Finances publiques

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La nouvelle gouvernance financière publique Bibliographie M. Bouvier, M.C. Esclassan, J.P Lassale ; Manuel de finances publiques ; LGDJ ; 9ème édition ; 2008. M. Bouvier ; Les finances publiques ; LGDJ ; 13ème édition ; 2008. M. Bouvier ; Introduction au droit fiscal général et à la théorie de l’impôt ; LGDJ ; 9ème édition ; 2008. Les politiques se sont intéressés plus fortement aux finances publiques, ce qui explique que l’on parle de « gouvernance financière publique ». Il s'agit de l’étude des finances de l’Etat dont nous sommes les financiers à travers nos impôts et diverses taxes. Le système qui est le notre depuis la crise des années 1970 (chômage, moins d’argent, moins d’impôts, moins d’achats, etc.) a entrainé une hausse des dépenses publiques, qui ont augmenté tandis que les recettes décroissaient. Recettes et dépenses se sont croisées (effet de ciseau), et un déficit important a pu dès lors se développer. La solution a semblé être l’emprunt, qui lui aussi a augmenté de façon exponentielle. Ainsi, la dette publique de la France est aujourd’hui évaluée à hauteur de 1.200.000.000 euros, tandis que le PIB de la France est de seulement 1.900.000.000 euros. Introduction Le terme de finances publiques désigne les finances de l’Etat, les finances des collectivités locales (communes, départements, régions, etc.), ainsi que les finances des organismes de sécurité sociale. E.G : Lorsque l’on parle de dette publique, on ne parle pas seulement de la dette de l’Etat. La dette publique est la dette cumulée de l’Etat, des collectivités locales et des organismes de sécurité sociale (plus de 1.200.000.000 d’euros donc).

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Les finances publiques sont également les recettes et les dépenses de ces trois groupements. On peut aussi employer le vocable de « denier public ». Les recettes publiques sont essentiellement les prélèvements obligatoires (impôts : T.V.A ; cotisations sociales – prélèvements effectués sur les salaires pour le compte des organismes de sécurité sociale). L’utilisation de l’argent public est représentée par ce que l’on appelle les dépenses publiques. Il s'agit par exemple des dépenses de l’Etat (universités, etc.), des collectivités locales (financement d’une piscine municipale, etc.), et les dépenses des organismes de sécurité sociale (remboursements des médicaments prescrits par le médecin, etc.). Les finances publiques sont des finances à part, c’est pourquoi elles nécessitent un contrôle important afin de veiller à leur bonne utilisation. L’argent public ne doit pas être gaspillé, il convient aussi d’éviter les malversations. Il existe pour cela d’une part des administrations, mais également des juridictions chargées de contrôler la régularité des opérations effectuées par le secteur public. E.G. : L’Inspection générale des finances, la Cour des comptes, etc. La décision politique appartient aux représentants des citoyens. Le budget de l’Etat doit ainsi être adopté par le Parlement ; de même, le budget d’une collectivité territoriale doit être adopté par le conseil de cette communauté (conseil général pour le département, etc.) La réforme des finances publiques s’est amorcée depuis la seconde moitié des années 1970. Elle a été déclenchée par la crise économique qui a provoquée une crise des finances publiques. Les dépenses publiques ont augmenté mais les recettes publiques n’ont pas suivi le mouvement. C’est un phénomène international. La réforme des finances publiques a commencé par les pays développés, elle se poursuit aujourd’hui du côté des pays en développement ou émergents. Cette réforme consiste essentiellement à adapter les méthodes de gestion utilisées par les entreprises privées à la gestion du

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secteur public. Notons tout de même que cette réforme est mondiale, protéiforme. L’enseignement des finances publiques, ou la manière de les appréhender, s’est faite en plusieurs étapes. - La première étape est la législation financière. Au XIXème et au début du XXème siècle, les finances publiques étaient uniquement considérées sous leur aspect juridique. C’est une conception qui va prédominer jusqu’aux années 1950. - La deuxième étape est l’économie financière publique. Elle est apparue à partir des années 1950 lorsque l’Etat a été obligé d’intervenir de façon massive dans la vie économique. - La troisième étape est la gestion financière publique. Le souci de mieux gérer le secteur public est apparu au début des années 1980. La crise financière de l’Etat a conduit à rechercher de nouvelles manières de gérer le secteur public. On a alors commencé à adapter les méthodes de gestion de l’entreprise à la gestion publique. Derrière la réforme des finances publiques, c’est une réforme de l’Etat dans son ensemble à laquelle nous sommes en train d’assister. Depuis 1996, des révisions importantes de la Constitution sont intervenues en matière de finances publiques. Première partie : Les finances publiques et le pouvoir politique Les finances publiques sont à l’origine du pouvoir politique. On s’appuie aujourd’hui sur la réforme des finances publiques pour réformer l’Etat. Cela n’a rien d’étonnant car l’Etat tire ses origines de la création d’un dispositif financier public. Première sous partie : Les finances transformations du pouvoir politique

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Sans le pouvoir de lever des impôts, mais aussi sans le pouvoir d’utiliser librement cette ressource, il ne peut pas exister de pouvoir politique. Sans le pouvoir financier, aucun pouvoir politique ne peut exister. Aujourd’hui le pouvoir financier tire sa légitimité de l’existence d’un droit qui en organise le fonctionnement : le droit public financier.

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Il comprend trois branches : le droit fiscal (droit des impôts), le droit budgétaire (c'est-à-dire le droit qui pose les règles concernant par exemple la présentation des budgets publics, ou encore la prise de décision) et le droit de la comptabilité publique. C’est très largement à travers la construction du droit public financier que le parlementarisme démocratique s’est construit. Chapitre 1 : Finances publiques et naissance du pouvoir politique Le pouvoir politique a pris naissance en s’enracinant dans le pouvoir financier et en premier lieu à partir du pouvoir fiscal. Section 1 : La naissance du pouvoir politique et de l’impôt L’impôt est à la source du système financier public et de la construction de l’Etat. Par la suite, c’est de l’impôt que dépend la puissance du pouvoir politique. I – Une forme désordonnée de prélèvement et de pouvoir : le pillage Le pillage est une forme lointaine, primitive, de l’impôt. Ce qui le caractérise en effet est qu’il s'agit d’un prélèvement obligatoire irrégulier dans le temps. Or, ce qui caractérise l’impôt est sa régularité. Le pillage est soumis au hasard, aux besoins d’un groupe de pillards. Il consiste le plus souvent à prélever la totalité des biens qui sont possédés ou qui sont produits par les victimes. Le pillage est un prélèvement obligatoire (une des caractéristiques de l’impôt) qui ne laisse pas le temps aux victimes de reconstituer leur patrimoine par la suite. Cela est stupide car il est alors impossible aux victimes de créer de nouvelles richesses. Il n’est plus possible dans ce cas de reconstituer des richesses économiques, et les pillards, en s’accaparant la totalité des biens de leurs victimes, ne leur laissent plus aucune possibilité de produire de nouveaux biens ni même de survivre dans certains cas. Autrement dit, ils les condamnent à disparaître et perdent en même temps leur source de revenus. Les pillards n’ont aucune conception de la maitrise de leurs ressources sur la durée. Ils vivent dans l’instant, ne se projettent pas dans l’avenir. Autrement dit, ils n’ont aucune stratégie.

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II – Le tribut Le tribut est l’ancêtre de l’impôt. C’est aussi avec lui que les pillards les plus avisés ont commencé à bâtir un pouvoir politique. Les pillards ont compris qu’il fallait : - Laisser à la disposition des peuples conquis une partie de leur production, de leur laisser leurs moyens de production (outils qui leur servent à cultiver la terre, etc.) Par conséquent, ils ont compris qu’il fallait que leurs victimes soient en mesure de continuer à cultiver leurs terres, à produire de nouvelles richesses dont une partie pourra être ultérieurement prélevée. - Effectuer des prélèvements réguliers, à date fixe après les récoltes. Ils ont donc compris qu’il était plus judicieux de laisser les individus libres de travailler, de leur laisser de quoi entretenir leur force de travail (c'est-à-dire se nourrir, se vêtir et se loger). Dès lors, on assiste déjà à la naissance d’une conception gestionnaire et stratégique. Cette conception traduit une capacité de se projeter dans l’avenir, mais également la capacité d’organiser un territoire, un espace territorial. Le tribut possède déjà les principales caractéristiques de l’impôt. Il est ainsi obligatoire et peut être effectué par la force. C’est un prélèvement qui intervient à date fixe. Il laisse aux individus de quoi survivre et de quoi produire de nouveaux surplus qui pourront être prélevés. Enfin, il s'agit d’un prélèvement effectué sur la différence entre ce qui est produit et ce qui est consommé pour continuer à produire, car prélever plus conduirait à l’extinction de la source du prélèvement. Section 2 : La naissance de l’Etat et de l’impôt Les Etats ont pu se constituer à partir du moment où l’on a inventé des formes de prélèvement obligatoire structurées, c'est-à-dire à partir du moment où l’on a mis en place une organisation du pouvoir fiscal. I – L’organisation du pouvoir fiscal et l’administration de l’impôt

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L’Etat est apparu lorsqu’a été mis en place un système de financement stable et permettant par ailleurs de rémunérer une armée et une administration, tout d’abord fiscale. Autrement dit, l’organisation du pouvoir financier constitue un préalable à l’organisation d’un pouvoir politique. Le passage du tribut à l’impôt se caractérise par le fait que l’on crée une organisation de plus en plus performante pour effectuer les prélèvements fiscaux. En effet, le prélèvement de l’impôt nécessitait non seulement la force, c'est-à-dire une armée, mais également de connaître le mieux possible ce que l’on pouvait prélever. Par conséquent il est indispensable de connaître précisément ce que l’on appelle la matière imposable, c'est-àdire ce que l’on va taxer, ce que l’on appelle aussi la base d’imposition. Il a ensuite fallu connaître le montant maximum pouvant être prélevé sans risquer de produire des effets négatifs sur le renouvellement des richesses et sans risquer de provoquer des révoltes fiscales. Il a donc fallu déterminer ce que l’on appelle : - Des procédures d’assiette de l’impôt (asseoir l’impôt), c'est-àdire des procédures permettant de calculer les bases d’imposition du contribuable. - Des procédures de liquidation de l’impôt, c'est-à-dire des procédures permettant de calculer ce qui est dû par le contribuable. Cela correspond le plus souvent à l’application d’un taux (d’imposition) à une base. - Des procédures de recouvrement de l’impôt, c'est-à-dire la manière la plus efficace et la plus commode pour le contribuable pour lui faire payer sa dette fiscale. La connaissance de la matière imposable est indispensable : il faut savoir non seulement ce que l’on va imposer, mais aussi qui l’on va imposer. E.G : Sous l’Antiquité, les Egyptiens ont institué des dispositifs sophistiqués qui leur permettaient de connaître avec précision non seulement la matière imposable, mais également la capacité contributive des contribuables (jusqu’où ils peuvent payer sans leur prendre le nécessaire à la survie et à la production). Ils ont institué pour cela d’une part des procédures de recensement de la

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population, des familles, et d’autre part ce que l’on appelle un cadastre c'est-à-dire un plan des terrains qui indique leur superficie, leur type de culture, leur rendement, et également leur propriétaires ou celui qui en cultive la terre. Un corps de fonctionnaires spécialisés est alors créé pour réaliser ces tâches. Ces fonctionnaires vont devoir déterminer la matière imposable, liquider l’impôt et recouvrer l’impôt (le percevoir). Sur cette base une structure étatique va pouvoir se mettre en place, et l’on va pouvoir financer l’armée, l’administration fiscale et également une administration générale. II – La création des premiers Etats A – La naissance des Etats autoritaires Au départ, l’Etat se présente comme une forme politique supérieure aux différents groupes qui composent la société. Cet Etat se donne pour objectif d’unifier sous son autorité les différentes communautés qu’il a soumises. Il se présente alors comme la communauté supérieure qui est légitime pour prélever un tribut. La force ne peut demeurer longtemps la solution pour forcer l’impôt, il faut que cela devienne légitime, que la population consente à l’impôt. L’Etat va se présenter comme un pouvoir qui réalise l’intérêt général. Cet Etat va dire aux populations : - Qu’il est leur protecteur et leur assure sa sécurité grâce à l’armée, - Qu’il est le moteur du développement économique ; par exemple en organisant l’irrigation des terres, - Qu’il organise des fêtes religieuses et organise donc les rapports des individus avec leurs dieux. Finalement, le pouvoir politique fournit des services aux communautés et aux individus qu’il domine. Cela marque les premiers pas vers le consentement à l’impôt. B – La création des Etats parlementaires Sous l’Antiquité, des systèmes fiscaux organisés ont été institués. C'est-à-dire non seulement des impôts, mais également une administration fiscale. Par la suite, avec le Moyen-âge, ces systèmes fiscaux vont soit disparaître, soit éclater. Il ne restera

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que quelques impôts qui continueront à être prélevés par des seigneurs féodaux. Par ailleurs, il n’existe pas au Moyen-âge de différence entre le patrimoine public et le patrimoine privé (cf. Cours d’histoire du droit). On ne fait pas de différence entre les finances publiques et les finances privées. Il y a confusion du patrimoine du souverain avec celui du royaume. Les guerres vont aller en se multipliant et les moyens utilisés pour faire la guerre vont coûter de plus en plus chers. Ainsi, un cheval équipé d’une armure et d’un caparaçon coûtait aussi cher, comparativement, qu’un tank perfectionné aujourd’hui ! Les souverains ont été obligés de demander une aide matérielle à leurs vassaux, ce sont les aides féodales. Ces vassaux n’ont pas accepté d’emblée de contribuer aux dépenses de guerre de leurs souverains et c’est ainsi que chaque fois que le souverain demande une aide, il est obligé de négocier cette aide avec ses vassaux. Cette négociation va progressivement prendre une forme habituelle et va même s’institutionnaliser sous la forme d’assemblées. C’est dans ce cadre là que vont se décider les aides féodales que l’on qualifiera d’aides extraordinaires. Progressivement, ces assemblées abandonnent leur caractère ponctuel pour devenir régulière. Dans un premier temps, ces assemblées n’étaient qu’épisodiques. Par la suite, la démultiplication des conflits aidant, les assemblées vont elles aussi être amenées à se démultiplier et vont devenir régulières dans le temps et devenir de véritables institutions parlementaires. On les appelle les cortes en Espagne, le Parlement en Angleterre, les Etats Généraux en France. Par ce biais va naître la première forme organisée du consentement de l’impôt. Il faut souligner que dans ce cadre, le souverain n’est plus le seul à détenir le pouvoir fiscal. Il partage ce pouvoir avec les membres de l’assemblée. L’impôt devient alors un enjeu majeur ; et c’est sur la base de son consentement que va se construire le régime parlementaire. Chapitre 2 : Droit public financier et naissance de la démocratie politique

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Section 1 : La Révolution de 1789 et la naissance du droit public financier I – La révolution fiscale et la naissance du droit fiscal La particularité de la Révolution française a été, d’une part, d’inventer des impôts, et, du reste, d’inventer des principes fiscaux, des règles fondamentales en matière fiscale. Parmi ces principes, l’un des plus importants est celui du consentement de l’impôt. C’est sur la base des principes fiscaux inventés à la Révolution que va pouvoir se construire un droit fiscal comportant progressivement des garanties pour le contribuable. En d’autres termes, c’est une sortie de l’arbitraire fiscal qui se met en place à travers cette sécurité juridique. D’autre part, la lutte qui se joue autour du pouvoir budgétaire et fiscal entre le pouvoir législatif et le pouvoir exécutif, c'est-à-dire entre les constituants et le roi, se situe au cœur des enjeux politiques. L’issue de ce combat va être déterminante pour la création d’un régime parlementaire démocratique. A – Les principes fiscaux fondateurs d’un pouvoir fiscal légitime A la légitimité sociologique de l’impôt qui demeure, va venir s’ajouter une légitimité juridique de l’impôt. En effet, la légitimité fiscale va être formalisée juridiquement par trois principes qui vont figurer dans la Déclaration des droits de l'Homme et du citoyen du 26 août 1789 aux articles 13 et 14. Il s'agit du principe du consentement de l’impôt. Soulignons ici que les révolutionnaires, avant de s’intéresser aux dépenses publiques, se sont exclusivement intéressés à la fiscalité, aux impôts. Leur attention a été complètement focalisée sur le droit de lever l’impôt, sur la légitimité fiscale. Ils ont négligé le pouvoir d’utiliser les ressources fiscales, c'est-à-dire le pouvoir de dépenser. Ils se sont attribués le pouvoir de décider de l’impôt et ont abandonné au roi celui d’utiliser le produit de l’impôt. On peut ajouter qu’après s’être déclaré Assemblée Nationale, le Tiers-Etat a décidé que tous les impôts existants étaient illégaux et qu’aucun impôt ne pourrait être levé sans un consentement préalable de l’assemblée (décret du 13 juin 1789). Cette décision, qui a pour objectif de limiter le pouvoir royal en limitant son

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pouvoir financier, a fait l’objet d’une inscription dans la Déclaration des droits de l'Homme et du citoyen du 26 août 1789 à l’article 14 : « Tous les citoyens ont le droit de constater par eux-mêmes la nécessité de la contribution publique, de la consentir librement, d’en suivre l’emploi et d’en déterminer la quotité (i.e. : taux d’imposition), l’assiette, le recouvrement et la durée ». Ce principe est qualifié de principe de consentement de l’impôt ou encore de principe de légalité fiscale (cf. Conseil Constitutionnel). Ce principe est toujours en vigueur. C’est aujourd’hui un principe à portée constitutionnelle. A partir du dégagement de ce principe par la Déclaration des droits de l'Homme et du citoyen du 26 août 1789, la légitimité de l’impôt prend une forme juridique solide. L’impôt a même une légitimité politique puisqu’il est décidé par les citoyens ou par leurs représentants. Toutefois, ce pouvoir financier attribué à l’Assemblée n’est pas complet car il est limité au droit de voter l’impôt et n’envisage pas celui de décider des dépenses. L’Assemblée ne détient finalement qu’une partie du pouvoir financier. Cependant, une logique politique nouvelle s’est amorcée. Il s'agit de la création du régime parlementaire démocratique. Un second principe fiscal est inscrit dans la Déclaration des droits de l'Homme et du citoyen du 26 août 1789. Il s'agit du principe d’égalité devant l’impôt (article 13). Ce principe condamne tout privilège en matière fiscale. Article 13 : « Pour l’entretien de la force publique, et pour les dépenses d’administration, une contribution commune est indispensable : elle doit être également répartie entre tous les citoyens, en raison de leurs facultés ». Un troisième principe inscrit dans la Déclaration des droits de l'Homme et du citoyen du 26 août 1789 est celui de la nécessité de l’impôt. Cela signifie que l’impôt est indispensable pour financer les dépenses publiques. Il figure aux articles 13 (« Une contribution commune est indispensable ») et 14 (« La nécessité de la contribution publique »).

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Ces trois principes confèrent une légitimité juridique à l’impôt. Le principe de légalité (article 14), du consentement de l’impôt, confère une légitimité politique à l’impôt. Le principe d’égalité devant l’impôt (article 13) lui confère une légitimité sociale, et concerne la justice fiscale. Enfin, le principe de la nécessité de l’impôt (articles 13 et 14) lui confère une légitimité financière. Les révolutionnaires ont également inventé une fiscalité fondée sur des impôts directs en réaction à celle de l’Ancien Régime. B – La création d’un système fiscal nouveau 1 – L’influence des doctrines professées par les physiocrates Les physiocrates ont développé leur théorie au cours de la seconde moitié du XVIIIème siècle. Leur leader était le médecin du roi Louis XV et s’appelait François Quesnay. Cette école comptait en son sein des hommes comme le Chapelier ou Turgot ; elle était à la fois très moderne et archaïque. Elle était moderne en ce sens qu’elle expliquait que la richesse d’un pays dépend de la liberté des échanges, de la liberté du marché économique, qu’il fallait par conséquent réduire au maximum les réglementations et qu’il fallait laisser les hommes échanger librement leurs marchandises, qu’il fallait qu’il s’exerce un libre-échange. Sous l’Ancien Régime, les corporations de métier déterminaient les prix des marchandises et les salaires. Il existait à l’entrée des villes des péages où devaient être payés des droits sur les marchandises. Les physiocrates étaient farouchement opposés à ces corporations et à ce système fiscal. L’action de Turgot allait dans ce sens, mais face aux oppositions il fût contraint à partir. Cette école était avant-gardiste et préfaçait le libéralisme économique. Elle demeurait par ailleurs archaïque car elle considérait que la source de la richesse d’une nation résidait dans la propriété foncière alors qu’allait se développer l’industrie et qu’avec cela la source de la richesse ne serait plus la propriété foncière mais la force de travail. C’est ce qui explique que les physiocrates se soient montrés favorables à l’institution d’un impôt unique sur le foncier. Ils considéraient en effet qu’il fallait abolir tous les impôts

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existants et qu’il fallait les remplacer par un seul impôt taxant la propriété foncière. A l’époque révolutionnaire, les constituants étaient pénétrés des idées des physiocrates. Les révolutionnaires étaient dans leur majorité favorables aux idées physiocrates et c’est pourquoi ils ont proposé de supprimer les impôts existants et de les remplacer par un impôt foncier partant du principe que la propriété foncière étant, selon les physiocrates, la source de la richesse, l’impôt le plus rentable était bien entendu celui qui taxait la propriété foncière. 2 – La création d’impôts directs sur la propriété foncière Une fois les privilèges fiscaux abolis dans la nuit du 4 août 1789, la constituante pose le principe de la mise en place d’une fiscalité égalitaire. Les révolutionnaires décident d’abolir tous les impôts indirects existants et notamment les gabelles (impôts sur la consommation) et notamment l’impôt sur le sel. Ils décident de remplacer ces impôts par des impôts directs taxant la propriété foncière. Ils voulaient éviter toutes relations entre le contribuable et l’administration fiscale car l’on voulait éviter les conflits qui s’étaient multipliés sous l’Ancien Régime. C’est la raison pour laquelle on a voulu mettre en place des impôts qualifiés d’impôts indiciaires. En effet, les impôts assis sur une base foncière permettaient d’éviter les relations entre le fisc et le contribuable car il suffisait d’évaluer de l’extérieur la superficie de l’immeuble ou du terrain pour déterminer la base d’imposition (pas besoin de demander aux contribuables d’écrire quelque chose donc). Par ailleurs, la constituante a créé dans un premier temps deux impôts. L’un s’appelait la contribution foncière (contribuer à l’intérêt général), et l’autre la contribution mobilière. La contribution foncière a été créée par les lois des 23 novembre et 1er décembre 1790. Il s'agit du premier impôt créé par les révolutionnaires. Ils pensaient pouvoir tirer de cet impôt la totalité des ressources qui leur seraient nécessaires, mais cet impôt n’était pas totalement recouvré.

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La contribution mobilière a été instituée par les lois des 13 janvier et 18 février 1791. Elle était considérée comme un impôt sur le revenu du contribuable et demeure un impôt indiciaire. L’indice de ce revenu était le loyer qui pouvait être demandé pour le logement occupé par le contribuable. Ce loyer était évalué sur la base d’indices appelés, et c’est toujours le cas aujourd’hui, valeur locative (du logement). Mais ces deux impôts étaient difficiles à recouvrer et l’on a décidé de taxer les activités industrielles et commerciales et d’instituer un impôt appelé la contribution des patentes. Sous le Directoire est créé un quatrième contribution sur les portes et fenêtres.

