Modzik 43

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N°43

Fr€6.00 / 6.90£

L 17157 - 43 - F: 6,00 € - RD Giorgio Moroder - Marques ‘ Almeida - Soko - Jimmy Page - Paul Smith - Charlotte OC - Curtis Harding Mark Ronson - Yelle - Bianca O’Brien en David Bowie




www.C OTE LA C .FR



EFFRONTÉ DEPUIS 1973

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Édito

M10

Bonjour chers lecteurs. This is Modzik n°43. Bonne lecture ! Suivez-moi sur instagram :

@norabaldenweg

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Rédactrice en chef¬Nora Baldenweg

MODZIK


117°17’35”W

ALIVE IN CALIFORNIA

T H E

T I M E

T E L L E R

33°2’35”N

N i x o n S t o r e , 1 4 r u e Fr o i s s a r t , 7 5 0 0 3 Pa r i s - n i x o n . c o m


Sommaire 34 M12

10 Edito 12 Sommaire 14 Ours 16 Contributeurs 18 Modzik Diary 20 Things we love 29 Emilie Luc Duc 30 Julien David x Quiksilver 60 31 Black XS 32 Marques ’ Almeida Mark Ronson 36 Etienne Derœux 38 Nehera 39 Alice Lewis 40 Hanni El Khatib 42 Kid Francescoli 43 Harmony Paris Ami Sioux Ami Sioux partage sa vision du monde 52 Curtis Harding et ses moments de vie. Soko La chanteuse Soko rencontre le créateur Alexandre Mattiussi 70 Yelle pour un déjeuner entre amis. 84 Charlotte OC Mode Totally 70s. Ce qu’il faut retenir de cette 92 Eleonore, Jeanne et Solène saison. 104 Bold as Love Bianca is Bowie À l’occasion de l’exposition David Bowie is, Bianca O’Brien se met 124 What’s in our bag ? dans la peau du chanteur. 130 Dream pop Paul Smith x Jimmy Page Le créateur et la rock-star anglaise se rencontrent pour 136 Transmusicales de Rennes une interview mythique. 104 142 Giorgio Moroder 146 Futurama 152 Albumarama 154 Thomas Erber 70 156 Tina Turner & Ike 158 Pat La Boite 160 Art de la fin 161 Abonnement 162 Numéro lecteurs

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Veste Chanel. T-shirt Calvin Klein. Bague Pamela Love. Maquillage¬Damian Garozzo @ Jedroot avec les produits M.A.C COSMETICS Coiffure¬Sébastien Le Corroller @ Airport Agency Assistant Photo¬Carl Smith Thomas Assistante Stylisme¬Priscilla Teko Shooté au Studio Montmartre,142, rue Montmartre, 75002 Paris

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En couverture¬Soko Photo¬Laurent Humbert Stylisme¬Nicolas Kuttler


letempsdescerises.com


Ours

FONDATEUR ET EDITEUR Anatole Amavi

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RÉDACTRICE EN CHEF Nora Baldenweg DIRECTION ARTISTIQUE & CONCEPTION GRAPHIQUE Laurent Burte (L+B) RÉDACTRICE AT LARGE Mimi Xu DIRECTRICE MODE Isabelle Decis RÉDACTEUR MODE Nicolas Dureau RÉDACTEURS MUSIQUE Guillaume Cohonner Joss Danjean RÉDACTRICE BEAUTÉ Irina Munz RÉDACTRICE-GRAPHISTE Clémence Gouyon COORDINATION MAGAZINE Aurore Hennion PRODUCTION PÔLE IMAGE Léa Canevese

MODZIK est un bimestriel édité par la maison d’édition B-E LAB , RCS 484 237 417 Au capital social de 15 000 euros. Siège social et rédaction : 6/8, passage des Récollets, 75010 Paris DISTRIBUTION France MLP et Paperlab Export Pineapple Média CONSEIL EN DIFFUSION SPÉCIALISÉE IPS Nadia Mebarek nmoualek@ipsdiffusion.com 189 rue d’Aubervillers 75018 Paris ASSISTANTE DE DIRECTION AVM-Anastasia Machutadze

CORRESPONDANTE LONDRES Jeanne Hancock

ADMINISTRATION, GESTION, COMPTABILITÉ David El Baz, Patrick Monmeyran

SECRÉTARIAT DE RÉDACTION Nathalie Grisoni

PRIX DE VENTE AU NUMÉRO 6 euros

CRÉATION DU LOGO Nicolas Ouchenir

ABONNEMENTS & ACHAT www.modzik.com www.relay.com

WEB www.modzik.com web@modzik.com Sébastien Doze, Angélique Destre, Sixtine Gérard-Tasset tél.: 09 50 30 24 89 E-mail : info@modzik.com ONT CONTRIBUÉ À CE NUMÉRO Rédacteurs : Nora Baldenweg, Guillaume Cohonner, Joss Danjean, Angélique Destre, Nicolas Dureau, Thomas Erber, Jeanne Hancock, Aurore Hennion, Pat La Boite, Bianca O'Brien, Alice Pfeiffer, Elen Pouhaër, Philippe Pourhashemi, Ami Sioux, Nadège Winter. Photographes : Alex Antitch, Nora Baldenweg, Antonin Guidicci, Laurent Humbert, Markus Lambert, Philipp Mueller, Manuel Obadia-Wills, Emma Picq, Estelle Rancurel, Rachel Rebibo, Ami Sioux, Elise Toïdé, Graham Turner, Christoph Wohlfahrt Stylistes : Yasmina Benabdelkrim, Isabelle Decis, Nicolas Dureau, Yasmine Eslami, Théophile Hermand, Nicolas Kuttler, Leonie von Lieres, Guido Werth. Nous remercions aussi Monique Baumann, Christophe Brunnquell, Larry Dirt, Thomas Erber, Alexandre Geindre, Zoé Martin, Alexandre Mattiussi et Hakim Mazouz .

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PUBLICITÉ CAPTIF & HORS CAPTIF B-E LAB 6/8, passage des Récollets, 75010 Paris Tél. : 01 42 78 82 10 Directrice de communication, publicité et marketing Delphine Caredda : delphine@modzik.com Chargée de développement Lou Cheyenne-Méheust lou@modzik.com

IMPRESSION Jprint (Espagne) COMMISSION PARITAIRE : 0914K89366. Dépôt légal à parution. No. ISSN : 1623-6289 All rights reserved. Dépôt légal à parution – septembre 2012 Commande en ligne : www.modzik.com Numéro Mars-Avril 2015

Les indications d’adresses, de marques et de prix sont données à titre informatif, sans but publicitaire. La reproduction, même partielle, des articles et illustrations parus dans MODZIK est interdite. MODZIK décline toute responsabilité pour les documents remis. Les manuscrits non insérés ne sont pas rendus. Les textes, illustrations et photographies publiés engagent la seule responsabilité de leurs auteurs et leur présence dans le magazine implique leur libre publication.



Contributeurs

Laurent Humbert Laurent Humbert est né dans le Sud de la France où très tôt, il se passionne pour la photo. Alors qu'il a à peine 12 ans, sa famille et ses amis seront ses premiers modèles. Après des études universitaires en communication à Nice, Laurent s'installe à Paris pour être au plus près de la création photographique. Très vite, les rencontres et projets personnels se succèdent. Son style aux inspirations éclectiques mêle habilement graphisme et douceur, élégance et pureté. Esthète, il prône la beauté comme valeur première et il concentre son travail autour de la mode et des portraits.

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Alexandre Mattiussi Alexandre Mattiussi est le fondateur et directeur artistique de la marque AMI. C'est en 2011 après avoir fait ses armes chez Dior, Marc Jacobs ou encore Givenchy Homme qu'il décide de lancer sa carrière solo. En 2013, il devient le premier créateur de mode masculine à remporter le prestigieux prix de l’Andam. Depuis, Alexandre enchaîne les collections et collaborations dans le bon goût et la positive attitude, tout en réussissant à nous surprendre et nous émouvoir à chaque fois. Chanson préférée du moment ? « Hope », de Kid Wise. Chanson préférée des 70s ? « En Chantant » de Michel Sardou. Ce que tu as envie de porter ce printemps ? Un costume de fiançailles. Envie du moment ? Aimer. Pour Modzik, Alexandre se prête au jeu de l’interview avec Soko en page 68. Ami Sioux Ami Sioux est photographe et musicienne. Elle gravite entre les Santa Monica Mountains, Tokyo et Paris. Chanson préférée du moment ? « Keep Pushing On », de John Maus. Chanson préférée des 70s ? « Connection », de Can. Ce que tu as envie de porter ce printemps ? Des bottines à lacets, des jupes et des chemises boutonnées jusqu'en haut. Envie du moment ? Trouver un éditeur pour mon Map Book et un bassiste ainsi qu'un batteur pour mon prochain album… Retrouvez son portfolio personnel en page 44.

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Markus Lambert Markus Lambert est un photographe allemand qui vit entre Londres et Paris. Après avoir travaillé plusieurs années en tant que coiffeur reconnu à travers toute l’Europe, Markus s’est tourné vers la photographie, sa vocation était trouvée. Son succès a été immédiat et son don vite reconnu par la profession, ce qui lui a valu une progression rapide dans le milieu. Son style romantique et glamour permet à Markus de capturer de manière fantaisiste et moderne le travail des créateurs et de sublimer les coupes et les tissus. Chanson préférée du moment ? « Chandelier », de Sia. Chanson préférée des 70s ? « You've Got a Friend », de Carole King. Ce que tu as envie de porter ce printemps ? Du noir. Envie du moment ? La santé et la paix. Pour Modzik, Markus signe la série « Bianca is Bowie » en page 116.

Chanson préférée du moment ? « Nemesis » de Benjamin Clementine. Chanson préférée des 70s ? « Uptown top Ranking » d'Althea & Donna. Ce que tu as envie de porter ce printemps ? Un pantalon de chez J.W. Anderson. Envie du moment ? Séville ! Pour Modzik, Laurent signe notre série de couverture avec Soko en page 60.

Yasmine Eslami Yasmine Eslami est styliste et consultante mode. Après dix années passées auprès de Vivienne Westwood et dix ans de collaborations avec les plus grands magazines de mode internationaux, elle lance sa propre marque de lingerie sous son nom en 2010. Elle est également la directrice artistique de la ligne Plage chez Eres. Chanson préférée du moment ? Il y en a plein ! Sébastien Tellier, « Aller vers le soleil »… Chanson préférée des 70s ? J'adore les 70s ! C'est mon époque préférée ! Gainsbourg « Melody Nelson », les Bee Gees, l'album Horses de Patti Smith, « Jumping Jack Flash » des Stones, « I'm Not In Love » des 10cc, Stevie Wonder, Polnareff « Hollidays », Carpenters « Rainy Days and Mondays »… Ce que tu as envie de porter ce printemps ? Le denim de Stella McCartney, les robes de Chloé, les robes coton de Westwood, les chaussures Pierre Hardy, les sandales Michel Vivien ou encore un sac Loewe en daim… Envie du moment ? Le Festival de Hyères ! Pour Modzik, Yasmine habille et déshabille nos Parisiennes préférées, Jeanne Damas, Eléonore Toulin et Solène Hébert, en page 92.


LIVE AUTHENTICALLY


Modzik Diary

M18

What have we done ?!… Giorgio Moroder et Joss Danjean, notre journaliste musical

Pfuri de Grand Cannon à la soirée Jeff Koons x H&M

Soirée pizza #MODZIKTEAM

Nora Baldenweg, rédactrice en chef de Modzik & friends à la soirée d’anniversaire de Bellanopolis

Réunion de rédaction

Anatole Amavi, éditeur de Modzik, avec The Dø. On leur piquerait bien leurs lunettes Karl Lagerfeld Règlement de compte à la rédaction

Debbie Harry enchante l’assemblée chez Black XS Charlotte OC rejoint la team Modzik

Angus Stone et Anatole

Paperlab, la crème de la presse internationale au BHV Marais Family Portrait

Curtis prendra un allongé sans sucre Philipp Mueller immortalise le moment

Damian Garozzo met en beauté Soko Tous sur Soko

Paris la Nuit à l’after de Henrik Vibskov Le Paris Scoring Orchestra au défilé Dior Homme. Bravo Étienne et Michel ! Magique !

Lenny encore toi

L’hiver 2015 en nuque longue chez Acne Studios La joyeuse équipe de la série "Bold as Love"

La photographe Emma Picq au boulot

« C’est quoi le mot de passe du Wi-Fi ici ? »

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Baptiste cultive son jardin Chanel

Coiffure folle chez Viktor & Rolf


Modzik Diary

M19

Yelle habituée du Modzik

Delphine Caredda, dircom Modzik avec DJ Cam à l’ouverture du Paperlab au BHV/Marais

Backstage du shooting de Yelle

Moment complice entre Yuksek et Anatole

Isabelle fait aussi son Emmanuelle Jeanne, assiedstoi faut que je te parle

Yelle sous les projecteurs

Nora avec Alexandre Mattiussi et Soko

Backstage du shoot Bowie

Yasmine Eslami et Éléonore Toulin. It’s all about Love

Soko prochaine cover-girl Rosie Lowe très belle à la Boule Noire

Comment ça t’es pas vegan ?

Dites-le avec des fleurs Transmusicales de Rennes avec style

Solène Hebert prend la pose pour Alex Antitch

Funk huppé avec Mark Ronson Masaya Kuroki de Maison Kitsuné et Nora Baldenweg à Bangkok Nadège Winter et Anatole

Petite pause vin pour Charlotte OC

Bruce Weber s’endort sur Nora À l’ouverture de la boutique Karl Lagerfeld rue Marbeuf

À l’Okura Hôtel à Bangkok pour le cabinet de curiosité de Thomas Erber

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Things we love

M20

Bottine Louis Vuitton.

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Things we love

M21

Lunettes de soleil Balenciaga.

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Things we love

M22

Sandale Prada.

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Things we love

M23

Parka Aigle.

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Things we love

M24

Sac à dos Dior Homme

Sneaker Converse.

Grenouillère bébé Stella McCartney.

Sac Burberry Prorsum.

Lunettes Mykita x Maison Margiela.

Pochette Karl Lagerfeld.

T-shirt Pepe Jeans.

Sac Chanel.

Sac Christian Dior.

Skate AMI.

Sac Céline.

Bague Goossens.

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Things we love

M25

Bague Elie Top.

Sac Hermès.

Pochette Alexander Wang.

Clutch Charlotte Olympia.

Pull Coach x Gary Baseman.

Etui à guitare Louis Vuitton Homme.

Sac Versace.

Bague Delfina Delettrez.

Porte-clés Loewe.

Clutch Emporio Armani.

Chaussure compensée Cat Footwear.

Bottine Saint Laurent par Hedi Slimane.

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Things we love

M26

Claquette Hunter.

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Things we love

M27

Palette ombre à paupière Couture Collector « Rock Resille Edition » Yves Saint Laurent Beauté.

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Things we love

M28

Clutches multicolores Mary Katrantzou.

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Émilie Luc-Duc Texte¬Angélique Destre

Un look, ça suffit

Émilie Luc-Duc aborde la mode à contre-courant en nous présentant « une collection écrin » pour l’été 2015. Composée d’une unique silhouette déclinée dans deux couleurs, elle comporte quatre pièces seulement. Chaque modèle, confectionné dans des fils précieux, laisse place à un raffinement confortable et à des lignes architecturées où l’élégance demeure sans faille. Sa créatrice définit sa microcollection

comme « une phrase ». Une phrase qui pourrait bien se prolonger avec une silhouette d’hiver, qui saura se révéler bien surprenante… « Cette collection raconte une baigneuse de Méditerranée, les nages solitaires à l’aube et les songes des longues soirées d’été. » En série limitée à partir du 10 février 2015 sur son site : emilielucduc.com


Kid Francescoli

M30

Amour & Turbulences Paru l’année dernière en digital, le premier album de Kid Francescoli vient de se faire éditer en CD et vinyle. Une bonne manière de (re)découvrir ce bijou pop bourré de singles à l’immédiateté sidérante.

Texte¬Guillaume Cohonner

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Au début, il y a une rencontre amoureuse entre un musicien, Mathieu Hocine, et une chanteuse, Julia Minkin. Une rencontre à New York qui va se solder par une rupture mais donner lieu à un album inspiré et accrocheur, With Julia. Les neuf titres qui composent ce disque résument le drame et la magie que peut provoquer l’amour. À la fois mélancolique (« Boom Boom #2 »), tantôt dansant (« Disco Queen »), Kid Francescoli démontre un sens de la mélodie déconcertante. Formé à l’aube des années 2000, le groupe mené par le Marseillais Mathieu Hocine s’est entouré de trois autres comparses également originaires de la ville qui a vu naître Zidane. C’est d’ailleurs en référence au footbal que le groupe choisit comme patronyme le nom du joueur uruguayen de L’OM, Francescoli (idole de Zizou, la boucle est bouclée). Déjà responsable de deux albums auparavant (Kid Francescoli en

2006 et It’s Happening Again en 2010), c’est avec la rencontre de Julia Minkin donc, que le groupe prend une nouvelle dimension. Musicalement, si ce nouvel opus reste d’obédience electro-pop, le musicien français pioche autant dans l’italo-disco que dans les BO d’Ennio Morricone. Une ouverture musicale qui ne singe pas les genres mais crée au contraire un univers à la fois singulier et personnel. Une pop racée et érudite donc, qui n’en oublie pas son objectif premier : composer des singles accrocheurs et addictifs. En concert : 12/04/15 : Festival Bonne Machine Conflans (78) 14/04/15 : IBoat - Bordeaux (33) 15/04/15 : Le Nouveau Casino - Paris (75) 17/04/15 : Le Poste à Galène - Marseille (13) 30/04/15 : Run Ar Puns - Chateaulin (29) 09/05/15 : Festival CrossOver (06)


The way we ride

M31

Ça ne passe jamais aux travers de nos filets quand la mode se met à rimer avec les vacances. Le créateur Julien David nous démontre avec cette collection capsule très moulante qu’il est encore possible d’avoir l’air plus cool que cool sur nos planches cet été. « Quand j’étais jeune, je portais des vêtements Quiksilver, et ils me faisaient rêver à ce lifestyle californien » avoue le créateur, qui a su booster rapidement l’image de cette marque en pleine reprise de vitesse à coup d’imprimés chic et décalés. Combinaisons, rashguards,T-shirt et bermudas composeront le vestiaire du parfait surfeur du dimanche que nous sommes, de quoi boire la tasse avec classe, des plages aux pistes de dancefloor. MODZIK

© Julien David / Quiksilver

Texte¬Nicolas Dureau


Marques ’ Almeida

M32

Marques ’ Almeida, just kids Texte¬Elen Pouhaër

Grunge, jeune et rebelle. Marques ’ Almeida est avant tout une attitude, une identité forte qui en fait la sensation du moment à la Fashion Week de Londres. Eux, c’est Marta Marques et Paulo Almeida, le duo créatif portugais à l’origine de la griffe britannique. MODZIK


Marques ’ Almeida

Le duo travaille le denim comme personne. Mixant et revisitant les années 60 et 70, il a élaboré une collection AW14 fraîche et instinctive. « Nous avons imaginé un univers évoquant, entre autre, l’époque où Patti Smith et Robert Mapplethorpe vivaient au Chelsea Hotel à New York, mêlé à la folk music des années 60 et à des morceaux de Janis Joplin, qui tournaient en boucle dans notre studio », nous confie Marta Marques. Cet hiver, ils créent encore le buzz. Pour Topshop, ils livrent une collection capsule inspirée par le vestiaire des nineties. Signature de Marques’Almeida, le denim – troué, déchiré, effiloché, délavé – est omniprésent, ponctué de touches flashy. « Nous nous sommes inspirés de notre adolescence, de ma petite sœur Sofia, égérie de la campagne, de séries photos de Corinne Day et Kate Moss, d’archives de magazines mais aussi d’artistes tels que Skunk Anansie et Lauryn Hill », ajoute Marta. Les deux créateurs ont un parcours sans faute, accumulant les succès. Ils se rencontrent sur les bancs de la Citex, à Porto, et s’envolent pour Londres, diplôme en poche. Marta Marques fait

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ses armes chez Westwood pendant que son boyfriend se forme chez Preen. Avant de créer leur marque éponyme en avril 2011, ils intègrent tous deux la célèbre école de mode Central Saint Martins. Ils lancent alors leurs premières collections grâce au Fashion East, l’institution anglaise qui fait germer les designers de talent. Cet événement ne fait que les propulser : ils remportent le NewGen, une bourse qui apporte le sacre aux jeunes créateurs britanniques et leur permet d’organiser leur premier défilé SS13 à la London Fashion Week. Rapidement repérés par Opening Ceremony, avec qui ils ont lancé des collections menswear, et auréolés du British Fashion Awards 2014 en tant que designer émergent en prêt-à-porter femme, Marques ’ Almeida est désormais distribuée aux quatre coins de la planète, de New York à Los Angeles, en passant par Tokyo ou Milan. Cet été, le duo créatif imagine une collection aboutie, plus introspective, hantée par la musique poétique de PJ Harvey. Un vestiaire riche en contrastes, avec des robes aux couleurs pop dialoguant avec des looks dark en denim noir métallisé, des robes asymétriques en soie aux couleurs ultra-vitaminées, et des pièces légères dévoilant la peau ponctuée de pierres Swarovski. Un voyage contemplatif et expérimental qui nous embarque au cœur de l’ADN de la marque.

