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René Dalemans - Nicolas de Potter
Louis de Potter
Révolutionnaire belge en 1830 Postface de Francis Balace
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Mais par ses lettres, pamphlets et pétitions amplement diffusés par la presse, il enflamme les esprits. Il est jugé, emprisonné et banni pour l’embrasement populaire qu’il cause.
(Emile de Laveleye, 1822-1892)
Un homme libre, qui a su et voulu rester libre, n’être guidé que par sa sincérité indéniable, ce qui explique qu’en Belgique il sera toujours, en dépit d’une énorme mais très éphémère popularité, à contre-courant de “l’air du temps”. Ce fut sans doute, là, son honneur... (Extrait de la postface de Francis Balace)
Louis de Potter
René Dalemans - Nicolas de Potter www.couleurlivres.be
PotterdeNicolas-DalemansRené
Révolutionnaire belge en 1830
Prix de vente public : 17 e ISBN 978-2-87003-580-1
Révolutionnaire belge en 1830
Louis de Potter
9 782870 035801
Chose rare à notre époque de convictions flottantes pour tout, sauf pour la conquête de la fortune. Il a ordonné sa vie d’après les notions qu’il s’était faites du vrai, du juste et du bien. Jamais le penseur ne fût inférieur à l’homme public.
Tribun audacieux, porte-drapeau du peuple, il sera en 1830 acclamé par la foule des nouveaux Belges. Porté sur les épaules jusqu’à l’Hôtel de ville de Bruxelles, il prononcera le vibrant discours de l’indépendance de la Belgique. Catalyseur d’une forme de “Comité révolutionnaire”, il deviendra doyen du Gouvernement provisoire, au titre de “président du Comité central”, puis doyen du Congrès national. Pourtant, il quittera le pouvoir…
1830enbelgeRévolutionnaire
Postface de Francis Balace
PotterdeLouis
C’était au temps où la Belgique n’existait pas encore. Et rien ne semblait, hormis les qualités intellectuelles et la vive curiosité pour les spéculations politico-sociales, prédisposer Louis de Potter, ce fils de famille né dans un milieu aristocratique, à jouer un rôle-clé dans la naissance du futur Etat belge.
René Dalemans - Nicolas de Potter
Couleur livres
Révolutionnaire belge de 1830
Louis de Potter
Postface de Francis Balace
Nicolas de Potter René Dalemans
Editions [Couleur livres] asbl
4, rue Lebeau – 6000 Charleroi
Tous droits de reproduction, d'adaptation ou de traduction par quelque procédé que ce soit, réservés pour tous pays sans l'autorisation de l'éditeur ou de ses ayants-droit.
© 2011, Couleur livres asbl, Bruxelles. D/2011/0029/25 www.couleurlivres.be
ISBN : 978-2-87003-580-1
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Remerciements
“L’Union fait la Force !” Louis de Potter, 1829-1831 .
1 Cité tel quel par le professeur Paul Harsin, Université de Liége, dans le manuel scolaire Pages de gloire : un siècle sous nos rois, Ed. Desclée, 1930, avec préface par S.M. le Roi Albert Ier adressée au président de l’enseignement catholique de Belgique, M. Paul Hanquet.
Pour leur précieuse contribution, nous remercions le professeur honoraire de l’Université de Liège, Francis Balace ; le professeur de la Vrije Universiteit Brussel, Els Witte ; le généalogiste, Jan Caluwaerts ; l’historienne d’art du Musée Royal d’Amsterdam, Marijcke Schillings ; le conservateur d’archi ves à Bruges, Maurice Vandermaesen ; l’archiviste, Johan Vanderghinste ; Chris Vande Walle de la ville de Dixmude ; le journaliste, Cleveland Moffett, ex-The Bulletin ; Suzanne Gauder, secrétaire de rédaction ; Marcel Meynaert, archiviste ; Jean-Yves Reysset de la fondation Stendhal ; le pho tographe, Oswald Pauwels ; l’auteur, Joanna Scott, fille de Yvonne de Potter et descendante de Louis de Potter, nominée aux prix Pulizer, Gugenheim, L.A. Times et titulaire de la chaire de littérature de l’Université de Rochester (New York) ; le conservateur du château de Lophem ; la Bonne Véronique van Caloen ; Claude et Gaëtane de Potter ; Amaury t’Kint de Roodenbeke ; Carine et ses enfants et l’éditeur Pierre Bertrand et toute l’équipe de Couleur livres, “trait d’union” entre toutes ces forces vives.
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Buste de Louis de Potter par Jean-Joseph Jaquet (1822-1898), situé dans la salle de lecture du Sénat de Belgique. Rédacteur au Courrier des Pays-Bas et écrivain en sociologie et en philosophie, Louis de Potter signait d’un “nom de plume” : “Le Potter” ou “Démophile” (du grec “qui aime le peuple”), ou “de potter” suivi du sigle grec “Oméga”(du grec “tout est dit”). © Jos Tontlinger.
Pour rendre compte de l’emploi de mon temps et de mes facultés, dans l’intérêt du pays, je dis avec fierté : Mes premières pensées furent consacrées à nos garanties démocratiques. Je suis journaliste ; oui, je tiens à l’honneur d’être journaliste depuis des années, et jamais on ne parviendra à flétrir ceux qui écrivent en conscience et avec courage, et défendent nos libertés, à leurs risques et périls, les journalistes. Louis de Potter, 1830.
Voici l’histoire haute en couleur d’un journaliste rebelle, devenu chef spirituel de la Révolution belge de 1830. Cette histoire raconte ses origines, motivations, convictions démocratiques et sacrifices personnels au profit d’une grande cause commune : “La Belgique” !
Au cœur de l’Europe naissante, il suscita la transition d’un régime mo narchique censitaire à un régime monarchique plus égalitaire, par une ouverture de l’opinion publique vers l’élection au suffrage universel. Dès son jeune âge en 1800 et malgré l’influence de Napoléon sur ses idées, les “lettres de Louis de Potter”, étaient fort appréciées par ses lecteurs en Belgique et ensuite en France, Italie, Allemagne, Royaume-Uni, Etats-Unis.
3 Tels MM. Coppin de Grinchamps, van der Linden d’Hooghvorst, de Mérode, Nothomb, Surlet de Choquier…
1 Tels Babeuf de 1789, Brest-VanKempen, Coché-Mommens, Couleur Livres, de Nève, Han, Labroue, Méline-Cans, Wodon, Ponthieu, Roscoe Ltd., Schnée, Tarlier, Van Linthout – Vanden Zande, Weissenbruch, et bien d’autres encore.
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Son bannissement, son emprisonnement, sa libération par le peuple et son triomphe éphémère au sommet du “Comité révolutionnaire” qui donna naissance au premier Etat de Belgique, arraché à l’Europe. Ensuite sa démission, son travail de doyen d’assemblée, ses souvenirs personnels, fidèlement relatés en annexe par de nombreux éditeurs et par de nombreux historiens et auteurs, d’aujourd’hui et d’alors .
Dans les coulisses, cette biographie relate l’aventure médiatique et fami liale du publiciste belge. Il sacrifia sa liberté et ses biens personnels aux Belges de 1820 à 1830, ainsi que sa carrière, en cédant le passage à ses pairs qui installèrent le Congrès national sans lui.
2 Tels Francis Balace, Maurice Bologne, Emile de Laveleye, René Dalemans, Jan Dhont, Vincent Dujardin, Paul Harsin, Lucien Jottrand, Théodore Juste, Henri Pirenne, Els Witte et bien autres cités dans l’ouvrage.
Introduction
La Belgique n’existait pas encore et l’antique ancrage culturel de grandes familles – telles les “Potter” – écartelées sur les frontières des Flandres et Picardies belges et françaises, était profond mais tourmenté. En ces contrées géopolitiques incertaines, bousculées par les guerres, l’art littéraire était le moyen de communication par excellence.
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3 Inventaire du Patrimoine de Flandre, le château du Ravenhof à Tourhout, XVIIe siècle, fam. de Potter et de Cuupere.
2 Histoire généalogique Harlez de Deulin, Geneanet, notes de Madame Rendaxhe : “Itiné raires littéraires au XVIIe siècle”.
Le dramaturge liégeois Simon de Harlez connut la branche aînée des Potter à Renaix. L’ardent “poète de la mer” Eugène Van Oye venait au château des Potter à Tourhout. L’auteur Guido Gezelle venait au château familial Potter-Caloen à Lophem. Les brasseurs et auteurs Rodenbach, de Roulers, venaient au château familial des Potter à Ooigem.
Son style visionnaire inspirait d’ailleurs une modernité par son autodérision et ses “pétitions” publiques. Il pratiquait une forme d’ironie, à son propre sujet et au sujet des pauvres “sujets du roi des Pays-Bas” et autres détracteurs d’un peuple devenant de plus en plus “Belge”.
4 Histoire du château de Lophem par la Baronne Véronique van Caloen et son équipe de la Fondation Jean van Caloen, 1990-1995.
1 Tels S.M. Léopold Ier, le philosophe Français Félicité de Lamennais, le journaliste français Stendhal, l’auteure française George Sand, l’auteur Suisse Jean-Baptiste de Colins de Ham, l’auteur francosuisse Benjamin de Constant de Rebecque, l’industriel de Roulers Pedro Rodenbach, l’auteur bru geois Paul Devaux, etc.
René Dalemans, Nicolas de Potter
Malgré son esprit révolutionnaire, il reçut des marques de respect de nombreuses personnalités belges et étrangères , tant son argumentaire de citoyen frondeur démocrate reposait sur une solide assise culturelle.
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Bienvenue au cœur de la révolte orchestrée par l’union des forces vives de la Belgique et de l’Europe qui se libère de ses anciens empires. Découvrez l’indignation et la révolte pour une bonne nouvelle et “libre Belgique”. Les libérateurs du rebelle de Potter, révolutionnaire dans ce petit fief défendu ar demment par les héros de 1830, de la première jusqu’à la “dernière heure” !
un affranchissement ou une affection populaire remotivante, il est probable que Louis et sa famille désiraient réduire l’héritage pesant d’une trop ancienne noblesse (cf. histoire familiale en annexe). Ils vou laient moderniser les pratiques politiques et religieuses asservies, sans bri ser toutes les traditions et valeurs risquant de verser dans l’esprit radical.
Louis aimait famille, pays et descendance mais se sentit, tout jeune, investi d’une sorte de mission démocratique et unitariste. Elle le gagna progressive ment durant ses années d’exil en bas âge en Allemagne et en France ou du rant son éducation de quinze années en Italie. Nul n’est prophète en son pays, dit l’adage, mais Louis le devint un peu, en tant qu’exilé, répudié dans cet esprit des anciennes “républiques aristocratiques” vénitienne et florentine. Sous l’avènement des Robespierre, Buonarroti et autre Danton, Louis l’aristo crate rebelle fortuné, érudit et idéaliste, désira aller beaucoup plus loin que ses ancêtres. A la lumière du contexte familial, on comprend pourquoi il mit tout dans la bagarre, renonça aux emplois, désargenta sa descendance.
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Tiraillé par un passé familial tourmenté mais féru d’histoire dès son plus jeune âge, Louis désirait ardemment promouvoir un “unionisme” concilia teur. Ce concept pacifique s’opposait aux guerres frontalières que connut sa famille. La paix entre peuples voisins ne semblait provenir ni des em pereurs, ni des monarques, ducs ou prélats, qu’ils soient catholiques ou protestants, mais plutôt de certains prophètes étrangers issus des grandes révoltes et guerres de 1789, 1790 et 1815.
Il semblait donc logique, aux parents de Louis de Potter, à la veille de l’emprise de Napoléon, de lui faire rejoindre des personnalités culturel les européennes. Des séjours à l’étranger permirent à Louis de croiser la route de bien des personnalités de l’époque. Par exemple d’Italiens com me l’arrière petit-neveu du célèbre Michel-Ange, Philippe Buonarroti, de Suisses comme Benjamin Constant de Rebecque et Jean-Baptiste de Colins de Ham, de Français comme Félicité de Lamennais, George Sand et Henri Beyle dit Stendhal, et bien d’autres grands.
Hélas, de tous ces savoirs littéraires et châteaux, nous verrons que, après la Révolution belge, il ne resta pas grand-chose d’autre à Louis qu’une maison rue de l’Epingle à Bruxelles. Bien sûr, il avait sa réputation de “tribun” et, heureusement, la belle Belgique tant désirée ! Les frustrations familiales suite aux exils semblent avoir forgé le caractère bien trempé des de RecherchantPotter.
Il proposa la force intellectuelle comme seul bagage utile au mode de vie qui soufflait à l’époque, loin de son ancienne vie paysanne. Il tenta de convaincre sa famille d’abandonner la couronne et de rejoindre la qualité de vie française, la modernité italienne, la coopérative d’opinions alle mande, le mode partisan britannique, et les frais émoulus “pétitionnaires” de la nouvelle métropole européenne : Bruxelles !
Rentré de ses voyages de jeunesse, Louis de Potter précipita le changement de la carte géographique orchestré par les grandes Puissances, alors que la majeure partie des protestataires plient ou fuient.
Hélas pour la rue, le pouvoir balaya trop tôt les promesses sociales du début. Les révoltés sentirent leur bienheureux “Comité révolutionnaire” se fondre en un rigoureux “Congrès censitaire” avec la bénédiction des nations. Les partisans du promoteur d’un paysage autochtone et fraternel “belgo-belge ”, se résignaient à abandonner la liberté du suffrage égalitaire qu’ils avaient brièvement remporté.
Tous ? Non ! Nous verrons que ce jeune journaliste “gallo-romain” résiste et attire l’attention grâce à des textes vibrants. Il demandera l’union de tous, la liberté pour chacun, l’égalité à tout instant. Il appellera à des élections non censitaires et poussera tout un peuple au soulèvement et à cet appel pour la naissance d’une “nation belge”. Suite à l’emprisonnement de son héros et à sa libération, puis son exil en France et enfin son retour triomphal “sur les épaules” des futurs braves Belges.
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Des cercles de fronde et résistance naissent à Lille, Bruxelles, Liège... Leur flamme est animée par de grands correspondants tels Buonarroti, Colins, Stendhal, de Lamennais. Un nombre croissant de lecteurs se passionne pour le publiciste en herbe, jeune mais déjà connu à l’étranger.
Les nombreux écrits du “publiciste banni” de l’histoire passaient discrète ment sous les portes des prisons et chaumières. Il était devenu l’homme le plus populaire de Belgique en 1830. C’est grâce à son procès, son bannis sement et son retour triomphant depuis Lille, sur les épaules de son peuple enthousiaste, qu’un “Etat tampon belge ” était né autour de Bruxelles.
Un sentiment patriotique démocratique fort était né des trois appels dans la foule de 1830 : liberté (moins de joug étranger, catholique et censitaire), égalité (moins de clivages entre les classes et électeurs égaux entre eux), fraternité (entente entre les provinces belges réunies, moins d’invasions, entente entre provinces belges).
Son oncle est procureur au Conseil de Flandre et chef de district autrichien.
Ses voisins : le général van der Meersch et Rodenbach, brasseur décoré par Napoléon
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La nouvelle Belgique sépara les voisins français, hollandais, allemands... tandis que l’Angleterre couronnait le tout par la nomination de notre bon roi “germano-anglo-belge”. Ensuite, l’avènement d’élections “censitaires”, plutôt que le suffrage universel tant espéré, eût lieu.
L’idéalisme de certains des premiers Belges, basé sur le choix des hommes pour leur mérite, fut délaissé. Le “clan Potter” et plusieurs fiers révolution naires, ne s’étant fait aucune illusion, furent écartés du pouvoir et restèrent sur le pavé. La campagne des partisans radicaux étant épuisée, les paysans, ouvriers et patrons révoltés retournaient dans leurs terroirs ; les fiefs libres de Renaix à Courtrai, en ce qui concerne notre Louis.
La petite-fille du chancelier de l’empereur d’Autriche recueille chez elle son fils naturel Victor.
Un membre de l’état-major de Napoléon est le beau-père de son fils naturel SonVictor.fief de Droogenwalle vient du prince de Mérode, famille dont est issu son collègue Félix.
On trouvera plus amples informations dans cette Histoire de la famille de Potter en annexe mais, pour l’instant, retenons les liens dont il a probable ment tiré parti en vue de devenir le chef révolutionnaire qu’il est devenu :
Le général Henri Brialmont, aide-de-camp du roi Léopold Ier épousa sa fille ScipionJusta.
Ricci, conseiller du duc de Habsbourg est son hôte et accueillait aussi BuonarrotiNapoléon., arrière petit-fils du frère de Michel-Ange aide à la révolution bel ge lors de son installation à Bruxelles en 1830. Plus de 50 éditeurs auront rejoint son mouvement “d’écrivain-militant” publiciste : Babeuf de 1789, Brest-VanKempen, Coché-Mommens, de Greef-Laduron, Han, Labroue, Méline-Cans, le chevalier X. de Nève, Wodon, Parmentier, Ponthieu, Roscoe Ltd., Rossellini, Schnée, Tarlier, VanLinthout-VandenZande, Vieusseux, le comte H. Vilain XIIII, Weissenbruch... Il sera en contact avec de nombreuses personnalités telles Colins de Ham, Stendhal, le général Lafayette (grâce à son fils naturel, féru des USA), de Lamennais, George Sand, O’Connel…
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Ouvrir les cimetières extra-muros devrait par contre améliorer l’hygiène des cités, loin d’être exemplaire. Démanteler les vieilles fortifications obsolètes face aux progrès de “l’art” de la guerre, permettra aux villes de respirer et de s’étendre.
Partie remise, car dans moins de dix ans les Pays-Bas autrichiens n’exis teront plus ! Il est vrai que ses sujets des anciens pays de par deçà n’ap précient guère “le roi sacristain” qui le leur rend bien : Quant au peuple brabançon, ce ne sont que têtes francisées et dont le fond est la bière, dit-il. Pourtant, ce despote éclairé, suivant la terminologie consacrée, ne manque pas d’idées lumineuses bien que parfois excessives : fixer la date des ker messes le même jour de l’année n’a pas de quoi plaire au bon peuple dont c’est l’une des rares distractions.
La vie de Louis de Potter
Après quinze ans d’une tutelle maternelle pesante, l’empereur, couronné en 1765, décide la fermeture de nombreux couvents d’ordres contempla tifs : riches-claires, brigitines, carmes, capucins... doivent plier bagage. Les jésuites eux-mêmes ne sont plus en odeur de sainteté chez ce gallican à la sauce autrichienne, ce qui en fait un “joséphiste”.
Plus sérieusement, nourri de la philosophie des Lumières, Joseph II, éloi gné de l’ultramontanisme par des pédagogues jésuites plutôt maladroits est avide de réformes dont sa mère Marie-Thérèse avait donné le signal.
En 1771, il a soutenu le pape Clément XVI dans la promulgation de la bulle Dominus ac Redemptoris supprimant la Compagnie, ce qui a fait passer l’enseignement sous la tutelle de l’Etat.
En ce début de l’an de grâce 1786, S.M. Joseph II, empereur allemand, roi des Romains, a du abandonner son projet d’échanger nos régions, bien éloignées du cœur de l’Empire, contre la Bavière.
L’Ancien Régime
La franc-maçonnerie elle-même n’échappe pas non plus au souci de ré glementer du souverain – qui n’en est pas – malgré le désir des “frères maçons” de se L’archiduchessel’approprier.Marie-Christine, sœur de l’empereur d’Autriche – les Habsbourg se répartissent les tâches en famille – et son beau-frère Albert de Saxe-Teschen, gouverneurs généraux, sans pouvoir réel face aux mi nistres plénipotentiaires venus d’Autriche, voient monter la contestation dans les Pays-Bas.
Les révolutions liégeoises et parisiennes viennent d’éclater quand Joseph II rejoint, en février 1790, ses ancêtres dans la crypte viennoise des capucins.
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Le jeune journaliste et politicien, Louis de Potter, dessiné par Quittelier. Extrait du livre de l’Histoire de Belgique de Poplimont (1957).
François II qui le remplace, après un bref retour dû à la victoire du général feld-maréchal Frédéric-Josas de Cobourg (un nom que nous retrouverons) à Neerwinden en 1793, verra déferler les Sans-culottes sur nos régions qui deviennent partie intégrante de la République française, une et indivisible, grâce à Jourdan et Pichegru, vainqueurs à Fleurus en 1794.
Après un an de rêveries et d’affrontement entre “statistes” et “vonckistes” pour qui les “Etats-Belgique Unis” n’ont pas le même visage, l’ordre autri chien est rétabli et la famille peut pour un temps retrouver le calme de PourLophem.échapper à la vindicte populaire, elle se met sous la protection du feld-maréchal baron de Bender, général en chef des armées impériales. L’abbé Lucas, un émigré français, enseigne à l’époque la lecture au jeune Louis âgé de six ans.
Un double exil
Fidèle à sa vocation, en un temps où la mortalité infantile est effrayante, elle offrira encore une fille Marie-Christine, (1793-1864) à son mari. Comme nous l’avons vu plus haut, aucune descendance mâle, sauf celle hors ma riage, n’assura la descendance de Louis de Potter.
Son frère, Léopold II, aura à peine le temps de prêter serment à la Joyeuse Entrée avant de descendre à son tour au tombeau en 1792.
Mais en 1794, le retour définitif des armées de la République pousse de nombreux aristocrates à chercher le salut dans la fuite. La majorité choisit l’exil dans les principautés rhénanes, entre autres à Trêves, Coblence et Worms où l’armée des émigrés à son quartier général.
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Fin octobre 1789, lors de la révolution dite brabançonne, le général van der Meersch, “le Washington belge” (!) refoule les Autrichiens vers le Luxem bourg et, considérés comme joséphistes convaincus, les de Potter se réfu gient à Lille voisine où la Révolution est encore bonne fille.
Indifférente en apparence à l’agitation politique et religieuse, mais fi dèle au prescrit biblique “Allez, croissez et multipliez”, Marie Catherine Maroucx d’Opbrakel (1752-1833), épouse de Pierre-Clément de Potter de Drogenwalle (1759-1823) donne naissance le 26 avril 1786 à Lophem à son fils Louis-Antoine, le héros de notre histoire.
Associée à celui du Premier ministre de Grande-Bretagne, l’expression “Pitt et Cobourg” deviendra le symbole de la coalition de l’Europe contre la QueRévolution.derencontres possibles pour le jeune garçon car les comtes de Pro vence (le futur Louis XVIII), d’Artois (le futur Charles X), Polignac, Bouillé, Châteaubriand cultivent leurs rancœurs et leurs querelles d’un autre temps au bord du fleuve germanique !
Peut-être la famille de Potter trouva-t-elle assistance auprès de cousins installés en terre germanique, on songe à l’oncle maternel de Louis, Louis Joseph Maroucx d’Opbrackel (1748-1800), intendant du kreis (district) de Gand, avocat, procureur général au Grand Conseil de Flandre, (Consi liarius ac procurator generalis in consilio Flandriae) membre du Conseil d’Etat sous le régime autrichien. Lui aussi était exilé, mais à Vienne, et sa fortune était apparemment considérable puisqu’il fut couché sur la liste des souscripteurs de l’emprunt forcé de 600 millions de livres imposé par le “libérateur” français à nos régions !
On peut aussi imaginer le gamin assistant au défilé des troupes, soldées par la Grande-Bretagne, commandées depuis 1792 par Frédéric-Josas de SaxeCobourg-Saalfeld (1737-1815) qui n’est autre que le grand-oncle admiré pour ses vertus guerrières d’un certain Léopold dont l’accession au trône de Belgique sera combattue par notre héros converti à l’idéal républicain des jeunes parisiens.
Un calme relatif ramené par le Directoire, Pierre-Clément se réinstalle à Lophem et, entre 1796 et 1805, agrandit son domaine, ne dédaignant pas, bien que bon catholique, de racheter ce qui était probablement des biens ecclésiastiques nationalisés par la République.
Un couple de professeurs à la retraite du couvent anglais de Bruges, les Messemaeckers, sont les premiers mentors de l’adolescent et vien nent adoucir ses moeurs. Puis, ce sera le pensionnat du sieur Simoneau, où il perfectionnera son français qu’il connaissait mal en raison de son
Retour à Lophem
Au niveau scolaire, Louis profita peut-être durant ce temps d’incertitude, et sans doute avec modération, des leçons de précepteurs privés germani ques car on reparlera de son approche toute teutonne d’auto-didacte.
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Le linge se lavant en famille, Victor-Armand fut installé au château de Charles de Ghellinck d’Elseghem, époux de la tante Reine de Potter, qui sauvèrent la mise durant le séjour de Louis en Italie.
Le grand-père de Louis, Louis Maroucx d’Opbraekel, colonel dans l’armée autrichienne avait à l’égal de l’oncle Louis conservé des liens au sommet de l’Empire des Habsbourg et l’ombre protectrice des Metternich se profile en arrière-plan de la destinée de cette “erreur” de jeunesse.
En 1807-1808, une sombre histoire sur laquelle sera jeté un voile pudique bouleversa l’existence de la famille : un fils naturel, fruit peu goûté par l’entourage d’une idylle entre Louis, il a 21 ans, et une jeune fille dont l’identité nous est inconnue, va naître.
Ce sera ensuite l’excellente institution Baudewyns (Bauduin) à Bruxelles où le grec et le latin lui seront bientôt familiers mais dont il sortira avec des connaissances plus que rudimentaires en mathématiques
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C’est probablement lors de ses études bruxelloises qu’il se lie d’amitié avec Pierre Van Gobbelschroy dont, comme nous le verrons, le chemin politi que divergera du sien, mais avec qui il restera malgré tout lié.
Il adoptera dès lors la devise assez ambiguë : Habeo non habeor, traduite assez laborieusement par “je possède et je ne suis pas possédé”. Grâce aux relations familiales, il pourra également fréquenter la biblio thèque du comte d’Arconati qui comptait 80.000 volumes ! Au total, il connaîtra, dit Jottrand, plusieurs langues vivantes. Il avait toutefois négligé beaucoup sa langue maternelle… Quoiqu’il la parlât familièrement dans le dialecte de Bruges, il la lisait difficilement et ne l’écrivait pas du tout. Dans les dernières années de sa vie, il disait souvent, en faisant allusion aux excès de la domination wallonne dont il était humilié comme la plu part de ses compatriotes flamands : Si cela continue, je me remettrai à mon brugeois et je n’écrirai plus que dans cette langue. Pour tempérer ce pro pos, rappelons que Lucien Jottrand, franc-maçon et rédacteur du “Courrier des Pays-Bas” auquel collaborera Louis, est l’un des initiateurs du mouve ment flamand sous le règne de Léopold Ier.
séjour germanique. N’oublions pas qu’à l’époque l’enseignement arraché aux mains des ordres religieux et l’école laïque n’étant pas organisée, il ne restait que des institutions privées.
En 1810, il pérégrine tout d’abord en France, Alsace, Franche-Comté, Provence, Languedoc et en 1811 part pour la péninsule afin de “parfaire son éducation – à 25 ans il était plus que temps – et améliorer sa santé” mais aussi pour éviter les rafles qui l’auraient intégré à la “Formation de la Garde d’Honneur”.
Louis de Potter par un “auteur inconnu”. © Archives de la Ville de Bruxelles.
Entre-temps, le républicain Bonaparte est devenu, depuis 1804, l’empereur Napoléon Ier et nous comprenons à présent que le séjour de Louis en Italie qui sera salutaire, à double titre, pour le salut de l’âme du fils embarrassant qu’est devenu Louis tout en l’éloignant des champs de bataille et des idées républicaines qui paraissent déjà l’habiter.
Choix malheureux car il trouvera son “chemin de Damas” dans la péninsule où il fera des rencontres et des lectures qui, de fils toujours présenté com me pieux aux gens respectables, le mueront en anticlérical convaincu.
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C’est dire que la ville éternelle est loin d’être une préfiguration du paradis, plutôt un chaudron de sorcières où bouillonnent les idées révolutionnaires que la France y a déversées.
L’Italie et la découverte des Lumières
En 1814, de Potter verra y revenir le Saint-Père et renaître en 1815 le Stato Pontificio dont la police déploie un zèle répressif qui rivalise avec celui des états réactionnaires voisins.
Quand Louis arrive à Rome, S.S. Pie VII a dû quitter le Vatican, forcé manu militari à l’exil par les troupes napoléoniennes et les Etats pontificaux for ment, en 1809, deux départements français, Rome et Trasimène.
S’il loge chez un maître menuisier belge, Pinchart, dont il assume la ges tion de l’entreprise jusqu’en 1816 alors que celui-ci tombe malade, il est aussi introduit dans les cercles littéraires romains où il semble avoir mis les bouchées doubles afin de combler certaines lacunes de sa formation car le vocable d’historien s’attache bientôt à sa personne sous la plume de ses Recommandécorrespondants.par
le chevalier Reinhold, ministre des Pays-Bas à Rome, avec qui il gardera de bons rapports, il a accès aux archives vaticanes ce que regretteront ensuite les éminences qui l’accueillent.
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L’initiative la plus importante de Pie VII immédiatement après son retour sera le rétablissement de la Compagnie de Jésus (constitution Solicitudo omnium ecclesiarum de 1814) qui permettra aux jésuites de connaître un véritable essor et à de Potter d’écrire quelques-unes de ses pages les plus sulfureuses aux yeux des biens pensants.
Rome bien que déchue de sa gloire, demeure un lieu de séjour obligé pour les jeunes artistes. Ingres et Paelinck, pour ne citer qu’eux, s’y trouvent, rejoints en 1817 par Navez avec qui il cohabite au palazzo Malaspina, place de Venise jusqu’en 1819.
Le peintre Joseph-Louis Odevaere (Bruges, 1775 Bruxelles, 1830), un “pays” installé dans la ville éternelle depuis 1805 devient son ami. Grâce à lui, nous avons un portrait de Louis datant de 1811 où classicisme et ro mantisme naissant se disputent dans la représentation d’un guitariste plutôt inattentif à la partition. (cf. illustrations en annexe)
Les lectures qu’il fera dans la bibliothèque de Vieusseux et de Ricci vont le confirmer dans son orientation peu orthodoxe, car en 1816 à Bruxelles, il publie “Considérations sur l’histoire des principaux conciles depuis les Apôtres jusqu’au grand schisme d’Occident” (en six volumes !), résultat de son étude de l’histoire de l’Eglise passée à la moulinette de la philosophie des Lumières et premier d’une série d’ouvrages qui vont asseoir sa réputa tion d’historien autodidacte.
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sera sa vie durant un anti napoléonien avec toutefois une certaine sympathie pour Louis-Napoléon, dont le passé de “Carbonari” ne devait pas le laisser indifférent. Le coup d’Etat du 2 décembre 1851 le fera changer d’avis.
Œuvre historique, le futur homme politique de Potter y est déjà présent. Dans l’introduction, il donne le ton en citant Saint Grégoire de Nazianze, le père et docteur de l’Eglise grecque : J’avoue, s’il faut parler sincère ment, que je crois devoir fuir toute réunion d’évêques ; parce que je ne connais aucun concile dont la fin a été heureuse. Ces assemblées ne font
Les “mauvaises fréquentations”
Prudent, Louis écrit à son futur beau-frère Joseph van Caloen : Le tableau d’Odevaere est tout à fait terminé. Il compte l’exposer ici avant que le lais ser emballer pour le porter à Paris (...) Je m’applique toujours un peu à la guitarra. Mais à propos de cet instrument, veuillez vous ressouvenir que je ne désirerai pas que l’on sait ni chez moi, ni chez les Messemaeckers, que je m’occupe de la musique. Je veux réserver à ma mère surprise complète Notons au passage qu’Odevaere avait été initié en franc-maçonnerie en 1803 dans la loge de “La Réunion des Amis du Nord” à Bruges. Louis à l’époque semble se partager entre Rome et Florence où l’accueille la noble famille du cardinal de Ricci dont les sympathies joséphistes le rap proche du grand-duc de Toscane, Léopold, momentanément “empêché” par les appétits napoléoniens et qui, en bon Habsbourg, a cherché refuge à LouisVienne.dePotter
Les Ricci le mettent entre autres en contact avec Giovani Pietro Vieusseux (Oneglia, 1779 Florence, 1863) un marchand d’origine genevoise qui possède une riche bibliothèque (celle-ci deviendra en 1819 le “Gabinetto Scientifico Litterario”, actuellement hébergé au Palazzo Strozzi).
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Premier livre publié par Louis de Potter (6 tomes).
qu’augmenter les maux, bien loin de pouvoir y porter remède. Grégoire savait de quoi il traitait car il avait été un des moteurs du Concile de Nicée qui condamna l’arianisme en 325 !
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Le royaume des Deux-Siciles est pour sa part gouverné par la branche ca dette des Bourbons d’Espagne qui ne manqueront pas d’appeler l’Autriche au secours lors des révoltes futures. Les “Potter” auront, quant à eux et bien plus tard, une alliance avec les Bourbons de France. En réalité, ce retour à la “légitimité” n’est qu’une façade derrière laquelle s’agitent carbonari et autres sociétés plus ou moins secrètes partisanes de l’unité italienne qui rêvent de bouter i barbari hors de la péninsule. Encore faut-il définir quel pourrait être le régime politique qui sortira de la révolution qui s’annonce : fédération d’états (avec le pape comme président !), république, royaume, les jeux sont ouverts. Il appartiendra au royaume de Piémont Sardaigne de réaliser le rêve en 1870. Mais ceci est une autre histoire.
A la chute du “tyran corse”, les choses changent sur les terres de ce qui n’est qu’une “expression géographique”, comme l’appelle dédaigneuse ment Metternich, où l’Autriche se réserve la meilleure part : elle annexe purement et simplement le Trentin, l’Istrie, la Dalmatie, récupère la Lom bardie et conserve le territoire de l’ancienne République de Venise. Par sécurité, elle installe des vassaux partout où elle le peut : l’ex-impératrice Marie-Louise, fille de l’empereur François II et épouse de Napoléon, de vient duchesse de Parme, Plaisance et Guastaldo et conservant le code Napoléon, instaure, fait suffisamment rare que pour être souligné, un ré gime beaucoup plus libéral que dans la plupart des Etats italiens.
Falck émet à cette occasion le souhait qu’il tournera son attention vers les connaissances administratives et la politique, afin de trouver en lui un collaborateur instruit des intérêts de son pays et exempt de préjugés, vœu pieux on le verra.
De 1817 à 1819, il est à nouveau en Italie et remplace même Reinhold à l’ambassade lors des absences de celui-ci, délivre des passeports et se voit donner du “Secrétaire de son Excellence le ministre de Sa Majesté le roi des Pays-Bas” par les quémandeurs. En août 1820, nous le retrouvons à Bruges après un passage par Paris, où il rencontre Félicité de Lamennais et l’abbé Grégoire qui lui donne peut-être l’idée de son “Ricci”.
L’ambassadeur Reinhold l’introduit auprès d’Anton Reinhard Falck (17771843), Secrétaire général du nouveau Royaume des Pays-Bas avec qui il noue des relations amicales en 1816 lors d’un séjour à Bruxelles, sans dou te à l’occasion de la publication de ses “Considérations” et le 27 octobre il est reçu, en tenue de ville au mépris de l’étiquette, par le Roi Guillaume, qui a lu l’ouvrage, et par le prince héritier.
Nous reviendrons sur la vie de cet évêque de Pistoia et Prato, dont la vie inspirera à Louis un ouvrage qui l’aidera à préciser sa pensée philosophi que et politique.
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L’esprit des lieux est donc celui d’un despotisme paternaliste héritier du joséphisme, climat de relative liberté intellectuelle dans laquelle de Potter évolue et qui lui permet de s’atteler à un complément aux “Considérations” de 1816 : “L’esprit de l’église ou considérations sur l’histoire des conciles et des papes depuis Charlemagne jusqu’à nos jours”.
C’est en cette année 1821 que Louis regagne la Toscane où il trouve une nouvelle fois l’hospitalité auprès de la famille Ricci, conseillers écoutés du souverain régnant à nouveau à Florence, le grand-duc Ferdinand III de Habsbourg-Lorraine. Celui-ci, par la grâce des Puissances et l’appui de l’Autriche soucieuse de placer ses pions, a retrouvé, en 1814, le trône confisqué par Napoléon en 1800. Pas rancunier, Ferdinand accueille dans leur exil des membres de la famille Bonaparte, comme le fait d’ailleurs le Saint-Père à Rome. Ferdinand décèdera en 1824 et son fils Léopold II, devenu grand duc, subira les premières secousses annonciatrices de l’unité italienne, avant d’abdiquer en 1859.
La douceur des paysages toscans semble avoir, une nouvelle fois inspiré des élans romantiques autant que sensuels à notre historien de l’Eglise car une nouvelle présence féminine entre dans sa vie. Il s’agit cette fois d’une artiste peintre, Matilde Meoni (1779-1858), épouse d’un sieur Malenchini dont la discrétion sera louable et dont elle divorcera. Un talent artistique fort honorable que celui de Matilde, membre de l’Académie de Saint-Luc à Rome, qui est une élève de l’école de Vincenzo Camuccini (1771-1844). C’est de cette époque que date un portrait qu’elle a réalisé de son ami doctement installé dans la bibliothèque où sont rassemblées les collections de Scipion de Ricci (1741-1810).
Pour ce qui est de Matilde, le rôle essentiel de la jeune femme est, pour notre propos, de l’avoir mis en contact avec des intellectuels libéraux – ce qui à l’époque signifie de gauche : “Carbonari” italiens, “Charbonniers” français, francs-maçons dont le moindre n’est pas Filippo, devenu Philippe lors de sa naturalisation française, Buonarroti (Pise, 1761 – Paris, 1867), l’arrière petit-neveu du grand Michel-Ange.
Entre 1820 et 1823, Louis pérégrine d’Italie en Suisse et en France et il a sans doute l’occasion de rencontrer Buonarroti à Genève où celui-ci a obtenu en 1806, après des années de prison, l’autorisation de résider grâce à Fouché qui protège les anciens babouvistes.
