La Lettre de la bibliothèque n°66 : Sacré saké !

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“Une nuit de vent et

“Le saké froid, c’est

Tout à coup, ce qui

d’averses, la pluie se

comme de l’eau. Ça ne me

s’appelle tout à coup,

change en neige sans que

fait aucun effet.

l’ivresse vint. Non,

– Ah tu crois ça. Mais ça va

décidément, le saké froid

venir. […]

n’est pas de l’eau. Une

Je sortis seul de chez

ivresse terrible. Un énorme

Furuya. Marchant dans

tourbillon se soulevait

la rue noire, une tristesse

au-dessus de ma tête, mes

terrible me saisit, je me

pieds flottaient, je me

mis à chanter à mi-voix un

frayais un chemin parmi

couplet de la chanson de

les nuages, pagayant

la courtisane Okaru :

avec mes bras. Puis je

Je pars pour être vendue…

m’écroulai.”

En bref Isoda Koryusai © Metropolitan Museum of Art, New York

grossière et sirote une tisane de lie de saké…”

Yamanoue no Okura, Dialogue de la misère, tiré du Man’yôshû, VIIIe siècle

demandés, de même qu’à l’autre bout de la chaîne, les kikizakeshi, les sommeliers de saké en mesure de conseiller les clients sur les mariages avec les mets que permettent les sakés modernes. Près de la moitié de la production (principalement du saké ordinaire) se concentre dans les préfectures de Hyôgo et de Kyôto. Tandis que celle du saké de qualité supérieure, le seul dont les ventes progressent, est bien mieux distribuée sur l’ensemble de l’archipel.

déroulement de la fabrication. Etre tôji requiert beaucoup d’années d’expérience. Autrefois, la fonction se distinguait de celle du kuramoto, propriétaire de la fabrique, qui employait un tôji six mois de l’année.

Sugidama Boule d’aiguilles de sugi, cèdre du Japon, ornant l’entrée des brasseries pour annoncer le saké nouveau.

Kimoto Méthode de production à l’ancienne du moto, starter de fermentation qui porte la signature du tôji. Si rien n’est précisé sur la bouteille, c’est la méthode sokujomoto de levurage rapide avec ajout d’acide lactique qui a été pratiquée. Sakamai Riz à saké. Le grain, plus gros que celui

Sacré saké !

En bref...

du riz ordinaire et à la saveur plus douce, supporte le polissage qui en révèle le cœur, riche en amidon. L’épi de grande taille se révèle d’une culture délicate, d’où des coûts de production élevés.

Quelle est la place des femmes dans le monde du saké ? Jusqu’au XVe siècle, c’était les femmes qui avaient principalement la charge de la fabrication et du commerce. Au XVIe siècle, la fabrication du saké fait un bond qualitatif, se professionnalise, et c’est à ce moment que se développent les associations de tôji. Le métier était dur et très physique. Les tôji, au départ, étaient des paysans qui quittaient leur foyer pour aller travailler pendant l’hiver dans les brasseries du Kinai qui exportaient vers Edo. C’était difficile à envisager pour des femmes. De nos jours, elles se fraient à nouveau une place dans l’univers du saké, aussi bien comme productrices, kikizakeshi (sommelières), que comme consommatrices. Ce sont elles qui, à mon avis, influencent le plus les productions de sakés modernes dont les goûts, plus légers et plus proches du vin, peuvent se marier avec des cuisines étrangères, dont les consommatrices japonaises sont friandes.

Omiki Saké des dieux, fabriqué dans les

sanctuaires, donné en offrande lors de fêtes shintô.

Ginjô / daiginjô Plus le riz est poli, plus

le saké est délicat : chez les sakés ginjô, le taux de polissage est d’au moins 60 % (60 % du grain est conservé) et de 50 % au moins chez les daiginjô.

Junmai / Honjôzô Une autre distinction

est l’ajout ou non d’alcool pur : on aura alors des saké « pur riz », junmai (pour les premium, junmai ginjô et junmai daiginjô) ou bien des honjôzô (pour les premium, ginjô et daiginjô, sans autre mention).