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Mark Ronson

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Englishman in New York Interview¬Joss Danjean

Photo¬Christoph Wohlfahrt

Il ne chante pas et pourtant son nom est sur toutes les lèvres. Il a travaillé avec les plus grands artistes black américains, néanmoins c’est un Anglais pur jus. Mark Ronson est un des plus fascinants paradoxes musicaux qui soit, mais qui s’en plaindra ? Certainement pas Bruno Mars avec qui il vient de signer un nouveau single #1 au Billboard. De passage à Paris, on a attrapé au vol le producteur VIP à l’hôtel de Sers où il est descendu…

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Mark Ronson

Quel est le fil rouge de ce quatrième album, Uptown Special ? Sur ce disque, j’ai quasiment composé tous les morceaux sur mon piano à l’exception de « I Can’t Lose » et « Uptown Funk ». Cela a à voir aussi avec le fait d’être à Venice où le studio de Jeff Bhasker se situe et avec qui j’ai travaillé sur ce disque : quand tu es au piano dans ce studio à l’arrière de sa maison, tu as des palmiers dans ton champ de vision et c’est un enchantement. Je pense que ce disque transpire la Californie et aussi ce que j’ai jamais pu faire, sauf peut-être sur le premier : faire un disque de morceaux que je peux jouer, c’est-à-dire un mélange de hip-hop/soul/ R’n’B/reggae ! Je n’avais rien prémédité à l’avance mais c’est quelque chose que j’ai ressenti et essayé de conserver pendant toute la conception de cet album. Avec le temps, tu te rends compte dans quoi tu es le meilleur : j’adore le rock et l’indie alors je fais des disques avec Kaiser Chiefs et d’autres groupes comme cela mais c’est lorsque je fais de la soul, du R’n’B et du funk que je suis le meilleur. C’était l’idée avec ce disque : faire ce que je sais faire de mieux. Il y a tellement jeunes producteurs comme Hudson Mohawke (producteur pour Kanye West, NDLR) : je ne peux pas faire ce qu’ils font. Je ne peux pas prétendre avoir encore 25 ans, mais je peux réaliser ce que je fais de mieux. Pourquoi et comment as-tu choisi de travailler avec l’écrivain Michael Chabon pour les textes de tes chansons ? J’ai choisi Michael parce que son roman Les extraordinaires aventures de Kavalier et Clay est mon livre contemporain préféré. C’est le livre que j’achète souvent pour les gens que j’aime. Et lorsqu’il a publié Telegraph Avenue, je suis allé à une séance de dédicace et il m’a demandé

mon nom, m’a reconnu. Il a mentionné un de mes morceaux qu’il aimait beaucoup. Et un an plus tard, lorsque je travaillais sur les morceaux, je cherchais bien sûr le meilleur riff de basse, le meilleur rythme mais en même temps je me disais : « Et si les paroles pouvaient aussi être à la hauteur de la musique ? » Pourquoi les paroles denses seraient réservées à la guitare acoustique, pourquoi la musique groove ne pourrait pas avoir des paroles fortes et pleines de sens ? J’ai envoyé un mail à Michael Chabon pour lui proposer d’écrire les paroles des chansons de l’album et il a répondu oui. Je savais qu’il était fan de la culture pop et que sa plume fonctionnerait sur des chansons comme les miennes. Son dernier livre, Telegraph Avenue, est à propos de deux gars qui possèdent un vieux magasin de disques de jazz. À sa manière de parler des références de jazz, j’ai su qu’il comprendrait. Il m’a envoyé quelques paroles et c’était évident qu’on allait bien travailler ensemble. Et j’ai même pu composer des mélodies simplement à travers ses textes, donc on a pu vraiment collaborer. Sur cet album, tu as travaillé avec des artistes que tu connais bien comme Bruno Mars, Andrew Wyatt ou encore Kevin Parker, mais tu as cherché une voix nouvelle, n’est-ce pas ? Au début, il n’y avait que moi et Jeff à l’écriture, et il y avait cette chanson « I Can’t Lose » et c’était tellement évident qu’il fallait une voix de diva féminine pour la chanter. Une voix puissante mais sexy aussi. On réfléchissait à qui on connaissait qui serait à même de la chanter. Et à la faveur de la nuit dans le studio, et de quelques verres de whisky, on a eu cette idée : lançons-nous dans cette « Mission Mississippi ». On conduit en voiture vers le sud dans

les clubs et on va découvrir des voix incroyables ! Jeff a un background de pianiste de jazz ayant étudié à Berkeley : il a joué dans de nombreuses petites formations de gospel du New Jersey donc il sait comment trouver les clubs, les groupes de jazz, sentir le truc… Alors on a pris l’avion pour la Nouvelle Orléans, on a loué une voiture et on a fait ce périple à travers le Sud en passant par Jackson (Mississippi), Bâton-Rouge, Memphis, Saint-Louis… C’est à Jackson qu’on a rencontré cette fille qui avait juste la meilleure vibe. On ne lui a pas dit tout de suite mais une fois à Memphis, on a loué une chambre au célèbre Lorraine Motel et un studio aux fameux Sun Studios de Sam Phillips : on l’a fait venir pour voir ce que ça pouvait donner en studio et elle a été absolument géniale. Son nom est Keyone Starr. Et tout le monde va la découvrir. On a aussi visité les Royal Studios où ils ont enregistré tous les morceaux de Al Green et c’était juste fabuleux : je me suis alors tourné vers Jeff et je lui ai dit : « On va venir ici enregistrer tout l’album ici, c’est magique ! » Tu as aussi un invité de marque sur ton disque, peux-tu nous raconter cela ? J’ai écrit la mélodie de « Uptown’s First Finale » d’après les paroles écrites par Michael. J’adore les paroles mais je ne parvenais pas à m’ôter de la tête l’harmonica de Stevie Wonder qui jouerait cette mélodie. J’ai envoyé un mail au manager de Stevie Wonder, lui expliquant que Stevie est mon héros et j’ai joint le morceau. J’adore Stevie : c’est mon chanteur, musicien, compositeur préféré de tous les temps ! Le sentiment que je ressens qu’il ait accepté de jouer cette mélodie à l’harmonica est assez indescriptible. Je sais que j’ai dit que maintenant que Stevie

« Maintenant que Stevie Wonder a joué sur mon disque, je peux arrêter de faire de la musique ! »

Wonder a joué sur mon disque, je peux arrêter de faire de la musique ! C’est exagéré, je le sais bien, mais j’ai vraiment pensé ça à ce moment-là ! Avec Bruno Mars, tu as signé un véritable tube qui sonne comme une sorte d’hommage à Prince, tu le connais ? J’ai rencontré Prince il y a dix ans lorsque je jouais comme DJ à New York. J’ai vu Prince dans le club et je me demandais comment le faire venir à moi ? J’ai alors joué le bootleg de Stevie Wonder « All I Do ». Il est venu à la cabine et m’a lancé : tu joues un bootleg ? Je lui ai répondu : j’ai l’original bien sûr mais je joue cette version car le pressage (vinyle, NDLR) est de meilleure qualité. Il m’a fait un clin d’œil et il est resté danser avec ses amis. Ça a été une nuit vraiment spéciale ! On a coécrit « Uptown Funk », Bruno et moi avec le reste de l’équipe mais le souvenir de Prince était là. Mark Ronson, Uptown Special (Columbia/Sony Music) www.markronson.co.uk

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Étienne Derœux

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Le roi du sporty chic appose sur ses tissus nobles son style décontracté unique. Il nous séduit avec ses collections tellement désirables et son charme faussement timide.

De la classe dans les baskets Texte¬Aurore Hennion

« Ce n’est pas vraiment ce que je voulais faire au tout début, j’étais plutôt tourné vers l’archi et le design mobilier et en fait, au fur et à mesure de mes expériences, je me suis dit que les vêtements étaient ce qui m’intéressait le plus. » Et il a eu raison. Sans cette lueur de lucidité, nous serions passés à côté du jeune créateur Étienne Derœux. Des coupes élégantes, épurées, un soupçon sport

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mais avec des matières luxueuses font des créations du directeur artistique de la marque éponyme des collections sophistiquées et minimalistes. Aujourd’hui, avec une vie à cheval entre New York et Paris, le jeune Lillois d’origine a d’abord fait ses armes à La Cambre puis à l’Académie royale des beaux-arts d’Anvers en Belgique. « Je viens de deux écoles compétitives avec une compétition permanente ! J’ai été élevé à cela », rigole-t-il. Se battre, il connaît, et il pose un regard assez serein et réaliste sur

le milieu. « J’ai choisi d’étudier à Anvers car je suis un grand fan de Margiela et je respecte qu’on ne voit jamais sa gueule. C’était mon rêve de réussir à faire cela, jusqu’au jour où j’ai pris un attaché de presse qui m’a dit que je serais mieux en couleur. » Après avoir fait ses premières expériences chez Jean-Louis Scherrer comme assistant dans le studio de couture de Stéphane Rolland, il a travaillé pour Peter Pilotto, qu’il a rencontré à Anvers au début de la marque, et a ensuite continué à peaufiner sa patte chez Matthew Ames. « Je ne fais pas partie

de cette typologie de créateurs, les génies, qui sont dans leur monde, ne regardent rien et tombent toujours juste », explique Étienne, dans son pull col roulé marine qui fait ressortir son regard bleu intense. « J’ai besoin de me raccrocher au monde qui m’entoure. Mais je regarde plus la rue, les boutiques, ce que les gens portent plutôt que les shows… même si cela revient un peu au même au bout du compte. Je fais un travail de sociologue. » Bouger, être ouvert à tout et produire de nouvelles idées, c’est le leitmotiv d’Étienne. Pour présenter la


Étienne Derœux

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« Je fais un travail de sociologue. »

collection à la presse et aux acheteurs, il édite également des journaux tous les six mois qui servent d’introduction à la marque. Il est important pour lui d’avoir une proximité géographique et humaine avec les gens avec qui il travaille. Ses fournisseurs sont d’ailleurs principalement français ou au plus à 2 heures d’avion de Paris. « Ils peuvent m’appeler à 20 h le jeudi car ils sont bloqués sur un truc et moi je débarque le vendredi à 8 h et je les aide. C’est comme cela qu’on avance, qu’on produit quelque chose de qualité, qu’on survit quand on est une petite boîte », assure Étienne. Assuré donc, pragmatique, naturel, Étienne quoi.

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Nehera

Cousine de Céline et The Row, Nehera revendique une esthétique pure et fonctionnelle, n’utilisant que des tissus de très haute qualité et des détails sophistiqués. Relancée il y a deux ans, la marque de prêt-à-porter puise ses racines dans la personnalité charismatique de Jan Nehera, magnat du textile tchèque disparu à la fin des années 50. Véritable pionnière de l’industrie de la mode, la marque avait construit son petit empire, comprenant avant tout le monde l’importance du lien direct entre production et distribution. Aujourd’hui, c’est un Français, Samuel Drira, qui reprend la direction artistique de la maison.

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La force de Drira réside dans sa maîtrise de l’image et sa compréhension du stylisme, donnant à Nehera une nonchalance chic et arty. Le blanc éclatant est proposé en superposition, évoquant l’univers fort des photographies d’August Sander. L’orange s’associe au jaune, tandis que vestes et manteaux sont souvent oversize, enveloppant le corps au lieu de trop s’en approcher « Je travaille beaucoup par élimination, affirme Drira. J’aime l’idée d’un vêtement familier qui, grâce à son volume et ses proportions, finit par raconter quelque chose d’autre. »

Fondateur du magazine Encens, Samuel Drira est avant tout un passionné du vêtement, influencé par le travail des créateurs japonais Rei Kawakubo et Issey Miyake, ainsi que les collections de la styliste française AnneMarie Beretta. Pour Drira – dont les éclats de rire fréquents ne dissimulent pourtant pas une approche sérieuse de la mode – le vêtement doit avant tout s’adapter aux circonstances, à l’image d’une femme sensible et intelligente. « Pour Nehera, je suis parti de l’idée d’un vestiaire bourgeois que j’ai retravaillé et épuré. Je pensais aux films de Claude Chabrol, à ces filles jeunes qui s’approprieraient une garde-robe traditionnelle. Les matières sont presque toutes naturelles et les pièces ultralégères, faites pour le voyage. J’aime bousculer les codes dans mes silhouettes, éliminant le superflu pour mieux souligner les formes. »

Nehera rallume la flamme Texte¬Philippe Pourhashemi

Belle endormie ressuscitée, Nehera s’est récemment glissée dans le groupe ultra-sélect des maisons de luxe minimalistes, faisant de la simplicité sa marque de fabrique. Modzik a débusqué son nouveau directeur artistique, cet homme de mode discret qui préfère rester dans l’ombre. MODZIK


Alice Lewis

L’Enfant et les Sortilèges

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Texte¬Guillaume Cohonner

Après le EP Ignorance Is Bliss, Alice Lewis nous revient avec Your Dreams Are Mine, un album à la profondeur et à la créativité déconcertantes. Toujours sur le fil, Alice creuse encore un peu plus son univers à la fois intime et grandiose. Électron libre dans le paysage musical hexagonal, Alice Lewis a également un parcours atypique. Après avoir passé son enfance en Angleterre, elle s’installe à Paris où elle est diplômée des BeauxArts. Elle s’intéresse alors à la musique, la poésie, la mode ou encore le dessin et crée un univers singulier, à la fois magique et angoissant. Après deux EP, un premier album en 2010, No One Knows We’re Here, qui montrait ses accointances avec l’univers du jazz et de la musique classique, Alice Lewis continue sur la voie de Ignorance Is Bliss. Un chemin plus synthétique et baroque qui la porte en digne héritière de Kate Bush et de l’élégance d’une Nico (période John Cale) : tantôt glacial (« The Statut »), tantôt extraverti (« Perfect Stranger » qui rappelle son goût pour la new wave). Produit par Ian Caple (l’homme derrière certains albums de Tricky et d’Alain Bashung), Your Dreams Are Mine se découvre au fil des écoutes, tant la densité des arrangements est sidérante. À la fois audacieux et mélodique, ce second album la porte en première division d’une pop classe et séduisante. Disons le clairement, Alice Lewis n’a, pour l’instant, pas encore d’égale. On attend avec impatience de la voir sur scène. Alice Lewis, Your Dreams Are Mine (Kwaidan) alicelewis.bandcamp.com

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Hanni El Khatib

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Easy Rider

Ancien directeur artistique chez HUF, Hanni El Khatib s’est imposé en seulement deux albums en figure incontournable du blues rock américain aux côtés des Black Angels et des Black Keys. Une reconversion en musicien payante, donc. Il vient de sortir un nouvel album, Moonlight. L’occasion de le rencontrer pour lui parler de skate, de son label et de dépression post-tour.

Interview¬Guillaume Cohonner Photo¬Manuel Obadia-Wills

Tu aimes les interviews ? Hum, on ne peut pas dire que c’est ce que je préfère, mais ça s’arrange. Mais j’aime bien rencontrer de nouvelles personnes. La France est le pays où tu es peut-être le plus populaire, comment expliquestu cela ? J’en suis incapable. Peut-être que toi tu peux me l’expliquer ? J’imagine que tu incarnes une certaine idée du rock californien : les motos, la gomina… Peut-être. Même si les scènes se sont maintenant décloisonnées à travers le monde, je représente peut-être les racines du rock américain pour les Français. Ce troisième album est plus hétérogène. Ça a été facile de trouver une nouvelle ouverture ? Pour moi, c’est l’album que j’ai toujours voulu faire. C’est définitivement un album qui me correspond. J’ai réussi à mélanger tous les styles de musique que j’adorais pour en faire quelque chose de personnel. Ça va de groupes comme Suicide à la soul sixties en passant par le psyché seventies. J’ai voulu le faire seul avec mon batteur. Tu tournes énormément et pourtant tu arrives à sortir des albums régulièrement… Deux mois à peine après ma tournée, j’étais en studio. J’ai pris un mois pour me relaxer, je ne fais pas de démos, je préfère essayer des choses en studio. J’ai besoin de garder l’énergie des tournées pour être inspiré. Tu ne souffres pas de la dépression post-tournée comme certains groupes ? Si, ça arrive. Tu peux avoir ce sentiment étrange quand tu rentres de tournée. Pas seulement déprimé, mais tu te

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sens un peu comme un ovni. Personne autour de toi ne peut comprendre l’intensité que tu as vécue pendant des mois sur la route. Quand tu demandes à tes potes ce qu’ils ont fait pendant les trois dernières semaines, ils vont te répondre : « J’ai été bosser, j’ai vu quelques concerts, j’ai été dîner avec ma copine. » Et si tu demandes à un musicien qui revient de tournée ce qu’il a fait, tu vas lui dire : « J’ai été dans 24 villes différentes, j’ai visité 4 pays, j’ai rencontré 500 personnes et j’ai joué 26 concerts. » Assez étrange non ? Ce n’est définitivement pas une vie normale, donc tu as toujours besoin d’un temps d’adaptation quand tu rentres. Si je suis sur la route pendant trois mois, je mets un mois à me réadapter à une vie normale. Tu réécoutes parfois ton premier album ? C’est marrant, je l’ai réécouté il n’y a pas longtemps. C’était assez lo-fi non ? Je criais beaucoup et je chantais moins… Mais, ce n’était pas mauvais, hein. Avant d’être musicien, tu avais une autre carrière… J’étais directeur artistique chez HUF, oui. J’ai toujours voulu être musicien. Je n’ai pas de regrets dans la trajectoire que j’ai prise, car maintenant j’ai mon propre label et mon expérience en tant que directeur artistique, je m’en sers via le label, je m’occupe des visuels, des T-shirts… J’ai d’autres projets pour cette année qui vont me remettre sous la casquette de designer en m’occupant de graphiques pour des skates, des trucs comme ça. J’aime bien avoir ces deux casquettes : le design et la musique. Tu vas d’ailleurs sortir l’album d’un groupe français sur ton label Innovative Leisure… Oui, Wall of Death. Je les ai rencontrés en tournant


Hanni El Khatib

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avec les Black Angels. On est devenus potes et on a gardé le contact. Ils m’ont ensuite rejoint sur la tournée française. On a des similitudes musicales. On aime bien le côté heavy du psychédélisme. J’aimerais pouvoir faire ça dans ma musique mais ça ne marche pas toujours. J’adore leur côté lourd à la Black Sabbath. Ils avaient ce rêve d’enregistrer aux États-Unis. J’ai donc fait en sorte que ça se réalise.

