O RAGE NADIA RABHI 1
1
O
RagE NADIA RABHI
2
3
[ Du son sans le son, de l’image avec affect ] Pour entendre la grogne populaire et mes propres colères aussi. [ Du son sans le son, donc et de l’image avec affect ] Une manifestation silencieuse et bruyante, à la fois.
Ô rage : Est ce que tu l’entends ?
4
5
“T’as vu ce cul ? Je ferais bien des trucs dedans”. “ On est dans un milieu d’homme, comprends bien que t’as pas ta place” “Hé, mademoiselle ! Tu veux pas venir chez moi ce soir ?” “Pourquoi tu t’énerves, t’as tes règles ?” Morceaux choisis de la vie d’une femme en 2016. Un jour tu fais le constat alarmant que tu vis dans un monde où il ne fait pas toujours bon être une femme. Tu te rends compte que rentrer chez toi de nuit peut devenir dangereux, que tu es moins payée que tes congénères masculins, que tu subis une pressions sociale sur la reproduction, que tu dois justifier plus encore de tes compétences pour obtenir un poste, que tu es moins légitime du fait de ton sexe tout simplement.
5
Un jour j’ai fais ce constat alarmant et j’ai senti l’orage monter en moi, quand c’est là tu ne peux plus fermer les yeux. J’ai la rage contre la domination que subisse les femmes, j’ai la rage quand je vois les inégalités bouffer les femmes et les hommes, j’ai la rage d’assister à la monter en force des pensées conservatrices. La rage est devenue un moteur pour me battre au quotidien contre un sexisme pernicieux. Transformer la colère en lutte / la rage en mots.
FLORA
6
7
8
9
10
11
Colère déchainée contre Michel mon prof’ de judo qui a mal arbitré ma compétition et à ceux qui nous font vivre dans la peur et le traumatisme
11
FERDINAND
12
13
14
15
16
17
Colère contre la peur, colère contre moi d’avoir quelque fois peur. Colères contre celles et ceux qui disent nous servir et n’en font rien. Colère contre la futilité de certaines de mes colères.
17
Et puis enfin, le ciel s’éclaircit.
VALÉRIE
18
19
20
21
22
23 Il est temps de se
déplacer autrement. Temps de ne plus acheter d’essence. Grand temps de reprendre notre place. Il est temps de partager avec nos voisins. Temps de cultiver et consommer localement. Grand temps de boycotter les multinationales. Il est temps de revenir à l’essentiel. Temps de vivre ensemble. Grand temps de respecter notre terre. Il est temps de prendre le temps. Temps de prendre de la hauteur. Grand temps d’agir.
23
GABRIELA
24
25
26
27
28
29
Je voudrais aller crier sur les arbres mais il n’y en a pas. Je voudrais que ma seule discipline soit celle de la résistance. Que tout mon corps soit fait de cette discipline. Tout mon corps résistant. J’aimerais être un Sioux et avoir une crête de couleur. Je sais que ma colère est vaine. Pourtant je préfère la colère à la tristesse. Il y a encore de l’espoir avec la colère. La colère est encore synonyme de non-acceptation. La non-acceptation est encore synonyme de la possibilité de changement. Croire qu’il existe une chance de combattre la médiocrité et la bêtise. On est pas aidé et c’est pas gagné, vraiment pas gagné.
29
La bêtise s’arroge toujours plus d’espace sonore que l’intelligence. Et la monopolisation de l’espace sonore par la connerie permet d’accaparer le pouvoir, l’argent. On est dominés par des cons. C’est malheureux. Comme dit si bien Gramchi “Il faut allier le pessimisme de l’intelligence à l’optimisme de la volonté”.
LUCIE
30
31
32
33
34
35
“J’ai la rage de ceux qui ne se l’autorisent jamais. La rage rentrée, brûlante, envahissante. C’est celle de ceux à qui l’on a beaucoup dit de se taire et de faire bonne figure. Celle de ceux qui ont passé leur enfance au fond de la classe en espérant qu’on les oublie tout en priant pour ne jamais être avalés par la masse. C’est la rage des muets, des gentils, des émotifs et des effrayés. Parce que la rage, tant qu’on ne l’a pas regardée en face, elle encombre terriblement. Et elle fait peur comme un de ces monstres de la nuit noire. C’est peut-être même la plus grande peur après celle de mourir. Ou de ne pas être aimé.
