20 ans de la Mission Parrainage des enfants hospitalisés

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© Stéphanie Rivoal

NOUS / SOIGNONS/ CEUX / QUE LE MONDE / OUBLIE / PEU / À / PEU/

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1988-2008

– Témoigner de la détresse des enfants isolés, souvent défavorisés – Soigner les blessures qui ne se voient pas – Participer à l’humanisation des hôpitaux, aux côtés des soignants


© Cyrille Girard

UN ENFANT HOSPITALISÉ NE PEUT PAS ÊTRE SEULEMENT UN OBJET DE SOINS ” Dr. Daniel Alagille

Chantal H. et Abdullah, au centre des Côtes

Médecins du Monde est une association de solidarité internationale qui a pour vocation de soigner les populations les plus vulnérables dans des situations de crises et d’exclusion partout dans le monde et en France.


UNE RENCONTRE N’DJAMENA JANVIER 1982 Je me souviens très bien de ce petit garçon frêle et silencieux, immobile sur son lit, dans une salle commune de l’Hôpital de N’Djamena. 6

ques Lebas, qui réhabilite l’hôpital et la

interrogent pour que nous te disions ce

maternité détruits par la guerre civile. Je

que tu vas devenir. Mais ni moi ni per-

suis enceinte de 4 mois.

sonne ne peut te répondre et tu restes

Comme je ne suis ni médecin ni infir-

là, immobile, sans une larme.

mière, c’est auprès des enfants que je

Le diagnostic d’une papillomatose la-

trouve ma place.

ryngée est envisagé par les médecins.

Je croise pour la première fois la souf-

Il s’agit d’une maladie rare due à la pré-

france et la mort des enfants. Un choc

sence de polypes qui obstruent peu à

brutal, difficilement supportable.

peu le larynx et provoquent un étouffe-

Chaque jour, je vais à leur rencontre

ment que seule une trachéotomie peut

avec toute cette tendresse dont je dé-

soulager. Les soins à prodiguer sont

borde. Un sourire, une caresse, quel-

impossibles à N’Djamena.

ques mots à ceux qui les comprennent.

Un soir, Jacques Lebas envisage pour

Aucun jouet, ni livre pour les distraire…

toi une évacuation sanitaire sur Paris.

Ta grand-mère reste assise sur une nat-

Ton départ est rapidement organisé :

te près de ton lit, ombre discrète et ras-

une prise en charge de l’État tchadien

surante. Elle parle très peu, en arabe.

pour les frais d’hospitalisation, des

Mais elle est là.

passeports et des billets d’avion. Ton

Tu n’es pas seul devant la souffrance et

père t’accompagnera. Tu vas peut-être

la maladie.

pouvoir guérir...

Je croise pour la première fois la souffrance et la mort des enfants. Un choc brutal, difficilement supportable.

Je m’approche souvent de ton lit avec Tu poses autour de toi un regard triste

l’envie de t’aider, mais aussi un terrible

Je suis la première à rentrer en France.

et interrogateur. Une canule de métal re-

sentiment d’impuissance devant l’in-

Mais avec une belle mission ! Trouver

pose sur un carré de gaze noué autour

justice qui t’a conduit sur ce lit d’hôpi-

le chirurgien qui t’opérera pour que tu

de ton cou. Une canule qui a percé ta

tal. Quand je suis près de toi, ton regard

puisses survivre. Ce sera le professeur

gorge et te fait mal, qui te permet pour-

s’allume et tu esquisses un sourire timi-

Narcy, à l’hôpital Bretonneau, spécialis-

tant de respirer, après la trachéotomie

de. Tu ne peux pas parler... En m’éloi-

te de l’oto-rhino-laryngologie infantile.

d’urgence qui t’a sauvé la vie quand tu

gnant, je tente un petit signe d’amitié,

es arrivé à l’hôpital en état d’insuffisance

avec mon index droit. Le lendemain,

Tu quittes ton pays, ta maman, tes

respiratoire aiguë.

je recommence... Tu le fais aussi… La

frères et sœurs, ta grand-mère si

complicité vient de naître entre nous.

bienveillante, ta langue maternelle, ta

Médecins du Monde a 2 ans… C’est

Elle me réchauffe au milieu de tous ces

culture… tout… tu quittes tout.

l’époque de Bernard Kouchner et des

drames dont je suis témoin. Je sens, je

Tu es malade, tu souffres, tu ne peux

réunions fiévreuses du jeudi soir, rue du

sais qu’elle te réchauffe aussi. Tu m’ac-

plus parler. Tu t’envoles vers un pays

Fer à Moulin.

ceptes. Tu te laisses apprivoiser.

inconnu, vers un hôpital parisien…

J’accompagne au Tchad Éric, obstétri-

La canule crache en permanence les

Je sais que tu t’appelles Adoum.

cien en mission dans l’équipe de Jac-

mucosités de ta gorge. Tes yeux nous

Tu as 5 ans.

Tu arrives à Paris, à l’aéroport Paris-CDG le 23 février 1982, en plein hiver parisien, avec ton papa.

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À l’hôpital, nous te confions aux soi-

Les explorations dans ta gorge se suc-

gnants. Sur ton lit, raide et immobile

cèdent. Le diagnostic de papillomato-

comme à N’Djamena, mais maintenant

se est confirmé. Il s’agit d’une maladie

dans une chambre inconnue, tu nous

évolutive, si rare qu’il est difficile de faire

fixes avec ce regard plein des mêmes

un pronostic et impossible de prévoir

questions. Pas un geste, pas un san-

une date de guérison.

glot. Seulement de grosses larmes qui roulent doucement sur tes joues. Avec

Ton retour au Tchad n’est pas envisa-

une dignité qui ne te quittera désormais

geable. Des interventions chirurgicales

plus et qui sera ta force.

répétées et des contrôles réguliers sont à prévoir. Un aérosol est installé près de

À sa demande, j’accompagne chaque

ton lit pour humidifier les sécrétions de

jour ton papa. Je prends le relais, sans

ta gorge. Le bruit de succion de l’aspi-

le savoir encore. Tu ne parles toujours

rateur électrique qui permet de nettoyer

pas, mais tu écoutes ton père t’ex-

régulièrement la nouvelle canule rythme

pliquer en arabe qu’il doit repartir au

désormais tes jours et tes nuits. règles du jeu. Je viens pour toi.

tends pour la première fois ta voix, si

te soigner et guérir. Il me regarde sou-

J’apporte un pyjama, des jouets, des

Nous sommes en contact téléphoni-

sourde, prononcer les mots que tu as

vent. Et je devine qu’il t’explique aussi

livres… tout ce qui peut te rendre la vie

que régulier avec tes parents. Ils sont

préparés : « Au revoir Catherine ». Tou-

que je suis là et que je ne t’abandonne-

plus douce. La photo prise avec ton

confiants et rassurés.

tes mes craintes s’envolent enfin… Ton

rai pas. Il ne me le demande pas vrai-

papa est accrochée au-dessus de ton

ment, mais il sait que j’accepte et tu le

lit. Tu m’attends, tu m’accueilles avec

Mais les frais de séjour à l’hôpital sont

que le choc de l’intervention et la sé-

sais aussi. Tout entre nous est évident

un sourire à la fois timide et radieux qui

très lourds et les médecins envisagent

paration brutale d’avec tes parents ne

et implicite. Et cela nous rend graves,

me fait fondre. Nous communiquons

de te transférer dans une maison de

t’aient définitivement privé de langage.

très graves tous les trois.

par nos gestes, nos yeux, nos sourires.

la Croix-Rouge, dite de long séjour, à

Tu parles et tu parleras.

La tendresse et la complicité grandis-

Margency, près d’Enghien-les-Bains.

Tchad, mais que toi tu dois rester pour

HOPITAL BRETONNEAU FÉVRIER À MAI 1982 L’avion d’Air Afrique vient de te transporter d’un continent à un autre, d’une vie à une autre. Et pourtant tu nous souris. Timidement.

Il me donne l’autorisation écrite de te

silence se prolongeait et je redoutais

C’est un bonheur fou pour nous deux.

sent entre nous chaque jour.

sortir de l’hôpital si ton état de santé le

La vie collective y est bien organisée et

Les choses vont désormais aller très

permet et celle de prendre toutes déci-

Je suis souvent tentée de m’occuper

tu reviendras en ambulance régulière-

vite. Tu comprends de mieux en mieux

sions concernant les éventuelles inter-

des autres enfants du service, qui sont

ment pour les interventions, qui s’an-

et tu commences à te faire compren-

ventions chirurgicales.

seuls eux aussi. Mais tu me fais bien

noncent nombreuses.

dre. Timidement toujours, avec un sou-

Dans la voiture qui nous emmène vers

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Nous communiquons par nos gestes, nos yeux, nos sourires. La tendresse et la complicité grandissent entre nous chaque jour.

vite comprendre que je suis là pour toi

Un soir, tu me raccompagnes, comme

rire permanent.

l’hôpital Bretonneau, tu te blottis contre

Il te confie à moi. Après son départ,

seulement et tu me tires par la manche

d’habitude, jusqu’à la porte du ser-

Tu n’es pas bien épais, 1,17 mètre et

moi. Tu ne connais que la chaleur afri-

mes pas me portent toujours vers cet

pour que nous restions tous les deux

vice avec notre petit geste complice.

17 kilos seulement, mais tes joues sont

caine et je t’enveloppe soigneusement

hôpital où je sais que tu m’attends, au

dans ta chambre.

J’ai toujours le cœur serré quand je te

maintenant rebondies. Tu arbores une

dans une épaisse couverture. Tu as déjà

milieu d’autres enfants malades et éloi-

Et pourtant, eux aussi ont besoin…

laisse ainsi au bout du couloir. Mais ce

épaisse tignasse noire que tu ne veux

confiance.

gnés eux aussi de leurs parents.

Mais je te comprends et respecte tes

jour-là, après t’avoir embrassé, j’en-

pas faire couper. Tu t’affirmes…

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Ton départ vers le centre de Margency se précise. Et je commence à redouter que le transfert ne se fasse au moment de la naissance de mon bébé. Alors il

Je sais que je continuerai à préserver ce lien essentiel avec ta famille et ton pays, pour que tu puisses un jour y retrouver ta place.

devient évident pour moi que nous devons aller là-bas tous les deux « repérer les lieux » pour que tu n’arrives pas seul dans ce nouvel univers. Et nous découvrons donc ensemble ce centre où tu passeras de longs mois, voire des années. Ton transfert est programmé le 3 mai.

MARGENCY

Tu rejoins de nombreux enfants qui,

MAI 1982 À MARS 1985

comme toi, sont malades, déracinés, éloignés de leurs parents souvent très défavorisés… Stéphane vient au monde le 6 mai. Très vite, nous allons te chercher pour que

À Margency, la vie devient pour toi très différente.

tu partages ce bonheur avec nous.

peu ton histoire pour mieux t’adapter.

Les mois se succèdent… Mais combien

activités de l’école maternelle. Tes

Les autres enfants semblent réagir com-

de temps vas-tu devoir rester loin des

progrès sont rapides. « Esprit vif et

me toi à la séparation. Je comprends et

tiens ? Personne ne peut le dire…

Ému et intimidé devant ce bébé, tu pro-

Tu partages une chambre commune.

curieux » soulignent tes bulletins sco-

pourtant je sais que je continuerai à pré-

nonces son nom pour la première fois,

Tes journées sont rythmées par les acti-

laires. Nous recevons régulièrement

server ce lien essentiel avec ta famille et

dans un souffle rauque, avec ton sou-

vités scolaires, les jeux, les promenades

des nouvelles de tes parents qui écri-

rire désarmant.

et les soins, encore et toujours les soins.

vent par l’intermédiaire d’un proche,

Mais tu acceptes très vite ce nouveau

car ni l’un ni l’autre ne savent le faire.

J’accueille cet enfant tant désiré avec, à mes côtés, ce petit garçon africain que la vie vient de me confier. Je ne sais où cette merveilleuse histoire va nous mener…

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À la rentrée, tu t’inities aux multiples

mode de vie, ces nouveaux visages,

Nous sommes en mars 1985. ton pays, pour que tu puisses un jour y Il y a près de 3 ans que tu vis à Margency. retrouver ta place. Nous partageons avec toi nos week- Tu as 8 ans et demi. ends, que tu passes à la maison où tu

Trois ans plus tard, en 1988, Médecins du Monde déclenche le premier parrainage dans le service d’immunologie du professeur Griscelli, à l’hôpital Necker.

Catherine Peterman

avec une étonnante faculté d’adap-

Tu accueilles avec plaisir les envelop-

as désormais ton lit et tes affaires « per-

tation. Autour des monitrices, vous

pes « avion » et écoutes la lecture de

sonnelles », comme tu aimes les appeler.

formez une grande famille. Maryse, si

ces lettres avec un plaisir que nous par-

douce, est ta « préférée ».

tageons avec toi. Nous devinons leur

Tout n’est pourtant pas si simple… Les

Jamais de larmes, ni de reproches.

confiance et leurs lettres sont de longs

frais d’hospitalisation ne sont toujours

Adoum est resté en France, sa santé né-

Tu acceptes silencieusement la situa-

remerciements à partager avec les équi-

pas pris en charge par l’État tchadien

cessitant des soins réguliers impossibles

tion qui t’est imposée, difficile, mais que

pes soignantes. Je réponds régulière-

et la menace administrative de te faire

à prodiguer au Tchad. Il est souvent re-

tu sais incontournable.

ment, pour les rassurer et leur envoyer

repartir au Tchad alors que tu n’es pas

tourné à N’Djamena où il a retrouvé, peu

Ta vie s’organise à Margency et la nôtre

des photos.

guéri me donne des ailes pour chercher

à peu, sa famille et sa place.

autour de la tienne. Ton père a renou-

Mais tu parles très peu du Tchad et tu

une solution que nous trouverons auprès

Il a maintenant 32 ans. Nous sommes

velé sa procuration sur toutes les déci-

sembles avoir oublié ta langue mater-

des Aides Légales. Tu vas pouvoir rester

tous les deux restés très proches.

sions te concernant.

nelle. Comme s’il te fallait occulter un

en France jusqu’à ta guérison.

Mais ceci est une autre histoire…

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le parrainage Sophie B. et Rayan, reparti en Guyane

UN BESOIN Soulager la détresse des enfants hospitalisés et isolés

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UNE MISSION D’URGENCE — 25 UNE MISSION DE PRÉVENTION — 33 UNE MISSION DE SOUTIEN — 43 LA SÉPARATION — 53 UN TRAVAIL D'ÉQUIPE — 63 L’ANTENNE EN GUYANE — 75 20 ANS DE MISSION — 80

© Sophie Brändström

UNE RÉPONSE La mission Parrainage de Médecins du Monde

— 15

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Abdullah, décédé à Paris

UN BESOIN

SOULAGER LA DÉTRESSE DES ENFANTS HOSPITALISÉS ET ISOLÉS

L

es 20 ans de la mission Parrainage des enfants hospitalisés de Médecins du Monde nous donnent l’occasion de la mettre en perspective avec l’histoire de l’hospitalisation pédiatrique. La médecine, dans la seconde moitié du XXe siècle, connaît une évolution scientifique qui va favoriser les progrès considérables des soins auprès des enfants porteurs de maladies graves, dites lourdes et ou chroniques. Cette médecine moderne se pratique uniquement à l’hôpital,

© Cyrille Girard

qui dès 1958, va porter le titre de Centre Hospitalier Universitaire. Il se fait pivot d’attraction nationale et internationale pour ce qui concerne l’AP-HP.

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— DE L’ISOLEMENT DE L’ENFANT CONTAGIEUX AUX UNITÉS « MÈRE-ENFANT »

Il faudra attendre 1973 pour voir la création des premières

Il s’agit d’aider l’enfant en lui offrant une mise à distance de

unités « mère-enfant » au CHU de Besançon, puis à l’hôpital

sa maladie et de l’hôpital tout en participant au maintien opti-

Ainsi si, à la fin du XIXe siècle, par crainte de la contagion,

Trousseau de Paris. Toutefois leur occupation reste excep-

mum du lien des parents avec leur enfant.

les médecins hospitaliers préconisent la séparation d’avec

tionnelle et relève d’une prescription médicale.

Même si en matière d’accompagnement, nous ne serons

la famille, certains d’entre eux prennent toutefois rapidement

Quelques progrès apparaîtront : suppression de la salle com-

jamais au bout des progrès…, il faut souligner l’importance

conscience des méfaits de cet isolement de l’enfant d’où

mune au profit de chambrettes aux parois de verre permet-

de l’apport des bénévoles et leur investissement auprès des

leurs réticences à demander au Directeur de l’administration

tant aux parents de voir leurs enfants.

enfants isolés.

de l’Assistance Publique d’abaisser l’âge d’admission, alors

Ces parois deviendront pourtant le symbole d’une frontière

de 2 ans, aux nourrissons.

hostile à la présence des parents.

Dominique Favier

© Cyrille Girard

Malgré tout, en 1884, l’âge d’entrée des enfants est abaissé

— DES ENFANTS DU BOUT DU MONDE SEULS POUR VIVRE LA MIGRATION SANITAIRE

afin d’assurer l’enseignement de la pédiatrie depuis la nais-

— VERS UNE HUMANISATION DE LA PÉDIATRIE

sance. Des crèches sont créées très progressivement, où

Un nouveau pas sera franchi le 1er août 1983, grâce à une cir-

sont admises les mères et leur bébé de 0 à 2 ans. Toutefois

culaire qui institutionnalise les modalités d'humanisation de la

les mères n’y sont acceptées qu’au titre de nourrices.

Pédiatrie hospitalière en officialisant le droit de visite parental.

Cette période sera suivie de celle du développement du cou-

Parallèlement, la médecine en matière de lutte contre les in-

rant hygiéniste et de la naissance de la puériculture. Cette

fections connaît des progrès considérables qui vont favori-

dernière s’intéresse à l’éducation des mères avec une tech-

ser la mise en place des obligations de la loi. Des animations

nicité des gestes qui réduit voire supprime la dimension af-

sont proposées sous l’impulsion des associations de béné-

fective de l’allaitement. Les visites parentales ne sont autori-

voles : télévision, cinéma, musique, clowns, livres contribuent

sées que les jeudis et dimanches de 13 à 15 heures.