Tu as d’autres projets avec Innovative Leisure ? Je m’occupe beaucoup d’artwork, j’écoute beaucoup de nouveaux groupes, discute avec eux… Pour l’instant, on a 17 artistes, ce qui prend du temps déjà. C’est comme une communauté artistique. Ils ne font pas tous la même musique : on a des artistes electro, du rock, du R’n’B, du psyché. Tu viens du skateboard,

quelles sont les vidéos qui t’ont influencé plus jeune ? La vidéo FTC, Penal Code. La partie de Keith Hufnagel, ça m’a vraiment marqué. La musique, c’était du reggae un peu up-tone. Celle de Guy Mariano dans Yeah Right! avec du Herbie Hancock. La partie de Lavar McBride aussi dans une vidéo World Industries, avec Jimmy Cliff en bande-son. J’ai fait une playlist pour Deezer justement où j’ai mis 22 chansons que j’ai

découvertes grâce aux vidéos de skate. Tu as d’autres projets ? Je vais collaborer avec le rappeur Freddie Gibbs. Ce sera une nouvelle expérience. Je suis pas mal occupé ces temps-ci. J’aimerais bosser avec des gens que j’admire, j’ai bossé avec GZA du Wu Tang, c’était dingue. Hanni El Khatib, Moonlight (Innovative Leisure/Because) hannielkhatib.com

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Harmony Paris

Caillera de luxe

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Sans sérif et sans chichi, Harmony rhabille Paris.

Texte¬Alice Pfeiffer

Une jeune fille blonde vous regarde droit dans les yeux, l’air carnassier. Sur sa tête est vissée une casquette à l’envers. Sur ses épaules, un ample blazer mou lui sert de carapace. À mi-chemin entre Courrèges et Carhartt, la femme Harmony est une enfant des rues tombée dans le luxe (ou vice-versa). Cette enseigne est la dernière née du parisien David Obadia, fondateur de la marque streetwearchic Brooklyn We Go Hard. Son but ? Offrir des basiques simples dans des matières nobles qui vous accompagnent au quotidien. Ce qu’on y trouve : des pièces piquées de références sportswear, mais confectionnées dans des petits ateliers artisanaux européens, pour une définition du luxe urbaine et high & low. Alors que la semaine de la mode regorge de T-shirts à logo et baskets sur les podiums, Obadia propose de repenser et moderniser l’histoire du vêtement de loisir : jupes et T-shirts un poil preppy – évoquant les débuts de Lacoste ou le travail de feu Claire McCardell –, mêlés à des références néo-90s, bombers et sweat-shirts un poil vintage. Quant à l’homme (incarné par le bellâtre Jérémie Laheurte, petit ami de quelques heures d’Adèle Exarchopoulos dans La Vie d’Adèle et compagnon dans la vie réelle), le voilà rhabillé en veste de survet’ mais en laine luxueuse, tennis blanches, pull graphique. Robert Pattinson a d’ailleurs été un des premiers clients de la marque. Harmony, c’est le grand écart entre Paris Ouest et Paris Est, qui éveillera la caillera aux goûts de luxe qui sommeille en chacun d’entre nous.

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Black XS

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Iggy et Debbie, Debbie et Iggy... Texte¬Joss Danjean Photo¬Nora Baldenweg

Depuis ses débuts, le parfum Black XS porte en lui un ADN résolument rock, dans le style mais aussi dans l’attitude irrévérencieuse. Pour l'édition limitée Be a Legend, quelles icônes à la fois rock et glam pouvaient mieux représenter cette fragrance que ces deux deux-là, à l’amitié qui plus est inoxydable ?

Il faut dire que ces deux monstres sacrés se connaissent de longue date : Iggy Pop a invité Blondie en première partie de ses tournées, Debbie et lui affichant tous deux cette dose de glamour et de transgression qui marqueront les années 70 et 80. Ils se sont aimés. Début 1990 ; au moment où la scène musicale tout entière se mobilise pour la recherche contre le sida, ils reprendront ensemble « Well, Did You Evah », célèbre morceau de Cole Porter pour la mythique compilation Red, Hot + Blue, clippé par Alex Cox, le réalisateur du film Sid & Nancy.

Quelques années plus tard, Debbie et son groupe reprendront « Ordinary Bummer » d’Iggy Pop. Décidément, ces deux-là sont unis par la musique et par le rock. Pas étonnant que Paco Rabanne voit en eux la personnification de son nouveau parfum : deux icônes forcément excessives à l’histoire inextricablement liée, pour un parfum aussi électrique que légendaire. Black XS « Be a Legend », édition limitée avec Debbie Harry et Iggy Pop, en exclusivité dans les parfumeries Nocibé. pacorabanne.com/blackxs

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Rubrique Ami Sioux

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Texte et photos¬Ami Sioux Dance So Lonely

Now I, I liked the way you Dance so Lonely, And I liked the way you stood your ground. An’ sometimes they judged this boy so lonely. But then you could see he stood his ground. MODZIK


Ami Sioux

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Now I, I walked behind you to see your shuffle step An’ you’re a down dealer holdin’ your georgette An’ in that golden hour Before you found your queen.

Did you think that hand would give you a life, A life you could redeem?

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Ami Sioux

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A life that you could redeem.

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Ami Sioux

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The nights that you’d never see. The life that you would redeem. The nights that you’d never see.

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Ami Sioux

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Now I, I liked the way you Dance so Lonely, And I liked the way you stood your ground. An’ sometimes you judged this boy so lonely.

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Ami Sioux

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But then you could see he stood his ground. But then you could see he stood his ground.

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Ami Sioux

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To a life that you’d never see.

A life that you could redeem. A life that you’d never see.

A life that you could redeem.

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Ami Sioux

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The nights that you ’d never see.

Ami Sioux est photographe et musicienne. Elle vient de sortir son deuxième album, Stand your Ground. www.standyourground.amisioux.com

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Curtis Harding

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Curtis Harding

Interview¬Guillaume Cohonner Photos¬Philipp Mueller Stylisme¬Nicolas Dureau Curtis Harding est habillé en Saint Laurent par Hedi Slimane. Mise en Beauté¬Faustine Hornok @ Backstage Agency.

Soul Kitchen

Protégé d’Hedi Slimane et proche de l’écurie Burger Records, Curtis Harding est l’étoile montante de la soul américaine. Le jeune homme d’Atlanta est l’un des artistes qui va faire parler de lui dans les prochains mois grâce à des chansons accrocheuses et une coolitude absolue. On fait les présentations. MODZIK

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Curtis Harding

« Je suis né dans le Michigan, un endroit où l’histoire musicale est forte avec la Motown. Cette musique est dans mes gènes. »

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Curtis Harding

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Curtis Harding

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« Quand tu fais de la soul, tu ne peux pas mentir, il faut être le plus honnête possible, être au plus près de la réalité. »

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Curtis Harding

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Curtis Harding

« Après le concert, Hedi [Slimane] m’a demandé s’il pouvait me photographier. […] je lui ai dit : “Mais t’es qui toi putain ?” »

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Comment te sens-tu avant la sortie de ton album ? C’est à la fois excitant et nouveau. C’est la première fois que je me sens vraiment un artiste solo… Être seul sur la route, répondre seul à des interviews… Auparavant, j’avais fait des interviews mais avec des groupes en tant que guitariste ou vocaliste, là c’est différent. Comment décrirais-tu ton album ? C’est définitivement de la soul, mais il y a aussi d’autres emprunts. C’est un style que je maîtrise depuis longtemps, ça fait partie de moi, ça n’a donc pas été dur de l’enregistrer. Certaines chansons ont été composées il y a quelques années,

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d’autres pendant que j’étais en studio, j’avais déjà pas mal de choses dans mes valises. Les textes ont l’air assez intimes sur cet album… Oui, c’est assez personnel. Quand tu fais de la soul, tu ne peux pas mentir, il faut être le plus honnête possible, être au plus près de la réalité. Il faut aussi avoir envie de raconter son histoire, ne serait-ce que pour survivre, ça a été mon cas. Il y a beaucoup de groupes à Atlanta, comment y décrirais-tu la communauté artistique ? C’est un truc de potes surtout. On s’entraide pas mal. Tu peux être dans un groupe de punk, de soul, de


Curtis Harding hip-hop, on traîne tous ensemble, il n’y a pas de différence. C’est vraiment ouvert. On sort tous dans les mêmes endroits, on sort tous avec les mêmes filles… C’est très incestueux en fait [Rires]. Et avec quels genres de musique as-tu grandi ? Ma mère était chanteuse de gospel, elle chantait tout le temps, mon père écoutait énormément de blues à la maison. Je suis né dans le Michigan, un endroit où l’histoire musicale est forte avec la Motown. Cette musique est dans mes gènes. Et tu penses que tu pourrais vivre dans une autre ville ? Je pense bouger bientôt. D’ailleurs, j’ai toujours aimé voyager. Voyager, c’est t’éduquer, mec. C’est comme ça que tu acquiers de l’expérience. On n’a pas l’océan à Atlanta, donc tu as intérêt de te bouger le cul si tu veux voir ce genre de choses. J’ai beaucoup voyagé étant gamin. Je suivais ma mère quand elle allait chanter dans différentes églises, dans la rue, on prenait la voiture et c’était l’aventure. On écoutait aussi beaucoup les autres : les sans-abri,

les chœurs de gospel, ça m’a profondément marqué. Quel est le souvenir qui t’a le plus marqué sur la route quand t’étais gamin ? Une fois, nous étions à Los Angeles, on n’avait pas de maison, on vivait dans notre van. Il y a eu une tempête et ma mère croyait que c’était moi qui secouais le van [Rires]. On n’avait pas beaucoup d’argent, mais on se marrait bien à l’époque. Tu es proche aussi de Burger Records, le label californien en vogue… J’ai sorti quelques trucs chez eux, c’est vraiment des passionnés. C’est eux qui m’ont fait. J’adore tous leurs groupes. Ils dorment dans leur magasin, ils sont très DIY. Tu as d’autres projets, des collaborations ? J’ai fait les chœurs sur pas mal de disques de chez Burger Records qui vont ou sont sortis. Danger Mouse m’a aussi contacté, on verra ce que ça donne. Qu’est-ce que tu fais quand tu ne fais pas de musique ? C’est assez ennuyeux en fait : je regarde des films, je sors mon chien, mon père a 84 ans

donc je passe du temps avec lui, je m’occupe du jardin. Je ne sors plus beaucoup à Atlanta, j’ai toujours beaucoup trop fait la fête auparavant ! Qu’écoutes-tu en ce moment ? Toujours les mêmes choses qui me font vibrer : Albert King, John Lee Hooker, Bo Diddley… J’adore ce mec, c’était une personnalité assez excentrique. Si je ne devais en garder qu’un seul, ce serait lui.

collaborer avec lui, je lui ai demandé s’il pouvait faire un clip pour moi, et il a accepté. Mais tu t’intéresses à la mode ? Non, pas du tout. Je m’intéresse au style, c’est différent. Mais je n’y connais rien en mode. J’ai joué pour l’aftershow d’un défilé d’Hedi l’autre fois, c’était plutôt marrant comme ambiance. Curtis Harding, Soul Power (Anti/Pias) www.curtisharding.com

Comment as-tu rencontré Hedi Slimane qui t’a photographié ? Je jouais au festival Beach Goth organisé par The Growlers à Costa Mesa. Il est venu me voir jouer. Après le concert, il m’a demandé s’il pouvait me photographier. Au départ, je lui ai dit : « Mais t’es qui toi putain ? » Je n’avais jamais entendu parler de lui, on a parlé, sympathisé. Puis on est allés dans la maison des Growlers où je dormais, c’était un bordel monstre. Hedi nous a rejoints dans sa grosse voiture noire, les Growlers m’ont dit : « Hey ! Quelqu’un a appelé les flics ? » [Rires]. On a fait quelques photos. Quelques mois plus tard, il m’a appelé pour savoir si je voulais

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Soko Maquillage¬Damian Garozzo @ Jedroot avec les produits M.A.C COSMETICS Coiffure¬Sébastien Le Corroller @ Airport Agency Assistant Photo¬Carl Smith Thomas Assistante Stylisme¬Priscilla Teko Un grand merci au Studio Montmartre,142, rue Montmartre, 75002 Paris

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Photos¬Laurent Humbert Stylisme¬Nicolas Kuttler

Soko

Elle est française, elle vit à LA, chante en anglais, parle d’amour, d’amitié, d’espoirs de fille et de désirs de femme. Elle rêve, un peu, et fascine, beaucoup. Loin des baby doll acidulées et autres bimbos sous Auto-Tune, Soko impose son style et son allure avec une rage que lui envient beaucoup de ses confrères bien plus âgés. Les rockstars n’ont pas d’âge. La preuve en image.

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Soko

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Chemise Julien David. Boucle d’oreille Eddie Borgo.

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Veste Emporio Armani. Boucle d’oreille Eddie Borgo. Robe vintage. Bracelets Chanel.

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Pull Acne Studios.

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Soko

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Veste Olympia Le-Tan. Chemise VĂŠronique Branquinho.

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Soko x AMI

Il a suffi d’un selfie complice entre Alexandre Mattiussi et Soko pour que leur followers – nous inclus – tombent dans le panneau et les croient amis. Il n’en étaient pourtant qu’à leur première rencontre et ce, grâce à la magie des réseaux sociaux. On a voulu en savoir plus sur cette cyber-amitié en réunissant à nouveau le fondateur de la marque AMI et notre cover-girl le temps d’un déjeuner.

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Réalisation¬ Nora Baldenweg Transcription¬Sixtine Gérard-Tasset

Alexandre Mattiussi : Hello mon petit chaton ! Ça va ? Viens, je vais te faire un câlin. Soko : Aaaaah…

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AM : On apprend à se connaître en fait, là. Sur Instagram on a renvoyé une image de gens très proches alors qu’on ne s’était jamais vus. On ne s’est rencontrés qu’il y a deux mois. J’adore Instagram. C’est vraiment génial. C’est comme un journal intime, une mémoire. En plus, on voit les gens grandir. Comme toi. Je t’observais quand tu étais à LA. S : Et ça permet de retrouver des contacts. Quand j’étais à Bordeaux enfant, j’étais dans la même classe qu’Olivier Rousteing. On était meilleurs copains quand on était petits tu sais. On ne s’est pas vus depuis dix ans, mais on se parle sur Instagram. AM : Moi, je like toujours ce que postent mes fan. Qu’il s’agisse d’une paire de baskets ou d’une autre photo sur laquelle je suis tagué. Je like ou alors je mets un petit mot, pour montrer que je suis derrière. C’est important. Et en plus, je suis trop content quand un artiste ou un acteur aime mes photos. Tiens, je vais commander à manger. Ça te dérange si je mange de la viande devant toi ? Salade au bacon d’agneau ? Ah ah, ça doit t’angoisser à mort quand je dis ça très fort ! ? S : Non, je m’en fous. Ça ne va pas dans mon ventre. Ce n’est pas sur ma conscience. Vous avez des infusions ? Une verveine ? Et attends, mais, je savais pas que tu faisais aussi des baskets ! Vas-y montre ! Elles sont cooools. Et ça fait partie de la basket ça ? Ah non c’est tes chaussettes, mais elles aussi elles sont trop cools. AM : Cette paire ça fait trois jours que je les porte. C’est des tests de productions ! On fait ça chez AMI maintenant. Tu sais, ça évite les conneries du début. J’ai une semaine pour les tester et faire des commentaires. S : Et tu m’habilles quand, toi, en fait ? AM : Eh bien, c’est quand la prochaine promo ? S : Mais tous les jours ! Ah ah !

AM : Tu te rappelles comment on s’est connus tous les deux ? Grâce à la magie d’Instagram ! Moi, je te regardais de loin. Tu sais, quand tu avais les cheveux super longs et que tu jouais de la guitare dans les cimetières ? Tu te souviens, on a commencé à liker nos photos.

AM : Eh bien quand tu veux alors. Revenons sur toi, je trouve que t’es quand même très Los Angeles maintenant. Quand je vois le teaser de ton clip, toute cette énergie, c’est ça Hollywood ! Les palmiers, la coolitude qu’on n’a pas ici, nous.

S : Ouiii ! Et après on a mis des petits cœurs, et ensuite des petits chats. [Rires]

S : Les rapports humains sont différents, c’est hyper facile de collaborer là-bas. Tu vois la


Soko x AMI vidéo que j’ai faite ? J’ai juste appelé une copine, je lui ai dit voilà, le concept de la vidéo c’est ça : je fume de la weed, je mange des Cronuts vegan, je saute dans une piscine d’enfant et puis sur un lit avec des têtes de lapins. En vrai, je ne bois pas et ne fume pas. En fait, j’ai fait ma crise d’ado en retard. Il n’y a pas longtemps. J’ai perdu mon père très tôt. J’avais cinq ans. Donc tout de suite c’est beaucoup de responsabilités et du coup je me suis retrouvée avec des idées noires très jeune. J’avais perdu l’insouciance des enfants. AM : Ah oui, tu étais très jeune. Mais quand je pense aux relations entre les artistes, tu sais les chanteurs, les photographes, les musiciens… je me demande à quel moment la mode t’a approchée ? Quand est-ce que tu t’es intéressée à l’univers de la mode ? S : Sur la sortie de mon premier album, en 2012, plein de personnes me sollicitaient. Mais j’étais contre. Parce que je suis une fille, je dois parler de mode ? Non ! Ça me fait chier ! Je fais de la musique moi. Je n’aime pas parler de fringues, parler chiffons, lire des magazines féminins, parler des crèmes que j’utilise, de ce que je mange… Tout ce que je dis c’est dans ma musique. Et rien d’autre. Du coup j’étais fermée et je refusais toutes les request. Après, il faut grandir et te dire que t’es obligé de faire de la presse si tu veux réussir à survivre en tant qu’artiste indépendant. Alors autant faire ça plutôt ouvert d’esprit et de bonne humeur. En y mettant du sien. Donc là j’ai switché. Je suis devenue beaucoup plus à l’aise et plus ouverte. Avant je pleurais quand on me prenait en photo. J’étais comme un chat qu’on jetait dans un bain. [Rires]

déteint sur moi. Je jouais quelqu’un qui ne sait pas communiquer, qui ne parle qu’avec son corps. Après le film je tombais dans les pommes en interview, j’étais tout le temps malade, j’avais des crises d’angoisse. Je suis allée voir un psy, antidépresseurs et compagnie. C’était dur d’en sortir et d’arrêter de me voir comme cette personne. En me coupant les cheveux, j’ai enlevé le poids et la négativité que j’avais accumulés. Je me suis sentie plus légère en blonde, et depuis j’ai beaucoup de demandes de la part de la presse. Si avant c’était une corvée, ben aujourd’hui ça m’amuse ! On collabore, on fait des images cools, je lie des nouvelles amitiés avec d’autres artistes, dans la mode, la musique, des photographes…

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AM : En fait, en tant qu’artiste, ton moyen d’expression c’est la musique ! Et après on va chercher à comprendre qui tu es. Moi, je pense qu’il faut te mettre des barrières. Tu dis beaucoup trop de choses. Tu devrais en dire moins. Tu es trop naturelle, trop spontanée. Rappelle-toi chez Ruquier sur RTL la dernière fois ! OK, c’était hyper fort, on a compris qui tu étais, tes traumatismes et tout. C’était très beau et très touchant mais tu donnes beaucoup trop !

