Pratiques exemplaires et prometteuses en matière d’adoption et de confiance à l’égard des vaccins

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MALADIES INFECTIEUSES ET CHRONIQUES

PRATIQUES EXEMPLAIRES ET PROMETTEUSES

EN MATIÈRE D’ADOPTION ET DE CONFIANCE

À L’ÉGARD DES VACCINS CHEZ LES MEMBRES DE

PREMIÈRES NATIONS, LES INUITS ET LES MÉTIS

Préparé par Regine Halseth

La vaccination est un outil important de prévention des maladies. Malgré cela, la couverture vaccinale au sein des populations de Premières Nations, d’Inuits et de Métis peut parfois être plus faible que chez les populations non autochtones en raison de facteurs structurels, sociaux et interpersonnels, ce qui ouvre la voie à des inégalités en matière de santé. L’élimination des obstacles à la vaccination est donc une stratégie importante pour réduire les inégalités en matière de santé chez les populations autochtones 1

Cette fiche d’information, qui vise à mettre en relief certaines pratiques exemplaires ou prometteuses, relève plusieurs exemples de programmes dirigés par des Autochtones qui ont démontré un certain succès en matière de promotion de l’adoption du vaccin chez les populations

autochtones en différents contextes. Les divers exemples retenus sont inclusifs dans la mesure du possible et ont été choisis en gardant à l’esprit la nécessité d’inclure les populations de Premières Nations, les Inuits et les Métis de diverses régions géographiques à travers le Canada. Ces initiatives touchent aussi bien les enfants que les adultes et visent à prévenir différents types de maladies.

Les programmes d’immunisation ont été répertoriés principalement à l’aide d’une recherche dans Internet, en s’intéressant d’abord aux programmes offrant suffisamment de renseignements, entre autres, sur leurs principaux partenaires, leur déploiement et leurs paramètres de réussite. Cette recherche a permis de constater des lacunes dans l’information sur les diverses initiatives,

particulièrement sur les paramètres de mesure de leur réussite et de leur mise en œuvre, et de noter qu’il y avait aussi un nombre limité d’initiatives métisses et inuites, ou qui avaient été entreprises en dehors du contexte de la COVID-19. La stratégie de recherche a donc été élargie afin d’inclure des contacts avec certains chercheurs possédant une expertise en vaccination dans le contexte autochtone, et de trouver ainsi d’autres programmes d’immunisation ayant connu du succès. Les dirigeants des initiatives ont aussi été contactés afin de compléter au besoin l’information concernant ces initiatives et pour en vérifier et en approuver le contenu. Bien que nous ayons tenté d’assurer une bonne diversité, l’information sur les initiatives inuites et métisses ou sur celles qui ont été menées en dehors du contexte de la COVID-19 demeure limitée.

1 Dans ce document d’information, le terme « Autochtones » est utilisé globalement pour désigner les membres des Premières Nations (inscrits ou non), les Métis et les Inuits, tels qu’ils sont définis en vertu de l’article 35 de la Loi constitutionnelle de 1982 Lorsqu’il est question d’un groupe autochtone précis, les termes « Premières Nations », « Inuits » et « Métis » sont utilisés lorsqu’ils sont pertinents.

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Programme pour la petite

enfance – Maskwacis

Health Services

Maskwacis Health Services (MHS), située sur le territoire du Traité 6, offre des services de santé aux Premières Nations Samson, Ermineskin et Louis Bull, en Alberta. Ses services ont évolué et peuvent maintenant répondre aux besoins particuliers des communautés de Premières Nations que dessert le centre, à la fois sur les plans social, culturel et de la santé. L’approche de MHS pour les soins de santé fait simultanément appel à des méthodes thérapeutiques traditionnelles et contemporaines, et ce, tout en « assurant le respect des croyances culturelles et spirituelles » [traduction] de la clientèle (Maskwacis Health Services, 2017, para. 2)*. MHS exploite un centre de santé communautaire offrant des soins de santé primaires complets, dont des services de vaccination pour les enfants et les adultes des trois communautés de Premières Nations, selon une approche globale et sensible sur le plan culturel.

Dans les communautés desservies par MHS, des retards peuvent survenir dans la vaccination des enfants en raison de la pénurie de personnel, de l’isolement de ces communautés, des procédures et des règlements relatifs à la vaccination et du manque de transport ou de temps des parents ou des tuteurs des enfants. Comme dans toutes les familles, les parents et les tuteurs peuvent avoir des priorités concurrentes ou vivre des situations de crise; déménager dans une réserve ou la quitter ou manquer de réseaux de soutien (MacDonald et al., 2022, 2023; Rattlesnake & Morin, 2023). La politique un enfant/un rendezvous, par exemple, ne convient pas aux parents de Premières Nations qui n’ont pas facilement accès à des moyens de transport ou des services de garde d’enfants (MacDonald et al., 2022). Il n’est donc pas rare que des membres d’une communauté ne soient immunisés que partiellement.

Il a été démontré qu’offrir des services d’immunisation sur les réserves améliore la couverture vaccinale chez les enfants de Premières Nations desservies par MHS. En fait, les enfants ayant reçu leur premier vaccin au centre de santé communautaire avaient plus de chances d’être entièrement vaccinés à 2 et à 7 ans, comparativement aux enfants qui avaient reçu leur première dose de vaccin en dehors de la communauté, hors de la réserve (MacDonald et al., 2023).

Le Early Years Program – le programme pour la petite enfance – de MHS est un outil important pour aider les parents ou les tuteurs à surmonter les obstacles à la vaccination de routine des enfants et pour favoriser l’adoption du vaccin sur les réserves. Créé en 2018, ce programme fonctionne grâce à « une formation adaptée à la culture et une variété d’activités telles que des visites à domicile, des rassemblements et un programme préscolaire » [traduction] (Trees Network, 2022, para. 1). D’abord offert sous forme de projet pilote dans la Première Nation

* Toutes les références bibliographiques citées dans ce rapport sont en anglais seulement.

Promotion de l’adoption du vaccin par des visites à domicile et des rassemblements

Le programme pour la petite enfance offre des visites à domicile aux futures mamans et aux familles comptant de jeunes enfants. Il fait appel à des préposés vivant dans la communauté, qui sont chargés des visites (une personne pour 15 familles), font la promotion du bien-être des familles et aident à améliorer les perspectives d’avenir des enfants (Rattlesnake & Morin, 2023). Ces préposés ont avec eux un ensemble de fiches d’activités adaptées par des membres de la communauté afin d’assurer leur pertinence culturelle. Ces fiches visent à amorcer la conversation et proposent des activités classées en six sections, du prénatal à l’âge préscolaire 3. Chaque fiche porte sur un aspect du développement sain des nourrissons et des enfants qui deviendra le sujet de la conversation. La vaccination de routine des enfants est l’un des sujets proposés dans ces fiches d’activités. Une fois que

les préposés aux visites à domicile ont eu une conversation sur la vaccination de routine des enfants, ils remettent la fiche aux parents ou aux tuteurs à titre de rappel. Le programme pour la petite enfance a été adapté durant la pandémie de COVID-19 afin de permettre des rencontres en virtuel, avec les fiches d’activités placées dans des tablettes électroniques achetées par MHS et remises aux familles.

Les relations que le programme a permis de tisser entre le personnel et la clientèle aident à remédier aux obstacles à la vaccination. Les préposés aux visites à domicile entrent dans les demeures de leurs clients en se demandant : « Que pourra m’apprendre cette famille? » au lieu de se dire : « Que vais-je pouvoir apprendre à cette famille? » Cette approche est conçue pour remédier aux différences de pouvoir, maintenir les relations et établir un lien de confiance avec les parents ou les tuteurs (Rattlesnake & Morin, 2023). Le personnel du programme est fier du peu de roulement et du taux élevé de rétention de ses membres et peut compter sur un environnement de travail d’équipe

2 Jusqu’à tout récemment, Maskwacis Health Services desservait aussi la nation Montana; le programme s’étendait donc aussi à cette Première Nation (C. Rattlesnake, communication personnelle, 8 août 2024).