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Ces quatre impôts ont été appelés avec émotion les « Quatre vieilles » (alors qu’il n’y en a en réalité que trois). N.B : Les impôts, les contributions, créés à la Révolution étaient des impôts d’Etat. Ces contributions furent ensuite transférées aux collectivités locales dans la première moitié du XXème siècle. En effet, l’Etat a considéré à juste titre que ces impôts n’étaient pas assez rentables pour couvrir ses dépenses et a créé à son profit ce que l’on appelle les impôts modernes, c'est-à-dire l’impôt sur le revenu des personnes physiques (IRPP), l’impôt sur les sociétés, la TVA, et il a remis aux collectivités locales les trois contributions foncières, mobilières et patentes qui sont devenues des impôts locaux. Aujourd’hui, la contribution foncière correspond à la taxe foncière sur les propriétés bâties et à la taxe foncière sur les propriétés non bâties. La contribution mobilière est devenue la taxe d’habitation, et la contribution des patentes est devenue la taxe professionnelle. Ces quatre taxes sont actuellement les principaux impôts directs locaux. II – Les premiers pas vers le droit pour les élus de décider du choix des dépenses publiques Les révolutionnaires étaient convaincus que le pouvoir de décider en matière fiscale était essentiel et que par conséquent ce pouvoir

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devait appartenir aux représentants des citoyens, comme indiqué à l’article 14 de la Déclaration des droits de l'Homme et du citoyen du 26 août 1789. Mais le pouvoir de dépenser revenait encore à l’exécutif. En réalité, le pouvoir financier était assimilé au pouvoir fiscal et il faudra attendre 1791 pour qu’au moins en principe soit admis le fait que le pouvoir législatif était également compétent pour décider des dépenses, compétent pour décider d’un budget (un budget consiste à prévoir des dépenses et des recettes). Selon la constitution de 1791, le corps législatif a pour fonction « de fixer les dépenses publiques, d’établir les contributions publiques » (article 1er, 1ère section, chapitre III, Constitution de 1791). Ce texte constitue un premier pas vers la présentation d’un budget, c'est-à-dire d’un acte parlementaire qui prévoit pour l’année à venir des dépenses et des recettes et qui autorise l’exécutif à réaliser ces opérations de dépenses et de recettes. A cette époque, il n’y a pas encore de texte législatif qui prévoit des dépenses et des recettes ; il n’existe pas encore de budget. Il n’existera en 1792 qu’une simple autorisation globale de dépenses qui sera d’ailleurs reconduite les années suivantes. Plus tard, les constitutions de l’an III et de l’an VIII rappelleront la nécessité d’un budget. Cela sera néanmoins sans effet. D’autre part, le terme de budget n’apparaîtra qu’en 1802, mais il n’y en aura pas. Napoléon 1er ira même jusqu’à établir les impôts luimême par décret. Section 2 : La naissance de l’Etat gendarme et du droit budgétaire au XIXème siècle Le XIXème siècle est marqué par les théories économiques libérales classiques. Ces théories estimaient que l’Etat ne devait en aucun cas intervenir dans la vie économique, qu’il devait être absolument neutre vis-à-vis du marché économique. Par conséquent, ces libéraux estimaient que le budget de l’Etat ne devait pas peser sur le marché. Autrement dit, ils estimaient que : - Les impôts ne devaient pas être trop lourds afin que les citoyens puissent investir dans les entreprises ;

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- Les dépenses publiques devaient également être limitées car leur accroissement risquait d’entrainer une augmentation des impôts ou un financement par l’emprunt. C’est la raison pour laquelle les libéraux classiques feront en sorte que des normes soient instituées afin de réglementer l’activité financière de l’Etat, afin de l’empêcher d’avoir des activités, notamment économiques, au-delà de certaines frontières. C’est pourquoi le droit budgétaire, c'est-à-dire le droit qui règle l’exercice du pouvoir financier en ce qui concerne l’évaluation des recettes et des dépenses publiques, va être élaboré essentiellement dans le cadre de la construction de l’Etat libéral classique. I – Les doctrines libérales classiques et les finances publiques A – Adam Smith (1723-1790) C’était un professeur de philosophie, d’économie et de droit de l’université de Glasgow. Il a rencontré les physiocrates lors d’un voyage en France. Il a retenu de leur vision le principe de la liberté du marché. Il va associer ce principe de la liberté du marché au développement industriel et au rôle essentiel joué par le travail dans la production des richesses économiques. Il publie Recherches sur la nature et les causes de la richesse des nations en 1776, dans lequel il développe sa théorie. Adam Smith développe les idées selon lesquelles : - La liberté doit être le principe de base du système économique et l’interventionnisme doit être rejeté ; - La source de la richesse n’est pas la propriété foncière, mais le travail ; - Les salaires et les prix ne doivent pas être réglementés (suppression des corporations de métiers) ; - Les frontières doivent être supprimées ; - L’activité économique de chaque individu est déterminée par son intérêt personnel et la confrontation de ces intérêts est la source du progrès économique ; - L’impôt doit être proportionnel aux revenus, et doit être payé par tous les contribuables.

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B – Les libéraux classiques : des héritiers d’Adam Smith Au XIXème siècle, des économistes ont poursuivi la pensée d’Adam Smith. On les appelle les libéraux classiques. Par la suite, à la fin du XIXème et au début du XXème siècle, d’autres économistes ont encore prolongé leurs théories. On les appelle les libéraux néoclassiques. Les libéraux classiques sont persuadés qu’Adam Smith est un génie ayant déjà tout dit et tout écrit, qu’il suffit de prolonger sa pensée. C’est pourquoi ils reprennent tous les thèmes essentiels présents chez Smith. Dès lors, ils essaient de construire une science de l’économie qui aurait ses lois comme les sciences de la nature et qui mettraient en évidence les moyens pour faire fonctionner scientifiquement la société. Parmi ces économistes classiques, il faut citer David Ricardo, Jean-Baptiste Say, Frédéric Bastiat ou encore Robert Malthus. Tous ces économistes, excepté Malthus, étaient persuadés qu’ils parviendraient à découvrir les lois de la richesse des nations. Malthus estimait quant à lui que les populations évoluaient plus rapidement que les biens alimentaires. Par conséquent, à un moment donné, il n’y aurait plus de quoi nourrir ces populations (croissance exponentielle de la population et croissance arithmétique de la nourriture  famines  rééquilibrage). Les néoclassiques sont persuadés que la production joue un rôle primordial dans l’économie. Ils développent également l’idée que les individus ont un comportement rationnel sur le marché économique. Ils entendent par cela que les individus font le choix d’acheter ou de vendre en fonction de leur intérêt personnel. Ils en déduisent que la confrontation des intérêts personnels engendre la réalisation de l’harmonie économique et de l’intérêt général. Parmi ces auteurs il faut citer Carl Menger, Stanley Jebons ou encore Frédéric Hayek (1899-1992). Hayek a participé à la création de l’école autrichienne au début du XXème siècle. II – L’Etat gendarme : première forme de l’Etat libéral classique L’Etat gendarme qualifie la forme d’Etat conçue par les libéraux classiques et néoclassiques. Il s'agit d’un Etat qui doit être

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indépendant du marché économique. Ses fonctions doivent être réduites à ce que l’on appelle les fonctions régaliennes. On l’appelle ainsi car il doit se limiter à assurer la sécurité des biens et des personnes. Il doit maintenir l’ordre à l’intérieur du pays et protéger les populations des agressions extérieures. L’objectif est économique. Il est de permettre aux entreprises et aux individus de produire et d’échanger en paix. Par ailleurs, cet Etat doit également permettre la circulation la plus facile des marchandises ; c’est la raison pour laquelle lui sont confiés la construction et l’entretien des routes. En résumé, les fonctions régaliennes sont les suivantes : - Assurer la sécurité des biens et des personnes, ce qui signifie financer une police et une armée ; - Assurer le respect des lois, et financer une justice ; - Assurer la circulation des marchandises, et donc financer la voirie. Selon cette conception de l’Etat, c'est-à-dire une conception neutraliste par rapport au marché économique, le budget de l’Etat ne doit pas peser sur l’économie et doit être strictement équilibré. Cela signifie que les dépenses publiques doivent strictement équivaloir aux recettes publiques. Selon cette doctrine, il ne doit y avoir ni déficit budgétaire, ni excédent budgétaire. En ce qui concerne la fiscalité, l’impôt ne doit pas peser sur le marché, sur la conjoncture économique. Sa seule fonction est de couvrir exactement les dépenses régaliennes. S’il était supérieur aux dépenses régaliennes, l’argent prélevé serait alors de l’argent non investi dans le circuit économique. Si l’on considère les réalités, les budgets du XIXème siècle n’étaient pas systématiquement équilibrés. Les principes libéraux classiques ont été très difficilement applicables, et plus l’économie se développait, moins il était facile de les appliquer. Toutefois, des règles juridiques ont été posées, elles avaient pour objectif d’encadrer, de limiter l’action de l’Etat dans la vie économique. III – La naissance du droit budgétaire et de la comptabilité publique Le droit budgétaire, c'est-à-dire le droit qui organise l’exercice du

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pouvoir financier, qui établit des règles relatives à la fixation des prévisions concernant les recettes et les dépenses publiques, se construira dans le cadre de la construction de l’Etat gendarme. En effet, selon les principes libéraux classiques, l’Etat doit être totalement indépendant dans la vie économique ; ce qui suppose, par conséquent, une limitation du pouvoir financier public. En conséquence, des normes vont être créées afin de contrôler la progression des dépenses publiques. On ne veut pas que ces dépenses augmentent au-delà de ce qui est nécessaire, c'est-àdire les charges régaliennes. Ces règles vont donc interdire à l’Etat d’agir au-delà de certaines frontières clairement établies. Il va falloir attendre la période de la Restauration pour que se bâtisse le droit budgétaire. Durant cette période va se construire un droit qui pose comme principe de base la prévision des dépenses et des recettes publiques pour l’année à venir. Cette fonction budgétaire va être confiée à l’exécutif pour la préparation du budget, et au législatif pour sa discussion et son adoption. Sous la Restauration, et par la suite sous la Monarchie de juillet, les assemblées parlementaires vont acquérir un véritable pouvoir financier, c'est-à-dire le pouvoir de décider de l’impôt et le pouvoir d’en dépenser les produits. C’est à cette époque, et en premier lieu sous l’impulsion des ministres des finances de Louis XVIII et de Charles X, que vont être créées les principales règles budgétaires. On aurait pu penser qu’une telle évolution était impossible car la charte constitutionnelle du 4 juin 1814 ne comportait aucune règle relative au budget. Seul l’article 48 de la charte faisait allusion à l’adoption des recettes fiscales. Selon cet article « aucun impôt ne peut être établi ni perçu s’il n’a été consenti par les deux chambres ». C’est en 1814 que pour la première fois un budget va faire l’objet d’une discussion concernant les dépenses. C’est le Baron Louis, ministre des finances de Louis XVIII, qui va donner le coup d’envoi d’un processus accordant un véritable pouvoir financier aux élus nationaux. Il va déclarer le 22 juillet 1814 aux députés : « En vous occupant du budget de l’Etat, votre fonction première sera de reconnaître la nature et l’étendue de ses besoins et d’en fixer la somme » (dépenses). Il ajoute : « Votre attention se portera ensuite sur la détermination et la fixation des moyens qui devraient

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être établis ou employés pour y faire face » (recettes). Il poursuit ainsi : « Pour procéder suivant l’ordre de vos délibérations, nous [l’exécutif] allons vous présenter l’évaluation la plus exactes de nos dépenses, c'est-à-dire les sommes qu’il est nécessaire d’affecter à chacun des départements ministériels ». C’est donc l’exécutif qui propose les dépenses pour chaque ministère, qui prépare le budget. Il termine comme cela : « Nous aurons ensuite l’honneur de vous offrir l’aperçu des moyens proposés pour les balancer ». Le Baron Louis dit que l’exécutif propose un projet de budget qui sera ensuite discuté et adopté par les députés. Le pouvoir reconnaît donc ce pouvoir aux députés. Une fois ce principe de l’adoption des dépenses ayant été acquis, les élus vont ensuite faire en sorte de voter de plus en plus en détails les dépenses. Cette évolution vers une adoption détaillée des dépenses va progressivement donner naissance à un principe budgétaire que l’on appelle le principe de spécialité budgétaire. Tout au long du XIXème siècle, les dépenses publiques seront progressivement compartimentées en diverses catégories à l’intérieur de chaque ministère. On va d’abord créer des parties à l’intérieur du budget des ministères : les sections. Ces sections ont été instituées par une ordonnance du 2 septembre 1827. Les parlementaires auront alors le droit d’adopter le budget par sections alors qu’ils ne l’adoptaient auparavant que par ministère. Par la suite, une loi du 29 janvier 1831 va créer de nouvelles catégories qui vont s’appeler des chapitres ; les parlementaires vont alors adopter le budget par chapitres. On dit que les crédits sont spécialisés par chapitres. Dès lors, le Parlement a acquis un pouvoir financier réel. Il contrôle dans le détail les crédits qui sont mis à la disposition de l’exécutif. Ensuite, des textes viendront améliorer la procédure, notamment un décret du 31 mai 1862 qui organise la comptabilité publique et qui est à l’origine d’un droit de la comptabilité publique et qui par ailleurs précise, rationnalise, les procédures budgétaires. A partir de cette date, les procédures budgétaires ainsi que l’architecture du budget (chapitres, sections) ne seront remises en question qu’à partir des années 1950. En effet, le droit budgétaire

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et comptable public institué par le décret de 1862 avait été créé sous l’influence et dans un contexte libéral classique au sein duquel la neutralité de l’Etat était essentielle. Or, à partir des années 1950, on admet que l’intervention de l’Etat dans la vie économique et sociale est une nécessité. Par conséquent, il va falloir reconsidérer le droit public financier et il sera réformé par une ordonnance du 2 janvier 1959. Chapitre 3 : Les finances publiques et la construction de l’Etat providence La fin des années 1950 se caractérise par le développement d’une conception de l’Etat opposée à celle qu’avaient développée les libéraux classiques. L’Etat est alors considéré comme un moyen d’assurer par ses interventions le développement économique et social. Cet Etat interventionniste est appelé Etat providence. Section 1 : La création de l’Etat providence et les modifications du droit budgétaire à la fin des années 1950 I – La naissance des premières théories interventionnistes avant la seconde guerre mondiale Ces théories ne sont pas nées au cours des années 1950, mais au XIXème siècle en réaction aux excès du développement industriel. Ces doctrines expriment la nécessité de l’intervention de l’Etat dans la vie économique et sociale. Ces théories ne seront réellement acceptées et concrétisées qu’à partir de l’après Seconde guerre mondiale. A – Adolphe Wagner, un précurseur de l’interventionnisme Wagner vivait à Berlin à la fin du XIXème siècle et était professeur d’économie, socialiste réformiste. Il est favorable à une redistribution des richesses et à une égalisation des situations sociales en utilisant la fiscalité. Ce qui a rendu sa pensée originale est l’intérêt qu’il a porté à l’étude des dépenses publiques. En effet, la quasi-totalité des auteurs de l’Etat ne s’intéressait qu’à l’impôt. Adolphe Wagner a établi ce qu’il a qualifié de « loi de l’extension croissante de l’activité publique de l’Etat ». On appelle encore cette loi la loi de Wagner. Cette loi a été exposée dans son

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ouvrage Fondements de l’économie politique. Cette loi signifie que du fait du développement industriel, les dépenses publiques augmenteront inéluctablement car le secteur public sera obligé d’intervenir pour rééquilibrer le système économique et social. Wagner écrivait : « Des comparaisons dans l’histoire et dans l’espace montrent chez les peuples en voie de progrès un développement régulier de l’activité de l’Etat et de l’activité publique exercée à côté de l’Etat par les diverses administrations autonomes (collectivités territoriales) ». Il ajoute : « L’Etat et les corps autonomes se chargent de plus en plus d’activités nouvelles. Ainsi, un nombre toujours croissant de besoins collectifs sont satisfaits par l’Etat, nous en avons la preuve manifeste et mathématique dans l’accroissement des besoins financiers de l’Etat et des communes ». Selon Wagner, le secteur public doit aider le développement de l’économie et doit également corriger les effets négatifs de ce développement. B – John Maynard Keynes et la formalisation des doctrines interventionnistes Keynes est né en 1883 et mort en 1946. Il était britannique et a eu l’intelligence de présenter une théorie d’une grande cohérence de l’interventionnisme public dans la vie économique et sociale. Il est libéral interventionniste. L’un des points clés de sa pensée consiste dans le fait qu’il a mis en évidence la fonction essentielle que doit jouer le budget de l’Etat dans la réalisation de l’équilibre économique, c'est-à-dire de l’équilibre entre la production et la consommation, entre l’offre et la demande. Il a montré le rôle que devait jouer le budget pour compenser les déséquilibres économiques et sociaux et pour relancer l’économie lorsque celle-ci s’essouffle et connaît malheureusement la récession. Keynes estimait que ses collègues libéraux classiques n’avaient pas raison en prétendant que le marché économique pouvait fonctionner parfaitement sans intervention de l’Etat. Il n’arrêtait pas de se disputer avec Hayek. Pour Keynes, il faut que l’Etat

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intervienne afin de soutenir ou de relancer la demande, c'est-àdire la consommation, lorsque cela est nécessaire. On dit qu’il s'agit d’une politique économique de la demande et l’on qualifie le point de vue libéral classique de politique économique de l’offre. Il développe également l’idée qu’il faut une politique sociale, et que cette politique ait pour objectif la recherche du plein emploi. Un autre axe consiste en le soutien de l’éducation et à l’aide en matière de santé. Pour atteindre cet objectif, l’Etat doit développer d’une part une politique de soutien au salaire, d’autre part une politique de redistribution de l’impôt et enfin une politique d’investissements publics. Afin de développer ces politiques, l’Etat ne doit pas hésiter à présenter des budgets en déficit. Ce déficit budgétaire permet d’injecter dans le système économique un supplément de pouvoir d’achat du fait des dépenses publiques. Autrement dit, il permet de relancer la demande et par conséquent de relancer l’économie. Toutefois, Keynes estimait également que s’il le fallait, un budget pouvait être voté en équilibre ou en excédent afin de réduire la demande et de rétablir l’équilibre avec la production. Ce n’est pas l’équilibre du budget qui compte en soi, mais son utilisation pour réaliser l’équilibre de l’économie. Il estimait que c’était là le seul moyen de sauver l’économie libérale. Ainsi, il écrivait : « L’élargissement des fonctions de l’Etat apparaît comme le seul moyen d’éviter une complète destruction des institutions économiques actuelles, et comme la condition d’un heureux exercice de l’initiative individuelle ». Keynes a marqué la pensée économique des générations de l’après seconde guerre mondiale. Cet auteur a permis la refonte de la pensée budgétaire. II – La crise de l’Etat gendarme et la création de l’Etat providence Les conceptions interventionnistes se sont imposées du fait des crises économiques et sociales. Elles sont apparues comme une réponse à ces crises. Les problèmes sociaux engendrés par un développement industriel sauvage ont conduit à admettre qu’il était indispensable de développer des politiques sociales.

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L’effet déclencheur du succès interventionniste va être la grande crise économique et financière qui va se développer à partir de 1929. On va alors comprendre que le marché économique devait être régulé, qu’il ne pouvait pas s’autoréguler, et qu’il fallait par conséquent des règles et des interventions du secteur public. C’est ainsi que très pragmatiquement dans les années qui ont précédé la seconde guerre mondiale, le rôle de l’Etat en matière économique va se développer avec la politique du new deal lancée par Roosevelt comme en Europe avec le front populaire en France par exemple. C’est la raison pour laquelle, après la seconde guerre mondiale, il sera bien admis qu’il faut des règles et que l’Etat doit être amené à occuper une fonction de stabilisateur de l’économie. III – L’adaptation du droit public financier aux caractéristiques de l’Etat providence L’institution de l’Etat providence va à contre-courant de l’Etat gendarme. Leurs points de vue sont totalement opposés. C’est la raison pour laquelle le droit public financier est alors en décalage par rapport aux réalités du moment. Il n’est plus adapté aux pratiques interventionnistes et n’est pas non plus en phase avec les théories économiques du moment. Le contexte général est lui même très différent. On assiste à un renforcement du pouvoir politique central et à la place primordiale qui est accordée au pouvoir exécutif, alors que dans les périodes précédentes, sous les IIIème et IVème républiques, le pouvoir législatif détenait une compétence quasi absolue en matière financière. Cette inadaptation du droit public financier a conduit à commencer à le réformer. C’est alors qu’un large consensus s’est établi sur le fait que le budget de l’Etat était essentiel pour l’équilibre et le développement du marché économique. Dans un premier temps, cette fonction économique de l’Etat s’est exprimée dans un décret de 1956. Ensuite, la Constitution du 4 octobre 1958 a limité les pouvoirs du Parement en matière financière et a augmenté ceux du gouvernement. Enfin, une ordonnance du 2 janvier 1959 est venue compléter le dispositif et l’harmoniser. A – La reconnaissance juridique de la fonction économique du

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budget de l’Etat Un décret du 19 juin 1956 reconnaît de manière explicite la fonction économique du budget de l’Etat. Il développe deux grandes données : - Il est indispensable de situer le budget de l’Etat dans un contexte économique et financier. - Il est indispensable de centrer les débats sur la loi de finance qui est la traduction d’un point de vue budgétaire des objectifs économiques et financiers du gouvernement. Apparaît ici une notion nouvelle qui est celle de loi de finance. Cette notion sera ensuite normalisée par l’ordonnance du 2 janvier 1959 et l’on distinguera le budget, traduction chiffrée de dispositions fixées par une loi particulière appelée loi de finance (alors que celle-ci ne sert qu’à fixer des objectifs). Le décret de 1956 reconnaît officiellement le rôle actif que l’on veut faire jouer à l’Etat en matière économique. Il reconnaît également les liens existants entre économie et budget ; autrement dit entre finances publiques et économie. Selon le décret, « Les moyens dont dispose l’Etat comme les ressources qu’il prélève ont désormais une influence profonde sur la vie de la Nation, son orientation économique, son devenir social. Le temps n’est plus où les recettes prélevées par l’Etat pour couvrir les dépenses de fonctionnement de services publics presque exclusivement régaliens demeuraient sans incidences sur l’économie nationale et par l’accroissement de ses interventions, l’Etat est présent dans toutes les branches importantes de l’activité du pays ». B – La limitation des pouvoirs du Parlement en matière financière Dans le cadre du parlementarisme rationnalisé, les élus nationaux ont vu leurs pouvoirs financiers très encadrés et considérablement limités tandis que ceux du pouvoir exécutif étaient augmentés. Le droit d’amendement financier des parlementaires a été réduit de façon considérable par l’article 40 de la Constitution de 1958. C – L’harmonisation de la législation financière

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L’harmonisation a été favorisée par une ordonnance du 2 janvier 1959 portant loi organique relative aux lois de finance : « constitution financière de la France ». Un décret du 29 décembre 1962 portant règlement de la comptabilité publique a été important lui aussi. L’ordonnance de 1959 a été abrogée par une loi organique relative aux lois de finance (LOLF) du 1er août 2001. Section 2 : La critique du système financier public et la crise de l’Etat providence Au cours de la seconde moitié des années 1970, une crise économique s’est développée et a eu de fortes répercussions sur le budget de l’Etat. Il s’est déjà produit lors de la crise 1929, ce que l’on appelle un effet de ciseau. D’un côté, les dépenses publiques augmentent considérablement du fait de la crise, et d’un autre côté les recettes publiques diminuent. A un moment donné, les recettes et les dépenses se croisent et l’écart entres les deux ne fait que s’accentuer. Par conséquent, le déficit s’accroit, il faut le financer et l’on fait alors appel à l’emprunt, ce qui ne fait qu’aggraver les choses. L’Etat providence a tenté de réagir en jouant sur la demande mais cette politique a eu pour effet d’accroître le phénomène de crise. C’est alors que l’on a contesté l’Etat providence. L’idée s’est développée du côté des économistes libéraux classiques qu’il était indispensable de revenir aux principes posés par l’Etat gendarme. Il fallait donc, comme l’expliquaient ces économistes, cesser l’interventionnisme et laisser le marché se développer librement. I – La critique de l’impôt et de la dépense publique Au milieu des années 1970, et surtout à la fin, on a constaté qu’il était de plus en plus difficile pour l’Etat d’assumer sa fonction de stabilisateur de l’économie. C’est alors que les critiques se sont développées vis-à-vis de l’Etat providence. C’est alors également que s’est amorcée une transformation de la gestion des finances publiques et une transformation de l’Etat qui n’ont commencé à devenir perceptibles que des années plus tard. On a compris aujourd’hui que la crise des années 1970 nécessitait non seulement une réponse de type économique, mais aussi une

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réponse de caractère institutionnel. A la fin des années 1970, une idée forte s’est imposée, selon laquelle l’Etat était beaucoup trop envahissant et qu’il pesait beaucoup trop sur le système économique. Les dépenses sont alors considérées comme nuisibles pour l’économie. De cette critique de la dépense publique est née une critique de l’impôt. Certains économistes libéraux classiques ont estimé qu’il fallait « affamer » l’Etat (Friedman, notamment). Il faut donc réduire sa fiscalité. On a l’idée que la réduction des impôts entraine la réduction des dépenses. Par ailleurs, l’impôt a fait l’objet d’autres critiques. Il lui a été reproché de gêner l’investissement des épargnants dans les entreprises, du fait que l’Etat, par ces prélèvements obligatoires, ponctionnait une partie importante de l’épargne. Toutes ces critiques ont conduit à l’idée qu’il serait plus efficace de substituer aux politiques keynésiennes (politiques qui encouragent la demande, la consommation) des politiques qui à l’inverse devraient soutenir la production (c'est-à-dire l’entreprise). Par conséquent, le clivage s’est produit entre les partisans d’une politique de soutien à la consommation et ceux d’une politique de soutien à la production. Ce clivage recoupe les partisans d’un Etat interventionniste opposés aux partisans d’un Etat non interventionniste. Ces clivages se sont exprimés d’un point de vue théorique comme d’un point de vue pratique par un rejet des théories keynésiennes et par un retour aux théories libérales classiques. II – Le retour aux théories libérales classiques A partir de la seconde moitié des années 1970 s’est produit un regain d’intérêt pour les théories libérales classiques et néoclassiques du XIXème et du début du XXème siècle. Ce développement s’est tout d’abord produit aux Etats-Unis avant de s’étendre à l’ensemble des pays développés, notamment en Europe. Certaines écoles libérales classiques en perte d’audience deviennent des écoles prises sérieusement en considération. C’est par exemple le cas de l’école du « Public choice » qui est née au début des années 1950 et s’est considérablement développée à partir de la seconde moitié des années 1970.