à rompre le désœuvrement de l’enfant. Elles restent limitées

C’est à ce titre qu’il admet des enfants gravement malades

et ne peuvent compenser l’absence des parents.

venus du bout du monde. Or, bien souvent, ces enfants sont

Jusqu’au milieu du siècle, l’enfant contagieux va connaître

seuls pour vivre la migration sanitaire.

une double séparation. Physique avec le cloisonnement de

Il faudra attendre la loi du 4 mars 2002 sur les droits du

Se posent alors, confrontées aux manques de l’institution

la salle commune et affective avec l’interdiction de visite fai-

malade pour que les parents soient enfin associés au

hospitalière dans ces domaines, les questions de la prise en

tes aux frères et sœurs.

fonctionnement du système de santé.

période cruciale de son développement.

À la même période, les travaux réalisés par René Spitz et

Les recommandations pour une meilleure intégration

Néanmoins, il faut se souvenir que la sensibilité actuelle de

John Bowlby mettent en lumière les troubles entraînés par

des associations renforce alors la place et le rôle des

certains milieux médicaux aux besoins de l’enfant est le fruit

la carence des soins maternels pendant l’hospitalisation, tant

bénévoles, et notamment ceux de la mission Parraina-

d’un long travail des pionniers.

pour le développement physique que psychique de l’enfant

ge des enfants hospitalisés.

Des ajustements progressifs nécessaires ont été réalisés. Ils

et en établissent le caractère quelquefois irréversible.

ont conduit à l’instauration des droits des parents et de l’en-

Ces travaux seront relayés par une circulaire et un décret mi-

Entré à l’hôpital en 1988 à l’initiative de l’association Méde-

fant à l’hôpital à partir de la reconnaissance de leurs besoins

nistériels de 1958 et de 1974; ils recommandent la présence

cins du Monde, ce parrainage contribue fortement au soula-

respectifs et des manques de l’institution. L’instauration du

d’un membre de la famille et une plus grande souplesse des

gement moral des enfants isolés et de leurs parents indispo-

parrainage fait partie intégrante de ces améliorations.

horaires mais ils ne seront guère suivis d’effet.

nibles ou à l’étranger.

charge culturelle, financière et affective de l’enfant dans une

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Dotés d’une sensibilité aux aguets vis-à-vis des besoins des enfants malades et de leurs parents, d’un discret © Stéphanie Rivoal savoir-faire avec les équipes de l’hôpital, les bénévoles de Médecins du Monde mènent à nos côtés et au quotidien un précieux travail que les témoignages des équipes hospitalières illustrent aujourd’hui, à l’occasion du vingtième anniversaire de la mission.” DOMINIQUE FAVIER / ASSISTANTE SOCIALE service de réanimation / hôpital Necker

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Catherine P. et Amadou, hospitalisé à Necker

UNE RÉPONSE LA MISSION PARRAINAGE DE MÉDECINS DU MONDE

INTERVIEW DE CATHERINE PETERMAN, FONDATRICE ET RESPONSABLE DE LA MISSION DEPUIS 1988 Propos recueillis par Marie-Françoise Colombani, éditorialiste à Elle. — Marie-Françoise Colombani : Pourquoi et comment, grâce à un petit garçon, Adoum, avez-vous créé la Mission Parrainage à Médecins du Monde ? — Catherine Peterman : J’ai toujours été bouleversée par la

© Pascal Deloche

détresse des enfants du bout du monde, mais avec Adoum, que j’ai accompagné avec beaucoup d'affection pendant ses années d’hospitalisation, j’en ai découvert une autre : celle, près de nous, des enfants malades et isolés.

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sion France. Il a immédiatement accepté le projet qui s’inscri-

des récompenses. Pendant des années, nous avons travaillé

vait tout à fait dans les nouvelles initiatives de l’association. Et

dans l’ombre. Recrutement, formation, suivi, parrainages,

c’est devenu la première des missions Enfance de Médecins

secrétariat… Aujourd’hui encore, chacun apporte ses com-

du Monde. Une fois obtenu l’agrément de visite dans les hô-

pétences et surtout son temps, beaucoup de temps, pour

pitaux par l’Assistance Publique, le plus difficile restait à faire :

que tourne cette mission, très discrète et désormais ratta-

comment trouver des bénévoles ? Un appel à mille donateurs

chée à la Mission France.

a alors été lancé : « Pourquoi ne pas faire autre chose que

La Mission Parrainage a été la première des associations de

d’envoyer un chèque ? ». Et l’aventure a commencé : le mon-

bénévoles en milieu hospitalier à signer avec l’Assistance

tage passionnant d’une mission.

Publique-Hôpitaux de Paris une convention, comme le propose la loi du 4 mars 2002, sur les droits du malade et l’hu-

© Jacques Boulay

— MFC : Les premiers parrainages commencent en

manisation des hôpitaux.

La rencontre avec Adoum et tous ceux qui, comme lui,

1988, comment sont-ils accueillis dans les hôpitaux ?

C’est là une vraie reconnaissance de la qualité de nos

étaient séparés de leurs parents a été un vrai choc. Car rien

— CP : Le tout premier parrainage a été lancé à Necker dans

parrainages, qui accentue le partenariat avec les équipes

n’existait vraiment à l’hôpital pour les aider. Chaque petit ma-

le service d’immunologie du professeur Griscelli. Ensuite, et

hospitalières déjà bien convaincues et solidaires de nos

lade avait, bien sûr, une infirmière ou une éducatrice « préfé-

peu à peu, l’équipe s’est étoffée. Nous devions sans cesse

interventions.

rée », mais celle-ci s’occupait aussi de tous les autres. Alors,

expliquer, multiplier les contacts et les réunions d’information,

comment apporter à ces enfants déracinés la tendresse,

car les équipes soignantes se renouvellent souvent. Il fallait

— MFC : Pourquoi avoir créé, en 2005, une antenne à

mes et des hommes que je n’aurais jamais croisés autrement

l’attention, l’affection dont ils ont un besoin impérieux pour

aussi vaincre les réticences, convaincre, faire nos preuves,

Cayenne, en Guyane, et pas d’abord dans une région

et, surtout, 1 600 enfants parrainés.

grandir, guérir, vivre ? Comment les aider à garder le contact

mais les enfants étaient là, isolés, en demande d’une atten-

plus proche ?

avec leurs familles, ce lien précieux qui va leur permettre de

tion et d’une écoute personnalisées. Nul besoin d’être mé-

— CP : Nous sommes allés là-bas à la demande du service

— MFC : Combien de bénévoles à ce jour ?

mieux se réadapter quand ils rentreront guéris ? Ces ques-

decin ou infirmière pour « soigner » les blessures invisibles de

de pédiatrie de l’hôpital de Cayenne qui avait pu appré-

— CP : Environ 320 et davantage de femmes que d’hommes.

tions me taraudaient. C’est comme ça que j’ai eu l’envie de

ces enfants-là. Très rapidement, les médecins de Necker et

cier notre présence auprès des enfants guyanais évacués

Je tiens à insister sur le fait que la réussite de cette mission

créer un réseau de femmes et d’hommes qui apporteraient à

de Laennec, où nous parrainions beaucoup en cardiologie,

en métropole. Nous y avons fait un travail de formation.

est surtout celle de toute une équipe, animée par une géné-

des enfants isolés l’amour qui leur manque tant.

ont constaté que nous apportions aux enfants un équilibre

Aujourd’hui, l’antenne, qui ne compte là-bas que des marrai-

rosité et une discrétion exceptionnelles. Personne ne compte

affectif indispensable à leur guérison.

nes, est très autonome.

ni son temps ni son énergie. Si dans l’organisation, l’anticipa-

tivité passionnante, de très belles rencontres avec des fem-

— MFC : Mais entre l’envie et la réalisation, on imagine

tion et la communication, je suis le « chef d’orchestre », cha-

que la route a été longue ! Comment êtes-vous arrivée

— MFC : Comment s’est développée la mission ?

— MFC : Ce que la Mission Parrainage apporte aux en-

cun joue, avec beaucoup d’implication et d’enthousiasme,

à votre but ?

Et quelles ont été les réactions des familles ?

fants n’est plus à démontrer, mais qu'en est-il sur le

une partition qu’il connaît parfaitement.

— CP : C’est vrai que je me suis posé beaucoup de ques-

— CP : Les parents de « là-bas » se sont sentis tout de suite

plan personnel ?

Quant à l’équipe de coordination, elle est complètement

tions. Après un état des lieux dans les hôpitaux, je me suis

rassurés. Les portes des autres hôpitaux pédiatriques se

— CP : Je peux vous assurer que lorsqu’on s’engage dans

autonome et convaincue.

très vite aperçue que cette formule : « un parrain, une marrai-

sont ouvertes : Saint-Vincent-de-Paul, Armand-Trousseau,

le parrainage, il y a des questions sur le sens que l’on donne

ne, un enfant » n’existait pas. J’ai pensé alors à monter une

Robert-Debré…, et les parrainages se sont multipliés. Mais

à sa vie que l’on ne se pose plus… Même si l’on continue

— MFC : Est-on parrain ou marraine régulièrement ou

association, mais la tâche était très lourde. François Foussa-

si la plupart des enfants repartent guéris, d’autres meurent

à s’en poser bien d’autres ! La mission a changé la vie de

une seule fois dans sa vie ?

dier, un vieux copain, responsable aujourd’hui de l’Opération

dans les bras des bénévoles. Les histoires sont souvent lour-

la plupart d’entre nous. Car les enfants nous donnent cha-

— CP : Les histoires vécues sont quelquefois très longues et

Sourire, m’a alors suggéré d’en parler à Médecins du Monde

des et douloureuses, mais tous, soudés par nos convictions

que jour des leçons de vie et de courage qui nous ont toutes

souvent douloureuses. La relation avec un enfant malade et

qui avait organisé l’évacuation d’Adoum. Alain Deloche,

et notre engagement, nous ne baissons jamais les bras. Il

et tous tellement appris et enrichis. Personnellement, c’est,

inconnu n’est pas toujours facile à maîtriser et la séparation,

faut dire que le sourire des enfants est la plus merveilleuse

sans aucun doute, la plus belle aventure de ma vie. Une ac-

que ce soit au moment de son retour dans sa famille ou par-

alors président de l’association, venait juste de créer la Mis-

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La réussite de cette mission est celle de toute une équipe… Personne ne compte ni son temps ni son énergie.” Heures de bénévolat en 2007: 16 560 heures

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Annick F. et Jenifa, hospitalisée à Margency

fois de son décès, reste un moment très difficile. De ce fait, le

impossible… Et quand les enfants repartent, nous n’avons

turnover des parrains et des marraines est assez important.

souvent plus de nouvelles.

Et c’est normal. En plus, pendant un parrainage, il est difficile

En revanche, les équipes hospitalières peuvent parler de ce

de se consacrer à autre chose. Le « noyau dur » de l’équipe de

qu’elles constatent chaque jour : l’éveil, les progrès des en-

coordination est en place depuis de longues années. Il anime,

fants, leur capacité à mieux se battre. À l’occasion de ces

écoute et conseille les bénévoles pour maintenir une qualité

20 ans, nous leur avons donné la parole et tous confirment,

de présence cohérente et efficace auprès des enfants isolés.

à travers leurs témoignages, les effets bénéfiques de notre présence. Dominique Favier, assistante sociale à Necker, explique aussi que ni les institutions ni l’Assistance Publique ne pourront jamais prendre le relais des bénévoles. Si ces petits malades isolés bénéficient des plus hauts plateaux techni-

Lorsqu’on s’engage dans le parrainage, il y a des questions sur le sens que l’on donne à sa vie que l’on ne se pose plus.”

ques en France, aucun accompagnement spécifique n’est prévu pour eux. Les Maisons de Parents n’ont pas la capacité d’accueillir toutes les familles qui le souhaiteraient. D’ailleurs, la plupart d’entre elles n’ont pas les ressources nécessaires pour assurer les frais de séjour en France. — MFC: Comment évolue le nombre de parrainages? — CP: Aujourd’hui, dans tous les établissements, nous consta-

— MFC : En dehors des bénévoles, avez-vous d’autres

tons que les demandes de parrainage sont moins nombreuses.

partenaires ?

Difficile de savoir exactement pourquoi. Les parents sont cer-

— CP : J’ai lancé et mené cet engagement en parallèle avec

tainement de plus en plus présents et nous nous en réjouis-

une vie professionnelle très diversifiée à Air France et les pas-

sons. D’ailleurs, l’idéal serait que notre mission cesse un jour

serelles entre ces deux vies ont été riches et nombreuses. La

d’exister ! Mais ne rêvons pas ! Les difficultés administratives

compagnie nous a d’abord soutenus financièrement dans

pour l’obtention des visas ou les prises en charge des enfants

nos programmes de formation et, aujourd’hui, elle propose

sont de plus en plus lourdes et ne facilitent ni l’accès aux soins

des billets pour réunir les familles et les enfants malades.

ni les voyages des parents.

Quant au partenariat avec les soignants, proposé par la loi

Raison de plus pour continuer et nous faire connaître davan-

de mars 2002, il se confirme chaque jour. Nous travaillons

tage afin qu’aucun des enfants qui a réussi à bénéficier d’une

dans la confiance et la complémentarité la plus totale avec

prise en charge de l’État ne reste isolé à l’hôpital. Comme en

les équipes hospitalières.

Guyane, une antenne de la Mission va être mise en place à Même s’ils sont moins nombreux, nous devons toujours là

sence auprès des enfants malades ?

pour les aider à lutter, à s’en sortir et à se construire. Et pour

— CP : Ce n’est pas facile pour nous d’évaluer… Il faudrait

tenter aussi d’inscrire en eux l’expérience de la solidarité, qu’ils

faire des études comparatives sur le devenir des enfants par-

reproduiront, peut-être un jour, à leur tour et à leur façon.

rainés et de ceux qui ne le sont pas… C’est pratiquement

22

© Cyrille Girard

Lyon. Peut-être, ensuite, d’autres villes de province suivront. — MFC : Comment évaluer les résultats de votre pré-


UNE MISSION D’URGENCE Eliyes, reparti à l'hôpital de Montpellier

UN ENFANT MALADE ARRIVE SANS SES PARENTS, L’HÔPITAL APPELLE MÉDECINS DU MONDE.

I

l arrive que des bébés de quelques jours, des nourrissons ainsi que des enfants plus grands soient déposés à l’hôpital par un accompagnateur qui repart aussitôt. Les

évacuations sanitaires des enfants du bout du monde sont le plus souvent imprévues. Très gravement malades, quelquefois arrachés à leur ma-

© Stéphanie Rivoal

man dès la naissance, ils sont « parachutés » brutalement dans l’univers inconnu et hostile de l’hôpital.

25


très nombreuses : santé, famille, langue, climat,

DES ENFANTS DU BOUT DU MONDE, MAIS AUSSI DES RÉGIONS FRANÇAISES

culture, auxquelles s’ajoutent la douleur et de

De la naissance à 18 ans, ils viennent souvent

multiples peurs.

de loin d ’Afrique subsaharienne, du Maghreb

PR. ALAIN FISCHER

mais surtout des DOM et des COM (La Réu-

CHEF DE SERVICE

Ils y sont aussitôt confrontés à la maladie, la souffrance et la solitude malgré la présence et le dévouement des équipes hospitalières qui les accueillent sans avoir toujours été informées de leur arrivée. Le déracinement est profond et les ruptures

Je dirais, qu’à la limite, déclencher un parrainage, c’est une prescription médicale.”

Malgré les réels efforts d’humanisation des

nion, Guyane, Mayotte, Antilles).

hôpitaux, un séjour à l’hôpital est encore pour

Ils souffrent tous de graves pathologies

chacun un évènement difficile à vivre. Il l’est

qui ne peuvent être traitées dans les

On ne peut pas imaginer que la vie d’un enfant à l’hôpital se résume au contact avec le personnel soignant.

bien davantage pour les enfants séparés de

structures hospitalières de leur région ou

Même si les soignants essaient d’apporter

leurs parents. Malgré une bonne volonté in-

de leur pays d’origine, par manque de ma-

plus que les gestes techniques, ils n’ont pas

déniable et la conscience de l’importance

tériel ou de compétences spécifiques.

le temps… Je dirais, qu’à la limite,

particulière à porter aux enfants isolés, les soi-

Ils sont alors dirigés vers les différents servi-

déclencher un parrainage, c’est une

gnants restent débordés par leurs tâches dans

ces pédiatriques des hôpitaux de l’Assistance

prescription médicale. L’enfant a besoin

un contexte de restriction des budgets et du

Publique-Hôpitaux de Paris (AP-HP) ou dans

d’avoir des relations affectives qui le rassurent

personnel. Même s’ils tissent souvent avec

les centres de long séjour de la région pari-

eux des liens d’affection, leur rôle reste celui

sienne quand les soins doivent se prolonger.

du soin et ils ne peuvent apporter aux enfants

La plupart d’entre eux ne parlent pas le fran-

la présence structurante dont ils ont besoin.

çais même si quelquefois ils le comprennent.

de pointe des hôpitaux parisiens. Souvent re-

Lorsqu’une infirmière, un médecin, une assis-

Dans ces situations extrêmes, rares sont

tenus par des obligations professionnelles ou

tante sociale ou une éducatrice décèle la situa-

les parents qui peuvent accompagner

familiales, les parents ne peuvent venir que

tion d’un enfant seul ou celle de parents devant

leurs enfants. Certains, en situation irrégu-

par intermittence ou très rarement auprès de

repartir, une décision collective est prise pour

lière, ont déjà eu beaucoup de difficultés à ob-

leurs enfants.

solliciter Médecins du Monde, qui déclenche

tenir la décision d’évacuation, c’est le cas des

Peu nombreux certes, mais plus en détres-

un parrainage comme une mission d’urgence.

enfants des comoriens, surinamiens ou haï-

se encore que tous les autres, les bébés de

En dehors de toute connotation religieu-

tiens. D’autres parents, de milieux souvent dé-

l’Aide Sociale à l’Enfance (ASE), malades et

se, le parrainage est un soutien moral ap-

favorisés, ne peuvent quitter leur travail parfois

hospitalisés, sont privés de tout lien parental.

porté à un enfant en détresse physique et

précaire ou leur famille souvent nombreuse, et

À l’hôpital ou en institution, ils sont en attente

psychologique.

n’ont pas les ressources suffisantes pour as-

d’adoption ou de famille d’accueil.