3 Les fiches du coffre à outils sont réalisées grâce à un financement offert par l’Initiative de la famille Martin (Rattlesnake & Morin, 2023).

d’Ermineskin, le programme a été élargi pour inclure les nations Samson et Louis Bull 2 , grâce à un financement de Services aux Autochtones Canada et de l’Initiative de la famille Martin (Brain Canada, 2019; Rattlesnake & Morin, 2023). Le programme pour la petite enfance a été mis sur pied à partir d’éléments probants issus de la recherche soulignant les lacunes importantes dans l’expérience prénatale des communautés desservies par MHS, surtout pour les enfants de 1 à 3 ans (Rattlesnake & Morin, 2023); le programme visait donc à combler ces lacunes. Son contenu a été créé en collaboration avec les Premières Nations desservies par MHS, selon la prémisse voulant que les parents membres des Premières Nations doivent être honorés et considérés comme les premiers et les plus importants enseignants dans la vie d’un enfant (Rattlesnake & Morin, 2023). Le programme pour la petite enfance est encadré par un comité consultatif d’aînés comptant des représentants des trois communautés. 3

harmonieux (Rattlesnake & Morin, 2023). Il faut du temps pour établir la confiance et gagner le respect d’une communauté (Smylie et al., 2001). La continuité au sein du personnel aide à nourrir des relations de confiance avec les clients, lesquelles nécessitent l’engagement et la patience du personnel pour se développer. La confiance établie entre les membres du personnel du programme et les familles ou les tuteurs peut être mise à contribution quand vient le temps de conseiller les parents et les tuteurs de faire vacciner leur enfant.

La présence de personnel infirmier au sein du programme pour la petite enfance a également contribué à créer une relation de confiance avec la clientèle. Des membres du personnel infirmier assistent aux événements qui ont lieu dans la communauté et expliquent l’importance de la vaccination. Les membres de la communauté ont ainsi la possibilité de faire connaissance avec ces personnes et de développer une relation de confiance, ce qui crée un environnement où ils se sentent plus à l’aise pour faire vacciner leur enfant (Rattlesnake & Morin, 2023).

La popularité des visites à domicile s’est rapidement accrue depuis la mise en place du programme. En 2018, une équipe de quatre employés desservait 28 familles, alors qu’en 2023, 476 familles ont été visitées par 33 membres du personnel (Rattlesnake & Morin, 2023).

Promotion de l’adoption de la vaccination par une approche holistique et culturelle

Le programme pour la petite enfance fait aussi la promotion de l’adoption du vaccin en remédiant aux obstacles personnels et culturels à la vaccination, grâce à une approche culturelle globale axée sur la santé et le bien-être des enfants et des familles maskwacis. L’aspect culturel est intégré à tout le programme – des œuvres d’art autochtones sont installées dans les locaux, le contenu des fiches d’activités et des affiches promotionnelles est adapté sur le plan culturel et on offre un accès simultané à la médecine contemporaine et traditionnelle, notamment à des cérémonies de purification par la fumée, et une prestation de services intégrés (Rattlesnake & Morin, 2023).

Le programme pour la petite enfance offre des services directs aux familles en fonction du lieu où elles se trouvent et de leurs besoins. En plus des visites à domicile, il propose un programme préscolaire de 8 semaines, offert aux enfants dès l’âge de 2 ans pour les aider à faire la transition vers l’école. Le programme propose aussi des rassemblements au cours desquels les participants ont l’occasion de se retrouver, de prendre part à des activités culturelles et d’apprendre les uns des autres; l’importance de la vaccination n’est qu’un des nombreux sujets abordés lors de ces rencontres (Rattlesnake & Morin, 2023). Un service de transport par autobus est utilisé pour rendre les services plus accessibles et faciliter l’organisation des activités. Ces autobus peuvent par exemple être stationnés au milieu d’un village afin d’encourager les parents et les tuteurs à visiter les locaux et à venir y jouer avec leur enfant. Ces

programmes suscitent une bonne participation. Ils permettent une interaction sociale et contribuent à accroître la fierté à l’égard de sa culture, en plus d’offrir une variété de bienfaits sur les plans social et intellectuel, qui font partie intégrante de la promotion de la santé et du bien-être dans les communautés maskwacis (Rattlesnake & Morin, 2013).

Le programme pour la petite enfance offre des services intégrés et de soutien à tous les membres de la famille. Il peut s’agir notamment de services de transport et d’assistance lors de rendez-vous prénataux, de vaccination, d’aide au logement, de soutien au revenu ou d’aide pour l’enregistrement d’une naissance à l’état civil et auprès de la bande. Par ailleurs, le programme comporte un volet axé sur l’éducation de toute la famille – parents ou tuteurs et grandsparents – où on explique pourquoi

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la vaccination est importante, ce qui peut aider à modifier les attitudes, les croyances et les comportements communautaires bien ancrés qui peuvent constituer des obstacles à la vaccination.

L’approche culturelle, globale et axée sur toute la famille du programme pour la petite enfance permet aux parents et aux tuteurs de répondre à leurs besoins en matière de santé et leur apprend à faire confiance au régime de vaccination pour leur enfant. L’augmentation des taux de vaccination dans la communauté n’était pas le but premier de ce programme, mais il a quand même contribué à améliorer l’adoption du vaccin dans les familles desservies par MHS. Dans les familles participant au programme, on a six fois plus de chances d’avoir une vaccination à jour comparativement aux familles qui n’en font pas partie (Rattlesnake & Morin, 2023).

Pratiques exemplaires et prometteuses en matière d’adoption et de confiance à l’égard des vaccins chez les membres de Premières Nations, les Inuits et les Métis

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Campagne Protect our People Manitoba

La campagne Protect our People Manitoba a été lancée à l’échelle locale dans le but de stimuler l’adoption et la confiance à l’égard des vaccins chez les membres des Premières Nations du Manitoba pendant la pandémie de COVID-19 (Government of Manitoba, 2021). Cette campagne a été lancée et menée par un groupe de dirigeants des Premières Nations de la Southern Chiefs’ Organization, de Manitoba Keewatinowi Okimakanak Inc., de l’Assembly of Manitoba Chiefs, de Keewatinohk Inniniw Minoayawin Inc. et du Secrétariat à la santé et au développement social des Premières Nations du Manitoba. Elle a été lancée en partenariat avec le gouvernement du Manitoba, qui a financé le projet. Ensemble, tous les partenaires ont formé l’équipe de coordination de la riposte à la pandémie des Premières Nations du Manitoba. L’équipe avait comme mandat de déployer des groupes de soutien et de gestion des éclosions dans les communautés de Premières Nations en veillant à ce que les aspects culturels soient pris en compte lors du déploiement des vaccins et que les obstacles à son adoption soient éliminés, notamment les mythes entourant le vaccin contre la COVID-19 (Boutsalis, 2021; Monkman, 2021). Le groupe se réunissait chaque semaine pour discuter des messages et des stratégies pour communiquer aux Premières Nations une information exacte sur les vaccins en utilisant un langage approprié sur le plan culturel, afin de les outiller et de les aider à prendre une décision éclairée à ce sujet (C. Redekop, communication personnelle, 11 juin 2024). Vincent Design, une

agence de marketing dirigée par des Autochtones, s’est chargée de l’image de marque et du marketing pour la campagne, laquelle a été déployée en multiples phases au fil de la progression de la pandémie.

