Journée du Patrimoine MOM

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MINISTÈRE DES OUTRE-MER Visite de l’hôtel Montmorin


Le ministère des Outre-mer

L’Histoire À l’angle de la rue Oudinot et du boulevard des Invalides, l’hôtel de Montmorin est classé au titre des monuments historiques depuis 1926.

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Il fût un temps... Encore campagnard et voué aux cultures maraîchères vers 1720, le quartier était devenu à la mode au début du règne de Louis XVI. Jean-Baptiste Gaillard de Beaumanoir, baron d’Ecouis, y acquit par contrat du 31 mai 1768 la propriété d’un bourgeois de Paris, située rue Plumet (aujourd’hui rue Oudinot). Il y fit construire un hôtel ayant double façade, l’une au nord, l’autre au midi.

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La façade sud présentait au rez-dechaussée plus de dix-sept fenêtres ou portes fenêtres ouvertes sur un jardin clos planté de grands arbres. Aucun document n’indique le nom de l’architecte qui dirigea les travaux. Seul un mémoire de réparations donne celui de Brongniart. On peut donc supposer avec vraisemblance que le futur constructeur de la Bourse est également celui qui a édifié l’hôtel de Montmorin.


Ces travaux ruinèrent Beaumanoir qui avait dépensé sans compter pour l’aménagement de l’hôtel. Il fut aliéné le 7 août 1781 dans sa totalité moyennant la somme de 220.000 livres. Le nouveau maître, Armand-Marc de Montmorin, issu d’une vieille famille d’Auvergne, revenait d’Espagne. Il y avait rempli, pendant six années, les fonctions d’ambassadeur. Ami personnel du roi, Montmorin avait contribué par son influence au rapprochement francoespagnol. À son retour, Louis XVI comprit combien sa présence pouvait lui être utile. En février 1787, il lui confia le portefeuille des affaires étrangères.

L’hôtel de la rue Plumet devint alors la demeure de l’un des principaux ministres de l’État et l’une des plus confortables et des plus luxueuses du quartier. Les nouvelles fonctions du maître exigèrent cependant quelques améliorations et embellissements. L’hôtel acquit alors la structure que nous lui connaissons maintenant. Le pavillon central était occupé au rez-de-chaussée par la salle à manger, flanquée d’un salon avec vestibule et salle de billard. Toutes les pièces s’ouvraient sur le jardin. Pendant quelques années, l’hôtel connu une vie de grand luxe, liée tant aux fonctions qu’aux habitudes du maître.

Avant même d’être ministre, Montmorin jouissait déjà d’une grande influence grâce à son intimité avec Louis XVI. Monarchiste, il luttait pour la cause du roi, mais aussi de la liberté, car il était partisan des idées nouvelles et il figurait parmi les premiers à reconnaître la nécessité de réformer. Les événements se précipitent. Louis XVI, fuyant Paris, est arrêté à Varennes. Dès la nouvelle reçue, le peuple incendie l’hôtel, car le passeport donné à la famille royale était signé Montmorin. Le comte doit alors prouver que le document avait été demandé sous un faux nom par l’ambassade de Russie. Montmorin arrête un plan pour une nouvelle fuite, mais Louis XVI refuse. Le 10 août 1792, accompagné de sa femme et de sa fille Pauline, Montmorin quitte l’hôtel et tente de se cacher. Mais il est découvert et mis en accusation pour avoir participé à l’organisation de la tentative de fuite de la famille royale. Emprisonné le 17 août, il est massacré par la foule le 2 septembre 1792. La propriété, considérée comme bien national, restera sous séquestre en attendant un acquéreur. Quoi qu’on en ait dit, il ne semble pas qu’elle ait été pillée.

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Le 15 juin 1795, l’hôtel passe aux mains de Daniel Parker, citoyen des États-Unis.

Successivement propriété de l’entrepreneur et banquier JeanAuguste Sévène, puis du général Jean Rapp, qui le conserve jusqu’en 1821, il appartient encore ensuite à un autre Auvergnat, le marquis Henry de Rochedragon, de 1826 à 1845. Puis la ville de Paris en fait l’acquisition afin d’y établir la maison mère des Frères des écoles chrétiennes, une congrégation fondée en 1680 par JeanBaptiste de la Salle et dédiée à l’enseignement des jeunes, notamment des plus défavorisés. Elle est connue pour avoir apporté à l’enseignement des innovations pédagogiques très modernes, telles que l’adaptation de l’enseignement à l’élève. La ville ajoutera à ses 9030 mètres carrés de superficie les 5130 6

mètres de la propriété contiguë, qui bordait le terrain à l’est dans presque toute sa longueur. Mais en 1905, une fois la loi de séparation de l’Église et de l’État entrée en vigueur, les religieux doivent quitter l’hôtel qui va alors être affecté au ministère des colonies. L’ensemble immobilier existant devait rapidement se révéler insuffisant pour loger tous les services de cette administration, qui était devenue autonome en 1894. De nouveaux bâtiments furent ajoutés de 1937 à 1939, à l’apogée de l’empire colonial français, sur les plans de l’architecte Maurice Boutterin. Les travaux reprirent après la guerre, alors que le ministère des colonies était devenu ministère de la France d’outre-mer.


