Sida : aller au devant des populations isolées

Page 1

SI DA

ALLERAUDEV ANTDESPOPULATI ONSI SOLEES:

POURUNEPRI SEENCHARGEI NTEGREEETDECENTRALI SEEDUSI DA

Cont a c t spr e s s e: Fl or e nc ePr i ol e t/ Anna be l l eQué ne t 0 14 49 21 43 1/ 1 43 2–0 60 91 73 55 9 www. me de c i ns dumonde . or g


INTEGRER LE SIDA DANS LA PRATIQUE MEDICALE COURANTE Depuis 25 ans, l’épidémie de sida a changé de visage, passant d’un pronostic de mort à courte échéance à une maladie qui se traite. Même si le nombre de personnes sous traitement antirétroviral a plus que triplé dans les pays en développement depuis 2003, ce chiffre n’atteint que 28% des personnes en besoin de traitement, et parmi eux seulement 15% d’enfants. Et bien que le coût des traitements dits de « 1ère ligne » ait baissé, atteignant 77 $/an pour la trithérapie générique la plus communément utilisée, les traitements de « 2ème ligne », utilisés en cas de résistance, restent chers à 1 500 $/an en moyenne. En plus de préoccupations financières, l’observance au traitement reste problématique car parmi ceux qui y ont accès, plus du tiers arrêtent leurs traitements ou décèdent au bout de deux ans.

Il est donc urgent de repenser la lutte contre cette épidémie et de sortir rapidement de « l’exceptionnalisme » qui prévaut encore pour parler du sida. Pour cela, les efforts d’intégration dans la pratique médicale courante et la simplification de la prise en charge constituent des avancées considérables. Concernant les pays à ressources limitées, la réalité du terrain nécessite de trouver une organisation de soins compatible avec des effectifs médicaux réduits et des moyens restreints.

C’est donc dans ce souci d’approche combinant décentralisation, simplification et intégration que le réseau international de MdM a mis en place en zone rurale des programmes décentralisés de prise en charge du VIH/ sida. Ces interventions flexibles proposent un paquet de services médicaux et sociaux cohérent et coordonné avec les acteurs locaux : acteurs gouvernementaux, ONG locales, associations de personnes vivant avec le VIH. Les équipes locales et expatriées soutiennent des dispensaires de santé primaire en milieu rural et décentralisent les consultations grâce à des cliniques mobiles comme par exemple MdM Espagne en Tanzanie. Nos activités sont également menées par des éducateurs pairs, issus des communautés rurales, assurant un meilleur impact aux messages de sensibilisation. Cette approche de santé publique n’est pas dénuée de défis, au premier rang desquels le maintien des stocks de médicaments et le problème crucial de manque de personnel qualifié.

Médecins du Monde intervient également sur le volet indispensable du renforcement des capacités locales : nous ne nous substituons pas aux systèmes existants mais nous intervenons au travers de mécanismes de partenariat, d’appui aux ONG locales et de formation des équipes locales.

Tous les moyens financiers et humains mis à disposition pour lutter contre cette épidémie font naître l’espoir d’une amélioration globale de l’accès aux soins dans les pays à ressources limitées. Le sida pourrait donc servir de levier en faisant bénéficier les autres pathologies chroniques et l’ensemble du système de soin des moyens de lutte contre cette pandémie.

© Médecins du Monde - Décembre 2007

1


DECENTRALISER : DEPISTAGE ET ACCES AUX TRAITEMENTS L’éloignement géographique des centres de santé constitue aujourd’hui l’un des principaux freins à la lutte contre le Sida. Le coût du trajet et la distance géographique placent les soins hors de portée de la majorité des malades et constituent une barrière au suivi des traitements. Il est donc impératif d’amener dépistage et accès aux traitements dans les structures de soins de santé primaire, premier niveau de soins. C’est pourquoi Médecins du Monde accompagne la décentralisation des activités de lutte contre le sida au plus proche des populations isolées. Loin de la capitale et des hôpitaux de référence, Médecins du Monde développe ses activités vers les centres de soins de base, situés aux cœurs des communautés, pour garantir un dépistage et un accès aux traitements pour tous et toutes.