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D’autres écoles sont nées dans le courant des années 1970 et s’enracinent dans le courant du libéralisme économique classique. Elles se reconnaissent toutes un maitre à penser, prix Nobel d’économie 1974, Frédéric Hayek. A – Frédéric Hayek Hayek était à la fois un juriste, un politiste et un économiste, l’un des fondateurs de l’école de Vienne. Il est né à Vienne en 1899 et est décédé en 1992. En 1924, il fonde le Cercle de Vienne ; il s'agit là d’un groupe de réflexion qui réunit des économistes autrichiens. Se développe ainsi une école libérale classique que l’on va appeler l’Ecole de Vienne. Hayek a par ailleurs créé, avec d’autres libéraux classiques, la Société du Mont Pèlerin, dont l’objectif est de développer les thèses favorables à l’économie de marché et de combattre les conceptions interventionnistes. Il a enseigné à l’université de Vienne puis à celle de Chicago, puis à celle de Fribourg et Salzbourg jusqu’en 1976. En ce qui concerne ses idées, il s’inscrivait en droite ligne des thèses développées par Adam Smith et ses successeurs. Il estimait que l’interventionnisme de l’Etat était particulièrement dangereux non seulement pour l’économie, mais également pour la liberté individuelle et pour la démocratie. Il estimait que l’interventionnisme était la source des Etats totalitaires. Il estimait en outre que les sociétés étaient beaucoup trop complexes pour prétendre posséder toutes les informations les concernant et pour prétendre les maîtriser afin de les diriger. Par conséquent, il estimait que les individus n’avaient aucune prise sur le développement de ces sociétés, qu’ils en ignoraient le mode de fonctionnement (l’interventionnisme est donc source d’erreurs). Selon Hayek, il est inutile et dangereux de vouloir diriger la société car elle est le produit d’une multitude de relations, elle est très difficile à comprendre, d’autant plus qu’elle change en permanence. Elle est donc insaisissable. Il est donc préférable de laisser s’auto organiser la société. Droit, législation et liberté, Frédéric Hayek, T.3 : Selon Hayek, « L’inéluctable ignorance de la plupart des données qui entrent dans l’ordre de la grande société est la racine du

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problème de tout ordre social, des millions d’hommes réagissent les uns sur les autres. Chacun ignore la plupart des faits sur lesquels repose le fonctionnement de la société ». Hayek propose à partir de là une libéralisation totale de la société et même une disparition de l’Etat et une appropriation du pouvoir par la société civile, c'est-à-dire par les individus, et notamment en utilisant les structures associatives. B – Les écoles néolibérales classiques 1 – L’école libertarienne, ou école libérale-libertaire, ou école anarcho-capitaliste Cette école est née à la fin des années 1960 par la création d’un parti politique, le parti libertarien. Il a été créé par des étudiants anarchistes libertaires et par des étudiants libéraux classiques. Les uns et les autres étaient très opposés aux théories keynésiennes interventionnistes. Les étudiants libéraux classiques avaient pour principe qu’il fallait appliquer à la lettre les thèses d’Adam Smith. Les étudiants anarchistes libertaires appartenaient à un courant anarchiste se situant dans la lignée d’un des fondateurs du courant anarchiste au XIXème, Pierre Joseph Proudhon. Il s'agit d’un courant de pensée radicalement anti étatiste mais néanmoins favorable à la petite entreprise. Par conséquent, les deux groupes étaient méfiants vis-à-vis de l’Etat, très individualistes, favorables à la petite entreprise et par ailleurs décentralisateurs. Cette école va devenir un laboratoire de pensée pour le monde libéral classique. Les points forts de ces théories sont l’anti étatisme et l’hyper individualisme. Sur cette base, ils développent les points suivants : - Une organisation décentralisée de la société. Les associations et les collectivités locales doivent complètement remplacer l’Etat. - Les services publics doivent être privatisés et confiés à des entreprises ou à des associations. - La petite entreprise doit être aidée car elle est la source du développement économique. - Il est indispensable d’opérer une déréglementation radicale et substituer à cela des contrats entre individus. Autrement dit, le droit doit être produit par les individus librement à travers leurs conventions.

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- Il faut supprimer les impôts. Ils ont pour slogan : « L’impôt c’est le vol ! ». Aujourd’hui, certains libertariens estiment que l’on peut admettre un impôt sur la consommation comme la TVA, mais à un taux relativement faible. - Les frontières doivent être supprimées pour que les échanges s’effectuent librement. Pour les libertariens, c’est la liberté de l’individu qui est primordiale. Ils estiment à la suite de Hayek que la liberté individuelle engendre automatiquement un ordre idéal. Finalement, le système s’auto organise de manière harmonieuse lorsque la société est fondée sur le marché économique d’une part, et sur la société civile d’autre part. 2 – L’école du Public choice, ou école de Virginie Elle est née dans les années 1950 aux Etats-Unis par deux économistes, Gordon Tullock et James Buchanan. C’est une école libérale classique qui a la particularité d’étudier le fonctionnement des institutions politiques et administratives. Leur démarche intellectuelle consiste à étudier l’administration et la vie politique à travers le prisme des conceptions libérales classiques dans l’économie. L’école du Public choice s’intéresse tout particulièrement aux dépenses publiques et plus précisément à l’utilité des dépenses publiques et à la manière dont sont prises les décisions les concernant. Cette école étudie les partis politiques, le système électoral et cela en prenant modèle sur le marché économique. Ils assimilent la vie politique à un marché ; c’est pourquoi ils s’intéressent particulièrement au phénomène clientéliste (favoriser les électeurs pour qu’ils continuent à voter pour une personne déterminée). L’école du Public choice montre que le clientélisme en politique aboutit à un gaspillage des fonds publics par des prises de décision en matière de dépenses qui ne se justifient pas économiquement. L’idée de base est que dans une démocratie, les citoyens sont des consommateurs qui indiquent leurs choix pour ce qui concernent les biens publics. Ils indiquent leur choix en votant pour leurs représentants. Or, ces représentants ont un seul objectif qui est de se faire réélire. Dès cet instant va se développer une logique de type économique

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selon laquelle les élus cherchent à élargir le nombre de leurs électeurs à l’image d’une entreprise qui cherche à accroitre le nombre de ses clients. Parallèlement à cela, un principe est posé selon lequel l’électeur se comporte comme un consommateur sur un marché économique, qu’il agit rationnellement sur un marché politique et agir rationnellement, selon cette école, signifie agir selon ses intérêts. Par conséquent, l’électeur votera en fonction des avantages économiques qu’il pense pouvoir retirer des programmes des partis politiques. Il s'agit là d’une conception économique gestionnaire de la vie politique et administrative. Cette école étudie la rationalité des choix qui concernent les dépenses publiques. A partir de là, l’école fait un certain nombre de propositions : - Il faut assouplir l’Etat, le débureaucratiser. Il faut donc l’intégrer aux mécanismes économiques. Il faut que l’Etat joue le jeu de la concurrence, qu’il se gère sur le modèle de l’entreprise. De plus, tous les monopoles de service public doivent être supprimés. - L’Etat doit se décentraliser. Il faut appliquer un principe que l’on appelle le principe de subsidiarité, ce qui signifie que les collectivités locales doivent assumer les fonctions que l’Etat ne parvient plus à assurer (c’est ce qui a commencé à être fait en France par un partage des compétences entre l’Etat et les collectivités locales par les lois de décentralisation de 1982 et 1983. Ce partage des compétences s’est poursuivi par la révision constitutionnelle de mars 2003). - Le système électoral doit être réformé car, du fait qu’il est fondé sur un suffrage majoritaire, il ne permet de donner satisfaction qu’à une partie des électeurs alors que la dépense publique est supportée par tous les citoyens contribuables. - Le secteur privé est plus légitime que le secteur public pour gérer les services publics car, selon l’école du Public choice, lorsque c’est une entreprise privée qui les gère elle fonctionne avec des fonds qui sont la propriété des dirigeants de l’entreprise et qui par conséquent sont responsables de leurs erreurs. Ils ajoutent qu’en revanche, les services publics gérés par l’Etat le sont par des fonctionnaires qui utilisent l’argent public et qui ne peuvent pas avoir un sentiment de responsabilité aussi fort qu’un chef d’entreprise.

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3 – L’école de la croissance endogène C’est une école libérale classique née au début des années 1990 aux Etats-Unis. Son originalité est qu’elle a réalisé une étude pragmatique et scientifique concernant l’utilité des dépenses publiques. Ces économistes, à la différence des autres économistes libéraux classiques, estiment que certaines dépenses publiques sont légitimes et sont favorables au développement économique. Parmi ces économistes, il faut citer Robert Barro et Aschauer. Ils proposent d’une part une politique sélective en matière de dépenses publiques ; ils recherchent quelles pourraient être les conditions favorables à une croissance économique qui serait autoentretenue, c'est-à-dire une croissance qui ne nécessiterait pas l’action de facteurs extérieurs. Ils sont pour un impôt neutre. Politique sélective en matière de dépenses publiques : Ces économistes cherchent quels sont les moyens pour qu’une croissance économique soit autoentretenue. Par conséquent, une croissance qui ne soit pas le fait de facteurs externes. Les recherches de ces économistes ont d’abord porté sur la manière de stimuler la compétition et la croissance économique par les dépenses publiques. A la suite des travaux de Barro, une étude des dépenses publiques sur le long terme, ils ont émis l’idée qu’il ne fallait pas systématiquement condamner toutes les dépenses publiques. Ils ont montré que certaines dépenses pouvaient être favorables au développement économique et qu’il convient d’opérer une sélection. Ils estiment par exemple que certaines dépenses, qu’ils qualifient de dépenses d’avenir, sont indispensables au développement futur du système économique. Il s'agit par exemple des dépenses de recherche et d’éducation. Ils estiment que les dépenses d’investissement comme les dépenses de fonctionnement (par exemple les salaires des chercheurs) constituent toutes des dépenses nécessaires pour l’avenir et profitables au développement économique. Barro a même démontré en étudiant 98 pays sur une période allant de 1960 à 1985 qu’une relation positive existait entre la progression des dépenses d’éducation et la croissance du PIB ! L’année dernière marque la première fois que le ministre a utilisé

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ce terme de « dépenses d’avenir ». La réhabilitation de la dépense publique par ces économistes a ouvert un nouveau champ de réflexion dans le secteur public et a ouvert la voie à la création de nouveaux concepts en finances publiques. Ces économistes estiment nécessaire de ne pas dépasser un seuil d’imposition optimal. Les impôts ne doivent pas peser sur le marché, doivent être proportionnels (qui s’oppose à progressif), ne prenant pas en compte la capacité contributive des contribuables. Section 3 : La réforme du système financier public comme source de réforme de l’Etat Depuis une trentaine d’années, les Etats développés, puis les Etats en développement, se sont engagés dans des réformes importantes de la manière de gérer le secteur public et plus particulièrement de la manière de gérer les finances publiques. Tous les Etats qui se sont engagés dans cette évolution ont pris modèle sur les méthodes de gestion utilisées par les entreprises. Par ailleurs, tous ces Etats sont amenés à libéraliser leur économie, ce qui donne lieu à des privatisations mais également au développement de la décentralisation. Ces évolutions qui s’enracinent à l’origine dans la nécessité de répondre à la crise économique transforment progressivement l’Etat. Les administrations sont les premières concernées, mais ce sont également les pouvoirs politiques. I – La réforme des finances des collectivités territoriales et la responsabilisation des acteurs publics locaux La responsabilisation des acteurs publics en matière financière, c'est-à-dire le fait de leur attribuer une certaine autonomie de décision et de gestion, constitue un élément clé des réformes contemporaines. Cette responsabilisation financière a d’abord été attribuée en France aux collectivités territoriales. Ce sont maintenant les gestionnaires de l’Etat, depuis 2006, qui sont concernés. Les collectivités territoriales, dans les années 1960 étaient considérées comme étant mineures dans le milieu financier (il leur fallait des autorisations pour emprunter et pour se servir de ces sommes etc.). Une autonomie financière des collectivités locales a commencé à se mettre en place dans la

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seconde moitié des années 1970 par l’attribution d’une certaine autonomie de gestion des fonds mis à leur disposition (subventions de l’Etat, ou encore prêts qui leur sont accordés). Par la suite, les collectivités territoriales acquièrent une certaine autonomie fiscale. On considère aujourd’hui que l’autonomie financière des collectivités locales est réalisée pour certains lorsqu’elles détiennent au moins une autonomie de gestion. Pour d’autres, cela suppose non seulement qu’il y ait autonomie de gestion, mais aussi que les collectivités locales soient également dotées d’une autonomie fiscale. L’autonomie fiscale s’entend d’une part du fait que les collectivités locales soient dotées d’impôts propres, et d’autre part de la possibilité pour ces collectivités de voter les taux de ces impôts (que ce ne soit pas le Parlement qui vote le taux d’imposition des impôts locaux). A – L’acte I de la réforme des finances locales 1 – Les premiers pas vers l’autonomie financière L’autonomie financière des collectivités locales, c'est-à-dire leur responsabilisation financière, a été marquée par la globalisation de moyens de financement tels que les subventions et les emprunts. Au lieu d’attribuer aux collectivités locales des subventions ou des prêts spécifiques, utilisables que pour une dépense bien définie par l’Etat, on autorise la collectivité à utiliser librement les fonds mis à sa disposition. On appelle cela une subvention globale. C’est alors une révolution. a – L’autonomie de gestion Elle a commencé avec la globalisation des prêts accordés aux collectivités locales. Cette globalisation des prêts a été initiée en 1976. Trois institutions financières, la caisse des dépôts et consignations, les caisses d’épargnes, et la caisse d’aide à l’équipement des collectivités locales (qui n’existe plus aujourd’hui, et est devenue Dexia crédit local), ont proposé, à titre expérimental d’abord, aux collectivités locales de plus de 10 000 habitants, des prêts globaux. Cette opération a ensuite été généralisée à partir de 1979 pour les communes plus petites. Une loi du 3 janvier 1979 crée une dotation globale pour les collectivités locales appelée dotation globale de fonctionnement.

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Jusqu’en 1979 l’Etat allouait aux collectivités locales des subventions qualifiées de spécifiques. Il s'agissait de subventions accordées sur la base d’un dossier fourni par la collectivité locale. Il y était expliqué quel était l’objectif de cette subvention et l’Etat décidait d’accorder ou non la subvention. S’il l’accordait, elle devait être impérativement affectée au financement de l’opération dans le dossier. En outre, il existait à l’époque un plan quinquennal qui prévoyait les équipements et les politiques que l’Etat entendait conduire dans les cinq ans à venir. Et si les collectivités locales demandaient des subventions pour des opérations qui figuraient dans le plan, elles avaient plus de chance de les obtenir. On en a déduit qu’il fallait responsabiliser les collectivités en globalisant les subventions. Début d’une autonomie de gestion. b – Vers l’autonomie fiscale Dans un premier temps, les collectivités locales se sont vues attribuer des impôts propres par des lois de 1973, 1974 et 1975. On leur a attribué quatre impôts : la taxe d’habitation, la taxe foncière sur les propriétés bâties, la taxe foncière sur les propriétés non bâties et enfin la taxe professionnelle. Il s'agit d’une base d’autonomie fiscale. Par la suite, une loi du 10 janvier 1980 leur a accordé la possibilité de voter librement les taux de ces quatre impôts. De la sorte, les collectivités locales bénéficient d’un pouvoir fiscal qui leur est délégué par le Parlement. Les assemblées délibérantes (par exemple le conseil municipal) des collectivités locales ne détiennent pas pour autant le droit de supprimer un impôt, de créer un impôt ou de modifier les règles d’imposition de ces impôts locaux. Il ne leur est délégué que le pouvoir d’en voter les taux. Depuis la loi du 10 janvier 1980, les collectivités locales peuvent faire varier les taux d’imposition de la taxe professionnelle qui est un impôt à la charge des entreprises, de la taxe d’habitation qui est à la charge des personnes qui occupent un appartement, de la taxe foncière sur les propriétés bâties qui est un impôt à la charge des propriétaires d’immeubles bâtis et de la taxe foncière sur les

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propriétés non bâties qui est à la charge des propriétaires de terrains. Deux possibilités sont offertes aux collectivités locales pour faire varier ces taux : - La variation proportionnelle des taux. Elle consiste à faire évoluer les quatre taux de la même manière chaque année ; - La variation différenciée des taux. Cela consiste à augmenter ou diminuer les taux de façon différente pour chacune des taxes. Cette seconde solution permet beaucoup plus que la première de développer une politique fiscale. Le renforcement de l'autonomie financière des collectivités locales : Des textes importants ont étés pris en 1982 et 1983. Il s'agit des lois de décentralisation. Ces lois ont pour objectif de développer le pouvoir financier des collectivités locales. Il faut remarquer que les collectivités locales détenaient déjà une certaine autonomie de gestion du fait de la globalisation des prêts et des subventions. Par ailleurs, une certaine autonomie fiscale des collectivités locales leur avaient été accordée puisqu'elle disposait d'impôts qui leur étaient propres ainsi que de la possibilité de voter librement le taux de ces impôts. Il s’ensuivit qu’au début des années 1980, les collectivités territoriales disposaient déjà d'une certaine autonomie financière. a – Les grandes caractéristiques décentralisation de 1982/1983

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Cette réforme de la décentralisation s'inscrit dans un vaste mouvement de décentralisation qui s'est produit dans les pays développés à la fin des années 1970 et au début des années 1980. La décentralisation est considérée partout comme un moyen de sortir de la crise financière de l'Etat qui s'était développé depuis la 2nde moitié des années 1970. Autrement dit les Etats ont tentés de se désengager d'un certain nombre de dépenses sur les collectivités locales. Ce désengagement s'est fait par un transfert de compétence de l'Etat vers les collectivités locales. Autrement dit, l'Etat ne parvenant plus à assurer certaines fonctions, il les a confiés aux collectivités locales.

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Ce mouvement de décentralisation partait du principe que les collectivités locales étant plus proche des citoyens, connaissaient mieux leurs besoins, cela permettait de minimiser les gaspillages. Par ailleurs l'Etat a également transféré des moyens financiers nouveaux aux collectivités territoriales, via des impôts et des dotations. Les lois de décentralisation ont poursuivi le processus d'autonomie financière et ont notamment instituées une subvention (dotation) globale d'investissement. A également été institué un contrôle a posteriori des actes des collectivités locales. On contrôle leur régularité (à la différence du contrôle a priori existant jusqu'alors). b – La montée en puissance du pouvoir financier local Les nouvelles fonctions accordées aux collectivités locales vont se traduire par une augmentation de leurs dépenses et de leurs recettes et les budgets locaux (on désigne les dépenses ici) représentent maintenant la moitié du budget de l'Etat. Les collectivités locales réalisent maintenant les ¾ des équipements publics civils (non inclus les dépenses de défense). En 1980 les collectivités locales ne réalisaient que 10% de ces équipements. Ces collectivités emploient près de 1 800 000 fonctionnaires. La dette des collectivités locales représente environ 10% de la dette publique locale. C'est à dire 1200 milliards d'euros. Les transferts financiers de l'Etat vers les collectivités locales, c'est à dire les subventions et le transfert d'une part du produit d'impôt d'Etat représente actuellement plus de 90 milliards d'euros. Les impôts locaux représentent 5% du PIB (le taux de pression fiscal générale est à un peu plus de 43%). Ce pouvoir financier local est important. c – Un pouvoir financier hétérogène Le pouvoir financier local est constitué par les recettes et les dépenses d'un très grand nombre de collectivités locales. Il y a un France 36700 communes, 100 départements, 26 régions. A ces

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collectivités territoriales, il faut ajouter ce que l'on appelle les « satellites des collectivités territoriales ». Il s'agit d'institutions auxquelles les collectivités territoriales ont déléguées des pouvoirs, auxquels elles ont confiées la réalisation de certaines opérations. Par exemple il s'agit d'associations, il s'agit de sociétés d'économie mixte locale (sociétés dont les capitaux sont à la fois privés et publics, les capitaux publics étant détenus par les collectivités locales. On appelle maintenant ces institutions des « entreprises publiques locales »), groupement d'intérêts publics ainsi que des groupements de communes... Résultat : certaines collectivités locales peuvent être particulièrement démembrées lorsqu'elles délèguent une grande partie de leurs compétences à d'autres institutions. Cette hétérogénéité engendre de très grandes inégalités entre les collectivités locales. Par exemple, sur les 36700 communes, 3200 communes ont moins de 1000 habitants, 1000 communes ont moins de 50 habitants. Cela pose des problèmes de financement. Pour les départements c'est un peu la même chose. La Lozère par exemple, 75 000 habitants, le département du Nord c'est 2 500 000 habitants. Le phénomène concerne aussi les régions, ainsi la région Ile-de-France c'est 11, 5 millions d'habitants, la région Rhône-Alpes c'est plus de 6 millions et le Limousin c'est 700 000 habitants. Actuellement, on réfléchit à la réorganisation des structures territoriales. On pense à la réforme de la carte territoriale. Une commission de réflexion est en place actuellement pour y réfléchir. B – L'acte II de la réforme des financements 1 – La révision constitutionnelle du 28 mars 2003 Il existe un principe constitutionnel important en ce qui concerne les collectivités territoriales. C'est le principe de libre administration des collectivités territoriales. Ce principe qui figure à l'article 72 de la Constitution a fait l'objet d'une révision en mars 2003.

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Article 72 avant sa révision : « Les collectivités territoriales s'administrent librement ». Le gouvernement dépose un projet de révision en 2003 pour compléter cet article. Des propositions de révision de cet article ont été faites à plusieurs reprises mais sans jamais aboutir. C'est le gouvernement Raffarin, qui en 2003, propose un projet en révision de l'article 72. Ce projet sera adopté. Les dispositions fondamentales de cette révision figurent à l'article 72-2 de la Constitution, elles inscrivent la libre administration dans l'autonomie financière des collectivités locales. Dispositions essentielles : « La libre administration des collectivités territoriales est garantie par des ressources dont celles ci [les collectivités] peuvent disposer librement. Elles peuvent recevoir toute ou partie des impositions de toute nature. La loi peut les autoriser à en fixer le taux [des impôts] et l'assiette dans les limites qu'elle détermine ». En vertu de l'article 34 de la Constitution, c'est le parlement qui détient le pouvoir législatif et qui détient par conséquent le pouvoir de créer des impôts, d'en supprimer ou de modifier les règles d'imposition. Mais le parlement à la possibilité d'autoriser les collectivités territoriales à décider du taux d'imposition de leurs impôts mais également de décider de la base (l'assiette) de ces impôts. Les collectivités territoriales se sont déjà vu délégué le pouvoir de voter les taux et cela par la loi du 10 janvier 1980. En revanche aucune loi n'a encore autorisée les collectivités locales à fixer l'assiette de leurs impôts. Cette révision a ancré le principe de libre administration dans l'autonomie financière des collectivités territoriales. Par ailleurs, la loi de révision constitutionnelle indique également que les recettes fiscales et les autres ressources propres des collectivités territoriales doivent représenter pour chaque catégorie de collectivités une part déterminante de leurs ressources. On s'est longuement interrogé sur la notion de part déterminante. C'est une loi organique qui a permis de définir plus précisément

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les modalités d'application de cette révision constitutionnelle. 2 – La loi organique du 29 juillet 2004 La loi a notamment définie la notion de catégorie de collectivités territoriales ainsi que la notion de « ressources propres ». a – Les catégories de collectivités territoriales L'autonomie financière n'est pas reconnue à chaque collectivité territoriale. Cette autonomie est garantie à la catégorie à laquelle elles appartiennent. C'est-à-dire à l'ensemble des communes et à l'ensemble des départements et à l'ensemble des régions. Cette autonomie financière se définie par rapport à la notion de ressources propres. b – La notion de ressources propres Les ressources propres comprennent le produit des impôts, le produit des redevances pour services rendus, le produit des dons et des legs, et également les produits financiers. Ne font pas partie des ressources propres, les emprunts et les subventions. Pour qu'il y ait autonomie financière, il faut que le montant des ressources propres sur la totalité des ressources excepté l'emprunt. On divise les ressources propres sur les ressources totales sauf l'emprunt. Il faut que ce rapport ne soit pas inférieur, pour chaque catégorie de collectivités, au niveau constaté au moment de la révision constitutionnelle, soit en 2003. Un rapport est fourni chaque année au parlement. Ce rapport fait apparaître pour chaque catégorie de collectivités territoriales le ratio des ressources propres sur l'ensemble des ressources hors emprunt. Si ce ratio est inférieur à celui de 2003, des dispositions seront prises dans le cadre de la loi finances. 2 – La réforme des finances de l'Etat et la responsabilisation des acteurs publics nationaux Cette réforme est instituée par une loi organique « Loi organique relative aux lois de finances » du 1er août 2001. Cette loi est entrée complètement en application depuis le 1er janvier 2006. Il