L’enfant est souvent en grande détresse affec-

surer les frais incompressibles d’un héberge-

Enfin, les enfants guyanais venus des « pro-

tive. Le parrainage, mis en place au plus vite,

ment et d’un long séjour à Paris.

vinces » bénéficient aussi des parrainages.

devient un facteur essentiel de la lutte contre

Certains petits malades vivant dans les ré-

Une antenne de la Mission a été mise en pla-

la maladie.

gions françaises sont dirigés vers les services

ce, à leur attention, à l’hôpital de Cayenne.

et l’aident à « tenir le coup ».” © Stéphanie Rivoal

Pr Alain Fischer / chef du service immunologie / hôpital Necker / 2008

© Stéphanie Rivoal

26

27


Sophie B. et Rayan, reparti en Guyane

DES PATHOLOGIES TRÈS LOURDES… DES SÉJOURS QUI SE PROLONGENT En 1988, lors des premiers parrainages dans les services de cardiologie des hôpitaux Necker et Laennec, le nombre d’enfants étrangers accueillis était beaucoup plus élevé qu’actuel-

L’enfant est souvent en grande détresse affective. Le parrainage, mis en place au plus vite, devient un facteur essentiel de la lutte contre la maladie.”

lement. Pour la plupart d’entre eux, le séjour n’excédait guère 3 mois et les parrainages, © Cyrille Girard

courts et intenses, aidaient les enfants à repartir guéris vers leurs familles. Aujourd’hui, les médecins et chirurgiens français sont de plus en plus nombreux à se déplacer pour enseigner et opérer à l’étranger

M. LOU PLANÇON

dans les structures hospitalières existantes où

CADRE DE SANTÉ

locales, la majorité des enfants qui, au fil des

Nous faisons des demandes de parrainage pour des enfants lourdement sédatés, intubés, ventilés,

ans, pourront bénéficier des soins et des inter-

dont le pronostic est souvent réservé.

ventions dans leur pays d’origine.

Une information de l’état clinique et des risques encourus est donnée dès la demande

les compétences ne sont pas encore suffisantes. Ils soignent sur place, avec les équipes

de parrainage, ce qui est très important pour le choix de la marraine.”

Les enfants actuellement évacués vers

Marie-Lou Plançon / cadre de santé /

les établissements de la région parisien-

service de réanimation pédiatrique / hôpital Necker / 2004

ne présentent donc des pathologies très techniques que certains hôpitaux pari-

Une autorisation est toujours sollicitée auprès

siens sont seuls à proposer. Le pronostic

des parents pour la mise en place du parraina-

vital est souvent engagé et la durée d’hospi-

ge. Quand les parents ne sont pas joignables

talisation, difficile à évaluer à l’arrivée, peut se

et que l’état de l’enfant nécessite la présence

prolonger des mois, voire des années, dans

d’un bénévole, c’est le chef de service lui-mê-

les cas par exemple d’attente de greffe ou de

me qui en fait la demande.

lourdes interventions orthopédiques.

28

© Sophie Brändström

lourdes nécessitant les hauts plateaux

29


© Stéphanie Rivoal

RANYA

© Stéphanie Rivoal

F. COCQUIN ÉDUCATRICE

Elle donne son numéro de téléphone afin

Bonjour à toute la famille,

que nous puissions la prévenir en cas de

Je voulais simplement savoir si Ranya était

changement de service ou d’un transfert

bien arrivée. J’espère que tout va pour le

vers un autre établissement. Tous ces

mieux et qu’elle est enfin chez vous avec ses

renseignements sont notés dans le dossier

deux sœurs. Cela va vous faire du bien de

médical de Ranya. Le nom de Sophie est

vous retrouver enfin tous les cinq.

inscrit sur le tableau d’information

Bien cordialement.”

dans la chambre.

Anne E. / coordinatrice Médecins du Monde

La maman repart confiante et rassurée.

à l’hôpital Necker.

Pendant 3 mois, Sophie viendra trois fois

Le 25 août, Ranya arrive en urgence du Maroc dans notre service pour une malformation cardiaque et des difficultés respiratoires. Elle a 15 mois

par semaine retrouver et soutenir Ranya.”

Effectivement, Ranya est bien arrivée.

Florence Cocquin / éducatrice /

Elle va bien, entourée de ses sœurs.

service de cardiologie / hôpital Necker

Comme d’habitude le sourire ne la quitte pas et elle le distribue généreusement. Nous vous

et la chance d’être accompagnée de sa

remercions encore de votre aide morale qui a

maman qui ne pourra pourtant pas rester

changé la vie de notre petite famille. Vous êtes

pendant toute la durée de l’hospitalisation.

« nos inoubliables ». Vous êtes les bienvenus

Il lui faut repartir s’occuper des deux autres

au Maroc. Passez le bonjour à tous ceux qui

enfants restés à Rabat, la sœur jumelle

ont participé et aidé Ranya à rentrer chez elle.

de Ranya et l’aînée de 7 ans. Dès que

plus adaptée pour prendre le relais. Sophie B.

Chez elle, c’est chez vous.

nous sommes informés de la date de son

vient dès le lendemain avec la coordinatrice

Bien cordialement.

départ, nous lui proposons le parrainage

rencontrer Ranya et sa maman. Auprès de

À bientôt.” La famille B.

Médecins du Monde en lui expliquant

l’équipe paramédicale, Sophie va trouver

combien c’est important pour Ranya et

des informations sur le comportement et les

C’était un parrainage très agréable,

sécurisant pour elle. Elle donne volontiers

habitudes de vie de Ranya qui vont l’aider à

avec une fin heureuse comme on les aime.

son autorisation et nous prenons contact

adapter ses heures et durées de visite à l’état

Je serai à Médecins du Monde samedi

avec la coordinatrice de Médecins du

de cette jolie poupée qui, malgré sa maladie,

prochain pour la conférence.

Monde qui recherche aussitôt la marraine la

garde le sourire.

Amitiés.” Sophie B. © Stéphanie Rivoal

30


Youva, hospitalisé à Margency

UNE MISSION DE PRÉVENTION

POUR ATTÉNUER LES TROUBLES PSYCHOLOGIQUES DUS À LA SÉPARATION.

L’

hospitalisation ainsi que la rupture brutale et prolongée des liens parentaux risque d’entraîner chez les enfants des troubles du comportement et

laisser des séquelles qui altéreront la réadaptation dans la vie sociale et familiale. Les études cliniques montrent que l’attachement à une figure de substitution peut préserver

© Cyrille Girard

© Cyrille Girard

l’équilibre psychologique indispensable à la guérison et éviter des carences affectives graves.

33


sorte de mécanisme de défense, comme une

Les études cliniques sur les nouveau-nés

étape ultime pour faire face à la souffrance.

montrent pourtant que l’attachement à une figure de substitution peut produire

En 1952, le docteur John Bowlby, médecin

les mêmes effets et éviter des carences

psychiatre, démontre que les troubles sont

affectives graves.

réparables si l’enfant retrouve sa mère avant 5 mois de séparation. Sans présence d’un

40 % des enfants parrainés sont des bébés de

substitut parental, les effets de la sépara-

moins d’1 an. Certains arrivent à l’hôpital âgés

tion ne disparaissent pas immédiatement

de quelques jours seulement.

et peuvent même se révéler irréversibles

RENÉ SPITZ DE LA NAISSANCE À LA PAROLE Dans son ouvrage De la naissance à la

manifeste une certaine crainte vis-à-vis

parole, René Spitz a repéré les moments

d’un inconnu. C’est ce que l’on appelle

(altération de la pensée, difficulté à entrer en

S’il y a traumatisme, dépression ou hospita-

essentiels du développement de l’enfant

communément « l’angoisse du 8e mois »

relation avec autrui et à mémoriser, altération

lisme, ce « fracas », comme le nomme Boris

qu’il est important de connaître quand

et donc le deuxième organisateur de la

de la notion de temps et d’espace, voire retard

Cyrulnik, l’enfant ne pourra rebondir que s’il

on accompagne les enfants isolés : dès

vie psychique. L’enfant est capable de

CHEZ LES ENFANTS EN BAS ÂGE

mental sévère). Ils peuvent être responsables

rencontre un tiers avec qui il « tricotera » une

les deux premières semaines, le nourris-

juger et de contrôler son environnement,

d’inadaptations sociales et familiales futures.

relation privilégiée et qui l’aidera à puiser dans

son ne reconnaît la tétine ou le sein que

il peut communiquer et comprendre des

ses ressources internes pour lutter et survivre.

s’il a faim. Dans le premier mois de sa

situations plus complexes. C’est cette

En milieu hospitalier, à la détresse affective

Les bénévoles proposent à l’enfant malade

vie, il perçoit le visage humain et associe

étape qui soutient le développement du

Pendant longtemps, les parents et même les

s’ajoutent le ressenti et les manifestations

isolé une « offre » de tuteurs de résilience, qu’il

son apparition avec la satisfaction d’un

langage.

médecins ont considéré que les bébés ne res-

de la douleur, même si les soignants mettent

choisira ou non d’investir, pour s’épanouir et

de ses besoins.

— Ensuite, l’enfant se met à marcher.

sentaient guère la douleur, qu'elle soit physi-

aujourd’hui tout en œuvre pour l’atténuer.

surmonter l’indicible.

Au cours des six premières semaines,

Il devient actif, ce qui transforme ses

que ou psychologique.

Dans le cas de carences affectives graves, les

il garde dans sa mémoire une trace du

échanges avec son entourage : on doit

organisateurs de la vie psychique peuvent dis-

visage et reconnaît la voix qui lui parle.

alors réfréner ses initiatives et créer des

Dans les années 40, les travaux du psy-

paraître, entraînant une détérioration du som-

Il explore sa cavité buccale avec ses

interdits auxquels il s’oppose à son tour

chologue René Spitz mettent pourtant en

meil et de l’alimentation. Cette dégradation

doigts, passant ainsi d’un effort de per-

par l’emploi du « non », étape essentielle

évidence que l’isolement et la privation

dans les premières phases est réversible.

ception à un effort d’incorporation.

de son jugement. C’est le début des

brutale et temporaire des soins maternels

échanges verbaux qui lui permettent de

compromettent le développement physi-

Nos récents contacts avec le neuropsychiatre

que et psychique de l’enfant et peuvent

Boris Cyrulnik viennent de nous conforter dans

susciter une dépression dite anaclitique

nos pratiques d’intervention et leurs effets bé-

(sans objet) dont les troubles cliniques sont le

néfiques auprès des enfants hospitalisés et

refus de tout contact, l’insomnie, la perte de

isolés. Il y a toujours un risque de « traumatis-

poids, la rigidité motrice et la perte de relation.

me » quand les petits malades sont confrontés

Dans ces conditions, l’enfant malade peut

à la séparation et à la solitude. Pour des pré-

développer ce que l’on nomme le syndrome

maturés ou des nourrissons, l’attachement à

de « l’hospitalisme ». La séparation est vécue

la mère dans les premiers jours et mois de la

comme une véritable menace et touche le sen-

vie est totalement décisif dans le développe-

timent d’identité. La dépression est alors une

ment psychique de l’enfant.

Mis en place au plus vite et étayé par une connaissance précise des besoins et comportements des enfants, le parrainage, soutien affectif personnalisé, va s’efforcer de soulager, d’apaiser cette souffrance polymorphe du tout-petit et tenter d’éviter l’apparition du processus de dégradation.”

Quelques moments sont fondateurs

manifester certains sentiments.

dans la structuration de la person-

Le « non » est donc le troisième organi-

nalité du petit enfant : — Vers le 3e mois, le sourire du bébé à

sateur de la vie psychique grâce à l’affirmation de la parole.

la présence de l’autre, s’il lui fait face, se montre assez mobile. Cette communication par le sourire est le premier organisateur de la vie psychique, indispensable pour passer à l’étape suivante. — Entre 6 mois et 1 an, le sourire est réservé à l’entourage proche et le bébé

© Stéphanie Rivoal

34

35


DR. ROSSET PÉDOPSYCHIATRE

Quelques rares bébés, juridiquement adoptables et très malades sont confiés à des pouponnières en attente d’un accueil familial ou d’une adoption. Pour ces bébés extrêmement malades,

LES BÉBÉS EN POUPONNIÈRE CONFIÉS À L’AIDE SOCIALE À L’ENFANCE (ASE) DE PARIS

ce temps d’attente est bien sûr vertigineux et mortifère. Quand nous avons

La maladie s’ajoute à la détresse immen-

rencontré la Mission Parrainage, nous avons pensé aux marraines de Médecins

se de l’abandon. À la pouponnière Paul-Par-

du Monde pour certains de ces bébés. Tous les enfants ont besoin que l’on se

quet de Neuilly, à l’hôpital d’enfants de Mar-

préoccupe réellement d’eux, c’est-à-dire qu’ils ont besoin d’être « portés » par

gency ou au centre des Côtes, les marraines

la pensée et par la rêverie, tout autant que par les bras. On sait que les enfants

sont quelquefois sollicitées pour le parrainage

non portés, psychiquement seuls, deviennent très vite inaccessibles pour les

de bébés confiés à l’Aide Sociale à l’Enfance,

MADELEINE P.

soignants : la relation devient rapidement confuse, fusionnelle, dangereuse.

abandonnés ou séparés d’une famille dé-

BÉNÉVOLE

La place de chacun doit être repérée, définie pour éviter la confusion, le chaos.

faillante par le juge des enfants.

© Stéphanie Rivoal

Madeleine P. et Mohammed, hospitalisé à la pouponnière Paul-Parquet

Par moments, il détourne son regard, il semble triste, ne participe pas, ne répond pas à mes sollicitations. Il osait frapper

La marraine doit savoir ce qu’elle engage avec l’enfant. Le cadre juridique et le projet qui en découle doivent permettre à la marraine de savoir pourquoi l’enfant

La maladie et la souffrance s’ajoutent à la dé-

les touches d’un xylophone, il ne le fait plus… Et pourtant, il touche

est dans l’institution et jusqu’à quand. Quel est le projet de vie pour ce bébé ?

tresse de l’abandon et aggravent les troubles

très doucement mon visage, joue avec mes cheveux, mon collier,

Ainsi apparaît la notion de temps. La marraine va pouvoir s’attacher, car elle sait

dépressifs fréquents chez ces tout petits en-

me regarde dans les yeux longuement… Je crois aux bienfaits que

que l’enfant a un devenir. Elle peut se situer, se repérer, investir l’enfant

fants, pourtant très entourés par un personnel

lui apportent mes câlins, les chansons, même si je ne perçois plus

et avoir une relation avec lui. Porté réellement par elle, le bébé devient sujet.

compétent et attentif.

d’évolution dans ses gestes. Mais c’est difficile…”

Il a son identité, son histoire propre : un passé, un avenir…, donc un quotidien que l’on partage, que l’on peut raconter et transmettre. La marraine doit pouvoir

Les marraines deviennent le seul repère affectif

partager cette connaissance de l’enfant avec l’équipe. Nous savons combien

stable de ces enfants privés de tout lien paren-

il est nécessaire que les marraines soient soutenues, aidées, étayées et

tal et dont la pouponnière est le seul lieu de vie,

regardées dans leur relation à l’enfant. Nous devons aider ceux qui aident.

souvent dès leur naissance. Elles s’engagent

chez les autres jeunes enfants et l’échange

Ce regard permet à la relation d’être et à chacun de se reconnaître et de se

avec une conviction profonde, souvent pour

quelquefois frustrant. Dans les cas les plus dif-

différencier, de s’autonomiser et de s’individualiser. Autour du bébé,

plusieurs années.

ficiles, il arrive que les progrès soient minimes.

© Cyrille Girard

DIRECTRICE

Et alors l’enfant reste vivant. Il y a des enfants qui n’ont survécu

Ces parrainages sont particulièrement délicats

psychiquement que grâce aux marraines, hommage à elles…”

et difficiles. Très meurtris par la séparation

La marraine devient la figure d’attachement

L’équipe de Médecins du Monde s’intègre parfaitement à notre projet institutionnel, en assurant une réelle

Docteur Dominique Jeanne Rosset / pédopsychiatre /

initiale, les enfants sont souvent en situation

indispensable à la construction de la person-

continuité affective, précieuse pour les

Aide Sociale à l’Enfance de Paris

d’évitement de toute relation affective pour se

nalité future et propose une offre de « tuteur de

enfants… et également pour nos équipes.”

protéger. La phase d’apprivoisement est lon-

résilience » que l’enfant choisira ou non d’in-

Joëlle De Roux /

gue, les relations encore plus nécessaires que

vestir, pour s’épanouir.

directrice de la pouponnière Paul-Parquet

Il faut être convaincu pour persévérer.

comme des poupées qui s’encastrent, les chaînes d’identification s’entrelacent.

Il y a des enfants qui n’ont survécu psychiquement que grâce aux marraines, hommage à elles.”

