée autour de la confrontation à la matière, de la tectonique et de la transdisciplinarité.
OBJET D’ETUDES
L’objet d’études est celui d’un pavillon d’une centaine de m². Sa matérialisation architecturale sera démonstratrice d’une éthique responsable et d’une méthode de conception formalisée en phase avec les problématiques contemporaines. Parmi les orientations possibles repérées figurent un pavillon d’accueil pour le Solar Decathlon Europe 21 à Wuppertal, une réponse au Fab City Campus. D’autres options existent dont celles portées par les étudiants que les enseignants s’engagent à soutenir dès lors qu’elles rencontrent notre positionnement. Ainsi, l’atelier se concentrera particulièrement sur trois orientations : ▪ l’esthétique ▪ l’éthique ▪ La méthode
L’ESTHETIQUE
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L’ETHIQUE
Il apparait de plus en plus important de considérer que les seules solutions techniques, économiques ou sociales ne sont pas suffisantes dans la production d’une forme architecturale aux matérialités visibles et invisibles. Bien au contraire, la profession d’architecte, dans toutes ses acceptions y compris hors de la maîtrise d’œuvre, doit sa spécificité dans l’aptitude à formaliser matériellement des intentions idéelles abstraites. Le sens et les impacts esthétiques méritent d’être explicités. Peut-on parler, comme Gernot Böhme, d’"esthétiques des atmosphères" ? Les enjeux esthétiques ne doivent pour autant pas masquer la puissance des enjeux actuels concernant la responsabilité
La méthode
Pour associer les questions éthiques et esthétiques, il semble pertinent d'essayer de mieux articuler ce qui relève de la recherche en architecture et ce qui relève de la production du projet architectural. L'un peut être moteur de l'autre, ou sa vérification, que ce soit dans un sens ou dans un autre. Les outils de planification du temps de production ou de mobilisation de références, par exemple, peuvent être mobilisés. Les questions contemporaines autour des enjeux techniques et normatifs, économiques et juridiques, sociologiques et sociétaux de l'éco- conception sont trop complexes pour s'abstenir d'une réflexion approfondie.
OBJECTIFS PEDAGOGIQU ES
1. Esthétique : explorer, comprendre, expérimenter et critiquer les conditions et modes de production contemporains, y compris dans leur vision prospective 2. Ethique : transformer les questions architecturales, constructives et énergétiques en engagements politique, économique et poétique 3. Méthode : articuler projet architectural et recherche (et réciproquement), c'est à dire déployer le projet avec une problématique et une méthode rigoureuse
CADRE PROBLEMATIQU E
En 2012, les activités du bâtiment et des travaux publics (BTP) ont généré 246 millions de tonnes de déchets, soit près des ¾ des déchets produits en France. Ce secteur est le plus gros producteur de déchets en France et en Europe. Il est également le plus grand consommateur de matière première non renouvelable, en l’occurrence le sable, qui est la ressource naturelle la plus consommée au monde. En France, cela représente 227 millions de tonnes, soit 5 fois plus que les ordures ménagères. Le seul secteur du bâtiment génère environ 40 millions de tonnes de déchets par an dont plus de 90 % provient des travaux de déconstruction et de réhabilitation. La loi de transition énergétique fixe comme objectif de recycler 70 % des déchets du BTP en 2020 (l'ambition du Plan National de Prévention des déchets 2014-2020 était de rompre le lien entre croissance économique et production de déchets). Cet objectif qui ne pourra pas être atteint à la fin de cette année devrait questionner les pratiques des architectes, leurs modes de conception comme de production matérielle du projet. Si historiquement, la qualité d'une architecture se mesurait à sa solidité (la fameuse firmitas de Vitruve), il est nécessaire de s'interroger aujourd'hui sur les capacités d'un bâtiment à évoluer, à être rénové ou réhabilité, sa possible transformation voire sa
FICHIE DU DOMAINE D’ÉTDUES
environnementale des actions architecturales. La question de la pérennité d'un bâtiment ne doit pas faire oublier sa possible obsolescence. Le choix de matériaux organiques, biosourcés ou inertes interroge la disponibilité ou l'épuisement des ressources comme le devenir des déchets. Ainsi, la connaissance et la conscience du cycle de vie d'un matériau sont à l'heure actuelle indispensables.