Expulsé de la cité lémanique, Buonarroti s’installera à Bruxelles en 1824. Il y retrouvera Louis lors de réunions de carbonaristes. Insatiable dans sa recher che d’un nouvel ordre social, de Potter fréquente toujours, en 1821 à Paris, le salon du docteur Edwards, membre de l’Académie Royale de Médecine. C’est l’occasion de rencontrer Henri Beyle, mieux connu sous son nom de plume germanique de Stendhal qui vient d’être expulsé de Milan, Stendhal qu’il introduira auprès de Vieusseux lors du séjour florentin de l’écrivain.
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Gravure de Louis de Potter publiée en France, transmise par Madame Céline de Potter. “Biographie des hommes du jour”, Ed. Dellicourt, 1827.
Il faut concéder au futur auteur de “Le Rouge et le Noir” une jolie manière pour tourner sa demande : M. de Potter, je vais passer un mois à Florence et serais heureux d’être recommandé par vous à quatre ou cinq hommes supérieurs. Je vais abuser de vos bontés, et vous prier, si toutefois cela ne vous gêne en rien, de m’adresser à Florence, trois ou quatre feuilles d’in troductions. Je reviens à Paris en janvier et serai heureux d’y cultiver votre connaissance. Si vous avez quelque livre à rapporter, disposez de moi et excusez cette indiscrétion. Agréez, Monsieur de Potter, l’hommage de ma haute considération.
Le grand vainqueur est cependant la Grande-Bretagne qui, s’étant emparée de la majorité des colonies hollandaises durant les guerres de l’Empire, “offre généreusement” les provinces belges en compensation à Guillaume, fils de Guillaume IV d’Orange, le dernier stadshouder des Provinces-Unies, chassé par les révolutionnaires français.
La “perfide Albion” s’arroge ainsi un droit de regard sur l’embouchure des fleuves et sur les ports rivaux du commerce maritime anglais. Elle s’assure aussi une ceinture de protection contre l’esprit de revanche de la France (Piemont-Sardaigne, neutralité suisse, Hanovre agrandi gouverné par le souverain anglais, forteresses le long de la frontière franco-belge).
En août 1823, Louis quitte l’Italie en compagnie de Matilde pour revenir à Lophem car son père est gravement malade (il décèdera le 28 janvier Or,1824).depuis 1811, le vent de l’histoire a soufflé en tempête sur le pays, le régime napoléonien a été balayé et un nouvel Etat est né par la volonté des grandes Puissances qui, sous le couvert de la Sainte-Alliance, jouent leur partition propre. L’Autriche ne désire nullement récupérer les territoires perdus en 1794 et préfère, comme nous l’avons vu, trouver des compen sations en Italie. La Prusse, le royaume qui monte, y voit une étape dans l’attente de futures acquisitions sur la rive gauche du Rhin et pourquoi pas jusqu’à Liège La Russie d’Alexandre Ier apprécie de voir la France rentrer dans ses frontières de 1789 sous le sceptre de Louis XVIII restaurateur de la légitimité, cheval de bataille du tsar.
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Retour au pays qui s’agite
Selon cette arithmétique, le projet de Constitution ayant été rejeté, le roi biffe les 126 “non” inspirés, estime-t-il, par des motifs confessionnels. Comme la soustraction n’est pas encore suffisante (il reste 143 voix de majorité aux opposants), Guillaume considère les 280 abstentions comme un accord tacite et atteint péniblement 807 “oui”. Faux bilan qui laisse mal augurer de la suite des évènements. Se considérant comme “le premier homme d’affaires de son royaume”, le souverain, qui a étudié l’économie à l’Université de Berlin durant ses années d’exil, se met au travail se basant à la manière anglaise sur le machinisme et le crédit.
Situation riche d’avenir, un mouvement prônant la langue flamande (mais laquelle, vu le nombre de patois ?) se développe au sein du clergé et de la bourgeoisie (francophone) de Flandre face au néerlandais, véhicule poten tiel de l’hérésie protestante.
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Après les péripéties des Cent Jours, Guillaume prend, le 16 mars 1815, le titre de “roi des Pays-Bas”, qui englobent ce qu’on qualifie de “provinces belges”, l’ancienne principauté de Liège et le Grand-duché de Luxembourg actuel. Usant de “l’arithmétique hollandaise”, il obtient en août la procla mation de la Grondwet, “la plus mauvaise Constitution qu’on ait jamais fabriquée dans aucun temps et dans aucun pays, un monstre moitié libéral, moitié féodal”.
Le nouveau royaume ne manque pas d’atouts : le sud produit alors que le nord du pays importe. On verra que bien des griefs vont se développer à ce Guillaume,sujet.
Que ce soit en Belgique ou en Hollande, personne n’est partisan de l’union et comme le dit un contemporain : Il n’existe dans toute la Hollande qu’un seul individu qui désire la réunion, et cet individu c’est le prince souverain.
qui vise logiquement à l’unification administrative de l’Etat, recourt de préférence à des fonctionnaires hollandais plus en fonction de leurs sentiments monarchiques qu’à cause de leur nationalité. Héritier de la tradition joséphiste, le roi veut faire dépendre l’enseignement – retombé aux mains du clergé, notamment jésuite, après le Concordat napoléonien – de l’Etat. De même, le catholicisme est mis sur le même pied que les autres religions, d’où la crainte des évêques de voir se développer un prosélytisme calviniste diabolique. Le divorce lui aussi reçoit des bases légales.
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On voit ainsi naître peu à peu une “Union des Oppositions”, ou plutôt une “union des contraires”, au sein de laquelle vont se réunir avant de s’affron ter catholiques et libéraux et dont Louis sera un acteur virulent, “électron libre” catalyseur des énergies avant de se retrouver marginalisé à cause de ses opinions républicaines. On verra qu’il redéfinit celles-ci dans le sens très net de la république, “chose publique” et “respect démocratique”, plutôt que dans le sens “anti-monarchique”.
Dès son retour en Belgique, c’est une nouvelle vie qui commence pour Louis, installé à Bruges avec sa mère sur laquelle il veillera avec beaucoup de tendresse. Il décide bientôt que son avenir d’écrivain philosophe et de journaliste politique doit se jouer à Bruxelles. La vieille dame et son fils s’y transportent donc, tout d’abord rue de l’Empereur, puis rue Longue, et ensuite, rue Neuve. Ils résideront ensuite place Saint-Michel ; coïncidence de l’histoire, celle-ci deviendra, après la Révolution, la “place des Martyrs” où seront ensevelies les victimes des combats de 1830. Il s’établira plus tard la “rue des Epingles” (parfois “de l’Epingle”). Nouvelle coïncidence de l’histoire, celle-ci partait de la rue Notre-Dame-aux-neiges, plus ou moins à la hauteur de la place des Barricades, jusqu’à la rue Pacheco, dans le pro longement de la rue du Congrès, au départ de la place du Congrès. L’une de ses premières actions qui le place dans les rangs des contestatai res est de refuser, avec l’accord de sa mère, de lever ses titres de noblesse ce qui lui aurait conféré la noblesse héréditaire. Au baron de Westreenen de Tiellandt, trésorier du Conseil suprême de la noblesse qui réagit sèche ment à ce refus, il écrit le 24 février 1824 : (…) Si, donc, la noblesse ne donne point de vertus, et si elle peut s’allier avec tous les vices, si elle-même peut devenir la récompense de tous les crimes ; si, en un mot, la noblesse, par elle-même, n’est rien, pourra-t-on trouver étrange que je n’en veuille point ? (…) On est toujours assez bien né quand on est né comme tout le monde. Notre homme a choisi son camp !
En 1825, paraissent, chez Weissenbruch, “Imprimeur du roi” à Bruxelles, les trois volumes consacrés à la vie de Scipion Ricci, évêque de Pistoia et de Prato et réformateur du catholicisme en Toscane sous le règne de Léopold. Les matériaux pour cet ouvrage dont les buts sont clairs ont été réunis lors du séjour italien. Scipion de Ricci, né en 1741, formé au collège
L’établissement à Bruxelles
Il s’agit plus profondément d’un éloge du joséphisme dont la politique du Roi Guillaume paraît s’inspirer et que Louis en un premier temps va sou tenir. N’écrit-il pas : Je remercie le sort de ce qu’il m’a destiné à vivre, sous des institutions libérales, qui par des principes de modération et d’équité, ne mettent aucune barrière à la pensée. Le roi lut le livre et fit savoir à l’auteur combien il l’avait apprécié.
Devenu un adversaire résolu du régime, de Potter témoignera cependant toujours d’une indulgence vis-à-vis du souverain : (…) Guillaume n’était ni un tyran, ni même un despote ordinaire. C’était tout bonnement un roi progressif, qui ne se contentait pas d’être roi de nom, roi constitutionnel, pour manger, oisif, au râtelier de la liste civile… ll voulait sincèrement ce qu’il croyait le bien, et ce bien il l’aurait fait, pour autant que sa position lui permettait ; car il était aussi éclairé que peu méchant.” (extrait des “Souve nirs personnels de Louis de Potter”).
Le reste du texte est du même tonneau : louanges à Léopold de Habsbourg qui va à contre-courant, même du peuple égaré par les prêtres, et qui abo lit l’Inquisition en Toscane, attaque contre les jésuites et les dominicains, approbation de la Constitution civile du clergé en France.
jésuite de Rome, ordonné prêtre en 1766, évêque en 1780, se rapprocha ensuite de l’esprit janséniste.
En 1839, il en viendra même à souhaiter, dans son opposition à la politique gouvernementale et à Léopold Ier, le retour de Guillaume.
Soutenu par l’archiduc de Toscane, Léopold de Habsbourg-Lorraine, futur empereur Léopold et adepte des réformes de son frère Joseph II, Ricci, au départ de celui-ci pour Vienne, fut attaqué par l’Eglise romaine, perdit son siège épiscopal, rentra dans la vie privée et mourut oublié en 1810.
Dans le prospectus de lancement, une citation extraite du projet de Consti tution pour la Toscane de l’archiduc est mise en évidence : Un despote imbécile et méchant peut seul se croire au dessus de la loi.
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En exergue à son ouvrage, de Potter cite un extrait des mémoires de l’évê que : Quand une nation a servilement soumis son intelligence à l’autorité des prêtres et des grands, elle cesse de réfléchir et perd tout désir de s’éclairer. Et il affirme sa certitude que ce tableau ne pourra manquer son but, à une épo que où les efforts réactionnaires du parti dominant, en Europe, ne tendent qu’à rétablir les abus de tout genre, que Léopold cherchait à déraciner.
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Si l’ouvrage est évidemment mis à l’index, il suscite par contre l’intérêt des milieux libéraux. “Le Globe” de Paris écrit : J’ai à vous parler d’un ouvrage qui dévoile tant de honteux mystères, et reproduit tant de vérités utiles, que l’on ne doit pas s’étonner ni des frémissements de rage ni des témoignages d’estime qui ont accueilli sa publication
Louis de Potter fut longtemps le rédacteur en chef du “Courrier des Pays-Bas”. Par la suite, il fut un journaliste assidu dans plusieurs autres journaux tels le “National”, la “Gazette de France”, “Le Belge” ou le “Vaderlander” (le journal patriote issu de Gand dont il fut membre fondateur). Il était aussi journaliste ordinaire au célèbre “Réforma teur de France” dirigé à Paris par Raspail et à bien d’autres publications encore (belges et étrangères).
Bien qu’écrit en “style allemand”, la “Vie de Scipion” eut droit à une secon de édition et à une contrefaçon parisienne, censurée il est vrai par la police de Charles X. Stuttgart et Londres eurent également leur exemplaire.
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armes dans la presse
Parmi ses membres, nous retrouvons entre autres l’état-major du “Courrier” ainsi que l’ami peintre Odevaere, Jean-François Tielemans, Adolphe Quetelet, tous maçons à l’exception de Van de Weyer. Peut-être est-ce dans ce cénacle que de Potter écrivit sa “Pétition de Saint Napoléon pour entrer au Paradis” (1825), dont les vers de mirliton n’auraient pas eu de quoi inquiéter la gloire naissante de Victor Hugo.
Derniers effets du séjour italien, ces écrits vont céder la place à d’autres préoccupations. En effet, de Potter débute rapidement sa collaboration avec le “Courrier des Pays-Bas”. Journal fondé en 1821, son équipe rédac tionnelle est à l’époque composée du Louvaniste Louis Jottrand, d’Alexandre Gendebien, de Jean-Baptiste Nothomb et de Sylvain Van de Weyer. Edouard Ducpétiaux, Philippe Lesbroussart et la majorité des ténors libéraux de la politique belge se manifesteront dans ses colonnes. La publication compte alors 900 abonnés, chiffre remarquable pour l’époque, et atteindra le chif fre impressionnant de 4.500 en 1830, la qualité et la virulence des articles de Louis de Potter seront l’origine de son succès.
Louis lance également l’idée de réunir tous les quinze jours (le second et le quatrième jeudi du mois) des hommes de lettres et des artistes – majoritaire ment opposants au régime – qui formeront la “Société des Douze”, fondée en 1823. Dissidence de la “Société de littérature de Bruxelles”, d’abord fa vorable au pouvoir puis suspectée par celui-ci, car soucieuse de la liberté de la presse, les Douze se réunissent dans les salons de Philippe Lesbroussart où ils marient les plaisirs de la table – ce qui n’est pas pour déplaire à Louis amateur de bonne chair – et les exercices de l’esprit.
Association de fait, sans statut officiel, le but des “Douze”, soutenue par Van Gobbelschroy est la défense de la langue française et la lutte contre la “hollandisation culturelle”. Se complaisant dans une certaine discrétion, vite percée à jour, les “Douze” ne manquent pas d’attirer l’attention des services gouvernementaux qui y voient un foyer de contestation car, si l’une des obligations des membres est de rimailler, la satyre politique prend rapidement le pas sur le culte des Muses car elle affirme vouloir “répandre les lumières dans toutes les classes et surtout les classes inférieures”.
Elle établit également un comité destiné à venir en aide aux Grecs en révolte contre l’Empire ottoman. Les “Douze”, en tant que cercle, perdra de
Son épouse sera toujours à ses côtés dans les épreuves comme dans l’exil et si, dans ses souvenirs, Louis fait peu mention de sa famille, préférant l’évocation de sa carrière politique, il témoignera toujours de beaucoup de sollicitude à son égard.
son importance lorsque l’union entre catholiques et libéraux deviendra une réalité dans leur opposition commune au gouvernement.
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Intermède sentimental
Les membres fondateurs de la “littéraire des Douze” sont A. Van de Weyer (Baron, docteur ès lettres), Louis de Potter (propriétaire), Ph. Doncker (avocat), L.A. Drapier (propriétaire), Ph. Lesbroussart (professeur d’athé née), J.D. Odevaere (peintre du roi), A. Quetelet (professeur de maths, physique, astronomie), Ed. Smits (employé au ministère de l’Intérieur), F. Tielemans, (avocat), F. Van Meenen, M. Gruyer et un nom qui manque à l’appel, mais il est permis de croire qu’un certain nombre de ses membres était appelé à se renouveler et qu’un siège était “tournant”.
En 1825, Matilde quitte Bruxelles pour l’Angleterre et la France où l’at tendent des commandes. C’en sera fini de leurs relations, mais Louis lui versera régulièrement une pension.
Il est permis de s’interroger quant à l’opinion de Madame de Potter mère sur le sujet. Pour cette union, il prend garde à ne pas s’allier à l’une ou l’autre fa mille de beau lignage, ne s’est-il pas exclu lui-même de ce monde, préférant choisir quelqu’un à la fidélité et aux vertus domestiques éprouvées.
Souci de se fixer, désir d’avoir une descendance légitime, toujours est-il qu’en 1826, Louis se met en ménage avec son amie brugeoise Sophie van Weydeveldt, fille d’un tapissier plaisamment appelée “de Champré”, du flamand weide (pré) et veld (champ). Ne vous figurez pas, écrit-il à son ami Tielemans, de trouver dans ma compagne un esprit subtil et cultivé. Non. Les qualités de Sophie se bornent à ce qui me suffit pour faire les charmes de notre union, à une sensibilité exquise et à beaucoup de bon sens. En quels termes élégants… Et encore : Le mariage à ma façon exigeait un consente ment de tous les jours, de chaque instant, plus flatteur par conséquent pour celle en faveur de laquelle il est donné, que celui qui n’est volontaire qu’une seule fois, et qui enchaîne ensuite la volonté pour toujours.
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L’une des personnalités qui a certainement exercé une grande influen ce sur l’évolution de la pensée politique de Louis de Potter est l’Italien Philippe (Filippo) Buonarroti. Louis, on s’en souvient, l’avait déjà rencontré en Italie et à Genève, mais l’installation de l’Italien à Bruxelles en 1824 sera déterminante (il quittera la ville pour la capitale française après les trois Glorieuses de 1830). Eternel conspirateur, cet avocat né à Pise en 1761, opposant au régime du grand duc Léopold, est membre ou fondateur de toutes les sociétés secrètes qui prolifèrent à l’époque en Europe.
politique européen s’impose
Le jeune héros emprisonné “porté au panthéon” par le poète artiste E. Montius. © Académie royale des Sciences, Lettres et Beaux-Arts de Belgique, Archives du Baron de Stassart, c. n° 1531.
Résumer la pensée de Buonarotti n’est pas aisé : fils des Lumières, il est imprégné des idées de Rousseau, Locke, Condillac et son frère Mably, Morelly, O’Connell ou Helvétius, qu’il va radicaliser. Antimonarchiste, an ticlérical et antiaristocratique, il prône une société égalitaire où la terre est mise à la disposition de chacun au profit de tous. Il condamne le com merce, l’industrie, la monnaie, comme corrupteurs. Jacobin, il réclame une éducation gérée par l’Etat ouverte à tous et et prône le suffrage universel. Ces principes développés dans son œuvre majeure, “Histoire de la conspi ration pour l’égalité, dite de Babeuf”, publiée à Bruxelles en 1828, auront un grand retentissement. Buonarotti ouvre ainsi la voie à Marx, à Blanqui et au-delà au communisme. Sans en adopter ces positions extrêmes, Louis
Arrêté une dernière fois à Paris en 1833, Buonarroti mourra pauvre et aveu gle. Reconnaissons au passage que la présence de ces régicides, républi cains et autres anarchistes, avides de fraternité et d’égalité pour le peuple, plaide en faveur de la liberté de pensée et de parole qui règne, quoi qu’on en dise, dans le royaume des Pays-Bas si on la compare aux prouesses de la censure dans d’autres pays.
Arrêtés le 11 mai 1796 à la veille du déclenchement de leur insurrection, Babeuf et ses principaux associés furent condamnés à mort le 26 mai 1796 et exécutés le lendemain à Vendôme.
Il fait alors connaissance avec la Société des “Bons Cousins Charbonniers” qui, exportée en Italie, servira de base à sa pendante, la fameuse “Carbo naria”. A Genève, Babeuf fonde la loge maçonnique “Les Sublimes maîtres parfaits” et, en 1812, il participe à la conspiration du général Malet. Fina lement, en 1824, expulsé définitivement de la cité du Léman, il choisit de s’installer à Bruxelles où il renoue avec d’anciens conventionnels et joue un rôle capital de liaison au sein de la maçonnerie et la charbonnerie.
Franc-maçon, affilié aux “Illuminés de Bavière”, il épouse les idées les plus extrêmes de la révolution et accomplit diverses missions officielles en Corse (où il se lie avec les Bonaparte), puis dans le Midi. Fondateur du club parisien du “Panthéon” qui défend les idées du libraire français Babeuf, il est arrêté lors de la découverte de la “Conspiration des Egaux” en 1796 et, alors que ce dernier monte à l’échafaud, il est condamné à la déportation commuée en détention.
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La “Conspiration des Egaux” était le nom donné à la conspiration “de la Commune” qui fut déjouée par le Directoire en 1796, partisan d’une révo lution sociale qui compléterait la révolution politique commencée en 1789.
Toujours plus anticlérical, notre historien-journaliste publie, en 1827, ses “Lettre de Saint Pie V”, suivie d’un catéchisme catholique romain compre nant la législation pénale de l’Eglise en matière d’hérésie. Ces lettres, écrit-il dans la préface, expriment toutes le même désir : elles n’expriment qu’un seul désir ; celui-ci enflammait le pape de l’extirpation de l’hérésie et de l’extermination des hérétiques.
C’est également à cette époque que de Potter approfondit sa connaissan ce des idées de Félicité de Lamennais. Ils s’étaient rencontrés début des années vingt et une correspondance fournie s’était établie entre eux. Elle durera jusqu’en 1840, leurs chemins idéologiques s’étant alors séparés. Félicité Robert dit “de Lamennais” (1782-1854), empruntant le nom d’un lieu-dit (“la Mennaie” en Côte d’Armor où son grand père possédait un bien) est ordonné prêtre en 1816. Champion à ses débuts du traditionalis me, il publie, en 1823, un “Essai sur l’indifférence en matière religieuse” où il critique l’Université issue des réformes napoléoniennes et le gallicanisme de la Restauration. Il proclame la nécessité pour l’Eglise de se désolidari ser des pouvoirs établis et de faire cause commune avec la liberté (“De la religion considérée dans ses rapports avec l’ordre politique et civil”, 1825).
En 1828, il fonde la Congrégation de Saint-Pierre, destinée à former un clergé en phase avec son temps et à rétablir l’autorité du pape en France. Il publie en même temps “Les progrès de la Révolution et de la guerre contre l’Eglise” qui marque un virage à gauche.
Cette évolution le mène à fonder, en 1830, avec Montalembert et Lacor daire, le journal “L’Avenir” auquel collaborera de Potter, qui plaide pour la
u 32 de Potter fera siens des éléments de sa pensée qui, peu à peu, l’éloigneront de ses compagnons de lutte anti-hollandais favorables à une monarchie parlementaire constitutionnelle.
Le moment est venu de se souvenir des exils répétés de Louis et du bannis sement de sa famille durant sa jeunesse. Les destinataires des missives du Saint-Père sont Philippe II, le sanguinaire duc d’Albe (qui avait persécuté la famille de Louis, notamment son arrière-grand-oncle qui fut décapité), Charles IX et Catherine de Médicis qui ne pouvaient qu’être d’accord avec celui qui disait : Gardez-vous de croire que l’on puisse faire quelque chose de plus agréable à Dieu que de persécuter ouvertement ses ennemis par un zèle pieux pour la religion catholique (Lettre 22).
Malgré leurs différences, les routes de Lacordaire et de Louis se trouvent bien souvent en parallèle et une vive sympathie naît entre eux. Monsieur de Potter, écrit Lacordaire en 1830, est un homme qui ne croit pas, mais d’ailleurs honnête et loyal, et qui a été le principal promoteur de l’union entre le libéralisme, ami de l’ordre, et le catholicisme, union qui doit s’effectuer partout sur la base d’une liberté vraie, unique garantie possible de la liberté commune.
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liberté de l’enseignement et la séparation de l’Eglise et de l’Etat, la liberté de conscience, de religion et de la presse.
Louis de Potter, dessiné par J. Lion pour les “Biographies des Hommes du Jour”, G. Sarut, Paris, 1836.
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Le roi s’attaque d’abord aux premiers, pépinières de futurs ecclésiastiques en trois ans, 300 prêtres avaient été ordonnés dans le diocèse de Malines –puis exige un diplôme d’une des universités d’Etat afin de pouvoir ensei gner. Finalement, devant la fuite des jeunes cerveaux qui suivent leurs maîtres religieux à l’étranger lors de leur éviction, il décrète qu’aucun Belge ayant fait des études hors du pays, ne serait admis dans les universités du royaume ou nommé à un emploi d’Etat.
Dès la création du Royaume des Pays-Bas, la question de l’enseignement revêt un caractère d’acuité qui ne peut que croître avec la politique menée dans ce domaine par le Roi Guillaume. Poursuivant la tradition née avec Marie-Thérèse et poursuivie sous Joseph II, la Révolution et l’Empire, le souverain veut faire dépendre l’Ecole des pouvoirs publics. 1.500 écoles royales (primaires), des athénées (les anciens lycées impériaux), des éco les normales vouées à la formation des instituteurs, trois universités d’Etat (Gand, Louvain, Liège) voient le jour au grand dam des ordres religieux qui s’étaient emparés des institutions d’enseignement à la chute de l’Em pire. jésuites, frères des écoles chrétiennes venus de France, dirigent petits séminaires et collèges diocésains.
Un évènement va réaliser, pour des raisons différentes, cette union entre les deux partis : la signature d’un Concordat entre le Royaume des PaysBas et le Saint-Siège.
En 1825, lors du discours du trône devant les Etats généraux, le roi annonce l’ouverture d’un “Collège philosophique”, véritable séminaire d’Etat, chargé de la formation des prêtres du royaume. De Potter, tout en reconnaissant qu’il s’agit d’une atteinte portée à la Loi fondamentale prend la défense du roi : (…) Le discours du roi, est franc et loyal. J’en reviens toujours pour lui au surnom d’honnête homme que je retrouve dans toutes ses paroles et dans toutes ses actions. Je crains beaucoup plus pour nous (il s’agit bien en tendu des libéraux) ce que l’on pourra dire touchant la haute main que le gouvernement prend sur l’instruction publique. (…) Nous voulons avec lui son existence et sa prospérité, quitte à le combattre lui-même dans la suite s’il n’abdique pas, en temps et lieu, l’autorité absolue dont nous aurons été
retour à la concorde ou ferment de discorde
avec joie les agents les plus dévoués pendant l’urgence. (lettre du 29 octobre 1825 à son ami Sirtema de Grovestins)
Si van Gobbelschroy, ministre de l’Intérieur depuis peu, belge et catho lique, s’efforce de calmer les esprits entre le vieil archevêque de Méan (1756-1831) et Goubau, Secrétaire d’Etat aux cultes, les affrontements de viennent quotidiens. Chacun comprend que le point de rupture semble atteint car, avec un séminaire d’Etat, la mainmise de celui-ci sur l’Eglise serait totale et le danger réel de voir renaître le fébronianisme, c’est-à-dire une église schismatique rompant avec Rome, probablement ouverte à la pénétration calviniste. Le Saint-Siège va alors reprendre des négociations en vue de la conclusion d’un concordat.
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Comme souvent, les premières manœuvres seront le fruit d’une diplomatie parallèle. Ni Goubau, vieux joséphiste, ni Van Maanen, la bête noire de Louis de Potter et du peuple belge, ministre de la Justice, Hollandais pur jus, ne sont tenus au courant de celles-ci. Van Gobbelschroy confie les premières approches au comte de Visscher de Celles, libéral sans sectarisme qui a ses entrées au Vatican. Officier de cavalerie, il avait chevauché botte à botte dans l’armée française avec le futur Monseigneur de Mercy-Argenteau, un proche du pape, frère du grand chambellan de Guillaume des Pays-Bas.
Un article, tenu secret, envisage de rendre facultatif le Collège philosophi que. Le texte aussitôt connu provoque une levée de boucliers chez les libé raux et les calvinistes qui n’y voient évidemment que les faveurs faites aux catholiques. Van Gobbelschroy adresse alors aux gouverneurs de provinces une circulaire confidentielle d’où il ressort que si le roi avait semblé s’être montré conciliant, c’était pour mieux amadouer les futurs nouveaux évêques et ainsi atteindre “par d’autres moyens” les buts qu’il poursuivait, en clair le maintien du tellement contesté Collège philosophique. Par une “heureuse indiscrétion” le document tombe entre les mains de Louis de Potter qui s’empresse de le publier dans le “Courrier” du 14 octobre 1827, à l’indigna tion cette fois des catholiques qui y voient la confirmation de la duplicité
Léon XII écoute d’une oreille attentive les propositions venues du nord et finalement, le cardinal Cappellari et de Celles, élevé au rang d’ambassa deur, concrétisent l’accord qui est publié en septembre 1827. De vingt-sept articles au départ, le Concordat n’en compte plus que trois dont la teneur prévoit la création de nouveaux évêchés, le droit de regard du souverain dans la nomination des évêques et l’obligation du serment de fidélité au roi à prêter par les membres du clergé.
Conversion du “Révérend Père” Louis de Potter et destruction des livres hérétiques © Archives de la Ville de Bruxelles, Collection iconographique, A575.
royale. La querelle rebondit donc. L’archevêque de Malines de Méan refuse de former à la prêtrise des élèves du Collège et le roi va jusqu’à exiger du Saint-Siège la déposition de l’irascible vieillard “ce barbouilleur”.
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A cette époque un évènement familial heureux se produit pour Louis : il devient père d’un fils, officiel cette fois : Agathon, qui deviendra médecin, franc-maçon, défenseur de l’idéal social colinsien et mécène de l’Académie Royale de Belgique. Que déduire de ce prénom insolite sinon le caractère ironique de Louis qui connaît bien son histoire des papes : Saint Agathon, pontife de 678 à 681, affirma l’indépendance et la primauté romaine, le principe de l’infaillibilité pontificale et l’unité de l’Eglise, toutes questions controversées à l’époque de notre pamphlétaire.
Née le 10 mars 1824 grâce à un trio d’avocats, Devaux, Charles Rogier et Joseph Lebeau, la feuille liégeoise lance, le 21 mars un appel à l’union : Libéraux et catholiques ont, les uns et les autres, leurs sujets de mécontente ment mais ils en ont beaucoup en commun. Ils veulent la liberté des langues, la liberté de la presse, l’inamovibilité des juges et la responsabilité ministé rielle. A quoi bon s’obstiner à lutter séparément quand l’union fait la force.
Mais dans l’article célèbre (anonyme mais qui porte sa griffe) paru le 8 novembre 1828, il élargit son champ de bataille : Jusqu’ici on a traqué les jésuites. Bafouons, honnissons-les ministériels. Que quiconque n’aura point clairement démontré par ses actes qu’il n’est dévoué à aucun ministre
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Inscrite dans la Constitution de 1815, cette liberté avait été considérable ment restreinte par un arrêté du 20 avril de la même année, pris durant les Cents Jours napoléoniens et jamais abrogé, qui permettait de traduire en justice “tous ceux qui cherchaient à susciter entre les habitants la défiance ou la désunion ou à exciter au désordre”. Des dizaines de prêtres et de journalistes avaient fait les frais de cette répression qui pouvait conduire jusqu’à la Cour d’assises. Anachronisme, dans la Belgique du XXIe siècle, les délits de presse, bien que la plupart du temps correctionnalisés, sont encore passibles de la Cour d’assises. En mai 1824 déjà, Lesbroussart, ré dacteur au “Courrier des Pays-Bas”, avait été emprisonné au secret pendant un mois pour avoir publié un article qui l’avait fait accuser de “provocation à la révolte”, alors qu’il n’en était même pas l’auteur.
Liberté de la presse, liberté en tout
Si le Concordat avait été l’occasion – pour des raisons certes différentes – de créer une opposition commune au gouvernement, la lutte pour la liberté de la presse cimentera l’union entre libéraux et catholiques. Cette première brèche verra s’engouffrer le torrent de toutes les revendications et aboutira aux évènements de 1830.
Jusqu’à ce moment, de Potter avait surtout mené le combat anticlérical dans l’affaire du Concordat : Maudits jésuites, écrivait-il encore quelques mois auparavant, ils nous auront fait bien du mal de leur vivant ; et quoi qu’enterrés en France, leur ombre continue encore à nous inquiéter.
Le coup d’envoi du rapprochement entre les deux partis opposés sera donné par Paul Devaux dans le “Mathieu Laensberg”.
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soit mis au ban de la nation et que l’anathème de l’impopularité pèse sur lui avec toutes ses suites.
Arrivée des volontaires Liégeois derrière Rogier, Ch. Soubre, 5 août 1880. © Musée royal de l’Armée.
De sa cellule aux Petits Carmes où, sous l’œil complaisant des gardiens, il reçoit la crème de l’opposition, part (le 22) un second article encore plus virulent : Dans les circonstances actuelles, serait-ce une lâcheté que de pro fiter du peu de liberté de la presse que nous jette le ministère pour accabler ceux qui, avec nous, la réclament tout entière. Ce serait une lâcheté d’at taquer les jésuites qui sont devenus chez nous les piliers de l’opposition ; le mot d’ordre dut-il être Saint Ignace, dussent les drapeaux porter le fameux monogramme et un Sacré-Cœur, dussent enfin les instructions partir du Vatican, le devoir de tout bon patriote est dorénavant dans les rangs de cette opposition toujours libérale, en ce qu’elle empêche les empiètements, les usurpations du ministère, seules véritables causes des malheurs d’un peuple et des dangers d’un gouvernement.
Dès ce moment, de Potter apparaît comme le chef de file de l’opposition et sa popularité dépasse le cercle des initiés pour gagner le grand public.
Immédiatement le ministre de la Justice Van Maanen, furieux, exige l’ouverture d’une instruction contre l’auteur (l’indépendance des magistrats est comme on le voit des plus relatives) et l’ancien défenseur du roi se retrouve huit jours plus tard en prison, accusé de complot contre l’Etat et d’excitation à la révolte.
Les journaux catholiques, qui dès l’origine avaient accueilli favorable ment le concordat, avaient été un peu désarçonnés à la révélation d’intentions que contenait la circulaire confidentielle. On voit dans les journaux libéraux de la fin du mois d’octobre 1827, que ceux-ci triom phent de la déconvenue du “Courrier de la Meuse” et du “Courrier de la Partout,Flandre”.laliberté assiège le despotisme. Même dans les Etats constitu tionnels, une tendance prononcée vers la plus grande liberté possible, imprime à l’opposition son élan toujours progressif ; l’Angleterre a ses radicaux, la France son côté gauche, et l’Amérique ses fédéralistes…
M. de Potter lança du fond de sa prison plusieurs écrits en faveur de l’alliance entre les catholiques et les libéraux. En juin 1829, parut sa brochure intitulée “Union des catholiques et des libéraux”. Plusieurs autres lui succédèrent ; toutes étaient attendues avec impatience, lues avec enthousiasme. Il devint l’homme le plus populaire de la Belgique. Son nom était prononcé avec respect par tous les partis, par toutes les classes ; il était l’idole du peuple et l’effroi des ministres.
La presse était toujours poursuivie à outrance par le pouvoir. MM. Claes et Jottrand étaient condamnés à l’emprisonnement ; M. CochéMommens, condamné aussi, se voyait menacé d’être enfermé de force
Au commencement de l’année 1829, les membres de la presse Ducpétiaux, Jottrand, Claes et de Potter se trouvaient réunis aux Petits Carmes, avec l’imprimeur Coché-Mommens, qui, suivant la jurispru dence du temps, était le complice de ces écrivains, encore bien qu’il lui eût été difficile, tout honnête industriel et tout courageux patriote qu’il était, de rendre un compte grammatical satisfaisant des articles de journaux condamnés par la justice
Ce que dit la presse
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Le “Courrier des Pays-Bas” était toujours le principal organe du parti libéral. Les rédacteurs les plus assidus étaient alors MM. Ducpétiaux, Jottrand et Lesbroussart. M. Claes, qui venait de terminer ses études de droit à l’Université de Louvain, s’adjoignit bientôt à eux. Il se faisait distinguer par la vivacité et l’esprit de sa polémique. Si nous devons reconnaître que presque tous les écrivains attachés alors à la presse libérale, avaient suivi de Potter dans le tollé qu’il avait soulevé contre le concordat, il faut ajouter que plusieurs furent dégoû tés de cette duplicité ministérielle. Le “Courrier des Pays-Bas” repro che, sans hésitation, au ministère son manque de franchise et lui dit, en propres termes, qu’il ferait mieux “de jouer cartes sur table”.
A la décharge du Roi Guillaume, la marche des événements dans toute l’Europe, ne permettait guère d’espérer beaucoup de succès de la pure habileté d’une politique de cour. On était, en France, à la veille de la chute du ministère Villèle. O’Connell tenait en échec toute l’aristo cratie anglaise, et allait lui arracher bientôt le bill d’émancipation des Sicatholiques.l’onveut juger de la situation générale des esprits au commence ment de 1828, et particulièrement de l’état de l’opinion en Belgique, qu’on lise les extraits suivants d’un article publié dans le numéro du 1er janvier 1828 du “Courrier des Pays-Bas”, sous le titre de : “Etrennes politiques”. Aussi bien n’est-il pas oiseux de rappeler, par cette citation, de quelles idées les journalistes d’alors occupaient le public et dans quel style ils savaient traiter les idées :
A la voix impérative du génie, le vieux monde s’écroule, le genre hu main se refait, et la véritable création ne date que d’hier. Lois, gouver nement, éloquence, tactique, industrie, besoins, idées, tout est changé, tout est nouveau ; 30 ans de prodiges en ont effacé 6.000 d’enfance politique ; et le temps n’aura pas d’espace pour dire tout ce qu’a fait ce petit règne de l’esprit.
dans la maison de Saint-Bernard, s’il ne prenait l’engagement de faire cesser les attaques du “Courrier des Pays-Bas” contre M. Van Maanen. Mais ce système de persécutions semblait donner à la presse une nouvelle ardeur, un nouveau courage, de nouvelles forces.
Les libéraux du gouvernement et, jusqu’à un certain point, les catholi ques en étaient offusqués. Les écrivains de la Sentinelle en étaient jus qu’à de quereller publiquement avec quelques rédacteurs du “Cour rier des Pays-Bas”. Les écrivains du “Journal de Bruxelles” cherchaient à se rapprocher de ceux-ci.
Nous voici parvenus à la 28e année de cette ère la plus étonnante qui n’ait jamais existé. Quel siècle ! Désormais il suffit à la liberté d’une feuille de papier pour se promener d’un bout à l’autre de l’univers… Des rois voyagent dans les diligences et font des articles dans les journaux ; d’autres “roi-bourgeois” se promènent librement sans gardes… Le pouvoir clairvoyant transige avec les peuples et abdique en leur faveur son sceptre d’airain. Le despotisme stupide s’accroche seulement à la matière. La fable et l’antiquité ont disparu devant l’histoire merveilleuse de notre époque ; et le siècle incrédule aux chimères sera pour nos descendants, un temps tout fabuleux.