© Olivier Dubuquoy

Intégrer les activités de lutte contre le sida dans les soins de santé primaires La démarche de décentralisation permet ainsi d’intégrer dépistage et traitement dans le paquet minimum de soins proposés par tous les centres de santé de base.

Au Bénin, MdM France développe depuis 2005 un programme complet intégré au seinmême des centres de soins de santé primaires de Ouidah et Comé. Premiers niveaux de soins, les centres de santé d’arrondissement sont aujourd’hui en mesure de proposer des activités de prévention, de dépistage et de traitements anti-rétroviraux. « Avant je devais © Médecins du Monde - Décembre 2007

2


parcourir 40 kms, aujourd’hui je peux aller dans mon centre de santé d’arrondissement qui n’est qu’à 3 ou 4 kms » témoigne une patiente. Fin 2006, ce sont plus de 12 000 personnes qui ont ainsi pu être dépistées. Chacune d’entre elles bénéficient de conseils pré et posttest individuels, quel que soit le résultat. Près de 500 patients sont aujourd’hui sous traitements anti-rétroviraux, avec un taux d’observance du traitement qui avoisine les 85%. Le projet permet également une prise en charge globale des malades (soutien nutritionnel et psychosocial) et un appui aux associations de malades. « Cette prise en charge globale implique de travailler en équipe et en lien avec la communauté, de savoir ce que les autres font dans la chaine sanitaire, ce qui est extrêmement enrichissant. Au-delà des activités de lutte contre le sida, cela nous sert pour toutes les autres pathologies chroniques » explique la coordinatrice de MdM au Bénin.

Au Zimbabwe, l’un des pays d’Afrique les plus touchés par le sida, un tiers de la population adulte est séropositive et l’espérance de vie a chuté de 52 ans en 1990 à 36 ans en 2006. Depuis mai 2004, les délégations de MdM France, Canada, Espagne et l’ONG locale FACT développent, dans le district de Chipinge, un programme complet alliant sensibilisation communautaire, prévention, accès aux antirétroviraux, services d’aide à domicile pour les patients séropositifs immobilisés et soutien psychosocial et thérapeutique aux orphelins et aux enfants vulnérables. Hors des murs de l’hôpital de Chipingue, le programme soutient également les activités préventives et curatives de 4 hôpitaux et de 46 dispensaires du district (prévention de la transmission mère-enfant, prévention et traitement des maladies opportunistes, mise en place et suivi des traitements ARV…).

© MdM

© Médecins du Monde - Décembre 2007

3


En Tanzanie, MdM France lutte depuis 15 ans contre le VIH dans l’une des régions les plus touchées du monde. L’association a progressivement mis en place à l’hôpital régional de Bukoba un programme complet de lutte contre le sida, incluant des activités de prévention, de dépistage et de réduction de la transmission materno-infantile. Aujourd’hui, l’accent est mis sur les trithérapies, avec 2 000 patients sous ARV, et la décentralisation des activités vers les zones les plus reculées. L’objectif est de débuter des projets similaires en dehors de l’hôpital, notamment en zone rurale, afin d’augmenter le nombre de bénéficiaires des traitements et de faciliter l’accès aux structures de santé. « Je dois faire plus de 50 kms pour venir chercher mon traitement à l’hôpital de Bukoba et cela me coûte plus de 6 000 shellings (3,60 euros) par trajet, ce qui est un véritable problème financier pour moi. » témoigne une patiente. Ainsi, loin de Bukoba, MdM aide à renforcer les programmes VIH développés par 4 hôpitaux de district et cherche à étendre ces services au niveau de 28 centres de santé et dispensaires de trois districts de la région de Kagera. « Décentraliser les activités est la meilleure solution pour garantir l’accessibilité des traitements

aux

populations

les

plus

reculées.

Cela

permettra

également

de

décongestionner les hôpitaux » souligne le médecin en charge des traitements ARV de l’hôpital du district de Ngara.

