ROSE ET NOIRE
& LA JUNGLE DES SONS Espace Musique Médiathèque Simone de Beauvoir Novembre 2006
LA JUNGLE DES SONS Parmi les artistes français ou vivant dans l’hexagone qui évoluent dans l’espace musical contemporain, nous avons choisi, autour de ROSE ET NOIRE, une dizaine de musiciens qui sortent des sentiers battus. Héritiers de grands compositeurs contemporains (Karlheinz Stockhausen, Steve Reich, John Cage…) et de multiples recherches musicales du 20 ème siècle (Brian Eno, Fred Frith, Laurie Anderson…), ils créent d’autres univers, se projettent dans d’autres dimensions… Entre chanson et rock, musique contemporaine et hip-hop, ambiance cinématographique et poésie électro-acoustique, ces jeunes compositeursinterprètes cherchent de nouveaux sons, de nouvelles expressions pour transmettre ce qu’ils ressentent au plus profond d’eux-mêmes. Ils ont en commun une très grande exigence artistique, un goût pour la performance, et une soif d’absolu. PS : tous les titres d’albums écrits en gras et en majuscules sont disponibles à l’espace musique de la Médiathèque Simone de Beauvoir
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ROSE ET NOIRE Duo electro pop Marie Möör a été longtemps dans l’ombre protectrice du saxophoniste Barney Wilen. Laurent Chambert évolue dans l’art contemporain. « Rose et noire » est le point de rencontre entre ces deux personnages, en 2001. J’ai toujours aimé la chanson et les expériences. Ma première collaboration était avec un saxophoniste, Barney Wilen et l’album « Aigre-douce ». Il était jazzman et pour lui aussi c’était une expérience : il était ouvert à tous les sons (…). Et puis j’ai écrit avec Christophe. J’aime la chanson… Elle est un art qui sous une forme légère peut toucher profondément. Marie Möör a en effet chanté plusieurs années pour Barney Wilen. Elle a enregistré également 2 singles dont Prends moi, prends moi qui fut interdit aux moins de 18 ans en 1988… Jean-Louis Murat produisit son 1 er album Svoboda en 1998-99, et elle écrivit 2 chansons pour Comme si la terre penchait de Christophe en 2001. Elle a illustré la pochette du CD de Barney Wilen « Sanctuary » en 1991. Elle arrêtera de peindre en 1996. L’artiste-peintre-poète Marie Möör pose désormais sa voix sur l’œuvre du plasticien et musicien Laurent Chambert. Né en 1967, il a fait des études de piano, puis a continué aux Beaux-Arts et dans les Arts plastiques. Depuis 1990, il expose, explorant depuis une dizaine d’années les espaces et horizons de la création multimédia. Je ressens vraiment une impression de liberté et d’harmonie avec Laurent. Marie Möör
Leur single QUELQUE CHOSE DE NOUVEAU (JE VEUX) paru juste avant leur premier album éponyme (2003), est une découverte étonnante : Laurent Chambert offre des canevas electro idéalement asymétriques pour faire vibrer la voix de sa partenaire. ROSE ET NOIRE confirme une plongée dans une électro pop où glisse la voix espiègle de Marie Möör. Les textes, entre bonheur et souffrance, s’inscrivent dans une veine baudelairienne réellement renouvelée par la sensualité magnétique de Marie. Leur 2éme album TRACÉ DANS LE BLEU est sorti en janvier 2006. Poésie surréaliste et nappes cold tourbillonnent à travers ces seize comptines psychédéliques. Un album unique, loin des modes et des consensus. Ce petit bijou électronique exerce attirance et fascination. Rose et Noire semble se jouer des styles et des modes, défrichant des terres encore inexplorées et se laissant glisser dans l’expérimental. Ils essaient de créer « quelque chose de nouveau » en associant une musique électronique minimale teintée de new wave à une recherche littéraire, sur des paroles très travaillées. « Rose et noire » en concert, c’est également un spectacle, avec ses jeux de lumières, ses gestuelles, ses projections d’images. Volupté, spleen et mystère. Sites : www.rose-et-noire.com www.myspace.com/roseetnoire www.sdnf.net/rose-et-noire/trace/01-trace.html