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faut insister sur le fait que de la même manière que pour les collectivités territoriale, cette réforme financière ne procède (concerne) pas de simples ajustements technique. Il s'agit d'une importante réforme de l'Etat. C'est une réforme financière qui a des conséquences très importantes sur d'une part l'organisation administrative et d'autre part d'une réforme de la répartition, de la distribution des pouvoirs politiques. Il ne s'agit pas non plus d'un phénomène franco-français. Ce phénomène concerne la majorité des Etats au niveau international. Il s'agit par conséquent d'un processus lourd, d'une tendance lourde dont la caractéristique est celle d'un rapprochement de la gestion publique vers la gestion privée. Il s'agit d'adapter les méthodes de gestion utilisée par les entreprises à la gestion publique. L'objectif est de rendre le secteur public plus performant, de l'inscrire dans ce que l'on appelle « une culture de la performance ». A – Les facteurs de la réforme 1 – Un nouvel environnement théorique Le droit budgétaire et comptable de l'Etat était défini jusqu'à la réforme de 2001 par une ordonnance qui était l'ordonnance organique du 2 janvier 1959. Ce texte avait été pris dans un contexte général qui était dominé d'un point de vue théorique par les conceptions keynésiennes. Ce texte s'est trouvé confronté à partir des années 1990 à un contexte général qui s'était complètement transformé et particulièrement du point de vue théorique. Des conceptions libérales classiques avaient remplacées les thèses keynésiennes, autrement dit on substituait l'idée que le marché économique ne devait pas subir d'interventions de l'Etat à l'idée que ce marché devait être régulé par l'Etat. On est passé ainsi d'une sorte de mystique de l'Etat à une mystique du marché. 2 – La crise financière de l'Etat Avec la crise économique de la fin des années 1970, les dépenses publiques ont augmenté et les recettes publiques ont stagné, et l'on s'est alors demandé de quelle manière on pouvait rééquilibrer

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les dépenses et les recettes et éviter ainsi d'emprunter. Dans la mesure où l'on ne pouvait plus augmenter les impôts, on s'est tourné vers la maîtrise, vers la recherche de la maîtrise des dépenses publiques. On a cherché les moyens de mieux contrôler l'évolution des dépenses et par conséquent de mieux gérer le secteur public. On essaye de développer au sein du secteur public, une culture de gestion. 3 – Les facteurs politiques Avec la crise des années 1970, l'opinion a changé, les mentalités ont changé et les contribuables citoyens ont commencé à s'intéresser plus précisément à l'utilisation qui était faite de l'impôt. Les parlementaires sensibles aux mouvements d'opinion ont pris le relais et ont exprimés leur volonté de voir s'accroître leurs pouvoirs financiers. Ils ont réclamés un pouvoir d'initiative plus important mais également un pouvoir de contrôle de l'exécution du budget de l'Etat. 4 – Le prolongement du processus de modernisation de la gestion publique locale Les collectivités locales depuis la fin des années 1970 étaient engagées dans un processus de responsabilisation en matière financière. Le seul processus s'est notamment traduit par le fait que certaines collectivités locales ont expérimenté une adaptation des méthodes de gestion de l'entreprise à leur propre gestion. Elles ont par exemple développé l'analyse financière, elles ont développé des méthodes de contrôle de gestion en vigueur dans les entreprises. A noter qu’à partir de 1997, la comptabilité des communes et ensuite celle des autres collectivités territoriales a été totalement transformée, réformée. Cette comptabilité a été calquée sur celle des entreprises. 5 – Le poids de l'environnement international Depuis les années 1980, certains Etats anglo-saxons s'étaient déjà engagés dans une réforme de leur gestion en prenant modèle sur l'entreprise. Par ailleurs, des institutions internationales, comme le FMI où

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encore l'OCDE ont, à partir de la seconde moitié des années 1980 et surtout à partir des années 1990, proposées des pratiques de gestion fondées sur la transparence des finances publiques. Enfin, l'Union Européenne a également incité les Etats à gérer leurs finances de manière plus « rationnelle ». B – La philosophie de la réforme Celle de 2001 : Elle est caractérisée par le fait que, sont associées 2 logiques : une économique (logique de gestion) et une logique politique (consiste à accroître les pouvoirs du parlement). Par conséquent, sont présentes, dans cette réforme, 2 cultures : une de gestion et une démocratique. C'est l'association de ces 2 cultures qu'il convient de qualifier de « nouvelle gouvernance financière publique. » Cette nouvelle gouvernance financière publique a aussi pour objectif de développer au sein de l'Etat les capacités d'expertise des gestionnaires et de développer des techniques d'évaluation de leur performance. 1 – L'axe politique : accroissement des pouvoirs du parlement La réforme (de 2001) a pour objectif d'imposer plus de transparence dans le système financier public ; il s'agit d'améliorer la lisibilité du budget de l'Etat et de ses comptes. On a simplifié la présentation du budget. Cet aspect de lisibilité concerne aussi bien les parlementaires que les citoyens. Second aspect politique : Le pouvoir d'initiative parlementaire en matière financière. Cet aspect a été augmenté par un accroissement de leur pouvoir d'amender le projet de loi de finance présenté par le gouvernement. Ce droit d'amendement des parlementaires en matière financière a été considérablement limité par la Constitution de 1958. La réforme de 2001 a accru ce pouvoir d'amendement. Troisième aspect : La LOLF (loi organique relative aux lois de finances de 2001) institue au profit du parlement la possibilité de

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contrôler l'exécution du budget. 2 – L'axe économique Il consiste à moderniser la gestion publique, la gestion de l'Etat. A partir du principe que 2 éléments sont essentiels pour bien gérer. D'une part, il est indispensable que les budgets et les comptes publics soient transparents. On ne peut pas gérer efficacement dans l'opacité. Cet objectif de transparence est aussi un objectif politique. Egalement, il y a la performance. La LOLF institutionnalise le contrôle de gestion et fait du critère de performance un critère de bonne gestion. L'action des gestionnaires sera évaluée sur la base d'indicateurs que l'on appelle des indicateurs de résultats ou encore indicateurs de performance. Par conséquent, on généralise au sein du secteur public une responsabilisation des acteurs. Cette responsabilisation consiste à leur donner une large liberté pour atteindre les objectifs qui leur on été fixé. En contrepartie, un contrôle a posteriori est mis en place. Il consiste à vérifier si les résultats, les objectifs ont bien été atteints. C – Les acteurs à l'origine de la réforme Cette réforme relève à l'origine d'une initiative parlementaire. Ce sont les acteurs politiques qui sont les initiateurs de cette réforme. Ce sont ensuite les administrations financières qui ont été concernées et qui ont eu en charge de construire très concrètement l'architecture de la réforme. Ces mécanismes dans un deuxième temps concernent toutes les administrations publiques. A la différence de ce qui s'était passé autrefois, l'initiative de la réforme est venue du parlement ; autrefois les textes importants en matière financière ont tous été le produit de l'exécutif. Le déclenchement du processus de réforme s'est fait en 1998 à l'initiative du président de l'assemblée nationale (Laurent Fabius) qui a institué un groupe de travail chargé de réfléchir sur l'efficacité de la dépense publique. Le rapporteur de ce groupe de travail était Didier Migaud (actuellement président de la

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commission finances de l'AN). Le 16 mars 2000, le 1er ministre, Lionel Jospin, dans une intervention à la TV explique qu'il faut réformer l'ordonnance du 2 janvier 1959. Le 11 juillet 2000, Didier Migaud dépose une proposition de loi visant à réformer l'ordonnance de 1959. Une commission spéciale chargée d'examiner cette proposition est installée le 19 octobre 2000 par le président de l’Assemblée Nationale. Le rapporteur de cette commission est Didier Migaud. De son coté, la commission des finances du Sénat alors présidée par le sénateur Alain Lambert (UMP) se place dans une position constructive. Le Sénat ne dépose pas de texte concurrent à celui de l’Assemblée Nationale. Il se contente de proposer des modifications qui sont discutées par les 2 commissions du Sénat et de l’Assemblée Nationale. C'est cette attitude qui va permettre que la réforme soit adoptée. Ensuite, viens la mise en œuvre de la réforme. Cette mise en œuvre a conduit à créer une administration spéciale au sein du ministère des finances. Cette administration s'appelait la « direction de la réforme budgétaire ». Elle a été supprimée le 1er janvier 2006 lorsqu'a été mise en place dans sa totalité la réforme budgétaire. La direction de la réforme budgétaire est remplacée par l'actuelle direction générale de la modernisation de l'Etat. Cette direction se partage maintenant le pilotage, la mise en œuvre, de la réforme budgétaire avec une autre administration qui est la direction du budget. D – La nouvelle présentation du budget ou la nouvelle architecture budgétaire Elle est en vigueur depuis le budget pour 2006. La présentation actuelle se fait sous la forme d’objectifs. Il existe des objectifs majeurs appelés des missions, comme par exemple la mission culture, la mission action extérieure de l’Etat. Ces missions représentent les grandes politiques publiques décidées par l’Etat. Pour le projet de loi de finances pour 2009 (projet de budget en réalité), quarante-sept missions ont été prévues. Les missions sont généralement au nombre d’environ cinquante. Ces grands objectifs, les missions, sont ensuite déclinés en sous

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objectifs qu’on appelle des programmes. Pour le budget 2009 il est prévu cent soixante-dix programmes. Ensuite, les programmes sont eux-mêmes divisés en sous-objectifs qu’on appelle des actions, il en est prévu cinq cent soixante-dix-neuf. Cette nouvelle architecture procède de ce que l’on appelle une logique de résultats. Elle consiste, d’une part, à présenter le budget sous la forme de résultats à atteindre et, d’autre part, d’évaluer si ces résultats ont bien été atteints. Cette conception est différente à celle en vigueur antérieurement à 2005 et qui consistait simplement à attribuer des moyens aux administrations pour qu’elles puissent fonctionner. On qualifie ce dernier dispositif de logique de moyens. Par conséquent, alors que jusqu’en 2005 le Parlement adoptait un budget de moyens, il adopte maintenant un budget de résultats. Deuxième sous partie : Les finances publiques et la prise de décision politique Chapitre 1 : L’élaboration et l’adoption du budget de l’Etat, la prise de décision budgétaire Le processus de prise de décision budgétaire est à la fois technique et politique et fait en outre intervenir de nombreux acteurs. Chacun de ces acteurs poursuit sa propre logique, ses propres objectifs. Par ailleurs, il faut remarquer que pendant ces trente dernières années, les procédures d’élaboration et d’adoption du budget de l’Etat se sont considérablement transformées. On a notamment décloisonné les rapports entre le pouvoir exécutif et le pouvoir législatif. Ces deux pouvoirs qui étaient autrefois totalement séparés au cours du processus de préparation du budget puis de son adoption, ont été récemment associés et notamment en ce qui concerne l’élaboration du budget. De plus, les budgets s’inscrivent dorénavant dans une logique stratégique. Section 1 : L’élaboration de la loi de finance La préparation du budget est un processus tout à fait pragmatique qui évolue selon les circonstances. Les textes, et notamment la LOLF, sont peu prolixes en ce qui concerne la préparation du budget.

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L’article 38 de la LOLF (loi organique relative à la loi de finances d’août 2001) dispose que « sous l’autorité du Premier ministre, le ministre chargé des finances prépare les projets de loi qui sont délibérés en Conseil des ministres ». Par conséquent, c’est l’exécutif qui prépare le budget. On peut distinguer, dans l’élaboration de la loi de finance, quatre phases essentielles. - Une phase de détermination d’une stratégie budgétaire cohérente dans un cadre pluriannuel (cela n’est valable que depuis 2009) ; - Une phase de définition d’une discipline budgétaire et de perspective par le dialogue et la collégialité, notamment entre ministères ; - Une phase de règlement des conflits entre ministères par un arbitrage politique ; - La mise au point définitive du projet de budget (pas de budget tant que le projet n’est pas adopté par le Parlement), qui sera comme tout projet de loi soumis préalablement à l’examen du Conseil d'Etat. I – Les institutions et les procédures d’aide à la décision Il existe des procédures techniques, mais également des acteurs politiques ou sociaux. A – L’aide technique à la décision Elle relève tout d’abord des administrations financières mais également d’un comité interministériel. 1 – Les administrations financières N.B : Les administrations financières sont des administrations qui appartiennent au ministère des finances. Les administrations dont il va être question appartiennent au ministère du budget, des comptes publics et de la fonction publique. La préparation du budget fait l’objet d’une série de mises au point successives. Dans ce processus, une administration financière tient une place particulière ; il s'agit de la Direction du budget. La Direction du budget n’est pas seule, et est aidée par d’autres administrations financières.

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a – La Direction du budget Le ministère des finances fait un travail de prévision qui relève de la Direction du budget. Cette Direction comporte des effectifs limités (environ trois cent personnes). Cependant, il s'agit de l’une des administrations les plus stratégiques de ce ministère. Sa fonction est d’autant plus importante qu’en dehors de la préparation du budget de l’Etat, elle participe également à la préparation de la loi de financement de la sécurité sociale. N.B : Rappelons qu’il existe trois catégories au sein des finances publiques. Les finances de l’Etat, les finances de la sécurité sociale et celles de collectivités territoriales. Par ailleurs, la Direction du budget a également en charge la mise en application de la LOLF ainsi que de toutes les mesures qui s’en sont suivies. En ce qui concerne l’élaboration de la loi de finance, la Direction du budget doit d’abord faire des estimations de dépenses et de recettes et doit faire une projection qui s’inscrit dans la programmation pluriannuelle qui doit être transmise chaque année à la Commission européenne dans le cadre de ce qu’on appelle le Pacte de stabilité et de croissance. Par ailleurs, la Direction du budget effectue également une analyse rétrospective, c'est-à-dire une analyse des résultats précédemment obtenus. Elle évalue si les objectifs qui avaient été fixés ont été ou non atteints. Elle prépare enfin un budget à moyen terme, c'est-à-dire sur trois ans, et cela depuis la préparation de la loi de finance pour 2009. Toutes ces opérations sont délicates car au moment où elles sont effectuées on ne connaît pas nécessairement de manière exacte les dépenses et les recettes à venir. On ne peut faire que des estimations. Or, ces estimations sont susceptibles d’être remises en question par un changement de conjoncture économique. Pour établir ces estimations, on s’appuie notamment sur une évaluation du taux de croissance pour l’année à venir. Or, et c’est le cas aujourd’hui, il arrive que ce taux doive être réévalué à la baise.

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Par exemple, le projet de loi de finance pour 2009 était bâti sur un taux de croissance de 1,5%. Cependant, il s’avère que ce taux devrait être de l’ordre de 0,1%. D’une manière générale, si les estimations ne sont pas exactes, c’est tout le projet de budget ainsi que tout le raisonnement budgétaire qui s’écroule dans un atroce fracas et se révèle inexact. On situe en effet le projet de budget dans un ensemble d’hypothèses économiques comme par exemple le taux de croissance mais aussi les taux d’intérêts bancaires ou encore l’inflation. Toutes ces données économiques sont fournies à la Direction du budget par une autre administration financière qui s’appelle la Direction du Trésor et de la politique économique. b – Les autres administrations financières En dehors de la Direction du Trésor et de la politique économique, la Direction du budget se fait aider par d’autres administrations financières. Elle reçoit par exemple des informations de la Direction générale des finances publiques qui lui fournit des données sur la fiscalité. La DGFIP est une administration fiscale qui assoit et recouvre les impôts. Elle reçoit également une aide de la Direction générale de la modernisation de l’Etat ou encore de la Direction de l’institut national des statistiques et études économiques. 2 – Le Comité interministériel d’audit des programmes (CIAP) Le CIAP a pour fonction de vérifier pour le compte du gouvernement si les informations qui sont jointes au projet de loi de finance sont pertinentes. Il analyse notamment la pertinence des programmes et des indicateurs de résultats qui leur sont associés et produit un rapport et donne un avis pour les programmes des différents ministères. Le rapport et l’avis sont transmis au ministère concerné ainsi qu’aux commissions des finances de l’Assemblée Nationale et du Sénat, ainsi qu’à la Cour des comptes. Par ailleurs le CIAP produit un rapport public d’activité tous les ans. Il contient des recommandations ainsi que les remarques faites par le Comité interministériel d’audit des programmes sur les programmes qui ont été audités (évalués).

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Le CIAP a été mis en place le 1er octobre 2002, il est composé de quinze membres qui appartiennent tous à des corps d’inspection et de contrôle des différents ministères. Enfin, le CIAP est présidé par un inspecteur général des finances. B – L’aide politique et sociale à la décision 1 – Le débat d’orientation budgétaire au Parlement Le débat d’orientation budgétaire (DOB) est une procédure consistant pour le gouvernement à consulter (avis) le parlement sur les orientations envisagées pour le budget. Cette idée n’est pas nouvelle. Une première expérience d’un tel débat avait été menée en 1990 par le gouvernement Rocard. Toutefois, il a fallu attendre 1996 pour que cette expérimentation soit reprise. C’est le gouvernement Juppé qui l’a utilisé pour la préparation du budget pour 1997. Il n’y eut pas de débat d’orientation budgétaire l’année suivante du fait des élections. Le dispositif fut repris en 1998 puis normalisé par la LOLF le 1er août 2001 et mis en application dès 2003. Les collectivités territoriales se livraient déjà à cet exercice depuis une loi du 6 février 1992. En effet, les collectivités territoriales doivent organiser un débat sur les orientations budgétaires dans les deux mois qui précèdent l’examen du budget par le Conseil de la collectivité. Le débat d’orientation budgétaire consiste à organiser une consultation du Parlement sur les choix envisagés par le gouvernement. Cette procédure s’inscrit dans la volonté de mettre en place un processus homogène ininterrompu de décision budgétaire, c'est-à-dire d’un processus qui intègre la préparation et l’adoption du budget et qui de la sorte atténue la séparation en matière budgétaire entre l’exécutif et le législatif. Le débat d’orientation budgétaire n’est pas un débat général. Les parlementaires disposent d’éléments techniques tels qu’un rapport du gouvernement, un rapport de la cour de comptes, des informations données par les rapporteurs généraux des commissions des finances de chaque assemblée. Cela permet au parlement d’avoir une position constructive, c'est-à-dire de faire des propositions au gouvernement. Le parlement a la possibilité de débattre de la présentation des programmes proposés par le

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gouvernement, ce qui permet au parlement de faire des propositions relatives aux politiques publiques envisagées. D’autre part, le débat d’orientation budgétaire a lieu au printemps, c'est-à-dire à une période de folle jovialité où les parlementaires ont la possibilité de se faire une opinion sur l’architecture budgétaire présentée par le gouvernement, sur les objectifs mais aussi sur les indicateurs et le Parlement peut ainsi, en donnant son avis, proposer des modifications qui pourront ou non être retenues par le gouvernement. 2 – La conférence nationale des finances publiques et le Conseil d’orientation des finances publiques Il est essentiel d’avoir à l’esprit qu’il existe trois composantes, et par conséquent trois types d’acteurs, dans les finances publiques. Il s'agit des finances de l’Etat d’une part, des finances de la sécurité sociale d’autre part et enfin des finances des collectivités territoriales. La maîtrise des finances publiques suppose de concevoir de manière intégrée ces trois catégories. On essaie depuis ces dernières années d’instituer un réseau composé des trois catégories d’acteurs concernés. On a mis en place une institution paritaire dont l’objectif est de réguler par la concertation les dépenses publiques. En effet, a été lancé le 11 janvier 2006, par le Premier ministre, ce que l’on appelle la Conférence nationale des finances publiques. Cette institution est régie par un décret du 5 mai 2006. Elle réunit chaque année les représentants des trois grandes composantes des finances publiques. L’objectif est de proposer les moyens de maitriser les dépenses publiques et notamment la dette publique. A cette institution s’ajoute le Conseil d’orientation des finances publiques. Il est placé auprès du Premier ministre et est composé des ministres chargés de l’économie et des finances, du budget, de la sécurité sociale, et des relations avec les collectivités territoriales. S’ajoutent à ces personnes des élus nationaux (députés, sénateurs), locaux, ainsi que des représentants des organismes de sécurité sociale. La fonction de ce conseil consiste à analyser la situation des finances publiques, de proposer des solutions pour les maitriser, et de préparer les travaux de la Conférence nationale des finances publiques. Ce Conseil remet ainsi chaque année au Premier ministre, après l’adoption de la loi

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de finance de l’Etat, et après l’adoption de la loi de financement de la sécurité sociale, un rapport qui est rendu public. Avec ces institutions on est en présence d’un embryon de l’institution future de régulation des finances publiques, d’une mise en cohérence des décisions prises par chaque catégorie d’acteurs II – Les différentes étapes de la préparation du budget de l’Etat Ce qui caractérise la préparation du budget de l’Etat c’est d’une part une conception stratégique et d’autre part la volonté d’associer les différents acteurs. A – La phase de détermination d’une stratégie budgétaire dans un cadre pluriannuel Dès le mois de décembre de l’année N-1 (décembre 2009 pour 2011 par exemple) ont lieu des échanges entre la direction du budget et les ministères au sujet des orientations de l’année N+1. Ces orientations sont présentées à un collège des directeurs financiers de l’Etat. Ensuite, le coup d’envoi est donné par le pouvoir politique. Le Premier ministre adresse à chaque ministre un document appelé « lettre de cadrage » (pour la préparation du budget 2009, cette lettre a été envoyée aux ministres le 11 février 2008). Cette lettre de cadrage fixe le cadre de la mise en œuvre d’un budget pluriannuel. Elle indique aux ministres à qui elle a été envoyée les normes qu’ils doivent respecter en matière de dépenses. Autrement dit, cette lettre donne des instructions à chaque ministre pour élaborer son budget. Par exemple, pour la préparation du budget 2009 la lettre impose aux ministres une évolution de leurs dépenses qui ne doit pas dépasser le taux d’inflation. Le taux retenu pour 2009 a été de 2%. De février à mai ont lieu des réunions qui ont pour objectif de déterminer ce que l’on appelle les perspectives budgétaires à moyen terme, c'est-à-dire les économies mais aussi les réformes qui doivent être réalisées sur les trois années à venir. 1 – Le cadre général de la stratégie budgétaire

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La stratégie budgétaire est organisée autour de deux dispositifs. D’une part la révision générale des politiques publiques, et d’autre part la programmation budgétaire pluriannuelle. a – La révision générale des politiques publiques (RGPP) Elle consiste à mettre à plat le fonctionnement de l’ensemble du secteur public. C’est un dispositif qui a été présenté en Conseil des ministres par le Premier ministre le 20 juin 2007 et qui a été officiellement lancé le 10 juillet 2007. La RGPP consiste à faire un travail d’audit (évaluation) des politiques publiques et de leur mise en œuvre par les différents ministères. C’est un dispositif qui existe depuis de nombreuses années dans certains pays. L’objectif est de rationaliser l’action administrative et de faire des économies. Par exemple, en 1993, le Canada était confronté à un déficit d’environ 6% de son PIB, sa dette était de 70% du PIB. La décision a alors été prise de ramener ce déficit à 3% en trois ans. Le Canada a donc mis en œuvre, en 1994, une révision générale de ses dépenses publiques et tous les programmes budgétaires ont été évalués, audités. Des mesures furent prises et la dette fut ramenée en 1998 à 65% du PIB. Les dépenses ont diminué de 17.000.000.000 de dollars. Le Royaume-Uni s’est engagé dans une même pratique en 1998. Le dispositif de pilotage de la RGPP se caractérise par une très forte implication des décideurs politiques. En effet, la RGPP est pilotée par un Conseil de modernisation des politiques publiques. Ce conseil est présidé par le président de la République et est composé de l’ensemble des ministres. Ce conseil décide des réformes qui doivent être mises en œuvre. Une autre caractéristique réside dans le fait que le travail d’expertise, d’audit, est réalisé par des études composées d’experts publics et d’experts privés. En ce qui concerne ces experts publics, il s'agit de hauts fonctionnaires qui appartiennent à des corps d’inspection. Du côté du secteur privé, on fait appel à des consultants, c'est-à-dire à des cabinets privés. On peut encore ajouter que les équipes présentent leurs résultats à un comité de suivi de la RGPP. La présence des décideurs politiques est également très forte dans ce comité. En effet, le comité est coprésidé par le secrétaire général de l’Elysée et par le

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directeur de cabinet du Premier ministre. Sont membres de ce comité, le ministre du budget, le secrétaire d’Etat à la prospective et à l’évaluation des politiques publiques, sont également membres les ministres concernés par les comptes publics, les rapporteurs généraux de la commission des finances de chacune des assemblées. En font également partie le receveur général des finances et le président du conseil d’administration de la banque BNP Paribas (car il a été l’auteur d’un rapport sensationnel sur la dette publique). En plus de cela, les équipes qui auditent bénéficient du soutien de la Direction du budget, de la Direction générale de la modernisation de l’Etat et également du cabinet du ministre du budget, des comptes publics et de la fonction publique. Une première réunion du Conseil de modernisation s’est tenue le 12 décembre 2007. Elle a donné lieu à un examen des scenarii possibles pour transformer les politiques publiques. Une seconde réunion a eu lieu le 4 avril 2008 au cours de laquelle ont été prises des décisions de réorganisation des administrations à réaliser sur la période 2009-2111. Une troisième réunion de ce Conseil s’est tenue le 11 juin 2008. Au total, ce sont plus de 300 décisions de réorganisation qui ont été prises qui concernent les missions écologiques, justice, agriculture, culture recherche et enseignement supérieur, etc. On prévoit de réorganiser cela sur trois années. On est donc déjà dans le cadre d’une organisation pluriannuelle. Il faut de plus relier la RGPP qui a pour objectif de faire des économies avec la programmation pluriannuelle. La RGPP est en relation directe avec la mise en place, depuis le projet de budget pour 2009, d’une programmation budgétaire pluriannuelle. b – La programmation budgétaire pluriannuelle Cf. également Chapitre IV de la deuxième sous-partie de la deuxième partie. La programmation budgétaire pluriannuelle a été officiellement annoncée par le président de la République le 12 décembre 2007 lors d’un Conseil de modernisation des politiques publiques. Cette programmation a été mise en œuvre la première fois lors de l’élaboration du budget pour 2009. C’est une programmation sur

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trois ans. Cette programmation ne remet pas en cause un principe de base du droit budgétaire de l’annualité budgétaire. Cela signifie que des lois de finance continueront à être adoptées chaque année. Simplement, ces lois de finance annuelles s’inscrivent maintenant dans une programmation pluriannuelle de trois ans. 2 – Les conférences performances Les réunions qualifiées de conférences performances ont lieu à la fin du mois de mars. Elles regroupent les services de différents ministères. Y participe également la direction du budget. L’objectif de ces conférences est de déterminer des objectifs et des indicateurs de résultat (appelés également « indicateurs de performance ») pour le prochain budget. Ces objectifs et indicateurs seront transmis aux parlementaires qui en disposeront au moment du débat d’orientation budgétaire (juin). 3 – Les conférences de budgétisation Au mois d’avril ou de mai, après que des décisions aient été prises dans le cadre de la révision générale des politiques publiques (RGPP), se tiennent des réunions appelées conférences de budgétisation. Y participent la direction du budget et les représentants des différents ministères. Ces réunions ont pour objet d’examiner les demandes de crédits et les demandes d’effectifs faites par les ministères. B – Les arbitrages politiques 1 – Les réunions de restitution A la suite des différentes conférences, le ministre du budget, des comptes publics et de la fonction publique organise des réunions appelées réunions de restitution qui ont lieu avec chaque ministre. L’objectif est d’étudier l’ensemble des propositions et d’arbitrer les différents pouvant exister entre les ministres et la direction du budget. Les arbitrages sont ensuite rendus par le Premier ministre. Une fois ce travail d’élaboration du budget et de discussion autour des problèmes, les ministres vont recevoir une « lettreplafond ».