District de Ngara - © Olivier Dubuquoy

MdM Espagne intervient dans le district de Karatu, situé au nord du pays, dans la région d’Arusha. Carrefour touristique et commercial, la région est considérée par le ministère de la Santé comme une zone à haut risque. Depuis 2002, les 40 centres de santé de Karatu et les équipes des cliniques mobiles ont dépisté plus de 27 000 personnes, soit près de 7.5% de la population du district. Avec l’appui de MdM, les 20 centres de soins de santé situés © Médecins du Monde - Décembre 2007

4


dans les zones rurales ont également effectué plus de 11000 dépistages. Depuis 2005, l’association assure également à l’hôpital de district de Karatu le suivi médical de plus de 170 séropositifs et de 248 patients sous traitement ARV. Mais pour répondre au mieux aux besoins des populations rurales, les équipes de MdM développent depuis avril 2007 des cliniques mobiles dans deux centres de soins du district. « C’est la première phase du processus de décentralisation. Les patients qui sont suivis économisent l’argent des voyages (10 dollars par mois et par patients). L’observance aux traitements s’améliore et les risques de personnes abandonnant leur traitement diminuent fortement » souligne le coordinateur de MdM Espagne.

Déstigmatiser la maladie via les centres de soins de proximité La population est naturellement moins disposée à faire la démarche et le voyage vers un centre éloigné, spécialisé dans la prise en charge du sida, qu’à se déplacer dans son centre de soins habituel. Proposer un dépistage et un traitement antirétroviral qui soient intégrés dans un centre de sante primaire permet donc de lutter contre la stigmatisation liée au VIH.

En Tanzanie, à l’hôpital de district de Chato, toutes les activités de lutte contre le sida sont intégrées dans le parcours médical des femmes enceintes. « Le dépistage VIH est proposé pendant les consultations de soins de santé primaire, au même titre que le dépistage de la malaria ou de la malnutrition. Elles ne sont pas obligées de se redéplacer pour se faire dépister » explique un agent de santé. Destigmatisé, le dépistage est désormais accepté par 100% des femmes.

District de Chato - © Olivier Dubuquoy

© Médecins du Monde - Décembre 2007

5


En Haïti, MdM Canada intervient dans l'un des quartiers les plus défavorisés et isolés de Port-au-Prince, Cité Soleil, le plus grand bidonville d'Amérique. Le programme est entièrement intégré dans les services du seul hôpital de Cité Soleil, le Centre hospitalier Sainte-Catherine de Labouré (CHOSCAL) qui couvre un bassin de population plus de 420 000 personnes. MdM y propose des activités de dépistage, de prévention de la transmission du virus de la mère à l’enfant et de support psychosocial aux personnes vivant avec le VIH. « Ce programme nous a permis d'améliorer l'accès aux soins des personnes vivant avec le VIH. Nous avons renforcé le service du laboratoire, les activités de santé reproductive, de planification familiale, de nutrition et de vaccination. L’intégration des soins dans les services des hôpitaux contribue également à la pérennité des programmes et à lutter contre la stigmatisation liée à l’épidémie » souligne le coordinateur de MdM Canada.

FORMER POUR NE PAS SE SUBSTITUER Pour garantir la pérennité de ses activités, Médecins du Monde ne se substitue pas aux autorités mais cherche à renforcer les capacités du personnel local, notamment des soignants, agents de santé, infirmiers ou médecins, en les formant au dépistage et à la prise en charge du VIH/Sida. Le transfert de compétence est l’une des activités phare de nos projets. Le travail effectué grâce à des éducateurs issus des communautés (« éducateurs pairs ») en est un exemple.

MdM travaille également de concert avec les associations locales de lutte contre le VIH et de personnes vivant avec le sida. Ce renforcement indispensable de la société civile participe activement à la lutte contre la maladie et contre la stigmatisation qui entoure les personnes infectées.