« Tu dis beaucoup trop de choses. Tu devrais en dire moins. Tu es trop naturelle, trop spontanée. »

AM : Je pense que la presse c’est un véritable trait d’union entre le public et la chanson pour toi, et entre les créations et les acheteurs pour moi. C’est un porte-parole en fait. S : Ben oui, du coup j’ai dit OK à tout. Et advienne que pourra ! En me coupant les cheveux, j’ai laissé tomber tous les traumatismes de mon dernier tournage de film. Je m’étais tellement imprégnée du rôle. Il avait

S : Ça me fait chier quand les gens contrôlent ce qu’ils disent. Je ne veux pas mettre un filtre ou dire la même chose à chaque interview. C’est naturel pour moi. Se mettre des barrières irait à l’encontre de ma musique, qui est honnête et directe. De toute façon je le dis, en interview, quand les questions sont nulles. [Rires] AM : Moi, tu sais, j’ai choisi d’être libre, et ouvert. J’ai toujours eu envie de mettre une part de générosité quand je travaille, quand je discute ou même sur Insta… Mais moi, dans la vraie vie, je ne suis pas compliqué. Ce matin à dix heures je suis allé acheter un

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Soko x AMI appareil à raclette, puis je suis parti signer les papiers pour une nouvelle boutique.

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S : Ah ah. Et moi j’étais avec le pompier pour faire déboucher mes toilettes ! AM : T’es partie il y a huit ans de Paris. Tu es partie à Londres, New York, Seattle et Los Angeles. Tu te sens française aujourd’hui ? S : Je suis française, née en France ! Mais même si ma vie c’est à LA, je suis très bien dans mes pompes ! Je ne me sens étrangère nulle part, ni à New York, ni à Paris ni à LA. AM : C’est quoi ton programme pour les prochains jours ? S : Je ne sais pas, ne rien faire pour moi m’ennuie, c’est la mort ! Je me mets des challenges tous le temps, je suis hyperactive, je parle trop vite, je fais tout le temps plein de trucs à la fois et mon cerveau fonctionne à dix mille à l’heure tout le temps. Et toi, t’es en train de conquérir le monde avec tes boutiques partout ?

aujourd’hui j’ai voulu m’habiller en fille, t’as vu j’ai mis une jupe moulante de secrétaire ah ah ah. Mais revenons à ton dernier défilé : tu as eu des critiques ? AM : Oui, cette saison j’ai été critiqué mais ça fait avancer, ça donne de la valeur à ton travail, ça donne des conversations, avec le journaliste qui t’a critiqué. J’avais touché un sujet un peu plus sombre. En fait, il y avait la même énergie que d’habitude, mais des événements actuels ont fait ressortir la mélancolie qui existe en moi. Paris était triste. On venait de vivre un attentat. Je n’ai pas voulu venir sur la scène avec mon bonnet rouge comme d’hab’, ça me semblait inapproprié. Même si je suis plutôt « léger », j’ai des responsabilités. J’ai voulu montrer un côté mature. Donc oui, ça déstabilise mais si on vivait sans critique, dans le confort ça n’avancerait pas ! Après j’ai eu des articles hallucinants, des compliments dithyrambiques, dans le New York Times, W… J’ai eu des échos magnifiques. Mais à côté de ça, ils m’ont dit attention, Alexandre, on n’a

« Ce matin à dix heures je suis allé acheter un appareil à raclette, puis je suis parti signer les papiers pour une nouvelle boutique. »

AM : J’avance tranquillement. Tu sais, j’ai eu peur cette saison pour mon défilé, mais je suis très content. Cette nouvelle collection se devait de représenter quelque chose parce que c’était la 9e ! Le 9, c’est mon chiffre portebonheur ! Regarde, il est tatoué sur mon poignet. Le 9 me suit partout dans ma vie depuis que je suis né. Même quand je n’en veux pas. Tu vois, il y 9 lettres dans mon prénom, dans mon nom, mon atelier, la rue de ma nouvelle boutique… Bref, du coup c’était top, ce défilé, on a eu un très bon accueil, des bons retours… Mais j’ai besoin d’amener d’autres degrés de lecture à ma marque. Même si je ne veux pas rentrer dans les codes, je souhaite garder notre ADN un maximum. C’est le même homme qu’avant, mais AMI il évolue, il mûrit, il est plus masculin, plus sophistiqué. Moi aussi, je n’ai pas qu’une seule façon de m’habiller. S : Moi c’est pareil je m’habille tout le temps différemment. Je mets souvent des pantalons taille haute genre des années 80 et des Creepers. J’ai tendance à me cacher. Mais

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pas habitude de te voir dans ces couleurslà ! C’est très drôle : j’avais prévu le coup et je savais que d’une certaine manière ça dérangerait. S : Pourtant, j’ai vu sur Insta des photos avec des manteaux colorés, genre orange et tout. Je trouve que c’était vivant. AM : C’était plus sophistiqué, plus travaillé en terme d’images, de couleurs que d’habitude… et toi, tu vis comment les critiques en tant qu’artiste indépendante ? S : Je m’en fous ! AM : Ah ah, je connaissais la réponse ! S : Si on me dit que c’est bien, c’est cool, je suis contente une seconde, puis je l’oublie. Mais je me remets en question en permanence. Je fais preuve de force et d’une vulnérabilité incroyable en même temps. J’ai confiance en moi, mais j’ai tout le temps envie de faire mieux, de progresser. Avec Ins-


Rubrique tagram, c’est facile de voir les réactions des gens. Quand je me suis coupé les cheveux, j’ai lu des commentaires genre : « Quoi ? Je suis trop déçue, tu changes, tu me déçois… » Les Français sont trop dans le jugement. Ils ont une image de moi. L’artiste rebelle, intouchable et ils sont déçus par n’importe quoi. Parfois ils deviennent violents. Moi je suis beaucoup plus ouverte d’esprit. Il ne faut pas s’arrêter aux a priori. Je pense qu’il a des gens bien dans chaque milieu et des cons partout aussi. J’ai mis une photo avec Paris Hilton, qui veut être ma copine à fond ! Elle est tellement cool avec moi, elle me dit que je l’inspire, qu’elle est fière de moi. Ça peut paraître à côté de la plaque vu que je suis une musicienne indé. Donc les gens sont dans le jugement comme si je cassais l’image qu’ils ont de moi. AM : C’est pour ça que je dis que quand on gère sa propre image on doit sans cesse être dans le contrôle. Il faut faire des choix qui nous ressemblent. Après, tes fans te critiquent car Paris Hilton véhicule l’image d’une fille bling-bling, bimbo avec des téléphones à paillettes. Toi, tu as cette image de fille de LA, d’artiste indé, branchée. Je trouve que t’es une très jolie fille d’ailleurs. Et j’ai du respect pour la musique car c’est direct. Moi une paire de pompes c’est différent. Ça n’est pas intime, toi tu rentres dans l’histoire des gens. S : Oui, mais regarde. Au final, les gens s’approprient tes chaussures comme ma musique. Ils se créent une histoire grâce à nous. AM : Tu sais, quand je croise des gens en scooter ou au restau avec une de mes pièces et qu’ils me regardent sans savoir qui je suis, ben moi je suis ravi. C’est une sorte de fierté. Moi, mon succès tient de celui de mes clients. Ils me font vivre. Toi, pour être une artiste, pas besoin de vendre des milliers d’albums. D’ailleurs, tu as lancé un truc la semaine dernière pour essayer de financer un album ? S : Oui. Y’a toujours des gens qui veulent m’épouser, alors pourquoi pas ! On fait un truc de fausse mariée ! Qui veut m’épouser pour la journée ? Je mets une robe blanche, je joue l’épouse idéale, je fais des photos avec chats et chiens, je vais aller voir la grand-mère malade à l’hôpital et tout. Je peux me marier avec une lesbienne ou un trans, c’est un truc ouvert à tout le monde. Tu sais, aux États-Unis je n’ai pas de label. Je préfère me produire toute seule, plutôt que de signer avec quelqu’un qui pourrait me compromettre. C’est ingérable financiè-

rement, surtout quand on est artiste indépendant. Je n’ai pas les moyens de payer les 5 000 dollars de Publicis par mois, plus les campagnes radio, plus les disques, et même partir en tournée ! Tout le monde pense qu’on gagne de l’argent quand on fait des tournées ! Alors oui, tu gagnes de l’argent quand tu fais des salles de 2 000 personnes ! Mais moi je fais des salles de 300, 500, parfois 800 quand c’est vraiment cool. Moi je perds de l’argent quand je pars en tournée, tout coûte super cher : en finançant les vans, les hôtels, la bouffe, les musiciens, je me paie pas… Toi, tu fais comment pour te financer en tant que créateur ?

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AM : Moi, c’est complètement différent. Toi, c’est magique la musique. Comme la peinture. Tu te réveilles avec une mélodie dans la tête, tu t’installes à ton piano et tu joues. Ta création est immédiate ! Moi, le moment où j’ai l’idée de faire une chemise, l’envie et le moment où elle se retrouve en boutique il faut presque un an ! Malgré la proximité qu’offre internet, il faut payer ! Il faut beaucoup d’argent pour la mode, il faut fabriquer, on a besoin d’un bureau de presse, d’un service commercial. Comme toi quand tu pars en tournée et qu’il faut les musiciens, le van et tout. Il faut de l’argent c’est comme une plante que tu arroses ! J’ai 40 salariés et je vais avoir trois nouvelles boutiques. On grandit, quoi. J’arrive à un stade où il faut tout gérer en profondeur. On cherche à se professionnaliser. Ça n’est plus les mêmes enjeux qu’il y a trois ans, quand je dessinais tout seul dans mon appart, avec mes petits bouts de tissus. La mode c’est aussi le changement. Il faut faire attention aux rapports que l’on a avec les gens. Il faut se mettre en danger, et se renouveler. Il faut se laisser la liberté de le faire. C’est un peu égoïste mais c’est toi d’abord. Tu es le chef du bateau ! S : C’est pareil pour moi. Faire quatre films cette année et m’oublier un peu c’est génial, c’est me mettre dans la peau de quelqu’un d’autre comme pour Augustine. Après le film, j’ai replongé dans mon enfance avec le nouvel album, j’ai redécouvert qui j’étais et quand je sature, je me relance dans le cinéma. J’ai trouvé l’équilibre. AM : Trop bien. Allez, mon chaton, c’était trop sympa cet après-midi avec toi, mais il faut vraiment que je file au travail. On fait un selfie pour les souvenirs ! Attends, viens là, il y a plus de lumière. Soko, My Dreams Dictate My Reality (Because Music) www.s-o-k-o.com/music

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Yelle

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Photos¬Estelle Rancurel @ Le Crime Stylisme¬Nicolas Dureau

Pas besoin d’avoir vécu une époque pour se l’approprier. La talentueuse Yelle interprète la tendance incontournable de la saison. That’s her 70s show.

Maquillage¬Yann Boussand Larcher @ Call My Agent avec les patchs « Pastel Eyes » de chez Dior. Coiffure¬Chiao Chenet @ Airport Agency Retouche¬Sophie K Un grand merci au Derrière, 69, rue des Gravilliers, 75003 Paris

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Chemisier Maison KitsunĂŠ. Gilet G-Star. Pantalon The Seafarer. Bottines Acne Studios. Montre Nixon.

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Robe Emilio Pucci. Perfecto Pepe Jeans. Bague Maty.

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Pull Cédric Charlier. Jupe Y’s Yohji Yamamoto. Escarpins Isabel Marant. Lunettes de soleil Vuarnet x AMI. Bague Maty.

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Yelle

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Top Monki. Veste Isabel Marant Etoile. Robe Le Temps des Cerises.

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Veste, short et ceinture Jean Paul Gaultier. Blazer oversize Faith Connexion.

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Paul Smith x Jimmy Page Yelle

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Chemise Superdry. Top Damir Doma. Bague Maty.

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Paul Smith x Jimmy Page Yelle

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Pull Sandro. Manteau CotĂŠlac. Jupon Marni. Pochette MM6.

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Top Monki. Robe Versace. Pantalon Thakoon. Bottines Acne Studios.

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Robe Valentino. Sabots US Polo Assn. Bague Maty.

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Robe et escarpins Acne Studios. Bijou de corps Giuseppe Zanotti.

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Charlotte OC

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La jeune fille en noir Interview¬Joss Danjean Maquillage¬Yann Boussand Larcher @ Call My Agent avec les produits M.A.C COSMETICS Coiffure¬Yoann Fernandez Un grand merci au Studio Silver Clash,10 bis, rue Muller, 75018 Paris

La petite Anglaise Charlotte O’Connor, aka Charlotte OC, a connu ses plus grands émois musicaux au mythique Berghain de Berlin. Aujourd’hui, elle enregistre sa musique à Los Angeles. Une pop aussi dark qu’envoûtante. Voici ce qu’elle raconte à Modzik entre deux prises de vues lors de son passage à Paris. Photos¬Rachel Rebibo Stylisme¬Yasmina Benabdelkrim

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Charlotte OC

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Casquete Zana Bayne. Chemise Veronique Leroy.

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Veste Azzedine Ala誰a. Gants Wolford.

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Charlotte OC

Comment t’es-tu rendu compte que tu voulais faire de la musique ? À 5 ans, j’étais dans une chorale, et je pouvais m’entendre chanter, et je voulais être seule devant à chanter. À cet âge-là, tu n’as peur de rien, tu es sûr de toi et intrépide. La peur vient plus tard… Et concernant l’écriture, je me souviens que plus tard j’écoutais la radio, et alors que les chansons passaient je me disais souvent : à cet endroit j’aurais plutôt entendu ça, je verrais le « pont » comme ça ou les arrangements sur le refrain autrement. C’est comme ça que je me suis rendu compte que je voulais créer de la musique. Et quel a été le déclic ? Plus tard, je me souviens que je voulais être Alicia Keys, j’étais obsédée par elle. J’allais la voir en concert (j’ai un souvenir très précis d’elle sur la scène de l’Apollo à Manchester et cela m’avait tellement marquée). Alors que j’avais 13 ans, je participais alors à un concours de chant à l’école et je m’étais dit que si je gagnais c’était un signe. Et j’ai gagné le concours. Je me sentais si bien sur la scène : c’était ce que je voulais faire pour revivre cela encore et encore. À 16 ans, tu mets de la musique sur Myspace et tu décroches un contrat dans une maison de disques, c’est assez incroyable, comment cela est-il arrivé ? Mon père m’avait acheté un enregistreur 12 pistes quand j’étais jeune, je ne savais pas trop comment il fonctionnait et je m’en suis servi de manière intuitive. Mais je parvenais à enregistrer, stopper, additionner les pistes et graver sur CD. Avec les morceaux que j’avais mis sur Myspace j’ai eu un petit buzz, Quiksilver m’a contactée pour des événements… Alors que je conversais avec un ami musicien assez connu, Columbia a vu mon nom dans sa liste d’amis et ils m’ont contactée.

Et pourtant tu n’as pas eu de chance en travaillant sur un album qui n’est jamais sorti… Qu’as-tu retiré de cette expérience ? En fait, même si c’était dur à vivre, je me rends compte aujourd’hui que c’était un mal pour un bien. À l’époque, je ne savais pas trop vers quel style je voulais m’orienter, j’étais trop jeune et influençable. À travers cette phase j’ai appris beaucoup sur moimême : cela a donc été bénéfique, bien qu’assez pénible à vivre. Aujourd’hui, je crée la musique qui sort de ma tête et personne ne me dit ce que je dois faire ou chanter : c’est tout ce qu’un artiste désire, non ? Tu as vécu une expérience assez dingue à Berlin, peux-tu nous raconter cela ? C’était il y a deux ans, je n’étais jamais allée là-bas auparavant. Pour être totalement honnête, je ne m’attendais pas à grand-chose et lorsque je suis arrivée, j’ai eu comme la sensation bizarre d’être chez moi, d’avoir une vraie connexion avec la ville, ce qui ne m’était pas arrivé depuis longtemps. C’était vraiment étrange. Je suis restée cinq jours là-bas, j’ai visité la ville, je suis allée dans plusieurs soirées et des clubs absolument géniaux et le dernier soir, je suis allée au Berghain. Je n’arrêtais pas de demander à mes amis : mais comment c’est cet endroit et personne ne me répondait ! Je n’avais aucune idée de ce que j’allais voir là-bas. Pour commencer, ce bâtiment assez austère est impressionnant et dès que tu entres, tu entends, ce rythme et ça été la meilleure techno que je n’ai jamais entendue. Par contre, je n’étais pas préparée à ce que j’allais y voir, les gens se lâchaient complètement, personne ne se préoccupe de ce qui se passe autour. Comme si l’hédonisme était la religion de ce lieu. J’ai vu des choses incroyables se passer juste à côté de moi sur

la piste : les gens se perdent en eux-mêmes. Et en fait, c’est que je ressens lorsque je monte sur scène. À un moment pendant le set du DJ, j’ai entendu la voix de Bon Iver survoler un morceau club intitulé « Hi Life » de Monkey Safari. Sa voix résonne comme un gospel et il y a effet d’écho comme dans une église : c’était comme une expérience religieuse. J’ai su que c’était ce son et cette musique que je voulais faire. En rentrant à la maison, j’ai changé de management, je me suis envolée pour Los Angeles, j’ai rencontré Tim Anderson (qui a travaillé avec Lana Del Rey, Sia et Solange, NDLR) et

c’était important pour moi de rester connectée avec ce style, il fait partie de mes racines musicales aussi. Avec qui aimerais-tu collaborer ? J’aimerais beaucoup travailler avec Caribou, poser ma voix sur sa musique. Son morceau « Back Home » résonne en moi. J’aime aussi Hozier et je pense qu’il a le même background gospel que moi : je pense qu’on s’entendrait bien. Là, je vais sortir un autre EP avant l’été et, j’espère, mon premier album pour septembre. Mais je ne veux pas brusquer les choses, je veux prendre le temps qu’il faut.

« Quand j’étais plus jeune, j’écrivais des chansons inspirées des histoires d’amour de ma grande sœur. » je lui a raconté mon expérience et lui ai joué deux morceaux qui flirtaient avec l’esprit de ce que je voulais et on a enregistré « Colour My Heart » qui capture ce qui m’est arrivé là-bas. Qu’est-ce qui t’inspire pour écrire tes chansons ? Beaucoup de mes chansons peuvent sembler des chansons d’amour comme « Hangover », par exemple, mais elles n’en sont pas. Je suis touchée par beaucoup de choses, en fait. Je m’inspire de ce qui se passe autour de moi : quand j’étais plus jeune, j’écrivais des chansons inspirées des histoires d’amour de ma grande sœur. J’écris aussi à propos du fait d’être une Northerner (fille du nord) à Londres : c’est très bizarre. C’est pas facile d’être loyal à tes origines dans une ville qui te pousse à gommer celles-ci. Tu as eu de très bons remixes par des DJs/producteurs de renom comme Moodymann, c’était une vraie envie de ta part ? J’écoute de la house music depuis mon adolescence et

Un autre élément important de ton univers ce sont tes vidéos, est-ce important de relier le visuel à ta musique ? Complètement : quand je crée ma musique, je vois des images, des atmosphères. Tout ça est assez sombre sans être complètement noir, certaines couleurs sont incorporées pour donner une nouvelle perspective sur cet univers nocturne. Je vais faire une toute nouvelle vidéo pour un titre inédit « If My Mouth is Burning » : je ne peux pas trop en parler sans dévoiler le concept mais c’est très fort ! As-tu des collaborations en prévision ? Pour l’instant, je me concentre sur ma musique, quoique j’aie travaillé avec Justin Martin quand j’étais à Los Angeles. Il a d’ailleurs fait un remix de « Strange » que j’adore ! J’ai enregistré des vocaux pour lui pour son album à venir. Mais dans les prochains mois, je vais seulement travailler à mon album. Charlotte OC www.charlotteoc.com

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Charlotte OC

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Gants Wolford.