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2 – Les lettres-plafonds A la fin du mois de juin, dans la première quinzaine de juillet, le Premier ministre adresse à chaque ministre une lettre qui, d’une part, les plafonds de crédit du ministère et, d’autre part, les réformes structurelles qui doivent être effectuées par le ministère en question. C – La finalisation du projet de loi de finance Le projet de loi de finance va être finalisé jusqu’à la fin du mois de septembre. Il va être soumis en septembre au Conseil des ministres. Une fois le projet adopté par le Conseil des ministres, il est transmis à l’Assemblée Nationale. Cette transmission doit se faire au plus tard le 1er mardi d’octobre. Section 2 : L’adoption de la loi de finances C’est le parlement qui discute puis adopte le projet de loi de finances. I – L’examen préalable du projet par les commissions des finances Le projet de loi de finance est d’abord examiné par les commissions de finances de chacune des assemblées. Le rapporteur général de chaque commission produit un rapport sur ce projet. Par ailleurs, des rapporteurs appelés « rapporteurs spéciaux » produisent des rapports détaillés sur les différentes catégories de dépenses. Les commissions des finances facilitent donc le travail des assemblées. II – La discussion et l’adoption du budget A – Les délais 1 – La procédure de droit commun Les délais sont fixés par l’article 47 de la Constitution de 1958 et par les articles 40 et 45 de la LOLF du 1er août 2001. Le projet de loi de finance doit être déposé sur le bureau de l’Assemblée Nationale au plus tard le 1er mardi d’octobre. A partir de là, le

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Parlement dispose d’un délai de soixante-dix jours pour adopter le budget. L’Assemblée Nationale dispose de quarante jours pour examiner le projet en première lecture. Si elle ne respecte pas ce délai, le gouvernement à la possibilité de saisir le Sénat du texte initial (avec éventuellement les amendements déjà votés). Dans ce cas là, le Sénat devra statuer dans un délai de quinze jours. Incidemment, si les délais sont respectés par l’Assemblée Nationale, le Sénat dispose de vingt jours en première lecture. Ensuite, c’est la navette normale qui s’effectue. 2 – Les procédures particulières Les procédures d’urgence. La procédure d’urgence de l’article 45 de la Constitution peut être utilisée. Cette procédure est de droit lorsque le texte n’a pas pu être adopté après deux lectures par chaque assemblée. Le Premier ministre demande la réunion d’une commission mixte paritaire, etc. Lorsque le projet de loi de finance n’a pas été déposé en temps utile, le gouvernement demande d’urgence au Parlement l’autorisation de percevoir les impôts (article 47 de la Constitution). B – Le déroulement de la discussion L’examen du projet de loi de finance en séance publique se fait dans un ordre précis. 1 – L’ordre de priorité : l’examen des deux parties de la loi de finance Le projet de loi de finance comprend deux parties. D’une part les recettes, et d’autre part les dépenses. L’article 42 de la LOLF prévoit que la deuxième partie de la loi de finance ne peut être mise en discussion si la première partie n’a pas préalablement été adoptée. 2 – L’exercice du droit d’amendement Le droit d’amender le projet de loi de finance soumis au Parlement par le gouvernement est excessivement réduit. Effectivement, selon l’article 40 de la Constitution, les

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amendements ne sont pas recevables lorsque leur adoption aurait pour conséquence une diminution des ressources ou une aggravation des charges. Un compromis a alors été prévu dans le cadre de la LOLF. La loi organique relative aux lois de finance du 1er août 2001 a permis une extension du droit d’amendement des parlementaires. Elle a permis aux parlementaires de modifier le projet du gouvernement sans pour autant augmenter les crédits prévus dans ce projet. La structure actuelle du budget de l’Etat se présente sous la forme de missions qui sont des objectifs généraux et qui représentent les politiques publiques qu’entend mener l’Etat. Le projet de loi de finance pour 2009 prévoit quarante-sept missions. Elles sont ensuite déclinées en cent soixante-dix programmes, eux-mêmes divisés en six-cents soixante-dix-neuf sous-objectifs appelés actions. Les parlementaires doivent appliquer strictement l’article 40 au niveau des missions, ce qui signifie que le plafond de crédit de la mission ne peut pas être augmenté. Néanmoins, les parlementaires ont dorénavant la possibilité de modifier les programmes à l’intérieur d’une mission. Ils ont la possibilité de supprimer un problème et d’en transférer les crédits sur les autres programmes à l’intérieur de la même mission ou de créer un nouveau programme. Ils ont également la possibilité de transférer les crédits d’un programme vers un ou plusieurs autres programmes. Les parlementaires peuvent choisir de répartir autrement les crédits entre programmes, mais ils ne peuvent jamais dépasser le montant de crédit attribué à la mission. Une mission doit comporter au moins deux programmes, il faut donc que les parlementaires laissent deux programmes. Le président de la commission des finances du Sénat et celui de l’Assemblée Nationale ont publié au printemps, dans le journal Le Monde, un article dans lequel ils estiment que l’article 40 de la Constitution pourrait faire l’objet d’une révision allant dans le sens d’une plus grande liberté des parlementaires en matière d’amendement du projet de loi de finance.

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Chapitre 2 : Le contrôle et l’évaluation de l’exécution des budgets publics Section 1 : Les contrôles administratifs et juridictionnels de l’exécution des budgets publics I – Le principe de la séparation ordonnateur comptable La séparation entre l’ordonnateur et le comptable constitue un principe essentiel du droit public financier en France. On sépare en effet la personne qui engage une dépense et qui donne l’ordre de payer la dépense de celle qui effectue matériellement le paiement de la dépense. La première personne s’appelle l’ordonnateur et la seconde le comptable. Ce principe a été mis en place pour mieux contrôler l’utilisation de l’argent public. Il s’applique également en ce qui concerne les recettes. En effet, celui qui donne l’ordre de percevoir une recette n’est pas le même que celui qui encaisse matériellement la recette. On sépare par conséquent celui qui ordonne et celui qui exécute. Les ordonnateurs ne constituent pas un corps particuliers de fonctionnaires. Il peut s’agir de fonctionnaires mais, dans la majorité des cas, ce sont des décideurs politiques comme par exemple les ministres ou encore les présidents des assemblées. Il existe différentes catégories d’ordonnateurs. 1 – Les ordonnateurs principaux Ils sont pour le budget de l’Etat. C’est le cas par exemple des ministres pour leur ministère, le président du Conseil général pour son département ou encore le maire pour sa commune. 2 – Les ordonnateurs secondaires Les ordonnateurs principaux n’ont pas la possibilité d’exécuter toutes les opérations qui figurent à leur budget. Ils se font aider par des ordonnateurs secondaires. C’est le cas par exemple du préfet, qui est ordonnateur secondaire pour ce qui concerne le budget de l’Etat au niveau du département pour les administrations déconcentrées.

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3 – Les ordonnateurs délégués Ce sont des fonctionnaires auxquels les ordonnateurs principaux ou secondaires ont accordé une délégation de signature. Les comptables publics ne sont pas des décideurs, ils exécutent des décisions qui sont prises par les ordonnateurs. Ils ont une double fonction. Une fonction de contrôle tout d’abord. En effet, l’ordre donné par l’ordonnateur fait l’objet d’un contrôle de régularité très minutieux de la part du comptable public et si le comptable constate que l’ordre est irrégulier, il refusera de l’exécuter sinon il engagerait sa responsabilité propre. Une fois effectué ce contrôle, le comptable public effectue les opérations de paiement ou de recouvrement de la recette et enregistre ces opérations en comptabilité. Le comptable public encourt un certain nombre de sanctions s’il commet des irrégularités. Ces sanctions peuvent être pénales en cas de détournement de fonds, disciplinaires en cas de manquement aux obligations professionnelles, et pécuniaires en cas d’irrégularité de sa gestion. Par exemple, le comptable peut être déclaré responsable sur ses biens personnels des sommes manquant dans sa comptabilité. N.B : Les comptables publics appartiennent, dans leur grande majorité, à une administration financière qui fait partie du ministère du budget, des comptes publics et de la fonction publique, qui s’appelle la Direction générale des finances publiques. Ils opèrent un contrôle administratif de base (premier type de contrôle administratif effectué). II – Les contrôles administratifs A – Le service du contrôle budgétaire et comptable ministériel Dans le but de rapprocher les comptables publics et les gestionnaires des administrations des différents ministères, ont été créés des départements comptables ministériels au sein des ministères. Il s'agit de comptables publics qui exercent leurs fonctions au sein du ministère. Ils ne se trouvent pas, comme autrefois, dans un bureau du ministère des finances.

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Ces comptables ont pour fonction de tenir la comptabilité du ministère, ce qui n’était pas tout à fait le cas auparavant. B – L’inspection générale des finances L’inspection générale des finances est un corps de hauts fonctionnaires, créé sous la Restauration. Leur fonction est d’effectuer des contrôles financiers des comptes de tous les comptables publics. Ils contrôlent également les comptes d’institutions privées qui bénéficient de subventions publiques. Une autre de leur fonction consiste dans la production de rapports concernant l’évaluation des politiques publiques. C – Le contrôle général, économique et financier Ce service a été créé pour réaliser trois fonctions. - Le contrôle de la régularité de l’exécution du budget de l’Etat et contrôle des entreprises et des organismes liés à l’Etat. -La mesure de la performance des organismes publics liés au secteur industriel et commercial. Ils effectuent par exemple des audits des chambres consulaires (chambres de commerce et d’industrie). - Le conseil. Ils produisent des études ou des expertises sur des questions concernant l’industrie, l’artisanat, le commerce et les professions libérales. III – Les contrôles juridictionnels Ce sont des contrôles opérés par des juridictions spécialisées. A – La Cour des Comptes C’est une institution spécialisée de contrôle (ISC), créée le 16 septembre 1807 par Napoléon Ier. La Cour des Comptes est présidée par un Premier président choisi par le gouvernement. Elle est composée de chambres spécialisées avec à leur tête un président de chambre. Chaque chambre est ensuite composée, dans l’ordre hiérarchique, d’auditeurs, de conseillers référendaires et de conseillers maitres. La Cour a un parquet composé d’un procureur général et d’avocats généraux.

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Elle a pour fonctions : - Le contrôle des comptes publics. Comme l’inspection générale des finances elle contrôle les comptes des comptables publics. La procédure de contrôle est collégiale et contradictoire. La comptabilité du comptable est d’abord examinée par un rapporteur. Il en vérifie la régularité et produit un rapport écrit. Ce rapport est ensuite transmis au procureur général mais également à un conseiller maitre. Ce dernier examine le rapport et présente un contre-rapport afin de limiter les erreurs. Une fois ce travail effectué, la Cour prononce un arrêt. - Le contrôle de gestion. Ce contrôle concerne les ordonnateurs. Il s’agit de vérifier le bon emploi des fonds publics qu’en font les ordonnateurs, mais il ne s’agit pas d’un contrôle juridictionnel. Il n’y a donc pas de jugement ; en revanche, les conclusions du contrôle sont susceptibles de faire l’objet d’une publication dans le cadre d’un rapport présenté par la Cour. - La certification de la sincérité des comptes de l’Etat. La Cour des comptes, sur leur demande, à l’obligation de porter assistance au Parlement et au gouvernement. B – La Cour de discipline budgétaire et financière (CDBF) La Cour de discipline budgétaire et financière a été créée par une loi du 27 septembre 1948. Sa fonction consiste à sanctionner les irrégularités commises par les ordonnateurs et à leur infliger des amendes. Elle est présidée par le Premier président de la Cour des comptes. Elle comprend par ailleurs un vice-président, qui est le plus souvent le président de la section finance du Conseil d'Etat, deux conseillers d’Etat et deux conseillers maitres de la Cour des Comptes. La fonction du ministère public devant la Cour de discipline budgétaire et financière est assurée par le Procureur général près la Cour des Comptes. Les recours en cassation se font devant le Conseil d'Etat. Cette juridiction peut être saisie par les présidents du Sénat et de l’Assemblée Nationale, le Premier ministre, le ministre des finances, les ministres concernés et enfin la Cour des Comptes.

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C – Les chambres régionales des comptes Les chambres régionales des comptes contrôlent les opérations financières des collectivités locales. Elles ont été créées par la loi du 2 mars 1982. Il existe une chambre régionale des comptes par région. Elles adoptent une procédure de contrôle largement similaire à celle de la Cour des Comptes. Section 2 : Le contrôle de l’exécution du budget de l’Etat par le Parlement A côté des contrôles de régularité effectués par les administrations et les institutions spécialisées, le Parlement peut lui aussi contrôler et évaluer les opérations financières de l’Etat. Il peut le faire de diverses manières. 1 – Le contrôle sur pièce et sur place Selon l’article 57 de la LOLF, les commissions des finances de l’Assemblée Nationale et du Sénat ont la possibilité de suivre et de contrôler l’exécution des lois de finance. Par conséquent, elles peuvent effectuer des contrôles sur pièce (contrôle des documents) et sur place (déplacement au sein de l’institution) de l’utilisation de l’argent public, et peuvent procéder à toutes les investigations qu’elles jugent utiles. Tous les renseignements et les documents doivent leur être fournis. Elles peuvent se faire assister par la Cour des Comptes. 2 – Les auditions La commission des finances de chaque assemblée a la possibilité d’auditionner les personnes qu’elles jugent nécessaire d’entendre. Ces personnes ont l’obligation de se soumettre à l’audition. Elles sont alors déliées du secret professionnel. 3 – Les questions au gouvernement Les parlementaires ont la possibilité d’interroger le gouvernement en matière budgétaire dans le cadre des questions écrites ou orales. D’autre part, en vue de l’examen du projet de loi de finance, les commissions parlementaires ont la possibilité d’adresser des questionnaires au gouvernement avant le 10

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juillet. Le gouvernement doit y répondre par écrit au plus tard huit jours après la date limite de dépôt du projet de loi de finance. Deuxième partie : Les finances publiques et la bonne gestion Partout dans le monde, les Etats s’efforcent de moderniser leur gestion financière, on qualifie ce nouveau phénomène de nouvelle gestion publique. On parle aussi de « bonne pratique en matière de gestion ». L’objectif poursuivi est de maîtriser les dépenses publiques et pour ce faire, d’introduire dans la gestion budgétaire plus de transparence, plus d’efficacité, une meilleure programmation des dépenses. D’autre part, on prend partout modèle sur les méthodes de gestion utilisées par les entreprises. Autrement dit, la gestion publique se rapproche de plus en plus de la gestion privée. C’est la raison pour laquelle ce que l’on appelle une culture de gestion se développe dans le secteur public. Première sous-partie : Les transformations de la gestion publique La gestion publique se transforme sur la base du principe de la recherche de la performance. Chapitre 1 : La culture de la performance, principe de la nouvelle gestion publique L’introduction d’une culture de la performance dans le secteur public est une idée ancienne qui a mis longtemps pour prendre une forme concrète. Section 1 : Les origines historiques Cela a débuté aux Etats-Unis et s’est ensuite développé en France. I – La recherche de la performance aux Etats-Unis Dès le début du XXème siècle, on a cherché à trouver des moyens pour gérer plus efficacement le secteur public aux Etats-Unis. Plusieurs commissions se sont réunies et ont proposé des solutions.

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1912 : La commission pour l’économie et l’efficacité. Cette commission, également appelée « commission Taft », recommandait des changements radicaux dans les méthodes de gestion utilisées par le secteur public. Elle proposait ce que l’on appelle un budget de programme, c'est-à-dire un budget organisé en fonction de différents objectifs, de différentes fonctions appelées programmes. Ces propositions ne purent pas être appliquées. 1929 : La crise de 1929 s’est caractérisée par une augmentation des dépenses publiques et une diminution des recettes publiques, ce qui a conduit à s’interroger là encore sur les moyens de maitriser l’évolution des dépenses et l’on a proposé de considérer le budget de l’Etat comme un instrument de contrôle de la gestion. 1947 : La commission Hoover. Cette commission va travailler jusqu’en 1949 et va proposer une refonte complète de la structure des administrations des ministères afin d’en améliorer le fonctionnement. [Aujourd’hui, la RGPP, révision générale des politiques publiques, poursuit un objectif similaire] Cette commission a par ailleurs proposé de modifier la présentation du budget et d’adopter une présentation sous la forme de programmes. Enfin, la Commission Hoover qualifie ce type de budget de budget de performance. Années 1960 : Au cours des années 1960 on propose d’utiliser des méthodes pratiquées par les grandes entreprises depuis les années 1920, c'est-à-dire des budgets de programme. Cela constitue également une conception stratégique de la gestion. En 1961 l’ancien directeur général de l’usine Ford, Mac Namara, devient secrétaire d’Etat à la défense aux Etats-Unis. Il décide d’appliquer à son ministère les méthodes de gestion utilisées par l’usine Ford. Il demande alors à un groupe d’experts de l’aider à adapter ces méthodes à son ministère. Ce groupe d’experts propose ce qu’il appelle le planning programing budgeting system (PPBS). Il s'agit tout d’abord de fixer des objectifs stratégiques au ministère, c'est-à-dire de proposer une politique à long terme (planning) ; il s'agit en second

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lieu de proposer les moyens pour atteindre ces objectifs (programing) ; et enfin il s'agit de présenter ces moyens sous la forme d’un budget, d’un programme chiffré des dépenses, d’un regroupement de ces dépenses par programme (budgeting). Selon cette méthode, chaque programme est doté d’un responsable devant atteindre les objectifs qui lui sont fixés. Il est responsable de ses résultats. Les responsables peuvent être gratifiés ou pénalisés en fonction des résultats qu’ils ont obtenus. Par conséquent, un tel budget est qualifié de budget de résultats. 1973 : Une autre commission propose d’insister sur ce qu’on appelle la reddition des comptes, ce qui signifie que tous les gestionnaires responsables de programmes doivent rendre des comptes sur les résultats obtenus. On se trouve placé, dans ce cadre de gestion, dans une logique que l’on qualifie de logique de résultats ; ce qui signifie que l’on ne se borne pas à attribuer des moyens (crédits) à une administration, mais que l’on demande à ce que des résultats soient atteints et que des comptes soient rendus sur ces résultats. On n’est plus seulement dans une logique qualifiée de logique de moyen (attribuer des moyens à une administration, sans se soucier des résultats). II – La recherche de la performance en France En France, à la fin des années 1960, le gouvernement envoie une mission d’exploration aux Etats-Unis pour examiner et comprendre le PPBS. En 1968, le gouvernement décide d’appliquer ce PPBS à la gestion des administrations publiques en France. Une expérimentation est faite au ministère de la défense et au ministère de l’équipement. Autrement dit, des budgets de programme sont mis en place, on détermine des objectifs, on détermine également des indicateurs de résultat qui permettent de savoir si les objectifs ont été ou non atteints. Cette nouvelle manière de considérer la gestion publique est alors qualifiée en France de rationalisation des choix budgétaires (RCB). Les programmes du budget sont des programmes pluriannuels. La RCB se soldera par un échec et sera abandonné à la fin des années 1970 car elle est restée cantonnée aux administrations. Les parlementaires ne s’y sont pas intéressés, à

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la différence de la récente réforme budgétaire (LOLF), où ce sont les parlementaires qui ont pris l’initiative de mettre en place une nouvelle gestion publique pour l’Etat. Section 2 : les normes internationales et la mondialisation Depuis le développement de la globalisation de la mondialisation, s'est développé un phénomène d'harmonisation des normes, des règles financières publiques au niveau international. Cette harmonisation est principalement due à des institutions internationales qui proposent des règles de bonne conduite budgétaire et comptable aux Etats. I – La mondialisation et la proposition de code de bonne conduite par les institutions internationales Ces institutions proposent des normes déjà depuis des années. En 1998 par exemple le FMI a proposé des règles très construites. L'atmosphère des années 1990 a été marquée par le consensus de Washington. A – Le consensus de Washington Ce qu'on appelle le consensus de Washington est une forme d'interprétation du développement économique international et de la manière de lutter contre la pauvreté. Ce consensus de Washington fut produit dans un cadre théorique très marqué par les théories économiques libéral classique (voir supra). 1 – Les caractéristiques du consensus de Washington Le terme de consensus de Washington a été crée sur la base des propositions d'un économiste américain nommé John Williamson. Il a voulu qualifier, déterminer les moyens de réaliser le développement économique. Il a fait différentes propositions en 1989. Il estimait que ces propositions faisaient l'unanimité chez les économistes. Il estimait également qu'elles étaient en accord avec les conceptions du FMI et de la Banque mondiale. C'est pourquoi en 1989, à Washington, il a proposé une liste de dix recommandations destinées aux pays dont l'économie était en difficulté. Il a essayé par cela de résumer la position de la plupart des experts des institutions financières internationales

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concernant les moyens à utiliser pour favoriser la croissance et réduire la pauvreté des pays en développement. Parmi ces dix prescriptions, plusieurs d'entre elles concernent la discipline budgétaire (maitrise pour les Etats de leur déficit public, nécessité de produire des budgets en équilibre : faire en sorte que le budget de l'Etat ne pèse pas sur le fonctionnement du marché économique), il y a aussi la libéralisation des marchés financiers, commerciaux et une dérèglementation de ces marchés, une abolition des barrières douanières. Développer les privatisations et protéger la propriété privée. 2 – La remise en question du consensus de Washington Les résultats de la mise en œuvre de ces principes n'ont pas étés particulièrement convaincants. Si les budgets de certains Etats ont pu être relativement améliorés, l'inflation a dans certain cas diminué mais la pauvreté n'a pas été réduite. Un rapport de la commission « croissance et développement » en date du 22 mai 2008 exprime l'idée et se montre partisan d'une autre politique d'aide au développement. La commission « croissance et développement » est une commission internationale crée en 2006 et qui est financée par l'Australie, les Pays-Bas, le Royaume-Uni, la Suède et la Banque Mondiale. Elle est présidée par un libéral classique qui s'appelle Michael Spence. Cette commission est composée de vingt-et-une personnes : des économistes, des responsables politiques (chefs d'Etat, ancien chefs d'Etat, ministres, ex ministres, représentants de l'ONU, représentants de la Commission européenne et représentants de gouverneur de la banque centrale). Ce rapport conclu « la principale de nos conclusion est que la croissance indispensable pour faire reculer la pauvreté et assurer un développement durable réclame un Etat fort ». La remise en cause du consensus de Washington porte sur les deux aspects suivants : les spécificités des pays n'ont pas été prises en compte (solutions beaucoup trop uniformisées), par ailleurs les aspects institutionnels ont été négligés alors que les institutions juridiques, administratives, politiques sont indispensables au développement.