La première phase de la campagne

Protect our People Manitoba s’est amorcée au début de 2021, avec des communications coïncidant avec le déploiement du vaccin contre la COVID-19. Cette portion de la campagne était fortement axée sur les Autochtones de 18 à 35 ans et avait principalement recours aux plateformes de médias sociaux (C. Redekop, communication personnelle, 11 juin 2024). Pour ce faire, des partenariats ont été conclus entre des dirigeants crédibles de la communauté et des influenceurs autochtones réputés des médias sociaux qui faisaient part de leurs propres récits et expériences avec la COVID-19 et expliquaient pourquoi le vaccin était important et comment il pouvait protéger les gens et les communautés. Les influenceurs utilisaient aussi des mots-dièses (hashtags) pour renforcer la sensibilisation (Government of Manitoba, 2021). Ces influenceurs étaient notamment :

• Sherry McKay, de la Première Nation Sagkeeng, influenceuse sur TikTok;

• William Prince, de la Première Nation Peguis, et Leonard Sumner, de la Première Nation Little Saskatchewan, musiciens;

• Brandi Woodhouse, entrepreneure, de la Première Nation Pinaymootang;

• Michelle Chubb, influenceuse crie sur TikTok;

• Leonard Sumner, auteur et chanteur anichinabé de la Première Nation

Little Saskatchewan;

• Michael Redhead Champagne, auteur et organisateur communautaire du quartier North End de Winnipeg.

En plus de travailler avec des influenceurs des médias sociaux, la campagne à multiples phases comportait des messages d’intérêt public en anglais et en diverses langues autochtones, diffusés à la radio partout au Manitoba (C. Redekop, communication personnelle, 11 juin).

La Dre Marcia Anderson , responsable de la santé publique de l’équipe de coordination de la riposte à la pandémie des Premières Nations du Manitoba et membre du First Nations Vaccine Implementation Task Force (groupe de travail pour le déploiement du vaccin chez les Premières Nations), a participé activement à la campagne de vaccination (C. Redekop, communication personnelle, 11 juin).

La Dre Anderson a publié dans ses chaînes de médias sociaux des vidéos traitant de la recherche médicale sur les vaccins et répondant aux questions posées par les influenceurs pour faire échec à la désinformation et aux mythes entourant la COVID-19 et les vaccins en vue de renforcer la confiance à l’égard de ceux-ci. La campagne a aussi donné lieu à la préparation et à la distribution de matériel de communication pertinent sur le plan culturel (affiches, documents d’information, etc.) qui a été envoyé aux communautés de Premières Nations dans la province, de vaccins, de couvre-visages et d’autocollants sur la vaccination.

Au fur et à mesure que la pandémie progressait vers les phases subséquentes – les vaccins de rappel – la campagne évoluait afin d’intégrer les dirigeants des communautés et des professionnels de la santé pour qu’ils diffusent des messages sur la vaccination et élargissent la portée de la campagne (C. Redekop, communication personnelle, 11 juin 2024). Melanie MacKinnon, infirmière crie de la Première Nation crie Misipawistik, directrice générale d’Ongomiizwin Health Services et directrice de l’Indigenous Institute of Health and Healing de la faculté des sciences de la santé Rady de l’Université du Manitoba, a été une porte-parole de premier plan au cours de cette partie de la campagne (University of Manitoba, 2021). Melanie MacKinnon a codirigé l’équipe de coordination de la riposte à la pandémie des Premières Nations du Manitoba qui, à ce stade, s’employait à surmonter les obstacles de juridictions afin d’offrir une réponse rapide à la pandémie dans les communautés de Premières Nations. Mme MacKinnon a aussi contribué à un déploiement accéléré des vaccins et à la mise en priorité des populations des Premières Nations. Des aînés et des acteurs importants de la communauté étaient aussi parmi les porte-parole.

L’objectif de la campagne a également été élargi pour couvrir d’autres contextes de vaccination. On a notamment créé des pièces de communication sur les doses de rappel du vaccin contre la COVID-19 et des documents ciblant d’autres populations autochtones, notamment les agences autochtones en milieu urbain qui avaient offert des programmes d’approche et avaient organisé des cliniques de dépistage

et de vaccination à l’intention de groupes inuits et métis (C. Redekop, communication personnelle, 11 juin 2024). À ce stade, le groupe consultatif d’intervenants dans la campagne a aussi été élargi afin d’inclure des représentants de la Manitoba Inuit Association et de la Manitoba Métis Federation. L’objectif élargi a aussi donné lieu à l’élaboration de pièces de communication portant sur les autres vaccins, tels que le vaccin contre la grippe, et sur les enjeux de santé mentale découlant de la pandémie. Dans le cadre de cet objectif élargi, l’agence Vincent Design s’est adressée à des dirigeants autochtones afin de vérifier si les ressources en question faisaient appel à une iconographie adéquate sur le plan culturel en provenance de ces groupes. À la fin de la campagne, pratiquement toutes les cliniques autochtones en milieu urbain ou en région rurale et presque toutes les communautés rurales et éloignées de Premières Nations y avaient participé et avaient reçu du matériel lié à la campagne qu’ils avaient affiché dans leur clinique ou dans leur communauté.

Dans l’ensemble, la campagne de vaccination déployée par l’équipe de coordination de la riposte à la pandémie des Premières Nations du Manitoba a contribué à un fort taux de vaccination contre la COVID-19 au sein des populations de Premières Nations, particulièrement celles des réserves. Au 30 octobre 2021, 81,7 % des membres des Premières Nations vivant sur une réserve

étaient entièrement vaccinés 4 et 11,4 % l’étaient partiellement 5; chez les membres de Premières Nations vivant hors des réserves, 63,3 % étaient entièrement vaccinés, alors que 6,2 % l’étaient partiellement (Anderson, 2024). La proportion de membres des Premières Nations vivant hors des réserves et étant pleinement vaccinés (63,3 %) était comparable à la moyenne nationale pour le Canada, laquelle était considérée, à l’époque, comme étant parmi les plus élevées dans le monde (Boyd, 2021). Des messages culturellement appropriés sur la santé, notamment sur l’importance de la communauté et de la culture, et le recours aux médias sociaux et à des influenceurs issus des communautés sont considérés comme des facteurs clés de la réussite de la campagne (C. Redekop, communication personnelle, 11 juin 2024). En fait, l’un des principaux collaborateurs de la campagne a relevé qu’à son lancement, celle-ci avait d’abord adopté une orientation différente pour ces objectifs. Lorsque l’équipe de coordination de la riposte à la pandémie a reçu des commentaires confirmant l’importance de la communauté et de la culture pour les jeunes des Premières Nations, les objectifs de la campagne ont évolué afin qu’elle soit axée davantage sur ces deux aspects et puisse toucher un auditoire plus large et plus jeune. Ce virage, mentionne Chris Redekop, a donné les résultats escomptés (communication personnelle, 11 juin 2024).

4 Avaient reçu deux doses du vaccin contre la COVID-19.

5 Avaient reçu une dose du vaccin contre la COVID-19.

Opération Immunité dans les collectivités éloignées

Élaboré conjointement par le ministère de la Santé de l’Ontario, la nation Nishnawbe Aski (NAN) et le service d’ambulance aérienne Ornge, l’opération Immunité dans les collectivités éloignées a été lancée au début de 2021 pour l’administration des vaccins contre la COVID-19 dans 32 communautés éloignées de Premières Nations (accessibles uniquement par avion) du nord de l’Ontario (Boyd, 2021; Mikhail et al., 2023). L’infrastructure de santé de ces communautés était insuffisante pour qu’elles puissent mener leur propre campagne de vaccination. Pour joindre ces 32 communautés éloignées, une « opération minutieusement planifiée » [traduction] et une « approche sensible à la culture et propre au contexte pour la prestation de soins de santé tenant compte de la diversité des cultures et des croyances ainsi que des défis particuliers, notamment en ce qui a trait aux injustices sociales dans le système médical » [traduction] ont été mises de l’avant (Burton et al., 2023, p. 5).

