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BAZIN ALBERT Sémiotique du minimalisme industriel dans le contexte d’une économie marchande : L’identité visuelle et communicationnelle d’Apple.


Less is more est le principe posé par le poète Robert Browning puis repris en 1947 par l’architecte représentant du Bahaus, Ludwig Mies van der Rohe pour expliquer le principe du minimalisme en design et en architecture. Cette expression tend à valoriser la pureté en création, l’abandon d’ornements, le dépouillement formel et la neutralité en s’appuyant sur l’économie maximale des moyens. Le courant minimaliste traverse le 20e siècle et exerce une grande influence sur le design industriel et les campagnes communication des entreprises dans le capitalisme. En effet, le design revêt un aspect primordial en économie marchande, celui-ci, selon les théories néolibérales du marché, permet à un acteur de se différencier sur le marché pour échapper à l’atomicité (non différenciation des biens) et tenter d’obtenir une situation de monopole temporaire sur la vente de la marchandise qu’il propose. Le design permet en outre aux entrepreneurs de contrôler ce que Jean Baudrillard nomme une liturgie formelle de l’objet, c’est-à-dire un système de signes généré par la consommation des biens et qui est à la fois créé par les consommateurs et conditionné par l’offre. Le culte de l’objet, entretenu par l’idéologie marchande est au centre des préoccupations d’un minimalisme industriel. Celui-ci acquiert une certaine renommée, notamment par le biais d’entreprises globales et particulièrement Apple, qui applique les principes du minimalisme dans toutes les étapes de la production de ses biens de consommation. L’étude du cas d’Apple revêt un intérêt pour le sémiologue à plusieurs titres : non seulement celui-ci permet d’apprécier l’impact quantitatif (un système de signe répandu dans le monde entier) et qualitatif (un ancrage dans la conscience et la mémoire collective) de l’utilisation du minimalisme en communication, mais aussi cette étude permet de dégager les intérêts de cette approche en marketing, et ainsi déceler le ressenti du consommateur face à ce type de communication. Seulement voilà, le minimaliste en design tient sur un paradoxe, puisque s’appuyant sur le dénuement, il veut accroître la puissance du communicateur (émetteur, communicant) et est même posé comme une doctrine salvatrice des stratégies de marketing visuel. Dès lors, moins est-il vraiment mieux ? Comment le minimalisme apporte-t-il un tel succès ?

S’il convient dans un premier temps de confronter les influences minimalistes d’Apple, il convient dans un second et dans un troisième temps de s’appuyer sur les usages de cet outil par cette firme transnationale.

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Sommaire

4 Les influences du design d’Apple : une typologie des minimalismes. 5 Le minimalisme japonais 8 Le minimalisme allemand 12 Le minimalisme de l’objet 14 Le minimalisme du logiciel 16 Le minimalisme et la publicité 18 Le minimalisme de la boutique Clôture.

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Les influences du design d’Apple : une typologie des minimalismes.

Apple est une firme californienne qui naît en 1976 de deux entrepreneurs : Steve Wozniak et Steve Jobs. L’entreprise cherche à vendre des ordinateurs au grand public, et commence à devenir un concurrent de poids dès 1977 grâce à une image moderne, jeune, décontractée ainsi qu’un logo coloré, loin de l’univers grisâtre des marques comme IBM, même si le design de l’électronique d’Apple reste encore ordinaire. Le succès est rapide et Apple enregistre son premier milliard de dollars de chiffre d’affaires au milieu des années 80. En 1984 Steve Jobs est forcé de quitter l’entreprise à cause de son caractère et part fonder les studios Pixar. Apple n’obtient dès lors que peu de réussite jusqu’au retour de Jobs en 97 qui impose une focalisation sur le design des produits plutôt que sur leurs spécificités techniques pour sortir l’iMac en 98, premier ordinateur de couleur et sans port de disquette. Pour effectuer ce tournant et imposer l’esthétisme sur l’ingénierie Steve Jobs s’entoure de nouveaux designers et engage notamment le Britannique Johnny Ive qui deviendra progressivement la seconde personnalité la plus influente de la firme. Les principes de design de Steve Jobs et John Ive seront ensuite utilisés par Apple pour ses prochains produits qui ne seront plus seulement des ordinateurs. Il y a tout d’abord un premier succès commercial avec la création de l’iPod, du logiciel iTunes et enfin de l’iPhone et de l’iPad. Le principe appliqué est de créer un produit qui soit simple d’usage et compréhensible. La simplicité, est donc un cœur du minimalisme apporté par Steve et John Ive, il convient cependant de séparer deux influences. Si Steve Jobs a fortement été influencé par le minimalisme japonais notamment de par ses voyages et ses étroites relations avec le pays du soleil levant, John Ive lui fut influencé par un minimalisme beaucoup plus récent et qui a fortement imprégné ses études : l’école allemande.