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La suprématie du marché économique a trop souvent conduit à écarter l'intervention de l'Etat. Un post-consensus est en train de se décider autour de plusieurs axes : Réhabilitation du rôle de l'Etat : On prend conscience qu'il doit investir dans les infrastructures d'éducation et de santé ; développer la démocratie ; mettre en place des administrations compétentes ; considérer chaque pays en particulier et non pas uniformisé les solutions. C'est à travers « la nouvelle gouvernance financière publique » que se mettent en place aujourd'hui les réformes budgétaires dans les pays en développement ou émergents. Cette nouvelle gouvernance financière publique associe une gouvernance démocratique et une gestion publique rationnelle et efficace. B – La mondialisation et la définition de standards budgétaires par le Fonds monétaire international Sur le plan international, on peut constater le développement d'une culture de gestion au sein du secteur public. Cette culture de gestion se caractérise par la recherche d'une plus grande transparence, clarté des comptes publics. L'objectif général poursuivi par les Etats est de maitriser les dépenses publiques et le FMI propose des règles de bonnes conduites en matière budgétaire. 1 – Le Fonds monétaire et la diffusion d’une culture de gestion Le FMI est une institution internationale qui a été crée à la fin de la Seconde guerre mondiale dans le cadre des accords de Bretton Woods. L'objectif qui lui était donné était de réguler le système monétaire national, de surveiller le système avant de prévenir les problèmes. Cette régulation du système monétaire international par le FMI fait parti de ce qu'on appelle la « surveillance multilatérale internationale ». Le FMI est rattaché à l'ONU en tant qu'institutions spécialisées. Son rôle est centré sur l'économie militaire et sur l'aide aux pays en développement. Cela s'est étendu depuis plusieurs années, aux politiques et aux procédures générales budgétaires. Cette nouvelle compétence s'inscrit dans ce que l'on qualifie de nouvelle régulation. C'est une nouvelle forme que prend la surveillance multilatérale

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internationale. Cela consiste à mettre en place au sein des Etats ; des dispositifs, des règles standardisées de manière à conduire ces Etats à se responsabiliser en matière législative. Le PMI incite les Etats à réorganiser leurs procédures de gestion des fonds publics et principalement à les rendre plus transparente. 2 – Le code de transparence budgétaire du Fonds monétaire international Le FMI a publié en 1998, un code de transparence budgétaire. Ce code fut révisé en 2007 et il présente ce que le FMI considère comme les meilleurs pratiques en matières budgétaires. L'objectif est de faire en sorte que dans le monde les Etats se conforment à une discipline budgétaire commune. Autrement dit qu'ils utilisent des règles de gestions et des principes budgétaires et comptables voisins voir même identiques. Le FMI ne peut pas imposer ses règles aux Etats. Il peut seulement leur proposer de s'engager sur cette charte de bonne conduite en matière budgétaire et d'en transcrire les règles dans leurs législations financière. Ce code est complété par un manuel sur la transparence des finances publiques. Ce code comprend quatre grands principes : - Une définition claire des fonctions et des responsabilités des différents acteurs. Il doit y avoir une différence nette entres acteurs et activités du secteur public et acteur et activités du « secteur privé ». La gestion des finances publiques doit s'inscrire dans un cadre juridique et institutionnel clairement définie notamment la répartition des fonctions entre les décideurs et les gestionnaires doit être parfaitement claire. - La transparence des procédures budgétaires : Les informations budgétaires doivent être présentées de la manière la plus claire et notamment doivent être précisées les objectifs de la politique budgétaire. - L'accès du public à l'information : Les informations concernant les finances publiques doivent être accessibles aux citoyens.

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- La garantie d'intégrité : C'est un principe qui concerne la qualité des informations budgétaires qui sont fournies (c'est à dire leur sincérité). Cela fut introduit par la LOLF du 1er août 2001. C – Le « Public expenditure and Financial accountability » (PEFA) Collaboration entre la commission Européenne, la banque mondiale, la France, le RU, la Norvège, la Suisse et le FMI. L'objectif de ce PEFA est d'aider à l'harmonisation des normes budgétaires des Etats et d'aider à la réforme des finances publiques des Etats, particulièrement des Etats en développement. Le PEFA produit des indicateurs de performance concernant les situations budgétaires des Etats. Ces indicateurs commencent à être utilisés pour évaluer l'avancée des réformes budgétaires. D – Les normes comptables proposées par le comité secteur public de la fédération internationale des comptables (FIC) Des normes comptables publiques sont proposées aux Etats par un organisme international (le FIC) qui bénéficie du soutien de la banque mondiale et du FMI. Cette institution est composée de représentants de différents pays dont la France, le RU, l'Afrique du Sud, la Nouvelle-Zélande, l'Argentine, le Canada, etc.). Cette institution propose des normes comptables standard. Et l'idée essentielle consiste dans la mise en place au sein des Etats d'une comptabilité prenant modèle sur celle de l'entreprise. La France par exemple, pratique une comptabilité très proche de l'entreprise depuis la mise en place de la LOLF. Il se généralise progressivement à travers le monde, une conception commune de la gestion publique. II – Le poids des structures régionales internationales sur les transformations des systèmes financiers publics nationaux La politique financière publique des Etats est nécessairement limitée lorsque sont mises en place des zones d'intégration économique et plus encore des zones d'intégration monétaire comme par exemple l’Union européenne ou encore l'Union économique et monétaire des pays de l'Afrique de l'ouest (UEMOA).

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La question qui se pose est de connaitre le degré d'autonomie dont dispose les politiques en matière financière. A – Les normes de l’Union européenne 1 – Une politique financière encadrée par le droit de l’Union économique et monétaire. Critères de convergence et le pacte de stabilité. a – Les critères de convergence L'autonomie des Etats est réduite en matière financière par l'obligation de respecter des critères de convergence. Ces critères ont été initialement posés par le traité de Maastricht du 7 février 1992. Ils ont été ensuite repris dans le traité instituant la communauté européenne, à l'article 104. Selon cet article 104, « Les Etats membres évitent les déficit excessifs ». De plus « La commission surveille l'évolution de la situation budgétaire et du montant de la dette publique dans les Etats membres ». Elle examine si la discipline budgétaire a été respectée et cela sur la base de deux critères. Les deux critères sont : La limitation des déficits publics. Le rapport entre le déficit public et le Produit intérieur brut ne doit pas dépasser 3%. On entend par déficit public, les résultats cumulés de l'Etat, des collectivités locales et des organismes de sécurité sociale. Il ne s'agit pas du seul déficit de l'Etat. Ce critère fut inséré dans l'article 1 du protocole annexé au traité européen. La limitation de la dette publique. Le rapport entre la dette publique et le PIB ne doit pas dépasser de 60% le PIB. La dette publique consiste dans l'addition de la dette de l'Etat, plus celle des collectivités territoriales et de la sécurité sociale. Le PIB actuel est de l'ordre de 1900 milliards d'euros. b – Le pacte de stabilité et de croissance Les politiques économiques au sein de la zone euro doivent être cohérentes, coordonnées et les politiques budgétaires qui sont menées par les différents pays doivent concourir à une

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consolidation, à un renforcement de la situation des finances publiques de chacun des Etats. Cela doit permettre à la banque centrale européenne (BCE) de maintenir des conditions favorables à la vie économique et financière de la zone euro. Par exemple, On veut éviter que l'augmentation des déficits publics d'un Etat provoque des problèmes dans les autres Etats. Cette coordination s'inscrit dans le cadre de ce qu'on appelle « le pacte de stabilité et de croissance ». C'est un dispositif qui a renforcé les critères de convergence et la discipline budgétaire. Le pacte à pour objectif de faire en sorte que les Etats se rapprochent de l'équilibre budgétaire, voir même dégage un surplus budgétaire. C'est une résolution du conseil de l'Europe qui a institué ce pacte : résolution d'Amsterdam du 17 juin 1997. Ce pacte fut précisé par 2 règlements du 7 juillet 1997. Concernant les modalités de ce pacte : on a décidé l'obligation pour les Etats de produire chaque année un plan à moyen terme (3 ans) de leurs objectifs concernant leur solde budgétaire. Ces soldes doivent être proches de l'équilibre (0% du PIB) voit même excédentaires. Le pacte comporte plusieurs volets. Tout d'abord, un volet sur la surveillance des politiques économique, ce volet prévoit que les Etats doivent produire, présenter chaque année une programmation budgétaire à moyen terme. Ces programmes doivent afficher un objectif qui est celui d'un solde budgétaire équilibré ou excédentaire. Le Conseil des ministres européens peut émettre des recommandations lors de l'examen de ces programmes, voir même lors du suivi de l'exécution de ceux ci. Par ailleurs des amendes peuvent être décidées en cas de déficit excessif (une marge d'appréciation est prévue en cas de circonstances exceptionnelles), si l'Etat persiste dans son inaction vis à vis de ses déficits L'exécution de ce plan suppose non seulement que l'Etat mais aussi les collectivités locales et les organismes de sécurité sociale

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parviennent à maitriser leurs dépenses, à réduire leur déficit et par conséquent à réduire leur endettement. 2 – Les points forts de la logique financière européenne a – La globalisation des finances publiques La globalisation des finances publiques : Les finances publiques sont conçues de manière globales (on prend en compte l'ensemble des finances de l'Etat, des collectivités locales et de la sécurité sociale). b – Le souci de la qualité de la gestion financière publique Un principe de bonne gestion financière publique est évoqué à l'article 274 du TUE. L'objectif de finances publiques bien gérées est central. c – La transparence budgétaire Une obligation de communautaires.

transparence

figure

dans

les

textes

B – Les structures régionales en Afrique Il existe plusieurs structures régionales en Afrique mais la plus élaborée et aussi la plus proche (dans sa structure) de l’Union Européenne est l'UEMOA (union économique et monétaire de l'ouest africain). Crée par un traité du 10 janvier 1994. En font partie, le Bénin, le Burkina-Faso, la Côte d'Ivoire, Le Sénégal, le Niger, le Togo, le Mali et la Guinée Bissau. Tous ces Etats ont crée une communauté sur le modèle de l'UE. Cette institution insiste sur la nécessité d'harmoniser et de faire converger les politiques budgétaire est fiscales des Etats qui la composent. Ces Etats doivent parvenir à une réduction de leur déficit public, ils doivent parvenir à une réduction de la dette publique, il est également prévu une réduction de la masse salariale de ces Etats et une augmentation du taux de pression fiscale. Chapitre 2 : Le management de l’entreprise, un modèle pour la nouvelle gestion publique Section 1 : Le modèle du gouvernement de l’entreprise

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I – La théorie de l’agence et la conception contractualiste de l’entreprise Le modèle utilisé est le modèle anglo-saxon de l'Entreprise. Selon la conception Anglo-saxonne de la gouvernance de l'entreprise. L'entreprise est considérée comme un lieu où s'établissent des rapports contractuels. Dans cette conception, le contrat est la base du fonctionnement de l'Entreprise. Tout ce passe comme si le décideur (patron) et le gestionnaire (employé) s'engagent l'un envers l'autre. On désigne le gestionnaire (employé) par le qualificatif d'agent. Dans ce contexte, l'agent est mandaté pour réaliser un objectif, un résultat et dispose d'une délégation de pouvoir de la part du décideur pour réaliser cet objectif. Par conséquent, l'agent est relativement autonome. Il est responsabilisé. L'agent sera jugé sur ses résultats. En fonction de cela il sera soit sanctionné, soit gratifié. L'agent fait l'objet d'un contrôle d'une évaluation de ses performances. Il doit produire un rapport de performance. Le décideur de son coté, à pour préoccupation de s'assurer qu'une fois le contrat signé entre lui et l'agent, l'agent respecte bien ses engagements. On parle de risque de hasard ou encore d'aléa moral. Le décideur essaye de se prémunir de cet aléa moral par un dispositif de contrôle, de surveillance mais aussi d'incitation du gestionnaire. II – L’adaptation de la gestion privée à la gestion publique L'utilisation au sein du secteur public du modèle de l'agent atténue voir même supprime les différences entre gestion publique et gestion privée. Dans ce cadre, la gestion publique, en adoptant le modèle de l'entreprise, est conduite à établir un rapport client fournisseur entre les citoyens et l'Etat. Cette logique entraine des transformations fondamentales au sein des administrations, ainsi que dans les rapports qu'entretiennent les administrations et leurs administrés. Les citoyens ou les usagers en viennent à se considérer comme des clients. C'est par exemple le cas aux USA. Cette évolution se poursuit maintenant dans de nombreux pays. Du coté des administrations, les gestionnaires sont de plus en plus responsabilisés et autonomes pour réaliser les objectifs qui leur sont fixés. Ce modèle fut mis en

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place depuis de nombreuses années dans des pays comme l'Australie, la Nouvelle Zélande, le RU, les Pays-Bas, le Canada, l'Espagne, l'Italie et la France. Section 2 : L’adaptation du modèle de l’entreprise à l’Etat I – Le pilotage de la gestion Il s'effectue sur la base de ce que l'on appelle une « chaîne de responsabilités ». La responsabilité dont il s'agit est une responsabilité gestionnaire. A – La responsabilité des gestionnaires Elle se fonde sur plusieurs dispositifs : La fongibilité des crédits : des crédits sont attribués aux gestionnaires publics. Ces crédits sont utilisables par les gestionnaires pour atteindre les résultats, les objectifs qui leur ont été fixés. Ils sont classés d'une certaines manière à leur niveau dans la position d'un chef d'Entreprise. On dit que les crédits qui leur sont accordés sont fongibles car les gestionnaires ont la possibilité de décider par exemple que des crédits qui ont été désignés au départ comme destinés à financer des investissements peuvent être utilisés à d'autres fins, par exemple pour financer des dépenses de fonctionnement. Ce qui est important, ce n'est plus la différence entre crédit d'investissement et crédit de fonctionnement. Si on veut transformer les crédits en fonctionnement on pourra le faire, ou vice versa. Autrement dit, on peut changer la destination des crédits. Par contre, il est interdit d'utiliser des crédits d'investissement ou de fonctionnement pour augmenter le montant des rémunérations des personnels. Cependant on peut utiliser des crédits de personnels pour financer soit des dépenses d'investissement, soit d'autres dépenses de fonctionnement. La fongibilité est asymétrique. Cette possibilité d'utiliser l'eau par les gestionnaires leur confère une grande autonomie mais en contrepartie ils doivent rendre des comptes.

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B – Les responsables de programmes Un responsable d'un ou plusieurs programme est désigné au sein de chaque ministère. Ce sont des hauts fonctionnaires. Ils sont au nombre de 80 pour 170 programmes prévus pour 2009. Ces responsables de programmes produisent chaque année un projet annuel de performance. Ce PAP est présente au parlement. Les responsables de programmes s'engagent sur des objectifs à atteindre. Ils ont la possibilité d'utiliser librement les crédits mis à leur disposition mais ils doivent ensuite rendre des comptes et seront jugés sur leurs résultats. C – Les responsables de budget opérationnel de programmes et unité opérationnelles de programmes Le responsable d'un programme va diviser son programme en ce que l'on appelle des budgets opérationnels de programmes. Il va désigner un responsable pour chaque budget opérationnel de programme (BOP). Un responsable de BOP peut être responsable de plusieurs BOP. Il existe 2300 BOP et 1200 responsables de BOP. Le responsable d'un BOP gère librement les crédits mis à sa disposition. Ce responsable de BOP s'engage auprès du responsable à atteindre des objectifs. Ces objectifs sont négociés entre le responsable de programme et le responsable du BOP. Cette négociation se déroule dans le cadre de ce que l'on appelle, le dialogue de gestion. Le responsable du BOP a lui même la possibilité de diviser son BOP en plusieurs unités opérationnelles de programme. Et là encore il désignera un responsable pour chaque « unité opérationnelles de responsabilité ». Là encore des objectifs entre le responsable du POP et les responsables des UOP. Cette chaine de responsabilité qui va du responsable du programme au responsable de l’UOP a été mise en place dans le cade de la mise en œuvre de la LOLF. D – Le bilan des budgets opérationnels de programme (BOP) En Janvier Février on effectue un bilan des BOP. On analyse les résultats obtenus et les écarts entre ces résultats et les objectifs. On réfléchit sur l'efficacité de la gestion ainsi que sur la

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pertinence des objectifs fixés. On identifie également les bonnes pratiques, c'est à dire les actions qui se sont montrées les plus efficaces. La structure du budget est simple (revoir les missions, programmes, les actions). A chaque niveau on place un responsable. E – La mise en cohérence du processus de gestion des finances de l'Etat 1 – Le dialogue de gestion C'est une procédure, un dispositif déjà utilisé par les entreprises. Avec la mise en place d'une chaine de responsabilité au sein de l'Etat, le dialogue, la concertation se substitue le système hiérarchique habituel. Les décisions se prennent à travers ou à l'issue d'une discussion entre le responsable de programme et le responsable de BOP puis entre le responsable de BOP et le responsable de UOP. « Le programme est divisé en BOP, le BOP est divisé en UOP ». Avec le dialogue de gestion les responsables à tous les niveaux s'entendent sur la manière d'atteindre les objectifs, sur les moyens disponibles pour les atteindre. Le dialogue de gestion consiste à décider conjointement des objectifs à atteindre et des indicateurs de résultats qui permettront de déterminer, d'être informé sur la réalisation de ces objectifs. Ce système ne marcherait pas sans un organe de cohérence. Il y a tellement de programmes, de BOP et de l’UOP. Il faut un organe de cohérence. 2 – La surveillance de la cohérence par le préfet Cette déconcentration et cette responsabilisation de la gestion nécessite que soit mis en cohérence les multiples actions ministérielles au niveau des territoires. C'est le préfet qui va s'assurer de cette cohérence. Le préfet donne d'abord un avis préalable sur les BOP, il donne cet avis au responsable du programme. Le préfet s'assure de la cohérence du BOP avec les

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autres actions territoriales. Le préfet veille également au respect de la démarche de performance et de la cohérence de cette démarche avec les priorités qui ont été fixées pour le territoire (département, région) sur lequel il exerce son autorité. II – L'évaluation de la performance par des indicateurs de résultat L'un des enjeux les plus importants de la nouvelle gestion publique consiste à faire passer l'Etat de ce que l'on appelle une culture de moyens à une culture de résultat. La culture de moyens consiste à allouer des crédits à des administrations sans se préoccuper de fixer des objectifs. La culture de résultats consiste à attribuer des moyens, des crédits mais en fixant des objectifs à atteindre et en mesurant ensuite si ces objectifs ont bien été atteints. Cette mesure se fait à l'aide des indicateurs de résultat. Selon cette nouvelle logique, à chaque programme sont associés des objectifs et des indicateurs de performance (résultat). Ces objectifs et ces indicateurs figurent dans un document annexé au projet de loi de finance et remis aux parlementaires. Ce document s'appelle un projet annuel de performance. A – L'engagement sur des objectifs et des indicateurs La stratégie d'un programme est définie, décidée par le responsable du programme en accord avec son ministre. Cette procédure conduit à sélectionner un nombre limité d'objectifs. A cet objectif sont associés un ou plusieurs indicateurs de résultat. A chaque indicateur est associée une cible à atteindre dans un délai déterminé. Par exemple en ce qui concerne la mission sécurité. Elle a 2 programmes (police nationale et gendarmerie). Le programme gendarmerie possède un certains nombre d'actions dont l'action sécurité routière. L'un des objectifs de l'action sécurité routière est de réduire le nombre de blessés et de tués sur les routes. La cible qui a été fixée à l'horizon 2009 est de limiter à 27 834 le nombre de blessés. Ce chiffre est l'indicateur de résultat. La valeur prévue de cet indicateur pour 2008 est de 29 611.

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Un comité interministériel d'audit des programmes contrôle la pertinence, la fiabilité des indicateurs. Ces audits sont réalisés par des fonctionnaires qui appartiennent à des corps d'inspection et de contrôle. Il s'agit par exemple d'inspecteurs des finances. B – Le contrôle de la performance par le parlement Le responsable de programme s'engage sur les objectifs et sur les indicateurs qui figurent dans le cadre du projet annuel de performance (PAP) de son programme. Il est responsable de ce programme, par conséquent, il doit rendre compte au parlement des résultats qu'il a obtenu. Il le fait en produisant un rapport annuel de performance (RAP). Le responsable de programme rend des comptes après la réalisation du programme (à la fin de l'exercice budgétaire). Le RAP est joint en annexe de la loi de règlement. Selon ce nouveau dispositif, les parlementaires ne se limitent plus comme autre fois à débattre des crédits car ils ont également à discuter des objectifs, des indicateurs. Cette logique d'entreprise nécessite des outils de gestions adaptés de l'entreprise. L'un de ces outils est essentiel, il s'agit de la comptabilité. III – Une comptabilité de l'Etat très proche de celles des entreprises Depuis 2006, la comptabilité de l'Etat a été complètement réformée. Elle est conçue maintenant sur le modèle de celle de l'entreprise. On appelle ce type de comptabilité, une comptabilité d'exercice. Il s'agit d'un système comptable qui consiste à décrire, à retracer, non seulement les flux (les entrées et les sorties d'argent), mais également la valeur du patrimoine de l'Etat. C'est à dire ce qu'il possède mais également ce qu'il doit. Aujourd'hui l'Etat comme les entreprises présente en fin d'exercice (en fin d'année civile) un bilan et un compte de résultat. Deuxième sous partie : Les nouveaux enjeux de la gestion publique

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L'enjeu majeur de la gestion publique consiste dans la maitrise de son endettement et également la maitrise du déficit budgétaire. Actuellement, le déficit budgétaire de l'Etat représente plus de 20% de l'ensemble du budget. Cela veut dire que l'Etat vit environ 25% au dessus de ses moyens. Par conséquent il est obligé en permanence d'emprunter de l'argent. C'est au cours des années 1980 que l'on a particulièrement pris conscience qu'il fallait trouver les moyens de maitriser les dépenses pour retrouver l'équilibre budgétaire. Jusqu'à cette date, on réfléchissait surtout essentiellement à la fiscalité, à l'impôt. Chapitre 1 : L'équilibre des finances publiques Le pouvoir financier, c'est le pouvoir de prévoir les dépenses et les recettes pour une période de temps limitée. Cette période est l'année civile. Cette prévision se fait dans le cadre de ce qu'on appelle un budget. Section 1 : Les notions budgétaires de base I – Les notions de budget et de loi de finance pour l'Etat A – Définition 1 – La notion de budget Le budget est un acte de bonne gestion par ce qu'il consiste à prévoir des dépenses et des recettes. Il s'agit d'un document utilisé dans le cadre d'une gestion active des fonds publics. Le budget n'est pas seulement un acte de gestion. C'est également un acte politique. En effet, le budget est un acte démocratique, il est élaboré, conçu et n'est adopté, voté que par les décideurs et des élus politiques (gouvernement + parlement). D'autre part, le budget est la traduction financière de certain choix de société. Le budget de l'Etat est adopté par le parlement et constitue un acte législatif : une loi. C'est la raison pour laquelle on parle de loi de finance. Par conséquent, la liberté des gestionnaires est des décideurs politiques est encadrée par le droit, c'est la raison pour laquelle le budget est à la fois un acte juridique, politique, économique et de gestion.

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Le budget est également à la fois un acte de prévision et un acte d'autorisation. Un acte de prévision : C'est un acte de prévision des dépenses et des recettes pour l'année civile à venir. Il doit être adopté par une assemblées délibérante, représentative des citoyens et démocratiquement élue, (c'est le parlement pour l'Etat), c'est le conseil de la collectivité pour les collectivités territoriales. Un acte d'autorisation : En adoptant le budget, l'assemblée délibérante, autorise la réalisation des opérations qui y figurent. Autrement dit, elle autorise, l'exécution des dépenses et le recouvrement des recettes par l'exécutif de l'institution. C'est à dire pour l'Etat, par le gouvernement, par les ministres. Autrement dit, le budget exprime le partage des compétences entre l'organe délibérant et l'organe exécutif. Cette autorisation doit être préalable. Elle doit en principe précéder les opérations d'exécution. Cette règle constitue une nécessité juridique. On dit que le budget est un acte-condition. La sanction de cette règle consiste que si le budget n'est pas voté (adopté) en temps voulu, dans l'impossibilité » pour l'exécutif d'assurer l'engagement des dépenses pour le recouvrement des recettes. 2 – La distinction budget/Loi de finance Cette distinction concerne l'Etat. On distingue d'une part, la loi de finance et d'autre part le budget depuis une ordonnance du 2 janvier 1959. Ces 2 notions ont été reprises dans la loi organique relative aux lois de finances du 1er août 2001 (LOLF). Selon l'article 1er de la LOLF : Les lois de finances déterminent pour un exercice la nature, le montant et l'affectation des ressources et des charges de l'Etat. Selon l'article 6 de la LOLF : Les ressources et les charges budgétaires de l'Etat sont retracées dans le budget...le budget décrit pour une année l'ensemble des recettes et des dépenses budgétaire de l'Etat.