réversibilité pouvant être prise en compte dès le départ de sa conception, avec la possibilité de réemployer ou recycler ses matériaux, à moins de penser à une démolition sans ruine d'une construction et à la destruction sans déchet de ses constituants. La question de l'épuisement des ressources pose également questions aux architectes qui doivent se positionner pour savoir s'il vaut mieux se concentrer sur "faire avec le déjà là" ou continuer à produire du neuf. Parallèlement, les questions sociales de confort, et d'abord de confort thermique et de qualité d'air et de lumière, sont à la fois des questions techniques et des questions économiques et financières. La conscience du réchauffement climatique a-elle une incidence sur la manière dont les architectes prennent en compte la biodiversité ou les questions environnementales ou écologiques en général ? Les "solutions" actuellement à l'œuvre ne mettent-elles pas en crise nos systèmes de représentations et nos modes de valeurs ? Par exemple, est-il nécessaire de prendre en compte l'économie locale et sociale d'un site pour produire un projet architectural ? Ou la question de la croissance économique est-elle forcément liée à la disparition des ressources et l'accroissement des déchets ? La question même de la croissance ou de la consommation restent-elles pertinentes lorsque l'on évoque une "frugalité heureuse" ? L'économie circulaire est-elle un moyen de résoudre à terme les pénuries de main d'œuvre pour une rénovation énergétique efficace ?
COMPETENS SPECIFIQUES
SUJETS D'ETUDES
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1. Connaissance des matériaux et de leur mode de production : origine, transformation, énergie qu’il faut pour les produire, les transporter, les mettre en œuvre, impact de leur utilisation sur les territoires concernés (infrastructures de transport, paysage, pollution, économie et sociologie de l’emploi) 2. Connaissance des matériaux et de leurs mises en œuvre : expérimentations à l’échelle 1, poids, dimensions, stockage, assemblages, etc. 3. Organiser et développer une méthode de travail : conception et production d'un projet architectural (dispositif, matière, climat) 4. Articuler recherche et projet 5. Mobiliser les savoirs, les disciplines et mettre en place les modes d'organisation nécessaires à cette méthode de projet (savoir écouter, savoir négocier, savoir regrouper des compétences, savoir critiquer, savoir décider) 6. Communiquer de manière précise et efficace les enjeux du projet : représentation, discours esthétique et idéologique, modèles, styles. Le projet devra développer les 3 sujets : ▪ La matière ▪ Le climat
▪ Le dispositif LA MATIERE
réinterprétaEon de la firmitas Vitruvienne. Le développement durable, croissance et décroissance, l'analyse du cycle de vie, l'économie circulaire, la question du réemploi et du recyclage, la question des déchets, l'énergie sociale, les matériaux bio-sourcés, inertes ou organiques, organisation de chantier collectif ou participatif, économie et systèmes juridiques ou d'assurance, solutions innovantes, etc
LE CLIMAT
réinterprétaEon de l’uElitas Vitruvienne Performance et confort, ambiance, atmosphère, énergies, environnement, usages
LE DISPOSITIF
réinterprétaEon de la venustas Vitruvienne Une architecture déterminée dans sa forme et sa matérialité, un dispositif ouvert. Se pose la question de savoir comment une architecture peut dépasser le cadre de sa commande initiale, permettre son évolution programmatique, sa mutation, son extension, sa transformation, sa déconstruction, sa réversibilité, sa résilience, etc.