JOËLLE DE ROUX

37


© Cyrille Girard

par cette maladie qui m’affaiblit et met ma vie en suspens. Je ne sais

QUAND LES ENFANTS SONT PLUS GRANDS

quel crime j’ai commis pour être condamné ainsi. Mes parents me

Il faut ensuite prendre le temps d’évaluer au

manquent et je n’ose penser à leur tristesse de m’abandonner à mon

mieux la nécéssité du parrainage, après ana-

sort par manque de moyens. Malgré tout, par instinct de survie sans

lyse de la situation familiale, en tenant compte

doute, j’arrive à puiser au fond de moi-même une force, une énergie

du désir de l’enfant. La parole permet de met-

inconnues. Pourtant, je reste soumis à cette contradiction permanente

tre des mots sur les souffrances et d’atténuer

qui fait de moi un enfant avec des préoccupations d’adulte.

les troubles. L’enfant a besoin d’être valorisé,

Alors je m’accroche avec détermination à cet espoir de vie mais

écouté, entendu et soutenu. En un mot, d’être

je donne en échange ma naïveté, mon insouciance, mon enfance.

aimé. Mais les risques de réadaptation dans le

ADOUM D. PARRAINÉ DE 82 À 85

Je me souviens de mon sentiment d’isolement, de solitude dans ce lieu terrifiant qu’est l’hôpital. Enfermé, emprisonné

Dans ce brouillard, je perçois une main qui m’agrippe.

milieu et la culture d’origine restent encore bien

Au début, je crois à un mirage. À force de persévérance et de

réels et importants.

conviction, et malgré mes doutes, elle m’aide à y croire. Cette main

L’accompagnement personnalisé, la création

est différente des autres, car elle n’est pas là pour soigner ou guérir le

de liens avec l’extérieur et d’éventuelles sorties

mal visible qui m’a conduit en ces lieux. Cette main ne fait pas appel à la science pour agir. Elle est simplement là parce j’en ai besoin.

prennent alors toute leur importance.

Cette main n’est pas présente par obligation, par devoir ou par bonne conscience. Elle est tout simplement là parce qu’elle en a ressenti

handicap ? Et elle est là, comme promis, pour partager un nouvel instant de complicité. Elle me lit avec beaucoup d’émotion les lettres envoyées

LES PARRAINAGES D’ADOLESCENTS

par mes parents. Elle comprend ma tristesse et la partage avec moi.

Ces accompagnements sont sans aucun dou-

S’il est vrai que certains d’entre nous ne s’en sont pas sortis, nous avons tous saisi cette « main », ce fil d’Ariane, qui nous offrait un brin de répit,

te les plus difficiles.

un peu de sérénité et beaucoup de réconfort et qui a, dans tous les cas, allégé ce lourd fardeau qu’un enfant ne peut porter tout seul.

Dans cette période si délicate de leur dévelop-

Souhaiter qu’un enfant ne connaisse pas l’hôpital reste irréalisable. Faire qu’un enfant ne soit plus isolé à l’hôpital, les marraines et parrains

pement, la maladie et l’hospitalisation s’ajou-

de Médecins du Monde s’y emploient aujourd’hui… Je réalise que nous avons eu une chance inouïe d’avoir pu compter sur toutes ces

tent au mal-être psychologique et risquent de

personnes qui ont mis volontairement toute leur énergie à nous aider.

briser leur élan vers l’autonomie. La relation

Miraculés de ce triste sort, nous attestons que la vie est parfois dure, injuste, voire cruelle, mais nous attestons aussi

avec les adolescents, quelquefois difficile à

qu’elle peut être pleine d’heureuses surprises et de belles rencontres. Les contraintes, l’énergie, le temps donné pour nous permettre

établir, est pourtant structurante et rassurante.

le besoin. Elle me cajole, elle me console, elle m’encourage. Elle me rend tout ce que cette maladie m’a pris, à savoir ma naïveté, mon insouciance, mon enfance. Je me dis que j’ai eu de la chance de la rencontrer. Elle se dit qu’elle a eu de la chance de me rencontrer. J’attends ses visites avec beaucoup d’impatience, j’ai tellement de choses à lui raconter. Viendra-t-elle ? M’aimera-t-elle toujours malgré mon

d’obtenir un sursis nous obligent à respecter ce présent et à nous en sortir totalement. Et on s’y accroche fermement pour affronter la maladie, notre ennemi intérieur. Je me souviens… Je me souviens…” Adoum D. / 32 ans / 2008

38

Jean-Claude M. et Stéphane, hospitalisé à Margency


© Cyrille Girard

Les bénévoles peuvent être de réels partenaires e travail avec les équipes. Ils perçoivent l’enfant différemment. Mettre en commun les points de vue, vécus ou ressentis, permet de mieux comprendre l'enfant et de s’ajuster davantage à ses besoins.”

© Cyrille Girard

ANNE FERRET / PSYCHOLOGUE centre des Côtes


UNE MISSION DE SOUTIEN Édith T. et Maroua, hospitalisée à Margency

UN PARRAIN… UNE MARRAINE… UN ENFANT… UNE RELATION PRIVILÉGIÉE ... UN REPÈRE...

T

rois visites par semaine, dont une pendant le weekend, sont indispensables pour construire une relation de proximité et de confiance entre le bénévole

et l’enfant malade. Le moment choisi pour ces visites est discuté et décidé avec l’équipe en fonction de la pathologie, des soins, mais aussi de l’âge de l’enfant et de son état de santé. Les obstacles à la communication sont nombreux : langage, matériel médical, peurs, douleur… Il est

42

© Cyrille Girard

nécessaire de bien les cerner et de les prendre en compte.

43


En préambule, toutes les relations et inte-

du tout-petit. Pour les plus grands, les vertus

La relation de parrainage est un véritable enga-

V. HOREAU

ractions créées avec l’enfant s’établissent

thérapeutiques du jeu prennent ici toute leur

gement sur la durée.

ÉDUCATRICE

et se déroulent dans le respect total de son

importance. Jouer est une activité vitale.

Maîtriser cette relation et éviter le surinvestisse-

identité, de sa culture, de ses croyances.

Un enfant malade est d’abord et avant tout

ment, néfaste à l’enfant qui doit repartir, sup-

un enfant.

pose une vigilance de tous les instants. Dans

Je me suis souvent émerveillée d’entendre une marraine me parler, les yeux pétillants de bonheur, de l’infime évolution de l’enfant dont elle avait la charge, de voir qu’une autre donne à un bébé la bonne place pour qu’il puisse se lover tout contre elle

La rencontre avec un enfant inconnu et ma-

À travers le jeu, l’enfant se développe, rencon-

cette aventure humaine à chaque fois différen-

et trouver réconfort et sécurité. J’ai trouvé remarquable la persévérance de ceux qui vivaient

lade, souvent craintif et silencieux, est un

tre les autres et construit son imaginaire. Le

te, le bénévole est soutenu par la coordinatrice,

une situation d’indifférence ou de rejet, l’imagination déployée par d’autres pour sortir

moment décisif dans le parrainage. Il faut en

bénévole devient l’initiateur et le complice des

qui, avec une disponibilité sans faille, suit de

un enfant de son isolement.”

quelque sorte l’« apprivoiser », ce qui ne peut

jeux, et le plaisir, si rare dans l’univers hospita-

très près l’évolution du parrainage, en liaison

Véronique Horeau / éducatrice / hôpital Laennec

se faire que par étapes.

lier, est alors partagé.

permanente avec l’équipe hospitalière et Mé-

La régularité des visites, aussi importante

© Stéphanie Rivoal

© Cyrille Girard

decins du Monde.

que leur durée, va favoriser la connaissance

Les projets élaborés ensemble vont briser la

de l’autre et l’échange structurant. Adaptée à

solitude et consolider l’espoir. Il faut faire rê-

Il s’agit d’une véritable transfusion d’éner-

l’âge, à la culture et à la pathologie, la rela-

ver les enfants malheureux. Grâce aux images,

gie qui aide l’enfant à puiser dans ses res-

tion est surtout une réponse aux besoins des

aux livres, à la musique, le bénévole se mobi-

sources personnelles pour se battre et

petits malades, identifiés avec eux et avec

lise pour que, pendant toute la durée du parrai-

quelquefois survivre.

l’équipe soignante.

nage, l’enfant reste en contact avec sa culture.

Petit à petit, le bénévole va créer entre l’hôpital

Il veille également à éviter les excès dans les

Rien de tout cela n’est anodin et aucun béné-

et le monde extérieur des passerelles qui per-

cadeaux ou les manifestations de tendresse

vole n’en sort parfaitement indemne.

mettront d’atténuer le sentiment d’exclusion.

que l’enfant ne connaît pas toujours, qu’il peut

En revanche, les leçons de vie que donnent le

même vivre comme une agression et ne re-

courage et la joie de vivre des enfants mala-

trouvera peut-être pas dans sa famille.

des sont pour chacun d’entre eux un cadeau

UN SOUTIEN AFFECTIF PERSONNALISÉ Une transfusion d’énergie

JEAN LUC G.

Les bébés ont un nécessaire besoin de souri-

BÉNÉVOLE

res, de regards, de caresses, de chansons…

inestimable. Quand la douleur envahit… la seule présence peut être aussi silencieuse et rassurante. Quand le bénévole devient l’exutoire des douleurs physiques et morales, signe manifeste que la relation « fonctionne » bien, c’est sou-

Nicole D. et Aïssa, reparti dans sa famille

vent difficile mais provisoire.

« Io sono col moi padrino ! » En français : « Je suis avec mon parrain ! ». Cette phrase,

Les moments du biberon, du repas ou du bain

Être à l’écoute des besoins de l’enfant et non

prononcée d’un ton péremptoire par mon petit filleul italien de 13 ans, Léonardo, « dérangé »

sont des instants privilégiés qui favorisent la

de ses propres désirs, être à l'écoute de ses

par un appel téléphonique pendant ma visite à Necker m’a interpellé et vraiment ému. Un

communication et l’échange, qui structurent

ressentis devant les situations douloureuses,

long silence venait de s’installer et j’envisageais d’abréger ma visite. Peut-être avait-il envie d’être seul ? « Je suis avec mon parrain. », ce qui signifiait aussi « Ne me dérangez pas ! », a été

le jeune enfant. Un avenant à la convention si-

trouver sa « juste place », savoir jusqu’où s’in-

gnée avec l’AP-HP autorise les bénévoles de

vestir, se préparer à la séparation…, demande

ce jour-là pour moi un cadeau fabuleux. J’étais pour Léonardo un repère important auquel il

Médecins du Monde à ces gestes essentiels

une grande solidité psychologique, mature et

tenait, et il voulait que je le sache ! Oui, on reçoit plein de cadeaux quand on est parrain…”

pour le développement physique et psychique

responsable. © Stéphanie Rivoal

44

45


UNE CONTINUITÉ DANS LES RUPTURES Un fil rouge Il arrive fréquemment qu’un enfant change de

pectivement quand il se déplace d’un hôpital

au groupe familial. Sans même attendre de ré-

à l’autre, repères sécurisants et toujours affec-

ponse, les bénévoles s’emploient à donner des

tueux. Quand leur état de santé le permet, des

nouvelles pour que les enfants continuent à vi-

sorties sont organisées : elles leur donnent une

vre par la pensée avec leurs familles éloignées,

« bouffée d’oxygène » et une vision bien diffé-

respectant toujours le fait que les informations

rente du monde de l’hôpital.

médicales ne peuvent être transmises que par

service à l’intérieur d’un même hôpital (cinq ou

les médecins à leurs correspondants dans le

six fois en cardiologie, par exemple).

pays d’origine. Pour les parents, le parrainage

Il doit alors s’adapter à une nouvelle chambre et à un personnel différent. Le bénévole, toujours présent auprès de l’enfant déplacé, déroule un « fil rouge » qui le guide tout au long de son hospitalisation, un repère indispensable, rassurant et sécurisant.

LE MAINTIEN DES LIENS AVEC LA FAMILLE Dans le respect de l’identité et de la culture de l’enfant

ABDOULAYE F. PAPA D’AMADOU

suivi long et régulier, pendant des mois,

— LES PARENTS SONT ABSENTS

voire des années, les enfants sont dirigés

Les enfants isolés sont souvent plongés dans

vers des centres de long séjour en région

des situations familiales ou sociales délicates,

Entre Médecins du Monde et les familles dans le cadre d’un parrainage, il y a un lien très fort qui se crée, d’assistance, de

parisienne (centres de Bullion, Margency

compliquées, voire inextricables : familles sans

communion, de partage, de solidarité.

et des Côtes) où la vie est moins rude qu’à

papiers, monoparentales, sans ressources…

Les marraines pénètrent de manière assez

l’hôpital. De nombreuses activités y sont orga-

Ces enfants, plus que tous les autres vulnéra-

progressive l’environnement de la famille

nisées dans un cadre un peu moins médica-

bles devant la maladie, repartiront un jour près

et y apportent bonheur, sécurité, réconfort

lisé. Certains enfants sont scolarisés.

des leurs, dans un contexte souvent difficile.

moral et psychologique, et permettent

Pour faciliter la réadaptation et la réin-

d’atténuer la douleur, l’anxiété et les angoisses. Elles ne sont guidées que par un seul souci :

Le parrainage vise alors à accompagner l’en-

sertion dans la famille, il est essentiel de

l’intérêt de l’enfant avec ce que cela comporte de labeur, coût, engagement et renoncement.

fant pendant une véritable « tranche de vie »,

maintenir le lien et, quand il existe, de

Une personne qui, à des milliers de kilomètres, s’occupe avec amour et désintéressement de

jalonnée par des alternances de soins lourds

l’entretenir. Il s’agit d’encourager l’enfant à

son enfant devient assurément plus qu’un parent, une partie de soi-même dont on ne peut à

et de convalescence. Il n’est pas rare que cer-

communiquer avec ses parents, ses frères et

jamais se détacher. La toile créée par Médecins du Monde, où se développent des rapports

tains enfants retournent régulièrement pour

ses sœurs, d'évoquer avec lui ses origines,

profonds et sincères d’amitié, de soutien moral, d’assistance multiforme tant sur le plan de la

des interventions ou des soins dans les ser-

son pays, ses habitudes de vie afin d’éviter une

mobilité géographique que du partage pur, est tout simplement magnifique.”

vices de l’hôpital parisien où ils ont été opérés

rupture trop grande.

Abdoulaye F. / Dakar / 2008

Quand les pathologies nécessitent un

© Sophie Brändström

devient alors un réconfort inestimable.

ou soignés à leur arrivée. Le bénévole qui a assuré le parrainage

Lettres, appels téléphoniques, mails, même

dans l’hôpital d’origine reste en contact

si la barrière de la langue est un obstacle (les

avec celui qui prend le relais dans le cen-

photos parleront), sont autant de moyens pour

tre de long séjour. L’enfant les retrouve res-

maintenir un lien de sécurité et l’appartenance

47


Mimi V. et le papa de Cédric, reparti à Lyon

Quelquefois, il s’agit de restaurer un lien qui n’a

Les contacts établis avec l’association des En-

pas pu être créé, dans le cas de bébés arra-

fants de l’île aux parfums facilitent les échanges

chés dès les premiers jours aux bras maternels.

entre les enfants de La Réunion et de Mayotte

La maman n’a pas eu le temps d’investir son

et leurs familles.

enfant. Il faudra alors tenter de désamorcer le rejet ou l’oubli qu’une trop longue absence, un lourd handicap ou un pronostic réservé peu-

— LES PARENTS PEUVENT VENIR

vent provoquer chez certains parents.

Quand les parents peuvent venir, par leurs pro-

Il arrive enfin que les parents ne soient pas

pres moyens où grâce aux billets qu’Air France

joignables, car trop isolés dans un pays loin-

met à la disposition de la Mission pour rappro-

tain. L’assistante sociale cherchera alors à les

cher la famille d’un enfant très gravement ma-

retrouver, par l’intermédiaire de celle du pays

lade ou en fin de vie, le bénévole prépare l’en-

d’origine, pour tenter de donner ou prendre

fant à leur arrivée. Il se met ensuite à distance,

des nouvelles.

sans pour autant disparaître, pendant le séjour des parents. Il reprendra sa place au moment du départ, pour adoucir cette nouvelle rupture et continuer à apporter son soutien. Lorsqu’il s’agit d’un « parrainage-relais » et que les parents ne sont là que par intermittence, les échanges sont différents, quelquefois plus faciles. Le bénévole peut devenir un véritable soutien à la parentalité.

— LES PARENTS SONT LÀ D. FAVIER ASSISTANTE SOCIALE

Même si ce n’est pas exactement l’objectif de la mission, les bénévoles sont quelquefois sol-

Le parrainage ne doit pas déresponsabiliser les parents. La marraine n’est

licités par l’équipe hospitalière pour permettre

pas un substitut parental, même si elle vient suppléer un temps la famille empêchée

à des parents démunis devant une situation

de jouer son rôle. Ses objectifs, tout au contraire, sont de maintenir l’investissement familial,

difficile de prendre le recul nécessaire et de se

de soutenir leurs compétences faites de patience, de confiance à distance, de tenter de

ressourcer. Il s’agit alors de prendre en comp-

diminuer la part de culpabilité si fréquente des parents au départ de leur enfant,

te le « mieux-être de l’enfant » qui peut souffrir

qu’ils peuvent vivre comme un abandon.”

d’une situation anxiogène. Il ne peut s’agir en

Dominique Favier / assistante sociale / service de réanimation / hôpital Necker

aucun cas d’une prise en charge morale ou matérielle des parents.

48


KUBRA Angeline R. et Kubra, décédée à Paris

Angéline R. est marraine Médecins du Monde depuis 4 ans. En janvier 2007, elle a pris en charge la petite Kubra, alors âgée de 3 mois, et ce à la demande du service d’immunologie de l’hôpital Necker où elle est hospitalisée sous bulle. Ses parents, d’origine turque, habitent la région de Bordeaux. Kubra a déjà subi une chimiothérapie et une greffe de moelle épinière.

© Stéphanie Rivoal

Quand Kubra est venue pour sa greffe, elle n’était vraiment pas bien. Je lui parlais beaucoup, je la massais, la caressais. Il a fallu l’apprivoiser doucement pendant plusieurs jours. Elle réagit aujourd’hui au son de ma voix, je capte son regard, elle y répond. Quand enfin elle me sourit,

© Stéphanie Rivoal

MR K.