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1 Le logo d’Apple avant les années 2000 2 Steve Jobs et le premier iMac lancé en 1998 3 John Ive

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Le minimalisme japonais : un minimalisme organique au service de la spiritualité Le minimalisme japonais n’est pas un simple effet de mode. Celui-ci est inhérent à une langue tradition, le minimalisme moderne japonais est le reflet d’une culture. Cette culture est tout d’abord influencée par ce qu’on nomme « la samouraïsation » : une application de la culture samouraï, c’est-à-dire des anciennes familles nobles du Japon à la société dans son ensemble. Le samouraï doit être parfait dans son action, pour les samouraïs toute fin est guidée par les moyens. À titre d’exemple, l’art de la guerre des samouraïs est extrêmement codifié et demande un sens de l’honneur, et si l’honneur est bafoué, le samouraï est obligé de s’ôter la vie sinon ce déshonneur se répandra sur sa famille. Le samouraï se perfectionne à l’art du combat tout comme la société japonaise héritant de cette culture, cherche à mener chacun dans ce qu’il fait de meilleur, et l’entraînement doit être douloureux, peu importe le métier. Le minimalisme japonais est le reflet de cette samouraïsation puisqu’il est aussi en quête de pureté, mais une bonne pureté. Les objets des artisans japonais cherchent à contenir une essence et à ne pas la rendre vulgaire avec des détails. Ils travaillent sans cesse pour rechercher cette pureté, les objets sont simples, mais bien travaillés à l’image des bols présentés en légende. Cette recherche de la pureté se retrouve dans le bouddhisme et l’art de la méditation. Afin de retrouver le divin, ou de se retrouver sois même, il importe d’être dans l’instant présent et de laisser passer les choses peu importantes, les pensées futiles. La méditation se base sur le concept de focus, un focus sur un objectif et le contrôle de soi et de son environnement. La méditation et le bouddhisme prônant le retour à l’essence il n’est pas étonnant de voir l’architecture et les objets japonais refléter cette recherche. Steve Jobs a été grandement influencé par le bouddhisme à tel point qu’il a été marié par un moine. Il garde le souvenir des temples japonais qui ont été réalisés sur des décennies avec une grande patience notamment lorsqu’il s’agit des jardins. Il y a ici un minimalisme qui est une sorte d’éthique qui permet après l’attente, la maîtrise des éléments pour les tempérer, rien de dépasse dans le jardin moussu du temple de Kyoto et pourtant tout paraît naturel, tout paraît revenir à l’essence. La lumière est elle aussi maîtrisée, cette lumière adoucie par les murs de papiers japonais qui inspireront Jobs, notamment le côté mystificateur de cette lumière. Le fondateur d’Apple porte durant 10 ans la même tenue avec comme haut un uniforme minimaliste inspiré des moines bouddhistes et conçu par Issey Miyake.

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1 Le temple moussu de Kyoto 2 Steve Jobs et sa fameuse tenue 3 Objets japonais par Muji

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Le minimalisme allemand : un minimalisme au service de la fonction

Les courant minimalistes qui influeront durablement sur le design n’émergent que dans les années 60. IL y a pourtant des influences qu’il est possible de citer comme le fonctionnalisme qui affirme que la forme d’un objet ou d’un bâtiment doit refléter sa fonction et le bahaus comme courant artistique qui tenta de vulgariser le minimalisme pour la grande masse avant la guerre. L’un des pères du design industriel dans le minimalisme allemand est Dieter Rams. D.Rams est ingénieur chez Braun et décrit une théorie fonctionnaliste du minimalisme qui affirme que l’objet doit être non seulement beau, mais communiquer son utilisation, être fait de matériaux nobles, robustes et durer. Cette philosophie n’est pas étonnante pour une époque où l’obsolescence programmée n’as pas encore été inventée (Apple fera plus tard un design durable, mais une électronique facilement obsolète), mais ce que Dieter Rams apporte est un contrôle qualité qui doit s’appliquer du début à la fin du processus. Dieter Rams n’était pas simplement un designer, il coordonnait tout le processus de fabrication sur les objets qu’il dessinait, lui permettant ainsi d’avoir un contrôle total sur la production. Le principe de D.Rams n’est pas seulement Less is more, mais « Less but better » qui implique le fait que le design doit optimiser les performances de l’objet. Une autre nouveauté apportée par le designer et d’utiliser un design architectural et des matières industrielles pour les inclure dans des conceptions d’électronique grand public. Les principes de Rams sont aussi éthiques puisque selon lui le design devrait aider les gens au lieu de les dominer. Pour vulgarise sa pensée Rams a conçu un guide avec 10 principes pour un bon design (voir page suivante). L’influence de Dieter Rams est très importante puisqu’apportant des outils et des idées qui sont constamment réutilisées par les industries modernes, en particulier Apple dont le designer John Ive qui s’est directement inspiré des objets conçus par Rams (voir page suivante, comparaison des productions d’Apple et de Braun). Pour John Ive et Dieter Rams, le monde d’aujourd’hui est fait d’une quantité monstrueuse d’objets de mauvaise qualité, il ne faut donc pas nier un certain élitisme du minimalisme industriel.