Au début de la pandémie, le gouvernement de l’Ontario a formé un Groupe d’étude ministériel sur la distribution du vaccin contre la COVID-19, avec représentation autochtone, afin d’offrir et de diriger le travail d’immunisation à l’échelle de la province (Burton et al., 2023). Le groupe d’étude a entrepris des discussions avec les dirigeants

autochtones sur les obstacles aux soins de santé dans les collectivités éloignées, la mise en priorité des communautés autochtones lors du déploiement des vaccins et les ressources nécessaires pour mener à bien une telle campagne. Lorsqu’une éclosion de COVID-19 est survenue dans le nord du Manitoba, une opération d’immunisation a été amorcée, ce qui a ouvert la voie à l’élaboration d’un plan pour une « campagne de vaccination adaptée aux besoins et aux défis des communautés des Premières Nations du nord de l’Ontario » [traduction]. (Burton et al., 2023, p. 6).

locaux de soins infirmiers (Ornge, 2021; Turner, 2021). Le groupe d’étude ministériel a obtenu un large soutien politique au sein du gouvernement de l’Ontario et des communautés locales, alors que le ministère de la Santé de la province a cédé un pouvoir de décision considérable à d’autres ministères, ainsi qu’aux communautés autochtones du Nord et à leurs dirigeants politiques (Burton et al., 2023). Ces efforts ont contribué à « une compréhension commune des besoins et des priorités des communautés autochtones » [traduction] relativement à la campagne de vaccination (Burton et al., 2023, p. 6). Le réseau de soins de santé Weeneebayko Area Health Authority (WAHA), les bureaux de santé publique du Nord, l’École de médecine du nord de l’Ontario (EMNO), Services aux Autochtones Canada (SAC), les Rangers canadiens et les Forces armées canadiennes ont aussi collaboré à l’opération (Burton et al., 2023; ISC, 2022).

Le gouvernement de l’Ontario et les dirigeants autochtones ont établi comme cible, pour la fin avril 2021, que deux doses de vaccin contre la COVID-19 aient été administrées dans les communautés autochtones éloignées (Burton et al., 2023). Au départ, Ornge a assuré la direction opérationnelle et logistique de l’opération Immunité dans les collectivités éloignées, en raison de son expertise confirmée pour relier les communautés éloignées au système de santé provincial et de sa vaste expérience de travail auprès des communautés autochtones du Nord (Burton et al., 2023). D’autres organismes se sont joints à l’opération pour codiriger la campagne de vaccination à divers stades, notamment la WAHA et SAC. La logistique était coordonnée avec les communautés autochtones avant chaque mission de vaccination afin que les commentaires reçus à l’échelle locale soient pris en compte et mis en pratique. Les équipes de vaccination ont administré

L’opération Immunité dans les collectivités éloignées était codirigée par des Autochtones et a été menée en collaboration. La NAN a rédigé une proposition résumant les ressources et les soustraitants non gouvernementaux nécessaires pour mener cette initiative. La NAN avait aussi élaboré 12 principes directeurs visant à encadrer l’opération pour en assurer le succès. Ces principes consistaient, entre autres, à veiller à ce que les membres des équipes de vaccination soient pleinement vaccinés; que l’opération soit déployée selon une approche graduelle, par région; que les membres des équipes suivent une formation en sensibilité culturelle; qu’un service de traduction et des traducteurs soient disponibles aux cliniques de vaccination; que le service ambulancier Ornge prenne en charge la planification de la logistique; que des sites supplémentaires soient prévus pour l’administration des vaccins afin de ne pas surcharger les postes 9

Pratiques exemplaires et prometteuses en matière d’adoption et de confiance à l’égard des vaccins chez les membres de Premières Nations, les Inuits et les Métis

des vaccins dans des cliniques de vaccination temporaires installées dans des sites communautaires prédéterminés et ont aussi vacciné à domicile des personnes qui n’étaient pas en mesure de se rendre à la clinique. Ces équipes ont également tenu des registres de vaccination afin d’assurer le suivi des effets indésirables, de confirmer le statut vaccinal et d’assurer le suivi des clients pour les doses de rappel (Burton et al., 2023). Des étudiants de l’EMNO ont été déployés en rotation sur une ou deux semaines dans le cadre de leur stage d’apprentissage pour aider à administrer les vaccins. Ils étaient accompagnés de membres du corps enseignant (Mikhail et al., 2023).

L’opération Immunité dans les collectivités éloignées prévoyait trois rondes de missions (Burton et al., 2023). De février à avril 2021, la première mission (opération Immunité dans les collectivités éloignées 1.0), dirigée par Ornge, a permis d’administrer 25 000 doses du vaccin Moderna aux adultes des Premières Nations admissibles. La deuxième mission (opération 2.0), lancée en mai 2021, était dirigée par la WAHA pour le nord-est de l’Ontario et par Ornge pour la région nord-ouest. Cette mission a permis d’administrer 6 000 doses du vaccin Pfizer-BioNTech à des jeunes de 12 à 17 ans. L’opération 3.0 a été lancée en novembre 2021 et a pris fin au début de 2022. Pour ce volet, on a fait appel à un partenariat entre SAC, la WAHA et la Sioux Lookout First Nations Health Authority, avec l’aide des Forces armées canadiennes et des Rangers. Environ 9 700 doses de vaccin contre la COVID-19 ont été administrées lors de cette mission, notamment les premières, deuxièmes et troisièmes doses et des

doses pédiatriques (Burton et al., 2023). À sa conclusion, l’opération Immunité dans les collectivités éloignées s’est recentrée sur l’offre d’un soutien plus souple offert aux communautés de Premières Nations, selon les besoins et à la demande des dirigeants de ces communautés, notamment de l’aide à la mise sur pied de cliniques communautaires de vaccination, pour le dépistage et pour la gestion des cas et des contacts (ISC, 2022).

L’opération Immunité dans les collectivités éloignées a dû faire face à des défis considérables en raison de la logistique qu’elle supposait (Burton et al., 2023). Dans le but de mettre un terme aux perceptions voulant qu’Ornge manque d’expertise pour assurer des services de vaccination, l’entreprise a réagi en faisant preuve d’une remarquable capacité d’adaptation. Ornge a recruté du personnel paramédical d’urgence des équipes des services médicaux d’urgence (ESMU) de l’Ontario et a mis en place le cadre du Système de gestion des incidents (SGI) – un modèle opérationnel utilisé par les militaires, doté d’une structure de commentaires clairs, de rôles et responsabilités bien définis et de procédures de reddition de compte verticales et horizontales (Burton et al., 2023). Le cadre du SGI a été essentiel pour assurer le déploiement rapide des ressources humaines, une coordination efficace de la logistique et une mobilisation importante dans les communautés locales, tout en aidant à l’autonomie et à la souplesse sur le terrain afin de faire face à l’imprévisibilité propre à la pandémie.

L’opération a aussi dû surmonter les effets permanents du colonialisme et du racisme anti-autochtone omniprésent dans le système de santé. Ces effets contribuent à la prestation de soins de santé non adaptés culturellement et à la méfiance des populations autochtones à l’égard des services de santé conventionnels, qui sont autant d’obstacles importants à l’adoption du vaccin au sein de cette population (Crooks et al., 2023). De nombreux membres du personnel et bénévoles engagés dans la campagne de l’opération Immunité dans les collectivités éloignées ne provenaient pas de communautés de Premières Nations du Nord, et avaient donc une connaissance contextuelle limitée de la géographie, des cultures et des conditions de vie des Premières Nations dans ces communautés éloignées (Burton et al., 2023). Une formation obligatoire en sécurisation culturelle a donc été mise en place afin d’atténuer tout effet négatif sur l’adoption du vaccin provoqué par des stéréotypes, du racisme ou de la discrimination. Tous les membres de l’équipe, y compris les étudiants, devaient suivre la formation en sécurisation culturelle de la fonction publique de l’Ontario offerte par le programme de formation à la sécurité culturelle autochtone San’yas (Burton et al., 2023; Mikhail et al., 2023).

Bien que des incidents liés au racisme se soient encore produits tout au long de la mise en œuvre de l’opération Immunité dans les collectivités éloignées, la formation en sécurisation culturelle autochtone a été considérée comme un effort concret visant à « protéger les destinataires du vaccin contre les stéréotypes destructeurs, à atténuer le racisme ordinaire et à agir sur la violence historique exercée par

les professionnels de la santé non autochtones sur les communautés autochtones pendant de nombreuses générations » [traduction] (Burton et al., 2023, p. 14). Les dirigeants du groupe d’étude et les administrateurs du vaccin ont pris le temps d’écouter les membres de la communauté qui hésitaient à se faire vacciner et de répondre à leurs questions. Ces gestes ont contribué à une compréhension mutuelle et à la création d’une relation de confiance entre les individus, et ce, peu importe que la personne ait décidé ou non de se faire vacciner.