LES ENFANTS BULLE

PAPA D'AÏSSA

Le parrainage a été pour nous un véritable soulagement. Notre moral est passé par des hauts et des bas. Mais nous savions qu’en notre absence, Aïssa était bien stimulé par une marraine, toujours la même, et nous nous sommes sentis vraiment bien épaulés.”

cela me bouleverse totalement. Je ne trouve rien de plus beau. Il est pourtant difficile, de ne pas pouvoir la toucher autrement qu’à travers cette bulle qui la protège, mais aussi l’isole. Je la stimule, je l’assois,

© Stéphanie Rivoal

CHEF DE SERVICE

auprès d’elle presque tous les jours pendant

Beaucoup de nourrissons ou de tout-petits qui ont des maladies rares du système immunitaire nécessitent des greffes de moelle osseuse et donc un séjour prolongé en « bulle ».

plusieurs heures. Les parrainages nous

Je ne suis pas certain que le parrainage des « enfants bulle » soit vraiment plus difficile. C’est différent.

enrichissent énormément. Ces enfants qui

Le premier contact peut choquer, mais la bulle est une barrière à laquelle il faut s’habituer. Il y a une

endurent tant de souffrances nous donnent

phase d’appréhension, dans les deux sens du terme, pour apprendre à s’en servir, avec les mains dans

de vraies leçons de courage. Pour être

les gants. Dans les discussions que j’ai avec les marraines, il semble que lorsqu’elles maîtrisent la bulle,

marraine, je pense qu’il faut avoir de l’amour

elles s’adaptent facilement et peuvent prendre l’enfant dans leurs bras, malgré cette contrainte.”

à donner, mais aussi des nerfs solides.”

Professeur Alain Fischer / chef du service immunologie / hôpital Necker / 2008

elle adore… Je joue avec elle. Je viens

50

PR. ALAIN FISCHER

51


Marianne P. et Malik, décédé à Paris

LA SÉPARATION DÉNOUER LE LIEN CRÉÉ AVEC LES ENFANTS PARRAINÉS EST UNE ÉTAPE INCONTOURNABLE DU PARRAINAGE.

L

a séparation, même si les bénévoles l’anticipent et s’y préparent est l’un des moments les plus difficiles du parrainage. La mission se termine à la fin de l’hos-

pitalisation. Le départ d’un enfant guéri, heureux de retrouver sa famille est la meilleure issue d’un parrainage. Mais le lien se brise quelquefois brutalement ou douloureusement. Il est inévitable que l'on s'attache aux enfants que l’on accompagne. Un travail personnel, soutenu par l’équipe, est

© Cyrille Girard

52

© photographie

alors nécessaire.

53


QUAND LES ENFANTS REPARTENT…

AGATHE F.

ISABELLE D-S.

BÉNÉVOLE

BÉNÉVOLE

Quand l’enfant repart, c’est souvent aussi bru-

Le bénévole n’est pas toujours prévenu, ce qui

Je pense que le fait que Yasser retrouve sa famille, sa maison, sa vie, a pris

Le départ bien sûr a été dur, mais moins que je ne l’aurais cru.

talement qu’il est arrivé. Après des semaines ou

provoque un chagrin et une frustration bien lé-

le pas sur le reste. Le fait d’imaginer sa maman le serrer dans ses bras après

Je ne suis plus marraine, mais c’est avec beaucoup de bonheur que je repense aux quatre dernières années

des mois d’hospitalisation et de soins adaptés,

gitimes. Le moment de la séparation, celui du

des mois de séparation m’a rendu le sourire. Mon petit rayon de soleil

pendant lesquelles j’ai accompagné Nicoletta

le moment du départ est souvent dépendant

bilan des bons et des mauvais souvenirs, du

me manquera, mais il a retrouvé sa place.”

sur son chemin de la guérison, plein de

du billet d’avion et de l’accompagnateur.

temps passé ensemble à garder l’espoir, de la

rebondissements. Autant de moments de bonheur que de moments de tristesse,

Le parrainage est « réussi » quand l’enfant repart serein sans souffrir de la rupture d’avec le parrain ou la marraine, qui se réjouit de son retour en famille. ”

DR. AUBIER

de larmes, d’angoisses, de prières… sans

MÉDECIN-CHEF

jamais perdre l’espoir. La greffe de Nicoletta

Bien souvent, nous sollicitons les marraines pour accompagner l’enfant lors de son retour dans son pays d’origine et c’est aussi grâce

a réussi ! À surveiller constamment… Elle est

à elles, aux liens qu’elles ont quelquefois conservés avec les enfants, que nous

et de volonté pour continuer à se battre.”

rentrée chez elle, en Guyane, pleine de vie

arrivons à avoir des nouvelles de nos petits patients.” Docteur Françoise Aubier / médecin-chef / hôpital de Margency

joie du retour en famille, de l’« au-revoir » en est essentiel pour le bénévole comme pour l’enfant. Une tranche de vie se referme pour l’un comme pour l’autre. Ne pas pouvoir le vivre

ARLETTE A.

est une déchirure. Le parrainage est « réussi »

MAMAN D'INNES

quand l’enfant repart serein, sans souffrir de la

Après une longue hospitalisation à Necker, Clarissa a pu repartir en Guyane. Elle doit revenir régulièrement à Paris pour des examens et des soins. Elle y retrouve à chaque fois Danielle H. qui l’a soutenue et vu grandir depuis des années.

QUAND LES ENFANTS REVIENNENT…

Chère Nathalie, Je suis la mère d’Innes (Martinique) que vous avez parrainée lors de son séjour à l’hôpital Necker. Je viens

rupture d’avec le parrain ou la marraine, qui se

vous donner des nouvelles d’Innes. Elle se

quand l’enfant est confié à ses parents par ce-

Des examens ou une autre intervention néces-

porte très bien et n’a connu aucun souci

lui ou celle qui l’a accompagné pendant son

sitent parfois un ou plusieurs retours à l’hôpital

depuis son retour en Martinique. C’est aujourd’hui une jolie fille, coquine et malicieuse comme vous pourrez le constater sur les

séjour à l’hôpital et qui peut raconter comment

dans les mois qui suivent le premier séjour.

se sont passés ces longs mois d’absence.

L’équipe signale à Médecins du Monde la date

photos jointes. Pouvez-vous les transmettre au docteur Chaloui ? Je vous remercie de tout

Si la relation se poursuit au-delà du parrainage,

prévue de l’arrivée de l’enfant qui sera de nou-

mon cœur pour l’aide et le support que vous nous avez accordés. À notre prochain voyage

par du courrier ou même des voyages, pour

veau confié, dans la mesure de sa disponibilité,

en France nous aimerions vous rendre visite. Si vous désirez venir passer des vacances dans

le bonheur de tous, c’est ensuite l’histoire de

au bénévole qui a assuré le parrainage.

notre belle île, nous sommes à votre disposition pour vous assister sur place et vous aider

chacun… et non plus celle de la Mission Par-

Il est évident que les enfants, tout comme leurs

dans votre séjour. Nous restons en contact avec vous et vous donnerons régulièrement des

rainage qui reste un accompagnement du dé-

parents, sont aussitôt rassurés et plus sereins

nouvelles de notre petite fille. Merci. Que dieu vous garde.”

but à la fin de l’hospitalisation.

pour aborder une nouvelle hospitalisation.

réjouit de son retour. Il arrive que les hôpitaux proposent de raccompagner les enfants parrainés. Les histoires se terminent alors au mieux

© Stéphanie Rivoal

54

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QUAND LES ENFANTS (ASE) SONT ACCUEILLIS OU ADOPTÉS… Quand vient le moment de la décision de pla-

ÉVELYNE S. BÉNÉVOLE

Pour l’anecdote, la puéricultrice m’a raconté que le pédiatre, étonné de l’amélioration de l’état général de Mohammed, avait décidé d’arrêter les neuroleptiques. Il lui avait demandé à quoi on pouvait l’attribuer. Elle a répondu en riant “ faites venir un car de marraines de Médecins du Monde à la pouponnière et la Sécurité sociale fera des économies…”

cement en famille d’accueil ou d’adoption des enfants de l’Aide Sociale à l’Enfance, souvent

DANIÈLE R.

après de longs mois ou années de parrainage,

MADELEINE P.

BÉNÉVOLE

la marraine participe avec l’équipe à l’élabo-

COORDINATRICE

Khélia avait 3 mois quand je l’ai rencontrée, elle a aujourd’hui 11 ans. Pupille de l’état, elle était polyhandicapée, avec un immense besoin d’amour et de chaleur humaine. Khélia a alterné des séjours hospitaliers à Saint-Vincent-de-Paul

Quelle bonne nouvelle pour Mohammed et pour toi que son insertion dans une famille se profile aujourd’hui clairement. C’est un

ration du projet de placement. Le parrainage aura favorisé l’intégration de l’enfant dans la vie sociale et son accès à l’autonomie.

et des séjours en pouponnière spécialisée. À l’âge de 4 ans, elle a été placée dans une famille en province. S’est posé alors le problème crucial du lien étroit que nous avions

Quand les familles d’accueil ou d’adoption

moment qu’il faut vivre avec beaucoup

créé presque à sa naissance. Les assistantes sociales de l’Aide Sociale à l’Enfance ont

sont trouvées, les équipes de l’Aide Sociale à

d’attention pour chacun. La séparation

fait alors preuve d’une grande humanité. Considérant que notre relation ne pouvait être

l’Enfance leur proposent de préserver ce lien

nécessaire est une épreuve difficile pour

interrompue et en accord avec la famille d’accueil, elles m’ont accordé un droit de visite

créé avec la marraine. La plupart d’entre elles

vous deux. Il faut prendre conscience que

et la possibilité de passer une partie des vacances avec Khélia. Aujourd’hui, mon mari et

acceptent volontiers, très conscientes du be-

pour Mohammed ce sera un arrachement

moi faisons partie de son cadre de vie. Nous avons tous les trois un rapport très privilégié,

soin de l’enfant accueilli et des ruptures à ne

à son milieu de vie. Tu l’y as préparé en lui

comme un oncle et une tante…”

pas reproduire. Les marraines de Médecins du

permettant de s’attacher à toi qui venais

Monde deviennent alors les « vraies marraines »

de l’extérieur et en lui faisant connaître les

de ces enfants. Naissent alors de très belles

sorties, la piscine, le coiffeur… L’extérieur n’est plus un danger pour lui.”

histoires de vie…

Madeleine P. /

KAËL L.

coordinatrice à la pouponnière Paul-Parquet

PARRAINÉE DE 89 À 93

Mireille B. et Alice

© Stéphanie Rivoal

J’ai 19 ans. Ma marraine de Médecins du Monde s’appelle Marie-Paule.

DR. ROSSET

Elle est restée près de moi de mes 8 mois à 4 ans et demi, c’est une personne formidable

PÉDOPSYCHIATRE

qui m’a apporté beaucoup de joie et d’amour. Elle a su me donner le sourire. Vous savez, quand vous êtes une petite fille sans parents à vos côtés pour vous soutenir,

Lorsque nous rencontrons enfin une famille qui va accueillir cet enfant, nous

comprendre ce que vous ressentez, ce n’est pas facile. Elle a compris quand je n’avais

sommes alors très attentifs à ce que les liens antérieurs soient bien évidemment conservés.

pas le moral et quand je souffrais. Elle avait toujours les mots justes et apaisants.

Ces liens créés ont été reconnus par nous comme essentiels et vitaux pour le bébé.

À 4 ans et demi, j’ai été adoptée et j’ai enfin eu des parents, des frères et une sœur.

Nos équipes ont été à l’origine de ce lien, nous en sommes responsables et nous devons

Et Marie-Paule est devenue ma marraine de baptême. Je suis fière de ce qu’elle a fait

le respecter et protéger les enfants de la discontinuité inhérente à nos institutions. Il est

pour moi et d’autres enfants. C’est un cadeau du ciel. Quand je la vois, on discute,

impossible de l’interrompre... Alors, en équipe, nous essayons de maintenir ce tissage…

on déjeune ensemble, on va au cinéma, on s’aime toujours beaucoup.”

Docteur Dominique Jeanne Rosset / pédopsychiatre / Aide Sociale à l’Enfance de Paris Marie-Paul P. et Kaël

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© Stéphanie Rivoal

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QUAND LES ENFANTS NE GUÉRISSENT PAS…

ANNE E.

----- Original Message -----

Voilà ensuite un extrait du texte écrit

BÉNÉVOLE

From: Morts de la Rue

par Anne-Marie, une des bénévoles

To: parrainage@medecinsdumonde.net

du collectif, et lu à l’enterrement de

Sent: Friday, September 08, 2006

Sergelin.

nière chance… Malgré tous les efforts des

Dès le début du parrainage de Sergelin, j'ai compris que les soins allaient être palliatifs et non curatifs. Je l’ai vu décliner tous les jours.

médecins, il n’y a quelquefois plus d’espoir de

Je ressens la mort presque comme une

guérison et les enfants ne parviennent pas à

délivrance pour ce petit bonhomme,

surmonter la maladie. Certains enfants repar-

sans grandes chances de survie, quasi

Bonjour,

Tes parents sont des gens du voyage,

tent alors passer dans leur famille les derniers

abandonné de ses parents et qui souffrait

Suite à notre échange téléphonique, voici

Des gens qui se déplacent…,

moments de leur courte vie.

plus qu’il n’est possible de l’imaginer.

ce qu’il en est des funérailles de Sergelin.

À Cayenne où tu es né,

Mais ici, personne ne les oublie… D’autres

Mais je reste toujours admirative de la

Le mercredi 13 septembre à 10 h 45, son

C’est tout autrement

décèdent à l’hôpital, quelquefois dans les bras

manière dont les médecins et tout le

cercueil sera emmené depuis l’hôpital

Que l’on se parle,

des marraines, parfois très brutalement, sou-

personnel médical font tout leur possible

Necker. Souvent quelqu’un du service est

C’est tout autrement que l’on pense l’un à

vent après de longues souffrances.

pour « sauver » ces tout petits enfants,

présent avec beaucoup d’attention. Nous

l’autre.

même quasi condamnés. Je suis triste

savons qu’à Necker, ils habillent avec soin

C’est en regardant les nuages,

Étant donné les situations extrêmes dans les-

de penser qu’il risque d’être enterré en

les enfants, et mettent un jouet dans le

C’est en écoutant le vent

quelles arrivent les enfants aujourd’hui, le taux

France et que personne de sa famille ne

cercueil.

Que l’on sent ceux que l’on aime.

des décès a considérablement augmenté ces

pourra lui faire une dernière visite.”

Pathologies très lourdes, voyages de la der-

3:01 PM Subject: enfant: Sergelin Sergelin, À Cayenne, où tu es né,

Anne-Marie et Pierre, bénévoles du

Pour t’aider à faire cet immense voyage

derniers mois, où il a été d’environ 20 %. Les

collectif, seront présents lors du voyage et

De Cayenne à Paris,

parrainages sont devenus longs, lourds et

au cimetière.

Médecins du Monde ont été tes parrains,

douloureux. Le décès des enfants est vécu,

Ils accompagneront Sergelin vers sa

Ici, une marraine,

avec les équipes soignantes, dans une pro-

tombe, dans l’espace des enfants.

Ta marraine, a veillé sur toi,

Il y a eu l’amputation qui n’a malheureusement pu être évitée, le courage et

fonde tristesse, mais avec beaucoup de di-

Les bénévoles du collectif évoqueront

Le temps de tes deux hospitalisations.

l’acceptation d’Ahmed. Une seconde opération aux poumons. Les séances de chimio qui

gnité. C’est une épreuve très difficile pour les

les parents de Cayenne, la marraine

Tu étais si heureux quand elle venait.

le rendent malade. Le combat incessant de l’équipe médicale et de moi-même pour le faire

bénévoles.

de Médecins du Monde, liront un texte

De tes grands yeux, tu la regardais.

manger. Il pleure dans mes bras quand il a compris qu’on allait l’amputer, parce qu’il a fait

Le corps de certains enfants ne peut être ra-

poétique, planteront une petite plante

Avec tes mains tu la touchais.

un cauchemar, parce que ses parents lui manquent, parce qu’il a mal, parce qu’il en a marre

patrié, faute de ressources nécessaires, et les

fleurie dans la terre. Dans quelque temps,

Tu étais si heureux quand elle venait.

tout simplement. Ahmed repart vers Alger le 6 janvier « parce qu’il n’y a plus rien à faire »…

bénévoles les accompagnent encore, avec

la mairie devrait inscrire son nom.

Puis, les sédatifs t’ont tellement fatigué,

Il est heureux de retrouver sa famille, mais je crois qu’Ahmed sait pourquoi on le renvoie.

tendresse, jusqu’au Carré des Enfants du ci-

Nous n’en parlerons jamais, il ne me posera pas la question que je redoute (…). Depuis son

metière de Thiais où les conduisent avec un

Bien cordialement.

retour, je l’ai souvent au téléphone et je comprends que son état se détériore. Il a une petite

grand respect les membres du collectif les

Cécile Rocca

voix et, comme souvent, tente de faire bonne figure. Il me dit d’embrasser tout le monde

Morts de la Rue.

ISABELLE R.

Jacqueline P. et Isabelle R. avec Ahmed, décédé chez lui en Algérie

BÉNÉVOLE

en France. Alors je vais conclure comme ça. Je vous embrasse tous de la part d’Ahmed.”

58

Que tu ne pouvais plus,

Eva non plus n'a pas surmonté la maladie, elle est décédée chez elle, à son retour au Cameroun

Lui montrer cette joie qui était en toi… Sergelin avait 8 mois quand il est décédé

Bonjour à l’équipe du parrainage.

loin de ses parents.

59


Si les bénévoles de Médecins du Monde n’existaient pas, il faudrait les inventer…”

© Cyrille Girard

DOCTEUR FRANÇOISE AUBIER / MÉDECIN-CHEF hôpital de Margency

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61


© David Delaporte

UN TRAVAIL D'ÉQUIPE DEPUIS 20 ANS, BÉNÉVOLES ET ÉQUIPES HOSPITALIÈRES ONT RÉUSSI À CRÉER AUTOUR DES ENFANTS ISOLÉS UN RÉSEAU DE COMPÉTENCES, DE PRÉSENCES ATTENTIVES.