Saké et dérivés Sakekasu est la lie obtenue

après le pressage de la mère de saké (moromi). Selon les cuvées et son taux d’humidité, elle est vendue sous plusieurs formes : en plaques (itakasu), en gruau (barakasu) ou en pâte (fumikasu). Très riche en sels minéraux, acides aminés et vitamines B, cette lie peut se consommer grillée, ou être utilisée en cuisine : soupes, ragoûts, poissons ou légumes saumurés se parent alors d’un goût umami irrésistible !

Amazake « saké sucré », est une

boisson obtenue en mélangeant du barakasu avec de l’eau. La lie de riz fermenté est naturellement sucrée car le kôji en a décomposé l’amidon en glucose, maltose et sucres complexes. Boisson très nourrissante avec un arrière-goût de fromage, on l’offre traditionnellement aux personnes affaiblies pour leur donner un coup de fouet, mais c’est aussi la boisson de la fête des filles le 3 mars, du Nouvel An, etc.

101 bis, quai JacquesChirac 75015 Paris Tél. 01 44 37 95 50 www.mcjp.fr

Ouverture

Du fait de la situation sanitaire, vérifier les heures d’ouverture et les conditions d’accès sur notre site

Fermeture

Les dimanches, lundis et jours fériés Tout le mois d’août

Directeur de la publication

Suzuki Hitoshi Rédaction

Sugita Chisato Pascale Doderisse Cécile Collardey Conception graphique et maquette

© La Graphisterie® / Cécile Le Trung a-l-oeuvre.fr 2016-2022 Impression

Imprimerie Moutot Dépôt légal

2e trimestre 2022 ISSN 1291-2441

n°66 • Printemps 2022

Tôji Maître de chai qui veille au bon

sans entrain une saumure

Maison de la culture du Japon à Paris

La lettre de la bibliothèque

Il fait si froid ! Je grignote

Bibliothèque

© Miyata Hisashi

je puisse rien y faire.

Komenuka Les protéines, lipides et

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Numazu Hokusai © Nationaal Museum van Wereldculturen-Leiden

Son image a été parfois ternie par l’idée d’un alcool fort et de piètre qualité, souvent servi à la fin du repas dans des restaurants de cuisines asiatiques. Né du mariage entre le riz et l’eau de source, le saké est, en fait, un monde de saveurs, qui ravit vos papilles avec douceur et réchauffe votre humeur de son taux d’alcool à peine plus fort que celui du vin. En outre, une bonne cuvée ne livrera son bouquet subtil qu’au terme d’une fabrication complexe dont chaque étape exige des années de pratique. Elixir incontournable des soirées de détente dans un izakaya (bar à saké), où il délie les langues, accompagné de petits plats légers et savoureux, otsumami, servi, selon son arôme, réchauffé ou froid dans des écrins de fines céramiques, le saké est l’indispensable boisson des moments festifs et conviviaux. Mais, à l’origine comme de nos jours, il est aussi le breuvage sacré qui relie les hommes avec les dieux selon la tradition shintô, d’où sa présence dans de nombreuses coutumes, telle que la cérémonie du mariage pendant laquelle les mariés échangent trois coupes avant de prononcer leurs vœux. La plupart des brasseries sakagura possèdent d’ailleurs en leur sein un petit autel dédié au divin Matsuo, le dieu du saké, où l’on dépose des offrandes avant la journée de travail afin d’assurer sa protection. La trace écrite de l’existence du saké, cité à plusieurs reprises dans le texte mythologique du Kojiki, est l’une des plus anciennes dans le domaine alimentaire nippon. À base de riz mâché et recraché, le kuchikami sake en est une forme archaïque parvenue jusqu’à nos jours dans certains temples, dont on voit l’illustration dans le dessin animé à succès Your Name : l’alcoolisation s’opérait grâce au mélange des en-