Les libéraux indépendants organisaient des démonstrations publiques, concerts, souscriptions, etc., au profit des Grecs alors en insurrection.
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L’organisation du procès menée rondement, celui-ci s’ouvre le 19 décem bre à Bruxelles devant la Cour d’assises du Brabant méridional. Louis, défendu par Van Meenen et Van de Weyer demande la publicité entière des audiences, la garantie du jury, l’emploi de la langue française ce qui lui est refusé durant son interrogatoire à huis clos.
Les audiences, finalement tenues en public, deviennent de plus en plus tumultueuses et débordent rapidement le cadre initial pour tourner à la mise en accusation de la politique gouvernementale. Tous les griefs belges sont soulevés par l’accusé et ses défenseurs qui sont à leur tour mena cés de poursuites par le procureur. A la fin des débats, qui durent deux jours, le président de Kersmacker, après avoir demandé l’avis du ministre Van Maanen obtient la condamnation de notre journaliste à dix-huit mois de prison et 1.000 florins d’amende.
Dans ses mémoires, de Potter écrira : (…) A peine la sentence fut-elle énon cée que la salle retentit des huées et des coups de sifflets du public, auxquels bientôt répondirent ceux de tout le peuple. Il me serait aussi impossible de décrire ce moment d’effervescence qu’il le fut alors aux nombreux agents déguisés de pouvoir le calmer. Je fus conduit hors de l’enceinte par une porte dérobée qui menait au vestibule ; on m’y fit attendre à l’écart, tandis que le public évacuait la salle et qu’à la faveur de l’obscurité les juges se soustrayaient à la fureur populaire en fuyant à pied et par des issues secrè tes. Comme on s’aperçut que le peuple ne se laissait pas induire en erreur par les assurances qu’on lui faisait donner à chaque instant que j’étais déjà retourné en prison, il fallut bien finalement songer à m’y ramener en effet, et l’on me fit monter dans une voiture introduite dans la cour et où trois gendarmes se placèrent auprès de moi. A peine avions-nous passé la porte que les vociférations les plus énergiques de “A bas le ministère ! A bas Van Maanen !”, mêlées aux cris de “Vive de Potter !” firent une épouvanta ble explosion autour de la voiture. Je l’avoue, ce fut là un des moments les plus solennels de ma vie et il me paya amplement, par l’espoir d’un meilleur avenir pour ma patrie, des maux personnels que je m’étais attirés pour le faire poindre.
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Une anecdote raconte que le président de Kersmacker qui faisait régu lièrement sa partie de dominos au café des “Mille Colonnes”, place de la Monnaie, ne trouva plus de ce jour de partenaires pour jouer avec lui. Le même soir le ministre Van Maanen donnait une réception dans son hôtel il luminé au coin de la rue des Petits Carmes et du Sablon – le gouvernement
Il obtient en effet de purger sa peine aux Petits Carmes afin d’être proche de sa vieille mère (elle a 76 ans), de son épouse et de son fils qui lui ren dent presque quotidiennement visite ainsi que de nombreux sympathisants. De ces rencontres autant carcérales que conjugales naîtra début 1830, alors que le père est toujours sous les verrous, un second fils, Eleuthère.
Dans sa relative solitude (les gravures d’époque montrent quelqu’un qui jouit d’un minimum de confort), le condamné s’attelle à la rédaction de divers écrits qui franchissent sans encombre les murs de la prison. Plu sieurs brochures se succèdent “Réponse à quelques objections, ou éclair cissements sur la question catholique dans les Pays-Bas”, “Dernier mot de l’anonyme de Gand sur l’Union des catholiques et des libéraux dans les Pays-Bas”. Il estime tout en recommandant l’emprunt des voies légales que “par la modération, la douceur, la raison, nous n’obtiendrons rien”.
A Bruxelles, en juin 1829, paraît une brochure “Union des catholiques et des libéraux dans les Pays-Bas” dont il adresse un exemplaire au roi. Epui sée en quinze jours, la publication connaît un second tirage, preuve du succès des idées qu’elle défend. Dans la lettre d’accompagnement, l’auteur s’adresse au souverain en ces termes : L’alliance qui, dans les Pays-Bas vient d’être jurée sur l’autel de la patrie Belge par la philosophie et la reli gion, est un des évènements les plus remarquables de votre règne : il nous sera envié par les peuples civilisés des deux mondes.
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Une fois de plus le prénom, pour le moins original, semble puisé dans le répertoire inépuisable des papes que Louis se plaît à critiquer : Saint Eleuthère, pourfendeur du montanisme, hérésie qui met en cause l’unité de l’Eglise, promoteur de l’apologétisme qui vise à démontrer la validité de la foi chrétienne, régna de 175 à 189.
Reconduit triomphalement à la prison des Petits Carmes, de Potter entame une vie de reclus qui ne lui sera pas trop dure comme le reconnaissent ses codétenus et lui-même : (…) C’est d’ailleurs une justice générale à rendre aux agents du gouvernement de cette époque, qu’ils ne mettaient aucune rigueur inutile dans l’accomplissement de leurs fonctions (…) et nous nous sommes bien souvent rappelé (…) quelques souvenirs agréables de notre commun emprisonnement.
siégeait alternativement un an à Bruxelles et un an à La Haye – lorsqu’une pierre fit voler en éclats une vitre de l’immeuble. Prélude à des violences bien autrement graves qui allaient se produire un an et demi plus tard.
A la même époque, Guillaume entreprend un périple dans le sud du royau me où son attitude cassante raidit l’opposition. Comme le rapporte Carlo Bronne : A Liège, abusé par la lecture de “Quentin Durward” où Walter Scott fait parler aux Liégeois le dialecte de la Flandre, (il) soutint qu’autre fois, on s’exprimait à Liège en flamand. On imagine l’ambiance. Trompé par l’accueil des “brigades d’acclamations spontanées”, il dira : Je vois maintenant ce que je dois croire des prétendus griefs. On doit tout cela aux vues de quelques particuliers qui ont leurs intérêts à part. C’est une conduite infâme (23 juin 1829).
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Louis de Potter, confortablement installé dans sa prison des Petits-Carmes, reçoit le ban et l’arrière-ban des forces vives belges et étrangères, qui lui font honneur à Bruxelles.
Il suffit de quelques jours pour que, début juillet, les frères Pierre et Constantin Rodenbach de Roulers, proches des Potter, créent “l’Ordre de
L’aventurier de Roulers, avait trouvé son compagnon ! Il avait com me lui de profondes racines littéraires et n’avait pas peur non plus de se sacrifier pour être libre !
Comme Louis, le jeune Pedro écoutait ses parents se plaindre, par exemple des taxes sur les alcools et la récession. Son arrière-grandpère, Ferdinand, avait déjà été emprisonné à Lille et son oncle était un ancien combattant amplement décoré pour faits de bravoure par Napoléon.
Révolutionnaire ardent et militaire à la Garde impériale de Na poléon, Pedro Rodenbach participa à la campagne de Russie. Il combattit aussi à Waterloo avec les Hollandais contre les Français. Il participa enfin en 1830 à la “Campagne de Bruxelles” en met tant son carrosse à disposition de Louis de Potter et le menant à la Mêmevictoire.sises parents n’appréciaient pas le côté révolutionnaire de Louis, cela ne l’empêcha pas de se rapprocher en Flandre avec d’aussi vaillants et anciens voisins, eux aussi bousculés par la disette et exilés du Nord au Sud depuis des générations.
Voisins de la famille régulièrement en visite au château de Pot ter à Ooighem, les Rodenbach étaient de fervents admirateurs de jeunesse de Louis de Potter. Issus d’une lignée de producteurs de genièvre aux Pays-Bas, ils engendrèrent une descendance de bras seur à AveugleRoulers.dèssa jeunesse, Alexander Rodenbach dirigea la brasserie dès 1821. Il écrivit des pétitions contre la politique de Guillaume Ier en faveur de la liberté de la langue et de la presse. Il mena ensuite en 1830 la révolution à Roulers et épaula ses frères Constantin et surtout Pedro à Bruxelles.
l’Infamie” et fassent frapper à Bruges un insigne, inspiré de celui des Gueux du XVIe siècle, avec l’inscription : “Grondwet, art.1, Loi Fondamentale, art. 1, Fidèle jusqu’à l’infamie, Lex Rex 1829”.
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Les Rodenbach, admirateurs de Louis (Knack, 1990)
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Alexandre et Pedro Rodenbach, brasseurs de Roulers et amis de Louis de Potter.
Le 15 novembre 1829, paraît la célèbre “Lettre de Démophile (Louis de Potter) à M. Van Gobbelschroy sur la garantie de la liberté des Belges à l’épo que de l’ouverture des Etats généraux”, dans laquelle il évoque la possible séparation des deux parties du royaume dont le Congrès de Vienne avait si malheureusement voulu faire une nation. Il met en garde le ministre de
En 1808, le jeune Rodenbach se rattachait à l’armée de Napoléon, combattant contre l’armée russe, tout en écrivant poèmes et his toires. Comme Louis, il aimait “publier des pétitions” avec de jeunes anarchistes pour changer le monde, de manière idéaliste et sans vieux compromis !
Le point de rupture avec la Hollande fut atteint avec la “guerre de la bière” (soulèvement des acteurs du secteur contre une taxe inique) et les Flandres Occidentales se soulèvent quand elles voient le jour naliste banni Louis de Potter emmené en triomphe vers Bruxelles dans la calèche mise à sa disposition par les Rodenbach, fiers mais ébahis par les cris du peuple : “Vivat Potter ! Vivat Rodenbach !”
C’est seulement quelques années plus tard qu’il resurgit, à Waterloo, auprès des troupes de Guillaume d’Orange cette fois. La lutte ne dura pas car il avait prévenu : “Le sabre des libéraux sera uni, s’il le faut, à la crosse du prêtre”, rejoignant et amplifiant par ces propos le mot d’ordre du jeune Louis.
A l’initiative du comte Vilain XIIII, il est proposé à Louis de Potter, en prison, de tirer une médaille pour financer son action. Celle-ci mentionne : Le pouvoir les proscrit, le peuple les couronne ! et Préservons nos autels et foyers. Ce vocable fait référence à l’association patriotique “Pro Aris et Focis”, créée en 1789 par Jacques-Dominique t’Kint, J-Fr. Vonck et H. van der Noot, et qui organisa la révolte anti-autrichienne brabançonne.
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l’Intérieur : Le peuple veille… Il arrivera à son but par les Chambres ou sans les Chambres, où même malgré les Chambres…
Si, après six mois d’emprisonnement, le souverain semble disposé à lui accorder sa grâce, Louis refuse de solliciter celle-ci et poursuit son travail de sape : J’aime mieux, écrit-il, être en prison, libre de droit que si, libre par le fait seulement d’en avoir moi-même mendié la faveur de qui, en me l’accordant, m’aurait par cela seul prouvé qu’il pouvait impunément me retenir sous les verrous.
“La lettre de Démophile…” à peine sortie, suit une “Lettre de Démophile au roi sur le nouveau projet de loi contre la presse et le message qui l’ac compagne” (20 décembre 1829) : Sire, vos courtisans et vos ministres, vos flatteurs et vos conseillers vous trompent et vous égarent ; le système dans lequel ils font persister le gouvernement le perd sans retour, et la menace d’une catastrophe inévitable à laquelle il sera trop tard de vouloir porter remède lorsque l’heure fatale aura sonné…
Au même moment, une autre forme de contestation respectant les formes légales naît : celle des “pétitionnements”. Le comte Charles Vilain XIIII et le comte François de Robiano semblent avoir été les initiateurs de la formule en rédigeant une pétition adressée aux Chambres demandant la liberté de l’enseignement. Déposées chez les libraires, circulant en province, ces pétitions récoltent des milliers de signatures tant catholiques que libérales et bientôt d’autres suivent réclamant celle de la presse.
Pétitions - Extraits des “Archives de la Révolution de 1830” par A. Bartels (Ed. Thieu, 1848, Paris)
Gourcy, A. de Grady, Félix de Grisard, A. Hamal, baron de Jacquemin, Clément Jonghe d’Ardoye, G. comte de Kersten Kethulle,,imprimeurL.Baronde la Kockaert, LindenLevae,LemariéLantsheere,Lamine,Lambert,Lamarche,bâtonniernégociantbaronF.L.dedeimprimeurAdolphed’Hooghvorst,
bar v.der Meester de Ravenstein, baron Mééùs, Mérode,FerdinandcomteHenri de Mérode, comte Werner de Nagelmackers, G., banquier Nève, Oversschiede de Neerysse, baron
Le signal de pétitions fut donné au public par Louis de Potter, du fond de sa prison. Dans une adresse aux rédacteurs de tous les journaux indépendants et patriotes des Pays-Bas, il réclama ce droit. Plusieurs bourgmestres des Flandres furent destitués pour s’être prononcés contre l’impôt mouture et Liége émit une pétition contre l’arrêté-loi. Le “Courrier de la Meuse” commença la publica tion de ses tableaux comparatifs sur l’inégale répartition des em plois administratifs et militaires entre les Hollandais et les Belges, les protestants et les catholiques. Ces chiffres accablants poussèrent au plus haut point l’irritation des esprits, et associèrent les intérêts matériels aux antipathies nationales. La pétition pour la liberté de l’instruction publique portait par exemple les signatures ci-dessous et quasi les mêmes noms figuraient pour les pétitions pour la liberté de la presse chère à de Potter :
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Bahonville, baron de Barthels, Ve Th. Bergeyck, baron Charles de Berlaimont, baron de Bethune, baron Auguste de Beughem, vicomte Cattoir, CavelierJ-B.d’Adrighem, baron Clercx de Waroux, J. N. de Coché-Mommens, imprimeur Cornet de Grez, comte D’Haene Steenhuyse, L. Debœur, négociant Dejaer, DonsDemanet,négociantvicomtedeLovendeghem, E. Ducpétiaux, Ghellinck,Francotte,FonbaréFassin,FailleFagot-Jonniaux,Pèrenégociantd’Huysse,dellaavocatdeFumal,barondenegociantde
L’adresse de Tournai pour la liberté de l’instruction fut signée par toute la noblesse ; mais les autres classes s’associèrent moins activement à celte démonstration. Les adresses pour le redressement de tous les griefs obtinrent les adhésions de la presque totalité des principaux habitants à Lessines et Gembloux. Plusieurs membres des états provinciaux signè rent à Mons et Charleroi. A Namur, Dinant et Bouvignes, 417 signatures furent recueillies.
Pangaert d’Opdorp, vicomte Potter – Maroucx, Vve de Potter d’Indoye, Ec. de Robert d’Oltrée, le baron de Robiano de Borsbeek, baron de Robiano, Eugène de Rogier, SaroleaCharlesdeChéralle, le comte de Sasse van Ysselt, député Sauvage, chevalier E. de Sauvage-Vercour, chev Fr. de Sauvage-Vercour, chev. Nicolas Scherpenzeel-Heusch, baron de Spoelberch,Snoy,Simonisbaronvicomte de Stas, négociant
Steen de Jehay, baron van den Surmont, de Theux, chevalier B. de Thiriard-Martiny, négociant Van Bommel, évêque de Liége van der Borcht, imprimeur Van der Cruyssen Van VanderThiegemHorst, avocat Vercken, Villenfagne,VilainVerdussen,négociantP.A.XIIII,comtebaron de Viron, J. de Wilde, J. de, étudiant en droit Yves de Bavay, marquis d’ Yves, comte d’ (etc.)
Les villes des Flandres qui ont mis, après Roulers, le plus d’empressement et de zèle à pétitionner sont : Courtrai, 217 signatures, comprenant toutes les notabilités commerciales, à deux ou trois exceptions près ; Menin, 200, dont 8 membres de la régence ; Furnes et le pays, 370 ; Bruges, 247 ; Termonde, Grammont, Renaix, etc. A Ninove et à Alost, des fonctionnaires se permirent de saisir les pétitions chez les dépositaires et aucun des souscripteurs n’osa réclamer directement contre cet attentat. Parmi les communes rurales, Zéle (Flandre Orientale), et Moorslede (Flandre Occi dentale) méritent une mention spéciale pour la promptitude de l’émission et le nombre des signataires. On ne pétitionna ni à Audenaerde, ni à Ostende.
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Une caricature, conservée au Cabinet des estampes de la Bibliothèque Royale, illustre bien l’engouement suscité par ces alliances de circonstan ces : la comtesse de Robiano, debout devant une montagne de pétitions, dit scandalisée, à son chapelain : Quoi, pour la liberté de la presse aussi ? Y pensez-vous l’abbé ? Et celui de répondre : Hélas, oui, comtesse, si vous voulez qu’ils signent pour la liberté de l’enseignement.
En quelques mois, 378 pétitions aboutissent sur le bureau des Etats géné raux dans lesquelles sont demandés pêle-mêle, outre la liberté de l’ensei gnement et de la presse, l’inamovibilité des magistrats, la responsabilité ministérielle, l’abolition de la taxe sur la mouture, la liberté de l’emploi des langues, Guillaume,etc.sensible à ces mouvements de l’opinion publique, utilise sa technique habituelle, donner d’une main, reprendre de l’autre. Une nou velle loi sur la presse est promulguée, bien entendu assortie des arrêtés qui la restreignent, alors qu’en même temps voit le jour un journal gou vernemental, le “National”, confié à un personnage des plus suspects, Libri LesBagnano.élections qui approchent voient naître d’autres foyers d’opposition des tinés à obtenir le redressement des “griefs nationaux” : les “associations constitutionnelles”, dont le moteur est Van de Weyer, au nombre de mem bres limités à dix-neuf pour ne pas tomber sous le coup de la loi relative aux réunions. Sur une proposition de Louis (lettre à son collègue J.-B. de Stassart), le salon de Madame de Potter-mère, place Saint-Michel accueille de Stassart, d’Hoogvorst, Odevaere, Quetelet, Smits, Van Meenen, Van de Weyer et autres contestataires.
En janvier et début février 1830, il défend l’idée, émise par Lebeau et d’Oultremont, d’une “Confédération patriotique” et le lancement d’une souscription nationale destinée à alimenter une rente au profit des fonc tionnaires, membres des Etats généraux, qui avaient refusé de voter le budget et de ce chef, été révoqués. Le projet paraîtra dans le “Courrier” du 3 février sous la plume de Tielemans qui le payera bientôt très cher.
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Tome 1er du “Procès de Louis de Potter” publié clandestinement.
Cette fois la coupe déborde. La plus grande partie des flèches acérées dont le ministère était harcelé étaient tirées tranquillement d’une prison de l’Etat et par un prisonnier enchanté de son sort (C. Bronne). Van Maanen réagit immédiatement à cette dernière provocation, car le 9 février le procureur Schuermans débarque aux Petits Carmes et saisit tous les papiers de de Potter, dont sa correspondance avec François Tielemans qui servira de base à Françoisl’accusation.Tielemans, fils d’un boulanger de la rue Haute, était fiancé à la fille de Weissenbruch (l’imprimeur de “Ricci”) et de Potter l’avait recom mandé à Van Gobbelschroy, toujours bienveillant, qui en fit un référendai re, équivalent de vérificateur, au ministère de l’Intérieur Van Gobbelschroy qui s’était “mouillé” en suggérant la libération de de Potter venait d’être
procès
En apparence anodin, le courrier échangé par de Potter et Tielemans contenait, à côté de sous-entendus transparents relatifs à M. “de la Lune” (Van Maanen, bien sûr) et au pauvre Van Gobbelschroy (M. “Transpira tion”, allusion à sa liaison avec Mademoiselle Lesueur), des considérations plus politiques qui n’épargnaient pas grand monde, amis comme ennemis, même Van de Weyer son défenseur devenait “l’avocat fier à bras”. Le style ne manquait certes pas de saveur : Tout le monde convenait avec moi qu’il n’y a pas assez de coups de pied au bout de la botte d’un honnête homme pour la canaille des courtisans, ou que les rois sont des idoles qui ont des yeux pour ne point voir, des intelligences pour ne pas comprendre, ou encore que Guillaume se montrait alors le plus stupide et le plus entêté des rois Accusés. de complot ayant pour but de changer ou de renverser le gouver nement, de Potter, Tielemans, Bartels, rédacteur du “Catholique des PaysBas” qui avait repris l’idée de la souscription, de Nève, éditeur du journal et aussi du “Vaderland”, comparaissent le 16 avril devant la Cour d’assises, défendus par Van Meenen, Gendebien et Van de Weyer, décidément peu Mêmerancunier.certains
milieux progouvernementaux estiment que le procès est une erreur. Comme l’écrit Reyphins, président de la Seconde Chambre des Etats généraux : Que le gouvernement montre sa confiance dans ses forces et qu’il abandonne ces malheureux à leur nullité.
Les journaux français libéraux (“Le journal des Débats”, conservateur qui évolue vers l’opposition libérale ; “Le Constitutionnel”, organe de rallie ment des libéraux, des bonapartistes et des anticléricaux) rendent compte des débats : Un grand procès se déroule actuellement en Belgique. Les an nales judiciaires offrent peu de procédures plus scandaleuses. (…) Dans cette grande cause, ce ne sont pas seulement des intérêts individuels qui sont en jeu, c’est une population en présence d’une autre, c’est la Belgique en jugement devant la Hollande. Ces deux peuples, divisés par la langue, la religion, les mœurs, les intérêts, n’ont qu’un lien en commun, celui du gouvernement…
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politiquement sanctionné en étant muté de son poste de ministre de l’Inté rieur à celui de ministre des infrastructures et de l’Industrie
Monsieur de Potter, place Saint-Michel, à Bruxelles.
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Missive déjà adressée au gouvernement. Mutatis mutandis.
I° L’association fonde à Gand une feuille nouvelle, flamande, sous le titre du Vaderlander, et en constitue M. J.-B. de Nève, imprimeur, éditeur et gérant responsable durant une année à partir du 1er oc tobre prochain, date obligée de l’apparition du premier numéro du Vaderlander, sans obliger par-là le prédit sieur de Nève à renoncer à aucune de ses occupations actuelles ; (…)
PS : W. vient de me remettre votre volume ; nous sommes quittes, mon bon ami. Je ne vous dirai pas la joie que j’ai eue à vous lire, elle est indicible. Vous la comprendrez en vous figurant que depuis plusieurs mois je ne vous avais perdu, et que je vous ai retrouvé tout entier dans votre dernière lettre. Oui mon digne ami, tous les chemins mènent à Rome et ici… !
Texte de Louis de Potter saisi par le tribunal des Pays-Bas pour motiver son arrestation
il est convenu ce qui suit :
Objet : Fondation du journal “De Vaederlandt” par de Potter et consorts chez de Nève, imprimeur du “Catholique” et du “Vader lander”, a Gand.
Contrat entre : MM. Le comte Vilain XIIII de Basele, Vilain XIIII de Wetteren, marquis de Rhodes, vicomte G. de Jonghe, J.-B. d’Hane, et Louis de Potter, réunis en association d’une part, et, J.-B. de Nève, imprimeur-gérant du Catholique des Pays-Bas, de l’autre,
Acceptez mes respectueuses salutations, Louis de Potter. ***
Mon commandant, Ce(…)n’est pas tout : alors même que je ne suis pas encore entiè rement revenu de l’étonnement où me met mon nouvel emploi d’entremetteur politique ou de politique, comme il vous plaira, ne voilà-t-il pas qu’il m’arrive des députations de braves, et de vrais braves Belges, car ce sont ceux des 27, 28 et 29 juillet, qui s’offrent à moi, c’est-à-dire à la Belgique par mon entremise, avec armes et bagages, un courage indomptable et la volonté inébranlable de vaincre ou de mourir !
Vous aurez la complaisance, mon commandant, de m’avertir exac tement du jour, de l’heure et du lieu où je devrai mettre tous ces héros futurs à votre disposition. Je puis compter sur plus de 10.000 hommes, dont 7.000 à 8.000 Belges et le reste Français (des fau bouriens du quartier Antoine), Allemands, Polonais surtout, et quel ques Anglais.
Extraits des textes de Louis de Potter retrouvés dans ses archives personnelles
Lettre au commandant de la garde (août 1830)
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Je vous transmets donc, mon commandant, cette généreuse offran de, pure, s’il y a quelque chose de pur au monde, de tout sentiment d’intérêt personnel d’ambition et même de gloire à acquérir. Car la plupart de mes guerriers (soldats est un titre qu’ils répudieraient, ils ne demandent rien) sont pauvres, sans nom et sans autre projet que celui d’aller aider là-bas des frères opprimés : ce sont les ter mes dont presque tous se servent en me parlant ou en m’écrivant. En un mot c’est du vrai peuple.
Cher ami,
Lettre de A. Bartels à F. Thielemans (juin 1830)
Le résultat de notre projet serait une bonne chambre et de bons tri bunaux. Avec ces deux avantages, on irait loin, sans compter la force qui naîtrait de l’union de tous les éléments démocratiques de l’Etat. Je crois qu’avec le temps, on en viendra à cette extrémité, si pas dans notre pays, dans un autre. J’aimerais mieux que ce fut dans les Pays-Bas. On pourrait suggérer cette idée aux associations constitu tionnelles qui existent déjà. Le moment m’en paraît favorable. Deux mots sur les Prussiens. Vous ne croyez pas aux projets d’in tervention qu’on aurait eus ? J’ai dit qu’au besoin en on viendrait là, mais je n’ai rien dit de plus. Le besoin s’en serait présenté si le budget avait fait la culbute, et qu’on eût résisté à l’impôt par ordon nance. Maintenant il ne sera plus question d’eux. Je suis pourtant d’accord avec vous que l’idée d’une intervention ne devait pas faire reculer la seconde Chambre, et qu’il fallait MOURIR sur la brèche plutôt que de dire OUI.
Il nous faudra du courage et de la patience, sans avoir un motif spécial pour s’en prévaloir. Il paraît qu’on redoute beaucoup la sortie de M. de P., non pas tant à cause des fêtes et des banquets dont elle sera suivie, que parce qu’on la voit déjà à la tête de l’opposition, dirigeant tout comme un autre O’Connel.
Et à ce propos, il faut lui recommander de la prudence ; qu’il se gar de des procureurs du roi ; la moindre faute lui sera imputée à crime, et l’on saisira un prétexte pour le retenir ou le remettre où il est. La loi sur l’instruction publique a été une déclaration de guerre : tout ce que le gouvernement a fait depuis porte un caractère d’hostilité ouverte. Une crise est donc possible, si non nécessaire. Les opinions diffèrent ici sur la situation des choses.
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Extraits d’une lettre codée à Louis de Potter saisie par le tribunal des Pays-Bas et qui motiva son arrestation
Ce soir, nous avons la Muette de Portici, un grand opéra. Nouveau sujet à exclamations. Ce matin, nous passerons la rivière pour aller faire les commissions de Caroline et voir le bon nécessiteux. Toutes les lettres sont remises.
Chère amie, (Louis de Potter est ainsi désigné par l’auteur anonyme, probablement son ami Sylvain Van de Weyer)
Depuis trois jours que nous sommes ici, Sophie est non encore dans l’admiration, mais dans l’étourdissement, la stupéfaction. Elle com mence fort heureusement à se retrouver un peu, sans quoi je ne sais trop en quoi cela aurait fini.
Vous allez donc écrire au roi ! Prenez garde de ne pas compromet tre la responsabilité ministérielle, en attribuant au maître ce qui émane constitutionnellement des serviteurs. Vous me comprenez. Adieu, ma chère amie, je vous embrasse de tout mon cœur, vous, Sophie, Agathon, votre bonne mère et tutti quanti. Caroline en fait autant et vous prie de faire remettre la lettre ci-jointe à votre mère. Elle a voulu profiter du départ de M. de Stassart. pour se rappeler à son souvenir. Elle aurait également écrit à Sophie, si elle n’avait pas craint que sa lettre arrivât dans les moments d’embarras et de souffrance qu’elle attend. Tout à vous. Demandez à M. de Stassart de se charger de votre réponse à la présente brochure (pétition)
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J’ai fait votre commission indirectement, c’est-à-dire par le canal de van den Horst, à l’évêque de Liége. Celui-ci étant malade, je n’ai pu le voir, mais son hôte n’aura pas manqué de lui expliquer l’objet de ma visite. De réponse, je ne puis vous en donner pour le moment ; mais aussitôt que M. van Bommel sera visible, je tirerai tout au clair.
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M. de Stassart me charge de vous dire que votre pétition a été envoyée hier soir, vendredi, au président après une délibération sur son contenu entre MM. de Gerlache, de Langhe, de Brouckère d’Omalius-Thierry et de Sécus.
Je vous embrasse, L.
Comment vont Sophie, Agathon, et votre bonne mère ? Encore un mois, mon ami, et tout ira mieux. En attendant, ne vous inquiétez pas pour le moment des couches. Puisque Julie sera là, vous devez être rassurés.
Envoyez-leur de suite le mémoire à consulter, ils le demandent ; et publiez, ils le désirent. Ils s’accordent à croire au succès : Les conver sations particulières ont tellement préparé la Chambre à voter en faveur de la proposition que peu de gens pourront s’y refuser. Au fond, votre demande est si juste, qu’il faudrait se boucher les oreilles et le sens commun pour ne pas en convenir. Plusieurs comptent aussi sur le rejet du budget ; moi pas.
de moi pour leur éducation et servez-leur des bons légumes et quelquefois un poisson, par-dessus le marché. Vous en tâterez j’espère au printemps prochain.
Chère amie, Souvenez-vous(…)
Ces messieurs l’ont lue et approuvée en tous points ; même résolu tion pour celle de votre collègue, mais ils n’ont pas été fort contents de sa rédaction qui sent trop le jeune homme. Le projet de loi sera présenté par les mêmes députés, et de plus MM. et Celles et Le Hon : ainsi, il le sera par huit Membres. La rédaction que vous avez proposée sera modifiée un peu.
Louis adresse, le 22 avril, un courrier admiratif à son défenseur Van de Weyer : (…) Mon ami, vous avez été sublime. Raison, force, logique, clarté, sentiment, éloquence, vous avez tout réuni au plus haut degré. Il faut que vous soyez bien mon ami pour que je ne vous envie pas un si beau talent ! Mon ami, les invectives du ministère public m’avaient laissé froid ; j’avais fini par m’endormir. Vous m’avez fortement remué, profondément ému. Mon âme a sans cesse répondu à la vôtre. Je vous admire beaucoup ; mais je vous aime encore plus.
Giorgio Libri Bagnano (1780-1836), toscan d’origines aristocratiques, adop te les idées républicaines et on le retrouve en France après le traité de Campo Formio de 1797. Il est bientôt poursuivi pour escroquerie, mais relaxé. Rentré en Italie, devenu bonapartiste, il complote en faveur de Napoléon après la première abdication et à l’issue des Cents Jours rejoint les “Sublimes Maîtres Parfaits” de Buonarroti.
Nous fûmes, écrit de Potter, placés dans des voitures, malgré nos réclama tions, et transportés au lieu où se tenaient les assises, sous l’escorte de neuf gendarmes. La lutte, je l’appelle ainsi, car c’étaient bien deux partis en pré sence, l’opposition et le gouvernement, la lutte fut aussi longue qu’animée : elle dura quinze jours, au bout desquels le président, à qui il fallait bien de servilité pour courir ainsi les mêmes chances que le chef de mes premiers condamnateurs, prononça, pâle comme un mort, l’arrêt de huit années de bannissement et huit autres de surveillance de la haute police pour moi, sept années pour MM. Tielemans et Bartels, et cinq pour l’imprimeur du “Catholique” M. de Nève.
Belles paroles, mais l’amitié disparaîtra bientôt comme celle avec Gende bien dont il dit le 5 juin, paroles prémonitoires, que M. Gendebien ne perde pas de vue qu’il est appelé à jouer un grand et beau rôle dans notre patrie.
Libri Bagnano, un escroc au service du pouvoir
Trois jours après, le fameux texte incriminé paraît chez Libri Bagnano. Le travail avait donc été réalisé bien avant le procès grâce à des fuites organisées par le pouvoir. L’occasion nous est ici donnée de parler de ce personnage véreux.
Réfugié en France lors de la répression autrichienne, il est à nouveau jugé en 1816 par la Cour d’assises de Lyon, condamné à dix ans de travaux
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La popularité des victimes était telle que les frais du procès, les amendes, les dépenses de l’exil furent couverts par une souscription publique dont de Potter tiendra scrupuleusement un décompte justificatif.
Pour son malheur futur, de Potter avait connu à Florence le fils de Libri, mathématicien de renom, et recommanda le comte, qu’il croyait être une victime politique, à Van Gobbelschroy.
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Le malfaiteur s’insinue alors dans les bonnes grâces de Van Maanen et sa librairie de la rue de la Madeleine devint le siège du “National” tout à la dévotion du pouvoir, dont le premier numéro paraît le 16 mai 1829.
forcés, à la flétrissure et à l’exposition au pilori pour faux, usage de faux et escroquerie, peine aggravée en prison à vie lors d’un nouveau jugement. Finalement, en 1825, Louis XVIII convertit la peine en exil perpétuel.
Après la mise à sac et l’incendie de sa librairie durant la nuit du 25 au 26 août 1830, il se réfugiera en Hollande où il poursuivra son œuvre antibelge, attitude qui ne cadrera bientôt plus avec la politique d’apaisement menée dans les deux pays et il finira sa vie dans l’obscurité et l’oubli.
Quant au retentissement de son procès, les pourvois en cassation introduits par de Potter et les autres condamnés furent évidemment rejetés le 16 mai et Van de Weyer vit son zèle d’avocat de la défense bien mal récompensé puis qu’il fut relevé de ses fonctions à la Bibliothèque de Bruxelles où il veillait, entre autres, sur les manuscrits de la Librairie de Bourgogne qu’il viendra défendre, les armes à la main, durant les journées de septembre 1830.
Devant le flot de calomnies que cette feuille déverse sur lui, de Potter publie dans “Le Courrier” la copie du jugement de Lyon. Les journaux d’opposition dévoilent également les versements de centaines de milliers de florins que Libri a reçus du gouvernement ce qui rend le “forçat libéré” encore plus hargneux.
Peuple, soyez attentif. L’attitude que vous allez prendre, pendant que vos mandataires délibèreront sur le pacte qui doit vous régir, en dé terminera la nature. Montrez-vous calme et fort. Que les intrigants de salon ne puissent arguer, ni de votre indifférence pour prouver qu’il est nécessaire de vous enchaîner. Ne voulant que ce qui est de droit, vous serez sûr de l’obtenir ; car la juste volonté du peuple est toujours la loi suprême : sous les rois ce sont les révolutions qui l’exécutent ; sous la République, elle comble l’abîme des révolutions. Union, constance, nationalité, voilà notre devise ; liberté, économie, éga lité, notre but ; justice, force, ordre public, les moyens de l’atteindre.
Vous m’avez rendu justice, messieurs : quoique rentré dans la vie privée, je n’en suis pas moins citoyen belge, et je mettrai toujours ma gloire à me montrer digne de ce titre. Quels que soient les ser vices que la patrie réclame de moi, je serai prêt en tout temps à me vouer entièrement à elle, et à lui consacrer ma fortune et mon existence.
Lettres de Louis de Potter retrouvées dans ses archives personnelles
Mais c’était un sacrifice à faire aux principes, et j’ai l’intime convic tion que sur les principes seuls pourra se fonder un jour l’édifice inébranlable de notre société.
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Louis de Potter - Bruxelles, le 8 décembre 1830.
Ma démission comme membre du Comité central de la Belgique a été pour moi un devoir pénible à remplir, à l’époque précisément où il allait être question de fixer le sort de notre patrie.
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Je finis, messieurs, en vous offrant, avec l’expression de ma plus sincère reconnaissance, le tribut de mon admiration pour votre zèle éclairé et pour votre patriotisme à toute épreuve.
Louis de Potter - Bruxelles, le 31 octobre 1830.
Signé Louis de Potter.
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Lettre de Louis de Potter à un éditeur à Gand (probablement le comte Vilain XIIII)
Lettre de Louis de Potter à Sylvain Van de Weyer
Mon ami, Me voici à Lille, craignant et ayant beaucoup de motifs de craindre qu’il faudra en partir demain sans en être chassé. A la porte, on ne m’a rien dit : il est vrai que mon passeport n’y a jamais été ouvert. Dans une heure d’ici je vais en personne à la police, comme si j’y voulais une passe provisoire pour Paris ; je n’y demanderai fort hon teusement qu’un visa pour Bruges. Cependant, espérons encore. Je fermerai ma lettre à mon retour, et quoi qu’il arrive, je la mettrai à la poste à Courtray. Donnez, je vous prie, de mes nouvelles à tout le monde et surtout n’oubliez pas l’excellent Weissenbruch. J’ai mon passe provisoire pour Paris : Je n’ai même plus autre chose, car mon passeport belge est parti pour Paris à ma place.
Bruxelles, le 6 avril 1826. Mon cher confrère, Je vous envoie cent prospectus, trente actions, dix circulaires et une liste. Répandez les premiers, et accompagnez-les d’une circulaire si vous le jugez utile. Distribuez les actions à ceux qui le demanderont, et tenez-en note sur la liste ad hoc. Je ne vous recommande ni le zèle ni l’exactitude : ce sont en vous des qualités innées. SVP. Parlez de notre société et de son prospectus dans le “Journal de Gand”. Non vi dirò neppure di volermi bene, perchè credo che lo facciate natural mente, come fò io a vostro riguardo. Perdona-temi questa scappata sul territorio di una nazione, la di cui lingua avrete poi forse l’inten zione di studiare. Mi preme di sapere se vi dei rapidi progressi. Vi abbraccio cordialissimamente.