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Les lois de finances contiennent des dispositions qui sont présentées comme pour toute loi sous la forme d'articles. Il s'agit par exemple de dispositions fiscales, ou encore de dispositions qui peuvent concerner les finances des collectivités territoriales. Le budget est un document comptable, chiffré, des dispositions prisent dans le cadre de la loi de finance. Les lois de finances : acte législatif. Le budget : document comptable. B – Les 3 catégories de loi de finances La loi de finance initiale : LFI. Il s'agit de la première loi de finance de l'année. Elle doit être adoptée par le parlement d'ici le 31 décembre pour l'année suivante. Par exemple, la loi de finance pour 2009 doit être votée pour le 31 décembre 2008. Les lois de finances rectificatives : LFR. On les appelle aussi « collectifs budgétaires ». Ce sont des lois de finances qui modifient en cours d'année, lorsque cela est nécessaire des dispositions, des choix qui avaient été prévus par la loi de finance initiale. Dans le courant de l'année 2008, 2 lois de finances rectificatives ont été prévues. L'une d'entre elle concerne des mesures pour répondre à la crise financière actuelle (celle-ci n'a pas encore été adoptée). Il est également question qu'un projet de loi de finances rectificatives pour 2009 soit discuté par le parlement en début d'année prochaine pour adapter le budget 2009 aux nécessités liés à la crise. Il peut y avoir aucune LFR ou plusieurs dans une même année. La loi de règlement : Les LFI et LFR prévoient des recettes et des dépenses. Mais la loi de règlement n'est pas un acte de prévision. Elle ne prévoit pas les recettes ou les dépenses. Elle constate les résultats de l'exercice de l'année civile écoulée. C'est également un texte voté par le parlement. En découle les réalisations effectives et les résultats effectifs de l'année. II – Les budgets des collectivités locales

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Il n'y a pas de notion de loi de finance pour les collectivités territoriales car les elles ne sont pas législateurs (article 34 de la Constitution). On parle seulement de budget pour les collectivités territoriales. Ces collectivités produisent 3 catégories de budgets : - Le budget prévisible : premier budget de l'année. Il correspond à la LFI pour l'Etat. - Le budget supplémentaire et les Décisions modificatives : budgets adoptés en cours d'année pour modifier les choix du budget prévisible. Ils correspondent aux LFR pour l'Etat. - Le compte administratif : Il décrit les opérations réellement effectuées. Il correspond à la loi de règlement pour l'Etat. III – Définition et évolution quantitative des dépenses publiques A – Définition 1 – La notion de dépense publique Par dépense publique on veut dire les dépenses des charges de l'Etat + celles des collectivités locales, plus celle des organismes de sécurité sociale. Les dépenses publiques ne se limitent pas aux dépenses de l'Etat. Il s'agit là d'une qualification introduite par l'UE. 2 – Les notions de dépenses d'investissement et de dépenses de fonctionnement Les dépenses d'investissement : On les appelle aussi les dépenses d'équipement ou encore dépenses en capital ». Il s'agit de dépenses qui concernent les bâtiments publics (FAC, etc.) Les dépenses de fonctionnement : Dépenses courantes. Elles permettent de faire fonctionner les équipements ou les employés qui utilisent le dit équipement ou encore les intérêts des emprunts. Toute réalisation d'un équipement entraine des dépenses de fonctionnement. Un équipement engendre une reconduction de dépenses de fonctionnement chaque année pendant toute la durée de cet équipement. Cela provoque ce que l'on appelle, une inertie du budget.

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Une nouvelle notion est apparue depuis quelques années. Il s'agit de la notion de « dépense d'avenir ». Ces dépenses concernent tout aussi bien, l'investissement que le fonctionnement. Par exemple, les dépenses de recherche ou les dépenses de formation ou d'éducation sont considérées comme des dépenses d'avenir et par conséquent comme des investissements pour l'avenir, même s'il s'agit de dépense de fonctionnement comme par exemple les salaires des chercheurs. Les notions de dépenses d'investissement et de dépense de fonctionnement sont remises en question par la pratique nouvelle issue de la LOLF, qui est celle de la fongibilité des crédits, c'est-àdire la possibilité pour le gestionnaire, pour le responsable d'un programme. On a la possibilité d'utiliser des crédits de fonctionnement pour financer les crédits d'investissement. Rappel : Cette fongibilité est asymétrique. 3 – La notion de dépense au transfert L'Etat et les collectivités territoriales redistribuent une partie de leurs ressources budgétaires à d'autres collectivités afin que ces collectivités réalisent certaines dépenses. Ces dépenses apparaissent en dépenses dans le budget de l'Etat et en recettes dans le budget de la collectivité : dépenses de transferts. Ce sont souvent des dépenses sociales ou liée au développement économique. Le RMI fait l'objet d'un transfert du budget de l'Etat vers les budgets des départements. Ce sont les départements qui sont chargés de redistribuer le RMI. 4 – Les dépenses définitives et les dépenses temporaires Les dépenses définitives : elles représentent la quasi-totalité des dépenses (par exemple les salaires). Les dépenses temporaires sont des prêts ou des avances consenties par les collectivités publiques. On les qualifie de temporaire celles qui bénéficieront d'une aide de l'Etat. 5 – Les dépenses fonctionnelles et dépenses par nature

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Les dépenses fonctionnelles : Organiser les dépenses de manière fonctionnelle signifie qu'on les rassemble par objectifs, par programmes qu'on peut aussi appeler des fonctions. Il existe par exemple des fonctions cultures, sécurité, défenses, logement. Les dépenses par nature : Les dépenses peuvent être classées par nature de la charge. Les salaires, les intérêts sur emprunts, les frais de déplacement, les loyers. Dans ce cas là, on aligne les postes de défenses par nature sans les rattacher à tel ou tel objectif. On peut combiner une présentation des dépenses par fonction et par nature. Cela signifie qu'à l'intérieur de chaque fonction, on va retrouver les dépenses par nature qui concerne cette fonction et uniquement celle-ci. B – L'évolution chiffrée Document sur le budget 2008 en « flyers ». Les dépenses de l'Etat : 300 milliards d'euros. Les dépenses des collectivités locales : 180 milliards d'euros. Les dépenses de la sécurité sociale : 450 milliard d'euros minimum. Les principales dépenses de l'Etat sont : La La La La La La

mission mission mission mission mission mission

enseignement scolaire : 60 milliard d'euros. recherche et enseignement supérieur : 24 milliards. défense : 48 milliards d'euros. sécurité : 16 millions d'euros. culture : 2,9 milliards d'euros. justice 8 milliards d'euros

Les intérêts de la dette de l'Etat : 45/50 milliards d'euros. Il faut observer que les dépenses de l'Etat sont essentiellement des dépenses de fonctionnement. Ce sont les collectivités publiques qui effectuent la plupart des travaux sur les routes. Les collectivités locales réalisent 73% des équipements civils (hors défense). En 1980, avant les collectivités locales ne réalisaient que 10% des dépenses.

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Section 2 : Les notions d'équilibre budgétaires Il n'existe pas de règles juridiques qui imposent à l'Etat de présenter son budget en équilibre. L'Etat doit seulement tenir compte d'un équilibre économique et financier général. Les collectivités locales ont une obligation d'équilibre du budget. Il existe un débat ancien entre économistes sur le sujet de l'équilibre budgétaire. Les uns estimant que cet équilibre des dépenses et des recettes est indispensable. Les autres estimant que l'essentiel était l'équilibre général de l'économie. I – Les conceptions théoriques A – La conception libérale classique Pour les économistes libéraux classiques, l'équilibre des dépenses et des recettes est indispensable car il constitue une garantie pour la neutralité de l'Etat par rapport au marché économique. L'équilibre entendu dans ce sens est un équilibre strict. Il ne peut y avoir ni déficit, ni excédent. Pas de déficit : les déficits sont interdits car leur financement oblige soit de recourir à l'emprunt et par conséquent d'alourdir les dépenses des futurs budgets avec les intérêts à payer notamment, soit à recourir à une augmentation des impôts, et l'on diminue alors le pouvoir d'achat ou la capacité d'investissement des contribuables. Pas d'excédent : S'il y a excédent, cela signifie que l'on a prélevé plus d'impôts que nécessaire. D'autre part, présenter le budget en excédent c'est prendre le risque d'engager des dépenses qu'il faudra reconduire (que l'on risque de ne pas pouvoir supprimer dans l'avenir). B – La conception keynésienne Selon Keynes, l'équilibre qu'il faut réaliser c'est avant tout l'équilibre général de l'économie. Pour les keynésiens, le budget peut parfaitement être déficitaire ou excédentaire ou strictement équilibré. L'essentiel c'est qu'il permette de réaliser l'équilibre entre la consommation et la production, autrement dit le solde budgétaire est considéré comme un instrument, comme un

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moyen d'intervention pour relancer augmentation des dépenses publiques.

l'économie,

par

une

II – Les conceptions techniques A – Les notions de solde budgétaire Le solde c'est la différence entre les dépenses et les recettes. Le solde budgétaire des lois de finances est appelé : le solde prévisionnel. Lorsque le budget a été exécuté on parle alors de solde d'exécution. B – La notion de besoin de financement Le besoin de financement est une notion plus large que celle de déficit. Il faut ajouter au déficit le remboursement des emprunts des années précédentes (l'amortissement de la dette). Il faut couvrir le déficit mais il faut également rembourser chaque année le capital emprunté. Le besoin de financement tel qu'il figure dans le projet de loi de finance pour 2009 est de 165,3 milliards d'euros dont 52 milliards de déficit budgétaire. III – Les notions de l’équilibre juridique La notion d’équilibre, d’un point de vue juridique, est différente selon que l’on considère l’Etat ou les collectivités territoriales. En ce qui concerne l’Etat, la notion d’équilibre figure à l’article 1er de la LOLF. Il ne s’agit pas d’un équilibre comptable, mais d’un équilibre au sens keynésien du terme. Ce qui est pris en compte est l’équilibre général économique et financier. Par conséquent, les déséquilibres comptables entre les dépenses et les recettes sont possibles. Par exemple, un déficit est possible. Il n’existe donc pas de règles juridiques imposant un équilibre comptable au budget de l’Etat. C’est le Parlement qui définit l’équilibre (qui va définir quelle est la différence entre les dépenses et les recettes). Les collectivités locales ont l’obligation de voter leur budget en équilibre comptable. Chapitre 2 : La transparence des finances publiques

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Section 1 : Un budget lisible, un budget clair Jusqu’en 2005, la présentation du budget de l’Etat était très compliquée. Les crédits qui y figuraient étaient dispersés au sein des ministères sous la forme de 850 comptes que l’on appelait des chapitres. Depuis 2006 (LOLF), les crédits sont répartis à travers un nombre d’objectifs limités que l’on appelle des missions, des programmes et des actions. A – Les missions Les missions sont des grands objectifs qui représentent les politiques publiques qu’entend mener l’Etat (culture, sécurité, etc.). Ces missions peuvent relever d’un ou plusieurs ministères. Elles sont composées de programmes. B – Les programmes Les programmes sont ministériels. Il s'agit d’objectifs devant permettre de réaliser l’objectif essentiel qui est la mission. Le programme constitue la clé de la réforme budgétaire car il pose en principe une budgétisation des crédits par objectifs. Cela signifie que les décideurs publics qu’ils soient gestionnaires ou qu’ils appartiennent à la classe politique, sont conduits à raisonner en termes d’objectifs et pas seulement comme autrefois seulement en termes de moyens. Par exemple, lors de la discussion budgétaire les parlementaires sont obligés de raisonner en termes d’objectifs, de fixer des objectifs, c'est-à-dire de raisonner à travers une culture de la stratégie. A l’ancien budget de moyens succède ce que l’on appelle un budget de résultats. Ces programmes sont ensuite divisés en sous-objectifs appelés les actions, également susceptibles d’être divisées en sous-actions. Section 2 : Les structures de pilotage du budget clairement identifiables I – La Direction du budget Elle joue un rôle essentiel dans la préparation des lois de finances. Elle est chargée de proposer au ministre du budget les grands choix en matière de recettes et de dépenses. Une fois

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qu’ont été fixées les priorités gouvernementales, elle les traduits en moyens budgétaires. Elle suit également l’exécution du budget et elle peut proposer des moyens pour améliorer la réalisation des objectifs qui ont été fixés. Par ailleurs, la Direction du budget assure depuis le 1er janvier 2006 le pilotage de la mise en œuvre de la LOLF. Elle a également en charge l’élaboration d’une programmation pluriannuelle des dépenses de l’Etat. Au total, la Direction du budget doit remplir sept missions : - Proposer une stratégie globale des finances publiques sur le long terme ; - Elaborer une programmation pour mettre en œuvre cette stratégie sur le long terme ; - Veiller à ce que la budgétisation annuelle soit cohérente avec la programmation ; - S’assurer que la gestion publique réponde à une logique de performance ; - Participer à l’élaboration du budget communautaire et à son cadrage pluriannuel ; - Définir les outils budgétaires à utiliser ; - Assurer la tutelle stratégique des organismes publics. II – La Direction générale de la modernisation de l’Etat Une administration avait été créée en mars 2002 pour mettre en place la LOLF. Cette administration s’appelait la Direction de la réforme budgétaire. Il avait été décidé que cette Direction disparaitrait lors de la mise en place de la LOLF (1er janvier 2006). Par conséquent, la Direction de la réforme budgétaire a été supprimée au 1er janvier 2006 et lui a succédé une autre administration, appelée la Direction générale de la modernisation de l’Etat (DGRE). La DGRE a pour fonction de mettre en application les grandes orientations concernant la modernisation de l’Etat au service des usagers. Parmi ses fonctions, on peut retenir qu’elle doit faire en sorte de rendre compréhensible l’action de l’Etat, elle doit simplifier les procédures administratives, développer l’administration électronique et participer à la dématérialisation des démarches administratives. III – Le comité interministériel d’audit des programmes (CIAP)

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Il s'agit d’une institution composée de hauts fonctionnaires appartenant aux grands corps de contrôle de l’Etat. Elle est présidée par un inspecteur général des finances. Sa fonction est de garantir la qualité des projets de programme, autrement dit de garantir la pertinence des objectifs et des indicateurs de résultat qui leurs sont associés et qui seront intégrés dans le projet de loi de finance. Section 3 : Des principes budgétaires garant de la transparence Dans tout régime démocratique, la recherche de la transparence financière est un objectif central. Cette recherche est dominée par la mise en avant d’un principe qui est celui de la clarté des documents budgétaires, et cela pour que les décisions prises par les parlementaires ne soient pas faussées par un manque d’information ou par des informations inexactes. Par ailleurs, la transparence est également recherchée pour pouvoir suivre l’exécution du budget et pour être en mesure de juger de la régularité et de la sincérité des comptes publics. Cela a nécessité la mise en place de nombreux principes depuis le début du XIXème siècle. I – Le principe de spécialité budgétaire Ce principe est né sous la Restauration. Il signifie que l’on détaille les crédits, qu’on spécialise les crédits par catégories de dépenses. Actuellement, les crédits sont ouverts par missions et par programmes, et l’ont dit que l’unité de spécialité est le programme. Les crédits sont spécialisés par programme. II – Le principe de l’universalité budgétaire Ce principe comporte deux règles : - La règle de non-affectation : elle consiste à imputer l’ensemble des recettes sur l’ensemble des dépenses. Autrement dit, il n’est pas autorisé d’affecter une recette particulière à une dépense particulière. Cette règle est souvent transgressée car certains crédits sont affectés à certaines dépenses. C’est par exemple le cas des budgets annexes.

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- La règle de non-compensation : elle est aussi parfois qualifiée de règle du produit brut. Elle consiste à interdire la compensation d’une dépense par une recette. Les recettes et les dépenses doivent figurer pour l’intégralité de leur montant au budget, elles ne peuvent être compensées. Ainsi, dans le cas où un contribuable est un fournisseur de l’Etat, d’un côté ce contribuable est redevable de ses impôts envers l’Etat, d’un autre côté l’Etat lui doit le prix de la prestation qui lui a été rendu par ce contribuable. Pour simplifier les choses pour nos cerveaux de larves atrophiées, il est possible de faire la différence entre les sommes dues d’un côté par le contribuable, d’un autre côté par l’Etat, et celui qui resterait redevable verserait la différence. En fait, cette possibilité est interdite, on ne peut compenser. Il faut que d’un côté le contribuable règle sa dette, et que de l’autre côté l’Etat règle la sienne au contribuable. III – Le principe de sincérité budgétaire Ce principe a été introduit par la LOLF. Selon ce principe, les lois de finance doivent présenter de façon « sincère » les ressources et les charges de l’Etat. Les ressources ne doivent alors pas être surestimées et les dépenses ne doivent pas être sous-estimées. Ce principe de sincérité s’applique également aux comptes de l’Etat. La comptabilité de l’Etat doit donner ce que l’on appelle une image fidèle de son patrimoine et de sa situation financière. Ce principe est donc à la fois budgétaire et comptable. La Cour des comptes a pour fonction de certifier la sincérité des comptes de l’Etat. IV – Le principe d’unité budgétaire A – Définition Selon la règle de l’unité budgétaire, l’ensemble des dépenses et des recettes doit être présenté dans un seul document. Cela a pour objectif de permettre aux élus d’avoir une vue globale exhaustive des prévisions budgétaires. Cette règle pose deux problèmes. 1 – Le document budgétaire lui-même

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Le budget de l’Etat est présenté en trois parties : - Budget général, - Budgets annexes, - Comptes spéciaux. Si la quasi-totalité des recettes et des dépenses figurent bien au budget général, d’autres recettes et d’autres dépenses sont cependant inscrites aux budgets annexes et aux comptes spéciaux. Par conséquent, le budget de l’Etat n’est pas réellement unifié (notons que ces saloperies de budgets annexes et de comptes spéciaux sont tout de même fournis, le seul problème est en réalité qu’il n’y a pas une colonne « recettes » et une colonne « dépenses »). 2 – Présentation d’ensemble de tous les comptes publics (Etat, collectivités territoriales et organismes de sécurité sociale). Il n’existe aucun document centralisant toutes les opérations réalisées par les collectivités territoriales, l’Etat et les organismes de sécurité sociale. On s’efforce actuellement de trouver les moyens de consolider les opérations financières de ces trois catégories d’acteurs. B – Les grandes catégories du budget de l’Etat 1 – Le budget général Il comprend environ 95% du budget de l’Etat. Les recettes sont inscrites globalement, aucune d’entre elles n’est affectée à une dépense particulière (non-affectation). 2 – Les budgets annexes Ils retracent des opérations effectuées par les services de l’Etat qui n’ont pas de personnalité morale et dont l’activité consiste à produire des biens ou des services qui donnent lieu au paiement d’impôts. Par conséquent, les budgets annexes ont été créés pour traiter à part des opérations commerciales de l’Etat. On isole certains services publics et les dote d’un budget propre appelé budget annexe. Ce budget figure en annexe du budget général. Il en existe actuellement deux : le budget annexe contrôle et exploitation aériens et le budget annexe publications officielles et informations administratives.

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Ils doivent être votés en équilibre. Si un excédent est dégagé, l’excédent est reversé au budget général. S’il y a un déficit, il sera comblé par une subvention d’équilibre du budget général. 3 – Les comptes spéciaux Ils enregistrent les opérations que l’on a voulu individualiser en raison de leur caractère spécifique, généralement temporaire. A la différence des budgets annexes, leur solde peut être excédentaire ou déficitaire et ce solde est reporté d’une année sur l’autre. Chapitre 3 : L’intégration des finances de l’Etat, des collectivités locales et des organismes de sécurité sociale Se pose aujourd’hui la question d’une vision d’ensemble des finances publiques afin d’en contrôler l’évolution et par cela de contrôler l’évolution du déficit public. L’Etat s’est fixé pour ses dépenses une norme d’évolution de ses dépenses : le taux d’inflation. Il souhaiterait que cette norme de dépenses puisse s’appliquer aux autres catégories des finances publiques et notamment aux dépenses des collectivités locales. Section 1 : La maîtrise des dotations de l’Etat allouées aux collectivités locales I – Les subventions allouées par l’Etat aux collectivités locales On appelle cela les concours de l’Etat. Ils sont de l’ordre d’environ 75 milliards d’euros. L’Etat accorde aux collectivités locales deux catégories de subventions. D’une part les subventions de fonctionnement, d’autre part les subventions d’investissements. Les dotations de fonctionnement servent à financer les dépenses courantes des collectivités locales (dépenses…de fonctionnement !). Parmi ces subventions, la plus importante s’appelle la dotation globale de fonctionnement. Elle représente environ 40 milliards d’euros. Elle est accordée aux communes, aux départements et aux régions. Les dotations d’investissement servent à financer les dépenses d’équipement (routes, etc.). Il en existe principalement deux : la

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dotation globale d’équipement, versée aux communes dont la population est inférieure à 20 000 habitants, ainsi qu’aux départements. La seconde est le fonds de compensation de la TVA. Les collectivités locales sont considérées comme des consommateurs et supportent par conséquent, comme tout consommateur final, la totalité de la TVA. Elles ne peuvent pas récupérer la TVA qu’elles ont payée lors d’un achat sur la TVA qu’elles auraient encaissé lors d’une vente comme c’est le cas pour les entreprises. Cela est incohérent car la dotation est équivalente à environ 20% du budget des collectivités pour l’achat d’équipement…soit le montant de la TVA. C’est pourquoi le fonds de compensation de la TVA consiste à rembourser aux collectivités locales la TVA qu’elles ont payé à leur fournisseur lorsqu’elles ont fait l’acquisition d’un bien d’équipement. Ce remboursement ne concerne que les dépenses d’investissement. Elle n’est pas remboursée lorsqu’elle concerne les dépenses de fonctionnement. II – Les dispositifs de régulation A – Le contrat de solidarité L’Etat a mis en place un dispositif qui vise à encadrer l’évolution de la plupart des dotations : le contrat de solidarité. Il consiste à placer dans ce qu’on appelle une enveloppe (un morceau de papier replié sur lui même afin d’accueillir un bout de papier) la plupart des dotations et à faire évoluer le montant de cette enveloppe en fonction de l’évolution prévue des prix à la consommation. Le contrat de solidarité s’inscrit dans une logique d’ensemble qui a pour objectif de maitriser les dépenses publiques. B – La Conférence nationale des finances publiques Il s'agit d’une institution créée par un décret du 5 mai 2006. Elle réunit chaque année les représentants des trois grandes composantes des finances publiques (Etat, collectivités locales et organismes de sécurité sociale). Elle a pour fonction de proposer les moyens de maîtriser les dépenses publiques et la dette publique. C – La Conférence nationale des exécutifs

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Cette institution a été créée le 4 octobre 2007. Elle a pour mission de faire participer les collectivités territoriales à l’élaboration des normes qui les concernent ainsi qu’à la réforme de la fiscalité locale. Il s'agit d’un lieu de concertation. Cette institution comprend les ministres concernés par les affaires locales (ministres des finances, de l’intérieur, de l’écologie, et des affaires européennes), ainsi que par les représentants des trois grandes associations d’élus locaux (association des maires de France, assemblée des départements de France et association des régions de France). On y trouve également le président du comité des finances locales et celui du Conseil supérieur de la fonction publique territoriale. Le président de cette Conférence est le Premier ministre. Sont donc créés récemment des institutions entre les différents acteurs financiers publics. Section 2 : La maitrise des finances sociales Elles représentent plus de 450 milliards d’euro (plus que l’Etat ou les collectivités locales). Elles ne font qu’augmenter depuis une trentaine d’années. I – Les contraintes liées aux évolutions de la démographie A – Les problèmes posés Ces problèmes concernent essentiellement la question de ces enfoirés de retraités. L’allongement de la durée de la vie accroit la charge des retraites. Par ailleurs, la diminution du nombre des actifs a des effets sur les cotisations de retraite (baisse des cotisations), ce qui remet en question l’équilibre du régime des retraites. Des solutions sont proposées. - Chaque individu constitue sa propre retraite. Par exemple, en cotisant à ce que l’on appelle des fonds de pension. Ce sont des organismes privés qui placent l’argent de leurs cotisants et leurs servent une pension au moment de leur retraite. Ces fonds de pension sont assez limités, ils dépendent en effet aux placements qu’ils ont opérés, et certains d’entre eux sont ainsi remis en question par la crise financière actuelle.

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- Augmenter les cotisations qui pèsent à la fois sur les entreprises et sur les salariés. Le poids des prélèvements obligatoires étant déjà élevé (44% du PIB), cela pose problème en pratique. - Constituer des réserves pour plus tard. La Suède ou le Canada ont ainsi institué un fond national de retraite (pour pouvoir financer les retraites). Le Canada, pour financer ce fond, a institué une « surcotisation ». - La solution qui va être adoptée en France consiste à augmenter l’âge de la retraite. B – La progression des dépenses Le nombre de retraités va augmenter, ce qui est une source importante d’augmentation des dépenses. Ceux nés juste après la seconde guerre mondiale peuvent faire valoir leur droit à la retraite (60 ans). Ce phénomène va s’ajouter au fait que la proportion des personnes âgées de plus 60 ans a déjà augmenté de plus de 4% depuis 1946 et progresse actuellement de près de 5%/an. On estime qu’à partir de 2010, les plus de 60 ans seront plus nombreux que les moins de 20 ans. Le coût des prestations sociales va aller en s’accroissant pour deux raisons : - Allongement de la durée de vie. - Baisse, proportionnellement à autrefois, des salaires servant de base au calcul des retraites. C – L’évolution des recettes Elle ne sera pas plus importante car elle dépend du nombre des actifs et également de la situation de l’emploi. II – Les contraintes liées à la crise de l’emploi Le nombre de demandeurs d’emploi a des conséquences sur le niveau des dépenses sociales. Cela concerne autant l’Etat que les organismes de sécurité sociale. Section 3 : Quelles normes pour les collectivités locales et les organismes de sécurité sociale ?