minéraux contenus dans les couches externes du grain de riz gênent le développement de certaines saveurs dans le futur saké, d’où l’importance du polissage. Il en résulte trois types de farines, le « son brun » issu de la surface, le « son moyen » et le « son blanc » extrait plus près du cœur pour les sakés à haut polissage. Ces poudres de riz servent entre autres à la confection d’aliments animaliers, de biscuits, d’alcools de riz distillés, et sont aussi très utilisées dans les produits cosmétiques : rien de tel pour votre peau que ce cocktail d’acides aminés et de vitamines, relevés d’un soupçon de levure à saké !

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Sacré saké !

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Dazai Osamu, Souvenirs de saké

zymes de la salive avec les levures contenues dans l’air. Mais déjà dans les capitales de Nara et de Heian (VII-XIIe siècle) pratiquait-on le brassage à base de kôji – ce précieux ingrédient intermédiaire qui transforme l’amidon du riz en sucre avant que celui-ci ne devienne alcool – et treize sortes de sakés étaient répertoriées au Xe siècle à la cour. Héritier de plus d’un millénaire de savoir-faire, le saké se décline aujourd’hui en un choix de qualités multiples, qu’il est heureux de savoir distinguer dans un marché où dominent la production industrielle et divers alcools souvent importés. Pour guider les amateurs, labels et distinctions fleurissent, notamment du côté des productions régionales très dynamiques et bénéficiant de la pureté de leur eau. Le brassage artisanal et traditionnel à base de kôji a par ailleurs été classé en octobre 2021 « Patrimoine vivant du Japon ». Depuis peu, le saké s’exporte. En France où la consommation en a triplé ces sept dernières années, de jeunes brasseurs formés auprès de tôji japonais (cf. p. 4) proposent désormais leur saké, certains à base de riz local. Le saké a de beaux jours devant lui sur la terre de ceux qui savent habilement allier le goût des plats avec les vins… de riz aussi certainement ! C. C.

Du fait des micro-organismes, levures et kôji-kin, qui entrent dans sa fabrication, mais aussi d’un brassage très complexe exigeant plusieurs fermentations parallèles, le saké est une boisson alcoolisée particulièrement riche en composants de nature umami, ce « goût savoureux » qui augmente la sapidité des aliments. Plus les grains de riz sont polis, plus l’umami est présent.

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“Quand vient la cueillette de graines de l’arbre à cire

Ressources

Les passereaux chantent,

Cinq questions à

nul ne se lamente. On fait le saké à l’aube, Je te retrouve au soleil

Le livre de Nicolas Baumert, Le saké : Une exception japonaise, s’attache à cerner les aspects historiques, géographiques et sociologiques de cette « boisson identitaire des Japonais ». Pour qui se lancerait dans l’aventure d’une brasserie, le livre le plus technique reste Nihonshu : le saké japonais, qui concentre le savoir d’agronome et d’œnologue de Gautier Roussille. Enfin, sans contrainte de lecture linéaire, des ouvrages présentent le saké, de sa fabrication à la dégustation : Le saké de A à Z, de Yamamoto Yôko imagine un dialogue entre une spécialiste et une novice, à grand renfort de croquis ludiques ; la sommelière du saké Adrienne Natsumi Saulnier Blache et l’écrivaine fine gastronome Sekiguchi Ryôko livrent un Guide du saké pour

Lavage du riz

Fonds spécifiques •

Sake Museum https://sake-museum.jp/ (a/j) Le saké n’étant pas dédaigné lors de la contemplation des fleurs de cerisiers, le présent musée, doté d’une collection permanente et d’une salle audiovisuelle, est couplé à un musée consacré à ces fleurs. Expositions et conférences en rythment l’année et tous les mois un nouvel article enrichit le site web : on y croise par exemple le Tsukinu izumi (« La fontaine intarissable »), roman comique de l’époque Edo (kokkeibon) qui croque ceux qui ont le coude léger. National Research Institute of Brewing https://nrib.go.jp (a/j) Institut national consacré à la recherche fondamentale et appliquée sur les boissons alcoolisées, au développement des technologies et à la diffusion des connaissances, qui répertorient les études scientifiques dans ces domaines.