Pour soi-même. Et puis, être enragée, quand on est une fille, c’est pas tellement bien vu. On doit être beaucoup de choses, mais enragée, ça, non, ça ne fait pas partie de l’image d’Epinal. Et puis un jour, ça vient. Ça monte et ça brûle comme le feu de la vie. Et alors, on se demande comment c’est possible que le monde entier ne soit pas enragé. De tout. De son absence. De leurs discours incessants. Du silence. Du bruit. De la bêtise. De leurs rhétoriques absurdes. Du trop plein. Du manque. De la brutalité infinie de ce monde qui court au-devant de sa fin. Et on en pleure. De rage”.
35
FLORENCE
36
37
38
39
40
41
Après l’ô rage, un arc-en-ciel de 2 cœurs qui sèment (…)
41
NOLWENN / SEB
42
43
44
45
46
47
Je passe des sourires au larmes, des cris au silence car c’est tout ce que j’ai pour exprimer ma peine… Et la sienne qui ne fait aucun vacarme et pourtant qui me touche en plein cœur, developper ma haine ne serait que l’alimenter… À la place j’ai choisi l’amour pour soigner mes mots et les siens, pour que l’univers nous soit temoin et qu’il vienne en aide à cette âme si parfaite et sensible… Elle saura avec le temps interpreter mes maux et se sortir de ce mauvais pas pour en faire un hors de cet hospital… Je sentais qu’un O’rage se préparait !
47
DJ eNyGm
48
49
50
51
52
53 Il est temps de se
déplacer autrement. Temps de ne plus acheter d’essence. Grand temps de reprendre notre place. Il est temps de partager avec nos voisins. Temps de cultiver et consommer localement. Grand temps de boycotter les multinationales. Il est temps de revenir à l’essentiel. Temps de vivre ensemble. Grand temps de respecter notre terre. Il est temps de prendre le temps. Temps de prendre de la hauteur. Grand temps d’agir.
53
CÉDRIC
54
55
56
57
58
59
Rage que des gens crèvent dans la rue, là en- bas et que je n’arrive à rien faire pour les aider. Rage de m’être levé du pied gauche. Rage de devoir me faire gazer pour finir une manif. Rage dedans. Rage dans la confusion ambiante. Rage de l’impuisssance. Rage d’aimer. Rage vivante. Ma rage, le lieu où mes colères s’amoncèlent.
59
MATTEW / SELMA
60
61
62
63
64
Pour entendre le monde qui va mal, ses 500 morts par jour en Méditerranée, ces gens qui n’en peuvent plus. Pour exprimer cette colère dans laquelle je refuse de rentrer mais qui m’anime aussi parfois et last but not least pour participer aux manifestations d’une manière différente puisque ce portfolio a été commencé pendant les manifestations populaires d’avril 2016. J’ai lancé une invitation à participer via ma page Facebook et j’ai été très surprise par le succès public de cette série. Entretemps, le monde ne s’est pas amélioré, la situation s’est même largement détériorée, notamment pour les populations les plus fragiles. les attentats, les polémiques, la laïcité, les migrants, le racisme, la duplicité des politiques, le capitalisme à outrance, la situation des femmes, l’éducation, la liste est non exhaustive et infinie. il y a donc bien d’autres raisons de manifester sa rage (...) Bien sur, on pense à la tragédie grecque et à ces sculptures aux faciès volontairement exagérés, c’est un axe que j’ai privilégié pour entendre sans le son. C’est aussi une piste que j’avais déjà exploré sur trafik-light.com, avec ces portraits de filles et garçons aux expressions engagées. in fine, J’ai demandé à chacun des participants de me donner un texte parlant de leur grand bout de rage, une manière de prendre le poul social sur un micro échantillon et de mettre des maux sur leurs mots.
LAPIN SAUVAGE
O
E g aR
2