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Depuis 1983, l’Etat s’est efforcé de ne pas augmenter ses dépenses dans des proportions supérieures aux évolutions du PIB, mais cette norme de dépenses a subi de très nombreuses exceptions. Ce n’est que depuis 2003 que cette norme qui consiste à faire évoluer les dépenses au rythme de l’inflation est respectée. Cependant, l’Etat souhaiterait que cette norme de dépenses soit étendue aux autres secteurs publics, et notamment aux collectivités territoriales. La réponse à la crise financière actuelle va nécessiter une intervention accrue de l’Etat et par conséquent une augmentation de ses dépenses. On se pose actuellement la question de dissocier les dépenses de l’Etat habituelles et ses dépenses exceptionnelles liées à la lutte contre la crise. Il serait question d’isoler les dépenses liées à la crise au sein d’une nouvelle mission du budget de l’Etat qui serait une mission spécifique dédiée à la lutte contre la crise. Chapitre 4 : La programmation pluriannuelle des finances publiques Une des innovations les plus importantes de ces dernières années en matière de finances publiques consiste dans le souci de contrôler la gestion publique, de la piloter. La question de la programmation des dépenses publiques dans le temps est centrale pour toutes les stratégies budgétaires contemporaines. La France vient d’instituer une programmation pluriannuelle pour les années 2009/2010/2011. Cette programmation concerne les dépenses de l’Etat. Par ailleurs, une révision de la Constitution de juillet 2008 a institué une nouvelle catégorie de lois, lesquelles sont les lois de programmation pluriannuelle des finances publiques. Une première loi de ce genre a été votée à l’automne dernier. Section 1 : Les enjeux de la programmation pluriannuelle Elle se heurte à une règle budgétaire importante qui est le principe d’annualité budgétaire. I – Le principe d’annualité budgétaire

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L’origine de ce principe est d’abord politique. Il tire ses origines du consentement de l’impôt. Lorsque les premiers impôts révolutionnaires ont été créés en 1790, il a été décidé qu’ils seraient levés pour une année. Cela concernait par conséquent les ressources, et il a été ensuite été étendu aux dépenses. A – Exposé du principe Pour l’Etat, la loi de finance initiale est établie chaque année avant le 31 décembre pour l’année civile çà venir, c'est-à-dire du 1er janvier au 31 décembre. L’exécution de ce budget se fait sur la même période. Les collectivités locales devraient normalement adopter leur budget avant la fin de l’année pour l’année suivante, mais elles sont autorisées à le voter jusqu’au 31 mars car elles ne possèdent pas toutes les informations nécessaires concernant leurs finances, qui leurs sont fournies par l’Etat, avant la fin de l’année. B – Les origines et les inconvénients du principe Ce principe a été institué à la Révolution afin qu’existe une régularité dans le temps qui n’existait pas sous l’Ancien Régime. On a considéré que la période (un an) n’était ni trop longue ni trop courte. Si elle était plus courte, les débats budgétaires seraient trop nombreux et si elle était plus longue, le contrôle du Parlement serait trop espacé dans le temps. Le problème qui s’est posé, par rapport à ce principe d’annualité, est que l’Etat est de plus en plus intervenu en réalisant des équipements de plus en plus importants. Or, la réalisation de ces équipements nécessitait parfois plusieurs années. En vertu du principe d’annualité, le budget n’autorise à dépenser que sur une année, ce qui voulait dire que pour réaliser de gros équipements il fallait voter chaque année pour la tranche à réaliser l’année suivante. On ne pouvait pas adopter l’ensemble de l’opération. De ce fait, les gros investissements étaient soumis aux fluctuations politiques, économiques ou financières. Ainsi, si une nouvelle majorité hostile à la poursuite des travaux entrait en fonction, elle pouvait faire cesser ces opérations car

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l’Etat n’était juridiquement engagé que pour une année. Il a par conséquent fallu mettre en place un dispositif permettant de poursuivre des travaux sur plusieurs années et d’engager l’Etat sur plusieurs années. Ce dispositif s’appelle les autorisations d’engagement. II – La pluriannualité travestie Dans notre droit budgétaire, la pluriannualité est généralement présentée de la manière suivante : l’annualité est la règle, la pluriannualité est l’exception. A y regarder de plus près, on s’aperçoit que des dépenses pluriannuelles existent sans qu’elles soient qualifiées comme telles. - La création d’emplois nouveaux dans la fonction publique. En effet, lorsque l’Etat crée un emploi dans la fonction publique, et qu’il recrute un fonctionnaire, il prend de fait un engagement pluriannuel car il s’engage à payer le traitement de ce fonctionnaire puis sa retraite et cela sur une longue durée. - La charge de la dette publique. En effet, lorsque l’Etat émet un emprunt, il s’engage à payer les intérêts pour toute la durée de l’emprunt. Par conséquent il s’engage dans un processus pluriannuel. Section 2 : Les outils classiques de la programmation pluriannuelle Traditionnellement, il existe deux dispositifs : les autorisations d’engagement d’une part, et les lois de programmation d’autre part. I – Les autorisations d’engagement Elles étaient autrefois qualifiées, avant la mise en œuvre de la LOLF, d’autorisations de programme. Ces autorisations instaurent une programmation des dépenses d’investissement et des dépenses de fonctionnement sur plusieurs années (ce dispositif s’applique pour toutes les dépenses de fonctionnement, excepté celles qui concernent les rémunérations des personnels). Si l’on était tenu de respecter le principe d’annualité budgétaire, il serait nécessaire dans le cas où l’on voudrait réaliser une dépense sur plusieurs années, de voter chaque année dans le cadre du budget la partie de la dépense concernant cette année, c’est-à-dire par exemple la partie de la dépense concernant les

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travaux devant être réalisés au cours de cette année (ex : pour 2009, on ne peut pas voter des investissements pour après 2009). L’Etat ne s’engage pas juridiquement au-delà d’une année, toujours en vertu de ce principe : ainsi, si par exemple un équipement ne peut être réalisé que sur plusieurs années, il pourrait être décidé de ne pas poursuivre les travaux, simplement parce que l’Etat s’engage juridiquement sur une année. D’autre part, si l’on inscrivait le total de la dépense sur 1 an cela augmenterait artificiellement puisque une partie seulement de ces dépenses serait réalisée sur l’année. Par conséquent, on a institué un dispositif qui permet à l’Etat de s’engager juridiquement sur plusieurs années. Ce sont les autorisations d’engagement. Ces autorisations sont accompagnées de ce que l’on appelle des crédits de paiement (CP). Ils correspondent au paiement de la dépense chaque année lorsque le travail a été fait. En résumé, les autorisations d’engagement (AE) sont pluriannuelles : elles engagent l’Etat sur la durée du programme. Cela signifie que l’équipement qui est prévu devra être réalisé et que les fonds pour le financer sont d’ors et déjà prévus. Ces fonds ne seront débloqués que par tranches au fur et à mesure de la réalisation des travaux. Ainsi, les sommes nécessaires sont inscrites au budget, votées (adoptées), ce qui est engage l’Etat et ce qui oblige chaque année à inscrire les crédits nécessaires au paiement du service fait par l’entreprise. Ces crédits qui sont inscrits chaque année et qui correspondent à la tranche du programme d’équipement qui devra être réalisée sont qualifiés de crédits de paiement. Ces derniers sont annuels. Ce sont les seuls pris en compte dans les charges du budget. Ils rentrent dans le calcul du solde budgétaire. II – Les lois de programmation Les lois de programme (ou lois de programmation / d’orientation) sont des lois qui définissent certains objectifs de l’action économique et sociale de l’Etat. Il ne faut pas les confondre avec les autorisations d’engagement. Ces lois n’ont aucun caractère obligatoire, il s’agit seulement d’indications qui n’engagent pas l’Etat. Ce sont des déclarations d’intention, formalisées dans un cadre législatif. Les lois de programme sont des lois ordinaires. Cependant, sous les IIIe et IVe Républiques, les lois de programme avaient la même valeur que le budget. C’est

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l’ordonnance du 2 janvier 1959 qui leur a retiré leur valeur budgétaire et qui les a limitées à des lois ordinaires. Il y a des lois de programmation pour l’éducation, la dépense, et ainsi de suite. Ce sont des lois ordinaires, et par conséquent elles sont le plus souvent non appliquées en raison de leur faible force. NB : Les autorisations d’engagement figurent dans le cadre des lois de finances, ce qui n’est pas le cas des lois de programme. Ces outils n’étaient pas suffisants pour développer une véritable stratégie budgétaire. Ces outils ne concernaient que quelques éléments. Il fallait faire en sorte de dépasser l’annualité. On pouvait recourir à la pluriannualité en Grande-Bretagne, mais pas en France avant 2008. Section 3 : La nouvelle programmation pluriannuelle Les dispositifs que l’on vient de voir existent toujours. A partir de 2008, on en a simplement ajouté de nouveaux. Cette nouvelle programmation est représentée par une programmation des dépenses de l’Etat mais aussi une programmation de l’ensemble des finances. I – La programmation pluriannuelle : une réforme gestionnaire La stratégie budgétaire de l’Etat s’enracine (ou s’organise) aujourd’hui dans la révision générale des politiques publiques. Cette révision générale des politiques publiques (RGPP) sert de fondement à l’élaboration d’une programmation sur trois ans (triennale) des dépenses de l’Etat. Ce dispositif ne fait pas l’objet d’une décision législative qui remettrait en question le principe d’annualité budgétaire. Il s’agit d’un dispositif gestionnaire qui vise à rationaliser la gestion budgétaire de l’Etat. Cette programmation est élaborée par les services du ministère du budget dans le cadre de la préparation du budget. Seules les prévisions concernant la 1ère année font l’objet d’un vote au Parlement dans le cadre de l’adoption de la loi de finances. Cette programmation a été préconisée par un rapport au gouvernement qui concernait la mise en œuvre de la LOLF. Ce rapport a été écrit par Alain Lambert (UMP) et Didier Migaud (PS) qui sont les initiateurs de la LOLF. Par ailleurs, la programmation budgétaire pluriannuelle a officiellement été annoncée par le président de la République le 12 décembre 2007 lors du premier conseil de

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modernisation des politiques publiques qui s’est tenu au moment de la présentation de la première tranche de la RGPP. Les propos du Président de la République étaient les suivants : « Nous mettrons en place pour 2009 / 2011 un budget pluriannuel cohérent avec notre trajectoire de finances publiques. Il s’agit d’une révolution dans notre fonctionnement administratif ». Cela faisait une quinzaine d’année que l’on parlait de cette réforme mais elle ne s’était jamais faite. Elle a été pour la première mise en œuvre lors de l’élaboration du budget 2009 sur une période qui correspond à celle de la RGPP (3 ans). Ce dispositif ne remet cependant pas en question le principe d’annualité budgétaire car seules les lois de finances annuelles ont une valeur contraignante et continuent à être adoptées à l’automne par le Parlement. La différence est que, bien que discutée et soumise à l’adoption des parlementaires chaque année, les projets de lois de finances s’inscrivent maintenant dans le cadre d’une programmation triannuelle. D’autre part, alors que les lois de finances concernent les dépenses et les recettes, la programmation pluriannuelle ne fixe quant à elle que des plafonds de dépenses. Cette programmation qui se limite aux dépenses de l’Etat concerne les missions qui figurent au budget (les politiques publiques, donc). Le périmètre de cette programmation comprend les crédits des missions figurant au budget général. On qualifie cette programmation de programmation semiglissante car le dispositif fonctionne de la manière suivante : En premier lieu un plafond global de dépenses est fixé pour chacune des années. Ce plafond est déterminé en fonction de ce que l’on appelle une norme de dépenses. Il s’agit actuellement du taux d’inflation prévu pour l’année en question. Ce plafond fait l’objet d’une programmation ferme, fixe, immuable, sur trois ans (excepté la possibilité d’une modification liée à une variation du taux d’inflation). En second lieu des plafonds sont fixés par missions. Ces plafonds sont fermes pour les deux premières années mais révisables la troisième année en fonction des contraintes de cette dernière. En troisième lieu sont enfin déterminés les crédits répartis par programme (plafonds par programmes) En ce qui concerne les programmes, les crédits sont fermes la première année mais modifiables les deux années suivantes. Cette programmation peut être qualifiée de semi

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glissante puisqu’on peut faire glisser des dépenses d’une année sur l’autre. La troisième année sert de fondement à la programmation pluriannuelle suivante (pour 2009/2011, la suivante sera 2011/2013). II – La loi de programmation pluriannuelle des finances : une réforme politique Une loi de programmation pluriannuelle des finances publiques a été instituée par la loi de révision constitutionnelle du 23 juillet 2008. Cette loi de programmation n’abroge cependant pas les lois dont on a parlé tout à l’heure. Selon l’article 34 révisé de la Constitution, les lois de programmation déterminent les objectifs des actions de l’Etat. De plus, les orientations pluriannuelles des finances publiques sont définies par des lois de programmation. Elles s’inscrivent dans l’objectif d’équilibre des comptes des administrations publiques. Autrement dit, la programmation pluriannuelle des finances publiques est associée à la réalisation de l’équilibre des dépenses et des recettes publiques. Par ailleurs, cette programmation concerne l’ensemble du secteur financier public, c’est-à-dire l’Etat, les collectivités locales et les organismes de sécurité sociale. Autrement dit, cet article s’inscrit dans la logique des critères de convergence et du pacte de stabilité institué dans le cadre de l’UE. On a ainsi créé une catégorie de lois qui va complètement dans le sens de l’UE. Il faut toutefois souligner que cette loi de programmation pluriannuelle des finances publiques est comme toutes les lois de programmation dépourvue de force obligatoire sur le plan financier. Ce ne sont pas des lois de finances mais bien des lois ordinaires. Elles peuvent donc être ou non appliquées. Néanmoins, il était important de donner un caractère solennel par un vote des parlementaires non seulement aux engagements pris dans le cadre du pacte de stabilité et de croissance mais également à une logique nouvelle de gestion des finances publiques. Par ailleurs, il est aussi important que la maîtrise des finances publiques soit conçue de manière consolidée / globale, ce qui signifie que soient prises en considération non seulement les dépenses et les recettes mais les dépenses et les recettes de l’ensemble du secteur public (pas seulement l’Etat). On ne peut plus considérer aujourd’hui les finances de l’Etat de manière indépendante de celles des collectivités locales et des organismes de sécurité sociale. C’est la raison pour laquelle le texte

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constitutionnel (l’article 34) fait référence aux finances publiques dans leur totalité. C’est la même chose pour l’équilibre des comptes publics qui doit être considéré de manière globale. NB : il faut souligner que la conférence nationale des finances publiques, laquelle réunit les représentants des différentes composantes du système financier public, va dans le sens d’une globalisation, c’est-à-dire d’une consolidation des comptes publics. Chapitre 5 : La mobilisation des ressources fiscales Section 1 : Une grande variété de prélèvements obligatoires I – Définition de l’impôt et des autres prélèvements obligatoires La notion de prélèvement obligatoire est utilisée en France pour désigner d’une part les impôts prélevés au profit de l’Etat, ou des collectivités locales, ou encore des organismes de sécurité sociale, et d’autre part les cotisations sociales prélevées au profit des organismes de sécurité sociale, non considérées comme des impôts. En effet, on considère que les impôts sont sans contrepartie. Or les cotisations sociales ont une contrepartie (comme c’est le cas pour le remboursement des médicaments par exemple). L’ensemble des prélèvements obligatoires représente environ 44% du PIB et plus de 20% sont représentés par les prélèvements sociaux. Il est très difficile de comparer les prélèvements obligatoires d’un pays à un autre car les services publics rendus par le secteur public ne sont pas identiques. En effet, il y a des pays où la couverture sociale est nulle alors qu’en France elle est au contraire très importante. Les débats les plus nombreux concernant la fiscalité sont relatifs à la justice fiscale et à la simplification des systèmes fiscaux. II – Caractéristiques et évolutions des impôts L’impôt constitue l’essentiel des ressources de l’Etat avec environ 300 milliards d’euros. Il représente 90% des ressources définitives de l’Etat. Le reste des recettes est constitué par des revenus provenant de l’exploitation des domaines publics et privés. Les principaux impôts d’Etat sont la TVA (qui représente 45% du total des impôts d’Etat), l’impôt sur le revenu des personnes

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physiques, l’impôt sur les sociétés et la taxe intérieure sur les produits pétroliers. Ce sont les quatre principaux impôts d’Etat. Il y en a bien d’autres (230 environ). L’impôt représente environ la moitié des ressources des collectivités locales. Les principaux impôts locaux sont la taxe professionnelle, la taxe d’habitation, la taxe foncière sur les propriétés bâties et non bâties. Il en existe beaucoup d’autres tel que la taxe sur la publicité, sur les eaux minérales, sur les permis de conduire, la taxe de séjour (généralement comprise dans le prix des chambres d’hôtels), la taxe sur les remontées mécaniques. En résumé, il y a des taxes à peu près sur tout (sauf l’air). Les organismes de sécurité sociale sont financés à la fois sur des impôts et par des cotisations sociales. Ces dernières sont dues à la fois par les salariés et par les employeurs. Les impôts sociaux sont maintenant une source de financement de plus en plus importante de la sécurité sociale. Parmi ces impôts, le plus important est celui sur le revenu des personnes physiques qui s’appelle la contribution sociale généralisée. Section 2 : Les résistances à l’impôt I – Les révoltes fiscales C’est un phénomène universel. A – Les révoltes fiscales en France Dans la période contemporaine, deux grandes révoltes fiscales ont eu lieu en France. Il s’agit du mouvement Poujade d’abord puis du mouvement Nicoud. Ce sont des mouvements qui ont profondément marqué l’administration fiscale française. Ils ont été, notamment le second mouvement, des mouvements très violents de révoltes contre l’administration fiscale. S’agissant du mouvement Poujade, il s’agit d’un mouvement de contestation de l’impôt qui s’est développé dans les années 1950. Il a été créé par un commerçant du centre de la France qui s’appelait Pierre Poujade, qui a fondé l’Union de défense des commerçants et des artisans (l’UDCA). Son objectif a été de s’opposer aux contrôles fiscaux qui venaient d’être mis en place. En fait, si le prétexte a été fiscal, il s’agissait surtout d’une réaction aux premières transformations de l’économie et plus particulièrement à une concentration du commerce de

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distribution et par conséquent à une disparition des petits commerces. L’une des actions les plus spectaculaires de l’UDCA a été d’empêcher les agents du Fisc d’effectuer leur contrôle. Poujade demandait à ce qu’on se place devant les entreprises qui faisaient l’objet du contrôle. Le commerçant imposé n’était pas sanctionné car il disait de pas refuser l’impôt, ce qui était une ruse. D’où une grande adhésion à l’UDCA. Par ailleurs, le mouvement Poujadiste a bénéficié du mode de scrutin de la IVème République, c’est-à-dire de la représentation proportionnelle. L’UDCA présenta des candidats aux élections, à la chambre des députés et obtint en 1956 une cinquantaine de sièges, ce qui lui permettait de peser sur les décisions politiques. Ce n’était donc pas seulement un syndicat mais aussi une force politique et sociale. Avec la Ve République et son nouveau mode de scrutin, l’UDCA n’obtint aucun siège à l’Assemblée nationale. Il disparut par conséquent en tant que force. S’agissant du mouvement Nicoud, il a été semblable au mouvement Poujade (il réunissait donc des commerçants et des artisans) et s’est développé au cours des années 70. Il s’agit du comité inter-professionnel de défense des commerçants et artisans (CID). Le CID fut créé en 1969 par un commerçant de la région Nord-Alpes, Gérard Nicoud. Ce mouvement s’est caractérisé par des actions parfois très violentes et spectaculaires contre les agents des impôts. Il kidnappait parfois des agents, les ligotait et les attachait toute la nuit à des arbres (sic !), plaçaient des bombes devant les portes de députés giscardiens (on raconte qu’une petite fille a failli un jour être blessée suite à une explosion d’une porte, et le mouvement Nicoud a fait porter des fleurs pour s’excuser). A un moment, Nicoud a été emprisonné et les militants, descendus dans la rue, défilaient en criant « pas de Nicoud, pas de sous » (il y avait donc une menace d’une grève de l’impôt). Nicoud a finalement été libéré suite à la pression populaire. Ce mouvement n’a jamais eu de représentation politique. Enfin, certains militants devinrent maoïstes, voire marxistes-léninistes et le mouvement finit par disparaître de luimême. B – Les révoltes fiscales aux Etats-Unis C’est sur le plan doctrinaire ou théorique que s’est développée la résistance à l’impôt. Des doctrines antifiscales sont nées et se

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sont développées à la fin des années 1970, et cela suite au mouvement du développement des théories néolibérales classiques (déjà étudiées, voir infra). On s’est alors focalisé sur le rejet de l’impôt sur le revenu des personnes physiques, beaucoup plus que les impôts sur les dépenses (la TVA n’était pas mal considérée car elle n’avait pas d’impact réel sur les entreprises). Les critiques se sont concentrées sur la pression fiscale trop importante, sur la progressivité de l’impôt, enfin sur la complexité des problèmes fiscaux. L’impôt était considéré comme un frein à l’investissement dans les entreprises. Un vaste mouvement de refus s’est ainsi développé à la fin des années 70 du côté des classes moyennes. Il était soutenu par des associations qui étaient pour la plupart très marquées par les théories économiques libérales classiques. Ce mouvement antifiscal a connu son apogée en Californie avec l’adoption le 6 juin 1978 par les deux tiers des électeurs d’un amendement à la Constitution appelé la proposition 13. Cet amendement a réduit considérablement l’impôt foncier de l’Etat de Californie en instituant un plafonnement du taux de cet impôt à 1% de la valeur marchande du bien. Il s’agit là d’une première forme de constitutionnalisation du taux de pression fiscale. Cet amendement avait été soutenu par un sénateur républicain (Jarvis) ainsi que par le futur président des USA (Ronald Reagan). Ce dispositif a ensuite été institué dans 22 autres Etats des USA. II – Les autres modes de résistance à l’impôt A – La fraude fiscale Elle constitue un anti-fiscalisme individuel dont l’ampleur est évaluée à 15 ou 20% des recettes fiscales en France. On distingue la fraude de l’évasion fiscale. La fraude est en effet un délit puni pénalement, et consiste à se soustraire intentionnellement à l’impôt. Il faut donc prouver l’intention. L’évasion fiscale consiste quant à elle à utiliser au maximum les possibilités d’atténuer la charge fiscale sans pour autant enfreindre la loi. On parle d’optimisation fiscale. B – La grève de l’impôt

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La grève de l’impôt a parfois été proposée par des partis politiques ou par des mouvements anti-fiscaux. On avait demandé par exemple à des militants de s’opposer à la construction d’une centrale nucléaire. Généralement, la grève de l’impôt n’a jamais fonctionné. C – La fuite devant l’impôt Cette délocalisation des contribuables concerne surtout les sportifs de haut niveau. Elle consiste à délocaliser leurs activités dans un autre pays à plus basse pression fiscale. Le siège de leurs activités se trouve alors dans des paradis fiscaux, Etats où la pression fiscale est parfois quasiment nulle. La fuite devant l’impôt est également une réduction des activités professionnelles : on a rencontré certains individus qui estimaient que, passé un certain stade, ils paiyaient trop d’impôts, et qu’il valait donc mieux arrêter de travailler. D – L’économie souterraine L’économie souterraine est ce qu’on appelle le travail clandestin, c’est-à-dire des activités non déclarées ou encore des échanges de services entre professionnels. Le travail clandestin est aujourd’hui considérablement développé dans tous les Etats du monde. C’est la terreur des Etats actuels car il est difficile à arrêter. Section 3 : Les transformations de l’impôt I – Les transformations de la nature de l’impôt Aujourd’hui, la matière imposable et l’impôt lui-même se transforment sous la pression de différents facteurs : la mondialisation des échanges, la délocalisation des contribuables, le développement du commerce électronique, la prolifération des industries de services, l’instabilité des systèmes fiscaux et financiers. 1ère conséquence : la mobilité de la matière imposable au-delà des frontières pose le problème de la fraude fiscale d’une part et du poids de plus en plus lourd de l’impôt supporté par les contribuables qui n’ont pas les moyens ni de se délocaliser ni d’optimiser leur fiscalité. 2e conséquence : le développement du commerce électronique pose de très grands

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problèmes en ce qui concerne le paiement de la TVA. On note en effet une fraude à la TVA. II – La réforme fiscale et la recherche du bonheur A – Les utopies fiscales Ce sont des doctrines qui proposent un impôt idéal : un impôt juste, simple et rentable. Par ailleurs, cet impôt remplacerait tous les autres impôts. Il s’agirait donc d’un impôt unique. Quelles sont les propositions d’impôts uniques qui ont été faites à l’époque et aujourd’hui ? L’impôt unique sur la terre : Cette doctrine a été conçue initialement par les physiocrates au XVIIIe siècle. La terre était perçue comme la source de la richesse économique. Ainsi, il était logique de taxer la propriété foncière. Cette idée fut reprise au XIXe siècle, aux Etats-Unis, par Henri George (1839 – 1897). George voulait instaurer un régime fiscal juste en instituant un impôt unique qui aurait pour vertu de lutter contre la pauvreté. Il estimait qu’en taxant lourdement la propriété foncière, on allait décourager les investisseurs d’investir dans ce domaine et les conduite à investir dans l’industrie, ce qui aurait pour effet de créer les emplois et par conséquent de lutter contre la pauvreté. Pour George, il s’agissait de supprimer tous les impôts et de les remplacer par un seul impôt sur le foncier. L’impôt unique sur le capital : Il a été proposé par un fabricant de chocolats (considéré à l’époque comme un médicament) qui s’appelait Menier à la fin du XIXe siècle. C’était un libéral. Il estimait qu’il fallait supprimer tous les impôts et les remplacer par un impôt sur le capital. Cette idée a été reprise dans la période contemporaine, sous un angle lui aussi libéral.

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