Chambre à kôji

Moromi (mère de saké)

Sake Times https://jp.sake-times.com/ (a/j) Ce site très pédagogique a pour vocation de promouvoir le saké, au Japon comme à l’étranger. Il informe sur l’histoire, la fabrication, les différences entre les sakés, les cuvées ayant été primées récemment, et propose des sujets annexes tels que « comment ne pas avoir la gueule de bois » ! On y trouve un glossaire pour comprendre le vocabulaire très étoffé du saké, en japonais et dans la version anglaise. Cette dernière soumet aux néophytes une rubrique « Le saké pour les nuls ».

Nicolas Baumert géographe, maître de conférences à l’université de Nagoya

L’analogie entre le vin et le saké peut-elle être pertinente ?

Sake, en japonais, signifie à la fois alcool et boisson alcoolisée, d’où l’ambiguïté toujours présente. Pour distinguer la boisson de riz fermentée, les Japonais emploient le terme nihonshu dont la meilleure traduction est « vin de riz japonais ». L’analogie avec le vin est pertinente, car son apparence et son goût l’en rapprochent. En revanche, le processus de fabrication le distingue complètement du vin. Le riz est une céréale qui ne contient pas de sucre et ne peut donc fermenter naturellement. Pour transformer l’amidon du riz en sucre, il faut faire intervenir la moisissure kôji (Aspergillus oryzae) lors d’une première étape et, ensuite, la levure transforme le sucre en alcool. Les deux étapes ont lieu dans la même cuve et se font en même temps : on parle de fermentations multiples et parallèles.

Comment parler du goût des différents sakés à un novice ?

(f) > français (a) > anglais (j) > japonais

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Les sakés forment un monde aussi varié que le monde du vin, du fait de la multitude de riz, de levures, de la nature de l’eau et des traditions régionales. Les sakés vus comme « traditionnels », ceux des izakaya (bar à saké) servis avec des accompagnements divers, se déploient plus en bouche qu’au nez et ont beaucoup de rondeur. Comparés au vin,

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ils sont bien plus discrets, car ils ont beaucoup moins d’acidité, mais développent néanmoins une certaine force. On les consomme chauds ou froids, plutôt dans des coupes à saké. Les sakés modernes, avec un important polissage des grains de riz comme les ginjô et daiginjô, sont plutôt fruités. La fraîcheur et les notes florales et anisées dominent. On peut les boire dans des verres à vin qui vont aider à développer leurs arômes. Ils seront plus spécifiques et il sera difficile d’accompagner un repas complet avec eux. Ceux à l’acidité volontairement plus prononcée sont les plus susceptibles de s’accorder avec la gastronomie française. Enfin, les saké vieillis sont à part, proches des vins jaunes du Jura avec des notes caramélisées, de noix ou d’épices. Ils vont bien avec les produits fermentés et les desserts sucrés.

Quelles sont les conditions géographiques optimales pour l’élaboration d’un saké de terroir (jizake) de qualité ? Si la température est trop basse, les levures cessent de travailler ce qui donne un saké moins alcoolisé. Si elle est trop élevée, le saké risque d’être altéré. Autrefois, on faisait les bons sakés en hiver afin d’en contrôler la fermentation, car il était plus facile de réchauffer les pièces que de les refroidir. Aujourd’hui, les cuves modernes permettent de refroidir ou de réchauffer le mélange sans contrainte de saisonnalité, et de produire du bon saké dans tout le pays. L’eau peut être aussi purifiée.