Le rôle central joué par les dirigeants autochtones dans l’opération Immunité dans les collectivités éloignées a aussi contribué à favoriser des relations et à bâtir la confiance (Burton et al., 2023, p. 14). Les dirigeants autochtones ont été intégrés très tôt au Groupe d’étude ministériel sur la distribution du vaccin et ont participé à la prise de décision à l’échelle provinciale, notamment à la décision de faire une priorité du déploiement du vaccin dans les communautés autochtones éloignées (Burton et al., 2023). En tant que responsable de la logistique, Ornge a, dès le début, mis en priorité les 12 principes directeurs de la NAN pour veiller à ce que les dirigeants communautaires soient acteurs clés et décideurs lors du processus de planification. L’entreprise a obtenu un consentement au nom de la communauté dès le début de l’opération, dont les équipes ont travaillé en partenariat avec les communautés durant toute

la campagne de vaccination. L’opération Immunité dans les collectivités éloignées a demandé aux communautés de diriger conjointement les efforts de vaccination et a veillé à ce qu’elles prennent part aux opérations de logistique. Ornge a aussi travaillé en étroite collaboration avec les dirigeants et les chefs autochtones pour encourager les membres de la communauté à se faire vacciner (Burton et al., 2023). Pour encourager la vaccination, des dirigeants influents de communautés des Premières Nations ont été mobilisés pour livrer des messages d’intérêt public et prendre part à des initiatives d’information sur le vaccin contre la COVID-19, accroître la sensibilisation aux vaccins à l’échelle communautaire, lutter contre la désinformation et aider à remédier aux inquiétudes et aux craintes des membres des communautés à l’égard du vaccin (Mikhail et al., 2023). Ces campagnes d’information ont été menées dans les langues autochtones locales et ont eu lieu par le biais de visites à domicile, dans les plateformes de médias sociaux et à la radio communautaire. On a aussi attribué des rôles clés aux dirigeants autochtones – ils ont été entre autres directeurs du site de vaccination autochtone local, chauffeurs, soutien pour les Rangers ou traducteurs (Burton et al., 2023). On a aussi veillé à maintenir des communications régulières avec les dirigeants et les chefs des Premières Nations et à

respecter leurs points de vue durant toute la campagne (Burton et al., 2023). Ces mesures ont contribué à favoriser les relations et à créer des liens de confiance avec les membres des communautés de Premières Nations durant toute l’opération.

L’opération Immunité dans les collectivités éloignées, avec plus de 800 missions déployées durant les trois phases 6 de la pandémie, est considérée comme un grand succès par les parties qui y ont pris part (Burton et al., 2023; ISC, 2022). Services aux Autochtones Canada (2022) a établi trois grands facteurs ayant contribué au succès de l’opération : des ressources et un personnel dédiés à l’échelle communautaire pour aider à la coordination clinique et soutenir la promotion de la santé; une collaboration entre tous les paliers de gouvernement; une communication interorganisationnelle efficace. Une évaluation complète de l’opération a permis de cerner d’autres facteurs jugés essentiels au succès de l’opération (Burton et al., 2023). Ces autres facteurs sont : les conseils des dirigeants autochtones dans la conception initiale, la planification et l’exécution de l’opération Immunité dans les collectivités éloignées; le leadership opérationnel et logistique efficace d’Ornge, pour veiller à ce que la logistique soit adaptée aux contextes locaux particuliers; les mesures essentielles pour créer la confiance, mises en place par les codirigeants (Burton et al., 2023).

6 Ces phases correspondent à l’expansion des principales populations visées par la vaccination au fur et à mesure que plus de doses de vaccins devenaient disponibles. La phase 1 ciblait les travailleurs de la santé et les populations à risque élevé, y compris les adultes des Premières Nations, inuits ou métis. La phase 2 avait une portée plus large et incluait les populations autochtones vivant en milieu urbain, alors que la phase 3 ouvrait la vaccination à tous les Ontariens admissibles (Government of Ontario, 2022).

Pratiques exemplaires et prometteuses en matière d’adoption et de confiance à l’égard des vaccins chez les membres de Premières Nations, les Inuits et les Métis

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Modèle de vaccination contre la COVID-19 de la nation métisse de l’Alberta

Le gouvernement métis

Opitemisiwak de la Métis Nation of Alberta (MNA; Nation métisse de l’Alberta) est un gouvernement autochtone qui porte la voix des citoyens métis vivant en Alberta. Au début de la pandémie, la MNA s’est efforcée de répondre aux besoins de ses citoyens en offrant un soutien financier et une aide au bien-être, en leur donnant accès à du matériel de protection et en leur transmettant régulièrement des messages concernant les ordonnances de la santé publique (King et al., 2022). Lorsque la vaccination a commencé, la MNA a aussi organisé des forums sur Zoom au cours desquels des membres de la communauté pouvaient s’entretenir avec des experts et poser des questions sur les vaccins. Ces forums ont d’ailleurs été un outil efficace pour améliorer la confiance à l’égard des vaccins (K. King & R. Bartel, communication personnelle, 2 juillet 2024).

La MNA a créé des infographies et gardé à jour de l’information sur la pandémie sur son site Web et a en outre partagé, de manière appropriée culturellement, de l’information provenant de sources fiables (K. King & R. Bartel, communication personnelle, 2 juillet 2024). La MNA a réalisé un sondage visant à déterminer ce que savaient les citoyens métis sur les vaccins et où ils souhaitaient les obtenir, ce qui a permis à l’organisme d’adapter

les programmes d’information et de vaccination aux besoins de ses citoyens.

De plus, la MNA a mené des campagnes d’information auprès des populations qui n’atteignaient pas les objectifs de taux de vaccination, par exemple les jeunes et les populations de 18 à 37 ans. La campagne la plus réussie de MNA a été la création de la vidéo COVID-19 : The Rise of AuntieVirus (COVID-19 : la Montée du virus), mettant en vedette Auntie (littéralement « ma tante ») – une seringue géante qui lutte contre la COVID-19 (K. King & R. Bartel, communication personnelle, 2 juillet 2024). La vidéo commence comme un film de la série Star Wars, avec le titre – The rise of Auntie-Virus – et le message The fight against COVID-19 continues (le combat contre la COVID-19 continue). Le générique défilant vers le haut à l’écran explique ensuite (en anglais) que la nation métisse de l’Alberta renforce sa défense avec « tante Virus » en tête du combat. Son arme secrète? La première clinique de vaccination contre la COVID-19 dirigée par les Métis (MNA, 2021). La vidéo se poursuit avec tante Virus (la protagoniste) qui traque le virus de la COVID-19 (l’antagoniste) qui court et cherche à se cacher, et se termine par un combat « épique » entre les deux personnages principaux, d’où tante Virus sort victorieuse 7, et avec un message disant de prendre rendez-vous sans tarder pour se faire vacciner.

7 On peut avoir la vidéo à https://www.facebook.com/ABMetis/videos/therise-of-auntie-virusweve-stepped-up-the-covid-19-defence-with-auntievirus-l/447589556467353 (AN).

à Edmonton, avec plus ou moins de succès (K. King & R. Bartel, communication personnelle, 2 juillet 2024). La plupart des cliniques n’ont offert que la première dose du vaccin, en raison, notamment, des retards dans l’obtention des autorisations pour l’ouverture des autres cliniques, ce qui a fait en sorte que de nombreux Métis se sont fait vacciner ailleurs. Puisque la première clinique dirigée par des Métis, à Edmonton, est celle qui a connu le plus de succès parmi toutes celles dirigées par des Métis en Alberta, cette étude de cas portera sur cette clinique en particulier.