Discographie QUELQUE CHOSE DE NOUVEAU ( JE VEUX ) Premier single paru au label Discordian Records à Grenoble en 2003. « Seulement six morceaux sur ce mini-album, mais déjà la sensation d'une étrange fascination qui emporte toutes nos certitudes sur les frontières de la chanson électronique... Un florilège de peintures mentales explosives...Ce disque trop court mais réellement stimulant possède un grain de folie. » OCTOPUS 2003 (supplément de la revue Mouvement) La construction, tout en douceur, offre à chaque morceau des harmonies et des mélodies à foison. ROSE ET NOIRE Leur premier véritable album, paru la même année, confirme le talent exceptionnel de ce duo français. « Les compositions électro-pop de Laurent Chambert éclairent ou assombrissent le phrasé sensuel et poétique de Marie Möör... Quatorze titres aussi fragiles qu'immortels. » D-SIDE (décembre 2003) Marie Möör dépose, de sa voix délicate, ses textes au désespoir flamboyant : « Servis frappés et vibrants, métalliques (main de fer) et délicats (gants de velours), mi-Bardot mi-Vega, sous le signe général du déliquescent sanglé cinglant. » LIBERATION (29 mai 2003) TRACE DANS LE BLEU « Ce dernier opus paru en 2006 parle aux sens par tous les pores de la peau... Le duo trace des lignes alliant froideur synthétique, expérimentation technoïde et sexualité feutrée, une rencontre improbable et pourtant réussie entre la passion et la sensualité du cabaret, la mélancolie urbaine du trip hop et l'aspect désincarné de la machine. » GUTSOFTDARKNESS (avril 2006) « Peu de groupes arrivent, comme Rose et Noire, à lier avec autant de splendeur paroles littéraires en français et musique électronique. » ELEGY 40 (février 2006) Notre musique est une langue étrangère dont le sens serait familier à chacun. Une musique comprise avec le cœur. Une musique comme une invitation au voyage, un embarquement immédiat. Nous la voulons déroutante, puissante, enivrante, exaltée. Pour l'entendre, il faut « lâcher prise ». TRAX (février 2006)
ALEXEI AIGUI Installé en France depuis 1999, Alexei Aigui est né à Moscou en 1971. Il a commencé l'étude du violon à six ans ; cependant le compositeur a pris ses distances avec sa formation classique initiale et mené son archet vers des terra incognita en acculturant instruments acoustiques et électriques. Après différentes expériences de collaboration avec des groupes de rock alternatif et des formations de free jazz, il fonde en 1994 son propre ensemble l'Ensemble 4'33". Celui-ci est composé de Alexei Aigui (violon), Mikhail Bereznitskiy (violon), Andreï Gontcharov (trompette), Sergey Nikolskiy (basse), Mikhaïl Doubov (piano). Sa formation a sonorisé de nombreux films et travaillé avec des compagnies de danse ainsi qu'avec Pierre Bastien. Il est aussi l'auteur de la musique du film « Les Silencieuses » du réalisateur russe Valery Todorovsky pour laquelle il a reçu le prix national russe de la presse et de la critique cinématographique en 1998 du meilleur compositeur. En 2000, il a ouvert le 43ème festival de films documentaires et d'animation de Leipzig par un ciné-concert « Le Bonheur » d'Alexandre Medvedkine (1934) avec l'Ensemble 4'33 ".
Violoniste et compositeur, Alexei Aigui apporte un souffle nouveau à la musique contemporaine russe qu'il combine au jazz et au rock. Il se distingue par l'originalité de sa programmation et par son caractère inclassable.