CONTENU SEMAINE INTENSIVE DE DEBUT DE SEMESTRE
La première semaine sera animée par deux interventions majeures : Michelle HOWARD, architecte vivant à Berlin, est professeur d'architecture et responsable de la plateforme pour la construction, les matériaux et la technologie à l'Académie des Beaux-Arts de Vienne. Elle partagera son regard, ses réflexions méthodologiques et les expériences qu’elle mène avec ses étudiants autour du projet de recherche « burning down the house » Vincent LIEGEY, ingénieur de formation vivant à Budapest, est un chercheur interdisciplinaire, essayiste, et conférencier. Il est objecteur de croissance et prône une transition démocratique et sereine vers de nouveaux modèles de société basés sur la décroissance, la convivialité et l'autonomie. Il est le co-auteur de l’ouvrage Un Projet de Décroissance (Éditions Utopia, 2013 et Écosociété, 2014). Vincent donnera une conférence le 11.02 à Centrale Lille qui sera suivie le mercredi 12.02 d’une journée de réflexion portant sur le rôle du concepteur dans la décroissance.
VOYAGE D’ETUDES
Un voyage d’études est prévu du mardi 31.03 au dimanche 05.04. Il est axé sur la découverte de la filière bois. Le voyage sera l’occasion d’aller à la rencontre d’œuvres où matière et énergie sont centrales.
TD ASSOCIES
Bernarth GODBILLE a la charge de vous permettre d’atteindre vos objectifs de fabrication d’un prototype à échelle 1.
l’appropriation même constitue un projet. Il doit entre autre permettre de travailler ensemble, de produire ensemble, de partager.
François LACOSTE a la charge de vous faire découvrir les filières de certains matériaux fibreux, bio-sourcés ou géosourcés.
Travaux prospectifs seront à la fois individuels et en groupes, variables selon les moments et les questions posées. Une même problématique peut par exemple être développées par plusieurs étudiants selon des entrées distinguées. Mobilisation par le futur architecte de compétences extérieures quand elles s'avèrent nécessaires au développement du projet (interdisciplinarité). Définition d'un planning de travail. Définition d'outils de conception. Convocation de références pertinentes.
Helène MARCOZ interviendra autour de la dimension plastique de la manipulation de la matière et des matériaux. Ce travail sera depuis la photographie. AUTRES INTERVENANTS
Alexandre ORVANNE, graphiste, interviendra en dernière partie de semestre pour vous assister dans la communication de vos projets (sous réserve) Louise Hamot est une ingénieur architecte DE basée à Londres. C’est une spécialiste en conception régénérative, biomimicry, biophilic design et « Sustainability and Environmental Analysis ». Louise participera aux évaluations du semestre.
DEROULEMENT DE L’ATELIER
Cet atelier de projet, club de discussion et de production de projets architecturaux, articule recherche et projet architectural. Projet architectural et sujet de recherche seront ici menés comme deux formes d’exploration d’une même problématique par des moyens différents. Le projet est abordé comme une émanation, une extrapolation de la recherche, transposé dans une nouvelle situation, ou comme l'origine de son questionnement. Ainsi, celle ou celui qui a déjà achevé son mémoire peut en développer un de ses aspects dans le projet. Celle ou celui qui est en cours de rédaction de son mémoire peut en développer un de ses aspects dans le projet, voire utiliser le projet comme un moyen de vérification de certaines hypothèses théoriques. Celle ou celui qui n’a pas encore commencé de séminaire peut commencer à développer par son projet une problématique de recherche. Les sujets de recherche ne sont pas impérativement liés aux recherches développées dans les séminaires. Si la problématique de recherche est développée dans un séminaire de recherche, il peut l’être dans n’importe quel domaine d’études même si le projet devra s’inscrire dans les spécificités du domaine d'études Matérialité, culture et pensée constructives. Le cas échéant, les productions pourront donner lieu à une publication.