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Une peinture Bahaus : 'K VII', László Moholy-Nagy, 1922 (Tate), avec deux exemples de Radio de Braun et une photo de Dieter Rams. Photos de la page suivante : comparaison des produits d’Apple et de ceux de Braun

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Les dix principes du bon design selon Dieter Rams Le bon design est innovant (le développement technologique continu offre l’opportunité d’innover de manière perpétuelle. Le « bon design » est constamment mis à jour grâce à l’intégration des nouvelles technologies. Le design ne connaît donc pas de limites en termes d’innovation.) Le bon design rend un produit utile (L’objectif premier du designer est de conférer au produit une utilité. Le design de celui-ci doit avant tout être pratique. Pour autant, le produit doit aussi répondre à certains critères psychologiques et esthétiques. Aussi, le « bon design » donne priorité à l’utilité d’un produit et proscrit l’ensemble des caractéristiques superflues.) Le bon design est esthétique (la conception bien exécutée ne manque pas de beauté. La qualité esthétique d’un produit fait partie intégrante de son utilité. Les produits utilisés au quotidien produisent un effet indirect sur les utilisateurs et leur bien-être.) Le bon design rend un produit compréhensible (il implique que la structure du produit soit compréhensible et prédispose l’utilisateur à utiliser ses fonctions de manière intuitive. Idéalement, le produit est intuitif pour toutes les catégories d’utilisateurs.) Le bon design est discret (La conception d’un produit doit être neutre et sobre. La simplicité et la neutralité sont destinées à laisser un espace d’expression à chaque utilisateur. Les produits bien conçus sont des outils, et non des objets décoratifs ou des œuvres d’art. Un produit bien exécuté est un outil qui ne perd pas son temps avec une identité esthétiquement illogique.) Le bon design est honnête (un design honnête ne cherche pas à tromper l’utilisateur sur la valeur réelle du produit. Il ne cherche pas à manipuler le consommateur avec des promesses qui ne seraient pas corrélées à la réalité du produit.)

Le bon design est durable (La mode est par nature éphémère et subjective. Par opposition, l’exécution appropriée du « bon design » confère à chaque produit une nature objective et intrinsèquement utile qui pérennise son utilisation. Ces qualités sont reflétées par la tendance des utilisateurs à conserver des produits bien conçus, bien que la société de consommation favorise les produits jetables.)

Le bon design se cache dans les détails (Il ne laisse jamais rien au hasard. La précision de chaque détail exprime le respect des concepteurs envers leurs consommateurs. Chaque erreur apparaît comme un manque de respect.)

Le bon design est respectueux de l’environnement (Il contribue de manière significative à la préservation de l’environnement par la conservation des ressources et en minimisant la pollution physique et visuelle au cours du cycle de vie du produit.)

Le bon design est minimaliste (Dieter Rams distingue le « Less is more » (« Moins c’est mieux »), paradigme de conception quotidiennement régurgité dans l’industrie du design, de son propre paradigme : « Moins, mais avec la meilleure exécution ». Son approche favorise les principes fondamentaux de chaque produit et évite tout ce qui est superflu. Le résultat idéal correspond à des produits d’une grande pureté et simplicité.)

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Le minimalisme de l’objet Comment le minimalisme provoque-t-il l’émotion ?