Dans le même temps, ses projets se sont diversifiés et orientés sur la composition de musiques de films, et la sonsorisation de films muets tels que « Metropolis » de Fritz Lang ou « La Poupée » d'Ernst Lubitch. Alexei Aigui offre un univers sonore unique en son genre : une musique hybride aux confins de la musique minimaliste, du rock, du classique, du jazz d'avant-garde, et des musiques traditionnelles. En 2004 Alexei Aigui accueille la chanteuse Mina Agossi sur son disque MIX. Avec cet album, l'Ensemble 4'33 "déploie sa soif de fusion musicale en direction de la pop, du dub et de l'électro. Des notes de violoncelle, le rythme régulier d'une batterie sur lequel se greffent une trompette et un violon nostalgique . Sur cet album, les trompettes atmosphériques cohabitent avec la mélancolie du violon. Des effets de claviers font penser à des passages dub-électro du groupe Zenzile. La constante du disque est le perpétuel dynamisme de la batterie, mettant toujours en valeur les autres instruments
PIERRE BASTIEN Pierre Bastien, musicien, compositeur atypique et multi-instrumentiste, est né à Paris en 1953. Il est diplômé de littérature française du 18 ème siècle à l’université de la Sorbonne. Installé à Rotterdam depuis plusieurs années, il s’est signalé depuis plus d’une décennie par son approche très personnelle de la musique. En 1977, il construit ses premières machines musicales. Dans les années suivantes, il compose pour des compagnies de danse et joue avec Pascal Comelade. Entre temps il développe son orchestre mécanique qu’il a appelé « Mecanium », vaste parc de machines sonores composé de robots animés construits à base d’éléments de Meccano activés par de petits moteurs de tourne-disques et de morceaux d’instruments de tous horizons. Depuis 1987, il se concentre sur des installations sonores, des enregistrements, et des collaborations avec des artistes tels que le couturier Issey Miyake et le compositeur Robert Wyatt.
Il enregistre : MECANIUM en 1988, MUSIQUES MACHINALES en 1993, EGGS AIR STEEL en 1995 MUSIQUE CYRILLIQUE en 2002.
Dans les années 90, l’orchestre mécanique a développé jusqu’à 80 éléments. Il a participé aux festivals de musique et aux expositions d’art en Norvège, en Australie, au Japon, aux Etats-Unis… La nature mutante des musiques à regarder de Pierre Bastien semble l’entraîner de plus en plus souvent du côté des arts plastiques (il a signé plusieurs installations sonores) ou de la vidéo, laquelle tient une place prépondérante dans ses concerts actuels. Il s’est forgé une sensibilité panoramique en se frottant à une foule d’instruments du monde entier, il en possède pas moins de 150.
Créateur de merveilleux automates sonores, Pierre Bastien n’est pas seulement un bricoleur de génie : il est aussi l’inventeur d’un langage musical à nul autre pareil. Il propose une musique ne reposant sur aucun code, aucune connaissance préliminaire… une musique qui produit la liberté, en quelque sorte.
En 1999 il publie MUSIQUES PARALLOIDRES sur lequel il s’accompagne, en plus de ses instruments à base de Meccano, de samples joués par des tournedisques bricolés de telle sorte qu’ils répètent la même phrase. Prononcez à voix haute les titres des morceaux : odovinil, eloj du piqueupe, omajosafir, sinétic santic, le décalajdésson et fonotek édé… et savourez-les. Son goût pour les jeux de langage de tous ordres le rapproche ainsi de toute une parenté d’écrivains, qui n’a pas cessé de secouer les carcans littéraires (ses allusions aux inventions imaginaires et aux procédés d’écriture de Raymond Roussel, ou encore ses clins d’oeil musicaux à Raymond Queneau). Son album MECANOID sort en 2001 sous le label Rephlex dirigé par Aphex Twin. Au fond, Pierre Bastien et son Mecanium vérifient concrètement un postulat… aucune œuvre ne peut accéder à des formes supérieures de beauté et de liberté si elle n’est pas, d’une manière ou d’une autre, le fruit d’une invention permanente… Si cet homme écrit depuis 20 ans l’un des plus riches chapîtres de l’histoire des arts mécaniques, c’est précisément parce qu’il en a toujours outrepassé les limites… Richard Robert, LES INROCKUPTIBLES.