En haut, de gauche à droite Mimi Vega, Catherine Bourdeau, Laurence Pioche (psychologue), Danielle Romual — chargées du recrutement UÊ Saâdia Messaoudia — secrétaire salariée U Catherine Peterman — responsable de mission UÊ Michèle Abidi — secrétaire bénévole U Coordinatrices bénévoles dans les hôpitaux, de gauche à droite Lucette Arnould et Chantal Heller — centre des Côtes U Sylvie Guillaume et Jocelyne Sanson — hôpital Saint Louis, centre Édouard Rist, hôpital Robert-Debré U Anne Etchegoyen — hôpital Necker et Fanny Alliez — hôpital Necker et hôpital Trousseau U Simone Bonhomme et Annick Ferrand — Margency U Madeleine Pottier — pouponnière Paul-Parquet U

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UN PARTENARIAT AVEC L’HÔPITAL Confiance et communication

De nombreuses associations apportent pré-

sonne accompagnée, le respect de sa dignité

dispositions matérielles nécessaires à l’inter-

sence, soutien et animation dans ces lieux de

et de son intimité, la discrétion, la confidentia-

vention des bénévoles de l’association au sein

soins, de solitude et de douleur. Le bénévolat a

lité, l’absence d’interférence dans les soins. »

des services médicaux et d’organiser à cet

trouvé sa place à l’hôpital.

En application de cette loi, Médecins du Mon-

effet des réunions de concertation et d’évalua-

de est la première des associations à signer

tion appropriées ».

Pendant toute la durée du parrainage, pour un

La loi du 4 mars 2002, relative aux droits des

avec l’AP-HP, en juillet 2002, une convention

enfant sans référent parental, le bénévole fait le

malades et à la qualité du système de santé

qui précise les modalités de ses interventions

lien avec les soignants dont il devient alors un

modifie le code de la santé publique et régit

dans les établissements.

interlocuteur privilégié.

les droits et les devoirs de l’hôpital et des as-

Le temps où le bénévole n’était accepté

sociations pour une meilleure intégration des

L’article 2 élargit les possibilités de parrainage

qu’avec réticence dans les services hospita-

bénévoles à l’hôpital.

« aux enfants dont les parents ou la famille ne

liers est aujourd’hui révolu. Depuis 20 ans, sa

peuvent être contactés. Le parrainage est or-

présence au sein de l’hôpital est devenue né-

Ainsi, l’article 17 de cette loi modifie l’article

ganisé et les sorties autorisées avec l’accord

cessaire pour créer des liens entre le malade et

L. 1112-5 du code de santé publique :

du chef de service. »

le monde extérieur.

« Les établissements de santé facilitent l’inter-

Le partenariat doit être basé sur la reconnaissance et la confiance mutuelle.” MARIE-LOU PLANÇON / CADRE DE SANTÉ / service de réanimation pédiatrique / hôpital Necker / 2004

vention des associations de bénévoles qui peu-

L’article 4 précise que « l’AP-HP s’engage à

vent apporter un soutien à toute personne ac-

préparer son personnel, par des actions de

M. GUILLOUX

cueillie dans l’établissement, à sa demande ou

sensibilisation, à l’intervention des bénévoles ».

De son côté, Médecins du Monde s’engage à

ASSISTANTE SOCIALE

avec son accord, ou développer des activités

L’article 7 propose « aux hôpitaux et équipes

« assurer la formation, l’accompagnement et

Un jour, une marraine s’est aperçue que l’enfant ne répondait pas à son prénom.

au sein de l’établissement, dans le respect des

médicales concernés de prendre toutes les

le soutien continu de ses membres bénévoles

Une longue conversation téléphonique avec les parents lui a permis de découvrir que le

règles de fonctionnement de l’établissement

prénom du passeport, employé à l’hôpital, n’était pas le prénom d’usage. Le lendemain, le

et des activités médicales et paramédicales et

visage de l’enfant s’éclairait… Une infirmière n’est pas toujours suffisamment disponible pour

sous réserves des dispositions prévues à l’ar-

faire ce travail d’observation et d’investigation.”

ticle L. 1110-11. Les associations qui organi-

Myriam Guilloux / assistante sociale / hôpital Necker

sent l’intervention des bénévoles dans des établissements de santé publics ou privés doivent conclure avec les établissements concernés une convention qui détermine les modalités de cette intervention. »

A. LE GUENNEC ASSISTANTE SOCIALE

Le code de santé publique, dans l’article

Dans un souci de coordination, le service organise deux réunions annuelles avec l’ensemble des associations de bénévoles intervenant en

L. 1110-11, précise : « Les associations qui or-

cardiologie pédiatrique et notamment Médecins du Monde. Ce temps de réunion

d’une charte qui définit les principes qu’ils doi-

est l’occasion d’échanger sur les pratiques de chacun et de les réajuster.”

vent respecter dans leur action. Ces principes

Anne Le Guennec / assistante sociale / service de cardiologie / hôpital Necker

comportent notamment le respect des opi-

ganisent l’intervention des bénévoles se dotent

nions philosophiques et religieuses de la per© Stéphanie Rivoal

64

65


et à transmettre chaque année un rapport re-

PR. HUBERT

traçant ces activités au sein des hôpitaux de

CHEF DE SERVICE

l’AP-HP ».

La collaboration entre le service de réanimation pédiatrique et Médecins du Monde a d’abord dû surmonter des réticences et des doutes de la part de plusieurs d’entre nous. Quel chemin parcouru

L’avenant à cette convention, signé en 2007,

depuis et quel bel exemple de chaîne de solidarité. Aujourd’hui, l’équipe du service

les gestes de la vie quotidiennes (repas, bains,

a constitué un réseau de complicité très efficace avec les différents intervenants

habillage…) dans le respect des consignes de

de Médecins du Monde. Ensemble, nous partageons des moments forts de joie,

l’équipe soignante. »

autorise aujourd’hui « les bénévoles Médecins du Monde à accompagner les enfants dans

mais aussi de peine et parfois de deuil. Que cet anniversaire soit l’occasion d’exprimer à l’ensemble des parrains et marraines de Médecins du Monde notre

Quand les bénévoles agissent dans les servi-

admiration et nos remerciements pour tout ce qu’ils apportent aux enfants,

ces avec réserve et discrétion, sans se subs-

pour leur immense disponibilité et aussi pour tout ce qu’ils voient et taisent

tituer aux parents, en en assumant les devoirs

de nos petites (et parfois grosses) imperfections.”

même s’ils n’en ont pas les droits, la commu-

Professeur Philippe Hubert / chef du service réanimation pédiatrique / hôpital Necker

nication s’établit dans la confiance et la transparence avec les soignants. C’est un véritable partenariat qui a réussi à se

© Stéphanie Rivoal

Anne E., Florence Cocquin et Kevin, reparti en Guyane

mettre en place entre les équipes hospitalières et celles de Médecins du Monde.

Il peut arriver aussi que la relation engagée avec

nécessaire : se séparer du bénévole, provisoi-

l’enfant ou l’équipe ne respecte pas les règles

rement ou définitivement.

ANNE FERRET PSYCHOLOGUE

Dès l’arrivée de l’enfant, tout au long de

éthiques de la mission : surinvestissement af-

l’hospitalisation, au moment de son départ

fectif, intrusions dans le domaine médical ou

Au-delà des liens tissés avec les enfants, la

ou de son décès, les échanges confirment

administratif… Cette situation fait alors l’objet

Mission Parrainage participe aujourd’hui ac-

Il peut arriver qu’un parrainage ne fonctionne pas ou dérape en cours de route, l’enfant et la marraine n’y

la complémentarité des équipes pour le

d’une réflexion commune qui peut amener à

tivement aux côtés des soignants au projet

trouvant pas leur compte. C’est alors le

« mieux-être de l’enfant ».

une décision quelquefois difficile, mais toujours

d’humanisation de l’hôpital.

moment d’engager une importante réflexion commune, d’essayer d’en comprendre les fonctionnements et les dysfonctionnements.

Lors d’entretiens réguliers avec le service (médecins, infirmières, assistantes sociales, édu-

PR. ALAIN FISCHER

catrices et psychologues), la connaissance et

CHEF DE SERVICE

66

poursuivre le parrainage ou le stopper ? Il est parfois possible de retrouver un

tent les observations faites par l’équipe hospi-

Il y a un contact permanent et essentiellement informel entre nos équipes et les marraines. Elles sont tenues au courant de l’état de l’enfant et des perspectives

talière. Son témoignage sur l’humeur, la douleur

d’évolution. De par leur présence qui n’implique aucun geste technique, les marraines sont

Dans le cas contraire, il est préférable

de l’enfant, comme ses suggestions, contri-

en situation de détecter une modification du comportement de l’enfant, de s’apercevoir

d’interrompre le parrainage et

buent à une prise en charge plus complète des

qu’il va moins bien que la veille, qu’il est déprimé. Le dialogue est dans les deux sens,

d’éventuellement confier l’enfant à une

difficultés de l’enfant et permettent la mise en

au bénéfice de l’enfant.”

autre marraine.”

place de solutions encore mieux adaptées.

Professeur Alain Fischer / chef du service immunologie / hôpital Necker / 2008

Anne Ferret / psychologue / centre des Côtes

l’écoute très particulière du bénévole complè-

Marie-Lou Plançon et Nathalie L

Quel est l’intérêt de l’enfant ? Doit-on

équilibre satisfaisant pour tous les acteurs.

© Stéphanie Rivoal

67


— LA FORMATION INITIALE

À l’issue des trois journées de formation, une

Élaborée spécifiquement pour les bénévoles et

charte est signée entre le bénévole et Méde-

dispensée à Médecins du Monde par des pro-

cins du Monde.

de sa démarche. Elle a su s’interroger sur sa capacité à s’occuper d’enfants,

UNE ÉQUIPE MÉDECINS DU MONDE SOLIDAIRE ET ENGAGÉE

elle qui n’en avait jamais eu. Saurait-elle trouver les mots, les gestes adaptés

Les réunions mensuelles de coordination et

dans les conflits ou les situations difficiles ? Qu’évoquait pour elle cette démarche

les retours d'activités ont, depuis 20 ans, fait

- réfléchir sur les motivations et les attentes

les soignants…, sont régulièrement organisées

d’aide et de désir de bénévolat ? Ayant subi à l’adolescence une longue hospitalisation

naturellement évoluer le dispositif de recrute-

liées à ce bénévolat ;

pour améliorer la qualité des connaissances,

où la solitude se faisait pesante, à une époque où l’hôpital était exclusivement un lieu

ment, de formation et d'accompagnement des

de soin, Danielle a vécu l’ennui et a ressenti un fort besoin de présence chaleureuse

bénévoles.

A. COURTADE PSYCHOLOGUE

Danielle R., marraine depuis de longues années, est un exemple réussi d’utilisation positive de son expérience passée. Avant de s’engager, Danielle s’est posé une multitude de questions pour comprendre les motivations

fessionnels, la formation assure la qualité et la cohérence des interventions des bénévoles en

— LA FORMATION CONTINUE

mettant au centre les besoins des enfants.

Des conférences sur des thèmes généraux :

Elle propose de :

séparation, psychologie de l’enfant, vertu thérapeutique du jeu, douleur, deuil, relation avec

de la présence et de l’écoute. © Stéphanie Rivoal

- appréhender la mission comme prévention des carences affectives et des troubles psychi-

et humaine. Sa démarche était donc une démarche gratuite visant à donner aux enfants hospitalisés ce qu’elle-même n’avait pu recevoir pour redonner du courage et de l’appétit

Chacun apporte ses expériences et compé-

pour la vie. Son offre ne venait pas compenser une détresse personnelle, mais partager

tences pour améliorer sans cesse la qualité

une expérience dépassée et transcendée devenue très riche et motrice.”

de présence et d’écoute auprès des enfants

- trouver la « juste place » auprès de l’enfant

isolés et apporter une réponse optimale aux

malade et isolé, des soignants et de la famille

exigences de la convention.

de l’enfant ;

Chère Catherine, Je quitte le parrainage, non par lassitude, mais par nécessité. Il faut savoir

ques inhérents à la séparation ;

GABY L. BÉNÉVOLE

- connaître le rôle, les limites de la mission

se résigner. J’ai peur de ne plus être à la hauteur, de manquer parfois

— LE RECRUTEMENT

dans le respect de la culture et de l’identité de

un rendez-vous. Ces enfants nous attendent avec tant d’impatience…

Les bénévoles chargés de l’entretien de recru-

l’enfant ;

Je suis triste de penser que tout cela est fini, qu’une période heureuse de ma vie

tement (psychologue et marraines expérimen-

s’achève, après 13 ans dans votre équipe. Que faire de toute cette tendresse ?

tées) tentent d’apprécier si la motivation et le

- développer l’écoute aux besoins des enfants

Et « mes » Catherine (lorsque j’aime, j’annexe…), toujours là, fortes et douces

projet du candidat peuvent correspondre aux

en s’appuyant sur des connaissances de psy-

à la fois, efficaces. Pour elles, chaque problème a sa solution. Ou plutôt il n’y a

besoins de la mission.

chologie des enfants ;

jamais de problème… J’ai aussi aimé l’ambiance de nos réunions. J’ai apprécié

Elles sont particulièrement attentives à déce-

- préparer à la séparation et au deuil ;

les contacts intéressants avec les infirmières et les assistantes sociales et surtout ler chez le candidat ses attentes, sa capacité

mes relations avec certains parents. Bon, tout cela est du passé. J’ai aimé, j’ai beaucoup appris, j’ai dû aussi m’améliorer.

d’écoute, sa disponibilité, mais aussi ses fra-

- donner une cohérence à l’action des béné-

Attention ! Pas d’attendrissement !

gilités (trop grande détresse, non-respect de

voles pour la crédibilité de la mission dans les

PS : je viens d’avoir 80 ans…”

l’autre), sachant que la générosité est néces-

hôpitaux ;

saire, mais non suffisante. Dans le cas d’un

68

refus, elles essaient d’orienter le candidat vers

- créer un groupe et réfléchir sur l’engagement

un autre projet.

associatif.

69


— LE SUIVI DES PARRAINAGES

— LES GROUPES DE PAROLE DES BÉNÉVOLES

Dans un cadre bien structuré, les bénévoles

Les coordinatrices bénévoles, pivots essentiels de la Mission et marraines expérimentées,

Animés par une psychologue, ils favorisent

ayant beaucoup de souplesse dans leurs inter-

sont en relation permanente avec les équipes

les rencontres nécessaires dans cette activité

ventions à l’hôpital. La communication trans-

hospitalières qui demandent les parrainages.

solitaire et parfois douloureuse. Les échanges,

parente et la confiance réciproque au sein de

Elles accompagnent et soutiennent les béné-

le partage des expériences heureuses ou mal-

l’équipe de coordination permettent d’assurer

voles tout au long de leur mission, en les aidant

heureuses les aident à surmonter leurs difficul-

la cohérence des comportements et la cohé-

à maîtriser la relation avec l’enfant. Leur grande

tés, à trouver les réponses adaptées. Le dépôt

sion des bénévoles.

disponibilité et leur écoute attentive font d’elles

des souffrances est essentiel au moment des

Les réunions régulières (groupe de paroles,

les garantes de l’éthique de la mission.

deuils. Mettre des mots pour parvenir à sup-

conférences) ou les rencontres plus convivia-

porter l’insupportable que représente toujours

les sont indispensables à la fidélisation des

le décès d’un enfant…

équipes et au sentiment d’appartenance à la

très engagés se sentent soutenus, tout en

Mission et à Médecins du Monde.

Après ces trois deuils successifs, ce fut très dur pour moi de prendre la parole devant les autres, mais ça m’a fait un bien fou…” OLIVIA G. / BÉNÉVOLE

— LA SUPERVISION DES COORDINATRICES Les coordinatrices se réunissent en moyenne une fois par mois avec une psychologue pour

ANNIE MAGGIOLI

partager leurs expériences. Il s’agit de mieux

FORMATRICE

comprendre certaines situations complexes

La bonne volonté ne suffit pas… et il n’y a pas de « recettes »

génératrices de perplexité ou d’angoisse, qu’il

pour réussir un parrainage. Il faut avoir longuement réfléchi à cet engagement

s’agisse d’un enfant parrainé ou des réactions

important, qui nécessite beaucoup d’écoute et de disponibilité pour éviter

des marraines qu’elles encadrent, des conflits

les pièges… Je suis très optimiste, car nous avons le luxe et le bonheur

qu’elles ont à arbitrer, des limites qu’elles ont

de faire un vrai travail d’équipe.»

à donner. Savoir que d’autres rencontrent les

MICHÈLE B. BÉNÉVOLE

mêmes difficultés qu’elles, écouter leurs avis bienveillants permet de se sentir soutenu.

Quelle expérience le parrainage… ! Une multitude d’instants, de rencontres, et Steve, cette boule de tendresse qui ne sait que sourire...

— LE SECRÉTARIAT

Première récompense ce sourire, moi qui croyais ne rien attendre. Mais autour

Une secrétaire à mi-temps et une secrétaire

de lui il y a tant d’enfants qui ne sourient pas. La souffrance que je vois me

bénévole assurent le suivi des dossiers et des

déchire… Mais je ne retiens que ses sourires qui sont des « pieds de nez

contacts avec tous les acteurs et partenaires

à la souffrance » et qui me donnent envie de continuer à donner une particule

de la mission.

de lumière, même si cela paraît infiniment petit. Merci à toute l’équipe,

La totalité des documents (dossiers et comp-

c’est bon d’être parmi vous.”

tes-rendus des parrainages, chiffres, courriers divers) a été conservée depuis 1988, en partie informatisée, constituant ainsi une véritable « mémoire » de la mission. © Stéphanie Rivoal

70

© Stéphanie Rivoal

71


MARIANNE S.

Marianne S. et Elyes, reparti à l'hôpital de Montpellier

Je ne lâcherai pas de sitôt! Tout cela a changé la vie et m’a beaucoup apporté, je veux continuer.”

AMADOU

Douze ans de parrainages, 34 enfants

Amadou est né à Paris en 1993.

Il vient de revenir à l’hôpital Necker pour une

qu’elle a suivis, qu’elle a vu mourir ou re-

Opéré deux heures après sa naissance

grave intervention. Il attend de nouveau une

vivre… C’est avec des yeux remplis, de ten-

d’une grave malformation intestinale dé-

greffe. Autour de lui, un réseau d’amitiés so-

dresse et de force que Marianne S. se souvient

celée à Dakar quelques semaines aupa-

lides, tissées tout au long de ces années, à

de chaque enfant, qu’elle raconte leur histoire

ravant, il se retrouve seul dans le service de

Paris comme à Dakar, devrait lui permettre

et la sienne.

gastro-entérologie. Ses parents doivent repar-

d’affronter cette nouvelle épreuve sans avoir

tir quand il n’a que 10 jours, leurs visas étant

besoin d’un parrainage.