La première chose qui nous frappe à la vision de l’objet c’est la couleur. Le gris. Le gris est détaché, neutre, impartial, il est le juste milieu entre le noir et le blanc, il ne cherche pas à imposer l’un ou l’autre. Le gris présenté ici est solide, stable, il ne provoque pas l’excitation ou la stimulation, il est élégant et conservateur, il catalyse l’énergie, d’autant lorsqu’il est mat. Car c’est bien une surface mate que celle du MacBook d’Apple, le gris, se posant sur le châssis de l’ordinateur aide à orchestrer le domptage des éléments. Puisque la lumière n’est que partiellement reflétée par l’objet ici, elle est déformée, il n’y a pas de reflet direct sur le MacBook, il n’y a qu’un flou créé par la surface mate qui uniformise et tempère la lumière : à l’image de la pomme au dos de l’ordinateur. C’est ici un culte de l’image, la pomme est mystificatrice et tient parfaitement du registre japonais. Elle s’allume en plein milieu du dos, à la fois exubérante puisqu’au milieu du dénuement, mais apaisante, elle cherche à diffuser sa lumière tamisée et mystique pour attirer le regard vers la marque, qui ne s’écrit pas en lettre, qui ne s’appose pas sur les surfaces visibles de l’ordinateur, Apple est une marque qui se devine. Cherchez donc sur le haut châssis, vous ne verrez nulle part écrit « MacBook » ou « Apple » puisque nous sommes en présence d’un modèle haut de gamme. Et d’ailleurs quel besoin pour une inscription, lorsque le logo de la marque domine le dos de l’objet, mais celui-ci domine en douceur. Le fonctionnalisme allemand guide le reste de la production, mis à part l’apport du logo il n’est pas de modification esthétique à l’objet qui n’a de sens technique : les deux seules altérations du gris sont ici pour indiquer les deux surfaces d’interaction, elles sont en noir, c’est l’écran et le clavier, le design révèle ici le sens par l’utilité. Le reste est dénuement. Les lignes sont droites, mais les coins sont arrondis, l’objet se veut fin. Au toucher l’objet d’Apple évoque la robustesse : c’est le seul ordinateur ayant un châssis bas (entourant les composants le clavier, etc) fait de seulement deux pièces d’aluminium ! C’est le tour de force technique, la robustesse industrielle. La seule chose qui se veut alors colorée dans les objets Apple : c’est le logiciel, le software.

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Le minimalisme de l’interface Un minimalisme récent.

L’histoire de l’interface d’Apple est faite d’un grand schisme qui s’effectue autour de 2013 : le passage du skeuomophormisme au flat design, le design flat. Ce passage s’effectue à la fois pour l’ordinateur et pour le téléphone, sauf si le MacBook de l’utilisateur concerné n’est pas encore mis à jour par ce dernier. L’on va ici se concentrer sur le design de l’interface de l’iPhone.

Le principe était le suivant : l’objet est minimaliste, dénué d’ornement, il magnifie une interface skeuomophormiste du grec skeuos (contenant) et morphé (forme). Le skeuomophormisme cherche à imiter le réel (mimesis), il tente de ne pas perdre l’utilisateur dans un monde digital. Ce skeuomophormisme est l’exception chez Apple, puisque celui-ci est peu minimal : il utilise un foisonnement de textures. Les exemples de reproduction du réel dans le skeuomophormisme sont l’utilsiation d’une texture bois pour la bibliothèque, d’un acier brossé digital pour certains menus, de donner de la profondeur 3D de chercher à reproduire les effets d’ombre. Mais Apple est désormais passé au flat design. En effet les utilisateurs ont changé, la nouvelle technologie n’est plus une nouveauté pour eux, ils peuvent enfin se perdre dans un monde parallèle digital qui articule un fonctionnalisme autour de la couleur éclatantes et surréalistes. La nouvelle interface flat (plate) utilise plusieurs éléments. Tout d’abord la clarté : il y a peu de détails, l’application représente l’usage que l’on va en faire, elle va à l’essentiel, elle utilise avant tout le symbolisme (contrairement au skeuomophormisme utilisant le réalisme). Les couleurs sont claires, plus fortes que dans le réel cette fois-ci, puisque c’est le monde digital, alors que dans le skeuomophormisme les couleurs sont ternes. Le flat design peut aussi être résumé par la métaphore, une métaphore de monde réel à travers des éléments de design graphiques (exemple : utilisation d’un soleil et d’un nuage pour la météo). Il faut enfin se garder de penser qu’un design plus épuré s’approche est plus simple à concevoir, comme on peut le voir avec le système utilisé pour construire les icônes représentées dans les images sur la page de droite.

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Le minimalisme de la publicité : Le luxe et le désir.