ANOUAR BRAHEM Anouar Brahem est un musicien, oudiste et compositeur né en 1957 à Tunis. A l'âge de 10 ans, il rejoint le Conservatoire national de musique de Tunis . A 15 ans, il commence à jouer dans des orchestres locaux. Rapidement le musicien élargit son univers en le confrontant aux modes musicaux venus d'Inde ou d'Iran et découvre le jazz. Dès ses premières compositions, il démontre que les possibilités du oud vont bien au delà du simple rôle d'accompagnement. En 1981, Anouar Brahem s'installe à Paris, où son talent s'épanouit au contact d'autres artistes. Il compose pour le chorégraphe Maurice Béjart, et en 1983, collabore avec Gabriel Yared pour la musique du film de Costa Gavras « Hanna K ». Pendant quatre années il se produit dans différents festivals en Europe. En 1985, il réunit à Carthage des musiciens turcs, tziganes, tunisiens et des jazzmen français pour interpréter sa pièce instrumentale « Liqua 85 » Il remet au goût du jour la forme originelle de l'orchestre traditionnel le « Takht » où chaque instrument devient tour à tour soliste en improvisant sur le thème de base. Il travaille sur d'anciens manuscrits et collabore avec le poète Ali Louati pour créer des chansons qui reprennent les formes anciennes. La suite chantée « Ennamoura el achiqua » lui apporte la consécration nationale. En 1987, il se voit confier la direction de l'Ensemble musical de la ville de Tunis. Il ouvre le festival de Carthage en 1988, puis en 1990, part en tournée aux Etats-Unis et au Canada. Peu après, il devient responsable du Centre des musiques arabes et méditerranéennes. Sa rencontre avec Manfred Eicher, le fondateur du label mythique ECM, va lui donner la possibilité de donner libre cours à son imaginaire musical. Il fait partie, avec le libanais Rabih Abou-Khalil du courant de musique contemporaine qui réunit la musique arabe et occidentale. Anouar Brahem est un magicien, il crée une musique totalement ancrée dans une culture ancestrale très sophistiquée et éminemment contemporaine dans son ambition universaliste. Il a joué et enregistré avec des grands musiciens de jazz tels que Jan Garbarek, Jean-Louis Matinier, John Surman ou Richard Galliano.
En 1994, il enregistre avec le saxophoniste norvégien Jan Garbarek et le joueur de tablas Ustad Shaukat Hussain : « Madar ». La même année, il compose la musique du film tunisien LES SILENCES DU PALAIS. L'album KHOMSA sorti en 1995 est pour le tunisien l'occasion de reprendre librement des thèmes qu'il a composés pour des films avec un sextet qui comprend notamment l'accordéoniste Richard Galliano. Le disque THIMAR en 1997 est le témoin d'une nouvelle rencontre qui transcende les genres aves le bassiste Dave Holland et le saxophonisteclarinettiste John Surman. L'année 2000 marque la sortie de son album ASTRAKAN CAFE enregistré avec ses amis, le percussionniste Lassad Hosni et le clarinettiste Barbaros Erköse. En 2002, il revient avec un disque surprenant, atypique LE PAS DU CHAT NOIR.. Son plus beau peut-être, assurément le plus ambitieux. En trio encore, en compagnie du pianiste François Couturier et de l'accordéoniste Jean-louis Matinier. Anouar Brahem nous livre ici une musique apaisée et d'un raffinement extrême. En 2006, toujours avec ces deux musiciens, il sort son nouvel album : LE VOYAGE DE SAHAR Artiste résolument moderne, il puise dans chaque rencontre les moyens de se renouveler tout en conservant son identité propre. Interrogé sur son inspiration, Anouar Brahem évoque l'image de « l'arbre qui, tout en s'élevant du sol et en élargissant son espace, continue à développer et à approfondir ses racines ».