ORGANISATION
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Projet : le fait de partir d'un sujet issu de la recherche n'interdit aucunement, bien au contraire, le fait d'être très rapidement dans la formalisation matérielle du projet selon trois entrées possibles : - par la matérialité de la maquette, des maquettes à différentes échelles - par la matérialité du détail (constructif, raccord) - par une méthode personnelle en lien avec la question de la matérialité de l'architecture Un travail plastique sur la matérialité, ainsi qu’un engagement dans la communication, ses outils, ses méthodes, alimenteront notamment le dispositif prospectif et réflexif
Les journées d’atelier verront cohabiter deux temps, l’un consacré aux entours du projets le matin (un temps d’échanges, de constitution d’une culture commune, favoriser l’échange, mutualiser recherches et organisation), l’autre à la production du projet l'après-midi (des temps de projet, mettant au même niveau production, expérimentation, visites, etc.). De fait, le lieu même de l'atelier est un lieu de production, un lieu dont
MODE D’EVALUATION
Contrôle continu et jury final Evaluation des 6 compétences attendues énoncées Validation sans note ni lettres : crédits ECTS obtenus ou non obtenus + commentaires justificatifs
TRAVAUX REQUIS
▪ Un projet matérialisé, représenté avec les moyens les plus efficaces en lien avec la méthode développée ▪ Des explorations et manipulations qui utilisent les caractéristiques de la matière à l'échelle 1 (une matérialité non simulée).
BIBLIOGRAPHIE
1. BABOULET Luc, Introduction "Paysage avec artefacts", in BANHAM Reyner, L'Architecture de l'environnement bien tempéré, éd. HYX 2011, trad. A. Cazé, The Architecture of the Well-tempered Environment, Architectural Press, Londres 1969 2. DEPLAZES Andrea, Constructing Architecture, Materials, processes structures, Birkhäuser 2005 3. GOODMAN Nelson, L'Art en théorie et en action, L’éclat, 2001, Gallimard, Paris, 2009 4. HIS Ghislain, "La matérialité comme récit. D'un récit culturel à la production d'une pensée ", dans Bulletin des Bibliothèques de France (BBF), n° 4 Architectures, janvier 2015, pp. 30-44
5. LUCAN JACQUES, Précisions sur un état présent de 6.
7. 8. 9.
SUPPORTS DE COURS
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l’architecture, Presses polytechniques et universitaires romandes, Lausanne, 2016 MASTRORILLI Antonella, FELIX-FROMENTIN Clotilde et HIS Ghislain (ss. dir.), Cahiers Thématiques n°15 "Matérialités", LACTH, éditions de l ’Ecole nationale supérieure d ’architecture et de paysage de Lille, février 2016 MERLEAU-PONTY Maurice, La phénoménologie de la perception, NRF, 1945, Gallimard, Paris, 1976 PICON Antoine (ss. dir.), L'art de l'ingénieur, constructeur, entrepreneur, inventeur, éd. du Centre G. Pompidou, Paris 1997 SNOZZI Luigi, 1973-1975 Aphorismes in Projeter pour la Ville, leçon inaugurale, www.jointmaster.ch > file.cfm > document > projeter_pour_la_ville
"Dans un café, communication de travail entre deux types qui se communiquent leurs sentiments et réflexions à partir de documents divers. L'un part plutôt d'un système d'explication du monde qu'il démontre à l'aide d'images et de sons assemblés dans un ordre certain. L'autre part plutôt d'images et de sons qu'il assemble dans un certain ordre pour se faire une idée du monde." Jean-Luc Godard
MAXIME ROUSSEL - C.L.T. : COMMUNITY LIVING TOGETHER PROJET DE FIN D’ÉTUDES // RAPPORT DE PRÉSENTATION // ENSAPL // DOMAINE D’ÉTUDES : MATÉRIALITÉ, CULTURE ET PENSÉE CONSTRUCTIVES // ATELIER BORDER CROSSING // SOUS LA DIRECTION DE CÉDRIC MICHEL 51 (DIRECTEUR D’ÉTUDES DU PFE), VINCENT DUCATEZ // PRINTEMPS 2020