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Charlotte OC

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Ta couleur préférée ? Noir. Il y a une marque anglaise (Surrey Nanosystem, NDLR) qui développe le plus noir des noirs que l’on ait jamais vu ; tellement noir que même l’œil humain ne comprend pas ce qu’il voit, avec un taux d’absorption de lumière jamais vu jusqu’à aujourd’hui. C’est ce noir-là ma couleur favorite ! Tu es plus maquillage des yeux ou des lèvres ? Définitivement ombre à paupière, parce mes yeux racontent mon histoire. Ton son préféré ? J’adore le son que font les pièces que l’on glisse dans la machine pour régler aux péages d’autoroutes… Le son que tu détestes ? Je déteste le son produit par un compte à rebours… Quel est le lieu que tu préfères dans le monde ? Berlin, car cette ville m’a vraiment inspirée afin de créer ma musique et mon style. Ton plus beau lever ou coucher de soleil ? C’était au Malawi : je ne peux pas vraiment expliquer ce que j’ai vu et ressenti par des mots mais c’était tout simplement incroyable. Ton show TV préféré ? Les Soprano. Pour moi c’est le meilleur programme que j’ai vu à la télé. Ton livre favori ? The Twits par Roald Dahl, parce que mon père me le lisait lorsque j’étais petite. Lorsque tu veux danser, où te rends-tu ? Au Berghain à Berlin : le meilleur club de la planète ! Quelle est ta dernière tentation de mode ? Un blouson KTZ. Je me suis aussi acheté des bottes de callgirl avec un talon vertigineux à Los Angeles ! Et quels sont les marques ou designers que tu affectionnes ? Chanel pour les sacs et Acne pour leur style unique. Et puis tout bêtement Zara pour les vêtements de tous les jours…

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Mode M90

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Toujours plus de tendances, toujours plus d’idées, toujours plus d’envies mais toujours autant de mètres carrés dans le dressing. No panic. On ne va pas casser les murs, juste vous montrer ce qu’il faut retenir de cette saison.

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Jeanne porte un soutien-gorge et pantalon Louis Vuiton. Foulard Rockins.

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Louis Vuitton Assistante styliste¬Chloé Dupuy Modèles¬Éléonore Toulin @ Ford models Solène Hebert @ Effigies Jeanne Damas @ IMG models Maquillage¬Sergio Corvacho @ Walterschupfermanagement pour Yves Saint Laurent Beauté Coiffure¬Giovanni Di Stefano

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Photos¬Alex Antitch Stylisme¬Yasmine Eslami

Éléonore, Jeanne et Solène MODZIK


Rubrique Givenchy

Jeanne porte une robe Givenchy par Riccardo Tisci

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Rubrique Lacoste

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Solène porte une robe Lacoste. Sandales Pierre Hardy. Foulard Rockins.

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Stella McCartney

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Solène porte une robe Stella McCartney.

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Maison Margiela

Jeanne porte une robe et combishort Maison Margiela.

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Vanessa Bruno

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Solène porte une robe Vanessa Bruno.

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Vivienne Westwood

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ÉlÊonore porte une veste et un pantalon Vivienne Westwood Gold Label. Sandales Michel Vivien.

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Dries Van Noten

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ÉlÊonore porte une robe Dries Van Noten. Soutien-gorge marine Yasmine Eslami.

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Sonia Rykiel

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Solène porte une veste Sonia Rykiel. Maillot Eres.

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Chanel

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ÉlÊonore porte une robe en maille Chanel.

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Modèles¬Yulia @Ford models Fay @ Ford models Maquilage¬Ismael Blanco @ Agence Aurélien avec les produits L’Oréal Coiffure¬Mickael Jauneau @ Agence Aurélien Texte tiré de la chanson « Bold as Love » de Jimi Hendrix Un grand merci au Studio Flesh, 19, rue d’Hauteville, 75010 Paris

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Bold as love

Photos¬Emma Picq Stylisme¬Isabelle Decis

Anger he smiles, towering in shiny metallic purple armor Queen jealousy, envy waits behind him Her fiery green gown sneers at the grassy ground MODZIK


Gucci

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Robe, gilet et ceinture Gucci. Turban Saint Laurent par Hedi Slimane.

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Paul Smith

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Blue are the life giving waters taking for granted They quietly understand. Tunique Paul Smith. Gilet et bijou de tĂŞte Kiliwatch. MODZIK

LĂŠgende de la photo


Carven

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Once happy Turquoise armies lay opposite readyemotion Robe Carven. Top Kiliwatch. MODZIK


Louis Vuitton

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But wonder why the fight is on

Veste et pantalon Louis Vuitton. Fleurs cheveux Karuna Balloo. MODZIK


Saint Laurent par Hedi Slimane

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But they’re all bold as love Chemise, veste et jupe Saint Laurent par Hedi Slimane MODZIK


Rubrique Prorsum Burberry

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they’re all bold as love they’re all bold as love Just ask the Axis Robe Burberry Prorsum. MODZIK


Rubrique Marni

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My Red is so confident He flashes trophies of war and ribbons of euphoria

Top et pantalon Marni. Chemise Kiliwatch. Collier Hermès. MODZIK


Rubrique Ralph Lauren

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Orange is young, full of daring

But very unsteady for the first go round Robe et top en crochet Ralph Lauren. Gilet Ă franges Kiliwatch. MODZIK


TommyRubrique Hilfiger

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My Yellow in this case is not so mellow In fact I’m trying to say that it’s frightened like me And all these emotions of mine Keep holding me from giving my life to a rainbow like you Robe et gilet Tommy Hilfiger. MODZIK


Rubrique Karl Lagerfeld

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But I’m, yeah, I’m bold as love Well, I’m bold, bold as love I’m bold as love Robe Karl Lagerfeld. Chemise Kiliwatch. MODZIK MODZIK


Rubrique Hermès

Just ask the Axis, he knows everything

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Top Hermès. Jupe et foulard Kiliwatch. MODZIK


BeautĂŠ

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Top Vetements. Manteau Martine Rose. Collier et bague Hannah Martin.

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Beauté

Photos¬Markus Lambert Maquillage¬Christina Lutz @ B-agency Texte¬Bianca O’Brien Stylisme¬Leonie von Lieres & Guido Werth @Kollektivnoir Modèle¬Bianca O’Brien @ IMG models

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Coiffure¬Mike Desir @ B-agency Un grand merci au Studio Deux Choses Lune,140, rue Oberkampf, 75011 Paris

Bianca is Bowie David Bowie a dit un jour : « Talking about art is like dancing about architecture. » En dépit de cet avertissement, je vais quand même essayer…

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Bianca O’Brien

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Veste Chanel.

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Bianca O’Brien

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Chemise Kenzo. Veste Chloé.

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Bianca O’Brien

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Top Yohji Yamamoto. Combinaison Jean Paul Gaultier. Chapeau Maison Michel. Bague Hannah Martin.

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Veste Jamie Wei Huang. Pantalon Louise Amstrup.

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Bianca O’Brien

Top Y/Project. Trench Wanda Nylon. Pantalon Chanel.

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Bianca O’Brien Quand Modzik m’a proposé d’écrire ces mots, je me suis sentie honorée de parler de cette star emblématique. Venant d’un milieu tout à fait normal (sa mère était serveuse et son père travaillait pour Barnardo’s, une organisation caritative), il a prouvé qu’un tel talent pouvait naître n’importe où, n’importe quand. Jusqu’à présent, sa carrière couvre quatre décennies et son ascension et gravée dans l’histoire de la musique. Je devais avoir 18 ans quand j’ai rencontré David Bowie. Je faisais partie des cinq femmes (dont l’envoûtante et emblématique Veruschka) qui devaient défiler pour un créateur mis à l’honneur lors d’une cérémonie de remise de prix pour les talents de la mode. Se préparer backstage et défiler avec Veruschka, en direct à la télévision, avec un public prestigieux assis en face et autour de nous, n’était pas la seule raison de chérir se moment. De nombreuses célébrités sont passées backstage, mais c’était David Bowie et sa femme Iman qui m’ont le plus impressionnée. Ils sont venus voir Veruschka puis j’étais présentée. Ces deux beautés, grands, élégants, bien habillés avec une carrure effrayante, ont tendu leur bras pour me serrer la main et j’ai fait de mon mieux pour avoir l’air cool. C’était un exploit si on considère que j’étais pleinement consciente de leur parcours et que je ne pensais qu’à appeler mes parents pour leur raconter. En y repensant, je me rappelle d’une citation connue de Bowie : « On pourrait penser qu’être une rock star mariée à un supermodel serait une des plus belles choses du monde, c’est vrai », et je dois dire que cela en avait l’air. C’est la quatrième fois qu’on me demande d’incarner David Bowie et j’espère que ce ne sera pas la dernière car il est singulier et merveilleusement original. Pour Modzik, je suis devenue la version la plus élégante et androgyne de David Bowie, ce qui est de loin mon look préféré parmi tous les siens. Costumes chic et esprit torturé. J’aurais pu continuer ce shooting pendant des heures et j’étais triste d’abandonner ce sentiment à la fin de la journée. C’était un plaisir de porter autant les interprétations des images que les gens ont de lui que ce qu’il était. J’ai appelé mon père pour discuter de David Bowie pendant l’écriture de ce portrait et nous avons passé une demi-heure à parler de l’empreinte qu’il a laissée pendant ses années de spectacle. De nous deux, mon père est le plus grand fan. Il admire son style et son image caméléon et la façon dont ses concerts deviennent des shows spectaculaires qu’on sent toujours orchestrés par une véritable personne. Ce grand performer a réalisé que chanter des chansons pop sur scène demandait plus et il a changé l’interprétation de ce « plus » tout au long de sa carrière. En donnant toujours quelque chose de convainquant. Aux côtés de Arthur Brown « The God of Hellfire » et Freddie Mercury de Queen, on avait le sentiment d’être immergé, parfois même pour de brefs moments, dans l’esprit et les passions d’un autre, aussi déroutant et réjouissant soit-il. Cela permet de rêver, des rêves psychédéliques, des rêves fuyant la réalité. Après avoir vu Arthur Brown et parlé avec lui, mon père se rappelle avoir dit à un ami (un roady de Deep Purple, Ron Quinton), que peut-être Deep Purple devrait être plus théâtral dans leurs spectacles. Ron soutenait que leurs jeans et vestes en cuir convenaient à leur musique mais plus tard, ils se sont tournés vers quelque chose de différent. David Bowie pouvait faire ce genre de choses : il pouvait inciter les autres à progresser et il pouvait rendre les gens ordinaires plus magiques. Mon père a dit que pour lui, Bowie est un des véritables artistes qui restait fidèle à lui-même. Ses chansons sont toujours bien pensées. Il apparaît comme un penseur, un philosophe, un créatif. Il semble toujours ouvert et avenant. Qu’il soit ou ait été bisexuel – quelque chose qui a cristallisé l’intérêt du public – peu importe, il s’en moque et les Britanniques aussi. En ce qui concerne les Anglais, il pouvait faire ce qu’il voulait, le public le suivait toujours. La seule question était que va-t-il faire après. Les Britanniques sont fiers de lui, non seulement pour ses succès mais aussi pour la façon dont il a vécu sa vie. Il semble avoir toujours fait ce qu’il voulait, fréquenté qui il voulait, gagné beaucoup d’argent et a été adoré jusqu’à la folie et cependant il n’a jamais paru arrogant. Il a toujours semblé humble, adorable et plein d’humour. David Bowie a demandé un jour à un autre grand musicien, John Lennon, ce qu’il pensait de son travail, ce à quoi Lennon a répondu : « C’est génial mais c’est juste du rock’n’roll avec du rouge à lèvres par-dessus. » Le fait que Bowie a répété les mots pendant les interviews prouve qu’il prenait très au sérieux son travail, mais pas sa personne. Si vous n’avez pas encore lu la première lettre qu’il a écrite à un fan, faites-le. C’est un parfait exemple de son humour et son grand cœur. Comme un pote que vous admirez.

En dehors de son talent de musicien, la raison qui fait que je suis une grande fan de David Bowie est qu’il est extrêmement drôle. Il y a une scène hilarante dans une série anglaise, Extras, avec Ricky Gervais dans laquelle David pousse une section VIP entière, dans une soirée, à chanter une scène du personnage de Gervais. L’interview dans laquelle il explique pourquoi il a accepté le rôle est à elle seule comique. Et pour moi, les producteurs, écrivains, réalisateurs devraient lui proposer plus de rôles comiques. Ce serait une perte s’il ne le faisait pas. Bowie est réellement un des vrais trésors artistiques britanniques. Il a été à la fois prolifique et accompli dans ses talents divers. Il n’y a peut-être que dans la comédie qu’on ne lui a pas donné sa chance. Mais pour moi, sa carrière d’acteur aurait pu commencer et finir avec son rôle dans le film culte Labyrinth et j’aurais été encore satisfaite. J’étais très jeune quand j’ai vu ce film pour la première fois et être touchée par la confusion que son personnage apporte, ce que j’ai ensuite compris être une figure sexuellement exubérante. Comme musicien il est mondialement connu pour avoir changé la donne. Il est aussi respecté comme parolier. « Ashes to Ashes » de son album le plus vendu, Scary Monsters, parle de sa bataille avec la drogue, qui lui a presque été fatale. Beaucoup pensent que les paroles de sa chanson « Space Oddity » font en fait allusion à un complot soviétique impliquant la mort de cosmonautes à cause de dysfonctionnements techniques. La seule chose que nous savons est que l’obsession du public pour les vaisseaux spatiaux pendant les 60’s et 70’s a influencé plusieurs de ses chansons et reste comme l’une des périodes les plus marquantes de sa carrière. J’ai lu qu’il avait dit un jour : « La seule chose que j’ai gagnée avec la célébrité est une meilleure table au restaurant, et pour cela, j’ai abandonné la capacité de me connecter aux gens. » Cependant il renvoie toujours autant de mystère et touche les gens avec ses lyrics, ce qui dans un sens semble contradictoire. La presse britannique a beaucoup parlé ces derniers temps des inégalités entre les classes pour se permettre de trouver le temps nécessaire et se développer artistiquement. Pouvoir s’offrir un piano, une guitare ou un instrument quelconque, pouvoir s’offrir des leçons de toutes sortes afin d’évoluer et de s’épanouir dans la musique. Ce problème concerne aussi Bowie en tant qu’enfant venant d’un milieu simple et ayant connu une réussite impressionnante (quelque chose de plus en plus rare mais heureusement pas pour toujours). Les talents doivent être découverts et poussés. Après avoir échoué à ses examens à 11 ans, Bowie est allé au Bromley Technical High School. Il a eu la chance de rencontrer Owen Frampton qui a été professeur au département d’art de l’école. Frampton a remarqué rapidement son talent musical et son enthousiasme et a été d’un grand soutien à tel point qu’il l’a encouragé une amitié entre lui et son fils, Peter, de 3 ans plus jeune. Peter était également naturellement doué, apprenant seul à jouer du ukulélé qu’il avait trouvé dans le grenier chez sa grand-mère. Il a ensuite appris seul le piano et la guitare. Ces deux amis sont devenus des stars accomplies et connues en Angleterre (Peter Frampton a joué avec Bill Wyman, Ringo Starr, The Bee Gees, etc). Bowie, qui peut jouer de 14 instruments, était proche de Freddie Mercury et est resté ami avec Elton John, mettant en lumière le respect et la camaraderie parmi ceux qui atteignent de tels sommets dans la culture britannique. Il a joué avec les meilleurs dont Queen, Mick Jagger, Annie Lennox, Bing Crosby, Tina Turner et Iggy pop. Il a aussi enregistré avec Lou Reed. Éclectique et toujours unique avec sa voix si reconnaissable. La musique est une partie très importante de la fierté nationale anglaise. Je dis cela de manière ironique mais ça reste vrai. La fierté est considérée comme un trait de caractère déplaisant qui doit être effacé, l’humilité étant une vertu reconnue par nos parents. Cependant, la richesse des talents musicaux qui continuent d’émerger en Grande-Bretagne est peut-être la seule exception à la règle. La liste des compositeurs et musiciens britanniques ne peut pas être ignorée et est quelque chose que les autres pays nous reconnaissent. Le compliment le plus courant que j’entends des Parisiens vivant ici est leur amour pour la musique anglaise, moderne comme plus ancienne. David Bowie, faisant partie de cette longue liste, est un des rares qui a surfé sereinement sur tous les autres. Comme Björk, vous n’êtes pas obligé de l’adorer, vous pouvez même ne pas aimer sa musique mais il est impossible de nier qu’il est un des plus grands. Maintenant et pour toujours. Long live David Bowie, in all his colours and rythms.

« En ce qui concerne les Anglais, il pouvait faire ce qu’il voulait, le public le suivait toujours. La seule question était que va-t-il faire après. »

Exposition « David Bowie is », du 3 mars au 31 mai, à la Philharmonie de Paris.

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What’s in our bag ?

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Photos¬Elise Toïdé Styliste¬Théophile Hermand Styliste beauté¬Irina Munz

Kit de (sur)vie Onze défilés quotidiens, multipliés par neuf jours de présentations, auxquels s’ajoutent cocktails, soirées et RDV pro improvisés. Essayer de survivre à la Fashion Week les mains dans les poches relève de l’utopie. Passage en revue des tours que notre team avait dans son sac.

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What’s in our bag ? Isabelle Decis, directrice mode

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Faire tenir autant de choses dans un si petit sac... C’est quoi son secret à Isabelle ? Un lien de parenté avec David Copperfield ?

Sac Valentino. Bracelet Christian Dior. Portefeuille Saint Laurent par Hedi Slimane. Carnet Maison M. Allumettes Hay chez Maison M. Broche Chanel. Pins Macon&Lesquoy. Crème mains Neutrogena. Vernis « Le Rouge Intense N98 Coromandel » Rouge Allure Chanel. Parfum « La Religieuse » Serge Lutens. Cellularose nutri-baume, soin apaisant intensif By Terry.

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What’s in our bag ?

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Tendre son carton d’invitation au joli hôte d’accueil. Prendre des notes en direct du premier rang. Serrer la main du créateur pour le féliciter à la fin du défilé. Faire la bise à ses copines mannequins. Manucure impeccable, rouge à lèvres de rigueur et superfood pour tenir la distance. Nora a fait le choix des armes. Nora Baldenweg, rédactrice en chef

Sac Christian Dior. Lunettes Miu Miu. Porte-carte Saint Laurent par Hedi Slimane. Eyeliner Make Up For Ever. « Cotton Care Zephyr Hand Cream » & Other stories. Rouge à lèvres « Lips& Boys » Diego Tom Ford Beauté. Le vernis « Nail Colour », N613 Eastern Light et taille-crayon Chanel. « Diorskin Nude Tan Matte » N002 Matte Amber Dior. Baume à lèvres « Hydro Salve » Baxter of California chez Colette. Parfum solide Philosykos Diptyque. Vernis Dark Trench N106 Burberry.

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What’s in our bag ? Nicolas Dureau, rédacteur mode

Le sac à dos, c’est le nouveau sac à dos. La basket, c’est le nouveau mocassin. La Wayfarer... bah c’est la Wayfarer enfin ! Besoin d’une leçon de style ? Demandez à Nicolas.

Sac à dos Jérôme Dreyfuss. Portefeuille Louis Vuitton. Sneakers Dior Homme. Porte-carte Delvaux. Lunettes Karl Lagerfeld en exclusivité chez Optic 2000. Ruban Mokubas. Lotion hydratante absorbante et ultra-légère pour hommes Kiehl’s. Le défatiguant yeux « Lift Intense » Givenchy Man. Concealer correcteur de teint Tom Ford For Men. Eau d’arômes vaporisateur Giorgio Armani.

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What’s in our bag ?

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Cette saison, la Fashion Week de Laurent c’était beaucoup d’idées, peu d’heures de sommeil. D’où la crème hydratante, les lunettes de soleil et la réserve de carnets de note. Laurent Burte, directeur artistique

Sac Louis Vuitton. Lunettes Dior Homme. Foulard Saint Laurent par Hedi Slimane. Carnet Quo Vadis. Gel nettoyant micro-purifiant Dior Homme. Baume efficace pour le contour des yeux et des lèvres Sisley. Baume pour barbe David Mallett. Crème hydratante réparatrice Shiseido Men.