BUMCELLO Le groupe atypique Bumcello est né de la rencontre du percussionniste Cyril Atef et du violoncelliste Vincent Segal. Cyril Atef est né à Berlin en 1968 et Vincent Segal a vu le jour à Reims en 1967. Ils mélangent les rythmes musicaux (pop, rock, rap, musiques du monde) à l'électro, donnant une touche personnelle aux sons. Leur parcours les a amenés à travailler pour des artistes de renom tels que Cheb Mami, Elvis Costello, Cesaria Evora, M, ou Jacques Higelin. Le premier album éponyme du duo arrive dans les bacs en 2000. Suivent les disques BOODY TIME, NUDE FOR LOVE, GET ME et ANIMAL SOPHISTIQUE Après une tournée en Amérique du Sud, ils se sont produit en 2006 à l'Elysée Montmartre, au Printemps de Bourges, au Festival Paroles et Musiques... Ils jouent aussi en acoustique, sans sonorisation supplémentaire que celle de leur ampli et d'un micro. Tous deux sévissent également en solo. Ségal a participé à "Cruel Smith" d'Elvis Costello, tandis qu'Atef a collaboré avec Vincent Courtois au disque de Yves Robert "In touch" ainsi qu'à l'album de Gotan Project "Lunatico".
C-D NUDE FOR LOVE 2002 Quelques note égrenées nous propulsent en plein cœur de l'Empire Otoman. Mais au son de cythares se mêlent bien vite des rythmiques anachroniques et synthétiques. L'accent est donné : à chaque morceau Bumcello s’entend à entremêler habilement des sonorités des quatre coins du monde. Ces pirates des sons nous invitent à un voyages aux innombrables surprises auditives. Cyril Atef (à la batterie mais aussi au chant) et Vincent Segal au violoncelle électrique fournissent la ligne directrice de l'album, sur laquelle se greffe la participation d'invités enrichissant cette première fibre déjà foisonnante. 18 morceaux, pour la grande majorité instrumentaux, atmosphériques, entre dub, pop, afro-beat, ethnique, chansons aux paroles absurdes et lyriques émergeant d'un univers décalé, léger et délicat, intense et profond. C-D ANIMAL SOPHISTIQUE 2005 Ce cinquième album est une réflexion sur la multiplicité de l'homme moderne, ses influences, ses besoins, ses langues, ses sources d'inspiration. Album métissé et maîtrisé pour le discret et enthousiasmant duo français : retour avec cette agréable sensation de venir picorer à la table d'une auberge espagnole dressée avec soin mais sans aucun respect pour les convenances musicales. On retrouve dans cet album, composé en grande partie sur la route de la tournée avec M, la gaîté et le mélange des plats servis par le précédent opus « Nude for Love » en 2002. La voix de Atef s'affirme comme celle d'un vrai chanteur, d'un vrai leader de groupe rock. Le son se peaufine : le groupe parvient à faire transparaître plus encore qu'avant la chaleur des instruments réels joués ou loopés. Rock direct, abrupt, façon Pixies, fricotage avec le free jazz, sonorités empruntées à la world music.
RODOLPHE BURGER Rencontre avec un esthète du rock, voix de velours et guitare, qui fait la part belle à une créativité sans faille. Chanteur et guitariste originaire de Strasbourg, Rodolphe Burger est surtout connu comme rocker au sein de Kat Onoma le groupe qu’il a créé en 1987. Tout commence à Sainte-Marie-aux-Mines, petite ville du textile au cœur des Vosges, où Rodolphe Burger monte son premier groupe juste après mai 68 dans la lignée du Velvet Underground de Lou Reed, tout en s’occupant d’un journal lycéen virulent et politisé. Ami de Jacques Derrida il enseigne la philosophie de 1980 à 1987. Entre temps, il monte un collectif bicéphale avec des musiciens de Strasbourg : d’un côté la Dernière Bande, orienté rock ; de l’autre Œuvre Complète, plus expérimental, orienté jazz radical. Un premier maxi sort en 86 sous le nom de Kat Onoma (ce qui signifie : Comme son nom l’indique ). Leader emblématique, il publie six albums avec ce groupe. Burger emprunte des textes à Shakespeare et Samuel Beckett. Et en 1993, l’excellent album intimiste CHEVAL-MOUVEMENT met en valeur la voix et la guitare du chanteur qui parvient à évoquer un Serge Gainsbourg… revu par Jean-Luc Godard.