De la publicité sur la clinique dirigée par des Métis était diffusée au moins une semaine à l’avance et ciblait principalement les citoyens métis de la province (K. King & R. Bartel, communication personnelle, 2 juillet 2024). La clinique a duré quatre jours et a mis en priorité la vaccination des citoyens métis considérés comme à risque élevé, en fonction d’évaluations cliniques.

Avant le début de chaque journée de la clinique, une réunion d’équipe était organisée pour expliquer à tout nouveau membre du personnel de santé pourquoi la clinique est importante, comment la colonisation et les traumatismes associés à la

méfiance ont mené à la création d’espaces sécuritaires et comment les membres de l’équipe peuvent pratiquer la sécurité culturelle. Cette réunion d’équipe aidait à créer un sentiment d’appartenance entre les fournisseurs de soins autochtones et non autochtones (K. King & R. Bartel, communication personnelle, 2 juillet 2024).

Lorsque les clients se présentaient à la clinique, la MNA assurait la gestion de tous les aspects touchant l’information, la vérification du statut de Métis et la communication avec les clients de l’admissibilité à la vaccination. Le personnel d’AHS examinait les renseignements relatifs à l’assurance maladie provinciale afin que la vaccination soit inscrite dans les registres provinciaux et à titre de vérification finale de l’admissibilité aux soins de la personne concernée. Du personnel infirmier et des médecins métis et des Premières Nations étaient sur les lieux pour répondre aux questions des clients et désamorcer toute crainte et toute appréhension relatives au vaccin contre la COVID-19 et inspirer la confiance à l’égard des vaccins. Environ 70 % des clients ayant visité la clinique étaient Métis, et la plupart des autres étaient membres des Premières Nations (K. King & R. Bartel, communication personnelle, 2 juillet 2024).

La MNA a également mis sur pied des projets pour la gestion de ses propres cliniques de vaccination au cours de la phase 2 du plan de déploiement de la province pour la vaccination contre la COVID-19, amorcée le 15 mars 2021, et a élargi ses efforts de vaccination afin d’inclure les groupes d’âge plus jeunes des populations de Premières Nations, inuites et métisses, et des Autochtones en milieu urbain de partout dans la province (King et al., 2022). Pour ce faire, la MNA devait d’abord obtenir l’approbation de la division de la santé publique et de la conformité du ministère de la Santé de l’Alberta et prendre des dispositions avec Alberta Health Services (AHS; Services de santé de l’Alberta) afin que du personnel d’AHS soit sur les lieux pour administrer les vaccins, particulièrement du personnel métis ou des Premières Nations. Une fois l’approbation obtenue et le personnel confirmé, le département de la santé de la MNA, en partenariat avec le ministère de la Santé de l’Alberta et AHS, a mis en place la première clinique de vaccination au Canada conçue et administrée par des Métis, dans des locaux à Edmonton (King et al., 2022). Des cliniques de vaccination contre la COVID-19 dirigées par les Métis ont aussi vu le jour à Lac La Biche, Fort MacMurray et Calgary, de même qu’une deuxième clinique 13 Pratiques exemplaires et prometteuses en matière d’adoption et de confiance à l’égard des vaccins chez les membres de Premières Nations, les Inuits et les Métis

La clinique de vaccination contre la COVID-19 dirigée par des Métis était unique parmi les cliniques dirigées par AHS, du fait qu’elle était installée dans des locaux où, auparavant, les Métis tenaient des événements et des célébrations. Le choix de cet emplacement a permis d’intégrer la sécurité culturelle aux pratiques de la clinique (King et al., 2022). La sécurité culturelle était aussi favorisée dans la clinique à l’aide des mesures suivantes :

• veiller à ce que les clients métis aient accès à des professionnels de la santé autochtones, y compris à du personnel infirmier autorisé et à des médecins métis ou des Premières Nations;

• créer une « expérience de prise de rendez-vous par téléphone ou en ligne à l’échelle locale qui respectera la souveraineté des données sur les Métis et honorera le vécu des Métis » [traduction];

• accueillir les gens venus se faire vacciner comme s’ils venaient à un rassemblement au lieu d’un rendez-vous médical;

• mettre la MNA à contribution pour confirmer les rendez-vous, vérifier l’admissibilité et remplir de questionnaire de dépistage de la COVID-19;

• confier au personnel de la MNA la responsabilité des mesures de santé publique au lieu de laisser le personnel d’AHS ou du personnel de sécurité s’en charger, notamment la distribution de couvrevisages et la surveillance du respect des mesures de santé publique;

• offrir des services d’inscription et de vaccination libres d’obstacles, y compris pour les membres de la même famille qui ne sont pas Métis;

• utiliser les intervenants pivots de la MNA pour guider les gens lors de la transition d’une zone de la clinique vers une autre;

• inviter des dirigeants influents de la communauté métisse à démontrer leur engagement dans la démarche en se faisant vacciner devant le public et en manifestant leur appui au travail de sensibilisation visant à promouvoir la vaccination dans la communauté;

• dans l’espace d’attente suivant la vaccination, faire jouer de la musique métisse de violoneux et présenter un diaporama montrant les faits saillants d’événements communautaires tenus auparavant;

• offrir en cadeau des aliments traditionnels très appréciés de la clientèle (bannique et confitures) lorsque les participants quittent la clinique (King et al., 2022).

Avec des fournisseurs de soins dignes de confiance sur place, les membres de la communauté métisse ont eu la possibilité de poser des questions liées au vaccin ou à leur santé personnelle. De plus, la diffusion de musique et d’une présentation visuelle en lien avec leur culture a contribué à rendre la clientèle plus à l’aise (King et al., 2022). Les difficultés et les conflits qui survenaient à la clinique pouvaient être résolus de manière conviviale par des représentants de la MNA au lieu de faire appel à du personnel de sécurité (K. King & R. Bartel, communication personnelle, 2 juillet 2024). Ensemble, ces mesures ont aidé à instaurer un climat de confiance entre les membres de la communauté et les professionnels de la santé et à accroître du même coup la confiance à l’égard du vaccin. Au cours des quatre jours où la clinique était ouverte, 1 301 personnes ont pu être vaccinées contre la COVID-19 (King et al., 2022).

Bien qu’aucune rétroaction officielle n’ait été obtenue, les organisateurs de l’événement ont fait savoir que la couverture vaccinale en Alberta pour la première dose du vaccin contre la COVID-19 était d’environ 86 % chez les populations métisses, ce qui est supérieur à la moyenne provinciale, alors que pour la deuxième dose, la couverture était à peu près la même que la moyenne provinciale. Les taux pour l’obtention de la troisième et de la quatrième dose ont toutefois diminué (R. Bartel, communication personnelle, 2 juillet 2024). À l’époque, il est devenu plus difficile d’administrer les autres doses, puisque la vaccination avait été confiée aux pharmacies et l’aide gouvernementale pour les cliniques dirigées par des Métis a chuté.

Néanmoins, les commentaires publiés dans les médias sociaux et les vidéos de la MNA indiquent que la clientèle était extrêmement satisfaite des cliniques dirigées par des Métis (King et al., 2022).

La clinique peut être considérée comme un succès selon les valeurs fondamentales du cadre d’évaluation autochtone de LaFrance et Nichols (2008), qui orientent les méthodes d’évaluation autochtones : « être les habitants d’un lieu », « reconnaître nos dons », « honorer la famille et la communauté » et « respecter la souveraineté » (cité dans King et al., 2022, p. 85).

La première valeur a été respectée grâce au choix de l’emplacement de la clinique de la MNA, car ce lieu servait à accueillir des célébrations métisses et était situé sur le territoire traditionnel des Métis, à proximité des bureaux du gouvernement de la MNA.