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What’s in our bag ?

Assez de se moquer des Belges ! On leur doit cette magnifique invention : le it bag transparent. Pratique pour celles qui comme Irina ne savent pas ce qu’elles y jettent, mais veulent le trouver sans avoir à y plonger le bras tout entier comme dans une épreuve de Fort Boyard. Irina Munz, rédactrice beauté Sac Delvaux. Chaussures Rochas. Carnet Maison M. Lunettes de soleil Linda Farrow. Bracelets or et argent Chanel. Rouge à lèvre « Pure Matte » Nars. Eyeliner waterproof haute précision N°4 Vert Lagon Diamant, N°9 Fuchsia Irisé , Fard à paupières waterproof N22 Make Up For Ever. « Moisturizing With A Mask », Bain d’hydratation Phyto-Alpin Valmont. « Eye Powder-Kajal » Poudre khôl Orientale By Terry. « All Day All Year », soin essentiel de jour anti-âge Sisley. « Pomelo Paradis » et « Santal Carmin » Collection Métal Atelier Cologne. Shampooing sec Drynamic Sebastian Professional. « Forever Light Creator » UV Protection Yves Saint Laurent. « Compact Sourcils » BR603 Brun clair Shiseido. « Roll-on Imperfections Locales », Aroma pureté Decléor. « Pure Color », ombre à paupières gelée poudrée Fire Sapphire Estée Lauder. « Skin Caviar Luxe Cream » La Prairie. Recourbe cils Shu Uemura.

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Dream Pop

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© Toby Burrows

Sohn

The Acid Rhye

Du rêve à l’état pur Texte¬Joss Danjean

Sous-genre du rock alternatif, une musique qui met autant les mélodies que les textures sonores et les voix susurrées en avant, tout cela avec une esthétique entre intimisme et abstraction, la dream pop est un mouvement assez mouvant, aux limites difficiles à cerner mais qui connaît dernièrement quelques rebondissements qui feront date…

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Phénomène assez indie, une nouvelle mouvance se détache depuis quelques saisons avec des groupes d’obédience assez mélancolique comme Daughter, trio franco-anglo-suisse qui publie son premier album en 2010 sur le mythique 4AD (maison déjà férue d’artistes aux ambiances sonores particulièrement marquées) ou de style plus léger comme Blue Hawaii, duo mixte canadien qui publie lui aussi son premier opus la même année sur le label Arbutus. Tandis que, sans crier gare, le duo Rhye formé à Los Angeles par le Canadien Michael Milosh et le Danois Robin Hannibal (de Quadron) va jeter un pavé dans la mare en refusant se montrer (on ne les verra jamais dans les vidéos et ils se produiront sur scène dans le noir ou en ombres chinoises) mais, surtout, ils ajouteront une touche de soul qui fera mouche dès leurs singles « The Fall » et « Open » : leur album Woman sort sur Innovative Leisure (label de Hanni El Khatib). Autre formation aux origines variées, The Acid, l’association du DJ/producteur anglais Adam Freeland, du producteur californien Steve Nalepa et de l’artiste-chanteur australien RY X, qui publient leur premier EP en 2013, eux aussi avec un style nettement plus sombre et plus électronique, essai qui se verra transformé par leur album Liminal en juillet 2014 : un disque perçu comme la fusion de la pop mélodique avec la noirceur de Burial. Un album assez dramatique qui fera date. Retour chez 4AD avec Christopher Taylor, artiste londonien expatrié à Vienne en Autriche qui se réinvente sous le nom de


Dream Pop

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Dream Koala est-il né d’un désir d’émancipation ? C’est à mes 17 ans, alors que j’étais dans un groupe de metal progressif avec des amis d’enfance, que Dream Koala est né. Ce n’était qu’un side project au départ, je souhaitais pouvoir composer seul et éviter bon nombre de galères que tous les groupes connaissent. Jamais je n’aurais pensé faire des concerts et vivre grâce à ma musique. Comment passe-t-on du metal progressif à la dream pop ? Le changement de style n’est pas volontaire, c’est quelque chose qui s’est fait naturellement. Tous les artistes que j’apprécie comme Stanley Kubrick, Björk ou encore Miles Davis ont changé de style au long de leur carrière. Je pense que l’on change tous avec le temps, je ne suis pas la même personne qu’il y a quelques années et je trouve ça important qu’on le ressente dans ma musique. Par exemple, j’ai commencé en faisant de la musique instrumentale, alors qu’aujourd’hui la voix et les textes sont des parties importantes de mon univers.

Dream Koala

Un des derniers nouveaux venu de ce mouvement étrange et presque impalpable est basé à Berlin, répond au nom – judicieusement choisi – de Dream Koala et distille, lui, une musique plutôt empreinte d’abstraction. Il mêle, comme tous ces artistes, sa musique à une imagerie forte à base d’images et de vidéos marquantes.

Peux-tu nous parler de ta nouvelle vidéo ? Oui c’est un clip pour le morceau « Earth », réalisé par Fabulous, le duo d’artistes qui avait déjà réalisé mon dernier clip Odyssey. Je suis impatient qu’il soit en ligne, Adrien et Albin (les garçons de Fabulous) travaillent dessus depuis quelques mois déjà. La vidéo sera plus sombre que celle d’« Odyssey » et complétera l’histoire de l’EP Earth. Home. Destroyed. Je trouve que l’image est tout aussi importante que la musique dans mon projet, c’est quelque chose qui me tient très à cœur.

© Jack Davison

Blue Hawaii

© Marilis Cardinal

Lo-Fang

Ton projet musical Dream Koala semble répondre à celui d’autres artistes dream pop, comment expliques-tu cela ? Je pense qu’aujourd’hui, tout va trop vite. Pour le grand public, tout doit être intense, compressé, les couleurs doivent être plus vives, les voix doivent sonner plus juste. Être humain, rêver et méditer n’est pas intéressant, il faut consommer plus et réfléchir moins. Je ne peux pas parler au nom des autres artistes, mais je crois que faire de la musique rêveuse, mélodique et atmosphérique, c’est une façon de s’opposer à tout cela, comme une rébellion nonviolente. Je n’ai pas l’impression de faire partie d’un mouvement ou d’un genre particulier, mais peut-être qu’il y a un renouveau, oui…

©Lauren Dukoff

Sohn en enterrant son projet Trouble Over Tokyo au bout de 4 albums. Son premier EP, The Wheel, publié en 2012 fait mouche et il enfonce le clou avec son album Tremors en 2014. Il mêle des vocaux aériens et hauts perchés avec des sonorités plus sombres et entêtantes et des éléments acoustiques, ce qui lui donnera une signature musicale identifiable. Sohn poursuit sa course en produisant un duo de jeunes Anglais dénommé Aquilo qui publiera le superbe « I Gave It All », aussi envoûtant que dramatique.

Aquilo

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Paul Smith x Jimmy Page

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On nous aurait décrit la scène avant qu’elle ne se produise, on n’y aurait simplement pas cru. Deux légendes, dont les noms suffisent à évoquer English Cool et sex, drugs and rock'n'roll réunis dans la même pièce. Une discussion dont le point de départ est… une collection de foulards. Trop beau pour être vrai ? Pas si sûr.

Whole Lotta Dream Interview¬Jeanne Hancock Transcription¬ Guillaume Cohonner

Photos¬Graham Turner

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Paul Smith x Jimmy Page

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Paul Smith x Jimmy Page à se parler et on avait beaucoup de goûts en commun que ce soit dans la musique, la mode et l’art en général. Ça devait être vers 1967. JP : On était déjà très occupés tous les deux, mais on admirait chacun nos travaux respectifs. Et on était tous les deux proches de l’industrie de la musique.

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Jeanne Hancock : Tout d’abord, quand vous êtes-vous rencontré ? Paul Smith : En 1856 [Rires]. Non, blague à part, on s’est rencontrés via un ami commun, Paul Reeves, je travaillais en tant que jeune designer pour lui dans les sixties, et il avait cette entreprise qui s’appelait Universe of Witness qui faisait des vêtements essentiellement pour les groupes de rock. Jimmy Page : Oui, absolument, il travaillait pas mal avec moi et le groupe. J’ai rencontré Paul Reeves pas mal d’années avant qu’il ne travaille sur les tenues scéniques de Led Zeppelin, on s’est rencontrés à l’époque où je jouais encore dans les Yardbirds. PS : On avait le même âge avec Jimmy Page, donc on a commencé

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JH : Vous pensez que dans les sixties, la musique et la mode étaient indissociables ? PS : Oui, dans les sixties et les seventies, complètement. Ne serait-ce que pour les vêtements de scène. C’était une industrie qui était là aussi pour faire rêver, plus que dans les fifties. JP : Les fifties était une décennie intéressante car c’était une génération encore marquée par les horreurs de la guerre, il y avait une réaction culturelle très forte à ça. Notre génération était la première qui pouvait faire ce qu’elle voulait, le champ des possibles était absolu. Mon frère était dans l’armée, en Italie puis en Israël, car il n’avait pas eu le choix, contrairement à moi. PS : C’est aussi intéressant ce qu’il s’est passé à Londres entre 1962 et 1972, il y a eu une explosion

« C’est intéressant ce qu’il s’est passé à Londres entre 1962 et 1972, l’époque était à l’expéri­­men­tation, les nouveaux magasins de fringues ont poussé comme des champignons sur King’s Road. Il y avait dans la mode un caractère théâtral et dandy que les groupes de rock ont repris. » culturelle dans tous les domaines, l’époque était à l’expérimentation, les nouveaux magasins de fringues ont poussé comme des champignons sur King’s Road. Il y avait dans la mode un caractère théâtral et dandy que les groupes de rock ont repris. JH : Et donc, vous vous retrouvez enfin tous les deux… JP : On était au Japon encore ensemble la semaine dernière,


Paul Smith x Jimmy Page c’était fantastique. Les gens étaient hystériques rien qu’à le voir. PS : Mais toi aussi, avec tous les albums que tu as vendus ! Jimmy a remastérisé les albums de Led Zeppelin, et j’ai vraiment hâte que les gens entendent ça. JP : Que les gens ne se méprennent pas, ce ne sont pas des inédits, mais de nouveaux mixages qui donnent une nouvelle lumière sur ces chansons. « Stairway In Heaven » qui avait été mixé à Los Angeles par exemple, il y a une autre version qui avait été faite à Londres. Là, c’est encore une nouvelle. JH : Justement, parlons de cette collaboration. Pour fêter la remastérisation des neuf albums de Led Zeppelin, Paul a retravaillé l’artwork des albums pour une édition limitée. Comment cela s’est-il fait ? PS : Je ne voulais pas refaire les pochettes mais les garder, tout en leur donnant une unité. J’ai donc redéfini les couleurs, le « scarve ». Les albums de Led Zeppelin font partie de l’histoire de l’art. J’ai aussi fait ça pour les fans du groupe, pour les collectionneurs. Dès le départ, on voulait éditer ça en vinyle.

C’est un nouvel artwork. Et pour moi, un véritable objet d’art, on est bien loin du mp3 ! JP : À l’époque, pour tous nos albums, on passait beaucoup de temps à concevoir de belles pochettes. On essayait beaucoup de choses différentes avant d’être satisfaits. Ça a été pareil pour ces rééditions avec Paul. On en a beaucoup discuté. On s’est aussi beaucoup amusés. PS : Comme je le disais, dans les sixties, on avait beaucoup de liberté artistique. On a voulu retrouver ce plaisir d’expérimentation avec cette collaboration, le tout en exprimant tous les deux notre créativité. JP : Je suis aussi vraiment content que les kids, les DJs redécouvrent la joie d’acheter des vinyles. On en revend de plus en plus, c’est super. Jack White est intelligent, il presse lui-même les disques qu’il sort, il a sa propre usine. C’est un des musiciens de sa génération qui a compris vite que les gens voulaient revenir à l’authenticité, à la

rareté. Même au début des White Stripes, il cherchait ça avec ce code à trois couleurs : blanc, rouge, noir.

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JH : Vous êtes donc satisfaits d’avoir collaboré ensemble ? PS : Non, c’était horrible, j’espère ne plus jamais le voir [Rires]. Non, c’est un vrai privilège pour nous deux. On est très fier de nous, d’avoir enfin après toutes ces années associé nos deux noms sur un même projet. Réédition en série des neufs albums studios de Led Zeppelin par Jimmy Page & Paul Smith www.paulsmith.fr www.ledzeppelin.com

« Jack White est intelligent. C’est un des musiciens de sa génération qui a compris vite que les gens voulaient revenir à l’authenticité, à la rareté. »

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Transmusicales de Rennes

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Rennes de beauté Cette année encore, le festival des Transmusicales de Rennes nous a gâtés avec ses découvertes musicales. Entre post-punk, hip-hop, electro et jazz, cette édition 2015 a été un bon cru. Voici quelques portraits d’artistes pris sur le vif à Rennes. Texte¬Guillaume Cohonner Photos¬Antonin Guidicci

Shamir. Boucle d’oreille Maison Margiela.

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Transmusicales de Rennes

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Gandi Lake. Capuche Eleven Paris.

Kate Tempest. Lunettes de soleil Ray-Ban.

Thylacine. Montre Nixon.

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Transmusicales de Rennes

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Rich Aucoin. Chapeau Larose.

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Transmusicales de Rennes

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Lizzo. Manchettes Chanel.

Curtis Harding. Foulard Cerruti 1881.

Animal Chuki. Pochette Yazbukey.

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Transmusicales de Rennes

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Le Zooo. Bob Levi’s.

Verveine. Lampe ananas Bonton.

Tumi Mogorosi. Chapeau Stetson.

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Transmusicales de Rennes

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The Avener. Casquette AMI.

Sabina. Echarpe Urban Outfitters.

Forever Pavot. Lunettes Carhartt.

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Giorgio Moroder

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Giorgio Moroder

Texte¬Joss Danjean

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« Je m’appelle Giovanni Giorgio, mais tout le monde m’appelle Giorgio ! »

Voilà la fameuse phrase de Giorgio Moroder dans le morceau hommage « Giorgio by Moroder » du duo français le plus connu dans le monde (les Daft Punk) sur leur album multiplatine Random Access Memory. Pourquoi choisir Giorgio Moroder ? Tout simplement car c’est une légende vivante de la musique – Donna Summer, les bandes originales de film comme Midnight Express, Flashdance ou Top Gun et de nombreux tubes pour Blondie et d’autres, c’est lui ! MODZIK


Giorgio Moroder

Pourtant on n’avait plus entendu parler de lui – en solo – depuis près de trente ans ! Mais cette année, Giorgio Moroder, à 74 ans, revient au meilleur de sa forme, entouré des plus grandes stars de la pop. Kylie Minogue, Sia, Britney Spears, Charli XCX, Kelly Rowland, Foxes… : elles ont toutes voulu travailler avec lui. Et moi, j’ai eu la chance de rencontrer un des artistes les plus gentils que Modzik a interviewé. Cela se passe à Paris, dans le salon attenant à sa suite de l’hôtel Mandarin Oriental, rue Saint-Honoré. On ne rencontre pas une icône de la musique tous les jours…

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Pourquoi avoir attendu autant de temps pour faire à nouveau de la musique ? On dit toujours que l’herbe est plus verte ailleurs et j’avais l’impression d’avoir fait le tour de la question après tout ce que j’ai fait avec Donna, les musiques de films, etc. Alors j’ai construit une voiture, la CizetaMoroder V16T (produite de 1988 à 1993), tourné un court métrage… Je voulais faire autre chose que de la musique. Et puis je me suis mis au golf [Rires!] : j’avais une vie très facile et tranquille jusqu’au moment où les deux robots français (i.e. les Daft Punk) m’ont demandé si je voulais travailler avec eux. Et puis il y a eu le succès, l’album qui a gagné un Grammy et d’un seul coup j’ai eu trois propositions de maisons de disques. J’ai choisi Sony parce que j’aime le catalogue des chanteuses et particulièrement le label Columbia, qui est mythique.

(Summer) les artistes pop ont de moins en moins de temps à consacrer à la musique car ils sont pris par tellement d’autres obligations : des partenariats, la mode, les parfums… C’est pas facile de les avoir dans un studio ! Quels sont les artistes avec qui tu as pu travailler physiquement dans le même studio ? J’ai travaillé avec Kelly Rowland et c’était vraiment bien. Avec Kylie c’était génial et puis le tournage de la vidéo c’était super car elle veut toujours en faire plus, elle est tellement facile à travailler : elle n’arrêtait pas de danser ! D’ailleurs, elle était aussi en train de faire un EP plus style underground avec un ami à moi et m’a demandé de dire quelque chose de sexy en italien sur le morceau !!! Avec Britney Spears, elle voulait que je sois en studio avec elle mais je devais partir le jour d'avant pour l’Europe. Mais je la vois à mon retour car j’ai modifié la chanson et ajouté une partie, donc elle doit rechanter. Mais elle est tellement occupée : son show à Las Vegas, etc. Maintenant c’est rare de voir le producteur dans le studio avec l’artiste. Par exemple, Charli XCX a enregistré à Stockholm et moi je travaillais avec son producteur à Los Angeles. Et ensuite, j’ai changé toute la base du morceau avec des musiciens en Allemagne ! Et ensuite, de nouvelles modifications à Los Angeles avec un autre musicien. C’est difficile à imaginer cette façon de travailler ! Il y a tellement d’intervenants !

« J’avais une vie très facile et tranquille jusqu’au moment où les deux robots français m’ont demandé si je voulais travailler avec eux. » Quel est le premier morceau écrit et réalisé pour ton nouvel album ? De mémoire, je crois que le premier morceau c’était avec Sia pour la chanson « Déjà Vu ». Il faut dire que toute la réalisation de ce disque a été assez long. C’est d’ailleurs un style assez nouveau de retrouver Sia dans un morceau si disco, n’est-ce pas ! ? Oui, c’est un peu EDM, un peu électronique et les violons et la guitare bien sûr. C’est un de mes préférés sur l’album avec « Right Here, Right Now » de Kylie. J’avais fait cette chanson il y a un an. Je lui avais envoyé la base du morceau. Et un jour elle m’appelle et me dit : j’ai fini la chanson, si tu l’aimes bien, tu peux l’avoir. Et c’est tout : je ne l’ai pas rencontrée car elle est très mystique et hors du show-business habituel. Je crois qu’elle est timide bien que très sympathique. Je sais qu’en studio elle travaille toujours avec les mêmes personnes, le même technicien pour le son… Pourquoi la réalisation du disque a été aussi longue selon toi ? Pour commencer, à part quelques instrumentaux, tous les morceaux sont interprétés par des artistes différents, et puis le business a tellement changé aujourd’hui : contrairement à l’époque où je travaillais avec Donna

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Où as-tu enregistré le plus de choses sur cet album ? Tu sais qu’en fait c’est difficile à dire ! À Los Angeles j’ai mon studio chez moi, le studio de mes musiciens principaux (Smiddy & Rainy) et aussi un autre jeune producteur anglais d’origine grecque Patrick JordanPatrikios. Mais il y a aussi les musiciens allemands (l’un est à Munich, un à Nuremberg et l’autre à Hambourg). C’est pas plus difficile mais ça prend tellement plus de temps et de transport. Comment tu as choisi ces chanteuses-là ? Presque tous les chanteurs voulaient travailler avec moi ! Un seul regret, c’est un morceau avec Paloma Faith de Londres : j’aimais beaucoup la chanson mais on a eu un problème dans le contrat. J’ai choisi toutes ces chanteuses parce que je les aime, tout simplement. Il y a juste une jeune chanteuse que Sony m’a proposée et je ne connaissais pas : la jeune Suédoise Marlene qui interprète le morceau « I Did It for You ». Avec qui aimerais-tu travailler ? J’aimerais beaucoup travailler avec Rihanna : sa voix est fantastique et elle est tellement jolie ! Il y a deux mois dans une interview pour Uomo Vogue en talie, Lana Del Rey a dit qu’elle aimait la musique que j’avais faite avec


Giorgio Moroder

David Bowie sur Cat People et il y a une semaine elle m’a laissé un message pour qu’on se rencontre lorsqu’elle reviendra à Los Angeles : je l’aime bien comme personne et elle a une voix très particulière, cela me plaît. Que penses-tu du business de la musique aujourd’hui ? Le business actuel me convient mais on a surtout perdu quelque chose, je parle en tant que producteur, c’est le contrôle sur l’artiste. Avec Donna Summer, j’avais le contrôle sur elle. Maintenant il y a le manager de Britney Spears qui dit : elle ne peut pas faire ça… Es-tu curieux des productions actuelles ? Je trouve que Calvin Harris est vraiment intéressant : il compose, il chante aussi. J’aime beaucoup ce qu’il a fait avec Ellie Goulding. Coté commercial, j’aime aussi David Guetta, mais c’est vraiment un producteur. Je ne connais pas Diplo mais j’en ai beaucoup entendu parler. Tu es revenu sur le devant de la scène grâce aux Daft Punk mais aussi à travers de nombreux remixes pour Coldplay, Haim et d’autres artistes, tu aimes faire cela ? Ah oui j’aime beaucoup ! Mais ça ne fonctionne pas à chaque fois. Moi, j’aime bien faire les remixes lorsque l’original n’est pas trop bon, parce que comment faire alors ? Il y a plusieurs chansons que j’ai refusées parce que je ne voyais pas comment les améliorer. Et puis moi je n’aime pas faire de remix complètement différent : j’aime bien conserver la structure de la chanson. Il y a quelques mois, Lady Gaga – que j’ai rencontrée deux ou trois fois – m’a demandé de remixer sa chanson avec Tony Bennett : c’était un travail très difficile à réaliser ! D’ailleurs, elle m’a proposé de travailler avec elle sur des nouveaux morceaux pour son prochain disque, le projet est donc lancé, on va voir quand on va pouvoir travailler ensemble : tout est une question de planning !