Son engagement commence par un décès.

arrivés à expiration.

Steven meurt peu de temps après le début

Une greffe de l’intestin grêle est prévue, mais

du parrainage. Marianne le vivra mal. « Je ne

l’attente risque d’être extrêmement longue…

pouvais pas en parler. » raconte-t-elle. Il faudra

Dès le départ des parents, un parrainage est

du temps et le parrainage de Léa, Jean-Félix

mis en place. Marie-Paule accompagnera

et bien d’autres, pour accepter l’injustice de la

Amadou pendant 7 longues années de l’hôpi-

mort d’un enfant.

tal Necker au centre de Bullion où il séjourne

C’est aussi l’ambiance et les liens créés dans

entre les soins intensifs dont il a régulièrement

FAMA F.

l’équipe qui permettront à Marianne d’assu-

besoin. 7 ans pendant lesquels Marie-Paule

MAMAN D’AMADOU

mer les souffrances rencontrées. « L’encadre-

apporte avec détermination et régularité à

ment est formidable. J’ai des amies marraines

Amadou sa présence rassurante et attentive,

Nous tenons à exprimer notre profonde gratitude à Marie-Paule S.,

qui ne sont pas de ma génération. On se voit

l’éveille à la connaissance de son pays et

Catherine P., Catherine B.

souvent, on dîne, on discute », explique-t-elle

de son continent, continue à lui rendre visite

et Nicole S. pour leu r générosité,

avec émotion.

quand il est au centre plus éloigné de Bullion,

leur disponibilité, elles qui ont toutes été

fait le lien avec les parents qui peuvent venir de

si proches d’Amadou et de nous ses

À près de 70 ans, Marianne reste pleine

temps en temps, grâce aux billets Air France.

parents… À aucun moment nous ne

d’énergie et surtout d’espoir. C’est avec force

Après la greffe réalisée par le pr. Goulet, Marie-

nous sommes sentis seuls durant

L’engagement des bénévoles est un engagement au long cours fondé

et passion qu’elle parle du futur : « Je ne lâche-

Paule a ramené Amadou à Dakar où il a retrou-

ces moments d’angoisse. Merci aussi

sur la fidélité, l’investissement dans la

rai pas de sitôt ! Tout cela a changé la vie et

vé ses sœurs. Elle fait désormais un peu partie

à tous les bénévoles de cette Mission

durée, l’abnégation et une générosité

m’a beaucoup apporté, je veux continuer. » Et

de la famille… Ensuite même si cela n’a pas

qui réussissent des miracles au-delà des

sans calcul.”

on la croit.

été toujours facile, Amadou s’est bien adapté

frontières et des couleurs de peau.”

Professeur Olivier Goulet / chef du service

à sa vie au Sénégal.

Fama F. / Dakar / 2002

gastro-entérologie / hôpital Necker

© Stéphanie Rivoal

MARIANNE S. / BÉNÉVOLE

72

© Pascal Deloche

PR. GOULET CHEF DE SERVICE

73


L’ANTENNE EN GUYANE Karina G. et Leaderson, actuellement en famille d'accueil

LÀ-BAS AUSSI, DES ENFANTS HOSPITALISÉS ONT BESOIN DE MARRAINES QUAND LES PARENTS, SOUVENT DÉFAVORISÉS, NE PEUVENT SÉJOURNER À CAYENNE.

E

n septembre 2005, une antenne de la mission est crée en Guyane sur la demande du docteur Delattre, chef du service de pédiatrie à l’hôpital de Cayenne,

qui avait apprécié l’expérience très positive des 185 enfants guyanais parrainés à Paris. Le parrainage des bébés prématurés dans le service de néonatalité est la spécificité de la mission à l’hôpital de Cayenne. C’est un plus inestimable pour ces bébés qui démarrent si difficilement dans la vie.

74

75


Quelques indicateurs épidémiologiques

Seule la maternité de Cayenne est de niveau III,

DR. ANNE FAVRE

KARIMA G.

précisent la situation de la Guyane :

disposant d’un service de réanimation néona-

CHEF DE SERVICE

BÉNÉVOLE

du département et de la région en situation de

Les mères ne peuvent rester que quelques jours en maternité, puis rentrent dans leur commune d’origine.

Dylan est né beaucoup trop tôt… au sixième mois de grossesse… Il pèse 800 grammes. Sa maman est

détresse.

La séparation d’avec leur enfant durera

repartie aussitôt en forêt où elle vit avec

plusieurs semaines ou mois. Pendant cette

ses autres enfants. Il attend, à l’hôpital

tale. Y sont donc référées toutes les naissan- le taux de mortalité périnatale est de 18,1 ‰

ces à risque et accueillis tous les nouveau-nés

contre 7 ‰ en France métropolitaine - le taux de prématurité est pratiquement le double de celui de la métropole ( respectivement 12 % et 7,2 % )

Les soins dispensés sont ceux habituellement

période, les parents ne peuvent recevoir que

de Cayenne, d’atteindre le poids

- le taux de mortalité infantile est plus du

pratiqués en métropole. Les prématurés sont

des nouvelles par téléphone, éventuellement

minimum pour partir retrouver ses

double de celui de la métropole ( 10,4 ‰

pris en charge à partir de 25 à 26 semaines

relayées par l’équipe du centre de santé

parents, très défavorisés. Chaque jour,

contre 4,1 ‰ )

d’aménorrhée, soit des poids de naissance

ainsi que des photos par Internet.

depuis son arrivée, j’enfile blouse et

autour de 600 grammes. Les durées d’hospi-

L’équipe soignante s’est inquiétée depuis

talisation de tels enfants peuvent aller jusqu’à

longtemps des conséquences pour l’enfant

masque et viens passer un long moment près de lui. Sorti de la couveuse il se blottit contre moi. Je lui parle doucement et le caresse.

3 mois.

d’une telle rupture. C’est dans ce contexte

Dylan se détend, ses mains se déplient, son visage s’apaise. Il respire tranquillement et

159 enfants ont été parrainés par les 27 bé-

que la mise en place d’un accompagnement

entrouvre les yeux. Nourri de cette affection et de cette attention quotidienne, il va mieux

névoles qui sont intervenus depuis décembre

personnalisé de ces petits patients a trouvé

lutter pour vivre, prendre du poids et quitter l’hôpital. ”

2005.

toute sa justification. Ainsi, dès qu’un enfant

Karima G. / coordinatrice bénévole de la Mission à Cayenne

© Marie Bourdeau

originaire des « communes » (comme on Le fonctionnement de l’antenne est identique

dit ici) est admis, il est proposé à la maman un accompagnement par une marraine de Médecins du Monde. Nous avions déjà

à celle de l’Île-de-France : recrutement, forma-

eu l’expérience très positive des parrainages des enfants envoyés pour soins à Paris. Ici, il s’agit d’accompagner des enfants

tion, suivi et groupe de paroles. Les parraina-

parfois très petits ou extrêmement immatures alors même qu’ils ne sont pas encore sortis du service de réanimation néonatale

ges sont souvent relativement courts (d’une

et que leur survie n’est pas « garantie ». Nous expliquons aux marraines nos réserves et surtout l’importance de leur rôle : être

durée d’1 à 2 mois) puisque la majorité des

une personne stable pour dispenser à l’enfant des soins uniquement maternants, jamais agressifs ni douloureux contrairement

enfants parrainés sont des prématurés. La

à ceux que nous, soignants, nous prodiguons. Cet espace de relâchement nous paraît un moment de réconfort dans la vie et

proximité de l’hôpital favorise les visites quasi

l’environnement de ces petits qui se prolonge bien au-delà de la durée des visites. Les marraines ont trouvé très simplement

quotidiennes nécessaires à ces tout-petits et

une place attentive et discrète au sein de l’équipe, entourant leur protégé de caresses, de paroles, de regards, de chansons. Le

la convivialité d’une équipe qui intervient dans

bénéfice de ces relations maternantes, même s’il est difficile de la quantifier objectivement en termes de procédure qualité (!), est

un seul et même établissement.

perçu comme évident pour les équipes soignantes. Nous n’observons plus de comportement de retrait, de fuite du regard face à nous ; l’apprentissage de la succion se fait avec envie et plaisir pour le bébé. Il est parfois arrivé que des situations inattendues

Cependant, la Mission répond aussi aux de-

de pronostic réservé, voire très sombre, soient identifiées. La présence de la marraine, toujours informée, a permis de maintenir

mandes de tous les autres services de l’hôpital

autour de l’enfant un rempart d’affection contre le stress d’une telle découverte, lien humain de soutien, là où la médecine avait

et certains parrainages se sont prolongés pen-

atteint ses limites. Aujourd’hui, nous n’imaginerions plus fonctionner sans les marraines auprès des enfants et souhaitons leur donner plus de place au sein de l’équipe. Ce sont elles qui, connaissant si bien leur tout-petit,

dant plusieurs mois.

sont les mieux placées pour témoigner de ces moments de vie à des parents trop éloignés. » Docteur Anne Favre / chef du service médecine et réanimation néonatale / centre hospitalier Andrée Rosemon / Cayenne Josette L. et Kenzo, reparti dans sa famille

76

© Marie Bourdeau

77


Nous souhaitons longue vie à cette belle mission qui panse les bleus du cœur.” © Cyrille Girard

ANNE FERRET / PSYCHOLOGUE centre des Côtes

78

79


QUELQUES DATES

20 ANS DE MISSION > > > > > > >

Quelques dates — 81 Les hôpitaux et établissements partenaires — 82 Carte des migrations sanitaires — 84 Quelques chiffres — 86 Le soutien d’Air France — 88 Les intervenants de la formation — 90 Les bénévoles depuis 1988 — 92

1987

L’Assistance Publique des Hôpitaux de Paris (AP-HP) donne à Médecins du Monde l’agrément de visite dans les hôpitaux

1988

CHARTE DE L’ENFANT HOSPITALISÉ CRÉATION DE LA MISSION PARRAINAGE DES ENFANTS HOSPITALISÉS Première mission Enfance de Médecins du monde. L’hôpital Necker et le service de cardiologie de l’hôpital Laennec sont désignés comme des établissements pilotes.

1989

CONVENTION INTERNATIONALE DES DROITS DE L’ENFANT « Tout enfant qui est temporairement ou définitivement privé de son milieu familial, ou qui, dans son propre intérêt ne peut être laissé dans ce milieu, a droit à une protection » (article 20). « Les états parties reconnaissent le droit de l’enfant de jouir du meilleur état de santé possible » (article 24).

1991

CHARTE DES ASSOCIATIONS DE BÉNÉVOLES À L’HÔPITAL

2002

LOI DU 4 MARS SUR LES DROITS DU MALADE ET LA QUALITÉ DU SYSTÈME DE SANTÉ Elle donne l’obligation de fixer par voie de conventions les relations et engagements des hôpitaux avec les associations de bénévoles actives dans leurs établissements.

CONVENTION ENTRE MDM ET L’ AP-HP Elle précise les engagements respectifs de l’association et des établissements hospitaliers.

2006

MDM adhère à l’Alliance Nationale des Associations en Milieu de Santé (ANAMS) MDM rejoint l’Union Nationale des Associations de Parrainage de Proximité (UNAPP)

MISE EN PLACE DE LA MISSION À CAYENNE EN GUYANE 2008

SIGNATURE D’UN AVENANT À LA CONVENTION ENTRE MÉDECINS DU MONDE ET L’HÔPITAL NECKER Il précise le rôle et la limite des interventions des bénévoles dans le processus de soins auprès des enfants hospitalisés.

80

81


U —

LES HÔPITAUX ET ÉTABLISSEMENTS PARTENAIRES U —

Signataires d’une convention avec Médecins du Monde

Hôpital Saint-Louis AP-HP / Paris 10e / — Hôpital Armand-Trousseau AP-HP / Paris 12e / — Hôpital Necker-Enfants Malades AP-HP / Paris 15e / — Clinique Médicale et Pédagogique Édouard-Rist / Paris 16e / — Hôpital Robert-Debré AP-HP / Paris 19e / — Centre des Côtes / Les-Loges-en-Josas (78) / — Hôpital de Pédiatrie et de Rééducation de Bullion / (78) / — Fondation Paul-Parquet / Neuilly-sur-Seine (92) / — Hôpital d’Enfants Margency Croix-Rouge Française / (95) / — Centre Hospitalier Andrée Rosemon / Cayenne (97) /

82

NOMBRE D’ENFANTS PARRAINÉS

33 106 699 15 77 56 2 12 45 159

Autres établissements

Hôtel-Dieu AP-HP / Paris 4e / — Centre Médico Universitaire Claude Albert Colliard / Paris 5e / — Hôpital de l’Institut Curie / Paris 5e / — Hôpital Laennec AP-HP / Paris 7e (fermé en 1999) / — Hôpital Rothschild AP-HP / Paris 12e / — Hôpital Pitié-Salpêtrière AP-HP / Paris 13e / — Hôpital Broussais AP-HP / Paris 14e / — Hôpital Saint-Vincent-de-Paul AP-HP / Paris 14e / — Institut de Puériculture et de Périnatalogie / Paris 14e / — Hôpital Bichat-Claude Bernard AP-HP / Paris 18e / — Centre Médical et Pédagogique Varennes-Jarcy / (91) / — Centre Élisabeth de la Panouse-Debré / Antony (92) / — Hôpital Foch / Suresnes (92) / — Hôpital Raymond-Poincaré AP-HP / Garches (92) / — Centre Médical pour Jeunes Enfants / Montreuil (93) / — Centre de Rééducation Fonctionnelle de Villiers-sur-Marne / (94) / — CHU Henri Mondor AP-HP / Créteil (94) / — Hôpital Bicêtre AP-HP / Le Kremlin-Bicêtre (94) / — Hôpital National de Saint-Maurice / (94) / — Institut de cancérologie Gustave-Roussy / Villejuif (94) /

1 1 12 307 1 1 3 26 3 1 1 1 3 1 2 15 1 1 9 20

83


CARTE DES MIGRATIONS SANITAIRES 80

27

23 53 357

167 96 225

10

PROVENANCE DES ENFANTS PARRAINÉS EN ÎLE DE FRANCE DEPUIS 1988 GUYANE (225) MAYOTTE (179) LA RÉUNION (132) ANTILLES (96) COMORES (84) FRANCE (80) TAHITI (09) NOUVELLE CALÉDONIE (02) SURINAM (10) ALGÉRIE (357) MAROC (53) TUNISIE (23) MADAGASCAR (02) EUROPE (27) BRÉSIL (04) AFRIQUE SUBSAHARIENNE (167)

84

84 4

179 2

9

132 159 2

ENFANTS PARRAINÉS EN GUYANE DEPUIS 2006

85


QUELQUES CHIFFRES — DE 1988 À SEPTEMBRE 2008 EN ÎLE-DE-FRANCE

1450 ENFANTS

PARRAINÉS DE 1988 À SEPTEMBRE 2008

395 BÉNÉVOLES DEPUIS 1988

96 BÉNÉVOLES AU 1ER SEPTEMBRE 2008

— DE 2006 À SEPTEMBRE 2008 EN GUYANE

ÂGE DES ENFANTS À LEUR ARRIVÉE À L'HÔPITAL 37,4% moins de 1 an

27,8% de 1 à 4 ans

17,2% de 5 à 9 ans

11,4% de 10 à 14 ans

159 ENFANTS

PARRAINÉS DE 2006 À SEPTEMBRE 2008

AU DELÀ DE 30 MOIS 20 À 30 MOIS 10 À 20 MOIS 3 À 10 MOIS 3 MOIS

ÂGE DES ENFANTS À LEUR ARRIVÉE À L'HÔPITAL 73,6% moins de 1 an

BÉNÉVOLES DEPUIS 2006

13 BÉNÉVOLES AU 1ER SEPTEMBRE 2008

6,2% de 15 à 18 ans

PARRAINAGES LONGS

25

18,2% de 1 à 4 ans

2,5% de 5 à 9 ans

4,4% de 10 à 14 ans

1,3% de 15 à 18 ans

DURÉE DU SÉJOUR À L'HÔPITAL 2,4% moins de 10 jours 44,3% de 10 à 49 jours

PARRAINAGES LONGS PLUS DE 300 JOURS 100 À 299 JOURS 50 À 99 JOURS

DURÉE DU SÉJOUR À L'HÔPITAL 21,1% moins de 10 jours

58,2% de 10 à 49 jours

20,8% de 50 à 99 jours 21,2% de 100 à 299 jours

PARRAINAGES COURTS

15,7% de 50 à 99 jours

essentiellement des bébés prématurés

PARRAINAGES COURTS essentiellement des pathologies cardiaques à l'hôpital Laennec (fermé en 1999) et à l'hôpital Necker

6,6% de 300 à 599 jours

MOINS DE 10 JOURS 2,3% de 600 à 999 jours 2,4% 1000 jours et plus

4,4% de 100 à 299 jours

DE 10 À 49 JOURS 0,6% de 300 à 599 jours

MOINS DE 10 JOURS DE 10 À 49 JOURS

86

87


LE SOUTIEN D’AIR FRANCE UN GRAND « PLUS » POUR LA MISSION PARRAINAGE

La direction de la communication d’Air France attache une importance toute particulière à ce partenariat logistique pour soutenir le remarquable travail des marraines-tendresse de cette mission pas tout à fait comme les autres, créée au sein de Médecins du Monde.”

F. AUBIER

EULALIE A.