Signé Louis de Potter.
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Vous vous souvenez que la pétition devait être présentée pas M. de Stassart et qu’ensuite huit Membres devaient faire une proposition pour la mise en liberté de MM. de Potter et Ducpétiaux.
D’abord, cette proposition a paru trop spéciale a quelques-uns d’entre eux. Ils ne s’expliquaient pas comment le législateur peut s’occuper d’un particulier, tandis que les lois sont faites pour les généralités. On a donc résolu de généraliser la proposition et l’on s’y est déterminé d’autant plus volontiers qu’on espère réussir plus tôt en ne nommant ni M. de P… ni M. Ducp…
Extrait de la lettre en codes secrets de Sylvain Van de Weyer à Louis de Potter retrouvée dans les archives personnelles de Louis
L’adresse portait : Monsieur de Potter, place Saint-Michel, 595 (4), à Bruxelles.
27 novembre 1829. Ma chère amie,
Vous verrez cette proposition dans les journaux et je pense que vous en serez satisfait. La femme de soixante ans a été consultée sur sa rédaction et l’a approuvée sauf quelques mots impropres qui ont été remplacés par d’autres. Cela fait, les huit Membres se sont réunis et, d’un commun accord, on a décidé qu’il fallait limiter le nombre des signataires, attendu que plusieurs choses et Sophie également. D’un autre côté, vous avez un excellent accoucheur et une fort bonne garde. Tout cela est quelque chose. Quant aux for malités à remplir, je crois que vous pouvez compter sur Alexandre. Donnez-moi des nouvelles sur le ménage, sur votre position actuelle et la manière dont on vous traite.
Adieu, je vous embrasse et Caroline aussi. Mille choses à votre ma man et à Sophie. Du courage et de la persévérance. Rira bien qui rira le dernier.
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Il serait imprimé 1.100 cartes, représentant une valeur de fr. 5 en pain et en houille, délivrables aux dépôts.
Extrait des textes de Louis de Potter retrouvés dans ses archives personnelles
Ils sont extraits textuellement d’un écrit philosophique que je rédige pour l’instruction des enfants, espèce de testament intellectuel et moral, dont ceux-ci feront après ma mort tel usage qu’ils jugeront convenable, et où le récit des principales circonstances de ma vie forme un chapitre.
(…)
S’il m’arrive quelque malheur, veuillez employer sans délai une part de mon argent de la manière suivante : M. l’abbé de Haerne, pour le Comité polonais fr. 832,60 M. de Heyn, pour les pauvres de Bruxelles fr. 5.500,00 M. Julien, pour les pauvres de Bruges fr. 5.500,00
Mon dernier témoignage, je le fais en vous adressant un exemplaire de mes souvenirs personnels ci-joint.
Total : 11.832,60
Mes bien chers enfants,
Je voudrais que les fr. 5.500, tant ceux pour Bruges que ceux pour Bruxelles, fussent employés en achat d’approvisionnements en houille et en pain. Ces comestibles et chauffage seraient déposés en lieux et mains sûrs.
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De Potter se tourne alors vers la Prusse. Escorté par la maréchaussée, il se rend à Vaels, dernier village belge avant l’Allemagne. Un quiproquo lui avait fait croire à l’acceptation de celle-ci, mais depuis l’époque du pre mier exil, les choses avaient évolué : installé au bord du Rhin, le royaume de Frédéric-Guillaume III enserrait comme dans un étau les petits états d’Allemagne centrale qui étaient destinés à entrer bientôt dans son orbite. Devenus voisins immédiats de la France, le souverain et son gouvernement craignaient la contagion révolutionnaire et désiraient, provisoirement, vivre en paix le long de leur glacis rhénan. Louis essuie donc un nouveau refus notifié, in extremis, par les autorités d’Aix-la-Chapelle alors qu’il a déjà franchi la frontière. Toujours accompagné des gendarmes, qu’ils doivent défrayer de leur poche, c’est donc le retour à Vaels où, pendant deux mois, logés – ironie – à l’auberge du Prince d’Orange, ses compagnons et lui rongent leur frein.
Cette solitude est brisée par l’arrivée de Madame de Potter et de l’épouse de Tielemans, accompagnées de leurs trois petits enfants qui, espérant rejoindre leurs maris, avaient également été refoulées du territoire allemand.
Finalement, un courrier daté du 7 juin, leur annonce que le canton helvé tique de Vaux accepte d’accueillir les proscrits. De Potter adresse une der nière lettre au roi : Sauvez la Belgique, sauvez la Belgique, il en est temps encore ; mais hâtez-vous de la sauver : car il pourrait n’en être plus temps
Les condamnés avaient espéré trouver asile en France. C’était sans compter avec le gouvernement réactionnaire de Charles X. Le président du Conseil, le Prince de Polignac, qui n’avait rien appris, rien oublié depuis l’émigra tion, peaufinait ses ordonnances destinées à briser l’opposition libérale, préparant ainsi sa propre chute, celle des Bourbons et l’avènement de Louis-Philippe d’Orléans, trois mois plus tard.
Il n’était donc pas question pour lui de tolérer la présence sur le sol du royaume à la fleur de lys de dangereux agitateurs, ce fut un “non” caté gorique. D’où une volée bois vert de la part de Louis : (…) Charles X, congrégationiste bigot par haine pour la liberté, ne voulait pas de nous qui étions en butte aux persécutions de Guillaume, intolérant jésuite par la même haine
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L’exil une fois de plus…
Circulaire du ministre de l’Intérieur et de la police prussienne aux Commissaires de districts pour faire arrêter de Potter & co.
Régence royale, département de l’intérieur Lettre de M. le ministre de Prusse pour soutenir les fugitifs-exilés de Potter & co. La Haye, ce 26 juin 1830. Messieurs, je suis fâché d’apprendre, par lettre que vous m’avez fait l’honneur de m’adresser en date du 23 de ce mois, les difficultés que vous rencontrez à la frontière prussienne pour traverser les provinces rhénanes. On aurait pu les prévenir si le gouvernement des PaysBas s’était entendu avec celui de Prusse. J’ignore quels sont à cet égard les ordres donnés à M. le Directeur de la police à Aix-la-Chapelle ; mais je viens d’écrire à M. le président Reimans, et ne doute pas qu’il fera de son côté ce qui dépend de lui pour faciliter votre passage. Je regrette de ne pas pouvoir y contribuer d’une manière plus efficace, et je vous prie, de recevoir les assu rances de ma parfaite considération.
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Paroles prémonitoires car, ayant enfin pu franchir la frontière, il apprend les évènements parisiens : les ordonnances parues le 25 juillet ont provoqué le soulèvement populaire : ce sont les “Trois Glorieuses” (27/29 juillet), et l’abdication de Charles X, le 2 août. Changeant alors leur plan, après avoir longé le Rhin et fait un crochet par Strasbourg, les exilés gagnent Paris.
Signé : Le comte Waldbourg-Truchess.
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Le ministère royal de l’intérieur et de la police a arrêté, le 13 courant, qu’il ne sera point permis de séjourner dans les provinces rhénanes à MM. de Potter, Bartels, Tielemans, et de Nève, condamnés au bannissement dans les Pays-Bas pour délits politiques, si l’un ou l’autre de ces délinquants se présente dans lesdites provinces, non plus qu’aux personnes qui seraient publiquement connues pour partager leur exil. En vous communiquant cet arrêté, d’après une décision de la suprême pré sidence royale des provinces du Rhin, en date du 22 de ce mois, nous vous enjoi gnons d’envoyer sans délai aux agences de police de votre cercle, l’ordre de faire immédiatement transférer au-delà des frontières, par voie de transport militaire, les coupables susmentionnés, aussitôt qu’ils auront été aperçus sur le territoire prussien. Le cas échéant, vous nous en donnerez avis. Dusseldorf, le 27 mai 1830.
Cependant, les spectateurs tel un torrent sortent de l’opéra, se déversent sur la place de la Monnaie, les cafés dont les consommateurs se joignent à eux se vident, et les manifestants se muent en émeutiers qui vont saccager et brûler la librairie de Libri Bagnano, s’en prennent à la maison du direc teur de la police de Knyff, rue de Berlaimont, à celles de Van Maanen (“le Polignac Belge”) au Sablon et du procureur Schuermans, rue du Poinçon, aux cris de “Vive de Potter ! Vive la Liberté !”.
La police débordée devant l’ampleur que prennent les évènements fait appel à l’armée, forte d’un millier de fantassins à peine pour toute l’agglo mération. Les soldats dispersés, isolés, faute d’ordres énergiques restent le plus souvent l’arme au pied et se font même désarmer par les émeutiers.
A ce moment à Bruxelles, le rétablissement d’un impôt sur la mouture et des festivités onéreuses prévues pour l’anniversaire du roi avaient déjà suscité la colère.
La nuit s’achève dans la plus grande confusion d’autant que devant l’évo lution insurrectionnelle de la situation, les bourgeois quittent les lieux et laissent la rue à une foule décidée à en découdre avec les représentants du pouvoir hollandais. Des agitateurs, dont certains seraient venus de France (ce qui n’a pas été formellement démontré), se mêlent aux manifestants, brandissent des drapeaux rouges ou tricolores et lancent des slogans répu blicains et même rattachistes.
La “Muette” fait parler la poudre
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Le ministre van Gobbelschroy qui est dans la salle ne semble pas mesurer l’ampleur que prennent les évènements et estime, comme le rapporte le comte Vilain XIIII, qu’un peloton d’agents de police suffirait après la pièce pour disperser ces quelques trublions
Des affichettes apparaissent : Lundi feu d’artifice, mardi illumina tion, mercredi 5 révolution. Si le feu d’artifice et les illuminations sont an nulés vu le mauvais temps – il fait un soleil resplendissant – la censure qui l’autorise n’avait sans doute pas lu le livret de la “Muette de Portici” l’opéra d’Aubert, livret de Scribe, où il est question de la révolte, en 1647, des Napolitains conduits par Masaniello contre le vice-roi espagnol à la suite d’un impôt sur les denrées. Le 25 août, lorsque le ténor français Lafeuillade attaque le duo fameux Amour sacré de la patrie. Rend-nous l’audace et la fierté, c’est l’explosion.
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Le vieil ennemi de Louis, le procureur Schuermans, conclut même à une conspiration inspirée depuis Paris par de Potter ce que Gendebien parti san, au début, d’un rattachement à la France démentira.
Face la carence des autorités, quelques hommes énergiques (Ducpétiaux, Delfosse, Vanderlinden) organisent, le 26, une garde bourgeoise dont le commandement en second est confié en un premier temps à Pletinckx, ancien maréchal des logis de hussards, le baron Emmanuel van der Linden d’Hoogvorst nommé à la tête de celle-ci étant absent.
Sur ces entrefaits, à Paris, de Potter, informé de la situation bruxelloise, ren contre La Fayette, glorieux vestige des temps anciens (il a septante-trois ans), qui a pris le parti de Louis-Philippe. Le “héros des deux mondes”, craignant la naissance d’une république en Belgique, interroge Louis à propos d’une possible réunion à la France à laquelle celui-ci est évidemment opposé com me le sera le nouveau souverain Orléans attentif à la réaction des Puissances devant le retour possible à des frontières gagnées par la révolution.
Alors qu’un drapeau français apparaît sur la façade de l’Hôtel de ville, Ducpétiaux se précipite, au coin de la rue de la Colline et de la rue aux Herbes Potagères, chez un commerçant en tissus, François Abts, dont l’épouse coud à la hâte, perpendiculairement à une hampe, trois bandes de tissus rouge, jaune et noir (les couleurs de la première révolution bra bançonne de 1789). Ducpétiaux arrache les couleurs étrangères du balcon de la maison de ville et y substitue le nouvel emblème. Le premier drapeau belge est né. Un arrêté du Gouvernement provisoire du 23 janvier 1831 décidera que les bandes seraient disposées verticalement et non horizon talement, le rouge à la hampe. Finalement, le 12 octobre 1831, le noir viendra à la hampe pour donner la bannière actuelle.
D’une manière générale, les dirigeants de l’opposition ne sont pas non plus favorables à un rapprochement. Le “Courrier des Pays-Bas” qui est leur organe officieux, pressentant les évènements, écrivait déjà le 19 août : Si donc la Belgique a des titres pour demeurer elle-même, nos voisins du Midi doivent comprendre qu’il n’entrera jamais dans nos vues ni dans nos intérêts de devenir simple province de la France…
Pendant ce temps, le 26 et le 27 août, l’émeute se déplace vers les fau bourgs et tourne à la révolte sociale. Destruction de machines génératrices de chômage, vols, décident les bourgeois à renforcer la Garde bourgeoise
Informé seulement le 27 des évènements bruxellois, le roi envoie son fils aîné, le Prince Guillaume, s’enquérir de la situation. Populaire auprès des Belges, on lui avait construit, grâce à une souscription nationale, une résidence devenue l’actuel Palais des Académies (où siège la Fondation de Potter). Orange, accompagné de son frère Frédéric qui cantonne à Vilvoorde à la tête de 6.000 hommes, pénètre le premier dans la ville avec une escorte réduite, tandis qu’à La Haye, le gouvernement siège sans trop savoir quel parti adopter.
Le Prince d’Orange, dont les relations avec son père n’avaient pas toujours été au beau fixe, obtient pour sa part l’assurance que la monarchie ne sera pas mise en question. On y verra un calcul dont la solution aurait été de le voir devenir souverain des provinces du sud. Là encore, les preuves formelles font défaut.
qui ouvre le feu sur les pillards. Les premiers morts de la révolution en marche sont des Belges tués par d’autres Belges.
Tandis que se déroulaient les affrontements, la situation avait pris un tour nant nouveau sur le plan politique. Gendebien ayant lancé l’idée d’envoyer une délégation au roi pour lui faire connaître les griefs à “redresser”, une réunion s’était tenue dans la soirée du 28 à l’Hôtel de ville et une qua rantaine de personnes, essentiellement des notables et des journalistes de l’opposition avait désigné Frédéric de Mérode, François de Sécus, Emma nuel d’Hooghvorst, catholiques, Alexandre Gendebien et Joseph Palmaert, libéraux, pour se rendre à La Haye où il sont reçus par le roi le 30 août. Souci d’apaisement, crainte du républicanisme affiché par de Potter, désir de mener un jeu personnel, toujours est-il que Gendebien écrit à ce dernier pour lui demander de ne pas revenir à Bruxelles pour l’instant.
Sous l’apparence de la concorde, les relations entre les deux hommes commencent dès lors à se dégrader et aboutiront dans quelques mois à la rupture Jusqu’autotale.3septembre, un chassé-croisé aura lieu entre trois pôles d’indéci sion : le palais de La Haye, celui du Prince d’Orange à Bruxelles et l’Hôtel de ville de la capitale. En trois jours, les positions vont évoluer du redres sement des griefs à la réclamation de la séparation administrative du nord et du sud du royaume.
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Le 3 septembre, le prince, escorté par un détachement de la garde bour geoise à cheval, quitte la ville en promettant d’appuyer les revendications
A Paris, de Potter s’adresse au peuple belge dans “La Tribune” où il presse celui-ci de déclarer : L’indépendance parlementaire et administrative de la Belgique, la fédération immédiate de toutes les provinces, la réunion d’un Congrès constituant et la formation d’un gouvernement révolutionnaire provisoire.
Le 9, il écrit à Gendebien : Si le Roi Guillaume n’accepte pas d’être roi des Belges, s’il ne déclare pas franchement et hardiment votre indépendance, alors, érigez-vous en république fédérative séparée de la Hollande. L’idée qu’il avait déjà avancée et qui est remise en avant par le “Courrier des PaysBas” sera reprise par Gendebien, certains diront récupérée à son profit.
Le même jour, Charles Rogier arrive avec 250 Liégeois dépenaillés sur les 700 partis de la cité ardente, ce qui ne concourt pas à l’apaisement et accentue la pression républicaine qui s’exprime au sein de la “Réunion centrale”, comité dont le style rappelle celui de la France de 1789. Devant la situation qui atteint un point de rupture, les deux parties, belges et hollandaises, cherchent à connaître l’attitude que prendront les Puissan ces en cas de conflit ouvert.
La France qui attend la reconnaissance internationale de la Monarchie de juillet, “ne veut pas d’une république à une journée de marche de Paris”, ni inquiéter l’Europe par un soutien au soulèvement qui s’annonce. FrédéricGuillaume III de Prusse, nous l’avons vu, ne désire pas s’engager au-delà du Rhin. L’Angleterre, à son habitude, adopte le wait and see. L’Autriche est davantage préoccupée par l’Italie que par le devenir de ses anciens sujets. La Russie qui interviendrait volontiers est loin.
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En réalité, tous les Etats avaient compris, avant Guillaume, que l’amalgame – qu’ils avaient décidé en 1814, il est bon de le rappeler – est un échec.
belges, notamment celle d’une union personnelle de Guillaume avec le sud, alors que le roi convoque les Etats généraux pour le 13 à La Haye. Gendebien, sans illusion, écrit à de Potter : Le prince s’en va, et avec lui toutes nos espérances. Les jours suivants sont calmes, on attend la réaction royale. Une fois de plus le souverain temporise et le 7, c’est la conster nation. S’il démet Van Maanen, il exige le retour à l’ordre et à la loi alors qu’Orange et Van Gobbelschroy lui conseillent la séparation.
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Parmi les exaltés, Pletinckx, chef de la garde bourgeoise, abandonne la Com mission dont il est membre et exige le combat. Heureusement, d’Hoogvorst est l’un des seuls à garder la tête froide et rallie une partie de la garde bour geoise, ce qui malheureusement ne suffira pas, car le 18, c’est l’anarchie totale : pas de députés, ils sont à La Haye, la bourgeoisie terrée chez elle ou en fuite, les nobles retirés dans leurs châteaux, la garde bourgeoise
Les députés belges (de Stassart, de Sécus, Surlet de Chocquier, de Gerla che…) qui se rendent à la convocation des Etats généraux sont conspués, menacés par les Hollandais dont les journaux s’enflamment : Plus de négociations ! La guerre ! Guerre aux rebelles, aux assassins, écrit le “Nederlandsche Gedachten”.
Le 17, la session des Etats est ouverte par un discours de Guillaume qui une fois de plus temporise, et le 21, par 81 voix sur 100, la seconde Chambre, Belges et Hollandais confondus, vote une adresse favorable à la séparation. Sitôt connu le texte de l’allocution, 200 à 300 personnes arpentent les rues du centre de Bruxelles en vociférant : “Vive de Potter ! Vive la Liberté ! Vive Napoléon !”. Et si la Garde bourgeoise disperse sans dommage la ma nifestation, il était apparu urgent de prendre une attitude claire devant la situation. Une réunion des sections de la garde avait donc été convoquée le 15 à l’Hôtel de ville. Loin de calmer les choses, elle avait mis en évidence l’opposition entre radicaux et modérés.
Frondeur mais lucide, de Potter anticipe et évoque le partage du gâteau, auquel vous pouvez en toute sûreté de conscience procéder sans moi. Le 17, il renchérit dans la ligne dure en évoquant les 8.000 hommes, tous Belges (ce qui nous paraît assez optimiste) prêts à marcher sur Bruxelles, tout en se plaignant que Gendebien et Van de Weyer lui demandent de rester jus qu’à nouvel ordre dans la capitale française. On devine une fois de plus la faille qui s’ouvre entre les ténors.
Ces derniers, formant la Commission de Sûreté publique (Van de Weyer, Gendebien…) désirent temporiser pour ne pas déforcer les délégués aux Etats généraux. Mais les membres de la Réunion centrale, Rogier, Ducpétiaux, Chazal et curieusement des étrangers comme l’Espagnol Juan van Halen, des carbonari en exil, des bonapartistes en disponibilité, sans mandat aucun, arrachent littéralement le 20 septembre le pouvoir des mains de la Commission. Ils envoient des délégations en province et celleci s’agite à son tour. A Gheel par exemple, on crie “Vive le Prince de Ligne ! Vive la Liberté ! Vive de Potter !”, étrange amalgame, on en conviendra.
Pendant ce temps, seuls d’Hoogvorst, Pletinckx et le docteur Grégoire, demeurent à leur poste et reforment la garde bourgeoise, face à la pro gression des cohortes du Prince Frédéric qui avancent vers la capitale. Le 2 octobre, le Gouvernement provisoire décidera la formation d’une garde civique dans toutes les communes du pays et le 31 décembre suivant le
Les journées décisives
A ce moment, de Potter est mal informé car il ignore que la bourgeoisie est en train de changer d’attitude à son égard devant la révolte sociale qui s’étend parce qu’il suffirait à celui-ci poser le pied sur notre sol pour être suivi à l’instant de tout le peuple qui l’aime et qui met en lui une confiance sans bornes (lettre de de Gatti de Gammond à Tielemans).
En réalité, un malentendu règne entre Louis et la classe possédante car, quand il parle du peuple ou de la république, c’est d’une manière litté raire, théorique, presque abstraite. Si, à l’époque, il connaît les questions institutionnelles et politiques, la réalité sociale lui est mal connue, ce qui se modifiera dans quelques années. Et pourtant, son heure de gloire va sonner...
Devant la situation, Gendebien, Van de Weyer et ceux qui avaient la tête politique comprirent que le mouvement se désagrégerait faute d’un chef dont l’autorité s’imposât à tous. Ce chef, ce sera, provisoirement, Louis de Potter. Gendebien, qui a quitté discrètement Bruxelles le 18 au soir, ren contre Louis entre le 20 et le 22, d’abord à Lille où il se trouve avec sa mère puis à Valenciennes en compagnie des ténors qui avaient prudemment pris le large devant la tournure des évènements (Van de Weyer, van der Smissen, Niellon, Chazal, Vandermeeren, Levae…). Mais de Potter refuse de se join dre à eux et retourne à Lille.
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désarmée par la populace alors qu’une intervention de l’armée royale se profile. Le Prince d’Orange qui, en signe d’apaisement, s’était replié sur Anvers, a reçu l’ordre de revenir sur Vilvoorde avec 10.000 hommes et 30 canons.
Monsieur Van de Weyer nous annonça que tout était définitivement perdu, écrira-t-il, ce à quoi Gendebien répondra bien à posteriori : On a mauvaise grâce d’insulter, de calomnier ceux qui eurent un moment de défaillance fort excusable, en présence de l’effroyable anarchie qui a précédé les com bats de Bruxelles. Vae soli ! (traduction litérale : Malheur au solitaire !)
Ils en seront pour leur frais car après avoir passé, par un temps affreux, la nuit du 26 et le 27 dans une chaumière, ils apprendront que, déjouant leur plan, Louis, prévenu par des résistants, est passé par Enghien Sincérité ou calcul, il écrit à Van de Weyer : Je suis aux portes de Bruxelles. La victoire est à nous : il n’y a plus qu’à en profiter. Mes amis, si je ne vous suis pas absolument indispensable, permettez-moi de retourner tout de suite à ma mère, à ma femme, à mes enfants, à mes occupations. J’aurais voulu vous être utile. Vous n’avez plus besoin de personne. Laissez-moi ma liberté.
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Rogier qui a quitté son refuge revient et fait appel à don Juan van Halen, un militaire professionnel, lequel organise les groupes épars alors que des volontaires arrivent peu à peu de province.
Congrès national décrète la loi contenant institution de la Garde civique. Celle-ci subsistera jusqu’au 11 juin 1920, date de sa dissolution.
Les combats se poursuivent les 24 et 25 septembre et le goulet entre l’ac tuelle place des Palais et la place Royale, où le canon de Charlier dit Jambe de Bois fait merveille, devient le centre de ceux-ci. Le 27 au matin, le prince ordonne la retraite.
Loin d’être une guerre d’opérette, ces “Quatre Glorieuses” feront près de 600 morts et un millier de blessés au sein de l’armée royale, qui compte des Belges dans ses rangs, et 400 morts et 1.200 blessés parmi les insurgés.
Alors qu’Orange se replie, de Potter franchit la frontière. Le 28, il hésite encore quant à la marche à suivre, mais il est emporté par une vague populaire. A Grammont, un petit groupe d’orangistes a formé le projet de l’enlever et de le conduire en Hollande, moyen radical pour décapiter la révolution en marche.
Le 23, la “Muette de Portici” retentit, jouée par les musiques militaires de l’armée, en réplique à l’émeute du 25 août et, à huit heures du matin, entrant par les portes de Schaerbeek et de Louvain, les troupes avancent jusqu’au parc. Les combats vont dès lors se concentrer dans le haut de la ville car, aux portes de Laeken et de Flandre, la cavalerie piétine : le sixième hussard qui avait brillamment combattu à Waterloo est sévèrement étrillé par les défenseurs qui sont essentiellement des ouvriers et de petits artisans bruxel lois et des faubourgs. Dès le début des combats, le général Trip, se souve nant de l’exemple parisien récent, a compris qu’une armée habituée à se battre en rase campagne a peu de chance de conquérir une ville aux ruelles et impasses nombreuses d’autant que le Prince Frédéric se refuse pour sa part à utiliser l’artillerie lourde qui provoquerait un bain de sang.
Le discours de Louis de Potter sur la Grand-Place de Bruxelles, le 28 septembre 1830 vers 19 heures
Mes chers concitoyens : Me voici au milieu de vous. L’accueil que vous m’avez fait m’a vivement ému, il ne sortira jamais de ma mémoire. Je ferai tout pour me rendre digne de vous et de la patrie. Brave peuple belge, vous avez victorieusement vaincu. Sa chez profiter de la victoire.
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A présent, rentrant de son exil français, arrivant aux portes de Bruxelles le 28 septembre vers 18 heures, les chevaux de la voiture, prêtée par M. Rodenbach à Roulers, furent aussitôt dételés, malgré l’opposition et les instances formelles de l’honorable voyageur.
M. de Potter rencontra plus de 20.000 citoyens, parmi lesquels on remarquait une foule de nos braves blessés ; sa voiture fut littéra lement tirée et portée à bout de bras jusqu’à l’Hôtel de ville. On n’entendait que les cris “Vive de Potter ! Vive le défenseur de nos libertés ! Vive les Belges !”, etc.
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En sortant de sa voiture, il fut porté sur les bras de plus 10.000 personnes qui se trouvaient sur la place, et ce n’est qu’avec la plus grande peine qu’il est parvenu à entrer dans l’Hôtel de ville.
C’était au cri de “Vive de Potter ! A bas Van Maanen !” que les premiers mouvements insurrectionnels avaient eu lieu en Belgi que, à la fin d’août et au commencement de septembre.
Là, il fut reçu par ses collègues du Comité révolutionnaire, qui tous se précipitèrent vers lui et l’étouffèrent pour ainsi dire leurs Leembrassements.peuplebelgele demandait à hauts cris au balcon. Louis de Potter s’y présenta accompagné du baron d’Hoogvorst. Il remercia ses braves concitoyens de l’accueil, vraiment admirable, qu’ils lui avaient fait, et leur jura que désormais il était tout à eux et que rien ne lui coûterait pour aider à les soustraire du joug des Hollandais.
Soyons unis, mes chers concitoyens, et nous serons invincibles. Conservons l’ordre parmi nous ; il nous est indispensable pour conserver notre indépendance.
La politique peut reprendre ses droits
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Le 23, une Commission administrative, composée d’Hoogvorst, de Rogier, de Jolly et de Coppin s’était mise en place, bientôt rejointe par Gendebien, Van de Weyer, de Mérode pour former, le 26, un Gouvernement provisoire, il faut bien le reconnaître, autoproclamé face à l’urgence et dont les mem bres sont des trentenaires exaltés. Le plus âgé, Gendebien, en a 41 et de Potter, avec ses 44 ans, fait figure d’ancêtre.
Par une manoeuvre subtile inspirée par Gendebien, le petit groupe dé cide le 28 de s’adjoindre de Potter, alors héros national, comptant l’utiliser pour détourner les ouvriers de la lutte des classes au seul profit de la lutte
Vos lâches ennemis sont dans la stupeur. Ne perdons pas un ins tant. Regroupons-nous autour du gouvernement populaire qui est votre ouvrage. De leur côté, n’en doutons pas, les incendiaires que vous venez de chasser si ignominieusement de votre capitale pré parent de nouveaux crimes.
Vive la Belgique !
Il nous faut revenir quelques jours en arrière pour comprendre la partie qui va maintenant se jouer.
Liberté pour tous ! Egalité de tous devant le pouvoir suprême : la nation ; devant sa volonté : la loi. Vous avez écrasé le despotisme ; par votre confiance dans le pouvoir que vous avez créé, vous saurez vous tenir en garde contre l’anarchie et ses funestes suites. Les Bel ges ne doivent faire trembler que leurs ennemis.
Plus d’hésitation, plus de ménagements. Il faut éloigner à jamais de nos foyers les assassins qui y ont porté le fer et le feu, le viol et le carnage. Il faut sauver nos mères, nos femmes, nos enfants, nos propriétés. Il faut vivre libres ou nous ensevelir tous sous des mon ceaux de cendres.
Installé dans le cabriolet de Pierre Rodenbach, Louis chemine vers Bruxelles sous les vivats et les Chansons qui glorifient le “La Fayette belge”.
Or, dans deux mois, il sera mort politiquement. Certains craignent qu’il ne s’installe au Palais Royal en dictateur, ce qui nous vaut un échange savou reux entre Plaisant, chargé de la sûreté et Van de Weyer.
nationale (entendons : “celle des classes possédantes politisées”). Nous avions fait, dira Gendebien, de Louis de Potter, un drapeau : nous savions par expérience qu’il n’avait que la valeur d’un drapeau ; mais un drapeau, tenu et dirigé d’une main ferme, pouvait rendre de grands services à la cause… Il s’agissait ainsi d’éviter que les “blouses bleues” ne s’emparent du pouvoir au détriment des “redingotes”.
Celui-ci demande à Plaisant s’il a un appartement disponible chez lui : Oui au second… Offrez-le-lui, il n’y a point de dictateur au second étage !
Sur l’initiative de Louis, à l’image de la Convention française de 1792, une des premières décisions du gouvernement est de créer un Comité central exécutif dont il est le président de fait.
Dans la fièvre politique qui régnait, de Potter aura des mots particulière ment échaudés à son égard : Monsieur de Mérode, caractère tenant à la fois de l’esprit dominateur du prêtre et de l’outrageuse superbe du grand vas sal dont M. Van de Weyer disait plaisamment qu’il ne connaissait d’autre droit que le droit canon, et d’autres canons que celui de la messe. Du reste, M. le Comte n’était guère redoutable ; il n’était que gênant : ses chicanes et ses détours de sacristie ennuyaient, mais n’empêchaient rien. De Mérode pour sa part l’avait traité de “Robespierre”. Clin d’œil de l’histoire : malgré
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Voiture dételée et portée à bras, arrivé à 18 heures à l’Hôtel de ville, inté gré immédiatement au Gouvernement provisoire, d’Hooghvorst le présente au balcon. C’est l’apothéose pour le héros, dont les 20.000 personnes qui l’acclament n’ont probablement lu aucun des textes, mais qui incarne la Liberté. Pour les observateurs, il ne fait aucun doute que primus inter pares il est, comme l’écrit l’ambassadeur d’Autriche au chancelier Metternich, “le véritable chef du Gouvernement provisoire”.
Le Comité intègre les différents courants qui vont dès lors s’affronter : Rogier et Van de Weyer représentent la tendance républicaine modérée, ils changeront bientôt d’orientation, de Mérode – bon sang ne peut men tir – penche pour la monarchie, ce qui rassure les catholiques.
Rapidement, il se repentira aussi d’avoir accepté une charge gouvernemen tale car il perdait ainsi sa liberté de manœuvre, ce qui était le but de ses désormais adversaires politiques, il écrira (mais était-il tout à fait sincère) : Je ne me doutai pas le moins du monde qu’en prêtant à ces messieurs tout l’appui de ma popularité qui était immense alors, je m’ôtais à moi-même la possibilité de la conserver, puisque, n’ayant qu’une voix au Conseil, j’assu mais sur moi la responsabilité entière de ses actes même les plus impopulai res du gouvernement que je les eusse ou ne les eusse pas voulus…
l’opposition, un mariage Mérode-Potter aura lieu et voici, à la page sui vante, un projet de Constitution conjoint.
Gendebien se voit confier celui de la Justice où il satisfait les exigences de l’opposition, entre autres, rétablissement du jury, audiences publiques. La magistrature est épurée par la révocation ou la mise à la retraite des orangistes. A ce chapitre, Louis de Potter regrettera de n’avoir pas au moins préparé la future abolition de la peine de mort.
Le Gouvernement provisoire tel qu’il se réunit le 26 septembre. Voici ceux qui en faisaient partie d’après le dessin original de P. Verhaert appartenant à M. Robert Gendebien. Debout de gauche à droite : Joly, Alex Gendebien, Sylvain Van de Weyer, baron E. d’Hooghvorst. Assis : F. de Coppin, Charles Rogier et Louis de Potter face au comte Félix de Merode. © Ceges, Bruxelles.
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Même s’il n’a pas voté pour la république, contrairement à dix-sept de ses collègues au Congrès, Louis apparaît comme un républicain et, en tous cas, le chef de file des démocrates “radicalistes”. Des commissariats spéciaux, sortes de ministères avant la lettre, viennent épauler le pouvoir central.
(M. de Mérode.)
Considérant que des agitateurs instigués et soldés par le pouvoir déchu, pour troubler les provinces, détourner l’atten tion des citoyens des élections nationales, fausser le vœu popu laire et préparer par l’anarchie le retour de l’ancienne tyrannie hollandaise ;
Il y a deux sortes de gouvernement pour un peuple. La premiè re, et c’est la seule bonne, la seule juste, la seule durable, c’est de consulter le peuple même sur la manière dont il veut être gou verné, pour savoir de lui quels sont ses besoins et ses vœux, ses opinions et ses croyances, et comment il suppose qu’on satisfera le mieux aux unes en marchant dans le sens des autres. Et de se conduire scrupuleusement envers et avec ce peuple comme il se serait conduit lui-même.
ARTICLE II. (M. de Potter)
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Toute ville occupée par des Hollandais armés qui empê chent l’action libre du Gouver nement provisoire est exclue de la participation aux délibé rations du congrès.
Note et articles constitutionnels de Louis de Potter
(M. de Potter)
(M. de Mérode.)
Toute personne, quels que soient son rang et son exis tence antérieure…
Considérant que le Prince d’Orange, qui n’est plus qu’un simple individu soumis aux lois de la Belgique, prétend exer cer un grand pouvoir dans une de ces villes, et qu’il s’y permet même de faire des actes de gouvernement, incompatibles avec l’indivisibilité du pouvoir exécutif actuellement confié au Gou vernement provisoire ;
Toute ville où se trouvent les Hol landais armés ou quelque membre de la famille des Nassau est exclue de toute participation aux délibé rations du Congrès national.
“Parallèle entre les rois Guillaume et Léopold”
Arrêté : ARTICLE Ier.
Tout membre de la famille des Nassau qui continuerait à résider en Belgique…
Ci-dessus, le portrait de Louis de Potter réalisé par son fils Eleuthère, jeune peintre de 17 ans, qui gagna un prix de l’Académie de Peinture de Bruxelles et fût primé à Paris avant de décéder à 24 ans lors d’un stage de peinture en Italie (collection familiale).
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Le portrait ci-dessous est d’un auteur inconnu, gravure reprise dans “Histoire de Belgique pour les classes d’humanité modernes”, Ed. Delaude, Bruxelles, 1965.
Mais loin de là ; voici la triste réalité qui gouvernait notre pays : consciences violées ; enseignement enchaîné ; droit de pétition mé connu ; presse condamnée à n’être plus que l’instrument du pouvoir, ou for cée au silence ; substitution arbitraire du régime des arrêtés au système légal établi par le pacte social ; confusion de tous les pouvoirs, devenus le domaine d’un seul ; imposition despotique d’un langage privilégié ; amovibilité des juges abaissés au rôle de commissaires du pouvoir ; absence complète de la garantie de la publicité et de celle du jury ; dette et dépenses énormes, seule dot que nous eût apportée la Hollande ; impôts accablants par leur hauteur et plus encore par leur réparti tion impopulaire ;
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“Congrès national belge”, le 10 novembre 1830
Au nom du peuple belge, le Gouvernement provisoire ouvre l’Assemblée des représentants de la nation. Ces représentants, la nation les a chargés de l’auguste mission de fonder sur les bases larges et solides de la liberté l’édifice d’un nouvel ordre social, qui sera pour la Belgique le principe et la garantie d’un bonheur durable.
Vous le savez, messieurs, à l’époque de notre réunion à la Hollande, une loi fondamentale fut présentée à des notables, désignés par le pouvoir, non pour l’examiner, la discuter, la modifier, et enfin l’accepter et en faire la condition du pacte entre le peuple et le chef de l’Etat, mais uniquement pour s’y soumettre aveuglément ou la rejeter dans sa totalité.
Elle fut rejetée, comme on devait l’attendre du bon sens et de la loyauté belges. Mais par un subterfuge sans exemple, elle fut déclarée acceptée, et une Constitution, imposée par la Hollande, pesa sur notre patrie. Si du moins cette loi fondamentale avait été franchement exé cutée dans toutes ces dispositions, avec le temps peut-être et à l’aide des progrès que l’arbitraire ministériel nous forçait chaque jour à faire dans la carrière de l’opposition constitutionnelle, elle aurait pu devenir l’espoir de la liberté belge.
Discours d’ouverture par Louis de Potter du premier
De si justes griefs si réels devaient aussi en assurer le résultat. Nous étions insurgés contre le despotisme pour reconquérir nos droits ; nous fûmes traités par la tyrannie comme des rebelles.
Un Gouvernement provisoire s’est établi, et il a suppléé temporairement à l’absence de tout pouvoir. La nécessité d’un gouvernement quelconque justifiait sa mission ; l’assentiment du peuple confirma son mandat.