Il est aujourd’hui compliqué de déterminer avec certitude ce qui reste du primitif hôtel Beaumanoir. Faisant abstraction des bâtiments qui encadrent la propriété, élevés au milieu du XIXe siècle, il nous faut considérer uniquement le pavillon central. Ses divers et nombreux possesseurs lui ont fait certainement subir d’importantes modifications. De son aménagement intérieur, on peut affirmer sans crainte d’erreur qu’il ne reste rien ou fort peu de choses. Aujourd’hui, on retrouverait difficilement l’emplacement des salons où se réunirent les derniers défenseurs de Louis XVI. L’extérieur, au contraire, semble avoir peu souffert. Si le tympan aux motifs guerriers, qui décore maintenant le fronton de la façade nord, paraît avoir été dessiné pendant que Rapp occupait l’hôtel, le premier fronton, avant 1789, affichait vraisemblablement quelques insignes de royauté qui ne survécurent pas à la Révolution. La croix ajourée qui surmonte la porte du 27 rue Oudinot témoigne encore de l’occupation des locaux par les Frères des écoles chrétiennes, de même que l’emblème qu’on aperçoit au nord de la cour Félix-Éboué : une étoile d’argent rayonnante sur un bouclier d’azur.

Néanmoins, l’on peut penser, que nous contemplons, aujourd’hui encore, l’œuvre créée par l’architecte de la fin du XVIIIe siècle, si harmonieuse dans sa simplicité.

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Le ministère des Outre-mer

L’hôtel Montmorin « En nous l’homme de tous les temps. En nous, tous les hommes. En nous, l’animal, le végétal, le minéral. L’homme n’est pas seulement homme. Il est univers. »

Ces quelques vers d’Aimé Césaire figurent sur la façade de l’hôtel de Montmorin. L’aile gauche porte le nom de Louis Jacquinot, l’un des ministres ayant occupé l’hôtel, l’aile droite, celui du Guyanais Félix Éboué, gouverneur général de l’Afrique équatoriale française, qui mit au service de la France libre une armée coloniale de 40 000 hommes et qui repose aujourd’hui au Panthéon. La cour d’honneur porte également le nom de Félix Éboué.

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L’antichambre du Ministère des Outre-mer

Les visiteurs sont amenés par les huissiers à patienter dans l’antichambre jouxtant l’entrée principale où figurent, en noir et blanc, les portraits des 31 ministres qui se sont succédés depuis Jacques Soustelle. On y voit aussi les monuments à la mémoire des agents et administrateurs coloniaux morts

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pour la France au cours des deux guerres et à la mémoire des personnels morts dans les opérations extérieures. Une tapisserie de Georges Rohner, tissée en 1958 et figurant des oiseaux aquatiques, décore cette pièce. Georges Rohner est par ailleurs connu pour une série de toiles consacrées à la Guadeloupe.


Visite du Ministère des Outre-mer

Le salon Louis-Delgrès Ce salon porte le nom du colonel Louis Delgrés. Né en 1766 en Martinique, cet officier de l’armée républicaine, commandant de l’arrondissement de Basse-Terre, en Guadeloupe, s’opposa en 1802 au rétablissement de l’esclavage par Napoléon Bonaparte. Sur le mur, un extrait de la proclamation qu’il publia avant de se faire sauter avec ses compagnons, pour éviter la capture. Elle est gravée sur une plaque de cuivre. Une inscription à la mémoire de Louis Delgrès se trouve dans la crypte du Panthéon.

Divisé en trois, ce salon remplit plusieurs fonctions : espace de réception, salle de conférence, lieu de réunion. C’est dans le troisième salon que s’assemblent chaque semaine les conseillers du ministre afin de faire le point sur les dossiers en cours et définir la stratégie pour les semaines à venir. Le couloir du rez-de-chaussée On remarque dans le couloir un buste de l’administrateur colonial Joost van Vollenhoben, tombé en 1918 près de Villers-Cotterêts. Il s’agit de la copie d’un autre buste, sculpté par Firmin Michelet en 1920, exposé dans une salle de réunion du ministère, la salle Félix-Éboué (où se trouvent 7 autres bustes provenant de l’école coloniale). Vollenhoven avait démissionné et demandé à être affecté au front pour protester contre des levées de troupes coloniales qu’il jugeait excessives.