La deuxième valeur – « reconnaître nos dons » – était aussi respectée lors de l’aménagement de la clinique en misant sur les relations de parenté traditionnelles avec des bénévoles et des membres de la communauté pour l’organisation et la prestation des services et en mettant à contribution les participants grâce à la nourriture et à la musique traditionnelles et au soutien offert. La troisième valeur – « honorer la famille et la communauté » – a été respectée en offrant l’inscription et la vaccination libres d’obstacles, y compris pour les membres non métis des familles et pour les proches aidants. La clinique a aussi permis aux dirigeants des communautés métisses de démontrer leur engagement à se faire vacciner. Enfin, la quatrième valeur « respecter la souveraineté », s’est concrétisée en confiant la direction, l’organisation et la prestation des services de vaccination à la MNA, avec un soutien en ressources offert par l’AHS, et des ententes de partage des données avec le ministère de la Santé de l’Alberta.

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La clinique de la MNA dirigée par les Métis peut aussi être considérée comme une réussite en vertu de plusieurs autres paramètres. Au cours de cette période où tant de gens se sentaient incroyablement isolés, la clinique a eu pour effet, sans le vouloir, de créer une véritable communauté (R. Bartel, communication personnelle, 2 juillet 2024). La clinique a aussi eu un effet inattendu sur le personnel non autochtone qui a aidé à l’administration des vaccins. Le sentiment de faire partie d’une communauté, créé chez le personnel non autochtone exposé à la culture métisse à la clinique et lors des réunions d’équipe a favorisé le développement d’un fort sentiment d’appartenance (K. King & R. Bartel, communication personnelle, 2 juillet 2024). Une telle exposition confirme la valeur de l’apprentissage par l’expérience pour la promotion de l’humilité culturelle chez les fournisseurs de soins de santé, laquelle est une stratégie essentielle pour la promotion de la sécurité culturelle (Cahn & Smoller, 2020; Mattingly, 2022).

Les organisateurs de la clinique ont cependant aussi dit avoir fait face à un important problème à la clinique, lequel pourrait influencer le succès de futurs efforts de vaccination en cas de pandémie. Bien que le gouvernement provincial ait versé une aide financière pour la clinique dirigée par les Métis, il n’avait pas tenu compte de la capacité limitée de la MNA à assurer le fonctionnement de ses propres cliniques de vaccination. La MNA n’avait aucun employé assigné ni aucune ressource pour répondre rapidement à une urgence de santé publique comme celle de la COVID-19. Par conséquent, les membres du personnel actuel de la MNA existante a dû organiser la clinique et offrir la composante d’éducation à la vaccination de la campagne à partir du « coin de la table ». Les organisateurs de la clinique ont donc fait appel aux gouvernements provincial et fédéral en vue d’obtenir un financement continu et récurrent afin d’assurer la permanence de leurs équipes de gestion des urgences et de promotion de la santé. Un tel investissement est nécessaire pour que la MNA dispose de la capacité nécessaire pour répondre rapidement et efficacement à tout événement pandémique futur (R. Bartel, communication personnelle, 2 juillet 2024).

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Défis et réussites liés à la vaccination au Nunavik

La Régie régionale de la santé et des services sociaux du Nunavik (RRSSSN) offre des services sociaux et de santé à 14 communautés inuites situées dans une vaste région très peu peuplée (comptant environ 14 000 résidents) dans la région arctique du Québec. Cette région est bordée à l’ouest par la baie d’Hudson au nord par le détroit d’Hudson et à l’est par la baie d’Ungava et le Labrador (NRBHSS, 2024a). L’adoption du vaccin et la confiance à l’égard de la vaccination ont été définies comme des obstacles à l’immunisation dans cette région. Bien que la vaccination de routine pour les enfants était une pratique généralement bien perçue et acceptée dans les communautés du Nunavik avant la pandémie de COVID-19, les autres vaccins n’ont pas été aussi bien accueillis (Dubé et al., 2023). Ainsi, au Nunavik, l’adoption du vaccin contre le pneumocoque pour les enfants nés entre 1994 et 2005 était conforme à la moyenne provinciale (Cléophat et al., 2014). De même, les évaluations de la santé publique du Nunavik font état de taux très élevés de couverture vaccinale complète chez les enfants à 24 mois pour les cohortes nées en 1996-1997 et en 2010-2011, avec 91,6 % et 87,9 %, respectivement (C. Burdet, communication personnelle, 9 août 2024). La pandémie a toutefois contribué à un déclin documenté dans la couverture vaccinale de routine des jeunes enfants du Nunavik. En février 2024, seuls 52,9 % des enfants de 24 mois

étaient jugés adéquatement protégés contre la rougeole, ce qui est bien en deçà de l’objectif d’une couverture vaccinale de 95 % pour atteindre l’immunité collective (NRBHSS, 2024b). Un déclin similaire a été documenté dans l’évaluation de 2022 de la santé publique du Nunavik et de l’INSPQ relativement à tous les vaccins infantiles pour les enfants du Nunavut âgés de 24 mois, avec une vaccination complète chez seulement 56 % des enfants (C. Burdet, communication personnelle, 9 août 2024).

En ce qui concerne la COVID-19, la faible acceptation et le peu d’adoption du vaccin s’est traduit par un taux de vaccination contre la COVID-19 beaucoup plus bas que la moyenne pour le Québec chez les résidents du Nunavik. Malgré la mise en priorité de la population du Nunavik pour la vaccination contre la COVID-19, en janvier 2022, seuls 55 % des résidents du Nunavik admissibles avaient reçu deux doses du vaccin contre la COVID-19 comparativement à 80 % des résidents du Québec (Nunatsiaq News, 2022).

17 Pratiques exemplaires et prometteuses en matière d’adoption et de confiance à l’égard des vaccins chez les membres de Premières Nations, les Inuits et les Métis

Plusieurs études ont établi les obstacles à l’adoption et à la confiance à l’égard des vaccins chez les résidents du Nunavik. Dubé et ses collaborateurs (2023) ont constaté une plus grande réticence à la vaccination chez les jeunes de cette région. Et ont aussi observé des obstacles liés à la communication, notamment un manque d’information adéquate sur les vaccins – leur fonctionnement et leur innocuité, et les méthodes de communication inappropriées sur le plan culturel, de la désinformation sur les vaccins dans les communautés et dans les médias sociaux, et des barrières linguistiques. Des obstacles organisationnels et systémiques ont aussi été constatés, notamment le recours à un calendrier de vaccination infantile légèrement différent de celui du reste du Québec 8, les difficultés de gestion des stocks de vaccins et d’inscription des vaccins en raison de problèmes de connectivité à Internet, surtout dans les secteurs plus éloignés; la difficulté à joindre les populations des communautés isolées; la

méfiance à l’égard des prestataires de soins de santé traditionnels et les enjeux de rétention du personnel; des expériences de vaccination antérieures négatives et la peur des aiguilles; les normes sociales et l’influence des autres (C. Burdet, communication personnelle, 9 août 2024; Dubé et al., 2023).

La Direction de la santé publique du Nunavik s’est efforcée de mieux comprendre et d’adopter des mesures visant à assurer le succès des campagnes de vaccination chez les résidents du Nunavik. Pour ce faire, des initiatives communautaires ont été intensifiées pour remédier aux difficultés liées à l’adoption du vaccin contre la COVID-19 chez les Nunavimmiut 9 (C. Burdet, communication personnelle, 26 juillet 2024). À l’été et à l’automne 2021, la RRSSSN s’est associée à la CroixRouge pour mener des campagnes de sensibilisation de porte à porte dans les communautés du Nunavik. Pendant toute l’année 2021, les émissions de radio FM se sont déroulées en inuktitut, ce

qui a permis aux résidents locaux de faire part de leurs inquiétudes et de poser des questions sur les vaccins. Les organisateurs de l’équipe de vaccination contre les maladies évitables de la santé publique ont mentionné que ces émissions deviennent parfois très intenses et peuvent durer de 3 à 4 heures. L’immunisation et les mesures liées à la pandémie ont été au centre des débats entre les membres de la communauté (C. Burdet, communication personnelle, 26 juillet 2024). Ces émissions de radio étaient animée par des membres respectés de la communauté et par des fournisseurs de soins, notamment une infirmière retraitée parlant l’inuktitut, une membre influente de la communauté de Puvirnituq, reconnue pour sa capacité à expliquer des notions de santé complexes telles que l’immunité collective ou les vaccins à ARNm en inuktitut, la langue locale, et par des conseillers en immunisation de la santé publique, capable d’aborder les aspects techniques et médicaux de la vaccination et de la COVID-19.