Tout était à faire, tout était à créer. Il fallait : réorganiser l’administration intérieure, le pouvoir judiciaire, les finances, l’armée et la «garde citoyenne», sur laquelle désormais s’appuieront les empires modernes ; abolir l’impôt odieux de l’abattage ; rendre entière publicité aux procédures criminelles ;instituer un jury po pulaire ; assurer de nouvelles garanties aux prévenus devant la Cour d’assises ; abolir la dégradante punition de la bastonnade ;
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lois toujours votées par les Hollandais pour la Hollande seulement, et toujours contre la Belgique, si inégalement représentée aux an ciens Etats généraux ; siège de tous les grands corps constitués et de tous les établisse ments importants fixé dans cette même Hollande ; scandaleuse distraction des fonds spécialement destinés à favoriser l’industrie ; révoltante partialité dans la distribution des emplois civils et militaires. par un gouvernement aux yeux duquel la qualité de “Belge” était un titre de réprobation ; en un mot, la Belgique traitée comme une province conquise, comme une colonie ; tout, messieurs, nécessitait une révolution, la rendait inévitable, en précipitait l’époque.
Nos villes incendiées ; les actes les plus barbares exercés jusque sur des vieillards et des femmes ; les lois de l’humanité, les droits de la guerre foulés aux pieds, témoignent encore de la férocité de nos ennemis, en fai sant bénir la victoire du peuple qui en a purgé notre sol. Le fruit de cette victoire était l’indépendance. Le peuple l’a déclarée par notre organe.
Interprète de ses vœux, le Gouvernement provisoire vous a appelés, messieurs, vous, les hommes choisis par la nation belge, pour constituer cette indépendance et pour la consolider à jamais. Mais, en attendant que vous puissiez remplir cette tâche, un centre d’action était néces saire pour pourvoir aux plus urgents besoins de l’Etat.
Nous jugeâmes donc que la libre Belgique devait fonder son indé pendance par ses propres forces, toujours prête à les tourner contre quiconque voudrait entraver ce droit sacré. Depuis que nous avions pris cette résolution, nous avons reçu assurance de la cessation prochaine des hostilités, l’évacuation, sans conditions aucune, de tout le territoire.
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Et nous, messieurs, en quelque position que nous soyons, nous soutien drons de tous nos vœux, tous nos moyens, tous nos efforts, cette œuvre patriotique, trop heureux, après son entier succès, de nous confondre dans les rangs de ce peuple qui aura, tout à la fois, vaincu et assuré les bienfaits de la victoire !
Voilà, messieurs, les principaux titres avec lesquels le Gouvernement provisoire s’offre devant la nation et ses représentants. De relations avec l’étranger, nous n’avons pas cru devoir en établir, dans les circons tances où se trouvaient et la nation et nous-mêmes.
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Nous savions d’ailleurs à n’en pouvoir douter et nous pouvons vous en donner l’assurance positive, que le principe de non-intervention serait strictement maintenu à notre égard.
Messieurs, vous allez achever de consolider notre ouvrage. Fondez l’édi fice de notre prospérité future sur les principes de la liberté de tous, de l’égalité de tous devant la loi, et de l’économie la plus sévère. Que le peuple soit appelé à profiter de notre révolution : charges de l’Etat diminuées selon ses vrais besoins ; salaire des fonctionnaires réduit à la juste indemnité du temps et des talents qu’ils consacrent à la patrie ; suppression des emplois inutiles et nombreuses pensions, récom penses souvent accordées à la servilité, vous mettront à même de consommer l’œuvre de notre régénération.
organiser les élections populaires des bourgmestres et des régences, et l’élection directe des députés au Congrès national ; plus de direction générale de police, plus de haute police ; affranchir l’art dramatique ; abolir la loterie ; publier les comptes et budgets des communes ; liberté pleine et entière pour la presse, pour l’enseignement, pour les as sociations de toute espèce, et pour les opinions et les cultes, désormais délivrés de toute crainte de persécution, de tout danger de protection.
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Bruxelles, ce 4 octobre 1830 de Potter, Ch. Rogier, Sylvain van de Weyer, comte Félix de Mérode Par ordonnance, le secrétaire, J. Vanderlinden
Considérant qu’il importe de fixer l’état futur de la Belgique arrête :
Article premier - Les provinces de la Belgique, violemment dé tachées de la Hollande, constitueront un Etat indépendant.
Le Gouvernement provisoire, Comité central :
Art. 2 - Le Comité central s’occupera au plus tôt d’un projet de Constitution.
Art. 3 - Un Congrès national, où seront représentés tous les intérêts des provinces, sera convoqué. Il examinera le projet de Constitution belge, le modifiera en ce qu’il jugera convenable, et le rendra, comme Constitution définitive, exécutoire dans toute la Belgique.
En octobre, les évènements se précipitent et, le 4, paraît l’arrêté qui consomme la rupture nord-sud :
En langage plus précis, instaurer la république dans son sens puritain de l’époque qui comprend : “révolte, démocratie, liberté, fraternité, égalité… Bref, la chose publique moderne ; ou la res publica italienne avec ses variantes de républiques aristocratiques de Venise et Florence”.
Louis se trouve en effet isolé car, comme le dit Pirenne : Un seul eût souhaité aller plus loin et de profiter des circonstances, non seulement pour réformer la constitution politique, mais la constitution elle-même de la société.
Quelle forme de régime choisir ?
Il sollicitera même l’appui de de Mérode, de Van de Weyer et de de Potter par l’intermédiaire du Prince Kosloffski, ancien ministre plénipotentiaire de Russie à la cour de Wurtemberg, disgracié, qui habite Gand, mais il s’atti rera une réponse sans ambiguïté de de Potter : Si le peuple m’eût seulement soupçonné de vouloir présenter le Prince d’Orange comme le seul chef digne de lui commander, il serait monté au lieu des séances du gouvernement pour me jeter par la fenêtre, et je n’aurais eu là que ce que j’aurais mérité, pour avoir méconnu et avoir voulu violer le vœu national.
Finalement, le 18 octobre, les ponts sont rompus.
En effet, une troisième force demeure en lice : les Orange-Nassau conser vent encore de nombreux appuis et le Prince Guillaume, qui joue cavalier seul vis-à-vis de son père le roi, déclare le 16 octobre, dans une ultime proclamation, se placer “à la tête du mouvement qui menait les Belges vers un état de chose nouveau et stable, dont la nationalité ferait la force”.
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De Mérode écrit pour sa part : Ayant reçu communication du désir qui nous a été exprimé au nom de Votre Altesse royale d’entrer en accommo dement avec le Peuple belge, le soussigné pense qu’il est devenu très difficile de rendre à aucun membre de la Maison d’Orange-Nassau, l’affection et la confiance d’une nation si longtemps trompée dans ses espérances, d’une nation privée pendant seize ans de ses droits, de ses garanties les plus chè res, et livrée à la rapacité dévorante d’étrangers hollandais ou de Belges indignes de ce nom par une égoïste et honteuse servilité…
Le 10 octobre, celui-ci demande de Paris, où il a été envoyé, pour s’enqué rir de l’attitude française : de Potter voudrait-il par hasard, se faire général ?
Les membres du gouvernement hésitent encore puisque, le 18, ils envoient de Brouckère négocier à Anvers où les troupes hollandaises se sont retirées dans la forteresse.
Bien qu’ayant signé le document, de Potter ne peut accepter cette dictature de fait du Comité et exige que ce soit le Congrès et lui seul qui établisse la LesConstitution.positionsvont dès lors se radicaliser et deux camps s’affronter quant au régime que la Belgique doit adopter : monarchie ou république (dont certains craignent voir de Potter devenir président). Le combat, mené par Gendebien, tendra comme l’écrit Louis à le transformer en une “innocente mouche du coche”.
Le peuple belge possède la souveraineté réelle. Veut-on courir le risque de le mettre aux prises avec la monarchie héréditaire qui pourra s’établir chez lui (…) par ses vertus, le peuple belge mérite la liberté. Lui imposer la monarchie héréditaire, ce serait le ramener de force au régime (…) dont il s’était délivré si glorieusement, ré gime de luxe et de faux éclat, d’où résultent dépravation des grands, avilissement des petits, déconsidération de la nation et la ruine de l’Etat.
Extrait de la “Lettre à mes concitoyens” de Louis de Potter, novembre 1830
Soutenu par mon ami Tielemans, j’étais le seul au Comité central à vouloir qu’il se dessine politiquement et qu’il prenne parti (…) nous étions les représentants de la révolution et il nous était imposé de la faire triompher (…) abandonner le sort de la patrie au Congrès eût été une imprudence.
J’ai indiqué, par une lettre publiée dans “La Tribune des Départe ments” combien il était absurde de permettre aux ministres étran gers de donner Paris pour prison à ceux de leurs compatriotes qui ne leur conviendraient pas. Cette lettre piqua vivement l’ambassa deur néerlandais et je partis alors avec un passeport certifié bon à la préfecture de police.
Considérant le Gouvernement provisoire comme la véritable force motrice de la révolution, j’avais voulu confier à ce gouvernement seul la mission d’asseoir la révolution sur des bases inébranlables (…) Aussi, par le refus fait au Gouvernement provisoire (…) je vis que la royauté constitutionnelle conservait des chances de succès devant la représentation nationale. (…) Le gouvernement jusqu’alors était essentiellement révolutionnaire et nécessairement anti-orangiste.
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Peuple, ce que nous sommes, nous le sommes par vous ; ce que nous ferons, nous le ferons pour vous. (…) Il n’y a que vous que je veuille convaincre de mon sincère patriotisme.
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Le résultat le plus positif sera la signature, le 17 novembre, d’un armistice entre les belligérants. Ensuite, au texte lapidaire proposé par Talleyrand (les cinq Puissances accèdent aux vœux des Belges et les reconnaissent comme un peuple formant un Etat séparé de tout autre et indépendant) se substitue un protocole beaucoup plus élaboré qui proclame notamment la neutralité perpétuelle du nouvel Etat garantie par les Puissances, mais lui impose aussi au nouvel Etat une série d’obligations porteuses de conflits dans un avenir proche.
Du 4 novembre au 20 décembre, Palmerston (Grande-Bretagne), Bülow (Prusse), Lieven (Russie), Esterhazy (Autriche), Talleyrand (France) débat tent en présence de Falck, ambassadeur hollandais, flanqué de van Zuylen, et de Van de Weyer pour la Belgique, qui n’ont pas voix au chapitre. A cette occasion, Van de Weyer révèle de remarquables qualités de diplomate qui en feront une personnalité politique incontournable du futur royaume et un Premier ministre.
Finalement, la conférence se sépare en ayant évité une conflagration géné rale : la France voit tomber une barrière dressée à ses frontières. Talleyrand sans abattre ses cartes est en fait favorable au partage de la dépouille, Liège allant à la Prusse, la Flandre et Anvers à l’Angleterre, et la Wallonie bien évidemment à la France. S’il existe une fraction rattachiste dans cette partie du pays, elle restera toujours minoritaire.
Puissances se concertent
Reste aux Belges à se déterminer quant au régime qu’ils désirent adopter : constitution, république ou monarchie ? Depuis le 6 octobre, une Com mission de Constitution avait été mise en place, elle était composée de
Pendant ce temps, les Puissances se réunissent à Londres afin de trouver une solution au problème belge qui risque d’empoisonner les relations internationales. Faut-il régler la question par les armes pour rétablir la situation de 1814 ou négocier ? Comme le dit Metternich : La conférence s’est réunie pour arranger l’affaire, mais laquelle ? Celle de Sa Majesté néer landaise ou bien l’affaire des révoltés belges ?
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La Grande-Bretagne assiste à la disparition d’une concurrence commer ciale ; l’Autriche se réjouit sous cape de voir qu’on n’a pas mieux réussi l’union là où elle a échoué en son temps ; la Russie affronte au même moment la révolte polonaise et ne peut intervenir militairement comme elle l’aurait souhaité.
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Poursuivant son travail, la Commission établit les critères d’éligibilité au Congrès national qui va s’ouvrir : avoir 25 ans, disposer d’une fortune permettant le paiement d’un cens élevé ou posséder des diplômes, les officiers et les ministres des Cultes sont également admis à être candidats ce qui ouvre fatalement la voie à la formation d’un gouvernement bourgeois.
Le 19, de Potter envoie une lettre au “Courrier des Pays-Bas” dans laquelle il proclame sans ambages sa position : (…) Mes opinions, je ne les ai ja mais cachées, je suis républicain… La royauté, ou l’hérédité, ou l’intérêt dynastique, mènent presque nécessairement au luxe, au gaspillage, à l’ex ploitation. Une telle attitude lui aliènera encore un peu plus la bourgeoisie attachée au principe monarchique.
de Gerlache, de Brouckère, Devaux, Van Meenen, Tielemans, Balliu, Zonde, Thorn, Lebeau, Dubus, Blargnies, quasiment tous avocats, Nothomb est désigné comme secrétaire et rapporteur. Une série de mesures positives y est rapidement proposée : suppression des punitions corporelles, publi cité des budgets et comptes communaux, instauration d’une garde civique dans chaque commune, liberté des cultes, de la presse, du théâtre, du droit d’association. Reste à déterminer la forme du futur Etat.
Mais surtout, elle se prononce, le 27 octobre, pour l’instauration de la monarchie par huit voix pour et une voix contre, celle de Tielemans qui pro pose un compromis assez curieux, une alternance monarchie-république, chacune pendant trois ans.
Louis de Potter n’a pas voté ou se sera abstenu. Les autres membres étaient soit absents, soit non encore nommés.
Tielemans démissionne tandis que de Potter désabusé dit : Ce n’était pas la peine de verser tant de sang pour si peu de choses, car il a compris, qu’avant même le vote de la Constitution, c’est la défaite du parti républicain qui est consacrée. Dans ses “Souvenirs personnels”, il dira : MM. Rogier et Van de Weyer, voyant en moi l’ennemi des dignités solides et des honneurs positifs, se soient soumis au devoir de me perdre pour sauver la royauté, dont toute grâce, toute faveur, tout éclat fécond émanent, et sans laquelle, comme cha cun sait, il ne pouvait plus y avoir de Belgique (…), et que : M. de Mérode, lui, conservateur né de l’aristocratie de cour et de la religion de sacristie, ait cru essentiel au repos de sa conscience de me mettre hors d’état de nuire à ses curiosités de l’ancien régime.
Louis pour sa part défendra le principe du suffrage universel
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Louis de Potter propose une réduction de la “cense” et un vrai suffarge universel. (L’écho des vrais principes, 1829)
Une question se pose ici : de Potter a-t-il été candidat comme membre du Congrès ? Sans doute l’a-t-on pressenti, mais ses déclarations ultérieures le démentent. Encore peut-on y voir l’expression des ressentiments dont les “Mémoires” abondent : (…) Je ne tenais pas mon mandat du Congrès National, je ne devais donc, ni ne pouvais le résigner entre ses mains… Argument sans doute valable, car il n’avait pas été élu mais intégré dans un Gouvernement provisoire autoproclamé et n’avait donc aucune fonction légale à soumettre à la ratification du vote, d’autant que le régime censitaire destiné à rassurer la bourgeoisie lui était odieux.
Bien que n’en faisant pas officiellement partie, il accepte cependant, com me doyen d’âge du pouvoir intérimaire, de prononcer le discours d’ouver ture de ce que nous pouvons maintenant appeler le Parlement. Harangue au contenu convenu qui ne laisse pas deviner ses sentiments profonds.
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Ici se place une anecdote célèbre : Gendebien qui faisait courir le bruit que de Potter préparait un coup d’Etat républicain voit un matin des ouvriers du canal (“les capons du rivage”) arriver pour planter un Arbre de la Liberté devant les Etats généraux, notre parlement actuel, où était réuni le Gouvernement provisoire. De Potter étant sorti pour les accueillir, Gende bien (c’est lui qui le rapporte) s’exclame : Si vous proclamez la république, je vous jette par dessus le balcon. On n’en arriva heureusement pas à une telle extrémité, de Potter se contentant de saluer avant de rentrer dans la salle des débats.
En réponse à cette décision, Louis publie le 31 octobre une “Profession de foi politique” dans laquelle il suggère la création d’un poste de président de la République élu pour trois ou cinq ans ; idée nouvelle pour l’époque, comme l’est celle d’une réforme de l’impôt plus équitable. Or, (…) point d’économie possible sous la monarchie. Il propose également la déchéance des Nassau, rejetée dans l’immédiat, mais qui sera bientôt reprise.
Le 10 novembre s’ouvre donc le Congrès national, Assemblée constituante dont les 200 membres (152 seront présents le premier jour) sont désignés suivant un système censitaire que de Potter rejette : 46.000 électeurs votent
Le 5 novembre, après les élections, Gendebien écrit triomphalement à Van de Weyer : Monsieur de Potter boude. Il est déconcerté du résultat des élections. Il ne voit plus d’espoir pour la présidence… Il fera du bruit. Il sacrifiera au besoin le repos de son pays à des idées qui ne sont partagées par aucun membre du Comité central.
u 88 sur 4 millions de citoyens ; 45 aristocrates (dont lui ?), 59 hommes de loi, 13 prêtres, 13 propriétaires sont envoyés siéger. Fortune et diplômes sont les critères retenus, voie fatalement ouverte à l’instauration d’un gouverne ment Tirantbourgeois.lebilande
l’action du Gouvernement provisoire, dont il a été leader un peu malgré lui, de Potter écrira dans ses mémoires qu’il a été tout à fait au-dessous de sa mission qui était de : chasser sans tarder les Hollandais du territoire belge ; déclarer, avec l’indépendance de la Belgique, la délimitation de ses frontières, déjà conquises à l’ennemi ; déterminer positivement la forme du gouvernement futur des provinces belges, forme que le peuple belge aurait acceptée ou rejetée, avec les bases de la Constitution que le Congrès aurait été appelé à organiser ; convoquer le Congrès constituant, la Constitution ayant été promulguée et le pouvoir définitif institué, se retirer devant lui simultanément avec le Congrès, et, comme le Congrès se serait retiré devant le nouveau Parlement national.
Deux jours plus tard, coup de théâtre. Il annonce par une lettre adressée au Gouvernement provisoire, transmise au Congrès national, son retrait de la vie politique active : Vous m’accusiez d’ambition, parce que je paraissais, prétendiez-vous, vouloir rester au pouvoir, même malgré les représentants de la nation. Vous vous trompiez, Messieurs, et je le prouve aujourd’hui à ma manière, c’est-à-dire, en me retirant sans espoir aucun de confirmation… Son explication, alambiquée, montre sa crainte de voir le Gouvernement provisoire tenter de se maintenir au-dessus de l’Assemblée et de lui dicter sa loi ce qui “mènerait au despotisme et pis encore à la contre-révolution”. Je rentrais enfin dans la position d’où je n’aurais jamais du sortir : j’étais rede venu moi-même (une fois de plus coquetterie ou sincérité, chacun jugera).
Le 23 novembre, il publie sa “Lettre à mes concitoyens”, véritable plaidoyer républicain, d’autant que la veille l’Assemblée s’est prononcée par 174 voix contre 13 pour la monarchie.
Rendant hommage à Tielemans pour son attitude de refus au sein de la Commission de Constitution et sa proposition de déclarer la déchéance des Nassau, il écrit : (…) Dès l’abord, je rêvai de la République des provinces belges (…) Les mo narchistes étaient alors (septembre 80) ce qu’ils sont aujourd’hui. (…)
Nous ne pouvions nous entendre. (…) Je prouvai ensuite que l’économie naturelle à ce régime (la république) convenait plus que tout autre à une nation longtemps pressurée par la rapacité d’un roi marchand, dilapida teur pour ses courtisans, avare pour lui-même. (…) Physiquement faible comme monarchie constitutionnelle, nous aurions été forts comme Répu blique. (…) Le peuple belge mérite la liberté. Imposer la monarchie hérédi taire, ce serait le ramener de force au régime de corruption et d’immoralité dont il s’était délivré si glorieusement.
Piètre consolation, le 24, par 160 voix contre 28 sur les membres présents, le Congrès, révolté par le bombardement d’Anvers par les Hollandais, votera la déchéance de la dynastie des Orange avec laquelle il a si souvent croisé le fer.
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Y aura-t-il une Belgique ?, par Louis de Potter, 1838.
Louis de Potter, doyen de l’Assemblée constituante, président du Comité central du Gouvernement, adresse sa démission le 15 novembre 1830 et la dissolution du Gouvernement provisoire au Congrès national belge
Messieurs, au bas de l’acte par lequel mes collègues vous ont offert hier leur démission de membres du Gouvernement provisoire de la Belgique, vous n’avez pas lu mon nom. Vous en verrez les motifs dans la lettre ci-jointe, que j’adresse à MM. Gendebien, Rogier, de Mérode, Jolly, Van der Linden et de Coppin, ayant fait partie du dit Gouvernement provisoire, et par laquelle je leur fais part de ma résolution de me retirer.
J’ai cru, messieurs, devoir vous en donner communication. Avant de terminer cette lettre d’envoi, je prendrai la liberté de vous témoigner combien m’a surpris votre prompte décision sur la démission donnée, au nom d’un corps, par quelques membres de ce corps, dont tous n’avaient pas signé cette même démission, et cela sans avoir provo qué une explication sur les raisons qui avaient déterminé tant la si gnature des uns que le refus ou l’absence de la signature des autres.
Vous vous trompiez, messieurs, et je le prouve aujourd’hui à ma manière, c’est-à-dire, en me retirant réellement sans espoir aucun de confirmation. Mes motifs, à moi, sont que je crois le Congrès national un corps purement constituant, exclusivement appelé par le Gouvernement provisoire pour fonder notre nouvel ordre social et pour instituer le pouvoir définitif qui présidera aux destinées de la Belgique.
Depuis plusieurs jours, nous discutions la question de la démission à donner au Congrès national par le Gouvernement provisoire. Sûrs, disiez-vous, d’être confirmés, vous vouliez, en offrant de vous retirer, prouver au Congrès et au pays votre désintéressement. Outre les autres accusations graves, vous m’accusiez d’ambition, parce que je paraissais, prétendiez-vous, vouloir rester au pouvoir, même malgré les représentants de la nation.
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Le Gouvernement provisoire était un pouvoir antérieur au Congrès, extérieur au Congrès, et neutre entre le peuple et sa représenta tion nationale ; un pouvoir qui avait convoqué le Congrès lui-même, d’après un mode qu’il avait déterminé et dont l’existence du Congrès était le résultat ; un pouvoir pour exécuter les décisions de la majo rité de cette Assemblée, tout en se conservant néanmoins et avant tout entièrement indépendant d’elle. Il fallait que ce pouvoir reste entier, jusqu’à ce que le pouvoir définitif le remplace ; car alors, et alors seulement, ses fonctions cesseraient de plein droit.
Chaque fois qu’une Assemblée souveraine se trouve seule en pré sence de la minorité, rien n’est plus facile à celle-ci, pour peu qu’elle veuille chercher un appui dans les masses, que de renverser cette majorité, et avec elle l’Assemblée elle-même. Dès ce moment, la révolution commence et court toutes les phases de l’anarchie ; elle traîne à sa suite le despotisme, et la contre-révolution. C’est l’his toire de la Convention nationale de France et de la restauration des Bourbons. Je désirais que ce ne fut pas celle de la Belgique. Comme chef du Comité central, je me sentais la mission d’exercer un pouvoir modérateur du Congrès, de défendre le Congrès contre lui-même.
Ce sont là, messieurs, les principaux arguments que j’ai fait valoir auprès de vous pour vous empêcher de commettre une faute qui me semblait irréparable, et que la patrie peut-être, et l’histoire, sans nul doute, nous reprocheront un jour. Vous avez cru devoir passer outre. Je ne m’en plains pas et je vous laisse la responsabilité de vo tre décision. Je ne tenais pas mon mandat du Congrès. Je ne pouvais le résigner entre ses mains. Ce mandat est devenu nul, dès l’instant que vous avez investi le Congrès, comme vous venez de le faire.
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Alors que les Puissances (Grande-Bretagne et France) auraient vu avec faveur le Prince d’Orange sur le trône, le Congrès a, par son refus, montré qu’il désire être le maître des destinées du pays. Les mois qui vont suivre seront donc marqués par la quête d’un souverain qui fasse l’unanimité.
Après l’élection, le 24 février 1831, d’un “roi par intérim” en la personne aimable du Régent Erasme Surlet de Chokier, homme intelligent, spirituel et léger ; très égoïste et profondément sceptique ; incapable de rien faire parce qu’il n’a aucune foi politique, croyant à tout, excepté à la nationa lité belge ; convaincu que les évènements de 80 amèneraient une guerre générale et que la Belgique irait définitivement à la France (Nothomb), auquel ses longs cheveux gris et bouclé… donnaient l’air d’un vieux lion mal tenu (C. Bronne).
Louis aura beau jeu de se gausser rétrospectivement de ces candidatures de noms obscurs ou ridicules de petits princes en disponibilité (…) dont le petit Othon de Bavière qui, depuis, s’est fait sur le trône de Grèce une si triste réputation de nullité monstrueuse (élu en 1832, il sera détrôné en 1862).
La quête se poursuit donc et une caricature de l’époque montre la “Ména gerie royale” tant les candidatures, parfois surprenantes sont envisagées. Du comte Felix de Mérode au Prince de Ligne, les membres de l’aristocratie de nos régions déclinent cet honneur périlleux. La noblesse demeurera assez longtemps dans une prudente réserve vis-à-vis de la nouvelle monarchie.
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Plus sérieusement, Louis d’Orléans, duc de Nemours, second fils du nou veau Roi Louis-Philippe, défendu en un premier temps par Van de Weyer, recueille 97 suffrages sur 192 votants. Mais le souverain à la sagesse de refuser face aux complications qui s’annoncent avec l’Europe pour qui le glacis dressé devant l’esprit de revanche français risque de disparaître et
monarque oui, mais qui choisir ?
On pense aussi à Napoléon-Achille Murat, le fils du maréchal, défunt roi de Naples, exilé aux Etats-Unis ; à La Fayette – il a près de 75 ans – que propose Gendebien, nostalgique du rattachisme, au duc de Leuchtenberg, fils d’Eugène de Beauharnais et petit-fils de l’ex-impératrice Joséphine. Ce dernier se heurte à l’opposition de la France à qui il rappelle l’épopée na poléonienne. L’archiduc Charles d’Autriche, fils de l’empereur Léopold II, petit-fils de Marie-Thérèse, obtient 35 suffrages, nostalgie d’une époque révolue mais pas si lointaine.
Le 20 avril 1831, après des travaux d’approches menés par Lebeau, une délégation composée de de Mérode, Vilain XIIII, de Brouckère, Van Praet, le beau-frère de Devaux qui parle parfaitement anglais, et l’abbé de Foere rencontre Stockmar, le médecin, secrétaire et ami de Léopold. Ensuite, le 22, Léopold lui-même, assez inquiet devant le contenu de la Constitution belge qui limite les pouvoirs du souverain dit : Messieurs, vous avez rudement traité la royauté qui n’était pas là pour se défendre.
Finalement, le 4 juin 1831, par 152 voix sur 196 votants, quatre membres sont absents, le Congrès ratifie l’élection de celui qui devient Léopold Ier, roi des Belges. Louis de Potter est évidemment contre cette décision qu’il considère comme imposée par les Puissances.
Il reçoit l’appui de l’Angleterre, ce qui est essentiel. Il est veuf de la Princesse Charlotte-Augusta, fille de Georges, le Prince de Galles. La France, qui a besoin de l’appui anglais, se range plus ou moins de bon cœur à ses côtés.
Lors du retrait de Nemours, de Potter écrira encore, le 13 février 1831, à l’Assemblée pour plaider la cause de “la république définitive”, mais sa popularité est maintenant au plus bas.
Finalement, la solution viendra de la famille de Saxe-Cobourg (le haras de l’Europe, dira Bismarck avec son élégance habituelle) en la personne de Léopold-Georges-Chrétien-Frédéric, un prince protestant à qui le catholicis me de ses futurs sujets ne semble pas poser de problème. Devaux proposera sa candidature dès janvier 1831. Encore faut-il l’accord des Puissances.
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La Russie, dans l’armée de laquelle il a servi, bien qu’hostile à l’indépen dance belge, y voit un moindre mal. La Prusse considère qu’un prince allemand sur le trône de Belgique augure bien de l’avenir. L’Autriche n’est pas favorable mais n’a plus les moyens de sa politique.
dont l’Angleterre de Palmerston ne voulait absolument pas, ce que Van de Weyer comprit rapidement.
Il existe un courant, minoritaire, pour le rattachement pur et simple à la France, mais “Le Belge” résume le sentiment général : La réunion n’a pas de racine dans le peuple qui veut être belge et rien que belge.
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On s’est intéressé qu’aux questions secondaires de savoir ce que la Belgique sera, comment elle sera, et surtout qui y sera quelque chose ; comme si tous les accidents de forme et les intérêts par ticuliers n’étaient pas subordonnés à l’intérêt commun. Partout où l’égoïsme et la passion n’avaient pas oblitéré les intelligences, la logique inflexible n’a-t-elle point cessé de poser sans ambages ni circonlocutions, la question primitive : Y aura-t-il une Belgique ?
Extraits du livre “Y aura-t-il une Belgique ?” de Louis de Potter à ses concitoyens
Complètement oubliée, la question d’existence se représente aujourd’hui aussi problématique qu’avant notre séparation de la Hollande, et exigeant aussi impérieusement que jamais d’être tran chée définitivement. Elle avait cependant été formulée avec netteté et précision en 1828, par l’opposition fédérée ou unioniste en lutte avec le despotisme unitaire et centralisateur de Guillaume. (…)
Dès que l’existence de la Belgique fut réalisée par la victoire popu laire et constatée par la déclaration d’indépendance du gouverne ment, elle fut remise en question par le Congrès constituant belge. Celui-ci décréta la monarchie parce qu’il avait peur des Puissances étrangères ; c’était un pas rétrograde vers la soumission : il espéra que ceux-ci, pour employer l’expression d’un ancien membre du Congrès, qu’ils “consentiraient à l’existence d’une Belgique”, rentrée dans le bercail des cours ; cet espoir nous fit plier à l’intérêt dynas tique, si pompeusement appelé l’intérêt de la civilisation, pouvait nous faire imposer par les rois d’Europe. La diplomatie se chargera du reste. (…)
Cette question qui a agité a Belgique entière pendant deux ans, et qui aurait dû être décidée là même où elle avait surgi et par ceux seulement qui l’avaient soulevée, occupe l’Europe depuis que les Belges paraissent avoir renoncé à y mettre de l’importance parce qu’ils la croient résolue.
Ne parlons plus de patrie ni d’honneur ; sacrifions l’honneur et la patrie au veau d’or ; immolons-nous nous-mêmes sur son sordide autel, nation aujourd’hui, demain province, libres un instant, toujours prêts à servir, mais riches.
Ou nous soumettre de bonne grâce et accepter sans murmurer les temps et les circonstances tels que nous-mêmes, confessons-le sans détour, puisque le mal n’est pas à avouer ses fautes, mais à en com mettre, tels que nous-mêmes les avions faits ; Ou bien nous relever à toute la hauteur où nous étions parvenus en 1830. (…)
La vigueur qu’en ce moment la patrie réclame de nous, il faut qu’elle éclate spontanée et sans aucun retard. Car le temps, ce grand mys tificateur des peuples, l’auxiliaire le plus puissant de la diplomatie, est contre nous. Rien ne s’use comme l’enthousiasme qui devient du “pur calcul”, et les rois calculent beaucoup plus habilement que les peuples. (…)
Et par là la dynastie du roi des barricades se trouvera consolidée d’autant (…) dans l’esprit des rois par la gloire de Dieu. En outre, continuera à figurer dans les almanachs des cours un tout petit Royaume de Belgique où, comme a dit le Chansonnier, les Bourbons règneront toujours. (…)
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Le premier mouvement des peuples est toujours franc et bon ; voilà pourquoi les rois s’en défient : mais, ce moment de crise passé, la diplomatie s’empare du terrain et agit sans obstacle, amuse l’un, séduit l’autre, promet, intimide, trompe tout le monde et règne sur des ruines. Si chacun de nous n’a pas le courage de détourner quel ques mois son attention de lui-même, de l’argent, de spéculations, d’entreprises, d’actions industrielles, qui l’absorbent, pour la porter toute entière, avec tout son dévouement, sur la question de notre existence comme le peuple libre, tout est perdu. (…)
Ce sera donc probablement le peuple de juillet qui, chose incroyable mais vraie, aura la gloire d’avoir imposé l’ordre selon la conférence de Londres au peuple de septembre.
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Je n’ai jusqu’ici considéré la question que sous le rapport de la Belgi que : c’est le seul dont j’eusse à m’occuper dans l’intérêt des Belges, mes concitoyens.
Notre lot, c’est l’obéissance la plus absolue, du moment que nous ne sentons pas le force de pousser le courage jusqu’au désespoir. Nous commencions une vie bien réelle en 1830, aussi réelle qu’elle était glorieuse.
Mais il faut éviter un odieux éclat qui, aigrissant les esprits, nous empêche, comme on a dit, de laver notre linge sale en famille. Il passe alors à la buanderie diplomatique ; et là, les rois l’ont bientôt rendu inblanchissable. (…)
Je ne ferai que l’indiquer ici. L’existence de la Belgique, existence de fait et même de nom, qu’est-elle autre chose, si ce n’est une victoire du droit sur la force ? C’est un produit exclusivement révolutionnaire.
Mais il y a un point de vue plus élevé, d’où l’acceptation des 24 articles, soit dans leur pureté native, soit plus ou moins modifiés, ou le refus de la part des Belges de ses soumettre à l’arbitraire de la diplomatie, à la loi de l’étranger, prennent un aspect bien plus large, et se présentent comme question européenne, humanitaire.
Et(…)c’est
la Belgique, comme géographiquement la plus faible, et la plus tenace moralement dans ses prétentions à la liberté vraie, qu’ils ont choisie pour achever leur triomphe et rétablir l’ordre an térieur, c’est-à-dire le droit de quelques familles sur la fortune, la pensée, les croyances, la vie de tous les peuples.
Ne renoncerons-nous jamais à la déplorable manie de nous vexer et harceler mutuellement sans but comme sans terme ? L’union et la concorde nous ont émancipés ; est-il à croire que la division et la haine nous conserveront libres et forts ?
Que nous discutions avec bienveillance entre nous sur lesquels nous différons, que nous cherchions à nous éclairer les uns les autres, je le conçois ; c’est même un devoir.
Aux violences verbales succèdent les menaces et, si le 21 février un mee ting de l’Association est encore un succès et se termine par les cris “Vive de Potter ! Vive la Liberté !”, il est prévenu de ne pas se rendre le lendemain à une réunion à l’estaminet “La Bergère”. Celle-ci est en effet dispersée à coup de masses plombées par des individus, en majorité des chômeurs, stipendiés très probablement par Plaisant, chef de la police qui avait fait ses études de Droit à l’Université de Bologne de 1815 à 1820, époque où Louis était en Italie, et ancien compagnon de lutte de celui-ci. C’en est trop et fin février de Potter quitte Bruxelles pour Paris.
Le séjour dans la capitale française durera de février 1831 à 1839. Séjour et non exil ; lorsqu’il quitte la Belgique, c’est parce que la pression politique lui est devenue insupportable et non sous le coup d’une condamnation qui lui aurait interdit le territoire national.
Cependant, le 14 février était née “l’Association pour l’Indépendance nationale”, au sein de laquelle se retrouvent de Potter et Lesbroussart, de tendance résolument radicale et républicaine. Ces républicains que M. Rogier appelle “anarchistes”, comme l’écrit Louis dans un article paru dans “Le Belge” et qui veulent avant tout le bien du pays.
Mais désormais il n’apparaît plus que comme un gêneur accusé en de curieux amalgames d’être tout à la fois “un prêtre juif” (sic), un “saintsimonien ”, un “égalitaire”, un “orangiste”.
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En 1835, il y avait 1.635 décorés, les deux classes de la décoration ayant été fusionnées. En 1860, il restait 463 décorés vivants. Par contre ayant appris qu’il avait été “oublié” par le Congrès qui avait voté la distribution des 150.000 florins des Pays-Bas destinés aux membres du Gouvernement
La Croix de Fer, instaurée par la loi du 8 octobre 1833 était destinée à ré compenser les membres du Gouvernement provisoire et les autres citoyens qui, depuis le 25 août 1830 et jusqu’au 4 février 1831, ont été blessés ou ont fait preuve d’une bravoure éclatante dans les combats pour l’indépendance nationale, ou ont rendu des services signalés au pays.
La preuve en est qu’il reviendra à diverses reprises au pays. En 1834, il sera même proposé pour la Croix de Fer qu’il refusera comme tous les “hochets ridicules” que sont pour lui les distinctions honorifiques.
Encore et toujours l’exil
De Potter, toujours lucide mais caustique, pourra dire : Monsieur Gende bien, et pour cela on n’en saurait douter, ne voulait, en se débarrassant de moi, que protéger la Belgique.
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provisoire, il fit intervenir son avocat et obtint 11.000 francs aussitôt distri bués aux chômeurs de Bruxelles et de Bruges.
Un évènement plus heureux sera la naissance, le 1er août 1834, de son dernier enfant, sa fille Justa (décédée en 1875) qui épousera en 1859 le capitaine (futur lieutenant-général) Alexis Brialmont (1821-1903), spécia liste des fortifications, créateur des ceintures défensives d’Anvers et de Liège, apprécié par Léopold Ier et Léopold II.
Il va en effet renouer avec Lamennais et donnera de nombreux articles à “L’Avenir” dans les bureaux duquel il rencontrera Lacordaire et Montalembert. Il écrira également dans les colonnes de divers journaux républicains tel “La Tribune” et “Le Réformateur”.