« Les artistes pop ont de moins en moins de temps à consacrer à la musique car ils sont pris par tellement d’autres obligations : des partenariats, la mode, les parfums… » musique électronique avant-gardiste, en mêlant les deux dans cet album je garde ma signature musicale ! Aujourd’hui les artistes sont poussés à se produire en live et ta musique ne se prête pas vraiment à cet exercice… En fait, je me suis mis à jouer comme DJ aussi : je me souviens avoir joué l’an passé devant 20 000 personnes à Mexico et c’était incroyable. J’ai joué aussi à Berlin, à Ibiza au Club Pacha aussi et dans beaucoup d’autres villes. L’été dernier, je me suis produit à Aix-les-Bains au festival Musilac devant 30 000 personnes ! Je joue beaucoup de mes chansons (environ 60-70 %) en versions remixées, alors comme je les connais par cœur c’est assez facile pour moi et la réponse du public est absolument géniale. Ils ont entre 20 et 40 ans et ils connaissent toutes les chansons, « Hot Stuff », « Danger Zone », etc. Toi aussi, tu as des activités qui sortent du cadre habituel de ton travail d’artiste ? Oui, c’est le business de la musique aujourd’hui qui veut ça et puis j’aime bien réaliser des choses différentes : j’ai composé une musique originale pour Google, j’ai aussi désigné un casque audio pour la marque V-Moda et encore d’autres projets qui sont en cours de réalisation… J’en profite pour demander une dédicace : le pressage vinyle de Donna Summer Love to Love You Baby (1975) fera très bien l’affaire. Merci infiniment, Giorgio !

Côté remixes, peut-on espérer des remixes de tes propres morceaux ? Oui, mais c’est le département artistique de mon label qui s’en occupe : je leur ai donné les parties instrumentales et vocales séparées. Il y a tellement de DJs et producteurs qui veulent faire des remixes juste comme cela et si on aime bien alors on les sortira. Je rencontre Skrillex la semaine prochaine à Lausanne et j’espère qu’il va faire un remix ou un featuring sur mon disque d’ailleurs ! Depuis tes débuts, tu as réussi à imposer une sorte de signature musicale, dès les premières notes on reconnaît le son Moroder presque à chaque fois ! Comment expliques-tu cela ? Oui, je sais, il y a des choses que je fais consciemment. J’ai un son comme dans « I Feel Love » que j’ai utilisé sur le morceau avec Foxes. Sur Sia, j’ai mis les violons que j’aime. Sur Kylie j’ai utilisé un violon synthétique avec un son un peu cathédral. En fait je crois que c’est « I Feel Love », les violons et la guitare disco qui ont donné ma marque de fabrique. Comme je suis à l’origine d’un certain style disco mais aussi d’une certaine forme de

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Futurama

Ghost Culture Texte¬Joss Danjean

Après plusieurs maxis et vidéos parues depuis un an, voilà enfin que le projet Ghost Culture prend forme et vient se placer aux côtés des albums signés Daniel Avery ou encore Connan Mockasin sur le label d’Erol Alkan, Phantasy.

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Et de fantaisie musicale il est bien question ici, une luxuriance sonore comme on n’en a peu entendu de longue date : entre new wave, psychédélisme seventies et electronica de bon aloi, le tout saupoudré d’un certain romantisme pop (Elliott Smith n’est pas loin). Mais qui se cache derrière Ghost Culture ? Son nom est James Greenwood, il a 24 ans mais semble pourtant avoir incorporé tous les codes eighties à sa musique en parvenant toutefois à s’en affranchir. Pas étonnant, lorsqu’on sait qu’il a travaillé avec Daniel Avery, grand sorcier des machines électroniques. Et ce gamin n’a pas son pareil pour faire du neuf avec du vieux, tenez-vous bien, l’élément essentiel qui surplombe son album c’est le Korg, un synthétiseur inventé en… 1981 ! Alors que la mode est aux plugins qui peuvent copier n’importe quel son ou instrument, James, lui, emploie au mieux la devise du less is more, à savoir ici qu’avec un matériel assez simple – mais parfaitement maîtrisé – il parvient à faire pleurer les machines comme des rivières. Mais ne le prenez pas pour un geek à tout prix, c’est avant un excellent instrumentiste et il ne rechigne à jouer ses morceaux à la guitare acoustique : preuve en est que la mélodie prime avant tout dans ses compositions. Ghost Culture jette un pont entre classicisme et modernisme musical, le tout avec un sens du romantisme et de l’émotion qui force le respect. Quand l’electro frappe en plein cœur… Ghost Culture, Ghost Culture (Phantasy/Because) soundcloud.com/ghostculture © Jenna Foxton

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Rae Morris On l’a découverte au hasard d’une vidéo où elle partage le titre « Cold » avec Fryars et on a tout de suite cherché à en savoir plus : la jeune Anglaise de Blackpool, Rachel Anne Morris aka Rae Morris a déjà plusieurs EP à son actif et s’apprête à sortir son premier album, en partie composé des morceaux de ces fameux maxis. Elle a été invitée par Clean Bandit sur son album et fait la première partie de la tournée de George Ezra. Une artiste intimiste dont la musique touche par sa simplicité et sa fraîcheur, le plus souvent accompagnée de son fidèle piano. JD

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Børns Natif du Michigan, ce tout jeune dandy à cheveux long semble hors du temps : sa musique mêle folk, glam et electro rock avec brio ! Une voix aérienne et cristalline montre une candeur incroyable doublée d’un talent de showman assez impressionnant qui devraient lui ouvrir toutes les portes. Son EP Candy montre l’étendue de son ouverture musicale : rien ne semble lui être interdit. Bluffant ! JD soundcloud.com/bornsmusic

Gabriel Garzón-Montano On est tombé littéralement sous le charme de ce natif de Brooklyn, né d’un père colombien et d’une mère française. On a fondu pour la variété et le côté juste de Bishouné, le EP six titres de Gabriel Garzón-Montano sur le label Prospect, qui mêle les influences les plus bigarrées : une voix soul incroyable, des arrangements electro à faire pâlir les Anglais les plus pointus et un groove incroyable qui semble inné. Difficile à classer, mais facile de tomber en amour pour lui et sa musique. Un charisme fou au service de la plus juste cause qui soit : une musique qui transcende les styles. JD soundcloud.com/gabriel-garzonmontano

© Alexandra Waespi

© Nick Walker

soundcloud.com/raemorris

Lapsley À la manière d’une Adele au style alangui, cette jeune Anglaise de Liverpool d’à peine 18 ans dénommée Holly Lapsley Fletcher semble avoir toutes les cordes à son arc : elle est à la fois interprète, compositeur et productrice. Pas étonnant qu’elle ait signé un contrat d’artiste avec le label XL Recordings et soit déjà auréolée d’une nomination pour les BBC’s Sound of 2015. Et ce ne sont pas les quatre morceaux de son dernier Understudy EP qui contrediront cet intérêt plus que justifié. Entre électronique altière et piano envoûtants, sa voix aux multiples facettes vous charmera. JD

Radar Cult Duo formé par Luc Waites et KC Maloney, originaires de Los Angeles, Radar Cult mélange les styles avec un pur bonheur : entre electronica et pop crépusculaire, leur EP Splitting sur le label défricheur Plug Research montre toute l’étendue de leur savoirfaire. Cinq titres qui fleurent bon l’été indien, comme les feuilles qui rougeoient à la faveur de l’automne. Côté style, on aimerait les ranger aux côtés de The xx mais leur spectre va bien au-delà. On a hâte d’en entendre plus de ces deux-là. JD soundcloud.com/radarcult

soundcloud.com/hollylapsleyfletcher (XL/Beggars)

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Signé sur Innovative Leisure, le label d’Hanni El Khatib, le Londonien Tropics s’apprête à sortir un premier opus mêlant la douceur de la soul à des sonorités dream pop. À la fois sensuel et solaire, son album est l’une des belles surprises de ce printemps.

Texte¬Guillaume Cohonner

Tropics, Rapture (Innovative Leisure/ Because) Sortie le 23 mars www.innovativeleisure.net/artists/tropics

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© Emily Buck

Tropics

Chris Ward, à seulement 27 ans, est promis déjà à un brillant avenir musical. À la fin de ses études universitaires, le Londonien d’adoption décide de partir s’isoler dans la maison vide de sa grand-mère, tel un Jack Kerouac se réfugiant à Big Sur, mais pour lui, dans la station balnéaire de Southsea : « J’étais vraiment seul et isolé, pendant des journées entières, je n’ai eu aucune distraction. » Un isolement qui a porté ces fruits : Rapture est un album au charme envoûtant, un album solaire et intime qui révèle Tropics comme un des artistes les plus talentueux de sa génération. Tout en délicatesse, il tisse des chansons pop à la fois épurées et accrocheuses. L’ombre de James Blake n’est jamais très loin, même si Chris Ward privilégie un chant hérité de la soul, mais pas que. On y retrouve les rythmiques de Max Roach (le batteur de jazz, Gillian McLaughlin joue d’ailleurs sur tout l’album) ou encore le synthétisme d’Arthur Russell. Signé sur le label Innovative Leisure, on reconnaît quelques accointances avec ses confrères de Little Dragon et de Rhye. Un univers à la fois poétique et littéraire (le titre « Gloria » fait référence aux Heureux et les Damnés de Fitzgerald qui parle (souvent) de l’amour et ses complications. Rapture vous donnera envie de porter des chemises bien repassées et de siroter des Caipirina au bord de la piscine. Parfait pour achever ce triste hiver donc.


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Jessica Pratt Après un premier album passé malheureusement inaperçu chez nous il y a deux ans, Jessica Pratt, la protégée de Tim Presley (leader de White Fence) nous revient avec On Your Own Again. Toujours d’obédience folk, la Franciscanaise semble tout droit sortie des sixties. Avec un sens de la mélodie imparable, elle compose des chansons à la guitare sur le fil entre flânerie et mélancolie. On pense parfois à une Lætitia Sadier pour son intemporalité. On Your Own Again est un album poignant qu’il vous faudra écouter jusqu’à l’obsession. GC

Lion Babe Composé de la chanteuse Jillian Hervey, à la sensualité désarmante (pour ne pas dire autre chose) et du musicien-producteur Lucas Goodman, ce duo new-yorkais pourrait bien tout rafler en 2015 grâce à son R’n’B futuriste et accrocheur. Après un premier EP avec une apparition de Childhish Gambino, Lion Babe est déjà sur toutes les lèvres. On murmure même que le groupe serait rentré en studio avec Pharrell Williams pour leur prochain album. Wait & see. GC Lion babe, EP (Outsiders / Mercury Music

© Misha Taylor

Group)

© Pedro Meyer

© Colby Droscher

Jessica Pratt, On Your Own Again (Drag City/Modulor)

Charles X On ne sait pas encore beaucoup de choses sur ce petit génie de 24 ans, mais à l’écoute de son premier album (qui ne devrait plus tarder à sortir sur Tentacule Records), Charles X pourrait bien détrôner Franck Ocean grâce à un R’n’B inventif et incarné. Tantôt rappé (son flow fait à chaque fois mouche), d’autre fois chanté (les lignes mélodiques nous laissent sans voix), ce premier disque de quatorze titres, tous prometteurs, oscille entre hip-hop sombre (« Headfukt ») et R’n’B chaleureux (« Danger Mr Robinson »). On attend déjà la suite. GC

Blind Digital Citizen Nouveau venu sur le label français Entreprise (Moodoïd, Grand Blanc…), Blind Digital Citizen est un groupe à part. Plus proche de formations hexagonales comme Infecticide, Blind Digital Citizen fait dans une cold-wave à la gouaille tranchante. Sombre, potache et foutrement incisif, leurs compositions apocalyptiques ne font pas dans la finesse : c’est abrasif, parfois très con (mais on aime ça) mais résolument addictif. On attend avec impatience de les voir sur scène. GC Blind Digital Citizen, Premières Vies (Entre-

Calypso Après s’être fait fortement remarquer avec son album solo, Jackson Scott refait parler de lui mais avec une nouvelle formation, Calypso. Délaissant sa folk foutraque, il livre ici un EP de six titres, Oracle, qui sent bon les nineties. Six titres à la fois soniques et pop, qui assoient un peu plus le talent de compositeur de cet Elliott Smith des années 2 010 . D é p ê ch e z - v o u s d e commander sa cassette (limitée à 100 exemplaires), sur le site de l’excellent label à suivre, Atelier Ciseaux. GC

prise/Sony A+LSO)

Calypso, Oracle (Atelier Ciseaux) www.atelierciseaux.com

Charles X, The Revolution… And The Day After (Tentacul Records) charles-x.bandcamp.com

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Futurama

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Texte¬Joss Danjean

Shura

Tout le monde se souvient de la vidéo de « Touch » avec plus de 6 millions de vues où des couples de tous bords s’embrassaient l’an passé. Mais qui est donc Shura ?

De son vrai nom Alexandra Denton, née de père anglais et de mère russe, elle cite sans vergogne les premiers Madonna, Janet Jackson, Prince ou encore J-Dilla comme inspirations musicales. Après deux singles entre R’n’B solaire et pop aérienne ayant cartonné sur la toile l’an passé, elle livre un nouveau single, entre la Madonne des 80’s et Blood Orange, qui sera à n’en pas douter l’une des révélations de 2015, avec un album à venir chez Mercury. Shura revient déjà avec un nouveau titre intitulé « Indecision » (et sa vidéo) qui réchauffe déjà le cœur et le corps, se voyant revisité par le duo londonien Jungle. Outre ses œuvres, peu nombreuses mais ô combien marquantes, elle a remixé Jessie Ware et collaboré avec des artistes comme Sorrow. De leur côté, les producteurs les plus en vue comme Cyril Hahn ou Devonte Hynes parlent d’elles dans leurs interviews, de quoi faire largement faire monter la pression… Une chose est sûre, Shura ne va pas en rester là ! soundcloud.com/shura

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Futurama

Emile Haynie Goodbye » avec le trio formé par Charlotte Gainsbourg, Sampha et Devonte Hynes. Nul doute que, même si son nom n’est pas encore en haut de l’affiche, son album est très attendu, avec comme autres invités Rufus Wainwright, Randy Newman, Lykke Li ou Nate Ruess. À suivre de près donc. JD soundcloud.com/emile-haynie

© Kevin Morosky

Encore un artiste de l’ombre qui entre enfin dans la lumière ! On trouve le nom d’Emile Haynie comme producteur derrière de nombreux albums : on lui doit entre autre Born to Die de Lana Del Rey ou Man on The Moon II de Kid Cudi, mais il a participé aussi au dernier album de Mark Ronson, et c’est lui qui est derrière le morceau « Locked Out of Heaven » de Bruno Mars mais aussi des titres pour Eminem, Linkin Park ou Pink ! Sans oublier quatre morceaux sur l’album de FKA Twigs ! Producteur newyorkais émérite, il livre enfin ses premiers morceaux sous son égide et s’entoure des meilleurs interprètes. En prélude à son album We Fall, à venir, on connaît déjà trois titres « Falling Apart » avec Andrew Wyatt et Brian Wilson, « Wait For Life » avec Lana Del Rey et enfin le sublime « A Kiss

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Little Simz À seulement 20 ans, la jeune Londonienne Little Simz va faire parler d’elle en 2015 grâce à une maturité artistique sidérante et un charisme impressionnant. Son soundcloud regorge de chansons mêlant hip-hop, R’n’B et trap music dans un mélange qui sonne plus américain qu’anglais (l’accent mis à part). Même le nabab du hip-hop, Jay-Z ne s’y est pas trompé en la citant comme l’une des prochaines révélations du hip-hop. Loin des poses machistes et de jouer à qui a la plus grosse, Little Simz compte bien casser

les stéréotypes du genre, le tout en gardant sa féminité. Précoce, elle a commencé à rapper à l’âge de 10 ans, elle a déjà à son actif quatre mixtapes. Mais la belle a plus d’une corde à son arc : on a pu également l’apercevoir dans le show télé Spirit Warriors de la BBC dans le rôle de Vicky. Elle sera également en concert au Festival Les Femmes S’en Mêlent et ce sera le concert immanquable. GC soundcloud.com/littlesimz

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Albumarama

Howling Sacred Ground (Monkeytown Records x Counter Records) Comme tout le monde, on a littéralement fondu sur le Berlin de l’Australien basé à Los Angeles Ry Cuming aka RY X, puis l’été dernier c’était l’album Liminal du trio The Acid avec encore cette voix incroyable alliée à la production sombre et électronique d’Adam F et Steve Nalepa. Il récidive une fois encore avec le projet Howling mené avec Frank Wiedermann et creuse une fois de plus le sillon du mariage (réussi) entre sa voix intimiste avec une production entre electro pop et influences rock altières. Sacred Ground est un véritable bijou sonore, un disque hors du temps, où textures, glockenspiel, basses souterraines et éléments d’electronica servent d’écrin à la voix si touchante de RY X. Inclassable et tout simplement beau. JD

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Panda Bear Panda Bear Meets The Grim Reaper (Domino) Quatre ans après Tomboy et une collaboration avec Daft Punk qui le fit connaître du grand public, Panda Bear reprend une fois de plus son échappée en solitaire avec ce cinquième album solo. Loin des déflagrations synthétiques de son prédécesseur, ce nouvel album le voit retrouver son sens de la mélodie imparable (« Tropic of Cancer ») et ses harmonies vocales impressionnantes (« Crosswords »). Maintenant plus accessible, Panda Bear nous livre son meilleur album depuis Person Pitch. GC

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Joey Badass B4.DA.$$ (Arista) À 20 ans à peine, le prodige Joey Badass affole depuis maintenant trois ans le hip-hop américain. Avec son rap postmoderne, il nous ramène au beau milieu des nineties où les idoles new-yorkaises s’appelaient Nas et Notorious BIG. Plus apaisé que sur sa mixtape 1999, Joey impressionne toujours avec son flow et s’autorise aussi des guests de choix (DJ Premier, J Dilla, Action Bronson ou encore Kiesza). Loin de révolutionner le genre, Joey offre quand même un fervent hommage à un New York qu’il n’a jamais connu. GC