8 Le calendrier de vaccination au Nunavik comprend le vaccin BCG (vaccin contre le bacille de Calmette-Guérin) utilisé contre la tuberculose miliaire, et une dose supplémentaire du vaccin contre le pneumocoque à 6 mois (C. Burdet, communication personnelle, 9 août 2024).

9 Le terme Nunavimmiut (en français, Nunavikois) désigne les habitants du Nunavik en inuktitut.

Dans certaines communautés, les émissions de radio coïncidaient avec l’arrivée, par avion, des équipes de vaccination et de la Croix-Rouge venues appuyer les efforts de vaccination dans la communauté. D’autres membres influents de la communauté tels que le maire, le directeur général de la ville, des membres du personnel infirmier et d’autres figures importantes à l’échelle locale se joignaient de temps à autre à titre d’« animateurs » des émissions ou y participaient par téléphone. Bien qu’aucune évaluation ne puisse confirmer si cette initiative était une réussite, les émissions de radio ont permis d’ouvrir le dialogue dans toute la communauté durant une période marquée par la distanciation physique, les « bulles » sociales et les passeports vaccinaux.

La Direction de la santé publique du Nunavik a aussi mis en place des initiatives et conclu des partenariats pour promouvoir la vaccination infantile auprès des Nunavimmiut en réponse au déclin de la couverture vaccinale chez les enfants de 2 ans à la suite de la pandémie de COVID-19 (C. Burdet, communication personnelle, 26 juillet 2024). L’équipe de vaccination contre les maladies

évitables de la santé publique de la RRSSSN s’est associée à des chercheurs de l’Université Laval et de l’Institut national de santé publique du Québec pour établir les causes profondes de ce déclin ainsi que les obstacles et les éléments motivateurs de la vaccination des enfants chez les Nunavimmiut. Entre autres conclusions, l’étude a révélé que les collaborateurs inuits (p. ex., les interprètes, les responsables de la santé publique, les sages-femmes, les travailleurs spécialisés en mieuxêtre communautaire) ont fait part des difficultés à trouver, dans la langue inuktitute, le vocabulaire pour parler de la vaccination et des notions d’immunité, ce qui pose un obstacle pour amorcer une conversation sur les vaccins et aider les Nunavimmiut à faire un choix éclairé pour l’immunisation de leur enfant.

Pour remédier à cet obstacle, l’équipe de vaccination contre les maladies évitables de la santé publique a organisé des groupes de discussion avec des Inuits des deux côtes du Nunavik reconnus par leurs concitoyens comme connaissant très bien l’inuktitut et les concepts liés à la santé, afin qu’ils choisissent et conçoivent des

termes appropriés pour exprimer les concepts liés aux vaccins afin que ces termes puissent devenir des outils efficaces pour susciter, avec respect, la participation des Nunavimmiut (pour tout le spectre de l’hésitation à l’égard des vaccins) au dialogue sur la vaccination (C. Burdet, communication personnelle, 26 juillet 2024). Les chercheurs ont par exemple constaté que le terme couramment utilisé pour dire « vaccination » en inuktitut se traduirait par quelque chose comme « poignarder ». Puisqu’un « poignard » n’est pas tout à fait indiqué pour les enfants, l’équipe de vaccination contre les maladies évitables travaille à trouver un terme de rechange plus convivial et plus attrayant pour les enfants. On s’attend donc à ce que la création de ce nouvel outil linguistique fasse une réelle différence dans les pratiques de vaccination et la confiance témoignée par les Nunavimmiut à ce sujet (C. Burdet, communication personnelle, 26 juillet 2024).

19 Pratiques exemplaires et prometteuses en matière d’adoption et de confiance à l’égard des vaccins chez les membres de Premières Nations, les Inuits et les Métis

Conclusion

Les études de cas présentées dans ce document mettent en relief certains thèmes communs visant à faciliter l’adoption du vaccin et favorisant la confiance à l’égard de la vaccination chez les membres des Premières Nations, les Métis et les Inuits. Elle soulignait plus particulièrement l’importance de tisser des relations et d’établir un climat de confiance entre les fournisseurs des soins de services de santé et la clientèle, et d’assurer la participation des Autochtones à la direction de tous les aspects d’une campagne de santé publique, de son instigation à sa planification, jusqu’à sa mise en œuvre et son évaluation. Pour veiller à ce que l’information sur la vaccination trouve un meilleur écho auprès des communautés autochtones, ces études de cas démontrent que les stratégies utilisées doivent soutenir et offrir une plateforme permettant aux dirigeants et aux aînés autochtones d’agir comme modèles et comme messagers crédibles et doivent permettre l’utilisation de médias et de messages de promotion de la santé adaptés culturellement. Parmi les autres stratégies pour améliorer l’adoption du vaccin, citons une collaboration volontaire et efficace entre les gouvernements et une meilleure collaboration organisationnelle (Burton et al., 2023); l’intégration du savoir autochtone aux programmes (Burton et al., 2023; Rattlesnake & Morin, 2023); des services d’inscription et d’immunisation libres d’obstacles (King et al., 2022). La mise sur pied de programmes de vaccination mettant de l’avant une approche globale, complète et appropriée sur le plan culturel a aussi démontré son efficacité dans

l’élimination des obstacles culturels à l’adoption du vaccin (Rattlesnake & Morin, 2023).

Ces études de cas viennent souligner aussi la nécessité d’approches ancrées dans les communautés et adaptées aux contextes particuliers de populations autochtones précises. L’élaboration d’un outil linguistique visant à surmonter les obstacles à l’adoption du vaccin, en cours au Nunavik, est un bon exemple à ce titre. Un environnement sûr culturellement et des fournisseurs de soins dignes de confiance constituent des éléments facilitants essentiels pour favoriser l’adoption du vaccin chez les populations autochtones. En ce sens, il est également nécessaire de remédier aux inégalités de financement et aux capacités réduites qui sont le lot de certaines organisations autochtones – comme Métis Nation of Alberta – qui risquent de les empêcher de créer et de prendre en charge leurs propres campagnes de vaccination à l’avenir. Toutes les organisations autochtones doivent pouvoir compter sur un soutien durable pour renforcer leurs ressources humaines et leur capacité financière et veiller à ce qu’elles soient prêtes à faire face à la prochaine urgence sanitaire qui se présentera.

Remerciements

Nous aimerions faire part de notre reconnaissance et remercier les chercheurs et les dirigeants des initiatives menées par des Autochtones dont il est question dans le présent document d’information. Merci à la Dre Shannon MacDonald, de l’Université de l’Alberta; Chris Redekop, de l’agence Vincent Design; Charlene Rattlesnake, de Maskwacis Health Services; Claire Elise Burdet, de la Régie régionale de la santé et des services sociaux du Nunavik; Keith King, de l’Université de l’Alberta; Reagan Bartel, de la Métis Nation of Alberta. Merci de nous avoir aidés à combler les lacunes dans l’information et à mieux comprendre des initiatives particulières.

Pratiques exemplaires et prometteuses en matière d’adoption et de confiance à l’égard des vaccins chez les membres de Premières Nations, les Inuits et les Métis

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Bibliographie

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An English version is also available at nccih.ca under the title: Best and promising practices in promoting vaccine uptake and confidence among First Nations, Inuit, and Métis populations.

Référence bibliographique : Halseth, R. (2024). Pratiques exemplaires et prometteuses en matière d’adoption et de confiance à l’égard des vaccins chez les membres de Premières Nations, les Inuits et les Métis. Centre de collaboration nationale de la santé autochtone.

ISBN (format imprimé) : 978-1-77368-498-7

ISBN (format en ligne) : 978-1-77368-499-4

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