Sur le plan familial, il y aura le décès, le 22 juin 1833, de sa mère âgée de 81 ans. Elle résidait à Bruxelles chez Baudouin, l’ancien maître en huma nités de Louis.
A partir de cette nouvelle étape parisienne, les centres d’intérêt de Louis de Potter vont progressivement se déplacer. Si la vie politique belge ne le laisse pas indifférent, il s’impliquera de plus en plus dans ce que nous appellerons la “sociologie politique”.
De cette collaboration naît un projet de pacte d’union, sorte d’Internationale socialiste avant la lettre, qui propose une confédération républicaine des peuples belges, hollandais, rhénans, français dont s’effraie même Buonarroti devant les risques de conflits internationaux qu’il susciterait, ainsi que du poids qu’occuperait la France connue pour son esprit centralisateur.
Après ce départ, Gendebien revient au premier plan et fait de la surenchère patriotique avec la fondation d’une “Association nationale” qui combat une dernière tentative de replacer le Prince d’Orange sur les rangs des candi dats au trône et combat les résultats de la conférence de Londres tout en encourageant en sous-main des menées républicaines vouées à l’échec, mais qui assurent – il faut prévoir l’avenir – sa popularité auprès des classes moyennes et ouvrières.
On trouve un écho de la démarche de Lamennais dans la publication par Louis, en 1836, de son “Histoire philosophique, politique et critique du christianisme et des églises chrétiennes depuis Jésus jusqu’au XIXe siècle, huit volumes pas moins, soigneusement ignorés par la presse conservatri ce, sorte d’amplification de ses “Considérations sur l’histoire des principaux conciles…” de 1816. Extrait choisi : Par le christianisme que je combats, il faut toujours entendre le christianisme hiérarchiquement organisé. (…)
D’autres réactions ne tarderont pas puisqu’en 1832, le pape Grégoire XVI condamnera par l’encyclique “Mirari Vos” cette vision faite de catholicisme libéral, de liberté individuelle et de politique sociale.
Si Montalembert et Lacordaire se soumettent, Lamennais réplique en 1834 par “Les paroles d’un croyant” où l’Evangile apparaît comme une prophé tie révolutionnaire. La publication marque ainsi sa rupture définitive avec l’Eglise. Précurseur de la démocratie chrétienne, devenu député d’extrême gauche en 1848, il mourra après avoir refusé les sacrements.
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Buste de Justa de Potter, fille de Louis de Potter et épouse du général Brialmont. © Musée Royal des Beaux-Arts de Belgique, IRPA-KIK, Bruxelles.
Devant le désastre imminent, Léopold fait appel aux garants de la neutra lité belge – en l’occurrence la France – et le 11 août, le maréchal Gérard entre à Bruxelles à la tête de 60.000 hommes, ce qui provoque des remous au Parlement car “aucune troupe étrangère ne peut traverser le territoire qu’en vertu d’une loi”, mais cette fois nécessité fait loi.
S’il tend la main aux réformateurs dans l’Eglise, il se méfie d’un catholicis me soi-disant social : Tolérance donc, et tolérance entière ! Liberté absolue d’opinions et de doctrines. (…) Il faudra nécessairement que le christia nisme cède la place à la philosophie. (…) Et lorsqu’il fait en apparence une marche arrière : (…) La religion est le moyen le plus efficace de stabilité et d’ordre ; et l’ordre que la liberté affermit est le premier besoin des hommes en société (…), c’est pour annoncer qu’elle finira par céder : (…) nous devons, en ne cherchant pas à précipiter imprudemment la perte du catho licisme le laisser se perdre lui-même, entièrement et sans r etour.
Pendant ce temps-là en Belgique
Le roi désabusé dira : Une partie de l’armée me trahit, l’autre s’enfuit. Il y avait un pont près de Malines que je ne pus maintenir en mon pouvoir qu’en m’asseyant dessus.
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Député du Luxembourg, Gendebien abandonnera son siège le 19 mars 1839, lors de la ratification définitive du traité, après avoir lancé son cé lèbre : Non, trois cent quatre-vingts mille fois non pour trois cent quatrevingts mille Belges que vous sacrifiez à la peur.
Depuis le départ de Louis, les évènements se sont précipités. A peine Léopold a-t-il prêté le serment constitutionnel que les Hollandais rompent l’armistice (2 août 1831) et envahissent le pays.
Jésus et ses principes d’égalité sociale, de fraternité universelle sont pour moi la manifestation de l’homme moral au degré le plus sublime.
Le 20, les Hollandais évacuent, sauf la forteresse d’Anvers, après une cam pagne qui aura fait 91 morts et 453 blessés dans les rangs belges. Plus grave, devant la faiblesse du nouveau royaume et sous la pression anglaise, les Chambres devront ratifier un nouveau traité (les XXIV articles) par lequel une partie du Limbourg et du Luxembourg sont attribués à la Hollande. Le député Bekaert tombera mort à son banc, étouffé par l’émotion.
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Finalement, de Potter et Gendebien se rapprochent dans leur attitude intransigeante vis-à-vis du traité ce qui correspond bien à leurs caractères opposés. Gendebien, pour sa part, avait un tempérament pour le moins agressif : le 26 juin 1833, il se battra en duel avec Rogier, alors ministre de l’Intérieur, pour un motif qu’aujourd’hui on considérerait comme futile, touchant à l’honneur de Devaux. Si Rogier se contenta de tirer sans viser, Gendebien lui transperça bel et bien la joue lui brisant des dents. Sanc tionné par le Code pénal en 1841 (peine d’emprisonnement de sept jours à trois mois, amende de 100 à 500 francs, indexée), le duel n’est toujours pas légalement interdit en Belgique !
Cependant, Louis ne désarme pas dans son opposition au principe mo narchique et envoie lettre sur lettre au roi ne craignant pas de lui écrire : Bizarre destinée ! Vous qui, étranger à la révolution, êtes venu à sa suite, vous trouvez moyen de vous rendre agréable au peuple avec qui, sans elle, vous n’auriez jamais eu aucun point de contact, en la répudiant aussi naïvement qu’il la répudie lui-même ; et moi qui, après en avoir rassem blé les éléments, y aurais volontiers mis obstacle avant qu’elle n’éclatât, je suis, pour l’avoir voulue, maudit et persécuté par le peuple qui l’a faite ! Ou : Vous avez voué la Belgique à la neutralité morale et politique, espèce de castration sociale, de quasi-existence vague ambiguë, équivoque, qui est à jamais flétrie sous le nom de juste milieu. Et encore : J’ai seulement voulu vous prouver par là que c’en était assez et plus même qu’il ne fallait pour vous débarrasser au plus tôt d’une charge dont le poids vous deviendra de jour en jour plus insupportable. Louis reconnaîtra d’ailleurs que : le roi avait beaucoup ri en lisant mes réflexions.
Cependant, la basse politique le rattrape : le 4 mars 1838, à l’instigation de son homologue belge, la police française opère une descente à son domicile parisien, 8, rue de Fleurus, et saisit des papiers – un échange de courrier – qui se rapportaient au mouvement insurrectionnel de Bartels. Curieusement les documents aboutissent sur le bureau de Charles Lehon, ministre plénipotentiaire du Royaume de Belgique à Paris.
A l’époque Bartels, vieux compagnon de lutte de Louis dans les années 1820, auteur en 1836 de “Sur la Révolution belge”, publiait “Le Radical”, journal libéral dont les positions inquiétaient le pouvoir sans vraiment le menacer.
Nous faisons volontiers le sacrifice de nos affections et de nos in térêts à cette même patrie, et nous ne formons d’autre vœu que ce lui d’y voir enfin la liberté sortir triomphante de la lutte où quelques hommes l’ont si imprudemment et si maladroitement engagée.
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Nobles et puissants seigneurs,
Lettre adressée à l’avocat général de la deuxième chambre du tribunal correctionnel des Etats généraux, par MM. de Potter, Tielemans et Bartels à l’issue du procès d’assises les condamnant à huit ans de bannissement, suite à la saisie de la correspondance de Louis de Potter.
Ce n’est pas contre la condamnation que nous venons de subir que nous réclamons auprès de vous, quoiqu’elle nous prive d’une patrie qui nous est chère et d’institutions auxquelles nous sommes sincèrement dévoués.
Nous nous bornons, nobles et puissants seigneurs, à vous signa ler un scandale inouï dans les annales des peuples civilisés, savoir : la publication, par la voie de la presse, de notre correspondance confidentielle, intime, secrète, de toute notre vie privée et de celles des personnes qui, malheureusement pour elles, étaient en relation avec nous.
Un pareil scandale demeurant impuni, il n’y a plus de sûreté pour les citoyens, il n’y a plus de repos : les liens de l’amitié et de la confiance sont rompus et les mères de familles les plus honnêtes bafouées.
(…) Le cri de “Vive de Potter !” retentit du Châlelet à la rive oppo sée de la Seine. Notre compatriote parait au balcon. Les convives l’entourent de flambeaux car l’obscurité ne permet pas de distin guer ses traits. Les cris redoublent : “Vive le brave peuple de Pa ris !”, s’écrie de Potter. “Vive le brave peuple de la Belgique ! Vive de Potter ! Vivent les bannis”, répètent les héros de la grande semaine, en élevant des torches allumées. (…)
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Extraits de “Archives de la Révolution de 1830” par Adolphe Bartels (Ed. Thieu & Ponthoz, 1848, Paris)
(…) A Paris, un banquet fut offert aux honorables bannis, par une nombreuse réunion de Français et de Belges. (…) Un toast aux rédacteurs du “Catholique”, du “Courrier des Pays-Bas” et autres organes de l’opposition belge fut longuement applaudi. Le toast sui vant fut porté par M. de Potter : “A la France ! Elle est libre. Qu’elle poursuive sa noble carrière ! A la Belgique ! Puisse-t-elle bientôt être libre et n’avoir plus à envier à la France que l’honneur de l’avoir devancée. Vous le savez tous, Messieurs, la liberté des Belges peut seule affermir l’indépendance des Pays-Bas. Que les Belges donc secouent le joug hollandais ! Ils ne doivent, ni ne veulent opprimer la Hollande, mais aussi ne veulent-ils plus être opprimés par elle. Séparation réelle, parlementaire et administrative, entre les deux peuples, mais union indissoluble des deux peuples sous un même chef constitutionnel. Vive le Royaume-Uni des Pays-Bas ! Vive la libre, l’héroïque, l’hospitalière France !” (…)
(…) Soyez heureux, la couronne civique ; Dans vos foyers vous at tend au retour ; Souvenez-vous, vous fûtes nos frères ; L’Europe encore pourra dans l’avenir ; Par un poteau planté sur nos frontières, Nous séparer, mais non nous désunir. Ce couplet redemandé avec enthou siasme par tous est chanté en chœur par : catholiques indépendants et sincères, philosophes de bonne foi, députés, écrivains, proscrits, in dustriels, tous animés d’une égale ardeur pour la cause des peuples et la chute du despotisme dans le monde entier, se serrent les mains en formant une chaîne d’hommes libres. (…)
u Retrouver10 la Belgique
En septembre 1839, de Potter décide de rentrer au pays, ce qui, pour quel qu’un accusé par certains auteurs de fomenter un complot, aurait été pour le moins dangereux. Il s’installe à Schaerbeek, rue Royale Extérieure tout en séjournant à l’occasion à Bruges.
Dans l’avis au public, il dit : La Révolution belge, conçue en 88, née en 80, décédée en 89, appartient désormais à l’histoire. (…) Mes souve nirs de cette révolution, quoique purement personnels ne seront pas inutiles à ceux qui, plus tard, écriront sa nécrologie.
Il publie en deux volumes “Révolution belge. Souvenirs personnels” dont les 500 exemplaires sont vendus en dix jours d’où, en 1840, une seconde édition sous le titre “Souvenirs intimes”. Retour sur ma vie intellectuelle et le peu d’incidents qu’elle causa” accompagnée d’une traduction néerlandaise.
Louis en revient donc, sans doute devant les projets de partage du pays entre la France et l’Allemagne (Bismarck présentera dans quelques années cette politique des “pourboires” à Louis-Napoléon devenu prince-président puis empereur) l’idée d’un pacte fédéral sous la forme d’une “Monarchie socialiste” dont le souverain serait… Guillaume d’Orange !
L’ouvrage donne à lire des choses étonnantes au regard de l’intransigeance que l’auteur a manifesté jusqu’alors : La Révolution de 80 avait pour but de fonder une République sociale. Elle n’a pas atteint son but et elle n’a eu pour résultat que de diviser un puissant Etat en deux parties. Il est donc temps de réunir à nouveau deux peuples qui se complétaient l’un l’autre.
En avril 1840, Lebeau forme le premier ministère libéral homogène. C’en est fini de l’unionisme. Un an plus tard, un complot orangiste, organisé par deux anciens généraux Vander Smissen et Vander Meere est découvert. Il s’agissait d’enlever Léopold Ier et de rétablir les Nassau.
Ce complot des “paniers percés” mena les conjurés devant la Cour d’assises et aboutit à quatre condamnations à mort, non exécutées. A cette époque, de Potter opère un revirement qui va lui attirer des réactions violentes de la part de ses anciens amis républicains.
Depuis la fin des années trente, de Potter était en relation avec Jean-Guillaume de Colins, dont les idées sociales vont l’inspirer et transparaîtront dans ses écrits. Etrange personnage que ce baron rouge né à Bruxelles en 1783, fils d’un chambellan à la cour des gouverneurs généraux autrichiens. Imprégné
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de l’esprit des encyclopédistes, il fait une carrière militaire sous l’Empire et, à la Restauration, dédaignant la promotion à un grade supérieur dans l’armée du royaume des Pays-Bas, il s’exile aux Etats-Unis, puis à Cuba où il fait fortune comme planteur de café.
De nombreuses publications de Louis de Potter, “Etudes sociales ” (1843), “La Justice et la Sanction religieuse” (1846), “La Réalité déterminée par le raisonnement” (1848), “Le cathéchisme social” (1850), “ABC de la Science sociale” (1850), “Cathéchisme rationnel” (1854) et le “Dictionnaire ration nel”, paru l’année de son décès, puiseront largement dans l’idéologie co linsienne que son fils Agathon défendra à son tour.
A ce moment, de Potter rompra avec lui car, profitant des évènements en France, Colins aurait voulu instaurer la république en Belgique, idée que Louis avait abandonnée prévoyant l’aboutissement des évènements et un retour au despotisme : Exactement le même, qu’il soit exercé d’ailleurs au nom de la légitimité, ou de la monarchie de fait, ou de la république trico lore, ou de la démocratie rouge ou enfin du socialisme.
Colins publiera encore, de 1851 à 1854, “Qu’est-ce que la science sociale ?” tout en entretenant une abondante correspondance avec quelques disciples, actifs notamment à Verviers jusque dans les années 1870. Il meurt isolé en 1859, entrant au panthéon des réformateurs radicaux du XIXe siècle.
Emprisonné de juin 1848 à mars 1849 lors de la chute de Louis-Philippe et de la naissance d’une république éphémère, il se convertit à l’idée d’un ré gime militaire fort, seul capable d’amener l’égalitarisme dont il rêve. LouisNapoléon réalisera ses vœux, mais dans une optique un peu différente !
L’idée de la collectivisation de la propriété foncière, la création de coo pératives gérées par des associations de travailleurs mais l’interdiction de regroupements capitalistes, l’instauration des droits de succession pour les propriétaires de biens immobiliers, l’extinction des dettes au décès des débiteurs, l’instauration d’une dot sociale pour démarrer dans la vie pro fessionnelle, le prêt à intérêt le plus bas possible, l’instruction gratuite, une législation vieillesse, sont des buts que poursuivront les nouveaux partis qui vont éclore.
Nouveau revirement puisqu’il passe les examens qui lui confèrent le titre de docteur en médecine. En 1830, la révolution parisienne le pousse à revenir en France. Il trempe dans des complots bonapartistes pour finale ment se consacrer à l’étude des théories sociales qu’il développe dans “Le Pacte social ” et “Le Socialisme rationnel”.
Extrait d’une note de l’Institut de Colins de Ham concernant la correspondance de Louis de Potter avec l’économiste Jean-Baptiste de Colins de Ham
L’institut Colins dira plus tard, au sujet du jeune homme : “Son ouvra ge intitulé “Etudes sociales”, rassemblait divers opuscules consacrés à la “science sociale rationnelle”. On y trouve des thèses colinsien nes quant à l’indétermination du langage et à l’avènement de la souveraineté de la raison fondée sur l’immatérialité et de l’éternité des âmes. C’est dans un autre ouvrage publié sous le titre étonnant de “La justice et sa sanction religieuse” et une seconde fois, sous le titre non moins intrigant de “La réalité déterminée par le raisonne ment ou Questions sociales” qu’il apporta les contributions les plus décisives à l’ontologie rationaliste colinsienne…
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Dans ses lettres, Louis de Potter “harcelait sans relâche M. De Co lins de difficultés, de doutes, d’objections et de réflexions de toutes espèces” ; sur quoi il recevait “de belles dissertations, des dévelop pements clairs et des conclusions sans répliques”. Jean-Baptiste de Colins, à la naissance de ses relations avec Louis de Potter, avait déjà publié un livre remarquable, intitulé : Du pacte social et de la liberté publique considérée comme développement moral de l’homme.
Mais l’épigraphe de ce livre, Dieu et liberté, révèle clairement que l’auteur était encore dans l’ignorance de la réalité du droit et de la sanction éternelle : “A mesure que je composais ce travail sur la science sociale, je l’envoyais à M. de Potter, de Bruxelles, qui en pre nait copie et s’en servait pour l’éducation de son fils Agathon, jeune homme distingué et lettré, alors étudiant en médecine sociale, et, depuis lors, docteur en médecine.”
Lorsque Louis de Potter revint se fixer définitivement en Belgique, une correspondance suivie, très étendue, eut lieu entre le baron Jean-Baptiste de Colins de Ham et lui.
Une autre revendication, essentielle, celle de l’abaissement du cens électo ral, sera adoptée par le gouvernement libéral en 1848. Plus élevé dans les villes que dans les campagnes, il empêchait le vote d’une partie de la petite bourgeoisie urbaine. Ramené au minimum légal, 42 francs d’impôts directs, il élargit la base du corps des électeurs.
En janvier 1842, Louis avait été le moteur de la création de “L’Humanité”, un bi-hebdomadaire du dimanche et du jeudi qui cessera de paraître après 26 numéros, le 1er mai. Il est curieux de noter que Marx et Engels, installés à Bruxelles, élaboreront de 1845 à 1848, leur théorie du matérialisme his torique (“Le Manifeste du Parti Communiste”) sans évoquer nulle part les publications pourtant nombreuses de Louis de Potter.
Les maçons étant quasiment tous libéraux et, s’étant battu lors de la Révolu tion de 1830 pour la liberté de l’enseignement, l’Eglise voyait dans l’activité des loges une menace pour son emprise. Le résultat fut l’inverse de celui espéré et donna même lieu à un regain d’engouement pour la maçonnerie et aussi à la naissance d’un parti libéral structuré en 1846.
Grâce aux mesures prises par le cabinet Rogier, notamment des conces sions sociales, notre pays échappe à la contagion révolutionnaire française. Une bande d’aventuriers et d’utopistes, violant la frontière au hameau de “Risquons-Tout” fut même décimée par un détachement de l’armée belge commandée par le général Fleury-Duray.
Louis de Potter, franc-maçon ?
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En 1827, un frère Imbert l’invita à rejoindre la maçonnerie mais il déclina en raison des “mômeries” (sic) qui accompagnent les cérémonies et les rendent ridicules (Bologne, “Louis de Potter, un banni de l’histoire”). Il refusera de même une affiliation que lui proposera Lucien Jottrand. Dans ses rapports avec Goswin de Stassart – qu’il qualifie à diverses reprises de “mon Frère” (appellation maçonnique) –, à l’époque Grand Maître du Grand Orient, il
Alors que, nous l’avons constaté, la majorité des acteurs de la Révolution de 1830 faisaient partie des loges, nous n’avons pas trouvé d’indice et en core moins de preuve de l’appartenance de de Potter à la franc-maçonnerie et c’est probablement à tort que Paul Delsemme (“Les écrivains francsmaçons de Belgique”) le signale comme membre d’une loge bruxelloise “La Paix” en 1814 , époque où il était en Italie.
Si le Prince Guillaume, qui avait sa sympathie, avait été initié, le Prince Frédéric d’Orange, qu’il ne portait pas dans son cœur, avait été élevé, par la volonté du Roi Guillaume, à la dignité de Grand Maître de l’Ordre en 1818, avant d’être déchu lors de la Révolution. Une des conséquences fut la naissance, le 18 janvier 1833, du Grand Orient de Belgique qui se sépara de la Grande Loge d’Administration des Pays-Bas.
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écrit, le 22 novembre 1838, être un maçon aussi peu zélé que je suis mau vais catholique (M.R. Thielemans, Goswin de Stassart).
Par ailleurs, de Potter devait certainement savoir que Léopold Ier, initié en 1813 dans la loge militaire “l’Espérance” à Berne, avait exercé, avant son avènement au trône de Belgique, les fonctions de Premier Grand Surveillant de la Grande Loge d’Angleterre et son peu d’enthousiasme visà-vis du souverain ne devait pas le pousser à le rejoindre. Il est toutefois juste de dire que le roi se servit plus de la maçonnerie qu’elle ne se servit de lui et qu’il prit ses distances vis-à-vis de celle-ci.
Louis sera donc remplacé par ceux avec qui il avait rompu et devint le voisin posthume de Léopold Ier qui, malice de l’Histoire, du haut de la co lonne du Congrès, peut jouir depuis 1859, année du décès de celui-ci, de son triomphe sur son vieil adversaire.
Epilogue
En 1850, il refusera de se présenter aux élections comme le lui proposaient des députés… catholiques.
La même année, il assiste aux obsèques de Goswin de Stassart, Grand Maître du Grand Orient en 1835, avant que ce dernier ne soit banni par la maçonnerie qui l’avait défendu lors de son procès.
Le 24 mars 1854, c’est le décès brutal de son jeune fils Eleuthère qui menait en Italie une carrière d’artiste peintre trop tôt brisée.
Les funérailles de de Potter, qui se firent selon “un de ces modes établis depuis quelques temps par des sociétés particulières… sans les rites catho liques” (L. Jottrand, “Louis de Potter”), évoquent la laïcité et non la maçon nerie, même si ses anciens compagnons, quasiment tous maçons, suivirent le convoi. La question reste ouverte.
Souffrant depuis des années de bronchites, il tombe malade à Blanken berghe où il prenait les bains de mer. Ramené à Bruges, c’est dans sa ville natale qu’il s’éteint le 22 juillet 1859. Son fils Agathon et son beau-fils, le général Brialmont, conduiront le deuil tandis que son vieil ami le pein tre Navez tiendra l’un des cordons du poêle. Témoins de son histoire et de l’Histoire, Gendebien, Van der Linden, Rodenbach, Bartels, Quettelet, Jottrand, Ducpétiaux, oubliant pour un temps leurs querelles seront pré sents. Le peuple lui fit de modestes obsèques, d’après un de ces modes nou veaux établis depuis quelques temps par des sociétés particulières pour l’inhumation de leurs affiliés. Louis de Potter ayant désiré et réglé d’avance ce genre d’obsèques (Jottrand), sans les rites de la religion (Je suis loin d’être un catholique de conviction, et si je feignais de l’être, je serais coupable d’hypocrisie) et sans discours.
Les Souvenirs personnels de Louis de Potter (2 tomes).
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Et c’était sous ce point de vue tout d’avenir, que je voulais que nous renversassions le plus possible d’obstacles qui s’étaient jusqu’alors opposés à notre émancipation et à nos progrès. Je sentais bien que nos successeurs n’auraient ni le courage, ni la force de revenir sur nos réformes ; et notre Constitution, une des moins imparfaites qu’il y ait, entièrement puisée, pour tout ce qu’elle a de bon, dans les arrêtés du gouvernement révolutionnaire pendant le mois d’octobre, prouve assez que j’aie eu complètement raison.
Analyse des “Souvenirs personnels” de Louis de Potter par Théodore Juste (1860)
(…) Mais que voulez-vous que fit un simple homme de lettres, un savant si vous voulez, mais un pur savant, au milieu de la confusion de rouages d’une machine qu’il n’avait jamais vue auparavant : la machine gouvernementale ?
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Louis de Potter était à la base d’un milieu politique tout neuf où le hasard avait mêlé quelques lettrés dans l’expérience, et sou vent aux opinions divergentes, avec quelques hommes d’affaires, capables sans doute, mais déjà trop dégrisés de ce que cette classe d’hommes appelle “des utopies”.
Il comprenait si bien cependant que les objections qu’il rencon trait à la mise à exécution de ses principes n’avaient pas une valeur absolue, et s’en expliqua clairement dans ses “Souvenirs personnels” : Dans les temps ordinaires, mieux vaut sans doute une loi passable mais appliquée, exécutée et respectée que tout un code de bonnes lois que l’on méprise ou qu’on néglige. Mais nous représentions pour la Belgique une époque toute exceptionnelle : ce n’étaient point en effet de lois pour le moment présent que nous promulguions, mais bien des principes que nous posions pour source et pour base des lois futures.
Concluons par cet extrait du 8e volume de “L’Histoire du chris tianisme” par Louis de Potter, page 355 : Comme garantie de toutes ces libertés, le gouvernement avait affranchi la commune, voulant pourvoir à la recomposition des régences d’après les prin cipes d’une révolution populaire ; Cette recomposition aurait dû aboutir à la nomination de tous les magistrats formant le collège par le peuple.
Fin 1830, il fallait admettre que ce défi, intéressant d’ailleurs l’Eu rope toute entière, ne se règlerait pas sans l’intervention de l’Europe. Il déclara : Notre pays se trouvera encore dans des cir constances où l’intervention de nos voisins sera nécessaire. Ce que l’exemple de 1830 devrait nous enseigner, c’est à payer d’abord de nos propres moyens, assez pour garder voix au chapitre où nos af faires doivent en définitive toujours se régler. Ce que nous voudrons énergiquement, nous finirons toujours par l’obtenir de l’impossibilité où tous nos grands voisins se trouvent de s’entendre assez entre eux tous à formuler une autre volonté qui nous contrarie. Apprenons des souvenirs de 1830 à ne pas nous lasser si vite, à ne pas céder de si tôt. Apprenons des Suisses ce que les petites nations gagnent à savoir d’abord s’affirmer à propos.
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Louis de Potter ne peut être soupçonné d’avoir voulu constituer la Belgique nouvelle principalement au profit d’une aristocra tie. C’est le défaut de coopération au sein du Gouvernement provisoire qui lui aura fait donner sa signature aux décrets sur les élections pour le Congrès. Pas un défaut de démocratie qui aurait justifié l’adhésion forcée, dans l’intérêt de la Belgique.
Les publicistes les plus avancés à cette époque n’avaient presque aucune idée de la nécessité de faire descendre le droit électoral dans les masses démocratiques pour constituer la nation par suffrage universel. On s’imaginait qu’il suffisait de faire participer au droit électoral toutes les classes pour que les droits de tou tes les autres fussent parfaitement garantis.
Le tableau célèbre de Picqué représentant les membres du Gouvernement provisoire de 1830 sera l’occasion d’un ultime règlement de comptes, car les anciens rebelles refusèrent de poser si le portrait du plus rebelle d’entre eux n’était pas relégué dans l’ombre, occasion d’un dernier bon mot : Mon crâne pelé fut ce que le public remarqua le plus au milieu de tant de cuirs chevelus.
Dans l’histoire sélective et unanimiste de notre pays écrite au XIXe siècle, son épitaphe aurait pu être de sa plume : Je suis de ceux qu’on ne veut pas rappeler à la mémoire. Nous lui préférerons celle-ci, également de sa main : Le nom d’un mort ne peut plus être un épouvantail ; il peut devenir un symbole.
Que reste-t-il de cet “oublié de l’histoire” dans les annales de notre pays. Un buste posthume du à Joseph Jaquet dans une galerie du Palais de la Nation, un nom de rue à Schaerbeek où il voisine avec Gendebien, d’Hoogvorst, Rogier et Van de Weyer, et enfin, et c’est important, le souve nir des “premiers pas” de la Belgique dans votre mémoire !
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En 1870, Agathon publiera “Les Rognures” compilations des souvenirs pa ternels datant notamment de ses séjours italiens de jeunesse dans lesquels religion, indulgences, jeûnes et abstinences, inquisition, administration pa pale tiennent une place de choix, mais où il évoque également la reine de Naples, Caroline, la régente du royaume d’Etrurie Marie-Louise des Bourbons d’Espagne (mariage de cette branche avec la famille de Potter dont descendance en Amérique), Joachim Murat, héros des modernistes de l’époque, à qui il témoigne sa sympathie.
Déménagé du cimetière de Bruxelles au début du siècle, il repose aujourd’hui au cimetière de Saint-Josse ten Node. Sans doute était-il trop proche de l’église où dorment de leur dernier sommeil les honorables membres d’une dynastie qu’il tenta en vain de réformer. Son épouse dé cèdera en 1896.
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Louis de Potter, par lui-même… (Souvenirs personnels, 1839)
Lettre concernant la visite de M. t’Kindt.
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Louis de Potter, porte-flambeau de la liberté et de la nationalité belge, feu-follet politique ou simple “homme libre” ?
La famille passait pour joséphiste, pratiquait un subtil mélange d’irrévé rence envers les intrusions de la religion dans l’espace public, doublé de conservatisme et d’adhésion à l’ordre établi, de rejet craintif des boulever sements révolutionnaires bien plus que du simple maintien de la fidélité à Lel’Empereur.“voyage en Italie” que lui offre une famille bien nantie est peut être moins motivé par un souci éducatif que par celui de le mettre à l’abri des aléas de la conscription mais aussi des suites biologiques non désirées d’une liaison amoureuse.
Se partageant entre une Rome retombée sous un pouvoir pontifical de plus en plus mesquin et étouffant et une Florence terre protectrice des arts, de la culture et d’un sage réformisme, courant les bibliothèques, fréquentant assidûment salons littéraires et ateliers d’artistes, en correspondance avec Stendhal (qui lui réclame à lui le jeune Brugeois inconnu des lettres de
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Les saints, proclamés santo subito, risquent souvent de voir leur auréole pâlir très peu de temps après leur hâtive canonisation, parce que leurs vertus sont passées de mode, parce que leur rigueur morale a été par trop intransigeante… ou tout simplement par manque de miracles éclatants à mettre à leur actif et à proposer à la dévotion du bon peuple.
Francis Balace, professeur honoraire à l’Université de Liège.
Cette phrase un peu cynique pourrait parfaitement résumer la course du météore ou de l’étoile filante Louis de Potter dans le ciel politique belge. Rien ne semblait, hormis les qualités intellectuelles et la vive curiosité pour les spéculations politico-sociales, prédisposer ce fils de famille, né dans un milieu aristocratique, à jouer un rôle important dans la naissance du futur Etat belge.
Obligé par les Puissances de soumettre aux électeurs belges (1 pour 2.000 habitants !) la wijze Constitutie déjà accordée aux Néerlandais, Guillaume avait consacré tous ses efforts jusqu’en 1820-1821 à briser la résistance de l’épiscopat et d’une partie des catholiques, hostiles à une Grondwet qui mettait sur pied d’égalité la vérité et l’erreur et qui refusent d’y prêter serment de fidélité puisqu’elle prévoyait la tolérance religieuse et la nonsuprématie dogmatique du catholicisme.
recommandation auprès de la haute société florentine), Louis de Potter a pu acquérir un bagage culturel peu fréquent parmi les Belges du temps.
Obsédé par cette lutte, confiant qu’à terme il finirait par se rallier les Belges par ses mesures économiques hardies et novatrices, Guillaume Ier ne s’est pas rendu compte à temps qu’entre ses peuples du Nord et du Sud s’est creusé un fossé de mœurs et d’habitudes rendant illusoire tout réel amal game. Les diplomates étrangers sont plus perspicaces : “extrême antipathie naturelle”, “ils sont comme l’eau et le feu”.
La documentation recueillie en Italie va lui permettre de publier la vie de l’évêque réformateur toscan, Scipio de Ricci, et son gros ouvrage sur “l’Histoire des conciles”. Des fragments en seront bien plus tard traduits en anglais et publiés à New York pour alimenter à l’époque de l’agitation nativiste et de la “Protestant Crusade” la polémique contre les couvents féminins et leurs supposées turpitudes.
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Hélas, il n’est bon bec ou bonne plume que de Paris et la critique de Stend hal fustigera une œuvre “aussi bien pensée que mal écrite”, lui reprochant un style lourd et pesant d’érudit teutonique qui a fait “de cette amusante matière un livre assommant”. L’histoire du corps est souvent parallèle à celle de l’esprit : l’hédoniste guitariste aux cheveux frisés peint par Odevaere en 1811 s’est transformé en quelques années seulement en une espèce de “pri vat-dozent bavarois” dont la calvitie fort précoce fait ressortir l’amplitude de la boîte crânienne en forme d’œuf et l’allure volontairement compassée.
Rappelé en Belgique en août 1823 par la maladie de son père, Louis va aller s’installer à Bruxelles, capitale alternante d’un royaume hybride dont le Souverain est tenu par les Huit Articles de Chaumont de pratiquer l’amal game le plus parfait entre ses sujets du Nord et du Sud, alors que le même texte rédigé par les Alliés ne cesse de se référer à l’existence de deux peuples bien distincts – Belges et Hollandais – réunis sous une même cou ronne et dont il faudra préserver les droits et les religions.
Il a remporté en 1820 sa victoire facile sur l’opposition catholique grâce au soutien que lui ont apporté les Vieux-Libéraux belges, disciples de Voltaire et de Benjamin Constant, qui transposaient dans la personne du souve rain leur révérence philosophique pour la prédominance de l’Etat sur une Eglise qui prétendait se situer à la fois en dehors et au-dessus de lui.
Lors du vote de la mi-août 1815 sur la Grondwet, les partisans du oui se re crutent majoritairement en Wallonie et dans les villes du Sud, les opposants en Flandre (100 % de votes négatifs à Ypres et à Anvers). Des dispositions contenues dans la Grondwet, comme la liberté de la presse et l’absence de toute censure préalable, sont corrigées par un simple arrêté royal de 1815 érigeant en délit la critique des actes gouvernementaux ou toute tentative d’exciter l’opinion publique.
Quand cet arrêté deviendra la loi du 6 mars 1818 qui y ajoute la suppression du jury dans les affaires de presse, on s’aperçoit qu’elle a été votée par une majorité parlementaire groupant les députés hollandais et ceux des provinces du Sud considérés comme de Vieux-Libéraux. L’union des catholiques et li béraux qui fera l’indépendance belge, cet unionisme de plus en plus vacillant après 1830 mais qui conditionnera toute la vie politique, avec ses hauts et ses bas, ses espoirs et ses crises de confiance, jusqu’à la rupture de 1846 et l’émergence d’un parti authentiquement libéral, est née des efforts maladroits du Roi Guillaume pour tenter de cimenter l’union de ses peuples.
L’Autrichien Binder signale à Metternich que les Belges sont blessés dans leur amour-propre d’être réunis à un si petit pays que la Hollande et que l’amalgame moral est impossible… Or, sur le plan d’éventuelles mesures liberticides, l’opposition n’est pas forcément là où le Belge de 2011 croit devoir la trouver.
Une propagande anticléricale avait été discrètement encouragée dans la presse tandis qu’une législation muselière s’était abattue sur les organes catholiques comme “Le Spectateur Belge de l’abbé De Foere”, condamné à deux ans de prison, ou la condamnation de van der Straeten et à la radia tion du barreau de ses avocats.
Le roi croit, naïvement, que le regain d’opposition en Belgique reste d’ori gine religieuse. Il craint la force d’attraction que la France bourbonienne de la Congrégation et des Chevaliers de la Foi pourrait encore exercer sur les catholiques belges. Les gouvernements voisins se regardent en chiens de faïence depuis 1815, se soupçonnant de noirs desseins réciproques.
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Le projet de Guillaume et de son ministre van Maanen (un ancien jaco bin batave qui avait tonné jadis contre l’exécrable maison d’Orange) était double, mais les deux hommes tissaient sans le savoir une tunique de Nessus qui allait les dévorer. Pour combattre les catholiques belges et leur opposition, il faut profiter de la présence surabondante de Français jaco bins, bonapartistes, girondins ou montagnards de toutes obédiences, dans les salles de rédaction des journaux, où ils se sont imposés par inaptitude locale à la littérature politique.
Licence totale leur est donnée d’attaquer la France de la Restauration, les jé suites, la Congrégation car leur prose anticléricale sert jusqu’en 1820 contre les partisans de l’évêque de Gand Mgr. de Broglie, contre les opposants au Collège philosophique après 1825, contre les signataires catholiques du pétitionnement en 1827-1828.
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Quand le gouvernement des Tuileries se plaint de cette campagne de presse hostile, le pouvoir hollandais qui, en quelques années, avait fait saisir 23 jour naux et condamner 80 journalistes, se donnera les gants d’invoquer la Grond wet et la liberté de la presse, pour lui opposer une fin de non-recevoir…
Comme l’arrêté royal de 1815 et la loi de 1818 érigent en délit toute cri tique des actes du gouvernement par voie de presse, comme l’ignorance linguistique phénoménale d’alors empêche les journalistes de remplir les colonnes d’articles traduits de l’anglais ou de l’allemand, la surface rédac tionnelle des journaux (même ceux que Guillaume n’a pu ni acheter ni faire rédiger par des réfugiés français à sa solde) sera de facto consacrée aux seules choses de France.
Ne prêtait-on pas au “conspirateur stendhalien” grenoblois Didier, officiel lement guillotiné pour bonapartisme, le projet de proclamer roi de France le Prince d’Orange ou son père ? Un certain Libri-Bagnano, plus tard folli culaire à gages de Guillaume, est comme par hasard mêlé au complot. La Haye pour sa part soupçonnait le ministère Polignac d’attiser par l’envoi d’agents secrets l’opposition catholique dans l’espoir de récupérer les dé partements belges et, par un succès extérieur éclatant, calmer la fronde parlementaire en France.