Il enregistre METEOR SHOW en 1998, deuxième aventure en solo. Objet rare et précieux, plus expérimental que conceptuel, ce disque s’écoute en boucle. J’ai acquis le principe de restriction minimaliste pour suggérer des possibilités mélodiques plutôt que d’en imposer. Dans cet album aux sonorités étranges, hypnothiques, la voix de Burger, sublime, plane sans l’ombre d’un doute. Il publie WELCHE : on n’est pas Indiens, c’est dommage en 1999. Cet album est le fruit d’une performance inédite de Rodolphe Burger avec Olivier Cadiot, autour du patois des Vosges, le Welche. Voix, guitare, samples, basse, programmations s’unissent dans un morceau tendre et radical. Les morceaux de dialogues, les bruitages et la musique de Burger dégagent une ambiance forte et ambiguë, presque free-jazz. En 2002 il compose la musique du CANTIQUE DES CANTIQUES, texte biblique traduit par Olivier Cadiot pour la cérémonie de mariage de Alain Bashung avec Chloé Mons. Son album HOTEL ROBINSON sort la même année.
SYLVAIN CHAUVEAU Musicien prolifique et autodidacte, ce pianiste toulousain a publié trois albums solo en quatre ans, et participe aux projets de ses amis du groupe Micro. Je suis un pur autodidacte. La seule chose qui me guide est la passion, l’envie irrépressible de faire des morceaux qui seraient les plus beaux possibles. Sa musique expérimentale évoque les musiques minimalistes contemporaines (Arvo Pärt, Henryk Gorecki, Philip Glass) et le post-rock (Godspeed you black emperor, Sigur Ros). On pourrait le considérer comme un héritier du Brian Eno des années 70. Eno a eu une influence décisive, notamment parce qu’il a dépassé le complexe de l’amateur et qu’il a osé se raccorder à des musiques qui étaient censées requérir un solide bagage technique. Ses compositions précieuses, ses ambiances cinématographiques, son lyrisme se retrouvent dans ses trois disques. Avec Pascal Comelade, qui a été l’un des premiers à jouer une musique instrumentale sans étiquettes, Brian Eno a incontestablement déblayé le terrain sur lequel je travaille aujourd’hui. D’une manière plus générale, il y a aujourd’hui un retour à l’instrumental qui, sans ces précurseurs-là, n’aurait jamais eu lieu.
Sorti en 2000 chez Noise Museum dans un indifférence quasi totale, LE LIVRE NOIR DU CAPITALISME est réédité un an plus tard sous le label « Les Disques du Soleil et de l’Acier ». Un album somptueux et bouleversant. NOCTURNE IMPALPABLE publié en 2002, est une œuvre suspendue et sombre, qui témoigne d’une grande vigueur d’écriture et de choix esthétiques. UN AUTRE DECEMBRE paraît en 2004. En douze morceaux courts, ces fragments instrumentaux mélancoliques et sombres, sorte d’interludes minimaux et épurés, font l’apogée du silence. Comparé surtout à Erik Satie, Chauveau ajoute des touches infimes d’électronique, parfois imperceptibles, mais qui font la singularité et la magie des compositions. Cette même année, il nous revient avec la bande originale d’un film DES PLUMES DANS LA TETE signé par le réalisateur Thomas de Thier. Il est entouré par quelques musiciens (un pianiste, un clarinettiste, un violoniste et un violoncelliste). On replonge avec délice dans l’atmosphère de Nocturne impalpable.
