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Une réhabilitation qui ne casse pas de briques
À Nivelles, le site industriel des Ateliers Chantrenne est en voie de démolition pour être transformé en un intérieur d’ilot comprenant 66 logements neufs. La particularité du projet tient en sa circularité et au réemploi de matériaux, procédé encore inédit en Brabant wallon. Toutes les briques des anciens halls seront par exemple préservées pour être réutilisées comme parement des nouveaux immeubles.
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Texte : Xavier Attout - Photos : A2M, DDS+ et X.A.
10 Au bout d’une petite allée partant de la rue Delfosse, on aperçoit au loin les pelleteuses. Les tas de gravats également. À gauche, des hangars industriels qui vacillent, défigurés à moitié. Ils vivent leurs dernières heures. À droite, entre les ouvriers, des amas de briques plus ou moins triés. L’ancien site industriel des Ateliers Chantrenne, situé à quelques dizaines de mètres du centre de Nivelles, est en voie de disparition. Il est bien loin le temps où la manufacture « Edmond Chantrenne », construite à la fin du XIXe siècle, y fabriquait des machines destinées aux papeteries. Un projet immobilier est désormais en cours pour transformer ce site de 71 ares en un ensemble de 61 appartements, 5 maisons et 3 espaces pour professions libérales. Sa situation en cœur d’ilot, à l’intersection des rue Roblet et Delfosse, devrait lui conférer un caractère particulier où la mobilité douce règne en maitre. Un symbole de plus, en tout cas, de la politique locale qui vise à combler les « dents creuses », ces anciens sites industriels qui figurent en haut de la pile des priorités urbanistiques. Si le descriptif laisse entrevoir l’érection d’un énième projet immobilier en Brabant wallon, celui-ci mérite toutefois une attention particulière. Il s’agit du premier (avec un projet en cours à Louvain-la-Neuve, lire en page 12) projet qui met en application les principes de construction circulaire. De nombreux matériaux seront récupérés pour être intégrés dans le nouveau projet. « Il m’était inconcevable de ne pas travailler de cette manière, explique Benjamin Piret-Gérard, fondateur et CEO du promoteur immobilier Redev. Il est plus que temps de mieux réfléchir en amont au réemploi des matériaux. Quand j’ai découvert ce site en 2019, je l’ai directement trouvé magnifique. Les halls industriels avaient un vrai cachet et une âme particulière. Il me paraissait évident de vouloir les garder. Reste que si tous les murs n’ont pu être maintenus pour des questions énergétiques, les murs mitoyens ont été préservés et rabaissés. Je souhaitais également garder la belle tour centrale pour en faire une sorte de totem. Mais la commune a souhaité que la nouvelle voirie passe à cet endroit. Il faudra donc la démolir. »
1 200 trajets de camions économisés
L’une des principales spécificités du projet réside dans la récupération des briques anciennes pour les utiliser à nouveau comme parement de façades pour l’ensemble des nouveaux immeubles. Et ce, afin de conserver le caractère et l’identité du lieu. Les ouvriers s’affairent donc en ce moment à les trier dès que les pelleteuses font tomber les murs.
600 palettes de briques seront récupérées pour le nouveau projet.
Elles seront ensuite nettoyées et stockées sur le site. « Un travail considérable mais essentiel. Cela donnera un cachet unique aux immeubles. 70 % des briques seront récupérées, cela équivaut à 600 palettes. Seul le bâtiment central sera recouvert d’un enduit. Travailler en récupérant les briques ne coute pas plus cher que recouvrir l’ensemble des façades d’un crépi. Cela s’équilibre car si des économies sont réalisées sur les matériaux, le prix de la pose est plus élevé. Mais surtout, en travaillant comme cela, on évite le ballet incessant de camions. Près de 1 000 à 1 200 trajets seront ainsi économisés ! Tout ce qui peut être broyé – comme le béton – sera concassé et réutilisé. » Des matériaux qui seront stockés sur site pendant le chantier de démolition et de dépollution, ce qui ressemblera à un bon jeu de Tetris pour les ouvriers… « Des poutres en chêne seront installées dans la salle des fêtes communautaire. L’ancienne cuisine sera également réinstallée
Benjamin Piret-Gérard, fondateur de Redev
comme cuisine commune. Elle est magnifique. J’ai aussi gardé un millier de plans techniques qui ont été dessinés de 1898 à 1908. Il y en avait plein, je ne garde que 5 % de ce que nous avons trouvés. Ils serviront de décoration pour les espaces communs. Près de 70 moules de forge ont également été sauvés. Ils seront transformés en lampe et chaque résident en recevra une. L’objectif est vraiment d’essayer de transmettre l’âme de l’ancien dans le neuf. »