Et là, Guillaume et son ministre n’ont pas perçu le danger d’un phénomène de génération. Les jeunes diplômés des nouvelles universités fondées en 1817, ces jeunes avocats auxquels la politique linguistique, la méconnais sance de la “landtaal” ou, tout simplement, la prépondérance scandaleuse
Chez de Potter, le royalisme orangiste hérité du joséphisme ne va pas jusque-là. Sa fréquentation probable des cénacles célébrant pêle-mêle Buonarotti, carbonari d’Outre-Monts et Egaux chers à Gracchus Babeuf, a
au fil des mois, ils vont s’apercevoir que la conduite du roi et du gouvernement, quelles qu’en soient les motivations ou excuses, relève du même absolutisme, du même sic volo, sic jubeo que celui qu’ils ont eu pleine licence de dénoncer en France. Et l’inévitable rapproche ment se fera entre Jeunes-Libéraux et Jeunes-Catholiques, influencés par Lamennais et secouant le poids d’une hiérarchie trop attachée au maintien de privilèges surannés. On sursaute en lisant au fil des rapports des gou verneurs et fonctionnaires royaux, la virulente dénonciation de la coalition Louisjésuito-libérale.dePotter
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Le discours de Guillaume devant les Etats généraux lui semble en 1825, à propos du tant décrié Collège philosophique, franc et loyal, digne de lui valoir le surnom d’honnête homme. Il a fait hommage au roi de sa bio graphie de Scipio de Ricci, louant le sort qui lui permet de vivre sous des institutions libérales qui, par des principes de modération et d’équité, ne mettent aucune barrière à la pensée.
se situe très exactement à la ligne de séparation des eaux entre “vieux” et “jeunes” Libéraux. Son goût pour les réformes toscanohabsbourgeoises, ses restes de joséphisme le situent clairement, à son re tour en Belgique, dans le premier camp.
Le fougueux tribun commencerait-il une carrière de sycophante ou de journaliste à gages, à l’exemple du français Louis Teste, pilier de la Loge de Liège, propagandiste stipendié de Guillaume Ier en attendant de devenir le coryphée de l’agitation orangiste après 1830 et un ministre concussionnaire de Louis-Philippe ?
des ressortissants des provinces du nord dans la distribution des emplois administratifs ferment bien des carrières, se sont rabattus sur le métier de journaliste, lui-même empreint d’un intérêt forcé pour les choses politiques Lesfrançaises.débats parlementaires, la Charte, les procès de presse, les ordonnances de Charles X les passionnent. Là où les Vieux-Libéraux, restés joséphistes ou voltairiens, ne pensaient qu’en termes d’anticléricalisme et d’étatisme, ils vont penser, à la lecture des journaux d’outre-Quiévrain, en termes de Insensiblement,liberté.
développé chez ce quadragénaire une volonté de rompre avec l’aristocratie et la bonne bourgeoisie dont il est issu, comme en témoigne son mariage avec la fille d’un tapissier, mais aussi son refus, à la mort de son père, de relever ses titres de noblesse.
A notre sens, il s’agit moins d’un souci d’égalitarisme, ou d’économies sur les taxes de relief, que de celui d’éviter de se lier politiquement les mains en risquant d’être désigné par le pouvoir pour siéger dans l’Ordre équestre au sein des Etats provinciaux. “L’homme libre” de Potter, tonnait encore, au nom de la liberté de pensée, contre les maudits jésuites dans les polémi ques relatives à la signature d’un concordat entre Rome et Guillaume.
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Mais quand cette même liberté de penser, et surtout d’écrire, lui semblera menacée par les durcissements de la législation sur la presse, qui tournent allègrement les garanties de la Grondwet, quand il lui semblera, comme naguère à Beaumarchais, qu’il n’est plus possible de louer si l’on n’a pas licence de critiquer, le glissement se fera tout naturellement vers les rangs des Jeunes-Libéraux qui, comme Charles Rogier, Joseph Lebeau ou Paul Devaux, ont lancé un appel à l’union des catholiques et des libéraux sur un programme minimal en quatre points qui évitent soigneusement toute référence de type philosophique ou religieux : liberté des langues – liberté de la presse – inamovibilité des juges – responsabilité ministérielle.
C’est ce dernier point qui permet à de Potter, adversaire du ministre van Maanen, de franchir le pont, au nom même des principes libéraux, et d’exhorter à bafouer et honnir les ministériels, hommes politiques ou jour nalistes dévoués au pouvoir. Cet article non signé (8 novembre 1828) lui vaut inculpation et incarcération, et c’est de sa cellule que partira le fameux article du Courrier des Pays-Bas du 19 novembre qui concrétrise, en ter mes frappants, le ralliement du futur “martyr de Potter” au nouvel évangile qu’est l’unionisme :
Les anti-jésuites ont tant fait que dans les circonstances actuelles ce serait une lâcheté que de profiter du peu de liberté de presse que nous laisse le ministère pour accabler ceux qui, avec nous, la réclament toute entière. Ce serait une lâcheté d’attaquer le jésuitisme qui est devenu chez nous sy nonyme d’opposition. Que dût le mot d’ordre être Saint Ignace, dussent les drapeaux porter un monogramme et le Sacré-Cœur… Dussent enfin les ins tructions partir du Vatican, le devoir de tout vrai patriote est dorénavant de combattre dans les rangs de cette opposition toujours libérale en ce qu’elle
Nous touchons ici à un insondable mystère. Comment un publiciste aux origines flamandes, mais qui ne s’exprime qu’en français, aux formules ampoulées, aux distinctions subtiles entre anticléricalisme de principe et union de cœur avec l’opposition catholique, entre révérence envers un roi qu’il pense honnête et n’être en rien un tyran et la virulente dénon ciation de ses ministres, va-t-il du fond de sa cellule ou de son tardif exil en France passer pour un “martyr” d’abord, pour l’inspirateur de la révolte et le Lafayette belge ensuite ?
On saisit ses papiers, feint d’y trouver les traces d’un vaste complot subver sif, on le frappe de huit années de bannissement. Il finira, après diverses péripéties, contées dans le corps de l’ouvrage, à gagner la France, non sans avoir adjuré en juin 1830 encore Guillaume Ier de sauver la Belgique tant qu’il en était encore temps. Bref, un Mirabeau malgré lui dont le mythe patriotique fera un Danton…
empêche les usurpations du ministère, seules véritables causes des malheurs d’un peuple et des dangers d’un gouvernement.”
N’en reste pas moins un fait aveuglant : fin XVIIIe siècle, le taux moyen d’analphabétisme, villes et campagnes confondues, est de 39 % au moins chez les hommes, 63 % chez les femmes. Dans les premières années du
Il garde toujours un espoir naïf en un roi qui ne serait que mal conseillé, (vos ministres, vos flatteurs et vos conseillers vous trompent et vous égarent), auquel il a envoyé sa brochure sur l’union catholico-libérale (cette alliance qui, jurée sur l’autel de la patrie belge par la philosophie et la religion, est un des événements les plus remarquables de votre règne ; il nous sera envié par les peuples civilisés des deux mondes). Mais le gouvernement a perdu patience devant cet homme qu’on a incarcéré pour le faire taire et qui a réussi à transformer sa cellule en salle de rédaction, en tribune et en centre de correspondance.
Il y a certes le battage organisé autour de son incarcération et sa proscription par les rédacteurs et lecteurs du “Courrier des Pays-Bas” et feuilles alliées ; les collectes et souscriptions organisées pour couvrir les frais de sa défense et amendes, les hourvaris autour des tribunaux qui le condamnent.
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On connaît bien la suite : condamnation à dix-huit mois de prison (dans des conditions confortables aux Petits Carmes : guitare, cage à canaris, petit poêle et secrétaire, défilé incessant de visiteurs et sympathisants), sans compter la possibilité laissée au “martyr” de donner un second fils à son épouse.
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règne de Léopold Ier, après quarante ans de troubles et de guerres, il a at teint entre 80 et 90 % et aucune des feuilles d’opposition nées sous le régi me hollandais et qui ont “fait la Belgique” n’avait plus de 3.000 lecteurs !
Les Bruxellois, les Belges qui criaient “Vive de Potter !” n’avaient jamais lu un traître mot sorti de sa plume. Comment dès lors expliquer cette popularité ? Un nom facile à retenir et prononçable sans effort dans les deux idiomes ? Des subsides incitatifs distribués à bon escient par ses amis parmi les classes populaires qui, au fond, ont toujours été, parce qu’elles n’ont rien à perdre, les seules à gueuler puis à se faire casser la gueule sur les barricades, parmi les Waterkapoenen, ces stokslagers utilisables par le plus offrant, comme certains épisodes de la révolution brabançonne l’avaient montré ?
Des mémoires du temps mentionnent que “ce cri partait de la bouche des meneurs, car la populace criait vive tout le monde, tantôt de Potter, tantôt Napoléon, tellement il est vrai que tout est parodie chez ces singes perpé tuels de la France, comme elle criait vive la liberté, vive la république, et vive ou meure tout ce qui lui passait par la tête”. Il est vrai qu’il est plus aisé de courir aux armes et au besoin de mourir, en criant “vive quelqu’un” que “vive l’inamovibilité des juges”.
Le 18 octobre 1830 encore, le commandant local de la Koninklijke Marechaussee ne signale-t-il pas à Heerlen, ville de l’actuel Zuid-Limburg hollandais qui n’avait rien de “belge”, une émeute au cri de “Vive de Potter !” qui se terminera par la pendaison en effigie, à la sonnette du commissariat de police, de “M. le ministre du Culte protestant” ? Décidément, Louis de Potter était a man for all seasons dont le nom recouvrait tous les motifs de toutes les oppositions ! Avec justesse, feu le Professeur Robert Demoulin, le grand spécialiste de la Révolution de 1830, pouvait clore ce débat en écrivant : Louis de Potter est un grand nom : sa popularité est immense dans toute la Belgique. C’est un persécuté, un exilé, et auprès des masses, c’est le plus beau des titres. Bien sûr, mais reste l’essentielle et insoluble question de savoir qui a popularisé dans ces masses le nom du “martyr” ? Réfugiés en France, ni de Potter, ni Bartels, ces deux “porte-drapeaux de l’anti-Hollande”, ne sont pour rien dans les émeutes qui suivent la repré sentation de la “Muette de Portici”. Bartels écrira même en 1836 : de Potter et moi, nous n’avons jamais prévu ou voulu la Révolution. La presse d’op position se déclare encore favorable au maintien de la dynastie, pour autant
Le principal service que rend au tout frais Gouvernement provisoire ce lui dont la voiture, dételée, est portée à bouts de bras à l’Hôtel de ville de Bruxelles le soir du 28 septembre est de cautionner devant la foule le nouveau pouvoir (gouvernement populaire qui est votre ouvrage), d’adjurer
qu’elle enterre “le monstrueux amalgame, cette chimérique centralisation, cette union contre nature”, se bornant à réclamer la séparation législative et administrative, et que “dorénavant, tout sera Belge en Belgique”.
Ce n’est qu’à l’issue des sanglantes journées de septembre qu’il franchira la frontière, écrivant encore à Sylvain Van de Weyer qu’il ne se sent pas indispensable au succès, déjà acquis à ses yeux, de la cause et préfére rait retourner à sa famille et à ses occupations. Faut-il pour autant croire, comme ce présent livre l’écrit après bien d’autres, qu’il y aurait eu “une manoeuvre subtile inspirée par Gendebien” visant à adjoindre de Potter au gouvernement “pour détourner les ouvriers de la lutte des classes au seul profit de la lutte nationale”.
C’est un des grands paradoxes de l’Histoire. Tout ce qui s’est fait, en sep tembre, au cri de “Vive de Potter !” s’est fait sans de Potter, comme si ses amis et admirateurs eux-mêmes voulaient bien se servir de son nom, de sa popularité, mais ne le voyaient nullement, lui l’homme des bibliothèques et de l’étude, comme un leader charismatique, capable d’enflammer le peuple, voire tout simplement comme un homme d’action.
Quand à l’heure de l’abattement et du doute, devant l’anarchie politique régnant à Bruxelles peu avant l’intervention des troupes du Prince Frédéric, les leaders Gendebien, Van de Weyer, Chazal, etc., ont “un moment de dé faillance”, gagnent Lille ou Valenciennes et vont consulter de Potter, celuici, loin de les exhorter à la fermeté, se contentera de refuser de se joindre à eux en un comité en exil et se retirera à Lille.
C’est là une reconstruction postérieure dans la ligne des écrits de Bartels et des historiens postérieurs tenants du thème d’une “révolution proléta rienne” confisquée par la bourgeoisie. Beaucoup plus simplement, il était malaisé de faire passer le “martyr” à la trappe, tout en se rendant compte qu’il serait encombrant et quelque peu limité, après avoir fait acclamer son nom pendant de longues semaines. C’est le sens des paroles de Gen debien, admettant implicitement et prophétiquement qu’on s’est servi du nom du journaliste exilé mais qu’il fallait lui tenir les rênes très courtes, le canaliser comme on dirait aujourd’hui.
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D’emblée, il a persiflé sur le partage du gâteau auquel il ne tient guère à participer, se mettant volontairement hors jeu en professant des sentiments ouvertement républicains et ultra-radicaux, qui lui valent de ses collègues comme d’observateurs étrangers et surtout de la propagande orangiste et hollandaise le soupçon d’aspirer à la dictature personnelle en flattant le peuple. Lui-même considère ses collègues et anciens amis comme courant après titres et prébendes.
On sait les difficultés qu’auront le jeune Etat belge et son armée à se débar rasser plus tard de ces encombrantes légions belges-parisiennes, brigade “La Victorieuse” et autres corps non-régnicoles attirés vers les juteuses opportu nités de grades et de carrière offertes par la Révolution. Au Gouvernement provisoire, on ironisait : de Potter voudrait-il par hasard se faire général ?
Il n’y a dans les rangs des députés qu’une très nette minorité républicaine dont deux de ses amis, Lucien Jottrand (l’homme de la double contradic tion : catholique et libéral avancé, wallon et flamingant) et l’étrange abbé Désiré de Haerne, Brugeois comme de Potter. Désormais pour ce dernier,
de conserver l’ordre et de se tenir en garde contre l’anarchie et ses funestes suites. Toujours beaucoup de Mirabeau et fort peu de Danton...
Ses initiatives font peur, comme cette lettre où il affirmera à un leader militaire éventuel disposer le 17 septembre de plus de 10.000 vétérans armés des Trois Glorieuses parisiennes de juillet 1830 (qui s’offrent à moi, c’est-à-dire à la Belgique par mon entremise), dont 7.000 à 8.000 Belges de France, le reste des Français recrutés dans le faubourg Saint-Antoine, des Allemands, des Polonais surtout et quelques Anglais, du vrai peuple (sic).
Il voulait, à l’image des premiers révolutionnaires d’Amérique, faire des membres du gouvernement de simples exécutants des volontés d’un Congrès national élu démocratiquement, et se sentira mis au placard quand les élections au Congrès se solderont par la défaite de ses idées et le succès d’options nationales certes, mais solidement conservatrices ou modérées.
Il est, au Gouvernement provisoire, comme au Comité central, une sorte de pièce rapportée, la tête chauve et l’homme mûr (44 ans !), qui tranche sur le reste de l’équipe, beaucoup plus jeune. Qui tranche aussi parce que son nom est connu de tous alors que ses collègues sont pour la plupart très largement ses cadets et de simples notabilités locales soudain propulsées au premier plan par les événements.
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Deux jours après l’ouverture du Congrès national, il démissionne de ses fonctions pour, dit-il, couper court aux calomnies qui l’accusent de rêver de pouvoir personnel. Le 23 novembre 1830, le lendemain de l’adoption par le Congrès de la monarchie constitutionnelle par 174 voix contre 13, il publie une dernière et éclatante profession de foi républicaine dans laquel le il avoue avoir rêvé d’une République des provinces belges, sans se ren dre compte que le seul mot de république faisait, comme Joseph Lebeau l’affirmera dans son grand discours, l’effet d’un épouvantail sur les nations européennes, et surtout sur les électeurs et députés âgés de cinquante ans et qui avaient connu et le pitoyable échec des Etats-Belgique-Unis, utopie fédéraliste, et les excès des Sans-culottes.
Vous qui, étranger à la révolution, êtes venu à sa suite, vous trouvez moyen de vous rendre agréable au peuple avec qui, sans elle, vous n’auriez jamais eu aucun point de contact, en la répudiant aussi naïvement qu’il la répu die lui-même ; et moi, qui après en avoir rassemblé les éléments, y aurais volontiers mis obstacle avant qu’elle n’éclatât, je suis, pour l’avoir voulue, maudit et persécuté par le peuple qui l’a faite...
Dès lors, comme il le reconnaîtra de façon désabusée dans ses Souve nirs personnels publiés en 1839, il reste “Démophile”, pour le peuple, mais devient très sceptique sur la possibilité de construire des réformes et la république de ses rêves par le peuple : Réaliser dans l’état actuel des
Louis de Potter essaye d’animer la républicaine Association pour l’Indépen dance nationale, mais n’est plus aux yeux cette fois des autorités belges qu’un encombrant legs des années 1828-1830. On le lui fait sentir, au besoin par des allusions à des menaces physiques, et le Pater Patriae n’a plus qu’à s’exiler en France. Cette fois il n’y a bien sûr pas de bannissement judiciaire, mais un exil volontaire à Paris qui durera de fin février 1831 à septembre 1839. Il pourra y méditer à loisir sur l’ingratitude des masses, de ce peuple qu’il a naguère déifié mais qu’il n’a jamais vraiment connu, ni compris.
Pour lui, il y a eu une Révolution belge et qui n’a pu tenir ses promesses d’émancipation sociale parce qu’elle a été mise sous l’éteignoir institution nel par ses anciens amis et la nouvelle dynastie. Lucide, il fustigera, dans une lettre ouverte à Léopold Ier, la versatilité des masses et leur ralliement au roi :
qui a traversé comme une comète le ciel de la Révolution belge, tout est fini quelques semaines seulement après son retour triomphal à Bruxelles.
intelligences le suffrage universel n’engendrerait que l’anarchie. Le peuple n’avait ni les lumières, ni la force de volonté indispensable pour réduire ses adversaires au silence et les ranger au devoir. La république, je le reconnais aujourd’hui, était impossible.
Le parti orangiste, qui se tenait plus ou moins coi depuis 1834 et s’effritait, y voit paradoxalement l’occasion de regagner du terrain en versant l’huile de ses subsides sur le feu de l’agitation républicaine et anti-dynastique. Enfin, les débuts de la grande Crise d’Orient de 1839-1841 vont mettre fin à l’entente cordiale Londres-Paris, les mettre même au bord de la guerre en 1840, ce qui risque de priver le jeune Etat belge de la protection efficace des deux garants qui sont surtout ses parrains.
Nous touchons à l’épisode le plus délicat et le plus controversé de la vie de Louis de Potter : le “martyr” de la prison des Petits Carmes devient, à la stupéfaction de ceux qui connaissent mal l’action des agents oran gistes au sein de l’extrême gauche et de tous les déçus de la Révolution, partisan non pas d’une reconstitution telle quelle du défunt royaume de l’amalgame, mais de ce qui était le voeu des pétitionnaires de 1828 : deux
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Ou elle refusait et se brouillait avec toutes les Puissances, ou elle se ralliait à un traité qui l’amputait des parties du Limbourg et du Luxembourg qui s’étaient ralliées à la Révolution belge et qu’elle administrait depuis le refus de Guillaume dans un provisoire qu’elle croyait naïvement finir par être définitif. Un Alexandre Gendebien, farouchement opposé à la ratification du traité, agite des projets de soulèvement de l’armée, travaille les classes populaires des villes.
En effet, et sur ce point il a raison, le pays est de nouveau dans une si tuation trouble. La période révolutionnaire va-t-elle s’achever et “décéder” en 1839 où les années écoulées ne sont-elles que pré-révolutionnaires ? La décision de Guillaume Ier, en date du 11 mars 1838, de signer enfin le Traité des XXIV Articles mettait la Belgique au pied du mur.
En septembre 1839, de Potter rentre en Belgique. Pourquoi ? Il a bien sûr subi quelques tracasseries de la part de la police de Louis-Philippe à cause des contacts maintenus avec le catholique ultra-démocrate Bartels soupçon né d’ourdir des complots, mais aussi avec nombre d’utopistes égalitaires et “sociologues” de France. Ces coups d’épingle et une perquisition ne sont pas suffisants. Il y a le désir d’être présent dans sa patrie pour le cas où.
Le Louis de Potter qui a été l’auteur de la première proposition – avortée –de déchéance de la maison d’Orange et qui a félicité Tielemans de l’avoir poursuivie au sein de la Commission de Constitution, qui a défini la Belgique comme une nation longtemps pressurée par la rapacité d’un roi marchand, dilapidateur pour ses courtisans, avare pour lui-même est retourné à ses anciennes amours de joséphiste et de vieux libéral. Guillaume Ier ? : C’était tout bonnement un roi progressif, qui ne se contentait pas d’être roi de nom, roi constitutionnel, pour manger oisif, au râtelier de la liste civile. Il voulait sincèrement ce qu’il croyait le bien, et ce bien il l’aurait fait, pour autant que sa position lui permettait ; car il était aussi éclairé que peu méchant...
En effet, c’était bien la peine d’avoir fait la révolution... Même si la dynastie qui couvrirait de son manteau d’hermine le nouveau pacte fédéral hollando-belge se devrait d’être une Monarchie socialiste (sic).
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Le problème est qu’en reconnaissant la Belgique et une fois le Traité ratifié le 19 mars 1839, Guillaume a abdiqué en faveur du Prince d’Orange, celui naguère si populaire en Belgique. Devenu Guillaume II, il fut lui aussi victime de son imagination, des flatteries prodiguées par les dernières dé putations d’orangistes belges, des espoirs insensés de pouvoir, à la faveur de la crise internationale soit partager la Belgique entre la France et les Pays-Bas soit établir la monarchie double, but éphémère des premiers jours de septembre 1830.
états séparés unis au sein d’une “Fédération Hollando-Belge”, rêveries de de Potter en 89, jugera péremptoirement Henri Pirenne.
Le raisonnement s’apparente à la chanson satirique. C’était bien la peine assurément de changer de gouvernement. En effet, gommant l’aspect na tional de la révolte de 1830, de Potter n’hésite pas à écrire : La Révolution de 80 avait pour but de fonder une République sociale. Elle n’a pas at teint son but et elle n’a eu pour résultat que de diviser un puissant Etat en deux parties. Il est donc temps de réunir à nouveau deux peuples qui se complétaient l’un l’autre. Ces propos se comprendraient plus aisément si de Potter avait envisagé une alliance, fédérale ou confédérale, entre une République belge et une République des Provinces-Unies ressuscitée. Mais comme il considère maintenant la République comme une utopie irréalisa ble à cause de l’apathie des masses populaires, le voilà devenu orangiste au sens de partisan de la maison d’Orange-Nassau !
En septembre 1841, Guillaume se compromettra sottement dans le “Com plot des Paniers percés” organisé en son nom contre Léopold Ier par une série de laissés-pour-compte de 1830. L’orangisme est mort et le ralliement à la Belgique des grands aristocrates et industriels qui l’avaient jadis dirigé tiendra de la cavalcade, si ce n’est à Gand où l’avocat Metdepenningen et la Loge Le Septentrion le garderont encore vivace par hostilité libre-penseuse à l’emprise catholique sur l’Etat belge.
Louis de Potter ? Un homme libre, qui a su et voulu rester libre, n’être guidé que par sa sincérité indéniable, ce qui explique qu’en Belgique il sera toujours, en dépit d’une énorme mais très éphémère popularité, à contre-courant de “l’air du temps”. Ce fut sans doute, là, son honneur...
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Louis de Potter, homme indiscutablement sincère même dans ses palino dies politiques, dépourvu de tout esprit de lucre et de recherche d’avanta ges personnels, n’a pas été un des folliculaires stipendiés par un orangisme mourant, mais qui ratissait large parmi tous les mécontents. Désormais, il boude en pessimiste la politique qui ne peut aboutir qu’au despotisme qui, quels qu’en soient les oripeaux, sera exactement le même qu’il soit exercé au nom de la légitimité, ou de la monarchie de fait, ou de la république tricolore, ou de la démocratie rouge ou enfin du socialisme. Ultime avatar anarchiste, tous les régimes étant à ses yeux viciés par le simple fait qu’ils exercent un pouvoir ? Non, il ne veut plus être qu’un réformateur social, un rationaliste colinsien, resté fidèle aux vues généreu ses du Buonarotti de ses enthousiasmes de jeunesse. Ses revendications dans de nombreuses brochures éditées à ses frais ou dans l’éphémère feuille “L’Humanité” sont tantôt prophétiques (prêts à faible taux d’intérêt, instruction gratuite, législation vieillesse, droits de succession, “dot sociale” annonçant les actuelles primes d’installation) tantôt illusoires (collectivisa tion de la propriété foncière, extinction des dettes au décès des débiteurs, fin des regroupements capitalistes). Il n’a, faute d’engagement nouveau en politique, aucune chance de les voir aboutir.
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Louis de Potter jeune, jouant de la “guitarra” italienne, peint par Joseph-Denis Odevaere (1775-1830) en 1811. © Collection de la Fondation J. van Caloen, Lophem (Bruges).
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Auto-portrait par Matilde Malenchini-Meoni (école de Vincenzo Camuccini 1771-1844), peignant son ami dans la bibliothèque de Scipio de Ricci, évêque de Pistoie et Prato, conseiller du grand-duc de Habsbourg. Le petit portrait en arrière-plan se trouve au musée Groeninghe à Bruges et est reproduit à la page suivante.
© Hugo Maertens, Sint-Andries – Courtoisie Musées Royaux des Beaux-Arts de Belgique et Annuaire des musées de Bruges, 1989-1990, Bruges.
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© Collection privée à Bruges. Remerciements à M. Dominique Maréchal, conser vateur (hon.) du Musée d’Art Ancien à Bruges et conservateur des Musées des Beaux-Arts de Bruxelles.
Louis de Potter de Droogenwalle peint par son amie Matilde Malenchini-Meoni dans la bibliothèque de Scipion de Ricci, évêque de Pistoye et Prato, Florence, vers 1818.
La sœur de Louis, Marie-Christine de Potter, épouse du baron J. van Caloen, joue d’une grande harpe au château de Lophem. Elle est peinte par Joseph Odevaere (Bruges, 1775-1830). Remerciements à la Fondation Jean van Caloen, Lophem.
Château initial de Lophem où naquit Louis de Potter, construit par son père sur l’ancienne cure de l’évêque de Bruges. Aquarelle du peintre Holvoet, 1848. © Fondation J. van Caloen, Lophem.
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Entrée triomphante de Louis de Potter à Bruxelles dans le carrosse de Rodenbach, le 18 septembre 1830. © Archives de la Ville de Bruxelles.
“Scène des Jours du Septembre de 1830” (Louis de Potter tenant le bas du drapeau belge), peinture de G. Wappers, 1835. © Musées royaux d’art et d’histoire, Bruxelles.
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Louis de Potter dans la prison rue des Petits Carmes, par un auteur non identifié. © Archives de la Ville de Bruxelles, collection iconographique.
Louis de Potter, habillé de pots, incite les gens à devenir des “mendiants de la liberté belge” (S.M. Coster, Amsterdam).
Rogier portant le drapeau belge sur lequel est inscrit le nom de Louis de Potter et d’autres membres du Gouvernement provisoire (Ch. Soubre, 1878).
© Musée d’Art wallon.
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Médaille commémorative “de Potter – Unio”, Vhyrat, F., 1830, Cabinet des médailles, ministère des Finances.
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Premier “gouvernement révolutionnaire de Belgique” dénommé “Gouvernement Provisoire” dont le Doyen est Louis de Potter et, à la mode Robespierre de France, le fameux “Comité central” présidé par Louis de Potter. Au premier rang, on trouve Charles Rogier, Louis de Potter (de profil) et Félix de Mérode. Au second, Gendebien, Jolly, van de Weyer, de Coppin, van der Linden et d’Hooghvorst. Dessin d’après la peinture de Picqué, située dans la Cour de Cassation à Bruxelles.
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Nicolas de Potter
Ces lignées se rejoignent dans l’antique baronnie de Heule 5 à Courtrai. Cette métropole, accrochée à Lille, réunit les artisans du textile de la Lys transfrontalier. Ceux-ci produisent depuis Renaix et Roubaix pour les
3 Annuaire de la Noblesse de Belgique de 1896, Office Généalogique et Héraldique du Royaume de Belgique, p. 76.
5 Les trois références ci-dessus réunies.
2 Histoire généalogique Potter, Madame Henri de Potter d’Indoye, née Princesse Elisabeth de Mérode, Tradition & Vie, 1963, 422 p.
Origine des “Potter”
Pour mieux saisir l’esprit du chef spirituel de la Révolution belge, ses origi nes familiales et industrielles – bousculées par plusieurs guerres et exils –méritent d’être mieux cernées.
Cette vieille souche familiale nommée “Potter” trouve ses origines au cœur des comtés et principautés de Liège, de Picardie, de Flandre Occidentale et de Flandre française.
1 Généalogie de la famille Kranenburg, uitgeverij Dijksma, Utrecht, 1922.
Anciennes frontières
Un texte de la famille Kranenburg cite un Jacob de Potter comme bourg mestre de Renaix en 1270 tandis qu’un acte de 1357 cite son fils Gilles de Potter comme étant un échevin de Renaix et en même temps rentier dans le Franc de Bruges. Sa propriété se nomme “Ten Ysengaerde Bruges” . C’est de lui que descend la branche du co-auteur La généalogie mentionne aussi, en 1530, un Gilles de Potter de Dixmude, près de Bruges. C’est de ces deux Gilles que descend la branche du célèbre Louis de Potter, basée à Lophem, également à côté de Bruges
4 On y trouve la seigneurie d’Indooie (d’Indoye), un mot qui signifie dégel, fonte des neiges et crues d’eau.
Corporations et métiers
S’agissant des métiers, le patronyme “Droogenwalle” rajouté au nom de Louis provient d’une seigneurie, dotée de plusieurs arrière-fiefs à Dixmude qui relevaient au XVIIe siècle du comte Louis de Mérode , qui devint la propriété des Potter en 1713.
2 Source : Répertoire 42, liasse d’archives A/1553, bibliothèque de la Fondation J. Van Caloen, château de Lophem, Bruges.
4 Idem.
1 Inventaire Patrimoine de Flandre au XVIIe siècle., ministère de la Communauté flamande.
Anciennes armes “Potter” 5 représentant le métier de potier fabricants de récipients indispensables au 1er millémaire.
Soit, il s’agissait d’un vallon et sa colline à l’abri des fréquentes inondations du plat pays (droge walle – colline asséchée) . Soit, il s’agissait du blan chiment de la laine que l’on réalisait avec du lait à Torhout, et son séchage (drooge wolle – laine séchée)
Les antiques artisans potiers du premier millénaire sont donc devenus de so lides marchands de textiles qui se convertissent au fil de l’eau de la Lys et des siècles et réussissent à préserver leur patrimoine, jusqu’à l’arrivée de Louis ?
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3 Inventaire du Patrimoine de Flandre, XVIIe siècle, blanchisserie de Cuupere de Potter, château Ravenhof, rue de la Blanchisserie et Marché-aux-laines, Tourhout.
métiers à tisser d’Audenaerde et traitent aussi le lin depuis Tourhout pour l’exporter à travers Bruges, Courtrai puis Dunkerque.
5 Source : Office Généalogique et Héraldique de Belgique. Selon cultures et religions, souhait familial ou retranscriptions, l’ancien vocable “potteure” (récipents) variait à l’époque en “Pottere” ou “Potter” voire “Pottier” en France. Notons qu’une branche de la famille, établie en Amérique au XVIIIe siècle, garda le patronyme “Pottere”. L’histoire demeure un éternel recommencement car cette branche s’allia avec l’illustre famille de Bourbon-Parme, réconciliant ainsi d’anciens opposants.
2 Histoire généalogique “Potter”, Madame Henri de Potter d’Indoye, Tradition & Vie, 1963, 422 p.
Ces métiers textiles étaient ancrés sur la Lys, du XIVe au XVIIe siècle, dans la zone frontalière Roubaix-Furnes. La logique était bâtie sur l’axe nordsud, entre Renaix (contre la Principauté de Liége) et Bruges (chef-lieu du Franc de Bruges). Les terres Potter bordaient la route Renaix, Avelgem, Ooigem, Kerckhove au XIVe siècle. Celle de Wevelgem, Marcke et Renaix, au XVe siècle, puis Tourhout, Aertrycke, Kortemark, Leke, Vladsloo aux XVIe et XVIIe siè cles et, au déclin, Lophem et Bruges aux XVIIIe et XIXe siècles .
Invasions successives
1 Histoire généalogique “Potter”, Madame Henri de Potter d’Indoye, Tradition & Vie, 1963 et ANB de 1896 et OGHB diverses années et archives familiales diverses.
Hélas, ces commerces familiaux furent brisés successivement par les pas sages des troupes des rois d’Espagne et des Pays-Bas, mais aussi par celles des empires autrichiens, français et prussiens, imposant une très contrariante division territoriale d’est en ouest, frustrant fortement la famille de Louis.
Liévin de Potter, un aïeul de Louis, est même décapité par les troupes du duc d’Albe pour ses opinions religieuses exprimées à travers les tapisseries qu’il produit dans la région avec les de Moore.
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Au XVIe siècle, les ancêtres Potter durent donc fuir aux Pays-Bas, ensui te au Royaume-Uni et certains même aux Etats-Unis. Au XVIIe siècle, ils s’enfuyaient en France, au XVIIIe siècle ils s’exilaient en Allemagne et, au XIXe siècle, ils séjournaient en Italie et en Suisse . Les guerres de religion brisèrent les corporations de métiers et forçaient à l’exode. La famille de Louis avait donc été victime de cette situation et nous comprenons à pré sent toute la frustration de Louis et cette “revanche” qu’il souhaita prendre sur l’histoire. Plusieurs des lettres papales analysées par Louis concernent ces anciens ravages (exemple, celle au duc d’Albe).
Avant les révolutions, les corporations de métiers permettaient aux familles de s’unir au plan commercial. La branche de Louis y parvint aussi mais on comprend à présent que son destin littéraire avait été héroïque sur le plan démocratique, mais financièrement désastreuse. Elle incarna le romantisme révolutionnaire, style “fleur de lys à la française”.
Entre croyants, non-croyants, jacobins, protestants, libéraux, catholiques, des luttes fratricides ont lieu et des séparations douloureuses se produisent. La
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Source : Google © : Multiples et antiques seigneuries Potter à Aertrycke, Avelghem, Alveringhem, Ballin, Droogenwalle, Folquinswerve, Ghybalde, Heule, Keyem, Kerchove, Kortemarck, Leke, Lophem, Marcke, Ooighem, Picquendaele, Renaix, Ryghaertsvliet, Tourhout, Ysengaerde…
Seigneuries Potter, 750 ans entre la mer, Roubaix et Renaix.
1 Histoire généalogique “Potter”, Madame Henri de Potter d’Indoye, Tradition & Vie, édition de 1963 et ANB de 1896.
3 Les deux branches “Potter”, celle de Louis et celle de Nicolas, furent anoblies par Marie-Thérèse d’Autriche, pour faits de bravoure distincts mais concomitants.
2 Idem.
Les ancêtres de Louis sont exilés. En France durant l’invasion autrichien ne, en Allemagne lors de l’invasion française et en Italie à l’arrivée de Napoléon. Les divers cousins Potter étaient, soit alliés par mariages, soit par leurs terres voisines, soit par le compagnonnage de métiers (à Bruges et Renaix et Courtrai), unis dans la défaite lors de faits d’armes
branche de l’ancêtre Abraham de Potter quitta en hâte le sud des Pays-Bas. Heureusement, Amsterdam la propulsa à la tête de l’un des premiers grou pes d’achat de soies et draperies du nord de l’Europe .
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Source : B. Huyghe, De Belgische Revolutie, T. Verschaffel (VUB) et A. Dedijn (KUL).
© Rijksmuseum, Amsterdam.
Carte : Peeters, E., Le labyrinthe du passé, Louvain, 2003.
Zone de chalandise Potter fracturée par les guerres.
Abraham de Potter (1592-1650, par Carel Fabritius), commerçant en tissus, et Helena de Pottere (1586-1637 par J.-A. van Ravesteyn), exilés à Amsterdam.
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Petits-enfants de Abraham de Potter et blason, circ. 1640, école Fabritius. © Rijksmuseum, Amsterdam.
1 G. de Pottere, fils de Jacques, se rend à Bruges chez le Comte de Flandre, époux de Barbe, fille de Louis. Ce dernier émigra de Renaix à Bruges. Document Maes, 1609, Renaix. Généalogie Potter p. 271.
Le doyen des métiers de Bruges n’était pas moins que le grand tisserand Jacques de Pottere, issu de Courtrai, cousin de Jacob de Pottere alors échevin de Renaix, dont descend le fameux Liévin, maître ès tapisseries à Audenaerde, ville-lumière textile . Mais les liens tissés entre la Hollande, les parties nord et sud du Franc de Bruges, de la Principauté de Liège et le nord de la France se brisent.
Apogée à Bruges
Face aux invasions, bien des paysans, artisans et patrons de la zone fronta lière franco-belge eurent à franchir plusieurs fois la démarcation entre Lille et Courtrai, tissant ou retissant petit à petit leurs précieux contacts commer ciaux à partir de Dixmude et retrouvant d’ancestrales racines à Bruges.
