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édito
Crédit photo : © Arnaud Calais
PAR ÉLISABETH CLAVERIE DE SAINT MARTIN, PRÉSIDENTE-DIRECTRICE GÉNÉRALE DU CIRAD
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L’outre-mer français tient une place importante et singulière au sein du Cirad, tant par le nombre de salariés qui y sont basés (environ 350), par celui des projets qu’il y conduit, que par la diversité de ses partenariats et la présence d’infrastructures de pointe. Nos deux directions régionales – Antilles-Guyane-zone Caraïbe et Réunion-Mayotte-océan Indien – facilitent toutes nos actions.
Notre première mission y est scientifique. Nous produisons, à partir de problématiques locales, des résultats de recherche de qualité et génériques, utiles pour nos territoires d’outremer et les communautés scientifiques. Notre deuxième mission est d’apporter un appui scientifique et technique à la transition agroécologique des filières agricoles, à leur diversification et leur durabilité. Nos activités en appui aux filières banane aux Antilles et canne à sucre à La Réunion en témoignent. Enfin, nous coopérons en recherche et formation avec les pays environnants de la Caraïbe et de l’océan Indien, notamment via les réseaux de surveillance en santé animale et végétale que nous avons cofondés (CaribVet, OneHealth OI, CPHD). Le Cirad développe ainsi des partenariats étroits avec les établissements de recherche, décideurs publics, filières professionnelles et représentants du monde agricole : chambres d’agriculture, organisations de producteurs, instituts techniques et entreprises.
L’outre-mer héberge une biodiversité unique au monde, mais qui reste très menacée et vulnérable aux changements globaux. Celle-ci est pourtant au cœur des grands défis démographiques, socio-économiques, climatiques, alimentaires et sanitaires à relever dans les prochaines années.
Le Cirad, à travers ses réseaux de coopération, contribue à conserver, restaurer et valoriser la biodiversité ultramarine pour en faire un levier de développement et de résilience.
En matière d’agrobiodiversité des systèmes cultivés, il s’agit d’une part de conserver la diversité des plantes tropicales cultivées (café, cacao, arbres fruitiers, vanille, légumes anciens sous-utilisés...) au sein de centres de ressources biologiques aux Antilles-Guyane et à La Réunion. Un patrimoine agricole exceptionnel est ainsi sauvegardé et mis à disposition des professionnels de l’agriculture pour diversifier l’offre variétale, l’adapter au contexte climatique ou encore aux goûts des consommateurs. D’autre part, il s’agit d’intégrer cette diversité au champ, en associant des espèces qui se complémentent, dans des systèmes agroécologiques réduisant l’usage des intrants ou encore de l’eau d’irrigation.
En matière de biodiversité des écosystèmes naturels, outre l’étude de la dynamique forestière en Guyane, nous développons des stratégies de veille et de lutte biologique contre les espèces exotiques envahissantes (EEE), véritable menace pour la biodiversité indigène et endémique. À La Réunion, pour accompagner cette lutte menée avec le Parc national, l’ONF et le CBNM Mascarin notamment, nous utilisons des systèmes modélisés de cartographie qui ciblent les zones à surveiller, orientent les équipes de terrain vers les zones prioritaires de lutte, ainsi que des outils de sciences participatives, tels que Pl@ntnet. Cette expertise dans le domaine des EEE fait l’objet d’un partenariat récent avec l’Afrique du Sud, qui sera officiellement lancé début 2022.
Enfin, le rôle de la biodiversité dans la préservation de notre santé est aujourd’hui reconnu. Face à la crise sanitaire mondiale actuelle et pour prévenir celles à venir, l’approche « One Health / une seule santé » est incontournable. L’enjeu est de mieux comprendre et gérer les relations entre biodiversité et santé, et plus particulièrement, les interactions complexes entre l’humain, le bétail et les animaux sauvages, réservoirs de maladies, dans une dynamique de santé des écosystèmes plus globale qui inclut la santé des plantes. Un de nos objectifs est de mutualiser les outils de surveillance et de gestion des maladies en santé animale et végétale, en mobilisant la biodiversité au sein des agrosystèmes.
L’ampleur des enjeux autour de la biodiversité conduit aujourd’hui le Cirad à s’investir massivement dans les recherches permettant de mieux gérer les ressources naturelles et les écosystèmes terrestres à forte biodiversité. C’est à ce prix qu’avec les universités, les collectivités, les gestionnaires et entreprises locales partenaires du Cirad, nous pourrons tous ensemble faire de cette biodiversité exceptionnelle un atout durable des territoires ultramarins.