Au Bénin, les équipes de MdM travaillent en lien direct avec les ONG locales pour développer des outils et messages de prévention adaptés aux bénéficiaires (préservatifs au sein des communautés, structures offrant des conseils sur les infections sexuellement transmissibles ou le sida, messages diffusés via la radio…) Cette approche communautaire permet d’impliquer fortement les populations et les ONG locales. « Dans les communautés, les activités de sensibilisation sont menées par les pairs éducateurs, issus de ces communautés, ce qui a naturellement beaucoup plus d'impact » souligne la coordinatrice de MdM. « Les acteurs de santé, jusqu'à présent rarement impliqués, se sentent valorisés ». Les équipes de MdM travaillent également directement avec les populations bénéficiaires pour élaborer des microprojets de nutrition dont ils sont à la fois les acteurs et les bénéficiaires.

© Médecins du Monde - Décembre 2007

6


En Tanzanie, les équipes de MdM Espagne assurent la formation des équipes travaillant dans les hôpitaux et les centres de santé situés dans les zones rurales du district de Karatu. Depuis 2002, près de 465 personnels médicaux et 445 non-médicaux ont ainsi été formés à la prévention, à la transmission materno-infantile, aux traitements ARV et aux infections opportunistes. « Le programme permet également de sensibiliser et de former des pairs éducateurs issus des communautés mais aussi le personnel travaillant dans les bars ou les guest-houses de la région ». Au Mozambique, MdM Portugal propose dépistage et conseils sur l’ensemble des districts de Namaacha et de Shikanwe, dans la province de Maputo, ce qui couvre un bassin de population de plus de 40 000 personnes. Dans les 7 centres de santés ruraux aujourd’hui dotés de ces services, près de 3 830 personnes ont ainsi pu être dépistées en 2006. En lien étroit avec des associations locales, le programme met également l’accent sur la prévention communautaire, ciblée sur les femmes et les enfants, le suivi des traitements ARV et les soins à domicile. « Les activités de traitement développées au domicile des patients séropositifs permettent de garantir un accès aux traitements à des personnes qui en ont besoin mais qui n’y avaient pas accès. » Le programme prévoit également de renforcer les capacités des associations locales. « Notre programme s’intègre dans un mouvement de mobilisation de toute la communauté et s’accompagne donc de la formation du personnel médical dans les provinces et les villages » commente le coordinateur de MdM Portugal.

© MdM Portugal

© Médecins du Monde - Décembre 2007

7


Médecins du Monde Espagne intervient depuis 2000 dans les provinces de Maputo et de Cabo Delgado. Dans la province de Cabo Delgado, l’association soutient des programmes de soins de santé primaire et mène des activités de sensibilisation dans la capitale de Pemba et ses environs. Pendant 3 ans, l’association a soutenu les activités de conseil et de dépistage proposées à l’hôpital de Pemba (approvisionnement en médicament, soutien financier et matériel…) avant de lancer en 2005 deux cliniques mobiles dans deux districts ruraux. MdM soutient également les associations locales dans leurs activités de sensibilisation : distribution de préservatifs, sensibilisation des groupes les plus vulnérables (routiers, prostituées, prisonniers, militaires...), diffusion de pièces de théâtres, de brochures et de films éducatifs. Depuis 2005, MdM soutient également un programme de soins à domicile pour les malades du sida ou souffrant de maladies chroniques dans la ville de Pemba. Aujourd’hui, plus de 90 personnes vivant avec le VIH dans Pemba sont suives à domicile. Pour ce faire, MdM a fourni le matériel médical, les médicaments et formé plus de 20 personnes. « Les formations constituent une activité importante et régulière. Ils bénéficient d’une formation continue sur le terrain » explique le coordinateur terrain. Le personnel de l'hôpital de Pemba et des 15 centres de santé des zones bénéficient également de formation aux traitements ARV et à la prise en charge des infections opportunistes. « Enfin, nous avons élaboré des partenariats avec d'autres organismes intervenant auprès des enfants, des personnes vulnérables ou travaillant sur la problématique des droits de l'Homme » conclut le coordinateur de MdM Espagne.

Mozambique - © MdM

© Médecins du Monde - Décembre 2007

8


Turn static files into dynamic content formats.

Create a flipbook
Issuu converts static files into: digital portfolios, online yearbooks, online catalogs, digital photo albums and more. Sign up and create your flipbook.