Motorama Poverty (Talitres) Si certains ne connaissent toujours pas Motorama, dites-vous seulement que c’est la meilleure formation post-punk venue de Russie. Avec ses rythmiques raides (« Write to Me »), ses guitares arides (« Heavy Wave ») et sa voix d’outre-tombe, le groupe creuse encore un peu plus ses compositions à la fois mélodiques et obscures. Certes, Poverty n’est pas le disque qui vous rendra la lumière, mais ses chansons s’inscrivent déjà comme des classiques du genre. Chapeau. GC

Paris There Is A Storm (Ekler’O’Shock) Décidément, Nicolas Ker n’est pas près de raccrocher. Chanteur charismatique au sein de Poni Hoax et d’Aladin (on murmure également un album solo), voilà qu’il retrouve sa première formation qu’il avait montée il y a quinze ans à coups de concerts sauvages dans l’Est parisien. There Is A Storm est un album incarné, diablement aguicheur et d’une profondeur sidérante comme l’on n’en voit plus. Sombre, synthétique et définitivement post-punk, Paris invoque ses icônes rock pour mieux les détruire. GC


Albumarama

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Cat’s Eyes The Duke of Burgundy (Caroline) Responsable d’un album en 2011, Cat’s Eyes ne nous est pas inconnu. Le duo est en fait composé de Faris Badwan (chanteur de The Horrors) et de Rachel Zeffira (artiste solo venant du classique), ensemble à la ville comme à la scène. Ils signent ici la musique du film The Duke Of Burgundy ,réalisé par Peter Strickland. Ce score à la fois envoûtant et quasi fantasmatique n’est pas sans rappeler celui, tout aussi captivant, d’Only Lovers Left Alive avec ces arrangements au clavecin et autres violes de gambe. Magnifique. GC

Lonelady Hinterland (Warp records) Le premier album de Julie Campbell (Never Up paru en 2010) était déjà notre coup de cœur et son nouveau disque, Hinterland, reçoit les mêmes suffrages ici. La jeune Anglaise rousse de Manchester a conçu son disque toute seule dans son home studio et a enregistré le tout dans un studio analogique perdu dans le Michigan. Au programme, groove blanc où rock, funk et même quelques influences punk fusionnent dans un joyeux bouillonnement sonore où la voix de la belle fait mouche à l’image de son « Groove It Out » imparable. Let’s dance! JD

Argy & Mama Dominonation (Bpitch Control/Modulor) Producteur émérite qui a investi la scène underground internationale dès 2005 avec son premier album, le grec Argyris Theofilis, plus connu sous le nom d’Argy, s’est établi une solide réputation sur des labels comme Poker Flat, Cocoon Recordings ou Cadenza sans oublier ses remixes pour Defected ou Ibadan et cela sous divers alias. Avec le projet Argy & Mama, il allie sa production oldschool house et early rave avec les vocaux de sa comparse dans un album taillé pour la danse et le groove. JD

Citizens! European Soul (Kitsuné/Sony Music) Second effort discographique pour les quatre Londoniens de Citizens! venus enregistrer pour l’occasion à Paris au studio Tranquille Le Chat, dans le quartier Bonne-Nouvelle avec Laurent d’Herbécourt (le dernier Phoenix, c’est lui). Force est de constater que ces gamins ont gagné en maturité mais pas perdu en fraîcheur et spontanéité : European Soul est un disque dansant et lumineux émaillé de tubes qui va nous faire danser ce printemps. Un disque pour les filles, mais pas seulement ! JD

Fryars The Power (Fiction Records/Caroline) Le petit génie des machines, Benjamin Garrett alias Fryars, a travaillé près de cinq ans sur cet album et le résultat est là : une production de haute volée, un songwriting clair et aérien, des ambiances altières, un éclectisme de bon aloi, tout concourt ici à montrer tout le savoir-faire acquis par ce gamin ultra doué. Tout a commencé avec des instrumentaux hip-hop et le résultat est de la pop de haute volée. Pas étonnant lorsque l’on sait que ce touche-àtout a travaillé avec Lily Allen ou Mika. De la pop qui fait voler en éclat les règles établies. JD

Tobias Jesso JR Goon (True Panther) Voilà une véritable perle pop avec ce premier album du jeune Tobias Jesso Jr produit sous les meilleurs auspices puisque Chet JR White (Ex/Girls), Patrick Carney (Black Keys) et Ariel Rechtshaid (Haim, Vampire Weekend…) se sont penchés sur son berceau coté production. Mais c’est surtout la candeur du chant de Tobias à la manière d’un jeune Billy Joel qui force le respect, accompagné de son fidèle piano. Des chansons d’amour contrarié au charme à la fois léger et dramatique qui touchent en plein cœur et semblent comme suspendues. Un album magique. JD

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Thomas Erber

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Thomas Erber est l’homme derrière la version moderne du cabinet de curiosités. On garde l’éclectisme et l’ingéniosité, on enlève la poussière et le bordel. Avec Thomas, on voyage aussi dans un lieu différent à chaque événement, en même temps qu’on découvre ses derniers coups de cœur.

Les curiosités de Bangkok Texte et photos¬Thomas Erber

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1. L’arrivée à Bangkok est, pour quiconque, un grand trou noir qui deviendra lumineux ou très obscur selon ce qu’on a à y faire…

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3. Il me semble que cette phrase que j’ai empruntée à une chanson de Damien Jurado (à vous de la retrouver. Pour vous aider, elle est sur l’un de ses tout derniers albums) permet de vivre plus en adéquation avec la lumière, de mieux l’accepter, car parfois bien sûr, elle aveugle. Surtout par 40 degrés de chaleur à l’ombre et 75 % d’humidité. C’est celle que j’ai choisie pour le Cabinet de cette année. Comme un mantra !

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2. La 5e édition du Cabinet de Curiosités de Thomas Erber a été réalisée au royaume de Siam. Et fort heureusement, j’ai choisi le chemin de la lumière. J’étais accompagné, en plus de mon équipe composée de Ja et Margot, de mon hôte Barom.

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4.La preuve : elle ornera le sommet de la cathédrale de bois que les très brillants Diplomates ont créé pour servir d’écrin « outdoor » à la majeure partie de notre exposition. Une réussite titanesque ! Merci Mat. Mat, c’est lui à droite mais en vrai il ne fait pas du tout de surf, là c’est juste pour impressionner la fille à côté de lui. Il a « juste » créé Diplomates avec Jean. En revanche, le surf c’est Cuisse de Grenouille et Jorane Briand qui l’ont conçu avec un shaper très réputé pour le sortir.

Bien sûr, Bangkok sans le trafic ne serait pas Bangkok ! Jo Nesbø en parle déjà dans Les Cafards, le deuxième de la série de son héros scandinavo-chandlérien Harry Hole que j’adore. Même si je lui préfère quand même Dave Robicheaux (à vous de retrouver l’auteur cette fois ; comme pour True Detective, les intrigues se déroulent en Louisiane).


Thomas Erber

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8 5. Il y a du coup beaucoup de deux-roues en ville, mais pas comme celui-là malheureusement. Celui-là, c’est un Vespa que Francesco, de Bottega Conticelli a entièrement gainé de cuir pour cette nouvelle édition du Cabinet ! Une merveille.

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7. Car il fallait bien être chic et romantique pour l’opening : m:a fiancée Elina et moi et puis mon hôte, sa maman et sa fiancée Pat également créatrice de bijoux incroyables, .

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6. Mais bon, on n’est pas là pour s’amuser, encore que je ne sache pas travailler sans m’amuser non plus. Ici, c’est la construction de la partie principale de la scénographie du cabinet qui orne l’entrée de Central Embassy, le nouveau navire amiral de la flotte du groupe et piloté par Barom mon hôte, par ailleurs fondateur du concept store Siwilai, qui est l’autre partie recevant le Cabinet de Curiosités au 5e étage de Central, avec en plus une terrasse merveilleuse avec vue sur des jardins servant de refuge à l’ambassade de Grande-Bretagne. Plus à droite, c’est la pièce dévolue à Atelier Relief et Hubert Marot. La plus dangereuse du Cabinet mais aussi l’une des plus belles !

8. Mais aussi bien manger comme chez Bo-Lan, le meilleur restaurant de Bangkok : les préparatifs du dîner privé du Cabinet organisé avec Barom.

9. Et puis aussi s’amuser entre amis : Jérôme, réalisateur et votre humble serviteur, Ja, Mathieu de Diplomates, Farid de Atelier Relief, Adrien de Le Gramme et Christophe Guyot, producteur.

10 Et puisque nous parlons de pièces créées spécialement pour l’expo, en voici une autre exceptionnelle, bien qu’elles le soient toutes : la veste d’intérieur de Charvet.

10 . O u e n musique comme lors de la soirée d’ouverture et sa fête post-cocktail qui fut l’une des plus réussies de l’année en Thaïlande. Mais avec Masaya, ami de longue date et cofondateur avec Gildas de Maison Kitsuné, aux platines, aidé par deux joyeux pistoleros (Barom et Kevin de Hong Kong). C’était… comment dire… gagné d’avance ???

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Tina Turner & Ike

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Tina Turner & Ike

1971. Le single « Workin’ together » est le titre éponyme du 8e album du couple Ike & Tina Turner. C’est aussi l’un des albums qui fait date dans leur carrière, avec la fameuse reprise du morceau « Proud Mary » qui les fera entrer de nouveau dans les charts britanniques. Ce fameux morceau qui réveillerait un mort et cette fameuse intro parlée, susurrée par Tina… « I think you might like to hear something from us / Nice and easy /But there’s just one thing / You see we never ever do nothing / Nice and easy / We always do it nice and rough / So we’re gonna take the beginning of this song / And do it easy / Then we’re gonna do the finish rough / This is the way we do "Proud Mary"… »

Couples Texte¬Nadège Winter Illustration¬Monique Baumann En deux couplets, l’histoire du couple est à peu près résumée. « Workin’ together » ça chante l’espoir, l’optimisme, la fraternité, le combat pour un monde plus heureux, plus juste, plus respecteux, ça chante l’amour. Et pourtant, chez les Turner, ça vire plus souvent aux larmes qu’aux sourires. Et pourtant, quand on regarde la Tina se trémousser sur scène, agiter tout son corps, balancer ses bras, secouer ses jambes nues et envoyer son arrière-train à la face du premier rang, on a carrément l’impression qu’elle y croit, Tina, à cet espoir de vie, d’amour puissant, qu’elle transpire cette passion, partagée avec son bien-aimé. Rien ne semblerait abattre cette force de la nature, ce monstre électrifié par le Dieu de la soul music, du rythm’n’blues. Tina Turner a ce don rare de la scène, cette violence sensuelle et rythmique qui nous fout tous en transe, nous fait lever de nos sièges ou nous met le cul par terre, tellement c’est beau, tellement c’est bon de voir Tina Turner chanter.

monde avec des ventes dépassant les 200 millions d’albums. Tina sort son 5e album solo en 1984, Private Dancer et elle opère alors « le plus grand come-back de l’histoire de la musique ». Elle est l’artiste solo à avoir vendu le plus de billets de concerts de l’histoire, même plus que les Stones. Sortie de l’ombre du bourreau à jamais, elle porte farouchement une crinière d’amazone dans Mad Max 3, s’habille en Alaïa et sera faite chevalier des Arts et des Lettres en 1996. Le divorce est prononcé en 1978. Et c’est l’autre vie d’Ike qui s’achève. Lui aussi aligne les chiffres records, mais pas dans le même sens. Des échecs discographiques qui s’enchaînent, emprisonné pour dix-huit ans après 11 arrestations et la condamnation pour détention et consommation de stupéfiants, il en sort en 1993 et l’animal reprend la route des studios. C’est enfin la reconnaissance finale, juste avant de mourir comme il a toujours vécu, prisonnier de sa blanche, mort seul à l’âge de 76 ans d’une overdose de cocaïne dans sa maison de San Marcos en Californie. La même année, en 2007, Ike gagne le Grammy Award du meilleur disque de blues traditionnel pour Risin’ With the Blues. La boucle est bouclée. Ce couple a toujours été fascinant à regarder. Ike est terrifiant, tant dans sa faiblesse que dans sa violence. Tina est puissante, tant dans sa peau de bête de scène, que dans sa capacité à résister aux coups. On regarde Ike et Tina côte à côte, sur les photographies, les couvertures d’album, sur scène, et déjà on ne peut s’empêcher de ressentir un certain malaise. Image clichée du pimp et de sa « femme », Ike a la silhouette maigrichonne qui assume la coupe de cheveux de Dr Spok et le look 100 % dandy d’Harlem. Il n’enlace jamais Tina. C’est elle qui s’accroche à son homme. Elle, c’est Anna Mae Bullock, groupie chanteuse de soul originaire de Nutbush dans le Tennessee. Elle fait le forcing pour entrer dans le groupe de Ike en 1956. Elle réussit son coup. Ike divorce et transforme Anna Mae en Tina Turner. L’histoire que l’on connaît commence. Il est tellement incroyable de voir cette femme si sexy, si animale, s’exprimer sans pudeur, sans peur, sans tabou sur toutes les scènes du monde, à quelques pas de son mentor, cet homme au comportement violent, machiste, despotique. Elle lâche toute son énergie sous les projecteurs, il sait que c’est son produit « vendeur » qui casse la baraque et les hisse en haut des charts. Comme leurs retours en loge, à la maison, une fois les lumières éteintes, les cris des fans disparus, et la chaleur des Ikettes, et le groupe un souvenir de tournée, comme ce tête-à-tête a dû être si souvent terrible, meurtri par les pleurs, les gifles et les cris. On dit que cette vie c’est la routine malheureusement classique de l’histoire du rock, imbibée de soul. Trop de coups sont tombés sur Ike enfant, trop peu de place reste à prendre dans un monde qui n’est pas tendre avec la peau noire, et l’accent du Mississipi. Ike est mort. Un grand guitariste est mort. Mais la plus grande partie du public n’a gardé que le prénom de sa femme en mémoire. On regarde Beyonce et on se dit évidemment que cette robe en dentelle qui lui arrive sous les fesses, cette robe en lamé lacéré qui révèle ses jambes musclées, cette voix qui ne cède pas, ce port de tête fier, et cette stature de diva, c’est un peu la réincarnation vivante de la reine du rock’n’roll. Ça continue de nous mettre en transe et de nous foutre le cul par terre quand elle balance son « Crazy in Love ». Jay-Z n’est pas Ike. Jay-Z enlace Beyonce. Et eux, ils pourraient si bien chanter « Workin’ together ».

1971

Et puis il y a cette introduction à « Proud Mary », ce « We never ever do nothing nice and easy, We always do nice and rough ». Ça, c’est l’envers du décor. Ike et Tina ne la jouent pas « couple beau, riche et joyeux ». Ike et Tina ne savent pas vivre en douceur. Défoncé à la cocaïne, Ike frappe Tina jusqu’au sang et Tina ravale ses larmes, ses peurs et sa rage. Elle se relève toujours. Pour s’occuper des enfants, partir en tourner ou rire avec Les Stones, Phil Spector et les Ikettes. Tina garde le cap du mariage pendant dixhuit ans. Dix-huit ans de bons loyaux et services, 12 albums en studio, des années sur scène. Un soir, le 4 juillet 1976, dans une chambre d’hôtel à Dallas, Tina est de nouveau battue par son mari Ike. Elle a 37 ans. Elle a 36 cents dans ses poches, et cette fois, elle ne reste pas. Elle prend quelques affaires, les enfants sous son bras et elle part. Le divorce est prononcé en 1978. Et c’est l’autre vie de Tina Turner qui commence. La vie de la « reine du rock’n’roll », la vie de l’une des artistes les plus populaires au

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Pat La Boite

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À moins que vous ne viviez dans une grotte du Larzac sans un seul magazine de mode sous la main, vous êtes au courant : les années 70 sont de retour. Les 70s sont à la tendance de mode ce que les mots croisés sont aux magazines télé en été : un truc qui revient en boucle, qu’on sent venir à douze mille kilomètres et qui marche à chaque fois. Mais les années 70, c’est quoi ? Bonne question. On a essayé de demander autour de nous à des gens qui les ont vécues, mais nos amis sont trop jeunes. On a donc dû demander à nos parents. Ils se sont fendus d’un « rhoooo, ni plus ni moins la même chose qu’aujourd’hui » pour ne pas nous avouer les partouzes à l’arrière du Van Volkswagen et les joints fumés les uns après les autres, nus et mal épilés sous un coucher de soleil. Quelqu’un d’autre a bien voulu nous en parler, à Noël, entre la dinde et les marrons : tatie Marie-Jo. Manque de bol, ses seventies franchouillardes à elle ne risquent pas de nous faire rêver. Elle les a vécues à Bourg-en-Bresse, à coup d’Alexandrie, d’Alexandra

et de rêves de Claudette brisés à quatorze ans pour cause d’attirance trop prononcée pour le Nutella et de pilule contraceptive mal dosée. Il a fallu se rendre à l’évidence. Les 70s, c’est un concept hyper bien sur le papier et sur la pellicule (qui n’a jamais eu envie de ressembler à Kate Hudson dans Almost

Famous ?), mais dans la vraie vie, on fait comment ? On a demandé à nos copines sacro-saintes rédactrices de mode quelles étaient les pièces phares pour faire 70s en terrasse du Charlot cet été. Voici ce qu’elles nous ont répondu. Et voici ce qu’on en pense nous, commun des mortels de la vraie vie.

Le flare, aka pantalon pattes d’eph : porté taille haute, c’est vrai qu’il fait de longues jambes. À condition de ne pas avoir de hanches, de ventre, de cuisses. Et donc de n’avoir mangé aucun féculent depuis 1991. On ajoute à ça le facteur risque camel toe. Pas pour nous. La robe vaporeuse : idéale en blanc, un peu transparente, elle donne un côté baby doll, évoque fraîcheur et insouciance, deux choses qui nous manquent terriblement depuis bien des années. Problème : qui dit blanc dit transparent dit pervers dans le métro. Est-ce qu’on a vraiment envie de se faire toucher le cul à longueur de journée par de vieux pervers qui avaient l’âge de notre père en 1970 ? La spartiate : avec un lacet qui monte jusqu’aux genoux, idéale pour un look Belle des champs. Effectivement. Mais essayez de courir après un taxi un samedi soir avec ce truc aux pieds. Vous risquez de finir dans le caniveau. Mimi Cracra 1 vs Belle des champs 0. La saharienne : kaki et lacée, elle rappelle les plus belles heures de l’histoire de la mode. Sauf que dans l’inconscient masculin, la saharienne est un truc qui s’ouvre. Vite, et bien. Totale contradiction avec notre horoscope 2015, qui est formel : « Arrête d’être une fille facile si tu veux trouver un mec. » La sandale en liège : un peu comme la spartiate, elle donne un côté nature peinture à n’importe quelle silhouette. Oui oui, aussi nature peinture que Cynthia-Marjolaine, la cousine de votre ex qui vit à Cogolin, en région PACA. Ne manquent plus que les créoles, et à vous la vie sous le soleil. Et enfin, les maxi-lunettes : un truc censé nous faire ressembler à Jackie O, idole ultime qui trône sur les moodboards de tous ceux qui font la mode. Mais dans la vraie vie, qui met des lunettes aussi grosses, à part Véronique Sanson sur un plateau télé ?

Illustration¬Larry Dirt

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On remerciera donc énormément nos amies de la mode pour cet enseignement capital. Finalement, la mode c’est comme la vie, et la vie, c’est comme la mode. Tout est une question de limites et de frontières. Et dieu sait qu’entre déesse des 70s et cagole niçoise, elles sont toutes fines.


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