Depuis 1999, le service du Partenariat Huma-

MÉDECIN CHEF

MAMAN DE THOMAS

nitaire favorise le rapprochement des familles

Grâce au partenariat avec Air France, nous obtenons des billets d’avion pour

Je tiens à remercier la compagnie Air France de m’avoir offert un aller-retour

éclatées par la maladie des enfants quand

que les parents éloignés puissent passer

La Réunion/Paris afin de pouvoir venir voir

ciale. Avec une disponibilité et une réactivité

des moments privilégiés avec leurs enfants,

mon petit Thomas, hospitalisé en gastro-

sans faille, l’équipe du Partenariat Humani-

même lorsqu’il est nécessaire de les solliciter

entérologie à l’hôpital Robert-Debré, et de

taire accorde des billets gratuits, généralement

dans l’urgence quand la santé de l’enfant se

passer de merveilleux moments avec lui.

programmés mais souvent demandés dans

dégrade.” Docteur Françoise Aubier /

Avec toute ma gratitude.”

l’urgence par Médecins du Monde, en parti-

médecin chef / hôpital de Margency / 2008

Eulalie A. / 2000

culier lorsque le cas de l’enfant est considéré

elles ne peuvent bénéficier d’aucune aide so-

comme désespéré.

MIREILLE QUEILLÉ / RESPONSABLE DU SERVICE DU PARTENARIAT HUMANITAIRE D’AIR FRANCE

Catherine B. raccompagne Amadou à Dakar sur un vol Air France.

Des parents défavorisés peuvent ainsi se rapprocher de leur enfant malade quand l’hospitalisation se prolonge et qu’un état dépressif s’installe ou pour partager les derniers moments d’une trop courte vie. La chaîne de soli-

La Fondation Air France, créée en novembre 1992 en faveur de l’enfance défavorisée, a pour

darité qui s’installe entre Médecins du Monde,

vocation de « relier, réunir les hommes, favoriser le contact entre eux ». Mais sa priorité est de

H. TAMBOUR

le service du Partenariat Humanitaire, l’escale

soutenir les actions en faveur de l’enfance

ASSISTANTE SOCIALE

Air France et les parents permet à des familles

Dès 1992 Catherine Peterman et Catherine

Nous vous exprimons toute notre gratitude pour la solidarité et la générosité dont vous avez fait preuve

Bourdeau, coordinatrice dans les hôpitaux

envers la famille A. Vous avez permis à cette

émanant des personnels du groupe.

Le grand-père de Clarissa, originaire de Guyane, est venu à plusieurs reprises au chevet de Clarissa qui, depuis, a pu repartir dans sa famille et revient régulièrement pour des soins.

séparées de se retrouver pour des moments d’une rare intensité. Un « plus » inestimable pour l’enfant hospitalisé.

DOURATI A.

famille, séparée depuis 8 ans en raison de la

Quand leur état de santé et les médecins

MAMAN DE ALMA

maladie des petites jumelles, de se retrouver

l’autorisent, certains petits malades peuvent

en Bolivie pour une période de vacances.

aller séjourner et se ressourcer quelques jours

Merci pour ce temps passé dans

dans leur famille.

nir dès 1993 un quota de billets gratuits pour

Je voulais vous remercier de votre aide grandiose en nous offrant des billets d’avion pour mon mari et la sœur

faire venir les parents éloignés auprès des en-

jumelle d’Alma. Ma fille Alma est ici depuis

d’autant plus que nos demandes ont évolué

Enfin, grâce aux billets Air France, l’équipe de

fants malades.

le 18 avril 2005, en attente d’une greffe de

au cours de vos démarches. ”

la Mission de Paris se rend régulièrement à

Laennec et Necker, sont toutes les deux navigantes à Air France. Elles sollicitent aussitôt le soutien de la Fondation, qui permet à Médecins du Monde d’obte-

la recherche des vols les plus appropriés,

foie et nous ne savons pas combien de

Cayenne pour former et soutenir les bénévoles

En juin 1995, La Fondation finance également

temps cela va durer... Cela a été une grande joie de nous retrouver tous pendant un mois.

de l’antenne en Guyane.

la formation des bénévoles de la Mission. Son

Ces retrouvailles vont nous permettre de mieux supporter l’attente de greffe. Avec notre plus

aide ponctuelle se termine en 1998.

sincère reconnaissance et nos remerciements.” Dourati A. / 2005

© Stéphanie Rivoal

88

89


LES INTERVENANTS DE LA FORMATION

UÊAnna Elli-Pardo — psychologue :

UÊMadeleine Pottier — membre de l’association ARPLE

UÊMarie-Odile de Vaugrigneuse — présidente

« Le décès des enfants loin de leur famille » / 1996

(Association de Recherche et de Pratique sur le Livre

de l’association JALMALV (Jusqu’à La Mort Accompagner

— les animatrices de la formation initiale

UÊAnnie Maggioli — formatrice : « Parrainages-relais

pour Enfants) : « L’album comme outil utilisable auprès

La Vie), et Hélène Juvigne — responsable formation

UÊAnnie Maggioli — formatrice

avec les parents et décès des enfants » / 1997

des enfants malades » / 2003

de l’association JALMALV :

LA MISSION PARRAINAGE REMERCIE :

90

UÊMurielle Blachere-Battaglia — psychologue

UÊAnnie Maggioli — formatrice :

UÊAnnie Maggioli — formatrice :

« La fin de vie, réactions et comportements » / 2007

psychanalyste

« Évolution des parrainages : les parrainages longs » / 1998

« Relations avec les parents » / 2003

UÊMurielle Blachère-Battaglia

UÊAleth Naquet — formatrice en relations humaines

UÊMonsieur Vila — service de pédopsychiatrie

UÊMarie-Lou Plançon — cadre infirmier, service de

— psychologue psychanalyste :

de l’hôpital Necker : « Les carences affectives de l’enfant

réanimation du professeur Hubert à l’hôpital Necker :

« Réflexions autour des conséquences pathologiques

— les intervenants de la formation continue

isolé à l’hôpital » / 1999

« Organisation d’un hôpital et d’un service » / 2003

des effets de la séparation chez le jeune enfant » / 2007

UÊBarbara Brouillard — formatrice en relations humaines

UÊChristine Mannoni — ethnopsychologue

UÊAnnick Ernoult — centre de formation

UÊPauline Kunstmann — infirmière, et Cécile Chaudot

service de cardiologie du professeur Cachaner à l’hôpital

à l’hôpital Robert-Debré : « Les chemins du deuil :

François-Xavier Bagnoud : « Accompagnement des

— auxiliaire de puériculture à l’hôpital d’enfants Margency

Necker : « Déclenchement des parrainages » / 1989

souffrance, angoisse, révolte, séparation » / 2000

enfants en fin de vie éloignés de leurs familles » / 2004

Croix-Rouge Française : « Partenariat avec les soignants

UÊChristine Ollivier — psychologue :

UÊChristine Mannoni — ethnopsychologue

U Christine Mannoni — ethnopsychologue à l’hôpital

et limite de nos interventions auprès des enfants » / 2008

« La douleur chez l’enfant » / 1992

à l’hôpital Robert-Debré : « Développement psychoaffectif

Robert-Debré : « La souffrance morale de l’enfant malade

UÊFrançoise Galland — cofondatrice et directrice

UÊViviane Romana — assistante du Dr. Tobie Nathan,

des enfants et des adolescents » / 2001

et ses conséquences : tristesse, rejet… » / 2006

de l’association SPARADRAP : « La douleur chez l’enfant :

ethnopsychiatre : « Les liens familiaux au Maghreb

UÊAnnie Maggioli — formatrice :

UÊMarie-Christine Rateau — responsable de la Maison

les actions de l’association SPARADRAP » / 2008

et en Afrique subsaharienne » / 1993

« Relations avec l’équipe soignante » / 2001

de l’Enfant à l’hôpital Robert-Debré : « Les vertus

UÊJoyce Loe-Mie — animatrice des groupes de parole

UÊAnnyvonne Donnelly — psychologue :

UÊCécile Talbotec — assistance du professeur Goulet,

thérapeutiques du jeu chez l’enfant malade » / 2006

à Cayenne / 2007-2008

« Une présence de qualité auprès des enfants » / 1994

chef du service gastro-entérologie à l’hôpital Necker :

UÊHélène Deltombe — psychanalyste :

UÊMurielle Blachere-Battaglia — psychologue

UÊAnnick Ernoult — fondatrice de l’association

« Relations avec l’équipe soignante », 2002

« Rencontre avec l’enfant : évolution psychologique,

psychanalyste : « autour du décès de l'enfant » / 2008

Choisir l’Espoir :

UÊAnnie Maggioli — formatrice :

les étapes décisives de son développement,

« La séparation avec les enfants que l’on parraine » / 1995

« Isolement du parrain et de la marraine » / 2002

l’attachement » / 2007

91


LES BÉNÉVOLES DEPUIS 1988 A U Abidi Michèle Adam Jean Adnin Pascale Agoune Zélikha Alliez Fanny Alluno-Bruscia Sophie Alonso Geneviève André Nicole Andreu AnneMarguerite Anglade Ghislaine Annede Françoise Arnould Lucette Arthuis Benoît Aubonnet Marc Auclaire Christiane Aucuit Hélène

B U Bachelard Nicole Baillou Virginie Barbance Josette Barberger Maurice Bargin Françoise Bartschi Monique Baudonnière Catherine Bauer Jean-Louis Bauza Jean-Luc Bavay Laurence Beaumont Françoise

92

Beaumont Hania Beaussart Catherine Belgrave Mary Benmohamed Nora Benouaich Éva Berdah-Diagne Maryse Bernard Laurence Berrard Claude Berrard Guilaine Berson Anne Bertrand AnneLaurence Beugnot Christa Beugnot Gérard Bezombes Cécile Bideault Christine Bigio Marianne Billaud Laurence Billet Catherine Bilquez Gisèle Bloomfield Wafaa Bolnet Marie-José Bonhomme Simone Bonin Claire-Marine Bonnet Brigitte Bonnet Marie-Claire Bonnet Monique Bonneton Véronique Bonnichon Anne-Marie BordenaveLabarbère Sophie Bour Dominique Bourcier Mireille Bourdeau Catherine Bourgeaux Nicole Bourgin Nathalie Bousquet Michelle Bout Violaine Bouton Jeannie Bretaudeau Marianyc Broust Claudine Bruas Japick Buchwald Josette Bufkens Régine

C U Cadot Myriam Caignon Odile Cakin Lise-Marie Cambus Gabrielle Camps Marie-Hélène Carel Mariette Carme Jacqueline Castege Arlette Césaire Michèle Chabasson Guta Chalier Sophie Chambard Lucette Chanal Christiane Charlopin Thérèse Chebah Dalila Cheraillier Florence Chesneau MarieChristine Chevant Claude Chomette Danièle Cibiel-Lavalle Françoise Claverie Annie Cloiseau Hilde Colonna Teresa Commaret Denise Conérardy Philippe Corbineau Dominique Coste Jane Coudron Nadia Couettoux Denise Courtade Angélique

D U D’Erm Castel Annick D’Evry Gilles D’Hérouville Isabelle Dahl Laurence Dahmane Christine Daunis Danièle De Beauvais Nadine De Bernede Annabelle De Carville Florence

De FigueiredoFerraz Lia De la Debuterie Michèle De Léotard Laurent De Matteis Janine De Miscault Isabelle De Necker Anaïs De Riberolles Catherine De Tastes Géraldine De Villamil Marie Debard Pierrette Decaix Monique Degrenelle Xavier Delavilatte MariePascale Delgado Noëlle Delorme Julie Delpech Pierre Desa Marie-José Desandre Francette Dessombz MarieSophie Detournière Nicole Devos Irène Dô Éliane Donatien Lydie Doncoeur Sophie Dos Santos Andrée Drocourt Colette Duborgel Michèle Dufaure Danielle Dumez Jean-Claude Dupontanice Françoise Dupont-Duvialard Jacqueline Durand Agnès Duret Josine

E U Emmanuel Chiara Erramouspe Malika Esbelin Tatiana Etchegoyen Anne Even Janine

F U Fabie Marie-Andrée Fabre Christine Fais Simona Falgère Liliane Fassier-Ramonet Corinne Faubert Josiane Fauvel Caroline Fayard Colette Ferrand Annick Finkelstein Isabelle Fischer Claire Fontana Agathe Foubert Caroline Fredrick Colette

G U Gallesio Karima Gallier Sylvie Galliot Christelle Gambard Chloé Garrier Françoise Garzuel Nathalie Gaston Chantal Gateiller Jeaninne Gauthier MarieLouise Gauthier Martine Gautier Anne Gautier Gigi Geiger Francis Genestie Irène Genet Michèle Georgeron Martine Georges Dominique Giraudeau Yveline Godet Mireille Gollety Jean-Luc Gollety Sixtine Golub Françoise Gonzalez-Guibert Charlie Goussault Perrine Grandidier Valérie Gravereaux Florence

Grifaton Thérèse Grimberg Olivia Guigues MarieCatherine Guilhot Brigitte Guillaume Sylvie Guillebert Annie Guillemin Savine Guyader Alain

H U Hanemian Françoise Hartenstein Laurence Hascoët de Gennaro Danièle Heller Chantal Helou Muriel Hirsch-Marie Lisn Ho-Can-Sung Sandra Hoch Lise Hogan Marie-Claire Horth Aveline Humbert Régine

IIdirUYasmina Igoulen Claudine Imbert Emilienne

J U Jamain Anne JanssensWynsberghe Andrea Jersier Joëlle Joachimowicz Claire Jourdain Maryse

K U Kaba Naré Kiener Nathalie Kovacs Gabrielle Krys Sophie

L U L’Inconnu

M U Mabille Monique

P U Paindavoine-

S U Sallard Danièle

V U Vaccari Elisabetta

Rose-Aimée Lacaille Marie Lacq Bénédicte Lacq Geneviève Lafont Anne-Marie Lahaye Martine Lair Claude Lallemand Claire Lama Corinne Lamolinerie Christine Lantuas Sandrine Laristan Thierry Lasota Lydia Laurent Catherine Le Sache Bernadette Le Saint Nathalie Le Sausse Florence Leboeuf Françoise Legerton AnneMarie Legoff-Sciacca Nadine Legoueix Martine Legros Christophe Lemaire Anca Lemaire Nathalie Lemesle Jacqueline Lenaerts-Dequidt Mieke Lepoutre Marie Leroy Gabrielle Leveille Frédérique Leveille Sophie Liber Anaïs Lilaz-Polletaz Christiane Linchet Aline Lipski Serge Locquin Elizabeth Lombard Karen Lopes Paul Loriot Rolande Louvrier-St-Mary Josette

Maes Corinne Maggioli Annie Malonda Annette Malvoisin MarieThérèse Mane Marie-Thérèse Mangou JeanClaude Manil Christiane Marchand Annie Marchetti Patricia Margules Sylvie Martin Annie Martin Sylvie Martinetti Denyse Martinez Anik Masse Évelyne Massel Alexia Massel André Maupetit Monique Mayer Jessica Medjoubi-Ter Gilda Megard Kouki Mendes Araceli Meyer Chantal Mezouar Leïla Mimouni Claire Mirabaud Guy Moine Nicole Monnier Christiane Montanana ClaudeLise Morize Danièle Mouton Lou

Cassiet Nelly Pallas Eleni Panico Jean-Pierre Parent Catherine Pascaud-Becane Geneviève Pauchard Joëlle Pehmler Erika Pelletier Béatrice Pépin Sylvie Perquis Jeanne Perrignon Justine Peterman Catherine Peyres Jacqueline Philibert Pierrette Pinot Catherine Pioche Laurence Piou Christine Pittau Claudette Pollin Marianne Pottier Madeleine Presson Agnès Provoost-Riffault Charlotte

Samama Dominique Sanson Jocelyne Santos-Da Silva Isabel Savoye Marie-Paule Savy Gilberte Schaftlein Sylvie Scholten Christine Scotto Francine Seban Évelyne Sebbag Patricia Sebrie Michelle Seigneur Bernard-Éric Sénéchal Catherine Shehata Madiha Simonnot Marianne Sinet-Régnault Brigitte Sinizergues Marie Sirot Fabienne Souhami Angélique Szirak Nicole

Valencia Luc Vanrell Françoise Vaslier Chantal Vega-Pons Mimi Velten Annie Venin-Baron Thierry Verchere Laure Vervelle Marie-Josée Vesanes Petit-Paul Jeanne Vigier Christine Vilatte Anne-Claire Vincentelli JoséMarc Von PlatenTillement Claudia

N U Naem Jean Naudin Martine Ng Kon Tia Viviane Nsonga Hanako

O U Ollivier Christine

R U Radenez Françoise Ramirez Bozica Rebours Éliane Reffas Isabelle Renaudineau Jeanine Richomme Annick Riley Susan Ringelstein Violette Rivera-Sézille Balbina Robert Catherine Robinson Mandine Rogé Anne Roger Angéline Roger Philippe Romual Danielle Roulet Karine Roussel Martine Rozes Françoise

W U Wallich Simone Wolff-Rinaldi Annie

Y U T Yvansky Anne U Tachdjian Simone Taïbi Nourdine Tarras Yvonne Z U Tesseraud Édith Zeggai Fatima Theveniau Christine Thierry-Mieg Édith Tibourtine MarieChristine Tirard Monique Tirouche-Meunier Chantal Toin Jacqueline Touchard Nathalie Tourreau Nicole Tragin Danièle Traoré Maïmouna Travers Monique Trochesset Luce Troncy Hélène Tyan Joseph

Réalisation et montage du film « Mission Parrainage, une mission pas comme les autres » : Cyrille Renaux et Bruno Maruani Journalistes Camille Biet et Dorothée Frénot

93


UÊles bénévoles, les équipes hospitalières et les parents — pour leurs témoignages UÊtous ceux qui ont contribué à la réalisation de cet ouvrage UÊStéphanie Rivoal, Cyrille Girard, Sophie Brändström, Pascal Deloche, Marie Bourdeau, David Delaporte et Jacques Boulay — photographes UÊMarie-Françoise Colombani — journaliste Frédérique Chavance et Hélène Valls— pour la relecture UÊla compagnie Air France — pour son précieux soutien UÊCatherine Peterman pÊV Vi«Ì Êj` Ì À > iÊiÌÊÀj`>VÌ ÊUÊLaure Thonier — design graphique

achevé d'imprimer sur les presses de STIPA

94

octobre 2008

95


96


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