PROGRAMME Programme naquit à Toulouse en 1998 de la rencontre d’Arnaud Michniak (ex Diabologum) et de Damien Bétous. Le fruit de leurs obsessions donnera en 2000 un premier album incandescent à l’atmosphère fin de millénaire MON CERVEAU DANS MA BOUCHE. L’ENFER TIEDE (2002) en est la ténébrante suite. Tous deux paraissent au label nantais Lithium, maison mère de Dominique A. Quand nous nous sommes rencontrés, nous avions l’envie d’utiliser nos savoir-faire respectifs… l’important était de se servir de nos acquis pour exprimer de la manière la plus directe ce que nous avions au fond de nous. Avoir une attitude singulière a été le début de Programme. Les gens qui m’inspirent le plus demeurent ceux qui arrivent à avoir un imaginaire propre, un avis très personnel sur ce qui les entoure… et qui sont capables de tout réinventer quand ils sont confrontés à quelque chose. Damien Bétous Nous avons un côté cinématographique indirect, on entre dans l’album comme dans un film parce qu’il y a un univers particulier, une vision et une cohérence. Arnaud Michniak Avec son premier album Mon cerveau dans ma bouche, Programme travaille à l’éruption violente d’un imaginaire sans frime. L’album provoque un sentiment de fascination (musique) mêlé d’interrogation (textes). Le propos est radical, terroriste même, du genre « tous les disques sont de la merde » extrait de « Demain ». La musique d’une manière générale impressionne, parfois dense et abyssale, bien pourvue en samples, programmations et guitares saturées. Arnaud Michniak et Damien Bétous donnent à leur premier album et ses textes glaciaux une force terrifiante.
On pénètre dans L’Enfer tiède par un boyau souterrain : « Il y a », un colimaçon sonore qui n’en finit pas de tirer sa spirale vers le bas. D’abord cette nappe lourde, comme le bruit d’un bombardier en chute libre, puis une voix qui sept fois de suite clame : « On a raison de faire ce qu’on fait, de penser ce qu’on pense, d’être ce qu’on est, de continuer dans le même sens ». Les tracks articulés autour de boucles répétitives et de bruitages apocalyptiques se succèdent pour former une longue descente aux enfers. Arnaud Michniak adopte un ton direct et prophétique, clair mais toujours poétique. Son récit d’une vie contemporaine sans repères, perdue dans un paysage urbain en ruines, frappe par son fatalisme et son refus de toute complaisance. Les textes oscillent entre anecdotes imagées et slogans subversifs. Terriblement violent, un disque majeur d’une musique électronique « à textes ». Si Programme surprend musicalement (impressionnant travail électro-acoustique de Damien Bétous), les textes sont aussi les meilleurs que Michniak ait jamais écrit. 36 minutes de musique, sans concession aucune. En avril 2004 est né un mini-album concept BOGUE réalisé dans le cadre d’une commande de France Culture.
CAMEL ZEKRI Auteur compositeur, multi-instrumentiste, Camel Zekri est né en 1962 à Paris. Ses parents quittent l'Algérie en 1955 pour la France. Cinquième d'une famille de huit enfants, il hérite de deux langues : l'arabe et le français. Cette dualité devient une vibration permanente qui balance de l'oralité à l'écriture, de l'autodidacte à l'étudiant, de l'improvisation à la composition. J'ai commençé la musique très tôt, et sans le savoir car appartenant à une famille de musiciens traditionnels du sud algérien, je pensais que la musique était un élément naturel pour tout le monde... De la musique traditionnelle à la musique virtuelle, les expériences musicales se succèdent : performances, concerts virtuels... J'étais surtout attiré par les musiques expérimentales, le free jazz, la musique contemporaine et les musiques extra-européennes. Camel Zekri joue de l'oud et de la guitare, et utilise l'ordinateur dans toutes les musiques qu'il aborde avec Rachid Belgacem, Daunik Lazro, Michel Doneda, Denis Colin , Atau Tanaka, Bachir Temtaoui... Dès 89 je me suis intéressé à l'utilisation des ordinateurs dans la musique. Mais c'est en 95 que j'ai pu pratiquer en live un jeu instrumental qui lie la guitare acoustique à l'ordinateur. Son parcours s'enrichit chaque fois de nouveaux métissages culturels et sociaux. Outre la musique des Caraïbes, l'improvisation, l'étude et l'enseignement (premier prix de guitare au conservatoire de Paris, maîtrise en ethnomusicologie), il se passionne aussi pour les musiques du sud, de l'Afrique et du Maghreb. Esprit curieux de tout, il a suivi l'enseignement de Hamma Moussa, maître du Diwan de Biskra. Pour ce qui est de ma formation avec Hamma Moussa, elle s'inscrit dans une formation traditionnelle africaine où l'enseignement est autant spirituel que pratique. Je l'ai commençé dès mon enfance et je m'en sers toujours.