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Le bureau de

Sébastien Lecornu, ministre des Outre-mer

Parmi les hommes d’État ayant occupé ce prestigieux bureau, trois futurs présidents de la République : Albert Lebrun, Gaston Doumergue, et François Mitterrand. Également André Maginot, Édouard Daladier, Paul Reynaud, Henry de Jouvenel (le mari de Colette et le père de l’écrivain Bertrand de Jouvenel), Georges Mandel (assassiné par la milice en 1944 et dont la mémoire est honorée par deux plaques : l’une apposée sur l’aile est de l’hôtel, l’autre dans la cour Félix-Éboué, côté ouest). C’est dans cette pièce que le ministre des outre-mer, M. Sébastien Lecornu, élabore et coordonne l’action gouvernementale concernant 13 départements, régions et territoires de la France : la Guadeloupe, la Guyane, la Martinique, La Réunion, Mayotte, la Nouvelle-Calédonie, la Polynésie française, l’île de Saint-Barthélemy, Saint-Martin, Saint Pierre-et-Miquelon, les Terres australes et antarctiques françaises, Wallis-et-Futuna et enfin Clipperton.

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Être ministre des outremer implique de s’adapter constamment à l’heure de ces territoires situés partout dans le monde. C’est pourquoi une horloge numérique donne au ministre les différentes heures locales.


Les Jardins

du Ministère des Outre-mer Les jardins du ministère des outre-mer sont partagés avec différentes institutions. Au total, ce sont près de 800 personnes qui travaillent sur le site. À noter que sous les bâtiments se dissimule un curieux bunker.

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Le ministère des Outre-mer

Les Peintures Diverses œuvres d’art ornent les murs et les salons du ministère. Parmi les œuvres originales, celles de Paul Merwart, Suzanne Roché et Paul Gervais. Dans le vestibule du bâtiment sud, se trouve également une mosaïque d’Henri Guédon, artiste et musicien de jazz martiniquais, réalisée en 1992.

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PAUL MERWART (1855-1902)

Cet artiste franco-polonais, né en 1855, étudie à Munich et à Düsseldorf. De 1877 à 1884, il suit les cours de l’École des Beauxarts de Paris. En 1896, il devient peintre officiel de la Marine et des Colonies, ce qui lui permet de voyager : au Sénégal, au Soudan, au Congo, en Tunisie, en Mauritanie, en Somalie et en Guyane.

Ses peintures représentent des sujets exotiques inspirés par les colonies françaises. Il meurt en mission lors de l’éruption de la montagne Pelée à Saint-Pierre sur l’île de la Martinique en 1902.

↓ Rapide de Cafesoka à la Guyane, de Paul Merwart

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↑ Seine au quai d’Orsay de Suzanne Roché

SUZANNE ROCHÉ Seine au quai d’Orsay a été peint en 1936. Cette peinture se trouve au premier étage de I’hôtel de Montmorin, à l’entrée du salon Delgrès.

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Retrouvez les toiles marouflées de

Paul Gervais

au Ministère des Outre-mer

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PAUL GERVAIS (1883-1944)

Paul Gervais naquit à Toulouse, dans une famille de commerçants. Très jeune, il marqua un goût certain pour le dessin et son père l’autorisa à suivre les cours de l’École des Beaux-Arts avant de poursuivre sa formation à Paris, notamment en 1879 dans l’atelier de Gérôme. Ces toiles marouflées, c’est-àdire collées sur les murs avec une colle forte, la maroufle, ont fait l’objet d’une commande passée auprès de l’artiste, grâce au soutien de Gaston Doumergue, un dreyfusard qui fut deux fois ministre des colonies : de 1902 à 1905, puis de 1914 à 1917.

SES ŒUVRES Elles représentent des figures féminines, dénudées ou revêtues de fantastiques costumes inspirés par la Renaissance ou l’Antiquité dans des sites naturels ou des parcs évoquant l’Antiquité. Elles figurent au centre de compositions mythologiques ou historiques teintées de fantaisie. L’ensemble a été restauré en 1998. Deux copies de toiles d’Elisabeth Vigée-Lebrun sont également accrochées aux murs du salon Delgrès. L’une représente l’artiste et sa fille, l’autre Mademoiselle Molé-Reymond. 19


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Ministère des Outre-mer 27, rue Oudinot 75007 Paris www.Outre-mer.gouv.fr Texte: SIG / MOM / DGOM Page 4 à 7 : article d’Eugène Saulnier, 1916 Conception Graphique et mise en page et photographies : MOM - Morgane Zemmali

MOM - Septembre 2020 21



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