Photos © Miyata Hisashi, brasserie Iwamura à Ena (Gifu)

© Nicolas Baumert

Sakeology Center, Niigata University https://sake.niigata-u.ac.jp/ (a/j) De fortes chutes de neige l’hiver pour l’eau de source et des rizières prospères font de Niigata une région phare de la production du saké. L’association des brasseurs locaux et l’université de Niigata se sont associées pour créer en 2017 le Centre de recherches en sakéologie, qui organise aussi des formations et des conférences. Ce centre a notamment lié un partenariat avec l’Institut des Sciences de la Vigne et du Vin de l’université de Bordeaux afin de stimuler les échanges entre étudiants des deux cultures.

Cinq questions à...

Kokushu Digital Museum https://kokushu-museum.com/ (a/j) Sur des sujets aussi variés que le saké dans les estampes, les films, les mangas, la publicité sur le saké, la fabrication de cet alcool, un panorama des régions productrices, ce site de l’association des brasseurs de saké et de shôchû (boisson spiritueuse) offre une profusion de vidéos et d’images. Il recense aussi tous les centres de documentation en lien avec le saké disséminés dans le pays.

Cuisson du riz

Sacré saké !

Humoristique, Des mérites comparés du saké et du riz, rouleau imprimé (fin XVe - début XVIe s.), met en en scène la controverse entre un noble amateur de saké, un moine gourmand de riz et un guerrier prônant la modération. Dans un autre genre, le manga très fouillé Natsuko no sake, de Oze Akira, suit les pas de Natsuko, jeune citadine au palais exceptionnel revenue prendre le flambeau de son frère décédé qui rêvait de produire le meilleur saké du monde. Une quête ardue dans un monde masculin conservateur en proie à la concurrence de grands groupes.

Kitahara Hakushû, Sake no kabi

Tonneaux de saké © samueles

Il n’est qu’à se plonger dans les films de Ozu Yasujirô pour comprendre le rôle social du saké, accoucheur d’âmes, consolateur des esprits en peine ou compagnon de joyeuses rencontres. La nouvelle Souvenirs de saké offre un cadre pudique au grand écrivain du début du XXe s. Dazai Osamu, qui se remémore, au seuil de la mort, le temps de la santé et des amis qui ne sont plus, et lève le voile sur l’évolution des modes de consommation de cette boisson.

couchant.”

Sur Internet •

amateurs éclairés avec des fiches de dégustation, qui n’oublie pas les aspects culturels. Voir aussi notre bibliographie en ligne !

Nihon sankai meisan zue © NIJL

© RMN-Grand Palais (Sèvres Manufacture et Musée nationaux) Martine Beck-Coppola

Sacré saké !

Ressources sur...

Dans notre fonds •

Avec la chaîne de montagne qui traverse l’île principale de Honshû, une eau de bonne qualité est présente un peu partout, même si le nord et la mer du Japon sont favorisés. Toutefois, les régions historiques des grands sakés sont l’ancien Kinai, recoupant les actuelles préfectures de Kyôto et de Hyôgo. Leurs avantages tenaient à la proximité d’un marché (Kyôto tout d’abord), puis au commerce quasi exclusif vers la capitale Edo, car aucune autre région ne pouvait fournir de meilleurs sakés à l’époque, enfin à la puissance financière des sakaya (commerces de saké). Autrefois, les jizake étaient des sakés locaux rarement commercialisés en dehors de leur région et pas toujours bien faits. Mais, depuis les années 1980, les sakés de régions gagnent en crédit, sous l’impulsion de la préfecture Niigata (la première), et plus encore ces quinze dernières années. Au contraire, les sakés au goût plus uniformisé des anciennes régions productrices sont désormais perçus comme industriels et urbains.

Entre grandes marques et petits fabricants, comment se répartit le marché du saké ? Les brasseries artisanales existent, mais elles sont loin de représenter l’essentiel du monde du saké. En réalité, le saké est le plus souvent une boisson industrielle, en crise depuis plus d’une génération. Cependant, en lien avec une demande croissante d’authenticité, les tôji, artisans spécialisés dont le nombre s’était considérablement réduit pendant la période d’industrialisation, sont à nouveau très

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