Comment le minimalisme cherche-t-il à provoquer le désir ? La publicité d’Apple est comblée de dénuement et de refus d’ornement. Le blanc s’impose, comme arrière-plan et comme structure du message. Le blanc Apple est lumineux, c’est un blanc de méditation, un blanc mystique. C’est ici bien un message que la marque tente de faire passer : celui de la sortie d’un nouvel objet : l’iPad. La marque est rappelée par le seul logo, l’écriture est noire sur blanche, aucune autre inscription ne vient perturber la publicité. Il se trouve une grande sobriété dans la publicité de la marque Apple qui cherche à amener l’œil sur l’objet. Le récit est alors celui de la rencontre entre l’homme et l’objet, c’est la célébration du consumérisme, le culte de l’objet finit, aucune mention n’est faite des étapes de fabrication. Ainsi la tablette se suffit à elle-même pour remplir la publicité, pas besoin de slogan pour nous apporter l’envie, l’objet est objet de désir. Dès lors l’on a plus qu’à admirer la construction de l’objet, qui renvoie à un imaginaire, c’est-à-dire à toute la pédagogie marketing précédente produite par la firme. La publicité porte ainsi avec la célébration du consumérisme, l’autocélébration des objets qui en sont les fruits. Enfin arrive la main de l’homme. Elle interagit avec l’objet, le porte, le pause. Il n’y a pas de visage. Peut-être Apple souhaite que l’on s’identifie à cette personne tenant la tablette ? La firme, cherche à nous montrer que ses produits sont interactifs, qu’il est possible de les toucher. Les objets Apple sont des objets sensoriels.

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Minimalisme de la boutique : la création d’une ambiance et d’une expérience Entrer dans un store Apple c’est comme entrer dans un temple. Avant même d’avoir mis un pas dedans, toute l’expérience est maîtrisée jusque dans le moindre détail. L’entrée appelle le regard, elle est toute ouverte pour inciter les fidèles, la devanture est en verre, l’Apple store se veut ainsi transparent, mais mystérieux. Transparent, car Apple n’a rien à cacher et veut inciter les profanes à venir dans son antre, mais mystérieux, car l’on y entre toujours avec curiosité, curiosité pour la marque, son imaginaire, ses produits, par l’expérience qu’on y cherche. L’expérience se trouve dans l’ambiance. La pomme lumineuse célébrant la marque et tout en haut, avec sa luminosité mystique et bouddhiste elle est comme un phare planté dans le mall, indiquant le lieu de célébration de la technologie. Apple a tellement confiance en lui, Apple est si fameux qu’il suffit d’une pomme pour se retrouver avec une foule de consommateurs dans une boutique. La lumière de l’Apple store est contrôlée, elle a été scrupuleusement pensée, comme dans une église, elle nous indique on regarder. Ce sont les produits qui sont mis en valeur par la lumière, ils sont posés sur des tables en bois qui sont rangées dans un environnement aseptisé. L’environnement est celui du minimalisme allemand, des matières fonctionnelles, l’aluminium, la modernité. On trouve beaucoup d’espace dans le Apple store, l’espace laisse place à la méditation, à l’ordre, on laisse tout l’espace possible pour que le consommateur puisse se pencher sur le plus important : l’objet. L’objet de vente, l’objet marchand est ici mis dans un contexte qui le magnifie, lui donne une importance, comme une relique posée sur l’hôtel sacré. Mais cet objet, que nous avons vue dans la publicité, nous pouvons désormais le toucher, Apple touche le consommateur dans son corps, Apple se parque dans la paume. L’on peut interagir avec l’objet de désir familiariser avec lui, et projeter son imagination sur sa possession : et si j’en étais propriétaire ?

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Clôture. Apple nous montre qu’il est possible de faire mieux avec peu. Utilisant judicieusement le minimalisme allemand et japonais elle s’inscrit dans la recherche d’une transformation de l’expérience de consommation. La valeur intrinsèque de l’objet est célébrée tout autant que l’expérience qui l’entoure. Apple touche nos corps et nos sens, pour nous fournir grâce au minimalisme un sentiment d’apaisement, se sobriété et pourtant de jouissance dans l’objet qui, au lieu de s’appuyer sur ses apparences grandiloquentes, brille par ses apparences de luxe discret porté par la mythologie d’une marque multinationale et la création d’une liturgie formelle de l’objet. Apple tente d’élever l’objet au rang de sacré, pour entamer sa célébration. La seule différence, la seule limite étant que l’objet chez Apple est obsolète si rapidement : dépassé après une année, obsolète après cinq ans. Apple est donc un faux prophète, se revêtant des apparences des célébrations de l’éternel il est l’incarnation des plaisirs temporels.

Carré sémiotique de la stratégie de communication d’Apple : Mystique

Technique

Sobriété Esthétique

Fonctionnel

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