En 1992 il crée le Festival de l'eau. A la vue du fleuve Niger, l'idée a germé en moi de réunir des artistes et de descendre avec eux le fleuve sur des embarcations locales afin de faire des rencontres artistiques... Je me suis inspiré de l'eau pour tirer les éléments fondamentaux du concept du festival (l'eau réunit les humains, elle est élément de création...) et je me suis aussi inspiré du Diwan (cérémonie Gnawa d'Algérie) qui réunit musique, danse, chant. En 2001, il participe avec Majid Bekkas et Rachid Belgacem au disque de la chanteuse Hasna El Becharia DJAZAIR JOHARA. L'année suivante, Camel Zekri signe VENUS HOTTENTOTE au label La Nuit transfigurée. Cet album guitare solo est une splendeur musicale et poétique. Camel Zekri s'expose ici en solo avec ce carnet de croquis, où la mémoire de l'enfance, la nostalgie d'un futur toujours à inventer, la quête d'une liberté à agrandir chaque jour prennent chair dans des improvisations qui sont autant d'exercices poétiques. LE NOUVEL OBSERVATEUR
En 2003, au festival de Grenoble « Les 38ème Rugissants », on a pu l'écouter lors de deux concerts : − aux côtés du performer Atau Tanaka et sa « bioMuse » qui transforme son corps en instrument de musique et Zack Zettel au saxophone et dispositif informatique. − en compagnie du Diwan de Biskra et des chanteuses Hasna El Becharia et Malouma. En 2005, toujours sur le label La Nuit transfigurée, il sort un nouvel album LE CERCLE. Le Cercle est tout simplement une aventure musicale du XXI ème siècle. Sous la houlette de Camel Zekri, le Diwan de Biskra (groupe de musiciens gnawas du sud de l'Algérie) s'est aventuré en Europe à la rencontre de quelques instrumentistes issus de traditions musicales improvisées. Les musiciens sont disposés en un vaste cercle dont le centre est occupé par la console son. Assis ou allongé sur des tapis au cœur du cercle, l'auditeur est littéralement saisi de tous côtés de sons et de rythmes. Cette performance a donné lieu à un enregistrement.
SOURCES BIBLIOGRAPHIQUES Sites www.aigui.com www.pierrebastien.com www.djoriental.com/musique-orientale/18/anouar-brahem.html www.divergence-fm.org/article.php3?id_article=537 www.humanite.presse.fr/popup_print.php3?id-article=290521 www.sylvainchauveau.net www.m-la-music.net/article.php3?id_article=239 www.oozebap.org/text/camelzekri_fran.htm
CONCLUSION Sculptant le son originel et sublimant les mots, tous ces musiciens partagent le même goût pour les tonalités sombres. Sensibles aux arts contemporains, ils utilisent les nouveaux matériaux sonores… et nous surprennent, nous séduisent. Ils créent une ambiance, une atmosphère, où la voix est en symbiose avec la partie instrumentale. Ils utilisent la langue française pour mieux faire passer leurs messages. Le texte peut
prendre position face à la société, alors il accuse, il dénonce ; montrer ses déchirures intérieures, alors il crie, il enrage ; ou jouer avec les mots, alors il est drôle, il est tendre.
Diamants noirs ou étoiles scintillantes, ils éclairent « la nuit qui éclaire le jour» et parviennent à faire de la dissonance une harmonie… et vice versa. Nous vous invitons à écouter ces musiciens hors normes, venus d’horizons divers qui ont su créer, chacun, un univers très personnel ; auxquels nous pouvons ajouter : Rachel’s, Polmo Polpo, Pierre-Yves Macé…