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Malgré leur position et leur capacité de signer le “Compromis de Renaix”, par exemple, on voit que les Potter doivent fuir encore. Pourtant, on observe un nantissement commercial datant de 1392, en faveur du Franc de Bruges (sorte de “Principauté”), qui était endossé par le doyen des mé tiers de la ville, Jacques de Pottere. Ce dernier était pourtant issu de Renaix et Courtrai, dès le XIVe siècle alors que Liévin de Pottere était doyen des métiers au XVe siècle à Renaix. Seule la famille réussit à les unir ainsi. L’annuaire des métiers du Franc de Bruges reprend Robert de Pottere com me métayer au XVIIe siècle. Alors que le grand-père de Louis (Clément) était aussi doyen de la guilde Saint-Georges de Bruges au XVIIIe siècle. Une tradition donc solidement ancrée entre Renaix et Bruges, en passant par Courtrai et Audenaerde.
Sources : Archives Générales du Royaume de Belgique, cartulaires et annuaires des corps de métiers de ces villes.
3 ANB 1896 et OGHB diverses années et archives familiales diverses.
A la recherche de pacification et développement des affaires, la famille de Louis prend plusieurs points d’appui dans la région. L’aïeul Guillaume y épouse, en 1631, Marie de Costere et ensuite, en 1633, Antoinette de Doppere à Vladsloo (Dixmude).
Un passage de l’histoire de la famille van Coppenolle illustre bien l’ampleur des changements amenés par les grands tisserands au sein des guildes bru geoises et renaisiennes. On y découvre cette note intéressante au sujet de la famille de Potter et l’appui discret aux réformes qu’ils fournirent, sans perdre leur crédit auprès de Marie-Thérèse d’Autriche qui les anoblira d’ailleurs par la suite : Sous le règne de l’impératrice Marie-Thérèse, Gand fut sauvée de la famine par les Coppenolle qui fournirent le grain. Au XVIIe siècle, ils vendaient leurs tapisseries à travers le monde, selon la maîtrise des de Moore et de Pottere. Jacob de Pottere, Bourgmestre de Renaix en 0, habitait la région dès le XIIIe siècle et, à Bruges, Jan van Coppenolle obtint l’emprisonne ment de l’empereur Maximilien d’Autriche en 87 durant quatre mois pour obtenir la libération de Bruges. Il défendit Gand durant un siège de 90 à 9. Comme son compagnon d’infortune, Liévin de Potter, il fut décapité.
Un texte de la généalogie confirme ces heurs familiaux, source de plusieurs des défis relevés par Louis de Potter : Vers 8 apparaît un certain Leuder (Liévin) de Pottere, commerçant, né à Ter Lambeke près de Renaix. Il habitait sur la Grand-Place de Renaix et aussi à Bruges. Il comparut devant le magis trat et fut décapité pour ses croyances religieuses. Il était veuf de Catalina van den Berge et s’était marié en 50 avec Tanneke de Bruderode.
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Plutôt que le tissage, le négoce textile avait heureusement pris le dessus et la famille se redressa à partir de Courtrai et Dixmude, reconquérant sa fortune entamée par ces guerres passées et ses lettres de noblesse. Comme les ancê tres du “Compromis de Renaix” (voir page suivante), notre héros, 200 ans plus tard, marqué par ces épisodes tragiques de l’histoire de sa famille, s’employa à rendre le pouvoir plus pacifique et son accession plus démocratique.
Elle s’étendra rapidement comme “seigneurs de Droogenwalle, Keiem, Kerckhove, Leke, Alveringhem, Cortemarck” (Bruges), sans renier ni perdre pour autant leurs attaches avec leurs fiefs de Heule, Ooigem et Avelgem (Courtrai) ni celles des antiques origines de Kerckhove, Maarcke et Kerkem (Renaix) .
1 Histoire de la famille van Coppenolle, P. Dhaese uitg., Gand, 1978.
2 Généalogie de la famille Kranenburg, uitgeverij Dijksma, Utrecht, 1922.
Peinture du XVIe siècle par S. de Ruysdael illustrant les Potter quittant Renaix suite aux guerres de religion. © Collection de Madame Henri de Potter d’Indoye, née Princesse Elisabeth de Mérode, château de Melle.
Le “Compromis de Renaix” signé par les “Potter” en 1566 lié aux guerres de reli gions et aux exécutions de Liévin de Pottere et l’allié Stévin van Coppenolle, maî tres tisserands. Parchemin aux Archives Générales du Royaume à Alost.
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Les branches (de Renaix et Courtrai) se retrouvent
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Suite à ces recherches sur Louis, on découvrit que c’est par deux fiefs situés dans la baronnie de Heule que les ancêtres de Louis devinrent, en 1698, seigneurs de Droogenwalle, et ceux de Nicolas, en 1643, seigneurs d’Indoye
3 ANB 1896 et OGHB diverses années et archives familiales diverses.
Repris par les de Potter de Droogenwalle au XVIIIe siècle, le château du Ravenhof, datant à l’origine du XIIIe siècle, est donc situé sur l’un des rares petits promontoires vallonnés de la région du plat pays ; d’où la signification du patronyme évoquée plus haut : à l’abri des inondations (en néerlandais : droge walle).
1 ANB 1896 et OGHB diverses années et archives familiales diverses. Inventaire du Patrimoine de Flandre, XVIIe siècle, blanchisserie de Cuupere de Potter, château Ravenhof, rue de la Blanchisserie et Marché-aux-laines, Tourhout.
Le frère de Pierre, marguillier du Saint-Sauveur à Bruges, épousa Marie de Lannoy, de la famille des métayers des villes de Lille et de Lannoy. Elle était la fille de Jacques, greffier à la cour de Heule, fief sis à cheval entre les deux Flandres, belge et française. Un autre ancrage français pour la famille de Louis.
Jean, le fils de Guillaume, aussi commerçant en textiles, épousa à Cortemark Pétronille de Cuupere, fille du greffier. Son fils Pierre épousa à Tourhout, en 1743, Margueritte de Cuupere, fille de Jean, avocat général, receveur du Duc de Nieubourg à Wynendaele, grand Bailli du pays de Wynendaele. Cet ancêtre-clé est effectivement Pierre de Potter, précédant à la fois JeanGuillaume, Pierre-Clément et Clément-Joseph (ce dernier étant le père de Louis de Potter) .
Ce dernier est donc installé au XVIIe siècle, à Tourhout où vécut Nicolas. Ce hasard est dû à cette alliance avec la fille du “blanchisseur” Jacobus de Cuupere dont la famille occupait le château du Ravenhof . Devenu aujourd’hui le centre culturel de la ville de Tourhout, il se situe sur un promontoire dominant l’ancien Marché-aux-laines, et possédait une solide blanchisserie de lin, rue de la Blanchisserie.
2 Histoire généalogique “Potter”, ANB 1896, OGHB diverses années et archives familiales diverses. Inventaire du patrimoine de Flandre, ministère de la Communauté flamande. (http ://inventaris.vioe.be/dibe/relict/87510)
5 Inventaire du patrimoine de Flandre, ministère de la Communauté flamande. (http ://inventaris.vioe.be/dibe/relict/87510)
Siège du Collège d’Europe, cet hôtel de maître de 98 fenêtres fut bâti au n° 16 du Dyver à Bruges par le père de Louis de Potter. Il fut saccagé par les soldats de Na poléon. Source : Province de Flandre Occidentale et © Collège d’Europe, Bruges.
Au sujet d’Aertrycke, nous avons trouvé cette note : Pierre Clément de Potter, époux de Marie Erreboot, décédé en 70, était le septième Bailli de Dixmude, maître des requêtes au Grand Conseil de Flandre, avait autorité sur les fiefs d’Aertrycke
Comme Louis descend de Pierre Clément, voilà la confirmation de cet te convergence et des liens étroits entre les branches “Potter” . A un jet de pierre, et au XVIIIe siècle, Pierre Joseph, l’ancêtre de Nicolas, s’ins talle également à Tourhout. C’est dans la zone des prairies boisées dite Verloren Kost 5 qu’il s’établit, une terre répertoriée dès le XIIIe siècle comme appartenant au “domaine d’Aertrycke”, rapprochant ainsi les deux branches.
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1 Le site des châteaux de Belgique. (http ://www.chateauxdebelgique.eu/flandreOC/Aertrycke.aspx ?search_ai=pottere)
2 Histoire de la famille van Hille, Ed. Tablettes des Flandres, recueil 4, 128 p., Bruges, 1954.
Toujours au XVIIe siècle, Joseph de Potter s’installe au domaine d’Aertrycke 1. Par mariage, ce lignage s’allie au procureur général de Flandre et, par métier, se rattache au puissant vicomte de Dixmude et de Wynendaele .
3 Archives Générales du Royaume de Belgique, inv. lettre “i”, ref. 001, manuscrit, répertoires 397/98/99.
4 Histoire généalogique “Potter”, Madame Henri de Potter d’Indoye, Tradition & Vie, 1963 et ANB 1896 et OGHB diverses années et archives familiales diverses.
2 Source : Inventaire du patrimoine de Flandre, ministère de la Région flamande. (http ://inventaris.vioe.be/dibe/relict/87510)
3 Histoire généalogique “Potter”, Madame Henri de Potter d’Indoye, Tradition & Vie, 1963.
Le petit château du Ravenhof à Tourhout, adossé à des terres, une ferme et une blanchisserie de laine et lin, au lait. Datant partiellement du XIIIe siècle, il fut acquis par les de Potter de Droogenwalle au XVIIe siècle, via l’alliance avec la famille de blanchisseurs, de Margueritte de Cuupere , épouse de Pierre Clément de Potter, fils de Jean de Potter, arrière arrière-grand-père de Louis de Potter. Il se trouve entre la rue de la Blanchisserie et le Marché-aux-laines
Jean-Guillaume de Potter, seigneur de Droogenwalle, de Kerchove, de Ghybalde, de Scheurvliet, de Haveskerke, de Folquinswerve et de Heule, licencié ès lois, conseiller de Dixmude et de Nieuport, fut anobli, lui et sa descendance, par charge de maître des requêtes au Grand Conseil de Flandre à laquelle il fut nommé par lettres patentes de 1726 par S.A.S. Marie-Elisabeth, archiduchesse gouvernante des Pays-Bas
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Il avait épousé Jeanne Pattheet, fille de Pierre, greffier de Furnes, et de Pétronille de Cressin, fille de Juste de Cressin, seigneur de Ballin, de
1 ANB 1896 et OGHB diverses années et archives familiales diverses.
Gilles possédait en 1357 un arrentement nommé Ter Ysergaerde Brugghe à Bruges et était échevin à Renaix. Gilles (1550) exportait du textile de Renaix à partir de Bruges où il donne naissance à la branche de Louis, à travers Firmin.
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3 Site et brochure du château de Lophem, Fondation J-B. van Caloen. http ://www.coleurop.be/content/thecollege/locations/images/Dijver-building.jpg
4 Testament de Pierre Clément de Potter de Droogenwalle, liasse 27, chiro 1, bibliothèque du château de Lophem, Fondation J-B. van Caloen.
Au vu de ces antécédents, et quand on sait que l’autre branche des “Potter” comptait, à cette période, trois autres châteaux, on réalise que le noble sacrifice, par Louis, de tous ses biens matériels et de sa position aristocrati que, au profit de sa “carrière de publiciste belge” bouleversa la famille et le public
1 Annuaire de la noblesse de Belgique de 1896, Office Généalogique et Héraldique du Royaume de Belgique, p. 78.
Picquendaele, conseiller de Furnes. Jean-Guillaume décéda en son château de Kerchove en 1759 à l’âge de 75 ans, étant depuis longtemps le doyen du Grand Conseil de Flandre . Il engendra Clément de Potter de Droogenwalle, Bailli de Dixmude, qui acquiert, en 1756, auprès de l’évêque de Bruges, la cure désaffectée de Lophem qu’il agrandit pour en faire le Château de Lophem , et fait ériger un hôtel de 98 fenêtres au Dyver à Bruges, devenu entre-temps le siège du fameux Collège d’Europe .
En approfondissant la partie brugeoise du travail du Père Jacques de Potter et de madame Henri de Potter d’Indoye, née Princesse Elisabeth de Mérode 5, nous avons observé que les branches Potter dites de Renaix et de Bruges se rapprochent.
2 Histoire du château de Lophem par la Bonne Véronique van Caloen, Fondation Jean van Caloen, 1990-1995.
5 Généalogie “Potter”, Tradition & Vie, 1964, Madame H. de Potter d’Indoye et le R.P. Jacques de Potter.
Au décès du grand-père de Louis, le patrimoine familial comprenait plu sieurs importants fiefs au château de Keyem, au château de Kerchove et au château de Ooighem. Les châteaux de Lophem, Tourhout et Aertrycke n’y figuraient pas.
Ci-dessus : Château d’Heye à Kerckhove (Audenaerde) où s’éteint Jean-Guillaume de Potter, doyen du Grand Conseil des Flandres, en 1759. (J. Delcampe, Bruxelles et V. Pouilly, Monuments de Flandre Occidentale)
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C-dessous : Château de Ooighem sur Lys près de Roulers qui appartenait à Guil laume de Potter, époux de Marie de Costere au XVIIe siècle. Source : ministère de la Communauté flamande, 2008.
Plusieurs textes officiels requis à cet effet sont disponibles mais requièrent un travail de réconciliation que Nicolas a entamé avec l’aide d’un généa logiste hors pair.
Celui-ci ne figure pas encore dans le remarquable travail de M. Jean-François Houtart et permettrait aussi de prolonger l’origine familiale des Potter jus qu’au XIIIe siècle, par rapport au XVIIIe siècle actuellement indiqué.
Outre la concordance des lieux d’origine, celle des époques, des métiers du textile, des terres contiguës à Torhout, des patronymes…, c’est dans la petite baronnie de Heule (Courtrai), que l’on trouve le point de conver gence le plus significatif.
Victor Armand de Potter dit d’Elseghem
Selon Joanna Scott, finaliste au “Prix Pulitzer” (USA), et sa mère, Yvonne de Potter, descendantes de Louis, ce dernier aurait eu un enfant hors mariage, un dénommé Victor Armand de Potter dit d’Elseghem
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Le dit “Seigneur de Heule” n’est autre que Clément Potter Droogenwalle et la dite “Seigneurie d’Indoye”, qui se situe dans la dite baronnie de Heule, devient, en 1643, la propriété de… Joseph de Potter d’Indoye.
3 http ://www.geneall.net/W/per_page.php ?id=1098129
2 http ://inventaris.vioe.be/dibe/geheel/21265
1 J-Fr. Houtart, Histoire des anciennes Familles de Belgique, en collaboration avec l’Office Généalo gique et Héraldique de Belgique, 2009.
Cet enfant naturel naquit en 1807 et fut assigné, durant l’exil de son père, au château d’Elseghem , village attenant à la seigneurie de Kerckhove (fief Potter précité), chez sa cousine à la mode de Bretagne, Reine de Potter , née en 1784 et épouse du chevalier Charles-Louis de Ghellinck d’Elseghem, beau-fils du chancelier hon. de l’empereur d’Autriche, Jean de Bay.
Les trois documents ci-dessus sont disponibles à présent. Gageons que la prochaine génération arrivera à apporter les liens matériels requis pour réunir les branches de cet intéressant remembrement familial.
u 12 Arbre généalogique “Potter”.
Il avait épousé en premières noces Sylvie, fille du général Van den Hende, membre de l’état-major du Roi Louis-Napoléon qu’il suivit en France lors que ce souverain y reprit le trône. En secondes noces il avait épousé Sophie de More , membre d’une famille citée plus haut dans le cadre de l’industrie textile des environs d’Audenaerde. Il décéda à Melle en 1894 et fut inhumé près de la branche “Potter” précitée qui habitait le château de Melle et tenait le mayorat de la cité gantoise.
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1 http ://gw1.geneanet.org/index.php3 ?b=gillesdumas&lang=fr ;p=albert+francois ;n=de+more Château d’Eselghem (Audenaerde) où serait né Armand de Potter.
Les distinctions du “Mérite civique de 1830, de Grand-officier de l’Ordre de Léopold et de Chevalier de la Légion d’Honneur de France” font penser à l’aide donnée à son père. Mais on sait juste qu’il rencontra le général Lafayette et eut un fils : Pierre Louis Armand de Potter. Ce dernier fit ses études à Paris et émigra aux Etats-Unis où il devint professeur d’archéolo gie et gérant d’une agence de voyages sur Broadway 45 à New York.
Pour services rendus, lui aussi, reçut l’Ordre de Léopold… belge et le bre vet de colonel… belge. Il était chevalier de la Croix Blanche… d’Italie et de l’Ordre de Mélusine… français. Il avait un diplôme italien de docteur en philosophie et était membre des Sociétés d’archéologie française et amé ricaine. Il avait une vaste collection égyptienne exposée aux Etats-Unis. Après trois voyages autour du monde, il décéda sur les côtes de Grèce... où son père naturel avait posé un feu-follet ?
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A gauche : Grand-mère de Louis de Potter, Mme van Hille, dessinée par Eleuthère de Potter à 17 ans. Source : Alain van Hille.
Source : livre “Château de Lophem”, © Fondation J. van Caloen, 2001.
A droite : Portrait de la mère de Louis de Potter, la douairière Marie Maroucx d’Opbraekel (1758-1833), fille de Louis Maroucx d’Opbraekel, conseiller de Bruges au Grand Conseil de Flandre, seigneur de Reyghaertsvliet et de Bellem. Dessin de Emile J. Verbrouckhoven, reproduction par M. Werkman. Source : famille van Hille, épouse de Potter.
Château de Lophem où habita Marie-Christine de Potter, sœur de Louis. Comman dés peu avant le décès de son mari, en 1848, les plans pour remplacer le château Potter furent soumis de 1852 à 1856. Approuvés par la maître d’œuvre, la construc tion dura de 1858 à 1862, soit deux ans avant le décès de Marie-Christine de Potter.
Avis funéraire d’Armand de Potter, petit-fils naturel de Louis.
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P.-Louis Armand de Potter Sr, Paris et Détroit.
Première affiche électorale de Belgique, imprimée le 13 octobre 1830. Elle est signée par le “Comité central”, composé de six membres représentant le Gouverne ment provisoire, Comité présidé par Louis de Potter.
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Description de la personnalité de Louis de Potter par Lucien Jottrand, membre du Congrès de Belgique
Lucien Jottrand, fils d’un notaire de Genappe, fut avocat et journaliste au “Courrier des Pays-Bas”, comme Louis de Potter. Wallon d’origine mais rebelle perpétuel, après son passage au Congrès, il rejoindra sur le tard un certain mouvement flamand. Aux côtés de Louis de Potter, il fut emprisonné aux Pe tits Carmes avec Edouard Ducpétiaux (âgé de 26 ans !) et imagina le drapeau belge, tricolore vertical, bardé de rouge, jaune et noir. Il connaissait donc fort bien son compagnon d’infortune et voici ce qu’il en dit : Louis de Potter avait une grande facilité d’esprit, une humeur bienveillante, une éga lité sans nuages qui le rendait sympathique à tous. Sa probité et la dignité de sa vie lui donnaient une grande importance. Il ne s’agit point ici de sa loyauté privée, c’était un fait de notoriété universelle qu’il disposait d’un très haut degré de probité de conduite et du sens du devoir. Il n’était pas de ceux qui, pour sauver leur amourpropre, s’acharne à défendre une opinion pour le seul fait qu’ils l’ont émise. (…) Il était vif, gai, parfois jovial, (…) il était spontanément serviable envers tous ceux pour lesquels il avait estime ou affection. C’était avant tout l’homme de la règle, d’une grande assiduité au travail disposant des qualités du chercheur alliées à cel les du condisciple. (…) Il s’adonnait beaucoup aux exercices de gymnastique. Tout Bruxelles l’a connu comme un excellent nageur et élégant patineur. (…)
Les antécédents de Louis le désignaient naturellement comme conseiller de Guillau me Ier ou comme un excellent instrument à employer, à son insu, à la guerre cal viniste de la maison d’Orange contre le catholicisme belge. Nous nous souvenons parfaitement de cet ‘entourage politique’ que lui faisaient les Gobbelschroy, Goubau et autres agents du roi. (…) Les hommes d’Etat hollandais étaient parvenus à diviser l’opposition belge et essayaient de semer la zizanie entre les parties. (…) Louis fut confronté à ces manigances en se battant pour l’instauration du suf frage universel. Bien que très populaire, il fut devancé par ses collègues dans la mise en place d’élections, hélas censitaires. La bourgeoisie belge substituait une nouvelle légalité à l’ancienne, et abandonna la révolution. L’action véritablement démocratique de la Révolution de 1830 cessait ce jour-là, et la retraite de Louis de Potter devait en être la conséquence. Voyant dévier la Révo lution belge des voies où il croyait sincèrement l’avoir vu entrer, et dans lesquelles il croyait qu’on l’avait appelé à la guider, se retira dès qu’il reconnut s’être trompé.
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D’une activité d’esprit qui devait le rendre «autodidacte», il fut comme Jean-Jacques Rousseau ce que les Anglais appellent “a perfect scholar” c’est-à-dire un homme versé dans la connaissance des langues anciennes (…) et modernes, et quoiqu’il parlait familièrement dans le dialecte flamand de Bruges, il ne l’écrivait pas.
Tirés de son livre édité en 1946, voici les extraits choisis écrits par Louis de Potter en 1829-1831
Marchons consciencieusement et d’un pas ferme dans la nouvelle voie qui s’ouvre devant nous ; et, libéraux et catholiques, tous également amis des libertés publi ques, serrons cordialement nos rangs en disant, à l’exemple de O’Connell parlant de Cobbett : “Nous avons ratifié notre éternelle réconciliation pour la liberté de tous les hommes de toute religion, opinion, profession, espèce, classe ou rang !”
Sire, vos courtisans, vos ministres, vos flatteurs et vos conseillers vous trompent et vous égarent ; (…) Non, sire, vous n’êtes pas le maître des Belges, vous n’êtes que le premier d’entre eux (…) La loi qui nous régit, et vous régit avec nous, offre à tous des garanties pour nos libertés, nos droits et nos obligations. (…)
Aujourd’hui que nous connaissons le peu de longueur de nos chaînes, et qu’à nos efforts pour les rompre on répond par des actes contraires pour les raccourcir et en augmenter le poids, peu nous importe ces promesses ombrageuses ! J’écris au roi pour lui faire toucher au doigt les impertinences et le gaspillage de ses ministres qui, non contents de ruiner le peuple, les injurient encore et les maltrai tent.. J’aime ma patrie et mes concitoyens et je ferais bien des sacrifices pour leur assurer la liberté la plus entière. Mais si nous ne sommes pas encore mûrs pour elle je me dirai : cela ne dépend pas de moi et je me résignerai.
Les libéraux de tous pays commettent la faute de vouloir réformer les idées par les lois. Il ne savent donc pas que tourmenter, vexer, violenter les hommes est un très mauvais moyen de les convaincre ? Et qu’abattre des têtes n’est aucunement les changer. La conviction ne fait jamais place à une autre conviction. Croit-on parce que l’on craint ou que l’on espère ? Non. On croit parce qu’on croit. Tout moyen humain échoue contre la foi qui se fortifie dans la persécution. Le raisonnement seul est puissant contre le raisonnement.
L’Union n’est pas le résultat d’une convention humaine au profit de quelques hom mes. Elle est le produit de la Force des choses. Outre la conquête de la liberté civile, elle a pour but l’affranchissement de toutes les intelligences, l’expression de toutes les opinions et la garantie de dignité pour ceux qui se sont sacrifiés pour garantir la stabilité sur laquelle elle repose. (…) L’union des citoyens, condition sine qua non du bonheur public dans tous les temps, devenait dans ces moments critiques où l’on se trouvait, une condition de salut et d’existence. (…)
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Sa prison devint un centre où l’on agitait tous les moyens pour combattre le des potisme ministériel. Il vit défiler autour de lui tout ce que la commune patrie avait de caractères les plus distingués et d’esprits les plus sages, tous voulant comme lui la liberté de la Belgique. De multiples revendications furent consignées dans ne multitude de brochures rédigées pas Louis dans sa prison et disséminées avec un incroyable succès dans tous le pays. Du fond de sa prison, il dirigeait comme s’il était encore installé dans son bureau, proposant un plan de confédération patriotique. Il déclina l’offre de ses amis pour les élections de 1829 et contribua au succès de celles-ci. Le gouvernement pris peur et fit mettre de Potter au secret, saisissant tous ses papiers de cinq à six années, prétextant à une correspondance subversive pour le faire ré-inculper. Le bruit que souleva son second procès fut énorme vu la fronde populaire contre la divulgation de ses lettres. Le 30 avril le président des assises prononça, pâle comme un mort : huit années d’exil. (…)
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La carrière de l’illustre publiciste était loin d’être terminée, mais son rôle dans la préparation de la Révolution belge se clôt par cette victoire. Son honneur, dans notre histoire, sera d’avoir su payer de sa personne pour le triomphe d’une noble cause, d’avoir consacré le premier la formule que les Belges devaient prendre pour devise : L’union fait la force !
Dès 1828, Louis de Potter était un des chefs les plus écoutés du parti libéral avancé. L’intelligence avertie du publiciste brugeois avait compris le danger que présentaient pour les Belges leurs divisions. Son but aurait été d’obtenir du roi une autonomie pour la libre propagation des idées de tous. Un changement dans l’important journal libéral, le “Courrier des Pays-Bas”, vint lui permettre d’en modifier les tendances. (…) Il y publiait un article qui eût un immense retentissement : Que quiconque n’aura pas clairement démontré par ses actions qu’il n’est dévoué à aucun ministre soit mis au ban de la nation ! (…) Le gouvernement saisit le danger et Louis de Potter était arrêté. De sa prison, il lança de nouveaux appels à l’opinion publique, appels qui furent entendus. Le sacrifice de sa liberté galvanisa l’opposition et la victime du patriotisme devint l’idole de la nation. (…) A peine la sentence de son procès fut-elle prononcée que la salle d’audience retentit de huées auxquelles répondirent celles de tout un peuple à l’unis son. (…) A la faveur de l’obscurité, ses juges se soustrayaient à la fureur populaire en fuyant à pied par des issues secrètes. (…) A peine avions-nous passé la porte que les vociférations les plus énergiques firent une épouvantable explosion populaire autour de la voiture : “A bas le ministère ! A bas van Maanen ! Vive de Potter !”
Extraits de “Louis de Potter et la Révolution de 1830” par le professeur Paul Harsin de l’Université de Liége
Tandis que le peuple saccageait les demeures des ministres et fonctionnaires aux cris de “Vive de Potter ! Vive la Liberté !”, notre publiciste lança une adresse au peuple belge l’exhortant à proclamer l’indépendance réelle de la Belgique. Rappelé de Fran ce, de Lille à Bruxelles, son voyage ne fut qu’un cortège triomphal. L’enthousiasme qu’il soulevait tenait du délire. Dans les moindres villages, on dételait sa voiture pour avoir l’honneur de la tirer. A Bruxelles, où il parvint le 28 septembre, on porta sa voiture au dessus des barricades.
Je crois le moment actuel plus critique encore, pour la Belgique comme pour l’Europe toute entière, que ne l’a été aucun de ceux des quinze dernières années qui ont hâté l’explosion de juillet.
De véritable amour de la liberté, désintéressé et pur de tout mobile personnel, on n’en voyait pas, mais grâce au système d’oppression général sous lequel on gémissait, la liberté, qui était dans toutes les bouches, serait descendue dans tous les cœurs. Il fallait lui laisser le temps d’y prendre racine. Alors, on n’aurait pas été affligé par le spectacle de grands seigneurs convertis fraîchement au libéralisme parce que Guillaume les avait exclus des antichambres, prêts à étaler leur rampante morgue dans les cénacles de quiconque aurait donné à dîner et à danser dans les salons de l’ex-roi. En ami sincère de mon pays, j’attendais avec impatience que le temps de la liberté fut venu, bien décidé néanmoins à ne jamais la devancer. Outre les raisons particulières Belges, il me semblait imprudent de provoquer le jugement d’un roi quelconque, avant d’avoir mûrement préparé le jury populaire qui devait se prononcer sur les faits à charge, non plus d’un individu, mais de la royauté en tant qu’institution ancienne solen nellement traduite devant les assises du genre humain. (…)
Pourquoi hésiterais-je à le dire et à le dire tout haut ? Et pourquoi ne vous le dirais-je pas de préférence à vous, qui avez accepté une si large part de solidarité dans le grand drame social dont le dénouement semble approcher à grands pas ? Vous êtes sur le trône, il est vrai, et je suis sans patrie, mais qu’importe ? (…)
Et puis, je voulais réellement empêcher la chute de l’ex-roi des pays bas. Avant la révolu tion, deux choses devaient concourir à préparer la liberté future, c’est-à-dire, le bonheur durable de la Belgique : il fallait que le gouvernement hollandais continuât à y faire de l’arbitraire, et que les Belges apprissent chaque jour à mieux résister à l’oppression.
Les ennemis de Guillaume en Belgique étaient nombreux et acharnés ; mais quels étaient les motifs de cette haine ? Chez les nobles, leur servilité avait été dédaignée ; chez les prêtres, la crainte d’une secte dominatrice, chez les hommes avides, la certi tude de ne pouvoir arracher aux Hollandais les faveurs royales ; chez les masses un instinct aveugle d’aversion contre un autre peuple présomptueux et arrogant.
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Mes moyens pour atteindre ce but, auquel je me sacrifiais tout entier c’était de l’opposi tion constitutionnelle, persévéramment soutenue pendant bien du temps encore.
DansSire, le temps, j’ai écrit plusieurs lettres au Roi Guillaume, toujours aux époques que ses fautes rendaient les plus critiques, je cherchais à lui signaler ses fautes, à le rappeler à la raison, et je lui prédisais que, s’il continuait à heurter comme il avait fait jusqu’alors, la vérité et la justice, son règne ne serait pas de longue durée.
Extraits de la lettre de Louis de Potter à S.M. Léopold Ier, roi des Belges
Extrait de la biographie de Louis de Potter par le professeur d’histoire Emile de Laveleye (1822-1892)
Il n’a recherché ni pouvoir ni grandeur, échappant à l’égoïsme qui se fortifie à quand l’esprit perd en vigueur.
***
(…) Le nom de Louis de Potter mérite d’être inscrit au tout premier rang de la Belgique moderne.
Son désintéressement de tout ce qui est petit et bas était si incontesté, son amour de vérité si évident, que ses adversaires mêmes se sont vus forcés de lui rendre Chosehommage.rare à notre époque de convictions flottantes pour tout, sauf pour la conquête de la fortune.
Il a ordonné sa vie d’après les notions qu’il s’était faites du vrai, du juste et du bien. Jamais le penseur ne fut inférieur à l’homme public. (…)
L’ouvrage de M. de Potter, vaste mine de faits, est le fruit de quatorze ans d’étu des consciencieuses dans les bibliothèques de Florence, Venise et Rome. Eh bien !, se sera-t-il dit, je suis l’homme le plus riche de Rome, je vais en être aussi le plus brave et me moquer publiquement de tout ce que ces gens-là respectent, qui ressemble si peu à ce qu’on doit respecter. Car un don Juan, pour être tel, doit être homme de coeur et posséder cet esprit vif et net qui fait voir clair dans les motifs des actions des hommes. Si son livre eût paru en 1750, nul doute qu’il n’eut valu à l’auteur une réputation européenne.Tous les ouvrages de M. de Potter devraient être traduits en anglais. Ils contiennent une mine de vérités historiques.
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Extrait de “Stendhal et ses amis belges” (Le Divan, 1981) et “Stendhal raconté par ceux qui l’ont vu” (Jourda, 1931)
Il a pensé avec force et profondeur sur les principales questions qui occupent notre temps.
Jottrand disait : Stendhal doit beaucoup au “véridique”, au “savant” de Potter, qu’il qualifiait de “Gelehrter Allemand et historien chevronné”. Une des quelques per sonnalités belges que Stendhal tenait en très haute estime.
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Source : Coup d’œil rétrospectif sur 80, 1857.
Et le mot de la fin pour Louis de Potter...
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Nicolas de Potter, issu de Bruges, père de six enfants avec Carine t’Kint de Roodenbeke, fut conseiller aux gouverne ments du Québec et d’Eurorégions franco-belge et francobritannique. Il développa les contacts pour plusieurs médias européens et, à présent, crée une Société coopérative dans 27 pays de l’Union européenne.
Francis Balace, docteur en Philosophie et Lettres, professeur honoraire de l’Université de Liège, est un des spécialistes renommés de l’histoire de la monarchie belge, des guer res et divers autres sujets historiques et philosophiques. Il est l’époux de Catherine Lanneau, titulaire de la chaire d’Histoire européenne de l’Université de Liège.
Biographies des auteurs
René Dalemans, licencié agrégé en Philosophie et Lettres, Histoire de l’art et Archéologie, maître de stages d’agréga tion à l’Université Libre de Bruxelles, directeur honoraire de l’Académie des Arts de Woluwé-Saint-Pierre, auteur de nom breux ouvrages et conférences d’art et d’histoire, notamment celle de Léopold Ier.
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De la création de l’Etat belge à l’Europe des Régions
De la préhistoire à nos jours, une petite histoire illustrée de nos contrées pour mieux ap préhender la complexité de leur(s) identité(s), en décor tiquer les mythes, en éclairer les paradoxes et comprendre les ressorts d’une nation euro péenne dont on se demande chaque automne si elle passera l’hiver. L’Encyclo, c’est un ton et des illustrations. Une collection qui a pour ambition de s’intéresser à tous les aspects de notre histoire, du folklore aux sujets de société, de l’anecdote à l’essentiel. n 13 p. n 12,*18 cm n 12 e n
Nous sommes le peuple le plus multilingue et le plus solidai re du monde. Cela fait cent soixante-quinze ans que nous payons pour la Wallonie, ça ne peut plus durer !, déclarait J-M. Dedecker à l’hebdomadaire Le Point en décembre 2008.
Jérôme Adant Le Baron Rouge ? Antoine Allard, de Stop-War à Oxfam
Sous la direction d’Anne Morelli Rebelles et subversifs de Belgique des Gaulois jusqu’à nos jours
L’Histoire de nos régions se résume-t-elle aux actions des gouvernants et à la passivité du bon peuple ? La foule n’a-telle jamais pour rôle que d’ac clamer les rois ou les cyclistes vainqueurs ?
Michel Quévit Flandre-Wallonie Quelle solidarité ?
Depuis la révolte gauloise contre les Romains, se rebeller comporte des risques avérés mais modi fie parfois une situation que l’on estime insup L’actionportable.collective fait aussi partie de l’histoire de nos régions…
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Questions et débats de société, pédagogie, formation, récits de vie... www.couleurlivres.be
Ce livre exhume des moments de notre histoire où des hommes et des femmes, mécontents de l’ordre des choses, se sont levés pour tenter de le changer.
A quelle réalité correspond cet te image que la Flandre donne de la Wallonie et d’elle-même ? Michel Quévit a voulu confronter le discours nationaliste aux faits. Son analyse a l’intérêt d’ouvrir les yeux sur l’engrenage nationa litaire dans lequel la Belgique est entraînée et qui s’amorce dans d’autres régions européennes. n 18 p. n 13,*20, cm n 1 e n
Déjà parus chez le même éditeur
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Martial de Selva Petite histoire de Belgique
Issu des plus hautes branches de l’aristocratie et de la finan ce, rien ne prédestinait Antoine Allard (1907-1981) à sortir du simple cercle de charité chré tienne tracé dans son milieu. Et Cepourtant…livretraverse le siècle passé en empruntant un sentier histo rique encore mal balisé : celui d’un combattant pour la paix. La personnalité extrêmement riche d’Allard permet d’aborder des sujets aussi divers que la Première Guerre mondiale, la montée des fascismes, le monde diplomatique belge, les réseaux pacifistes… en passant par l’altermon dialisme d’Oxfam, les attentes œcuménistes de Vatican II, les relations Est-Ouest…
Le combat politique européen s’impose 30 Concordat, retour à la concorde ou ferment de discorde ............................ 34 Liberté de la presse, liberté en tout................................................................ 37 Second procès 50 Libri Bagnano, un escroc au service du pouvoir 57 L’exil une fois de plus ..................................................................................... 63 La “Muette” fait parler la poudre 65 Les journées décisives 70 La politique peut reprendre ses droits ........................................................... 73 Quelle forme de régime choisir ? ................................................................... 81 Les Puissances se concertent 84 Un monarque oui, mais qui choisir ? 92 Encore et toujours l’exil 97 Pendant ce temps-là en belgique 100 Retrouver la Belgique 104 Louis de Potter, franc-maçon ?...................................................................... 107 Epilogue 108
..................................................................................
.........................................................................................................
Remerciements 5
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La vie de Louis de Potter 11
L’Ancien Régime 11 Un double exil 13 Retour à lophem 14 L’Italie et la découverte des Lumières 17 Les “mauvaises fréquentations” 18 Retour au pays qui s’agite 23
3 Introduction ...........................................................................................
.....................................................................
..............................................................................................
Table des matières
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L’établissement à Bruxelles 25 Premières armes dans la presse 28 Intermède sentimental 29
....................................................................................
Vous trouverez sur le site www.potter.c.la une bibliographie complète ainsi que de nombreuses archives et illustrations qui témoignent de la richesse de la docu mentation réunie par Nicolas de Potter.Imprimé Belgique
......................................................................165***
Louis de Potter, porte-flambeau de la liberté et de la nationalité belge, feu-follet politique ou simple “homme libre” ? 115
...........................................................................................
Les branches (de Renaix et Courtrai) se retrouvent 146 Victor Armand de Potter dit d’Elseghem 151
Biographie des auteurs
Origine des “Potter” ...........................................................................137
Anciennes frontières 137 Corporations et métiers 138
Invasions successives 139
En savoir plus
en
Apogée à Bruges 142